Comportements humains et risque de transmission de la maladie du sommeil en zone périurbaine de Kinshasa (RDC)
p. 315-331
Texte intégral
1La maladie du sommeil ou trypanosomose humaine africaine (THA) est une pathologie qui est mortelle si elle n’est pas soignée. Elle touche plusieurs dizaines de milliers de cas par an en Afrique subsaharienne, et l’on estime à 60 millions le nombre de personnes qui sont exposées (OMS, 2006). La pathologie se décline en deux stades. Le premier est un stade invasif qui fait suite à la piqûre infectante d’une glossine porteuse du pathogène (Trypanosoma brucei gambiense en Afrique centrale et de l’Ouest ; T. b. rhodesiense en Afrique de l’Est), et durant lequel le malade ne présente pas de symptômes particuliers, mais sert de réservoir à trypanosomes et favorise la transmission aux proches lorsqu’il est piqué par une glossine susceptible d’héberger le cycle biologique du parasite. Le stade deux, se caractérise par le passage du parasite dans le système nerveux central après plusieurs mois, voire plusieurs années d’incubation dans le système sanguin ; à ce stade commencent à apparaître de nombreux troubles psychomoteurs conduisant à un état d’asthénie permanente, qui est d’ailleurs à l’origine de l’appellation « maladie du sommeil », puis au décès du malade.
2Au deuxième stade, le traitement est douloureux et dangereux, et nécessite une hospitalisation. De plus, le dépistage demande les compétences d’une équipe spécialisée et équipée, ayant les moyens d’intervenir dans les zones rurales les plus reculées. Il est donc apparu que la rupture de la chaîne de transmission par la lutte anti-vectorielle présentait l’avantage de limiter de façon efficace et à moindre coût le développement de l’endémie.
3En matière de lutte contre la THA, la pratique de l’interdisciplinarité n’est vraiment apparue que dans les années 1980, avec l’expérience ivoirienne. À cette époque, la persistance de certains foyers endémiques en Côte-d’Ivoire, en dépit d’un suivi médical régulier, a poussé les chercheurs à dépasser le stade de l’approche médicale, limitée aux centres de dépistage et de traitement, pour aller s’intéresser aux pratiques sociales liées à la gestion du terroir au cœur de la zone endémique (Hervouët et Laveissière, 1987). L’un des préalables à cette recherche consistait à sortir des sentiers battus et aller chercher l’exposition au risque dans les plantations, au sein des populations allogènes échappant à la vigilance du système de santé classique. Il est apparu indispensable pour comprendre les mécanismes qui animent le complexe pathogène de la THA – constitué d’un hôte (humain ou animal), d’un vecteur (la glossine ou mouche tsé-tsé) et d’un parasite (le trypanosome) – de ne pas s’enfermer dans un domaine disciplinaire afin d’être en mesure d’appréhender les implications des différents acteurs et leurs interactions à tous les niveaux de la chaîne écologique.
4La THA a longtemps été considérée comme une maladie spécifique aux zones rurales. En effet, en plus de la réémergence de l’endémie dans les anciens foyers historiques d’Afrique centrale et de l’Ouest (Penchenier et al., 1999), on observe depuis la fin du xxe siècle l’apparition de nouveaux foyers endémiques. La désorganisation des systèmes de santé et l’héritage d’une situation endémique, apparemment maîtrisée après les indépendances, ont fortement contribué à diminuer la vigilance et ont favorisé l’apparition de nouvelles flambées endémiques (Cattand, 2001). Plus récemment, d’autres types d’événements ont bouleversé les schémas classiques du contexte épidémiologique de la THA : les migrations pour raisons économiques ou pour fuir des conflits armés, les modifications des paysages liées au développement des cultures de rente (café, cacao) (Lointier et al, 2001). Par ailleurs, un exode rural important a mis une pression démographique sans précédent sur les paysages urbains, exposant les citadins de quelques villes au risque de transmission (Fournet et al., 2001 ; Bilengue et al., 2001 ; Courtin et al, 2005).
5Dans l’étude présentée ici, il s’agissait de répondre à une sollicitation du Programme national de lutte contre la THA (PNLTHA) en RDC qui voulait savoir si les cas de THA dépistés dans la ville de Kinshasa s’étaient contaminés ou non en périphérie de la ville, vérifiant ainsi l’hypothèse de l’existence d’un foyer local de THA dans une des mégapoles les plus importantes d’Afrique. L’ancien foyer de Kinshasa était considéré comme un foyer rural « éteint » depuis les années 1960, et la surveillance de la maladie s’était relâchée. Il a fallu attendre la reprise des activités de dépistage en 1995 pour voir le nombre de cas régulièrement augmenter, jusqu’en 1999 où 912 cas ont été diagnostiqués (Bilengué et al., 2001). Jusqu’en 1999, on considérait les patients atteints de Kinshasa comme des habitants ayant séjourné dans les provinces du Bas-Congo et du Bandundu, où la situation dans certains villages atteignait un niveau épidémique (Van Niewenhove et al., 2001). Mais c’est le nombre important de cas au premier stade de la maladie qui a attiré l’attention des autorités médicales, laissant suggérer que la contamination avait pu avoir lieu récemment et à proximité de la capitale. Plusieurs études furent menées qui décrivirent les activités de surveillance et de lutte (BilenguÉ et al, 2001 ; Ebeja et al, 2003) ou qui tentèrent de mettre en évidence le caractère local de la transmission (Robays et al, 2004 ; De Deken et al, 2005) sans vraiment y parvenir. Notre étude s’était donc fixée comme objectifs d’évaluer en un an (2005) la présence du vecteur autour de la ville, l’importance du contact entre l’homme, la glossine et le pathogène, et enfin de déterminer les paysages à plus haut risque pour la transmission autour ou dans la ville. Elle s’est donc appuyée d’une part, sur l’entomologie et la biologie moléculaire pour la détermination des facteurs biotiques, et d’autre part, sur la géographie pour mieux comprendre l’interrelation entre ces facteurs biotiques et leur environnement.
Contexte de l’étude
6Kinshasa est la capitale de la République démocratique du Congo. C’est aussi une ville province. Pour notre étude, nous ne nous sommes intéressés qu’à la partie urbaine et périurbaine. Bordée au nord par le fleuve Congo, la ville repose sur une plaine alluviale et sablonneuse, et s’étend au sud, à l’est et à l’ouest sur des sites collinaires. Elle est parcourue par de nombreuses fractures, occupées par un réseau hydrique important, dont l’élément principal est la rivière Ndjili. La végétation naturelle, ou ce qu’il en reste, est constituée de forêt dégradée, de savane et de steppe. Les sols sont argileux à sablo-argileux et sableux. Les précipitations sont en moyenne légèrement supérieures à 1 200 mm par an et la température moyenne annuelle est de 25 °C, le site bénéficie des masses d’air frais en provenance des courants du Benguela. La ville s’étend sur une superficie d’environ 450 km2 et regroupe 24 communes. La population est estimée entre 4,5 et 5,5 millions d’habitants, avec une densité moyenne de 500 habitants au km2. La situation de crise économique qui perdure a poussé bon nombre de Kinois à exploiter les terres situées en périphérie de la ville.
7Nous avons considéré que la glossine constituait le point focal de cette étude puisqu’en tant que vecteur, elle seule était capable de mettre en contact homme et pathogène. Deux enquêtes entomologiques ont donc été réalisées : la première en saison des pluies (février et mars 2005), dans un contexte climatique favorable aux glossines, la seconde, en saison sèche (juin et juillet 2005), plutôt défavorable aux populations de glossines. Huit sites d’étude ont été prospectés en saison des pluies, puis seulement six en saison sèche, deux sites s’étant avérés exempts de glossines en saison des pluies. Les insectes ont été capturés à l’aide de pièges pyramidaux (Goûteux et Lancien, 1986).
8Sur chaque site, les captures étaient réalisées pendant quatre jours consécutifs avec une cinquantaine de pièges disposés tous les 300 m environ, afin d’éviter les interactions entre pièges. Les insectes étaient collectés deux fois par jour, pour disposer de mouches en bon état pour la dissection. Le traitement des glossines capturées est individuel et exhaustif, la première étape consistant à faire de visu un tri entre les mouches vivantes et mortes, les espèces et les sexes, et à identifier les glossines fraîchement écloses qui n’ont jamais pris de repas de sang (ténérales). Ces dernières constituent un groupe intéressant au titre d’indicateur des lieux de reproduction, mais aussi en tant que groupe particulièrement sensible à l’infection par les trypanosomes. Dans la seconde étape les insectes vivants sont disséqués afin d’isoler les organes pour la recherche de trypanosomoses et l’identification des hôtes nourriciers par PCR (amplification en chaîne par polymérisation) (moser et al., 1989 ; Herder et al, 2002 ; Njiokou et al, 2004).
9Pour chacun des 305 points de capture, les coordonnées géographiques (décimales) ont été relevées à l’aide d’un GPS. Les caractéristiques environnementales ont été définies avec l’aide des géographes du Bureau d’études et d’aménagement de l’urbanisme de Kinshasa, et ont servi de base aux fiches de renseignements individuels pour chaque piège. Nous avons saisi les informations concernant les facteurs présents ou absents de l’environnement du piège.
10L’objet statistique était le point de capture et les variables discrètes et dichotomiques (présence/absence) ; la démarche a d’abord consisté à vérifier la solidité des groupes (5 % mini.) ; puis à comparer les variables individuelles à l’intérieur des groupes retenus (test du Chi carré) et rechercher les interactions possibles (régression logistique) entre facteurs biotiques et environnementaux (sols, végétations, présence d’eaux) ou humains (activités). Considérant que les populations de, glossines n’étaient pas les mêmes en saison sèche et en saison des pluies, les deux populations ont été analysées séparément.
Des populations de glossines à faible effectif se maintenant grâce au couvert arboré et à la présence d’humidité
11Les résultats obtenus par les deux enquêtes entomologiques et les analyses réalisées au laboratoire à l’université de Yaoundé-I (Cameroun) ont fourni nos variables dépendantes.
12Le nombre de glossines capturées, évalué par la DAP, est très faible quelle que soit la saison et est inférieur à 1 glossine par jour, l’écart-type des captures entre les pièges est de 9,8. 570 des 897 des glossines capturées (65,5 %) ont été disséquées et retenues pour les analyses, parmi elles 54 (9,4 %) étaient des ténérales.
13117 (20,5 %) glossines analysées au laboratoire avaient un repas de sang frais, en proportion significativement plus importante en saison sèche (33 %). Parmi les 117 repas analysés, 78 avaient été pris sur l’homme (67 % ; IC : 57,5-75,9) et 32 sur le porc (27,3 % ; IC : 19-36) et 7 non identifiés. La proportion de repas de sang humain pris en saison sèche est significativement supérieure (Khi2 Pearson, p < 0,000) à celui observé en saison des pluies. Enfin, 2,3 % (IC 95 % : 1,2-3,3) des intestins analysés étaient infectés par le pathogène.
14Pour être plus exploitables sur un plan statistique nos données environnementales ont fait l’objet de regroupements présentés dans le tableau 3.
15Les facteurs insuffisamment représentés ont été éliminés (ex. :« habitat dense »,« élevage caprin/ovin », etc.) ; les deux sites où aucune glossine n’a été capturée pendant la première enquête entomologique de saison des pluies n’ont pas été réintégrés dans l’étude en saison sèche. Le type de sol le plus rencontré est sablo-argileux (63,9 % des points de capture) ; la végétation de la périphérie est plutôt herbacée (49,5 %) et 56,4 % des pièges ont été placés à proximité d’un cours d’eau. Par contre, 13,4 % des pièges comprenaient dans leur rayon d’action à la fois un cours d’eau et un point d’eau « stagnante ». Concernant l’activité humaine, il y a autant de points de capture sans activité qu’avec une ou plusieurs. Parmi les 305 points, on notait la présence d’un élevage familial de porcs pour 16,7 % d’entre eux. L’habitat humain était présent dans l’environnement de 41,3 % des pièges.
16L’observation des tableaux 4 et 5 nous confirme que les sols argileux, les cours d’eau et la végétation arborée constituent des facteurs environnementaux qui favorisent la présence du vecteur tout au long de l’année et ce, quelle que soit la saison. La végétation mixte semble constituer un refuge pour les tsé-tsé en saison sèche. Pour les ténérales, qui sont à la fois un indicateur de lieux de reproduction et un groupe sensible à l’infection, les lieux de prédilection sont les rives des cours d’eau en saison des pluies, et les aires couvertes de végétation mixte en saison sèche. Inversement, couvert herbacé et eaux stagnantes sont plutôt défavorables à la présence de ces jeunes glossines. Concernant le contact homme/vecteur, celui-ci apparaît comme étant localisé principalement le long des cours d’eau en saison des pluies, et à proximité des élevages porcins ou sous couvert arboré en saison sèche. Aucune interaction significative (p < 0,05) n’a été observée entre les différents groupes.
Un risque de transmission lié à l’humidité mais aussi à une certaine pratique de l’élevage
17Cette étude a cherché à associer observations géographiques et analyses biologiques, permettant ainsi de relier la dimension moléculaire depuis les organes du vecteur (identification du pathogène ou du sang dans l’intestin du vecteur) jusqu’à une échelle plus large qui est celle du point de capture dans son environnement.
18Glossina fuscipes quanzensis est l’unique espèce de glossine capturée. Les faibles densités de glossines observées, inférieures à une glossine par piège et par jour, confirment les observations réalisées par R. De Deken et ses collaborateurs (2005) qui avaient remarqué que la distribution du vecteur n’avait pas ou peu évolué en périphérie de la ville depuis les enquêtes de M. Kazumba et collaborateurs en 1993. De Deken et ses collaborateurs décrivirent aussi des populations à distribution fragmentée. Ces auteurs avaient expliqué les variations saisonnières à peine perceptibles, par les faibles amplitudes climatiques entre les deux saisons en raison des remontées de courants d’air frais du Benguela par le fleuve Congo qui adoucissent le climat équatorial de Kinshasa. Néanmoins, il serait dangereux de sous-estimer l’importance épidémiologique d’une population de glossines fragmentée et de faible densité. F.-P. Goûteux et M. Artzrouni (2000), utilisant une approche biomathémathique, sont parvenus à modéliser la résurgence de la maladie du sommeil et ont pu observer que les faibles densités de tsé-tsé, combinées à un important contact homme/vecteur pouvaient provoquer des flambées épidémiques dans la population humaine. Cette hypothèse a pu être vérifiée dans de nombreux foyers d’Afrique centrale et de l’Ouest. Kinshasa offre ici toutes les conditions permettant la survenue de telles flambées. Le taux moyen de ténérales obtenu dans les deux enquêtes est conforme aux proportions classiquement observées (Laveissière et al., 2000). Les fortes proportions de repas de sang pris sur l’homme (67 %) et sur le porc (32 %) en font les hôtes préférentiels en périphérie de la ville, en dépit de préférences trophiques éclectiques de G.j. quanzensis. Il est vrai que la pression anthropique très forte sur le milieu et sans doute à l’origine de la disparition de la faune sauvage a modifié le comportement alimentaire des glossines. La proportion de repas de sang humain significativement plus importante en saison sèche, nous indique clairement qu’en dépit d’une baisse relative des densités de populations de glossines, la saison sèche favorise un contact plus étroit entre l’homme et le vecteur. Les deux mammifères servant d’hôtes nourriciers, l’homme et le porc, sont ainsi des réservoirs potentiels pour le pathogène ; il est donc peu surprenant de retrouver ce dernier dans les intestins de 2,3 % des glossines disséquées dans les deux enquêtes. La caractérisation moléculaire de T b. gambiense est encore récente (Herder et al., 2002) et n’a été que peu pratiquée sur le terrain, excepté en Côte d’Ivoire où un taux similaire a été observé (Jamonneau et al., 2004). Si ce taux n’est pas le reflet de la proportion de glossines réellement infectantes (présence du pathogène dans les glandes salivaires), qui est classiquement estimé à 0,2 % (Frézil et Cuisance, 1994), il n’en constitue pas moins une évidence, celle de la circulation du pathogène chez le vecteur dans une zone où l’hôte nourricier principal est l’homme.
19Une exposition accrue au risque de transmission en présence de certains facteurs environnementaux est confirmée. Les sols argileux, les cours d’eau et la végétation arborée favorisent la présence du vecteur tout au long de l’année. La végétation mixte semble constituer un refuge pour les tsé-tsé en saison sèche. Pour les ténérales, qui sont à la fois un indicateur de lieux de reproduction et un groupe sensible à l’infection, les lieux de prédilection sont les rives des cours d’eau en saison des pluies et les aires couvertes de végétation mixte en saison sèche. S’il est difficile de tracer un schéma général de la dynamique des populations de glossines, le climat et la disponibilité des hôtes nourriciers sont les deux facteurs environnementaux les plus influants sur la longévité et la mortalité des adultes. Il est reconnu que la saison sèche entraîne toujours une chute des densités d’insectes : augmentation de la mortalité des pupes, éclosion des imagos sans réserves de graisse, raréfaction de l’eau et du couvert végétal, soit autant d’événements qui sont atténués par une humidité permanente le long des cours d’eau et dans les sols argileux, ainsi que des températures plus clémentes à l’ombre des couverts arborés (Laveissière et al., 2000).
20Le contact homme/glossine apparaît lui aussi comme étant localisé principalement le long des cours d’eau en saison des pluies, et à proximité des élevages porcins ou sous couvert arboré en saison sèche. Inversement, l’intensité de l’activité humaine ne semble avoir aucune influence sur ce contact. Les activités liées à l’eau observées dans cette étude sont pourtant des activités quotidiennes, excepté le lavage des produits agricoles qui peut être lié à un rythme saisonnier réglé sur les récoltes. Par contre, le couvert arboré favorise le contact homme/vecteur en saison sèche, offrant un lieu de repos à la fois pour les glossines et pour les hommes, la promiscuité qui s’ensuit est de toute évidence un facteur aggravant du risque. Cette variabilité du risque de transmission a déjà été mise en évidence dans un foyer de THA en zone forestière du Sud-Cameroun (Grébaut et al., 2004), où il fut trouvé que l’exposition au risque était beaucoup plus importante en saison sèche, en dépit d’une baisse significative de la densité de population du vecteur. De même, la proximité de porcs multiplie presque par quatre le contact entre homme et vecteur en saison sèche. Sachant que la plupart des porcheries rencontrées dans l’étude sont situées dans une pièce de l’habitation familiale consacrée à cette activité, c’est vraisemblablement la pratique spécifique de l’élevage porcin à Kinshasa qui renforce les interrelations entre les trois acteurs du complexe pathogène. Pourtant, au Cameroun, R Grébaut et ses collaborateurs (2004) avaient remarqué que les glossines se nourrissaient plus ou moins sur les porcs en fonction des saisons, sans que cela n’influence significativement la proportion de repas de sang pris sur l’homme ; mais l’étude se passait en zone forestière et les animaux sauvages jouaient le rôle d’hôtes régulateurs saisonniers. C’est ici qu’une observation plus pointue de l’activité humaine dans l’espace périurbain apporterait vraisemblablement un éclairage nouveau sur le contact entre l’homme et le vecteur.
Conclusion
21Même si cette étude met en évidence une transmission active de la THA en périphérie de Kinshasa par l’identification des facteurs biotiques à risque et des biotopes favorables à ces mêmes facteurs, il n’en demeure pas moins que l’analyse des pratiques sociales et agricoles liées à l’occupation de l’espace en périphérie de Kinshasa fait défaut. Au-delà du résultat de l’étude biologique et géographique, qui ne visait qu’à répondre à la question de l’existence d’un foyer endémique local, de nombreuses interrogations se posent sur les pratiques humaines qui conduisent les Kinois à s’exposer involontairement dans les biotopes considérés comme étant à risque. On pourrait aussi se projeter dans l’avenir et chercher à modéliser l’évolution de l’endémie à moyen terme, compte tenu de l’évolution de la pression anthropique sur ce milieu. Mais cette étude dont la période de référence était limitée à une année se devait d’apporter des réponses rapides au PNLTHA de RDC, tout comme au bailleur de fonds. La nécessité de résultats à court terme a donc hypothéqué la puissance d’analyse d’une étude menée conjointement avec des sociologues et des anthropologues qui ne pouvaient se contenter du court terme pour mieux comprendre quelle relation les Kinois ont pu établir avec cette zone périurbaine qui module leur exposition à la THA.
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10.1046/j.1365-3156.2001.00731.x :Auteurs
pascal.grebaut@ird.fr
est assistant ingénieur en biologie à l’IRD depuis 1985 ; il a travaillé tout au long de sa carrière sur la maladie du sommeil et la lutte contre les glossines. Co-inventeur avec C. Laveissière du piège monoconique « Vavoua », P. Grébaut a activement contribué à la mise en place de dispositifs de lutte antivectorielle à grande échelle au Mali, en Côte-d’Ivoire, au Congo et au Cameroun. Depuis les années 2000, il s’intéresse en particulier à l’évaluation du risque de transmission de la THA. Aujourd’hui, il étudie aussi des aspects plus fondamentaux de la thématique, notamment les protéines excrétées/sécrétées par le trypanosome au cours de la phase invasive chez l’hôte, constituant ainsi autant de cibles thérapeutiques potentielles.
gustavsca@yahoo.fr
avec un PhD de biologie moléculaire, Gustave Simo s’est engagé dans la recherche sur la THA depuis sa thèse réalisée dans les années 2000 à l’Oceac (Organisation de coordination pour la lutte contre les endémies en Afrique centrale), à Yaoundé (Cameroun). Il a en particulier contribué à l’amélioration des outils d’identification moléculaire du pathogène et apporté un éclairage significatif sur la circulation de ce même pathogène dans la faune sauvage dans les foyers de maladie du sommeil au Cameroun. Par ailleurs, il a aussi adapté la technique d’analyse des repas de sang de glossines par amplification du gène du cytochrome C du sang de l’hôte. Aujourd’hui, G. Simo enseigne à l’université de Dschang (Cameroun).
emlzola@yahoo.fr
est technicien entomologiste à l’Institut national de recherche en biologie (INRB, Kinshasa, RDC). Il a beaucoup travaillé à l’étude de la transmission palustre à Kinshasa.
jeanmarie_bena@yahoo.fr
est géographe au Bureau d’étude et d’aménagement et de l’urbanisme (BEAU) à Kinshasa. Suite aux conflits en RDC à la fin des années 1990, la majeure partie des documents cadastraux de la ville de Kinshasa avait disparu. Au sein du projet, l’imagerie satellitaire devait permettre au BEAU de reconstituer son cadastre. J.-M. Bena fut chargé de la caractérisation des facteurs environnementaux de la zone d’étude.
diabakana@yahoo.fr
est responsable de la lutte antivectorielle au sein du Programme national de lutte contre la THA (PNLTHA) congolais, et supervise l’ensemble des opérations visant à étudier ou éliminer les glossines des foyers de maladie du sommeil en RDC.
gaelleo@hotmail.com
est épidémiologiste, ex-attachée culturelle à l’ambassade de France en RDC, elle a contribué à l’évaluation du dispositif de surveillance et de contrôle mis en place par le PNLTHA congolais.
gerard.cuny@ird.fr
est biologiste moléculaire et directeur de l’unité mixte IRD/Cirad Interactions hôte-vecteur-parasite dans les trypanosomoses.
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