Chapitre 11. De la notion de « connaissances traditionnelles associées » à celle de « patrimoine bioculturel »
p. 219-240
Remerciements
Ce travail a bénéficié de financements des projets « investissements d’avenir » de l’Agence nationale de la recherche (Labex DRIIHM/IRDHEI et Labex CEBA, réf. ANR-10-LABX-25-01) et du projet GUYINT « Gouvernance des grands espaces et enjeux environnementaux : l’intérieur du plateau des Guyanes » (réf. ANR-17-CE03-0002).
Texte intégral
Introduction
1Le protocole de Nagoya, adossé à la Convention internationale sur la diversité biologique (CDB), s’appuie entre autres sur l’initiative pionnière qu’est la déclaration de Belém (en 1988) de la société internationale d’ethnobiologie. Cette Convention indispensable, et appelée par de nombreux chercheurs, est destinée à favoriser l’accès aux ressources biologiques, et à en promouvoir la protection et la valorisation raisonnée, grâce à un mécanisme de partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation. Cet outil a donné lieu à des transcriptions dans les droits nationaux, à l’origine de déconvenues qui semblent liées autant à la nature même des objets traités qu’aux intérêts divergents des groupes concernés. Il est en effet le fruit d’un long processus de négociations (internationales, puis nationales) entre le monde politique, le secteur privé, le monde académique et les ONG, impliqués à des degrés divers en fonction des périmètres nationaux et politiques.
2La France, comme tous les États de l’Union européenne, se devait d’appliquer dans sa législation le protocole de Nagoya, signé en 2011 et ratifié en 2016. Aussi, afin de respecter son engagement international et en conformité avec la Constitution, les législateurs ont, dans un délai relativement contraint, produit la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 « Pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages » et son décret d’application n° 2017-848 du 9 mai 2017, dont un certain nombre de termes et de formulations posent question (cf. focus 3). À défaut de retracer un historique des débats et des consultations qui mettrait en regard les positions de chaque groupe d’intérêt (cf. chap. 8 ; Aubertin, 2018 ; BOURDY et al., 2017), nous faisons la proposition, en partant des définitions et en les appliquant au cas spécifique de la Guyane française, de mettre en évidence la complexité des objets que sont les connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques ainsi que les incohérences ou les paradoxes de cette législation.
3La Guyane, collectivité territoriale unique d’Outre-mer régie par l’article 73 de la Constitution, est munie, du fait du principe d’identité législative, du même arsenal législatif que la France métropolitaine (Mélin-Soucramanien, 2012). Outre la richesse de sa biodiversité, l’une des spécificités de ce territoire réside dans la présence de populations autochtones au sens défini par la CDB (Aubertin et al., 2007), et dans la richesse des savoirs liés à la nature dans les différents groupes culturels guyanais (Fleury et al., 2014 ; Grenand et al., 2004 ; Ogeron et al., 2018). Une défiance politique des acteurs locaux s'affirme par ailleurs vis-à-vis des centres décisionnels métropolitains et des actions d’un État jacobin dans l'application de lois mal adaptées aux réalités des territoires d'Outre-mer. À ce contexte politique s’ajoute une imprécision des concepts mobilisés dans la loi.
4L’objectif de ce travail sera d’éclairer ces imprécisions et éventuellement de proposer des clarifications théoriques autour de certains concepts. En partant des définitions clés de la loi française transcrivant le protocole de Nagoya, abordées dans une perspective anthropologique et ethnobiologique, nous discuterons de la pertinence des choix, des écueils posés à l’application de la loi et des raisons qui les sous-tendent. Cette analyse prendra soin de questionner :
- qui sont les détenteurs de savoirs au regard de cette loi, en abordant les notions de communautés d’habitants, leurs périmètres, et la complexité de l’attribution de la propriété d’un savoir ;
- ce que sont les savoirs liés à la nature en Amazonie, et en particulier en Guyane française, en abordant leurs caractéristiques, leurs temporalités et leurs évolutions.
Qui sont les détenteurs de connaissances traditionnelles ?
5La loi « biodiversité » définit ainsi les « communautés d’habitants » susceptibles de détenir des connaissances traditionnelles associées aux ressources : « Toute communauté d’habitants qui tire traditionnellement ses moyens de subsistance du milieu naturel et dont le mode de vie présente un intérêt pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité » (cf. chap. 7).
De la difficulté de définir une communauté d’habitants
6Cette notion a été initialement utilisée dans le décret ministériel de 1987 créant le dispositif foncier des zones de droits d’usage collectifs qui précise que les bénéficiaires de ces terres collectives sont « les communautés d’habitants qui tirent traditionnellement leurs moyens de subsistance de la forêt », catégorie que le droit a bien du mal à définir (Davy et al., 2016). Depuis, plusieurs textes juridiques ont repris cette notion : le nouveau Code forestier de 2005, ainsi que la loi sur les parcs nationaux de 2006, puis le décret de création du Parc amazonien de Guyane (PAG) dans son article 19.
7L’un des points aveugles notables de cette définition est toutefois qu’elle utilise les termes de « communauté d’habitants »1 comme signifié pour les définir en tant que signifiant, court-circuit rendant l’utilisation de cette définition ambiguë. Pinton et Grenand (2007) ont déjà noté que l’article 2 de la CDB (emploi des termes) ne définit pas les notions de communautés locales et de populations autochtones. De plus, le concept de communauté est intrinsèquement flou, puisque, en substance, il peut se référer autant à une entité familiale qu’à un groupe ethnique, à un ensemble villageois, ou de manière plus générale à une entité collective plus vaste, tant sociologique que culturelle (Gossiaux, 1991). Le sens même du terme et son appropriation par divers groupes sociaux sont d’ailleurs très questionnés dans d’autres champs des sciences humaines (MacQueen et al., 2001).
8D’après le décret d’application de la loi, en Guyane, le terme de « communauté d’habitants » désigne spécifiquement les « Amérindiens et les Bushinenges », en tant que personnes vivant loin des centres urbains. Le décret de création du PAG est également fondé sur la même acception des communautés d’habitants, sans inclure les Créoles de Saül. Pour certains, l’injustice semble flagrante vis-à-vis des Créoles ruraux pratiquant des activités liées à la chasse, la pêche, voire à l’abattis, bien que ceux-ci soient aujourd’hui de moins en moins nombreux.
9La raison qui permet de discriminer d’un côté des Amérindiens et des Bushinenges (dont un bon nombre sont aujourd’hui des urbains, habitant Cayenne, Kourou ou Saint-Laurent) et de l’autre des Créoles guyanais habitant aux mêmes endroits est rarement abordée. Les sociétés créoles et marrones, non autochtones au sens de l’ONU, partagent bien toutes deux une histoire issue de la déportation et de l’esclavage.
10Il semble clair qu’il s’agit d’un moyen pour l’État de reconnaître tacitement l’autochtonie, ou du moins d’essayer de la transcrire dans la loi française. Devant cette décision qui établit que les populations créoles ne peuvent se voir conférer des droits relatifs à leurs savoirs, le ressentiment en Guyane est palpable. On comprend bien que cette logique s’inscrit directement dans la prise en compte des traités internationaux reconnaissant des droits spécifiques aux autochtones et aux minorités, mais il semble légitime de questionner ici le grand partage entre des savoirs possédés par des autochtones et ceux possédés par des communautés rurales (de Guyane ou de France hexagonale) (Pinton et Grenand, 2007) : les savoirs des premiers devant être soumis à autorisation, alors que les autres non. Au regard de l’égalité devant la loi de tous les citoyens français, cela pose une question de droit.
11Cette interprétation semble donc au premier abord contradictoire avec l’article premier de la Constitution qui stipule que les Français sont tous égaux. Elle paraît néanmoins cohérente avec la création par la loi Erom2 du Grand Conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenges, début de reconnaissance de la part de l’État français de ceux qu’il ne peut pas encore appeler officiellement des autochtones (cf. chap. 8).
12Pour en revenir à la définition de la communauté, deux points achoppent en Guyane : qui la définit ? Et comment ?
13Nous pensons que ces points auraient dû être discutés au préalable au sein même des groupes culturels bénéficiaires. C’était d’ailleurs le vœu du Grand Conseil coutumier, tel qu’exprimé dans sa dernière réaction à l’audition, en septembre 2019, du Parc amazonien de Guyane. En effet, l’un des écueils soulevés par cette démarche reste la méthode employée : c’est le législateur français, ou européen, qui a imposé sa vision aux communautés guyanaises. Aucun travail de consultation sur le territoire et avec les différents peuples amérindiens et bushinenges n’a réellement eu lieu afin de construire de manière conjointe ce que l’on nomme maintenant des protocoles communautaires (cf. chap. 12 et 14).
14La loi ne concerne que les communautés d'habitants guyanaises et de Wallis et Futuna. Prenons l’exemple des bergers des Causses qui, grâce à leurs moutons, entretiennent des prairies à orchidées (certaines orchidées affectionnent particulièrement les prairies calcaires pâturées) (O’Rourke, 2006), et qui ont bien un mode de vie « qui présente un intérêt pour la conservation de la biodiversité ». Il en va de même pour les vignerons du Jurançonnais qui entretiennent des écosystèmes singuliers sur des coteaux calcaires qui disparaîtraient sans cela… Sans ces « communautés d’habitants » au sens de la loi biodiversité, ces habitats seraient en péril. Pourquoi ne pourraient-ils pas réclamer également un statut particulier ?
15De fait, l’influence des sociétés passées sur nombre d’écosystèmes est une réalité que les travaux d’écologie historique mettent en exergue tous les jours, de l’Inde à l’Amazonie en passant par la Colombie britannique ou le pourtour méditerranéen (Balée, 2013 ; Blondel, 2006 ; Gadgil et Thapar, 1990 ; Lepofsky et al., 2017 ; Odonne et al., 2019). Il est donc toujours complexe de définir une ligne de base quand on parle de « conservation de la biodiversité », d’autant plus que le concept d’état initial autant que celui de ligne de base sont complexes à définir (Barlow et al., 2012 ; Beisner et al., 2003 ; Papworth et al., 2009).
Quid des individualités : la place des savoirs
16L’expression « par une ou plusieurs communautés » ne concernerait que les niveaux communautaires. Cela exclut-il les savoirs individuels ? Le législateur considère-t-il qu’aucun savoir lié à des ressources génétiques n’est individuel dans ces communautés ? Cette réflexion n’est pas un détail, dans la mesure où l’articulation entre savoirs individuels et savoirs collectifs, et les différents niveaux du collectif, est également l’objet de réflexions entre les ethnobiologistes et les anthropologues (cf. chap. 10 ; Reyes-García et al., 2007).
17La répartition des savoirs peut ainsi être liée au genre (Torres-Avilez et al., 2016 ; Voeks, 2007). C’est le cas en Amazonie de la vannerie et des plantes à nivrées, qui relèvent d’activités plutôt masculines, ou des savoirs liés aux plantes tinctoriales et aux plantes d’accouchement, qui sont plutôt féminins. Il existe également des connaisseurs spécialisés dans des domaines technologiques, médicaux, cynégétiques ou agricoles. La spécialisation est ainsi évidente, bien que nettement moins marquée que dans certaines sociétés au fonctionnement plus hiérarchisé. Chez les Teko de Guyane, par exemple, on peut recenser les spécialistes des mythes (baekwöt a’e kuwapat), des plantes médicinales (ka’a lewa), des interactions spirituelles (paze), des danses (polãzat). Et, au-delà de cette dichotomie entre savoirs spécialisés et généralistes, il s’agit surtout d’un continuum allant de savoirs individuels à des savoirs plus partagés, communautaires. Un paze, par exemple, a des connaissances qui relèvent d’un enseignement interpersonnel, de maître à élève, mais également d’entités non humaines alliées ; ces dernières sont porteuses d’un savoir personnel et bien souvent indicible. Par exemple, chez les Zapara, en Équateur, une grande partie de l’apprentissage se fait par les rêves (Bilhaut, 2011). De l’autre côté de ce continuum, le spécialiste des contes détient un patrimoine communautaire, bien que sujet à des réappropriations individuelles et à de perpétuels réajustements. C’est en substance le propos de Collomb (2018) quand il affirme que « les interrogations soulevées par l’affaire du Quassia amara mettent ainsi en évidence la difficulté d’identifier – dans ce type de débat – le collectif des “sachants”, ou plus simplement de stabiliser l’idée d’un individu ou d’un groupe “détenteurs d’une connaissance”, qui seraient alors les destinataires légitimes des avantages issus du travail conduit par les chercheurs à partir de cette connaissance. »
Des collectifs à géométrie variable
18Cette question de la délimitation des communautés peut également être abordée dans une perspective diachronique, dans la mesure où tous les travaux d’ethnohistoire montrent que les communautés actuelles sont issues de recompositions, de coalescences (Grenand et al., 2017). Dans le Sud-Guyane, les cartes illustrent parfaitement la disparition progressive de différents groupes qui au final se sont fondus en trois groupes composites que sont aujourd’hui les Teko, les Wayãpi et les Wayana. Le monde amazonien est dans un mouvement perpétuel, accéléré brutalement lors de l’invasion européenne. De plus, les interactions entre les cultures amazoniennes et européennes sont plus anciennes qu’on ne le pense, et ces influences elles-mêmes posent de nouvelles questions en termes d’usage.
19Pour ne rien simplifier à la question de l’origine des savoirs, d’après la plupart des mythologies amazoniennes, la quasi-totalité des savoirs liés à la nature et aux techniques a été apprise auprès d’autres peuples, ces derniers pouvant être des humains ou des non-humains. Il en est ainsi des savoirs liés aux lianes ichtyotoxiques. Quelques espèces, particulièrement celles de la famille des Fabacées, des genres Lonchocarpus, Derris ou Tephrosia, sont utilisées comme poisons de pêche (Moretti et Grenand, 1982) : quand elles sont battues dans l’eau, elles libèrent un suc toxique qui enivre les poissons, les rendant ainsi faciles à capturer. Les nivrées utilisant les lianes du genre Lonchocarpus ont été enseignées aux Wayãpi, d’après leur histoire orale, par les singes capucins (Grenand, 1982).
20Un autre exemple est celui des roseaux destinés à la vannerie, les aroumans. Pour les Palikur (Davy, 2011), ce sont des oiseaux, les caciques cul-jaune, qui ont transmis les techniques pour tresser ces plantes. Par ailleurs, les deux espèces d’aroumans les plus utilisées leur ont été transmises l’une par l’agouti, l’autre par le tapir (ibid.).
21Tous ces mythes3 sont des métaphores insistant sur l’importance de la diffusion des techniques grâce à l’échange ou l’alliance avec d’autres clans, d’autres groupes ethniques ; historiquement véridique ou socialement recommandé, cet ethos amazonien illustre l’importance de l’échange et de l’alliance. De nombreuses études anthropologiques ont montré les complémentarités techniques et artisanales entre groupes. Par exemple, il a longtemps existé des réseaux d’échanges sur plusieurs centaines de kilomètres entre des dizaines de groupes : sur le plateau des Guyanes, certains de ces réseaux allaient du Venezuela à l’Amapá (Dreyfus, 1992). On sait également que sur le Rio Negro au Brésil, ou encore en Guyane, certains groupes étaient spécialisés dans la confection de râpes à manioc, d’autres de parures de plumes, d’autres pour dresser des chiens de chasse. Ces objets voyageaient et ont été imités à un moment donné. Il semble donc difficile de retracer la multiplicité de régimes de droits de nombre d’inventions amazoniennes. D’ailleurs, le droit français, dans lequel la question de la propriété intellectuelle est prégnante, achoppe quelque peu sur ces savoirs transmis par le rêve, les ancêtres mythiques ou les êtres non-humains, pour lesquels la notion de propriété est à questionner autrement (Pinton et Grenand, 2007).
Contenu et contour des savoirs
22Au-delà de la difficulté à définir les détenteurs, la définition de l’objet détenu est également délicate. La loi pour la reconquête de la biodiversité définit ainsi les connaissances traditionnelles associées à une ressource génétique : « les connaissances, les innovations et les pratiques relatives aux propriétés génétiques ou biochimiques de cette ressource, à son usage ou à ses caractéristiques, qui sont détenues de manière ancienne et continue par une ou plusieurs communautés d’habitants mentionnées au 4o, ainsi que les évolutions de ces connaissances et pratiques lorsqu’elles sont le fait de ces communautés d’habitants » (Art. L. 412-4, 5°).
Nature des objets considérés
23Cette définition pose de nouvelles questions relatives à son imprécision, le premier écueil étant celui de la nature de l’objet considéré, défini comme « connaissances, innovations et pratiques relatives aux propriétés génétiques ou biochimiques de cette ressource, à son usage ou à ses caractéristiques ».
24De quoi est-il question lorsque l’on parle d’innovations ? De procédés techniques ? La préparation du fruit du palmier wassay (Euterpe oleracea) est un processus complexe, comme celui de la transformation du manioc amer (toxique) en aliment comestible. Ces procédés, et de nombreux autres, sont précisément exclus en vertu de leur transversalité culturelle. Si ce critère permet d’exclure les connaissances trop partagées, pour lesquelles les discussions seraient complexes, il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’inventions collectives amazoniennes. Cette exclusion est probablement avantageuse du point de vue des industriels, dans la mesure où les projets de développement de la filière wassay en Guyane, qui se sont appuyés sur des pratiques anciennes, seraient considérés comme une forme d’accaparement de pratiques et d’innovations à des fins mercantiles et taxés de biopiraterie.
25Ensuite, quel est le sens du mot caractéristique ? La couleur bleue, tachetée ? La saveur amère ? Le mode de locomotion ? La taille ? N’importe quel qualificatif relatif à une ressource biologique est une caractéristique et peut concerner la nomenclature, la description, sans même aborder les usages. De fait, il concerne tous les champs des sciences humaines, de l’ethnographie la plus descriptive aux ethnosciences. Pour ceux qui ont échangé avec des habitants d’Amazonie, il n’y a pas une conversation qui n’évoque la taille du poisson pêché la veille ou la couleur d’un singe hurleur aperçu, la période idéale pour aller ramasser tel ou tel fruit… Les modes de vie amazoniens sont tissés des relations étroites entre les éléments et entités constituant le monde, dont l’homme est un acteur comme les autres.
Temporalité
26Un second écueil dans ces définitions tient à une question de temporalité. Que signifie « détenues de manière ancienne » ? Cinquante ans ? Cent ans ? Est-ce que le concept d’ancienneté équivaut pour tous les objets/savoirs ? Les sociétés à tradition orale évoluent de façon éminemment dynamique, et la traçabilité des connaissances, pour reprendre un terme emprunté aux sciences analytiques, leur ontogenèse, est plus que complexe. Elles sont difficilement abordables autrement que par des inférences parfois largement débattues, ainsi que le permettent la linguistique, l’archéologie ou l’ethnohistoire.
27Plus largement, la notion de tradition est en débat. D’après Pouillon (1991), elle « se définit comme ce qui d’un passé persiste dans le présent, où elle est transmise et demeure agissante et acceptée par ceux qui la reçoivent et qui, à leur tour, au fil des générations la transmettent ». La bibliographie anthropologique qui aborde cette question est fournie, mais visiblement le législateur n’en a cure. Depuis Hobsbawm et Ranger (2012), Latour (2013) ou encore Lenclud (1987), on sait qu’il est vain d’opposer des sociétés dites « traditionnelles » à des sociétés dites « modernes » ou « historiques ». De fait, opposer des populations qui seraient « traditionnelles » ou qui pratiqueraient des activités « traditionnelles » à d’autres qui ne le sont pas est, au xxie siècle, un sujet assez délicat4.
28Pour illustrer ces dynamiques temporelles, l’exemple des plantes utilisées par les Wayãpi contre la leishmaniose est intéressant. Nous avons montré qu’en trente ans, la plupart des plantes utilisées avaient changé (Odonne et al., 2011). Parmi les 38 espèces végétales citées lors de l’enquête de 2009, une seule était utilisée contre cette maladie trente ans auparavant. Parmi les mécanismes permettant d’expliquer l’évolution des connaissances mise en évidence, on peut citer : des glissements d’usages, une plante pour soigner une maladie de peau pouvant par proximité servir pour une autre maladie de peau, par exemple ; des glissements interculturels, les plantes s’échangeant entre groupes ; enfin, des créations de novo, les Wayãpi expérimentant au quotidien les usages des plantes.
29Ces savoirs sont donc dynamiques et évoluent en permanence. La force des sociétés amazoniennes réside dans leur adaptabilité à des milieux complexes, dans leur résilience face à des changements parfois brutaux. Mais comment prouver la continuité desdits savoirs ? Attester de la continuité d’une culture matérielle est complexe dans un contexte d’impermanence lié à la fragilité des objets amazoniens, retrouver la trace de patrimoines immatériels est une vraie gageure. Est-ce que la parole fait foi ? « Oui, mes grands-parents ont toujours fait ça » est une phrase, avec ses multiples variantes, souvent entendue dans les enquêtes… Dans ce cas, quid des savoirs secrets ? ou discrets ?
30Enfin, un autre point doit attirer notre attention, celui qui traite des « évolutions de ces connaissances et pratiques lorsqu’elles sont le fait de ces communautés d’habitants ». Il semblerait bien qu’il y ait derrière cette formulation une volonté de s’extraire d’une perspective fixiste, pour prendre en compte les dynamiques des savoirs locaux, mais cela pose de nouvelles questions. L’évolution d’une pratique n’est-elle pas une pratique elle-même ? La difficulté de s’inscrire dans le temps long en ce qui concerne la connaissance des techniques dans les sociétés amazoniennes réapparaît. Cette opposition entre continuité et évolution est étrange, sinon paradoxale.
Transversalité des savoirs et des pratiques
31Ce dernier point soulève la question de l’origine et des transferts de connaissances locales dans le temps et l’espace entre cultures. En excluant du champ de l’APA « les connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques ne pouvant être attribuées à une ou plusieurs communautés d’habitants » et « les connaissances traditionnelles associées à des ressources génétiques dont les propriétés sont bien connues et ont été utilisées de longue date et de façon répétée en dehors des communautés d’habitants qui les partagent », le législateur semble simplifier le recours à des modalités d’APA pour les savoirs partagés. Or rien n’est plus complexe que de montrer l’appartenance, ou la non-appartenance, d’un savoir. Dans le travail précédemment cité sur les plantes contre la leishmaniose sur l’Oyapock (Odonne et al., 2011), nous avons montré qu’il était vraisemblable d’estimer que les savoirs associés à 60 % des espèces utilisées en 2010 provenaient d'échanges entre groupes culturels. Ces échanges sont, comme le démontre de plus en plus fréquemment la littérature ethnobiologique, la source principale de l’évolution des connaissances locales (Delêtre et al., 2011 ; Díaz-Reviriego et al., 2016 ; Tareau, 2019 ; Tareau et al., 2019). Il serait ainsi bon de développer des études de « biogéographie culturelle » autour de la transmission des savoirs afin d’en comprendre mieux les dynamiques, mais ces études sont paradoxalement celles qui relèvent de processus d’autorisations APA complexes. D’ailleurs, de telles études comparatives à l’échelle amazonienne butent généralement sur le peu de données disponibles (Odonne et al., 2017). Avec un peu plus de recul, il est vraisemblable que les connaissances traditionnelles diffusées en dehors ou partagées entre des communautés d’habitants soient bien plus nombreuses que ce que l’on suppose a priori. C’est en substance l’un des résultats principaux des travaux de Tareau (2019) sur les échanges entre groupes culturels sur le littoral guyanais. Les savoirs, les espèces voyagent largement d’un groupe à l’autre, et certains groupes culturels, les Créoles en l’occurrence, se trouvent à une position clé, servant aujourd’hui d’intermédiaires entre les autres cultures guyanaises. Ainsi, Tareau montre que 75 % des espèces botaniques médicinales citées lors de ses enquêtes l’ont été par au moins 5 groupes culturels différents et 31 % par 10 des 16 groupes culturels enquêtés (Tareau, 2019 : 262). Ces chiffres permettent de mesurer l’importance des savoirs partagés concernant les plantes médicinales, et il semble bien vain, dans la plupart des cas, de vouloir assigner le savoir sur une plante à une communauté spécifique. L’exemple du Quassia amara est emblématique en Guyane (Bourdy et al., 2017 ; cf. encadré 1, chap. 12). Dans la thèse de Tareau (2019), suite à de nombreuses enquêtes, il apparaît que cette plante n’est spécifique d’aucun groupe guyanais. Elle a probablement été introduite en Guyane en 1772, et la colonie du Suriname en exportait, en 1869, 265 tonnes en Europe comme tonique amer, antipaludique et insecticide. Elle reste aujourd’hui la 5e plante médicinale la plus utilisée sur le littoral guyanais et elle est employée par 12 groupes culturels (Tareau, 2019). Aussi, malgré les polémiques existantes, si une étude devait avoir lieu sur les propriétés antipaludiques de cette espèce botanique bien connue, il est certain qu’une demande d’autorisation ne serait pas nécessaire tant ces « connaissances traditionnelles [sont] associées à des ressources génétiques dont les propriétés sont bien connues et ont été utilisées de longue date et de façon répétée en dehors des communautés d’habitants qui les partagent » (Art. L.412-5).
De la difficulté d’appréhender les changements
32Une autre manière d’appréhender les échanges anciens passe par l’approche linguistique. Les noms de plantes dans les diverses langues de Guyane (et au-delà) témoignent d’échanges culturels importants (Grenand, 1995). Si l’on prend le cas du palmier Euterpe oleracea, qui produit l’açaí, ses noms sont was (palikur), wasey (wayãpi), watsey (teko), wassaïe (créole guyanais), wasay (kali’na), açaí (portugais du Brésil)… La proximité est évidente. C’est également le cas pour les nivrées du genre Lonchocarpus par exemple, ñeku en wayãpi et beku en teko. L’une des espèces a par emprunt été appelée Lonchocarpus nicou en latin (initialement Robinia nicou), par Aublet, qui l’a collectée et nommée auprès d’Amérindiens Kali’na, qui l’appelaient nicou (Aublet, 1775). Ce phénomène se retrouve pour de nombreuses plantes emblématiques amazoniennes, témoignant à quel point les cultures amazoniennes sont transverses : ces peuples se sont mutuellement enrichis les uns des autres, et loin de former des entités imperméables, ils ont entretenu durant des millénaires des échanges matériels, matrimoniaux, belliqueux ou linguistiques qui ont connu des modifications certaines avec la colonisation.
Resituer la notion de préservation du patrimoine bioculturel
33Toutes ces réflexions s’inscrivent dans le cadre de l’application du protocole de Nagoya en France, et notamment en Guyane. Les débats et conventions internationales, autant que l’attention des politiques, se sont avant tout concentrés sur le partage équitable des avantages issus des utilisations des connaissances traditionnelles. L’histoire de ces textes nous rappelle qu’à l’origine, ils ne traitaient que de la propriété des États sur les ressources biologiques, puis ils ont été élargis, sous la pression de militants indigénistes et de sociétés savantes, aux savoirs locaux sur la biodiversité.
34Ces deux objets que sont la biodiversité, d’une part, et les savoirs qui y sont relatifs, d’autre part, sont de nature radicalement divergente. Protéger la première, c’est souvent commencer par ne pas y toucher, au moins de manière sélective. En ce qui concerne les seconds, plus labiles, particulièrement en ce qui concerne les sociétés à tradition orale, les protéger, c’est faire tout ce qui est possible pour les faire vivre, et donc, autant que possible, y accéder et y ré-accéder. Partant, si on peut protéger la biodiversité en en limitant l’accès, on ne protégera pas les savoirs associés en en limitant la diffusion. Les savoirs traditionnels ne s’usent que si l’on ne s’en sert pas.
35Ces savoirs, entre connaissances naturalistes et traits culturels, entre pratiques et théories, sont mal préservés. Le paradoxe des textes qui visent à les protéger, mais qui peinent à les définir et se concentrent sur le partage des avantages découlant de leur utilisation, appelle la mise en place d’un nouveau cadre conceptuel, à l’interface entre patrimoine naturel et patrimoine culturel, entre patrimoine immatériel et matériel : le patrimoine bioculturel (Maffi, 2018). Sans cet effort conceptuel indispensable, et sans la mise en place de programmes muséographiques et de conservation dédiés, les acteurs de la préservation continueront leurs débats sans fin, et les savoirs continueront de disparaître avec leurs détenteurs.
36Aujourd’hui, en France, il n’existe aucun lieu qui permette la collection conjointe de taxons biologiques, de leurs semences, de documents multimédias illustrant des savoirs et savoir-faire relatifs à ces taxons, d’objets issus ou associés à ces pratiques. En Europe, guère plus. Des collections d’« economic botany » existent au Royaume-Uni (Kew Gardens), aux États-Unis (Missouri Botanical Garden), mais ne répondent qu’à une infime partie des besoins de connaissance et de conservation.
37Les exemples cités dans ce chapitre illustrent des problématiques simples et localisées et, déjà, les définitions achoppent sur la réalité de la diversité des connaissances liées à la nature dans les sociétés amazoniennes. Le cas de groupes dont l’histoire récente a été géographiquement instable, comme les Galibi marworno du Brésil, ou les Ndjuka du Suriname, aujourd’hui présents en Guyane, soulève d’autres questions. Ces groupes font bien partie des Amérindiens ou Bushinenges, mais pour certains n’ont pas la nationalité française. Quelles lois applique-t-on à leur égard ? La loi française, brésilienne ou surinamaise ? Si les espèces auxquelles ils peuvent se référer sont indéniablement présentes sur le territoire guyanais, un certain nombre ont appris ces savoirs dans leur pays de naissance où la biodiversité est la même… Il s’agit donc peut-être d’envisager, en s’inspirant de l’Unesco, un statut particulier ? Devant l’histoire commune des sociétés humaines, une réflexion reste à mener sur la notion de patrimoine bioculturel de l’humanité, ou de patrimoine bioculturel global, au regard de la nouvelle notion de droit bioculturel (Collot, 2020).
Conclusion
38Il semble aujourd’hui évident que ces lois et leurs décrets d’application, sous couvert de protéger la biodiversité et les savoirs associés, ont hypothéqué leur préservation et découragé ceux qui essaient de les étudier. Particulièrement en Guyane française, ces textes ne prennent pas en compte la position des détenteurs de savoirs. Si l’on se réfère au perspectivisme amazonien tel qu’analysé par Viveiros de Castro (1998), toutes ces définitions de la « biodiversité » relèvent de conceptions ethnocentrées. En Amazonie, les relations entre humains et non-humains se pensent souvent comme des alliances, des crises, des histoires de famille… qu’ignorent les schèmes de pensée du législateur. Pour citer Pinton et Grenand (2007 : 194) : « Dans une perspective de conservation de la biodiversité et des savoirs associés, mieux vaut sans doute privilégier des approches flexibles, maintenir des espaces de négociation, ne pas inscrire les droits et devoirs des uns et des autres en termes trop précis dans la législation, pour permettre que des compromis satisfaisants soient trouvés. »
39Au-delà du patrimoine naturel, notion relativement bien circonscrite, et du patrimoine culturel, la notion de patrimoine bioculturel (immatériel ou matériel) fait sens, tant on ne peut séparer, dans certaines sociétés, le tangible de l’intangible (Pinton et Grenand, 2007). C’est peut-être sur la reconnaissance d’un patrimoine bioculturel commun de l’humanité qu’il nous faut à présent réfléchir.
Références
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Notes de bas de page
1 Dans un article récent, en refusant de mentionner le terme autochtone, et en employant celui de communauté d’habitants, choix par défaut, Collot (2020) va même jusqu’à avancer qu’un « un tel choix affecte le dispositif français d’une lacune fondamentale, illustrant la volonté du gouvernement comme du Parlement de reléguer les communautés concernées à un rôle secondaire au sein du dispositif APA ». Cet article propose une déconstruction juridique tout à fait pertinente de l’application du protocole de Nagoya dans le droit français.
2 Loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique.
3 Cette liste pourrait ne jamais finir, il suffit de feuilleter les milliers de pages des Mythologiques de Claude Lévi-Strauss pour avoir une idée de l’intrication entre ces mondes (Lévi-Strauss, 1964).
4 Notons que, du point de vue du droit, ce n’est pas l’ancienneté qui fait la tradition, mais le mode de constitution et de transmission de ces savoirs, qui est considéré comme le critère premier d’identification et de définition des connaissances traditionnelles (Collot, 2020).
Auteurs
Chargé de recherche CNRS (UMR LEEISA, CNRS-Université de Guyane-Ifremer), anime l’équipe EthnYC. Ses travaux explorent, dans le grand champ de l’ethnobiologie, les relations multiples entre médecines locales, biodiversité et perception de l’environnement dans un monde amazonien en plein changement.
Il est anthropologue et ethnoécologue, ingénieur de recherche CNRS (UMR LEEISA, CNRS-Université de Guyane-Ifremer) à Cayenne. Il dirige depuis six ans l’observatoire Homme-Milieux Oyapock. Ses recherches portent sur les savoirs naturalistes des peuples amérindiens Wayãpi, Teko et Palikur. Il s’intéresse également aux changements sociaux contemporains que ces peuples connaissent et à leurs relations à l’État français et ses institutions.
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