Chapitre 9. Connaissance et conservation des plantes sauvages au Burkina Faso
Contribution de l’herbier du Centre national de semences forestières
p. 137-151
Remerciements
Pour leur soutien constant au partenariat entre le Centre national de semences forestières (CNSF) au Burkina Faso et le Royal Gardens Botanic de Kew au Royaume-Uni et à l’élaboration du présent article, nous tenons à remercier le ministère de l’Environnement, de l’Économie verte et du Changement climatique du Burkina Faso, le Dr Paul Smith (actuel secrétaire général du Botanic Gardens Conservation International, BGCI et ancien chef du département de conservation des semences de Kew, Millennium Seed Bank Partnership au Royaume-Uni), le Dr Michiel Van Slageren (ancien International Projects Co-ordinator, Millennium Seed Bank Partnership/Royal Botanic Gardens au Royaume-Uni), le Dr Sidi Sanogo (chercheur en écologie, botanique et physiologie végétale à l’Institut d’économie rurale au Mali) et ses collaborateurs, M. Paulin Koura (responsable de l’herbier du CNRST au Burkina Faso) et le Muséum national d’histoire naturelle de Paris (département de Phanérogamie).
Texte intégral
Introduction
1Parmi les actions entreprises au Burkina Faso en matière de connaissance et de gestion de la biodiversité, la création d’herbiers est notable. Ainsi, aux côtés de l’herbier national du Burkina (HNBU), deux autres herbiers ont vu le jour dans le pays : celui du Centre national de semences forestières (CNSF) et celui de l’université de Ouagadougou Joseph Ki Zerbo (OUA). En plus de la conservation de la diversité végétale, ces herbiers jouent un rôle fondamental en matière d’éducation environnementale et de recherche scientifique. Dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique (CDB) et de sa stratégie mondiale pour la conservation des plantes, les États signataires ont l’obligation de connaître de façon précise la biodiversité de leur pays (Thiombiano et al., 2012). Par conséquent, les herbiers nationaux de la plupart des pays signataires de la CDB ont été enrichis par de nouvelles collections d’espèces végétales.
2Le catalogue des plantes vasculaires du Burkina Faso (Thiombiano et al., 2012) comporte 2 067 espèces végétales, ce qui représente une augmentation de 70 % par rapport à celui établi par Lebrun et al. en 1991. Cependant, depuis 1991, aucune étude n’a été réalisée sur l’ensemble des trois herbiers du Burkina Faso (HNBU, CNSF et OUA). En effet, la version actualisée du catalogue établie par Thiombiano et al. (2012) n’a pas pris en compte les espèces des herbiers du CNSF et de HNBU. Selon Thiers (2016), l’Index Herbariorum contient uniquement l’herbier OUA avec ses 12 000 spécimens. C’est dans ce contexte que cette étude a été réalisée afin de comparer les données de ces trois herbiers, entre elles puis avec celles issues des travaux de Thiombiano et al. (2012).
Matériels et méthodes
Présentation du CNSF et du RBG de Kew
3Le CNSF est un institut de recherche et développement du ministère de l’Environnement, de l’Économie verte et du Changement climatique du Burkina Faso. Ses missions comprennent la production et la distribution de semences forestières et la contribution à la mise en œuvre de programmes nationaux de recherche forestières.
4Le Royal Botanic Gardens (RBG), situé à Kew au Royaume-Uni, a pour objectifs, à travers le projet « Millennium Seed Bank Partnership » (MSBP)1 au Burkina Faso (MSB-P), de protéger plus de 24 000 espèces végétales de l’extinction et de sécuriser l’avenir des plantes à fleurs natives dans le monde. Pour atteindre ces objectifs, en collaboration avec ses partenaires, RBG devait collecter et conserver 10 % de la flore à graines du monde à l’horizon 2010, principalement dans les zones sèches.
Les trois herbiers du Burkina Faso
5Le Burkina Faso dispose de trois herbiers : l’herbier national, l’herbier de l’université Joseph Ki-Zerbo et l’herbier du CNSF. Les enseignants-chercheurs, les chercheurs, les étudiants et les partenaires internationaux sont les principaux contributeurs à l’enrichissement de ces herbiers.
- L’herbier national du Burkina Faso est un héritage de l’Institut fondamental d’Afrique noire (Ifan). Auguste Chevalier fut le premier botaniste à visiter en 1898 la Haute Volta, aujourd’hui Burkina Faso. Cet herbier est devenu aujourd’hui celui du Centre national de la recherche scientifique et technologique (CNRST) du Burkina Faso, localisé à Ouagadougou. Il compte à ce jour 35 000 spécimens.
- L’herbier de l’université de Ouagadougou a été créé en 1975 par le professeur Sita Guinko lors de ses travaux de thèse. À ce jour, l’herbier comporte 20 000 spécimens.
- L’idée de la création de l’herbier du CNSF est née en 1992 par feu Raymond Balima, cadre au sein du service d’Amélioration génétique des plantes. Cet herbier a été mis en place en 1996 par Lassina Sanou, inspecteur des Eaux et Forêts après un stage au Sénégal sur les techniques d’herbier. À ce jour, l’herbier est riche de 15 000 spécimens.
6Les ressources nomenclaturales utilisées pour comparer les listes floristiques issues des différents herbiers sont (1) African Plants Database (version 3.3.3), base de données sur les plantes d’Afrique et de Madagascar qui fournit les informations suivantes : noms, synonymie, distribution, notes écologiques (www.villege.ch/musinfo/bd/cjb/africa/) et (2) The International Plants Names Index (www2.archivists.org/groups/standards-committee/the-international-plant-names-index-ipni).
Présentation du milieu naturel
7Les collections proviennent des quatre secteurs phytogéographiques du Burkina Faso (Fontès et Guinko, 1995) : le Sahel strict, le sub-Sahel, le nord-soudanien et le sud-soudanien. La pluviométrie croît du nord au sud, avec de fortes variations saisonnières se traduisant par des sécheresses ou des inondations prolongées certaines années, dont les fréquences augmentent. Le régime de la mousson apporte la plus grande partie des pluies. En saison sèche, le pays est soumis au régime de l’Harmattan. Les caractéristiques de chaque secteur phytogéographique sont présentées dans le tableau 1.
8La distribution des récoltes dans les quatre secteurs phytogéographiques sur le territoire national est présenté dans la figure 1.
Missions de prospection botanique
9Les missions de prospection botanique, de collecte des semences et des spécimens d’herbier ont été préparées en amont de la sortie sur le terrain. À cet effet, un calendrier a été établi sur la base des informations relatives aux périodes de maturité des fruits en fonction des secteurs phytogéographiques et des types biologiques des espèces à collecter. Une liste d’espèces à collecter a été établie en s’appuyant sur les données disponibles concernant la flore du Burkina Faso et sur les guides de collecte réalisés en partenariat avec le RBG de Kew, à partir d’anciens spécimens déposés dans l’herbier de Paris. Les itinéraires et les sites de collecte ont été préalablement indiqués à l’équipe de prospection. Les administrations forestières locales des zones de prospection ont été contactées avant toute sortie sur le terrain.
Tableau 1 – Caractéristiques du milieu naturel des zones de récolte.
Secteur phytogéographique | Caractéristiques climatiques | Caractéristiques de la végétation et de la flore |
Sahel strict | Pluviométrie moyenne inférieure à 500 mm. Saison pluvieuse : 3 à 4 mois. Températures : forte amplitude annuelle. | Végétation composée de steppes, flore sahélienne, dominée par les épineux comme : Acacia senegal, Acacia seyal, Acacia raddiana, Balanites ægyptiaca. Forêts galeries occupées par Anogeissus leiocarpa, Combretum micranthum et Piliostigma reticulatum. |
Sub-Sahel | Pluviométrie moyenne comprise entre 500 et 600 mm. Saison pluvieuse : 4 à 5 mois. Températures : forte amplitude. | Essentiellement constituée de steppes et fourrés plus ou moins denses. Flore marquée par la présence de Lannea microcarpa, Anogeissus leiocarpa, Combretum micranthum, Pterocarpus lucens et Combretum glutinosum. |
Nord-soudanien | Pluviométrie varie de 800 à 900 mm. Saison sèche longue : 6 à 7 mois. | Différents types de formations avec une légère prédominance des savanes arbustives et arborées présentant de paysages agrestes dominés par les essences protégées : Adansonia digitata, Faidherbia albida, Lannea microcarpa, Parkia biglobosa, Vitellaria paradoxa (Boussim, 2010). La flore herbacée y est diversifiée avec des taxons annuels dominants, comme Andropogon pseudapricus dans les formations savanicoles. Les pérennes sont rares et peu abondantes. Andropogon gayanus est toujours présent dans les formations. |
Sud-soudanien | Pluviométrie annuelle : entre 900 et 1 100 mm. Saison sèche court : 5 à 6 mois. | Essentiellement dominée par les savanes boisées et les forêts claires. La présence d’Isoberlinia doka caractérise ce secteur (Boussim, 2010). Nombreuses forêts galeries à végétation constituée d’espèces guinéennes, comme Antiaris africana, Berlinia grandiflora, Carapa procera, Cola laurifolia, Dialium guineense, Milicia exelsa, Syzygium guineense et Voacanga africana (Sambaré et al., 2010, 2011). La flore ligneuse le plus remarquable comporte Acacia sieberiana, Anogeissus leiocarpa, Burkea africana, Daniellia oliveri, Diospyros mespiliformis, etc. (Bognounou et al., 2009). |
10Pour chaque espèce rencontrée, 2 000 graines à maturité ont été récoltées, ainsi que quatre spécimens d’herbier fertiles. En outre, au cours des prospections, des espèces qui ne figuraient pas dans les guides de collecte ont été récoltées de façon opportuniste.
Contribution de l’herbier du CNSF à la connaissance de la flore indigène
11Afin de mieux mettre en évidence la contribution de l’herbier du CNSF à la connaissance de la flore indigène du Burkina Faso, nous avons :
- étudié le référentiel taxonomique des trois herbiers afin de les harmoniser et de les mettre à jour, avec l’aide des bases de données existantes en ligne (en particulier African Plants Database) ;
- effectué une comparaison de ces trois listes ;
- identifié les espèces de l’herbier du CNSF qui ne se trouvent pas ni dans l’herbier de l’université Joseph Ki-Zerbo et ni dans l’herbier national du Burkina ;
- proposé une liste globale d’espèces spontanées et sub-spontanées du Burkina Faso qui intègre les informations des trois herbiers.
Résultats
La collection de l’herbier du CNSF
12À ce jour, le nombre de spécimens botaniques de cet herbier est de 15 000, dont 13 500 collectés dans le cadre du partenariat avec le RBG. Parmi ces échantillons, 12 000 sont montés, collés, étiquetés et classés dans les armoires de conservation, 2 500 sont montés sans étiquettes et 500 ne sont pas montés. L’antenne IRD de Bobo-Dioulasso a fait don de 800 spécimens d’herbier au CNSF en 2019. Ces échantillons ne sont pas encore montés et sont comptabilisés dans la collection de l’herbier du CNSF.
Richesse des familles botaniques dans l’herbier du CNSF
13L’herbier du CNSF renferme 1 343 taxons repartis en 600 genres et 123 familles. Les familles les plus représentées, avec au moins 20 espèces, sont les Poaceae, les Fabaceae-Faboideae, les Cyperaceae, les Rubiaceae, les Asteraceae, les Malvaceae, les Fabaceae-Mimosoideae, les Lamiaceae, les Euphorbiaceae, les Convolvulaceae, les Apocynaceae, les Fabaceae-Cesalpinioideae, les Acanthaceae, les Combretaceae et les Moraceae (tabl. 2).
Tableau 2 – Richesse des familles botaniques dans l’herbier du CNSF.
Familles botaniques | Nombre de genres | Nombre d’espèces | Nombre de specimens d’herbier |
Poaceae | 59 | 161 | 2 898 |
Fabaceae-Faboideae | 39 | 152 | 2 280 |
Cyperaceae | 19 | 93 | 1 674 |
Rubiaceae | 35 | 71 | 497 |
Asteraceae | 43 | 65 | 650 |
Malvaceae | 23 | 58 | 580 |
Fabaceae-Mimosoideae | 12 | 41 | 287 |
Lamiaceae | 21 | 39 | 273 |
Euphorbiaceae | 15 | 33 | 495 |
Convolvulaceae | 7 | 31 | 217 |
Apocynaceae | 21 | 29 | 290 |
Fabaceae-Caesalpinioideae | 17 | 29 | 435 |
Acanthaceae | 13 | 27 | 405 |
Combretaceae | 5 | 25 | 375 |
Moraceae | 5 | 24 | 192 |
Amaranthaceae | 10 | 18 | 126 |
Phyllanthaceae | 7 | 18 | 270 |
Commelinaceae | 5 | 18 | 324 |
Vitaceae | 4 | 18 | 180 |
Asparagaceae | 7 | 17 | 100 |
Cucurbitaceae | 8 | 16 | 288 |
Capparaceae | 6 | 16 | 112 |
Boraginaceae | 6 | 11 | 77 |
Lythraceae | 4 | 11 | 77 |
Orobanchaceae | 7 | 10 | 50 |
Annonaceae | 6 | 9 | 63 |
Anacardiaceae | 5 | 9 | 63 |
Araceae | 5 | 9 | 45 |
Orchidaceae | 5 | 9 | 45 |
Solanaceae | 4 | 9 | 72 |
Plantaginaceae | 3 | 9 | 45 |
Dioscoreaceae | 1 | 9 | 45 |
Onagraceae | 1 | 9 | 45 |
Eriocaulaceae | 1 | 8 | 40 |
Sapindaceae | 6 | 7 | 35 |
Arecaceae | 5 | 7 | 35 |
Gentianaceae | 5 | 7 | 35 |
Melastomataceae | 5 | 7 | 35 |
Celastraceae | 4 | 7 | 35 |
Meliaceae | 6 | 6 | 30 |
Sapotaceae | 5 | 6 | 30 |
Amaryllidaceae | 3 | 6 | 30 |
Caryophyllaceae | 2 | 6 | 30 |
Verbenaceae | 5 | 5 | 25 |
Ochnaceae | 3 | 5 | 25 |
Hypericaceae | 2 | 5 | 25 |
Loganiaceae | 2 | 5 | 25 |
Zingiberaceae | 2 | 5 | 25 |
Alismataceae | 4 | 4 | 20 |
Bignoniaceae | 4 | 4 | 20 |
Burseraceae | 3 | 4 | 20 |
Loranthaceae | 3 | 4 | 20 |
Pedaliaceae | 3 | 4 | 20 |
Iridaceae | 2 | 4 | 20 |
Molluginaceae | 2 | 4 | 20 |
Lentibulariaceae | 1 | 4 | 20 |
Oleaceae | 1 | 4 | 20 |
Rhamnaceae | 1 | 4 | 20 |
Pontederiaceae | 4 | 3 | 18 |
Marantaceae | 3 | 3 | 21 |
Nyctaginaceae | 3 | 3 | 45 |
Brassicaceae | 2 | 3 | 15 |
Chrysobalanaceae | 2 | 3 | 21 |
Clusiaceae | 2 | 3 | 15 |
Colchicaceae | 2 | 3 | 15 |
Polygalaceae | 2 | 3 | 45 |
Rutaceae | 2 | 3 | 15 |
Costaceae | 1 | 3 | 15 |
Ebenaceae | 1 | 3 | 30 |
Portulacaceae | 1 | 3 | 24 |
Polygonaceae | 4 | 2 | 16 |
Apiaceae | 2 | 2 | 10 |
Campanulaceae | 2 | 2 | 10 |
Cannabaceae | 2 | 2 | 20 |
Malpighiaceae | 2 | 2 | 10 |
Myrtaceae | 2 | 2 | 30 |
Nymphaeaceae | 2 | 2 | 16 |
Passifloraceae | 2 | 2 | 10 |
Salicaceae | 2 | 2 | 10 |
Zygophyllaceae | 2 | 2 | 30 |
Bixaceae | 1 | 2 | 10 |
Crassulaceae | 1 | 2 | 10 |
Elatinaceae | 1 | 2 | 10 |
Hydroleaceae | 1 | 2 | 10 |
Limeaceae | 1 | 2 | 10 |
Marsileaceae | 1 | 2 | 10 |
Menispermaceae | 1 | 2 | 10 |
Pandanaceae | 1 | 2 | 10 |
Vahliaceae | 1 | 2 | 10 |
Olacaceae | 3 | 1 | 5 |
Aizoaceae | 1 | 1 | 5 |
Araliaceae | 1 | 1 | 5 |
Aristolochiaceae | 1 | 1 | 5 |
Connaraceae | 1 | 1 | 5 |
Dilleniaceae | 1 | 1 | 5 |
Dipterocarpaceae | 1 | 1 | 5 |
Droseraceae | 1 | 1 | 5 |
Erythroxylaceae | 1 | 1 | 5 |
Gisekiaceae | 1 | 1 | 5 |
Hydrocharitaceae | 1 | 1 | 5 |
Hypoxidaceae | 1 | 1 | 5 |
Lauraceae | 1 | 1 | 5 |
Martyniaceae | 1 | 1 | 5 |
Menyanthaceae | 1 | 1 | 5 |
Ophioglossaceae | 1 | 1 | 10 |
Opiliaceae | 1 | 1 | 15 |
Osmundaceae | 1 | 1 | 5 |
Oxalidaceae | 1 | 1 | 5 |
Papaveraceae | 1 | 1 | 10 |
Piperaceae | 1 | 1 | 7 |
Primulaceae | 1 | 1 | 6 |
Proteaceae | 1 | 1 | 5 |
Ranunculaceae | 1 | 1 | 5 |
Rhizophoraceae | 1 | 1 | 5 |
Salvadoraceae | 1 | 1 | 5 |
Simaroubaceae | 1 | 1 | 8 |
Smilacaceae | 1 | 1 | 10 |
Sphenocleaceae | 1 | 1 | 5 |
Taccaceae | 1 | 1 | 5 |
Talinaceae | 1 | 1 | 5 |
Typhaceae | 1 | 1 | 15 |
Xanthorrhoeaceae | 1 | 1 | 13 |
Ximeniaceae | 1 | 1 | 20 |
Total | 600 | 1 343 | 15 000 |
14Les espèces présentes dans l’herbier ont été assignées à huit types biologiques selon la classification définie par Raunkiaer, généralement utilisée dans l’étude de la végétation en Afrique de l’Ouest (Guinko, 1984 ; Sinsin, 1993). Les espèces les plus représentées sont des thérophytes (37,16 %) et phanérophytes (36,63 %), suivis des chaméphytes (8,41 %), des hémicrytophytes (7,07 %), des géophytes (6,48 %) ; les autres types biologiques (hélophytes, hydrophytes et épiphytes) sont faiblement représentés dans l’herbier (fig. 2).
Mise en commun des données des trois herbiers
15L’analyse des bases de données des trois herbiers fait ressortir que 164 espèces sont uniquement représentées dans l’herbier du CNSF. Par ailleurs, 197 espèces se trouvent uniquement dans l’herbier national. Ces 361 espèces ne sont pas mentionnées dans le Catalogue des plantes vasculaires du Burkina Faso (Thiombiano et al., 2012). Ces nouveaux taxons de la flore spontanée et sub-spontanée du Burkina Faso se répartissent en 262 genres et 81 familles. Ces 361 espèces nouvelles s’ajoutent aux 1 942 espèces déjà répertoriées dans le Catalogue des plantes vasculaires du Burkina Faso (Thiombiano et al., 2012), ce qui équivaut à une contribution de 10,14 % pour l’herbier national du Burkina et de 8,44 % pour celui du CNSF. Avec cet ajout, le nombre total de plantes vasculaires du pays monte à 2 303 espèces, soit un enrichissement global de 18,59 %. La totalité de ces espèces se répartissent en 834 genres et 155 familles. Cette liste consolidée constitue la situation actualisée des espèces de flore spontanée et sub-spontanée (espèces indigènes) du Burkina Faso (sous réserve de la prise en compte des autres données auxquelles nous n’avons pas eu accès).
16Environ 15 000 spécimens d’échantillons d’herbier ont été collectés. Le poids des graines des espèces collectées et stockées en chambre froide est de 2 tonnes, soit plus de 60 millions de graines d’espèces indigènes disponibles pour soutenir les actions de restauration du milieu naturel au Burkina Faso.
Discussion
Distribution spatiale des récoltes sur le territoire national
17La majorité des collections d’herbiers et de semences ont été réalisées dans les secteurs phytogéographiques sud- et nord-soudanien ; les secteurs phytogéographiques sahélien strict et sub-sahélien ont fait l’objet de moins de récoltes. L’extrême-est du Burkina Faso, situé dans le secteur nord-soudanien, n’a pas été suffisamment prospecté et, par conséquent, les collections concernant cette zone sont quasi inexistantes.
18Les collections les plus riches concernent ainsi les parties ouest et sud du secteur sud-soudanien. Ceci est lié à l’importante phytodiversité de cette zone (Bognounou et al., 2009). En outre, la majorité des collections sont basées sur des guides de collecte élaborés à partir d’anciennes collections réalisées à la période coloniale et précoloniale (Chevallier, 1910-1914).
Composition floristique de l’herbier du CNSF
19La collection de l’herbier du CNSF, depuis sa création jusqu’à nos jours (en prenant en compte les 15 années de partenariat avec le RBG de Kew), est composée de 1 343 espèces reparties en 123 familles et 600 genres. Les familles les plus représentées sont les Poaceae (12 %) et les Fabaceae-Faboideae (11 %). Cette dominance pourrait s’expliquer par le fait que les Poaceae sont mieux adaptées aux conditions climatiques et se propagent plus facilement du fait d’avantages métaboliques. Les Fabaceae-Faboideae, quant à elles, sont des légumineuses profitant de leur symbiose avec les rhizobiums capables de fixer l’azote dans les nodules racinaires (Thiombiano et Dorothea, 2010 ; Ouali, 2018) ; elles se multiplient facilement dans la nature par rapport à d’autres familles botaniques. Les thérophytes et les phanérophytes sont les deux types biologiques les plus représentés parmi les huit types existants dans les collections (tous deux ~ 37 %). Certains auteurs indiquent que la flore vasculaire des régions tropicales est toujours dominée par les thérophytes et les phanérophytes (Zizka et al., 2015).
Contribution de l’herbier du CNSF à la connaissance de la flore indigène
20L’analyse des bases de données des trois herbiers indique que les collections de l’herbier du CNSF représentent environ 69,30 % de la flore indigène répertoriée au Burkina Faso. La comparaison de la liste cumulée des espèces des deux herbiers (HNBU et OUA) avec celles de l’herbier du CNSF a permis d’identifier 164 nouvelles espèces dans l’herbier du CNSF réparties dans 129 genres et 44 familles botaniques. Une centaine de ces espèces sont rares ou en voie de disparition (Thiombiano et Dorothea, 2010), ce qui justifie la mise en œuvre du projet « Millennium Seed Bank Partnership » (MSBP) au Burkina Faso. Les graines de ces espèces sont conservées dans les chambres froides du CNSF avec des duplicatas au MSBP au Royaume-Uni.
Situation actuelle des espèces spontanées et sub-spontanées
21En prenant en compte les 164 nouvelles espèces répertoriées dans l’herbier du CNSF, et celles de l’herbier national du HNBU (197 espèces), ainsi que celles du catalogue des plantes vasculaires du Burkina Faso, il existe au total 2 304 espèces spontanées et sub-spontanées au Burkina Faso, réparties en 834 genres et 155 familles. Avant notre étude, le catalogue actualisé des plantes vasculaires du Burkina Faso indiquait 1 942 espèces spontanées et sub-spontanées et cette nouvelle étude l’a enrichi de 18,59 %. Au vu de ces résultats, nous constatons que des efforts ont été consentis par les différents herbiers en matière de connaissance et de conservation ex situ de la phytodiversité du Burkina Faso. Par ailleurs, certaines des nouvelles espèces présentes dans l’herbier du CNSF sont particulièrement rares. Il s’agit d’Entada mannii (Oliv.) Tisser (Fabaceae-Mimosoideae), de Morinda geminata D. C. (Rubiaceae) (fig. 3), de Spathodea campanulata P. Beauv. (Bignoniaceae) (fig. 4) et de Morus mesozygia Stapf. (Moraceae).
Conclusion
22Les herbiers du Burkina Faso permettent la conservation ex situ des plantes sauvages et jouent un rôle important dans la connaissance de la flore du pays, et ce afin de répondre aux objectifs de la Convention sur la diversité biologique que le pays a ratifiée en septembre 1993. La comparaison des herbiers du Burkina Faso a permis de répertorier 164 espèces nouvelles pour le Burkina Faso, réparties en 129 genres et 44 familles, dans les seules collections de l’herbier du CNSF. En outre, 197 espèces reparties en 169 genres et 67 familles sont spécifiques de l’herbier national du Burkina (HNBU) et sont absentes des deux autres herbiers (CNSF et OUA). L’herbier OUA, quant à lui, inclut 824 espèces absentes de l’herbier du CNSF, reparties en 389 genres et 113 familles, et 929 espèces absentes de l’HNBU, reparties en 453 genres et 115 familles.
23De nouveaux taxons ont été identifiés dans l’herbier du CNSF et celui du HNBU, ce qui a permis d’actualiser la liste des espèces spontanées et sub-spontanées de la flore du Burkina Faso et de souligner la contribution de l’herbier du CNSF à la connaissance de cette flore (de 8,44 %). La liste ainsi actualisée inclut 2 304 espèces reparties en 834 genres et 155 familles, soit un accroissement de 15,66 % grâce à la contribution de l’herbier du CNSF et de l’herbier national. L’apport de ces deux herbiers à la connaissance de la phytodiversité du pays est important et souligne la nécessité d’une mise en réseau des informations des différents instituts botaniques du pays.
Ressources en ligne
24Les ressources en ligne les plus importantes pour la flore du Burkina Faso sont les suivantes :
- African Plants Database (version 3.3.3), base de données des plantes d’Afrique indiquant lesnoms, la synonymie, la distribution et des notes écologiques des plantes d’Afrique et de Madagascar : www.ville-ge.ch/musinfo/bd/cjb/africa
- West African Vegetation Database, une base de données de végétation de l’Afrique de l’Ouest incluant de nombreux relevés du Burkina Faso : https://www.gbif.org/fr/dataset/80b9fe97-d586-49e0-bb4b-c3cc0c3212cf
- The International Plants Names Index : https://www2.archivists.org/groups/standards-committee/the-international-plant-names-index-ipni
Bibliographie
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Format
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Notes de bas de page
1 Le projet MSBP est un projet international de conservation des graines de plantes sauvages, coordonné par les jardins botaniques royaux de Kew. Son objectif principal est de collecter et de conserver les semences et les échantillons d’herbier de bonne qualité ainsi que la recherche commune dans le domaine de la conservation des semences et la taxonomie, et le renforcement des capacités scientifiques et techniques du personnel des intitutions partenaires.
Auteurs
Écologue, conservation de la biodiversité, département « Écologie forestière », Centre national de semences forestières, Burkina Faso.
Écologue forestier, UFR « Sciences et technologies », université Norbert Zongo, Burkina Faso.
Généticien forestier, Centre national de semences forestières, Burkina Faso.
Agroforestier, Centre national de semences forestières, Burkina Faso.
Généticien forestier, Centre national des semences forestières, Burkina Faso.
Physiologiste des semences tropicales, division des Ressources et des Politiques forestières, département des Forêts, Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, Italie.
Botaniste forestier, ministère de l’Environnement, de l’Économie verte et du Changement climatique, Burkina Faso.
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