Chapitre 5. La modélisation environnementale, un outil du politique ?1
p. 155-185
Texte intégral
Introduction
1Précisons tout d’abord la posture que nous adoptons, en tant que chercheur, agronome et modélisateur, pour répondre depuis les sciences de l’environnement aux requêtes du politique.
2Les scientifiques sont questionnés sur l’environnement en tant qu’experts, soit au niveau global des conférences internationales ou des exercices de prospective du développement durable (Millenium Ecosystem Assessment 2003, International Assessment of Agriculture Science and Technology for Development (IAASTD) 2009, Pamela Carthagena et al., 2009), soit au niveau national, comme à Madagascar le groupe Vision Durban depuis 2003, ou actuellement le mécanisme REDD (Reducing Emissions from Deforestation and forest Degradation), qui contribuent à la définition des politiques environnementales.
3P. Roqueplo (1997 : 15) soulignait le double écart entre l’énoncé scientifique et l’expertise : « ce qui transforme un énoncé scientifique en expertise scientifique, c’est le fait que son énonciation soit intégrée au dynamisme d’un processus de décision, et qu’elle soit formulée à l’usage de ceux qui décident », et entre l’énoncé de l’expert et la réponse à la demande faite par le politique qui prendra la décision.
4Les scientifiques sont également questionnés en tant que producteurs de modèles. Nous distinguons le modèle scientifique, outil dans les mains du chercheur, de formalisation d’une réalité complexe et de mise en débat rigoureuse des alternatives, du modèle d’action, dans les mains du politique, dont l’élaboration et la légitimation résultent d’une bataille d’experts (Le Bars, 2009).
5À Madagascar, nous apportons nos acquis scientifiques en termes de modélisation environnementale en formalisant certains aspects utiles à la décision politique, en nous référant à R. Guesnerie et P.-C. Haucoeur (2003 : 10) cités par A. Karsenty (2006 : 445) à propos du rôle de la recherche dans les politiques forestières : « la recherche est aussi appelée à éclairer les arbitrages, les choix nécessaires entre des objectifs fréquemment contradictoires (...). Le rôle de la recherche n’est d’ailleurs pas seulement d’éclairer ces contradictions mais aussi de tenter de les dépasser par l’invention de solutions conciliatrices ». Dans ce rôle, nous nous limitons à une évaluation technique, avec nos outils d’analyse, des dispositifs institutionnels mis en place pour la conservation des forêts et nous suggérons un certain nombre de scénarios, car c’est en effet sur ces points que des constructions de modèles sont riches d’enseignement.
6Nous considérons la modélisation environnementale comme la modélisation d’ensembles physico-chimiques gérés par l’homme qui se situe donc entre natures et sociétés (Hervé et Laloë, 2009). L’adaptation au changement climatique, la conservation de la biodiversité ou la gestion durable des ressources naturelles relèvent du domaine des sciences sociales quand il s’agit de questionner les changements de comportement des hommes, en tant qu’individus, mais aussi comme groupes sociaux et ensembles politiques. Les tâches que nous nous donnons sont bien celles d’évaluer leurs trajectoires actuelles en regard de l’environnement, de trouver les moyens d’en infléchir certaines, d’en changer d’autres (Hervé et al. 2009 ; Martin, 2009), ou encore d’agir à temps sur une trajectoire pour la maintenir viable (Martin, 2004 ; Aubin, 2010).
7Nous réviserons d’abord quelques idées reçues qui ont contribué à construire la politique environnementale malgache avant d’aborder trois de ses facettes : mise en défens spatiale, transfert de gestion, compensation économique. En réponse, trois modèles dynamiques sont présentés en illustrant leurs atouts et limites : modèles d’occupation du sol, modèle de contrôle institutionnel, modèle économique pour éclairer la décision politique. Des enseignements sont finalement tirés pour fournir au politique un outil scientifique de modélisation environnementale.
Remise en cause des idées reçues
8On peut considérer le Programme national d’action environnementale (PNAE) comme un modèle d’action que traduisent les Plans environnementaux successifs (PE), ajustés selon les évaluations réalisées avec des normes imposées aux usagers de la forêt. La mise en place de ces plans environnementaux repose sur des manières de voir la conservation de la biodiversité issues de la biologie de la conservation, des catégories établies pour les parcs nationaux standardisées par l’Union internationale pour la conservation de la nature, et des stratégies des grandes organisations non gouvernementales d’environnement présentes à Madagascar : Conservation International (CI), World Wild Fund for Nature (WWF), Wildlife Conservation Society (WCS).
9Certaines perceptions de la forêt, bien ancrées, justifient des principes d’action que l’on peut discuter en termes de conservation des forêts. Nous nous limiterons à trois exemples : une forêt primaire vide d’hommes, un corridor forestier garantissant la biodiversité, une forêt réservoir d’eau en amont des bassins versants.
10Les biologistes de la conservation insistent sur la nécessité d’assurer la continuité du couvert forestier originel pour garantir la circulation des espèces à conserver (Langrand et Wilmé, 1997 ; Rasolonandrasana et Goodman, 2000 ; Goodman et Razafindratsita, 2001). S. Carrière et al. (2007) rejettent la conception d’une forêt primaire sans homme, à préserver sans habitants, sur la base de résultats scientifiques montrant que la forêt supposée primaire à Madagascar est en grande partie secondarisée. Pour conserver la biodiversité, ces auteurs proposent de connecter les formations secondaires composites actuelles, entre arbres, forêts et jachères intermédiaires incluses dans des cycles culture/jachère (Randriamalala et al., 2010). Cette orientation conduit d’une part à revisiter le concept de « corridor forestier » (Carrière, 2006 ; Carrière et al. 2008), utilisé comme justification scientifique d’une extension des aires protégées, et d’autre part à rendre opérationnel en milieu tropical le concept de connectivité développé en écologie des paysages (Hervé et Treuil, 2009).
11Si la conservation s’impose pour les biologistes (endémisme élevé, évolution des espèces après le détachement de Madagascar du continent africain), la question des modalités de cette conservation fait débat. Quelles sont les places respectives et les articulations d’une conservation par exclusion et d’une conservation participative et contractualisée par transfert de gestion auprès des usagers, dans les couloirs forestiers situés entre ces aires protégées ? La gouvernance de ces réseaux composites, qui intègrent plusieurs aires protégées et les couloirs forestiers qui les relient, reste un défi.
12Les points de vue conduisant aux transferts de gestion ont argumenté que la forêt, habitée par des paysans, est conservée par les paysans pour l’utilisation qu’ils en font, et pourrait donc être conservée avec eux, compte tenu de leurs pratiques, et non contre eux (Bertrand et al., 1997 ; Maldidier, 2001). Cette analyse a bien fonctionné pour la défense des ressources d’un territoire réapproprié contre des utilisateurs extérieurs, moins bien pour le contrôle interne des infractions, qui nécessite parfois un appui externe. La tension subsiste entre le modèle répressif et le modèle participatif, alors que la solution est sans doute intermédiaire, qui associerait et doserait les deux approches.
13En revenant sur la justification du maintien de la forêt pour sa fonction de réservoir d’eau (Chomitz et Kumari, 1996), G. Serpantié et al. (2007) montrent que ce qui reste un puissant argument de communication n’est pas démontré scientifiquement, étant donné l’extrême variabilité des précipitations sur de courtes distances de part et d’autre de la falaise du corridor forestier, qui en reste le site le plus arrosé. La relation entre déforestation en amont et déficit d’eau pour les rizières en aval, qui est avancée pour justifier le paiement par des « gagnants » défricheurs d’une compensation aux « perdants » riziculteurs côtiers (Carret et Loyer, 2003), est difficile à mettre en évidence dans les grands bassins versants dont la surface en forêt en amont ne représente plus qu’une infime partie de la surface totale. Cette relation entre déforestation, assèchement des sources et ensablement des rizières se trouve cependant reformulée par les paysans riverains de la forêt, mais à une toute autre échelle. Le ruissellement sur les versants ne contribue-t-il pas à l’enrichissement en aval des sols de rizières ? Une mise en correspondance de l’évolution de l’occupation du sol, des débits à l’étiage et des risques d’érosion, est nécessaire avant de proposer des paiements pour services environnementaux dans ce domaine.
14Une partie de ces idées reçues est à reformuler, en mobilisant des résultats scientifiques récents ou en mettant en chantier de nouvelles recherches, si l’on veut intervenir efficacement et durablement pour la conservation des forêts.
Les politiques environnementales : zonages, institutions, incitations économiques
Politique environnementale, un tournant
15La priorité environnementale affichée par Madagascar, avec le PNAE pendant plus de 15 ans et la déclaration de Durban en 2003, a constitué un moteur de captation de financements justifiés par l’extension des aires protégées, les transferts de gestion ayant simplement introduit des velléités de gestion participative.
16Au cours des trois programmes environnementaux du PNAE, certaines institutions étaient présentes depuis les débuts, l’ONE (Office national de l’environnement) et le ministère de l’Environnement et des Forêts aux dénominations changeantes. D’autres ont été nouvellement créés et financées : l’ANAE (Association nationale pour l’action environnementale) et l’Angap (Association nationale de gestion des aires protégées) durant le PE1, la Celco (Cellule nationale de coordination) durant le PE3 (Belvaux, 2007). Parallèlement, de nouveaux concepts ont été introduits : SAPM (Système des aires protégées malgaches) en 2003, Sites de conservation en 2004, NAP (Nouvelles aires protégées) dans un décret provisoire en 2006, puis confirmé à l’issue de consultations publiques en 2009. La création permanente de nouvelles institutions, de nouveaux concepts et de nouveaux dispositifs territoriaux, sans attendre l’évaluation des dispositifs précédents, traduit une dynamique qui n’est pas toujours comprise par les usagers et qu’il conviendrait d’évaluer par rapport à l’objectif de conservation affiché.
17La politique environnementale malgache se trouve actuellement à une période charnière. Le Programme environnemental 3 s’est achevé en juin 2009. Le groupe REDD, qui cherche à définir les conditions d’une réduction des émissions dans la situation malgache pour entrer dans les accords de l’après Kyoto en 2013, semble le seul à pouvoir prolonger le processus du PNAE en assurant un financement important de la politique de conservation. C’est aussi une période d’approfondissement de la décentralisation, avec des responsabilités accrues transférées aux régions et communes (Bidou et al., 2008), mais pas de manière significative dans le domaine de l’environnement. Le rôle effectif de l’État est cependant à moduler dans le contexte malgache où, selon C. Bertrand et al. (2006), les économies informelles sont importantes et l’État de droit faible, fréquemment incertain, et peu à même de s’imposer aux « droits des pratiques ».
18Les politiques environnementales nationales sont, de ce fait, en partie dictées par les grandes ONG internationales de conservation (Dumoulin et Rodary, 2005), en réponse aux injonctions internationales qui s’expriment dans des arènes internationales où se négocient les stocks de carbone, les valorisations de la biodiversité, les droits à polluer. Madagascar n’échappe pas à ce constat.
Des dispositifs environnementaux à composante spatiale
19Les modalités de conservation, définies par les politiques environnementales à Madagascar, opèrent par une mise en défens spatiale des ressources naturelles. Elles se traduisent par une affectation de règles (exclusion, périodes d’accès autorisé, volumes ou qualités d’espèces prélevées) à des espaces (noyau dur, zone périphérique ou zonages à valorisation économique). Le dispositif spatial qui en résulte est un système de protection dont la gestion peut être soit centralisée (parc national, services des Eaux et Forêts), soit transférée à des communautés locales (communautés de base ou Coba2). Dans la configuration SAPM, les parcs nationaux gérés par le MNP (Madagascar National Park, ex-Angap) sont reliés entre eux par des corridors sans statut formel, mais qui regroupent des territoires de Coba, certains dans les zones périphériques des parcs, ainsi que des forêts (domaniales, classées, stations forestières) qui continuent d’être gérées par les services des Eaux et Forêts. La grande taille et la diversité des statuts de ces espaces, comme le nombre des institutions impliquées, rendent plus complexe leur gouvernance.
20Suivant l’exemple des aires protégées, les limites territoriales des Coba et les contenus de leurs zones d’usage sont définis au moment de leur création, à la signature du contrat. Mais, à la différence des parcs, le territoire des Coba peut s’étendre sur des zones déjà défrichées pour être cultivées. Le suivi de la dynamique de l’occupation du sol sur 20 ans pour le parc national d’Andringitra (Dadu, 2009), et sur 10 ans pour les premiers contrats de transferts de gestion, démontre que les limites ne sont pas respectées à ces échelles de temps, mais pour des raisons qui peuvent être extrêmement variées. Ce constat met en cause la pertinence de certains critères de gestion négociée du territoire. C. Blanc-Pamard et H. Rakoto Ramiarantsoa (2007) avancent plusieurs explications ; ces limites ne respectent pas les divisions territoriales ni les marques foncières pré-existantes et peuvent créer des conflits entre communautés voisines. Des conflits de juridiction peuvent également se présenter entre la direction des parcs et les services des Eaux et Forêts. Des confusions entre les parties prenantes proviennent aussi de perceptions différentes de l’espace (orientation, échelle, légende, couleur), qui font l’objet de recherches plus approfondies sur le raisonnement spatial.
21Si les limites extérieures restent fixées telles qu’elles ont été définies lors de la création des parcs ou de la signature des contrats de transfert de gestion, les surfaces et les affectations des zones d’usage interne peuvent être éventuellement modifiées (Hervé et al. 2009), jusqu’à autoriser des zones de culture dans des « périmètres de culture » ou dans d’autres franges du territoire, comme une mise en valeur accrue des bas-fonds en rizières ou la défriche de plantations de pin pour cultiver du manioc, afin d’éviter de défricher la forêt (Toillier, 2009).
Gestion locale, quelle responsabilité des institutions ?
22Suite au transfert de gestion institué dans les années 1990 mais appliqué surtout à partir de 2000, les Coba se sont trouvées en charge de la gestion des forêts, le plus souvent avec l’appui d’ONG, mais uniquement sur leurs territoires qui ne couvraient qu’une partie du massif forestier (Hervé et al. 2008). Entre les parcs, c’est donc un chapelet discontinu de Coba qui est chargé de la protection des forêts.
23Les dispositifs de conservation contractualisés sont signés pour 3 ans, renouvelables après évaluation à l’issue des 3 ans, pour une période de 10 ans. Dans la majorité des cas ils perdurent, sans avoir été évalués, après le départ des ONG qui les ont appuyés.
24Une Coba, en charge de la conservation sur un site de transfert de gestion, a plusieurs recours possibles, en cas de difficultés d’application des sanctions : les unités administratives du fokontany et de la commune, et les services des Eaux et Forêt qui restent l’instance technique de référence. Ces institutions, emboîtées lorsqu’il s’agit des structures administratives, ou au contraire en compétition pour une emprise spatiale lorsqu’il s’agit des ONG, constituent une chaîne de surveillance des infractions et d’application des sanctions, bornée par la Coba en première instance et la justice en dernière instance, la justice étant la seule instance habilitée à émettre un jugement et faire appliquer la loi in fine (Ganomanana, et al., 2011). Cependant, le transfert des cas vers des niveaux institutionnels supérieurs, censés être mieux respectés, n’est pas une garantie d’application de sanctions. Il faudrait pour cela que l’ensemble des maillons de la chaîne assume son rôle. Or l’absence de niveau politique national reconnu engendrant l’impunité, les autres acteurs de la chaîne de contrôle sont incités au laxisme. Pendant les périodes d’instabilité politique à Madagascar, la défaillance de la gestion de la forêt apparaît au grand jour et c’est le niveau de gestion locale qui semble résister le mieux.
25Par ailleurs, A. Toillier (2009) a montré qu’aucune des unités administratives actuelles (région, district, commune) n’a de limites en correspondance avec des ensembles forestiers cohérents (massifs, unités de gestion forestière, corridor forestier). Les fédérations de Coba, ensembles de Coba regroupées par proximité et correspondant à des régions naturelles et culturelles homogènes, ont été suscitées à des fins de gestion plus rationnelle par les ONG qui les ont appuyées, alors que les Coba pourraient passer sous la juridiction des communes, assurées de stabilité dans la durée, avec des maires élus qui répondent de leur mandat (Toillier et al., 2008). Même si les restrictions de l’accès et de l’usage des terres forestières ne constituent pas, pour les maires, un thème électoral, et si la proportion en forêt du territoire communal peut être très faible (Hervé et al., 2008), plusieurs arguments militent en faveur du regroupement de la gestion locale des dispositifs de conservation. La reconnaissance et la gestion des droits de propriété non titrée se font déjà au niveau de guichets fonciers communaux qui délivrent un certificat foncier par une procédure allégée et décentralisée. C’est aussi la commune qui gère le développement local (PCD, Plan communal de développement ; PLOF Plan local d’occupation foncière), même si les ressources allouées sont extrêmement limitées. La reconnaissance d’une capacité de gouvernance territoriale à la commune ou à des institutions intercommunales passerait sans doute par une relance de la fiscalité locale (Belvaux, 2007). Au titre de l’aménagement du territoire, la commune, déjà signataire de certains contrats de transfert de gestion, devrait pouvoir intervenir sur la gestion des zones de forêt non encore transférées de son territoire.
26On comprendra que la Coba n’est pas la seule à traiter des infractions mais que la responsabilité de l’ensemble des acteurs de la chaîne est engagée et que, de ce fait, les responsabilités sur l’efficacité du contrôle sont partagées. Dans ce dispositif, la commune est amenée à jouer un rôle majeur.
Des incitations économiques compensatoires
27La restriction d’accès à certaines ressources naturelles est accompagnée d’incitations économiques de nature collective, directes pour les zones périphériques des parcs et indirectes par les ONG en dehors des parcs. Dans un rayon de 10 km qui constitue approximativement la zone périphérique instituée par chaque parc, au moment de sa création, ces incitations proviennent des parcs (50 % des entrées aux parcs) et sont canalisées sous la forme de projets de développement (infrastructures productives ou de santé au profit des fokontany). Entre les parcs, dans les villages les plus accessibles, ce sont des ONG qui, sous des formes d’appui institutionnel très variées, mettent en œuvre des projets alternatifs à l’exploitation de la forêt.
28Payer pour conserver peut donc prendre des formes diverses à travers la quantité d’argent mobilisée, les modalités de paiement, mais aussi les catégories de bénéficiaires : faut-il punir les fautifs ou récompenser les comportements vertueux ?
29Les amendes prévues pour les contrevenants ont pour fonction de pénaliser les infractions et de dissuader les autres agriculteurs de défricher. L’efficacité de ce dispositif dépend de la capacité à repérer les infractions en payant la surveillance (gardes forestiers, images satellites de suivi), puis à établir un constat pour pouvoir appliquer une sanction suffisamment dissuasive. Punir les infractions revient donc à monnayer la nature dégradée, le zonage servant de cadre pour localiser les délits et les affecter à l’instance compétente.
30Un autre point de vue consiste à payer la prévention (alphabétisation, apprentissage, renforcement des sociétés locales et récompense pour une bonne gouvernance) et rechercher des alternatives économiques à l’abattis-brûlis. Mais comment rétribuer les paysans qui respectent les règles, alors que les compensations ont été pensées par les ONG comme des projets collectifs destinés à des groupes d’usagers, Coba ou fokontany ? Des solutions sont à rechercher dans toutes les activités économiques en dehors de la forêt, le contrôle de l’eau dans les rizières, la gestion sylvicole des reboisements ou des plantations, la gestion du feu et du pâturage dans les savanes, même si l’impact de ces actions est moins visible. Mais la valorisation durable de certaines filières de produits issus de la forêt, comme le miel, la soie sauvage, les ressources non ligneuses utilisées en vannerie et dans certains cas une exploitation rationnelle du bois seraient également une incitation forte à la préservation de la forêt ; ce n’est pourtant pas la voie qui a été choisie (Derycke, 2007).
31Ce dilemme de payer les fautifs afin d’éviter la récidive, ou ceux qui ne le sont pas encore pour les en dissuader, risque de se poser pour toute incitation financière, donc également dans le cas d’une rémunération pour services environnementaux. Les paiements pour services environnementaux constituent encore un domaine très récent exploré par le projet Serena3 de l’ANR (Agence nationale de recherche) ; ils exigent une clarification de la propriété de la forêt et une définition des mécanismes de paiement pour une rétribution effective des populations chargées de protéger ces écosystèmes. La forêt sur pied devient source de financement par l’écotourisme si elle est accessible et par sa fonction de puits de carbone (biomasse forestière, sols) si celle-ci peut être mesurée. Les dispositifs spécifiques à la mise en marché de la forêt préservée par le carbone stocké (Pirard, 2008) imposent des modalités de calcul souvent très lourdes, qui ne sont applicables qu’à des massifs forestiers très étendus, afin d’amortir les coûts de transaction (Méral et al., 2008). Une telle protection « financiarisée » de l’environnement risque de traiter en priorité des flux financiers sans expliciter les modalités de leur répartition, alors que les paysans riverains des forêts devraient être les premiers bénéficiaires de ces compensations (Pollini, 2009). Ces derniers ne seront sans doute pas partie prenante des négociations sur le dispositif REDD et des ONG se placent déjà comme intermédiaires sur ces nouveaux marchés.
32On ne sait pas non plus très bien évaluer les besoins. Ainsi, le bilan financier d’une aire protégée devrait permettre de déterminer les coûts d’entretien et de fonctionnement (Méral et al., 2008) mais celui d’un dispositif de conservation contractualisé (Méral et Rabearisoa, 2006) est limité aux dispositifs qui génèrent des revenus et pose des problèmes de méthode (évaluation multicritère, coûts, avantages) pour mesurer des indicateurs (Froger et Méral, 2007). Dans ces dispositifs, ce qu’il importe surtout de mettre en évidence, ce sont les flux générés par la conservation, leurs montants, leur répartition et qui en sont les bénéficiaires (État, parcs, contrôleurs, policiers, appareil judiciaire, caisse villageoise ou communale), en particulier quel pourcentage de ces flux revient finalement aux paysans riverains de la forêt (Pollini, 2009). Par ailleurs, la question reste posée de l’impact de cette nouvelle distribution des flux financiers pour la protection de l’environnement : s’accompagne-t-elle d’une réduction quantifiable de l’abattis-brûlis ou des autres formes de déforestation (mines, exploitation de bois illicite) ? Nous avons, dans les développements précédents, remis en cause certains paradigmes et présenté les éléments spatiaux, institutionnels et économiques des dispositifs environnementaux à Madagascar. Nous allons dans ce qui suit relier ces trois catégories d’éléments à des propositions de formalisations concernant, respectivement, la dynamique de l’occupation des terres, le contrôle institutionnel et la viabilité économique de l’économie familiale des populations riveraines de la forêt.
Les modèles dynamiques
33La simplification qu’entraîne la modélisation exige de gérer une tension entre une exigence de généricité suffisante (dé-contextualiser) et une aide à la résolution de problèmes concrets (re-contextualiser). Cette simplification peut aider à appréhender la complexité du système social. Dans l’élaboration de politiques qui résultent d’enjeux contradictoires, les modèles sont élaborés comme des références ou des arbitres neutres et crédibles. Au sein du programme MEM (IRD/Université de Fianarantsoa), nous avons abordé les transferts de gestion en combinant trois modèles dynamiques :
la dynamique de l’usage des terres à partir de la première défriche en forêt et jusqu’à la saturation de l’aménagement des bas-fonds en rizières qui autorisait jusqu’à présent la défriche des bas de versants ;
le fonctionnement institutionnel des unités de gestion impliquées dans les transferts de gestion ;
la viabilité économique des populations riveraines de la forêt à protéger, traduite par la capacité à reproduire le capital de la famille élargie (lignage, ancêtre commun) vis-à-vis de la génération suivante et des générations futures. Nous analysons pour cela l’acquisition et la transmission du capital commun d’une famille élargie riveraine de la forêt.
34Ces modèles dynamiques demandent, pour être calibrés, des séries longues de données fiables et comparables entre elles4.
Dynamique de la couverture forestière
35En pays betsileo, C. Blanc-Pamard et H. Rakoto Ramiarantsoa (2007) ont montré le lien entre l’aménagement de bas-fonds en rizières et la défriche des versants forestiers. Cette « hypothèse bas-fond » permet de caractériser indirectement la déforestation en mesurant l’extension des rizières qui implique une défriche des bas de versants jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de bas-fond à aménager. G. Serpantié et A. Toillier (2007), en mettant en relation les données de population et de surface en bas-fonds, ont repéré un objectif d’aménagement de 10 ares de rizière par habitant pour des communes situées au sud du parc de Ranomafana. Sur la base d’un échantillon de communes élargi au Cofav grâce à plusieurs images du satellite SPOT obtenues du programme CNES-ISIS (Hervé et al., 2010), un modèle d’automate cellulaire a été construit avec, comme entrées, la population de la commune et la surface en bas-fond à différentes dates et, comme sortie, la date de saturation des bas-fonds aménagés en rizières (Rakotoasimbahoaka, 2011). En reliant cette date de saturation à la densité démographique initiale des communes, on obtenait un moyen de généraliser ce résultat aux communes dont on connaissait la population et la surface une année donnée mais pas le détail de la dynamique d’occupation du sol (Rakotoasimbahoaka et al., 2010).
36Dans la situation de terroirs villageois dont la totalité des bas-fonds est aménagée en rizières, la défriche qui n’est normalement autorisée qu’en bas de versants se poursuit néanmoins sur les pentes, donnant lieu à des successions de culture et des successions post-culturales. Le modèle de transition à 6 états (fig. 1) d’occupation du sol (forêt, culture, jachère, herbe, rizière, plantation), inclut une transition quasi irréversible, l’aménagement de bas-fond en rizière et des immobilisations longues (10 à 20 ans de croissance des pins ou eucalyptus avant leur coupe ; 50 ans pour une régénération forestière complète). De ce fait, seules les transitions entre trois états, culture, jachère, herbe, ont été analysées en profondeur avec des outils mathématiques et informatiques car elles ont pu être reconstituées rétrospectivement sur un pas de temps de 20 à 30 ans depuis la première défriche, dans plusieurs bassins versants de la lisière forestière.
37V. Ratiarson (Ratiarson et al., 2007 ; Ratiarson 2011 ; Ratiarson et al., 2011) explore des modèles de transition d’états parcellaires, stochastique (chaînes de Markov), déterministe (automate temporisé) et plus détaillé (système multi-agent), en prenant soin d’expliquer à chaque étape ce que le modèle permet de conclure et ce sur quoi il bute, justifiant par là même le passage à la phase suivante. Ces modèles de transition d’occupation du sol mobilisent l’écologie et l’agronomie sur les conditions et la réversibilité des transitions, en particulier l’apparition d’un état herbacé 20 ans après la première défriche et l’importance que prennent des labours d’herbe en remplacement des défriches de jachère forestière, pour la mise en culture de nouvelles parcelles. Dans un contexte d’interdiction de l’accès à la forêt, les défriches se reportent en effet sur des recrûs forestiers de moins en moins âgés ou sont remplacées par des labours de couverture herbacée, ou même par des défriches de plantations dégradées de pins ou d’eucalyptus pour une culture de manioc.
38Des cycles culture-jachère se succèdent ensuite, bornés par un seuil d’intensité de mise en culture. Ce seuil, qui indique la baisse de fertilité engendrée par la culture successive, peut être estimé par le rapport du nombre d’années de culture C sur le nombre total d’années cultivables depuis la première défriche : Culture + Jachère intermédiaire + Herbe + Jachère finale. En cultivant au-delà de ce seuil, la production récupérée ne couvre plus le travail investi.
39Une tendance lourde a été confirmée, la résilience de la forêt humide de l’est. Après une mise en culture et en absence de feu ou de pâturage par les zébus, la régénération forestière se réalise jusqu’à une formation forestière proche de la forêt mature. Les deux freins à cette régénération sont la bifurcation herbacée maintenue par le feu et la possible invasion en l’absence de feu par un arbuste, l’anjavidy (Philippia sp.). Les pratiques culturales et le temps d’exploitation depuis la première défriche influent sur ces limites à la régénération (Randriamalala et al., 2011).
Les dynamiques institutionnelles du contrôle de la conservation
40Le transfert aux Coba de la gestion des ressources forestières pose la question du contrôle sur le long terme de la déforestation du corridor. L’application de sanction, qui est l’une des clauses du transfert, dépend dans un premier temps de la détection d’un dégât, la constatation d’une violation (certaines passent inaperçues), puis de sa qualification sur une grille de délits classés par ordre de gravité, mise en correspondance avec une grille de sanctions classées par ordre de sévérité, enfin de son application effective, qui peut être différée dans le temps par le processus même d’instruction et de vérification de preuves. T. Ganomanana (2009) aborde la question de l’efficacité de cette chaîne de contrôle (fig. 2) à partir d’une analyse de la dynamique des institutions chargées de la conservation (fig. 3).
41La forêt est supposée subir des dégradations du fait d’actions des paysans riverains ou d’agents extérieurs à la communauté villageoise, qui violent des règles préétablies. Qu’il y ait ou non violation de règles, la dégradation de la forêt est réelle. Lorsque aucune règle n’a été établie, on ne parlera pas de violation ; la dégradation se fait alors en toute impunité. Ces violations ne deviendront des infractions que si le coût du contrôle est pris en charge afin d’établir un constat. L’établissement d’un constat d’infraction est une condition nécessaire à l’application d’une sanction ; ainsi le recours à une clause d’autorisation dans des limites bien définies serait le seul cas où une violation de règles ne conduirait pas à un constat d’infraction. Enfin, le montant d’une compensation économique pourra être déterminé en regard de la sanction à laquelle s’expose le responsable d’une infraction.
42Le fonctionnement institutionnel (fig. 3) conditionne donc la chaîne de contrôle. L’effet dissuasif des sanctions ne peut se mesurer que dans le temps s’il peut être relié à une éventuelle diminution ou fin des dégradations de la forêt. L’analyse de ce fonctionnement institutionnel requière alors des outils mathématiques spécifiques car tout n’est pas défini : une dégradation peut ne pas être répertoriée comme violation, une violation peut ne pas être constatée, une violation constatée donc qualifiée d’infraction peut ne pas être sanctionnée.
43Dans ce domaine institutionnel, la modélisation doit prendre en compte l’historique des interventions institutionnelles ou au moins des « traces » du traitement des infractions et une connaissance de la dynamique des institutions elles-mêmes (stabilité, changement de stratégie, échanges et communications existantes entre elles).
Reproduction de l’économie familiale
44Avec la résilience de la forêt humide, une seconde tendance lourde a été identifiée dans le programme MEM : la logique foncière de mise en réserve de terre pour la génération suivante, par l’aménagement des bas-fonds et la défriche des versants ; c’est le travail investi qui garantit l’accès à la terre.
45Dans un contexte de croissance démographique, les grandes familles sont en compétition pour marquer le territoire forestier par des défriches qui sont des chantiers collectifs d’une équipe de défricheurs et non le fait d’un agriculteur isolé. L’équité intergénérationnelle peut être étudiée dans le cadre de ce paradigme betsileo : la transmission de la terre des ancêtres aux descendants par la famille élargie (lignage), sur le principe : « la richesse, c’est la terre et les enfants », en se demandant si cette transmission peut être encore longtemps pratiquée aux dépends du couvert forestier, dont on a pris conscience qu’il représentait une ressource limitée. Dans le contexte du corridor forestier de Fianarantsoa, la survie des populations riveraines n’est assurée que si la famille élargie parvient à constituer et transmettre un capital commun à la génération suivante.
46L’équation synthétique de la formation de capital commun est écrite pour une famille élargie (lignage villageois) vivant de la forêt (encadré 1). La fonction de revenu mesure l’excédent de la production par rapport à la consommation. Le niveau de consommation peut être estimé par la couverture des besoins en riz et en équivalent riz des produits de cultures pluviales.
Encadré 1
Viabilité économique d’une famille élargie en lisière de forêt
3 variables dynamiques
(1) S surface aménagée (défriche et aménagement des bas-fonds en rizière), telle que Fo (1900) - s (t) = F (t) forêt restante au temps t depuis un état initial en 1900 ;
(2) N population ;
(3) K capital commun.
4 variables de contrôle
(1) δ(t), δ(t) < N(t) < δmax. L’effort d’aménagement est limité par la capacité de travail individuelle des habitants.
(2) V(t), 0 < V(t) < 1. La proportion des jeunes hommes en âge de travailler qui migrent en dehors du corridor varie entre 0 et 1.
(3) τ(t), 0 < τ < τmax. Le transfert monétaire, en provenance de l’État ou des ONG, est compris dans une fourchette.
(4) r(t), Rmin < r(t) < Rmax. L’accroissement de population est borné.
Bilan du revenu familial
Population :
N’(t) = r(t) N(t) - v(t) N(t) : accroissement de population moins les migrants qui sont partis.
Éléments en négatif dans l’équation :
– c N(t) : consommation par personne et par an ;
– β s(t) d(t) : coût d’aménagement par hectare d’une surface aménageable, bas-fond en rizière ou forêt défrichée en culture.
Éléments en positif dans l’équation :
- μmin (s(t), γ (1 - v(t) N(t)) : la production dépend de la surface cultivée avec un rendement μ, considéré comme constant, sur la surface aménagée, ou la partie de cette surface que la population restante après migration peut aménager, γ est la surface maximum cultivable par homme et par an ;
– w v(t) N(t) : revenus annuels provenant des migrants, versés dans le capital commun ;
– τ(t) : transfert monétaire annuel, de l’État ou des ONG, versé dans le capital commun.
Équation du revenu familial :
K’(t) = - c N(t) - β s(t) d(t) + μmin (s(t), γ (r(t) - v(t)) N(t)) + w v(t) N(t) + τ(t)
Avec les 2 contraintes suivantes :
– Contrainte écologique : 0 ״ S ״ Smax ; Smax = Fo - Fmin.
La surface aménagée maximale représente la différence entre la forêt originelle Fo et la forêt minimal que l’on décide de préserver.
– Contrainte économique : K current < K ; Kmin " K/N, (K/N)’ ≥ 0.
Le capital accumulé par la famille se transmet aux descendants comme ce qu’ont transmis les ancêtres. L’objectif est de maintenir le capital par tête K/N, c’est-à-dire que chacun ne reçoive pas moins à chaque génération.
47On considère que la surface maximale cultivée n’est limitée que par la surface aménagée. Une surface récemment aménagée ne reste pas longtemps sans cultures ; le propriétaire fera tout pour la mettre en culture, en ayant recours si nécessaire au prêt et à l’entraide. L’aménagement concerne la défriche des bas de versants attenants au bas-fond et, ce qui prend plus de temps, l’aménagement du bas-fond en rizière (canaux de drainage, aplanissement, casiers et diguettes). Dans un second temps, une fois les bas-fonds saturés, des terrasses peuvent aussi être creusées sur les bas de versants pour aménager des casiers rizicoles, à condition de disposer d’eau d’irrigation en quantité suffisante. On peut donc considérer que la défriche prépare aussi ce second seuil après la saturation des bas-fonds, la conversion des bas de pente en terrasses inondées pour la production de riz.
48Ces deux étapes ont été modélisées, jusqu’à la saturation des bas-fonds (Rakotoasimbahoaka, 2011), et après la saturation des bas-fonds (Ratiarson, 2011). Dans l’équation du capital familial, elles sont regroupées dans l’effort global d’aménagement. Cet effort d’aménagement est lié à la satisfaction des besoins alimentaires d’une population croissante, mais il dépend aussi d’une décision d’investissement, de la capacité de payer pendant la totalité du chantier le riz des travailleurs journaliers, L’aménagement n’est donc pas représenté comme la conséquence automatique de la croissance démographique (Locatelli, 2000). Ce choix de ne pas relier directement l’aménagement à la population a pour conséquence de faire porter le contrôle sur la décision d’aménagement et non sur des mesures de régulation directe de la population (taux de natalité, âge de première grossesse, mortalité infantile). Par conséquent, la croissance de la population ne constitue pas dans le modèle une variable de contrôle ; on choisit simplement de la maintenir entre deux bornes minimale et maximale, par exemple entre 1 % et 3 % dans le cas du corridor forestier Cofav.
Application de la théorie de la viabilité
Principes théoriques
49La conservation de la forêt est-elle durable sans flux économique en direction des riverains de la forêt ? Nous avons vu comment des économistes s’efforçaient d’évaluer les coûts de la conservation des forêts selon le dispositif de conservation choisi (parcs, transferts de gestion, réserve privée), pour savoir si les paiements pour services environnementaux peuvent couvrir ces coûts et définir comment affecter les flux financiers ainsi générés. Or l’objectif de la conservation n’est plus uniquement dans les mains des biologistes, – définir la surface minimale de forêt à préserver pour conserver une certaine biodiversité –, il doit également garantir un revenu minimum pour l’agriculture vivrière dans des systèmes post-forestiers et agri-forestiers. Résoudre un problème de gestion durable revient alors à déterminer les politiques d’actions qui permettent de contrôler la dynamique du système de façon à conserver les propriétés souhaitées (Durand et al., 2011). Les modèles, que traite la théorie du contrôle, décrivent des dynamiques de systèmes en perpétuelle transition induite par des décisions qui peuvent être réactualisées en permanence. La théorie de la viabilité, sous-ensemble de la théorie du contrôle, a été mobilisée au sein du projet ANR Déduction5 (encadré 2), pour dégager des leviers d’action permettant de limiter la défriche forestière en trouvant les moyens d’infléchir les trajectoires afin qu’elles restent viables.
Analyse de viabilité
50Le système étudié, où interfèrent la démographie, l’économie et l’environnement, n’est pas, dans le contexte forestier betsileo, viable économiquement. Il est cependant possible de déterminer les politiques qui permettront de repousser le plus possible la date butoir après laquelle l’une ou l’autre des contraintes, physique (seuil de déforestation) ou normative (seuil de pauvreté), sera nécessairement violée (Martin, 2010).
51L’analyse de viabilité du système d’équations (encadré 2) a été conduite par C. Bernard (2009, 2011) et S. Martin (2010) dans le projet ANR. La variable démographique n’étant pas pilotable par un agent identifié est qualifiée de régulon et le modèle indique une population comprise entre deux bornes. Les seules variables de contrôle sont alors l’effort d’aménagement qui joue sur S et les transferts monétaires qui jouent sur K. Sans transfert monétaire (τ = 0), les trajectoires d’évolution du capital en fonction du temps ne garantissent pas d’équité intergénérationnelle, c’est-à-dire qu’elles n’assurent pas un maintien de ce capital à long terme, pour les descendants. En effet, le surplus de riz est investi dans l’aménagement, ce qui créé une surface supplémentaire de terre cultivable, mais ces surfaces aménagées ne sont pas nécessairement suffisantes pour absorber la croissance de la population. Elles sont de toute façon bornées par les surfaces disponibles, celles des bas-fonds aménageables en rizières et celles des versants défrichables sur la forêt. Le capital par tête K/P diminuant, les descendants recevront chacun moins que leurs parents. La viabilité économique n’est donc assurée qu’avec un transfert monétaire et l’équité entre générations ne devient possible qu’avec un transfert monétaire assez élevé. Seules les familles qui ont actuellement un capital par tête élevé peuvent ainsi assurer une transmission à leurs descendants. En conclusion, toutes les trajectoires sont viables mais sans équité entre générations, sauf pour certaines familles. Ce résultat est à confronter avec les récits des chefs de famille âgés qui prennent conscience des limites du système de succession basé uniquement sur les terres nouvellement défrichées en forêt. Par ailleurs, les résultats plus récents de C. Bernard (2011) montrent le lien entre le volume du noyau de viabilité et la valeur de la borne maximale du transfert monétaire. L’augmentation de la somme transférée, en augmentant la taille du noyau, rend donc plus probables des trajectoires viables.
Encadré 2
Brève introduction à la théorie de la viabilité (Aubin, 1996, 2010)
Le principal objectif du projet ANR Déduction est d’expérimenter des outils des théories mathématiques du contrôle, qui ont démontré leur efficacité en automatisme, dans le cadre de l’ingénierie du développement durable en les appliquant à des « systèmes évolutionnaires » observables en écologie et en économie. S. Martin (2004) a montré qu’une de ces théories, la théorie de la viabilité, permettait de calculer la résilience dans des modèles de systèmes écologiques et sociaux, en l’appliquant au coût de restauration de lacs pollués (eutrophisation). La théorie de la viabilité s’applique au contrôle de systèmes dynamiques soumis à des contraintes : x’ = f(x, u), x appartient à l’ensemble K des contraintes et u appartient à l’ensemble U des contrôles. Son objet est d’expliquer mathématiquement et numériquement les évolutions gouvernées par ces « systèmes évolutionnaires », des évolutions non déterministes mais soumises à des contraintes de viabilité (ou d’optimalité inter-temporelle), et de guider ces évolutions vers des cibles afin de les atteindre en un temps fini. Il s’agit essentiellement de faire émerger les rétroactions sous-jacentes qui permettent de réguler le système et de trouver des mécanismes de sélection pour les mettre en œuvre.
L’objectif est donc de définir la viabilité d’une « trajectoire » et de trouver les contrôles permettant de maintenir des trajectoires viables à long terme tout en évitant les catastrophes. Il ne s’agit pas de prévoir le futur mais de voir comment une situation initiale répond à des contraintes futures, quel est le cahier des charges à respecter pour satisfaire une solution future, quelles sont les précautions à prendre au voisinage de la frontière de viabilité ? Cette démarche qui prône l’apprentissage de la prudence induit évidemment un profond changement de perspective par rapport à la recherche d’états à l’équilibre ou d’un état optimal.
Champ d’action politique déduit de l’analyse de viabilité
52L’action politique peut modifier trois des variables de contrôle choisies dans le modèle de viabilité : le transfert monétaire, l’effort d’aménagement et la proportion de migrants trouvant du travail en dehors de l’exploitation.
Une première variable de contrôle est le transfert monétaire. Afin d’assurer un montant positif de transfert monétaire, deux sources de financement sont actuellement mobilisées par la politique environnementale malgache, les parcs (50 % des entrées dans les parcs) et les ONG en dehors des zones périphériques aux parcs. Mais les solutions offertes par les ONG dans les corridors forestiers restent pour l’instant insuffisantes pour pallier l’absence d’investissement de l’État. Les montants significatifs, attendus du marché du carbone, seront-ils plus élevés et surtout plus stables, alors que la part devant revenir aux paysans riverains reste incertaine ?
Une deuxième variable de contrôle est la décision d’aménagement. Du fait de l’interdiction de défriche, l’effort d’aménagement est limité, afin de maintenir une surface minimale en forêt Fmin, δ(t) = δmin. Par contre, pour les bas-fonds, l’aménagement en rizières n’est limité que par la disponibilité de bas-fonds à aménager. Les recherches ont montré que ces bas-fonds seront saturés à court ou moyen terme (Rakotoasimbahoaka et al., 2010). Cette limitation physique des possibilités d’aménagement, dans un scénario de forêt préservée, devrait faire pression sur les besoins d’augmentation des rendements à surface constante.
Une troisième variable de contrôle est la migration, en augmentant la proportion de migrants trouvant du travail en dehors de l’exploitation dans de nouveaux emplois peu qualifiés. Actuellement les offres de travail temporaire sont limitées au pays Tanala (est du corridor forestier) pour l’aménagement des bas-fonds en rizières. Les emplois générés par l’écotourisme sont limités au portage, au logement au village ou chez l’habitant, et au guidage mais avec l’obstacle de la pratique de la langue française. Par contre, des emplois peuvent être développés sur place dans la sylviculture (élagage, coupe « propre », valorisation des sous-produits en biomasse, sélection des rejets dans les bois plantés de pins et d’eucalyptus, collecte de feuilles pour l’extraction d’huiles essentielles), la transformation agro-alimentaire (c’est déjà le cas avec la distillation traditionnelle de canne à sucre en alcool, mais d’autres transformations pourraient être développées comme l’extraction d’huiles essentielles, le séchage des fruits et légumes, l’élaboration de produits à base de miel et de sucre dont la conservation ne pose pas de problème). Un autre objectif pourrait être de créer des emplois en dehors du village d’origine, et de passer par exemple d’un taux de migrants v(t) = 0,1 actuellement, à v(t) = 0,3 dans l’avenir.
53Les points 1 et 3 sont liés entre eux. Soit l’État ne consacre aucune ressource au développement rural et la facture à payer au titre des compensations à la conservation est élevée, soit l’État promeut un développement local, forme des agriculteurs et crée des emplois qui soulageront ses versements à titre de compensations. La seule possibilité de revenus extérieurs à l’exploitation des rizières et de la forêt provient actuellement du travail des jeunes migrants issus de la famille élargie. En supposant que l’augmentation de cette part des ressources familiales détournerait les paysans de la défriche de la forêt, la mesure du revenu provenant des migrations constituerait alors une référence utile pour évaluer le plancher des ressources nécessaires à la survie du groupe familial qu’il faudrait se procurer en dehors de la forêt. Un montant équivalent pourrait être apporté par l’État, pour détourner les paysans de la forêt. À défaut d’un tel transfert monétaire, l’État devrait favoriser la création de nouveaux emplois dans des secteurs d’emploi peu qualifié. Cette offre de travail équivalente est considérée comme pouvant absorber un surplus de population sans augmenter la pression sur la lisière forestière, et éviter ainsi des mesures d’expulsion de population du corridor.
54Concernant le point 2, l’action publique peut également jouer sur les conditions d’augmentation des rendements agricoles chaque fois qu’une marge d’augmentation est identifiée : l’accès aux engrais, la lutte contre les prédateurs et les maladies, les crédits de campagne, la formation et la vulgarisation technique. En effet, pour augmenter le revenu commun sans exploiter la forêt, la famille élargie peut difficilement réduire ses coûts : c (consommation par personne) et β (coût d’aménagement). D’ailleurs, plus les bas-fonds se raréfient, plus ils sont distants des habitations, encaissés, de taille réduite et plus ils deviennent coûteux à aménager pour une même unité de surface. Enfin d’autres interventions pourraient viser la diminution des risques de la production (cyclones, criquets), le stockage pour réduire la soudure et parer à la volatilité des prix des denrées alimentaires ou encore une politique de prêts de campagne à des taux non usuriers.
Discussion et conclusion : la modélisation environnementale, un outil du politique
55À travers un exemple de modélisation environnementale, le corridor forestier de Fianarantsoa, nous avons vu combien la combinaison de trois points de vue était essentielle : agro-écologique sur les dynamiques post-forestières d’occupation des terres, normatif et probablement juridique sur le fonctionnement institutionnel des transferts de gestion, économique enfin sur la viabilité d’une famille élargie en lisière de forêt.
56Nous avons montré que plusieurs modèles étaient nécessaires pour comprendre les processus dynamiques de systèmes complexes, chacun étant valide dans un certain domaine ne couvrant qu’une partie de la complexité, et qu’à partir d’une première formalisation simplifiée de la conservation (espaces-institutions-compensations), d’autres variables pouvaient être agrégées (foncier, démographie, etc.). Une exploration progressive et compréhensive de la complexité est, nous semble-t-il, préférable à un modèle reproduisant au mieux toutes les facettes de la réalité, mais qu’il serait ensuite très difficile d’utiliser et qui n’apporterait pas nécessairement de connaissances nouvelles sur les mécanismes enjeu. Dans tous les cas, des séries longues de données sont indispensables et leur maintien à jour devrait être une priorité des politiques.
57Dans cette exploration de la réalité avec des modèles scientifiques, le chercheur peut n’être pas du tout en phase avec ce qu’en attend le politique, qui cherche plutôt à mobiliser des experts au service de ses objectifs. Comment la modélisation environnementale peut-elle alors devenir un outil du politique ?
58À l’écoute des habitants du corridor forestier et en accédant aux représentations et aux vécus tels qu’ils sont et non tels qu’ils se décrètent, le chercheur traduit les processus et les dynamiques dans un autre langage, celui des modèles. Dans ce langage, des simulations sont envisageables ; elles sont utiles pour préparer la prise de décision. Leurs résultats peuvent être discutés et validés par les paysans eux-mêmes. Un travail commun nous semble nécessaire, entre chercheurs et politiques, autour de scénarios, afin d’aboutir à des protocoles discutés puis accordés, permettant d’évaluer l’impact de telle ou telle mesure passée ou future. Des scénarios qui mettent en relation les besoins des paysans concernés et les demandes des politiques pourraient servir de bases de négociation ou de plaidoyer pour construire de nouveaux modèles d’action.
59À l’écoute des populations du corridor et en réponse au politique, en maniant des variables économiques et d’impact environnemental, le chercheur est finalement conduit à assumer deux postures : interpréter les volontés du politique et proposer des choix possibles au politique.
Bibliographie
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10.1504/IJSD.2008.026501 :Notes de bas de page
1 Origines de la recherche : IRD, programme MEM Modélisation pour l'environnement à Madagascar, convention IRD/Univ. de Fianarantsoa (2007-2011), et projet ANR Déduction, Ingénierie du développement durable (2007-2010).
2 Les Coba ou Communautés de base sont des unités regroupant des usagers de ressources naturelles, dans le cas qui nous intéresse, des forêts, nouvellement créées à des fins de conservation.
3 Le projet Serena, Services environnementaux et usages de l'espace rural (2009-2012) financé par l'ANR Systerra, traite des modalités de paiement pour des services environnement des écosystèmes, autres que leur production intrinsèque, par leurs fonctions de régulation (climat, érosion, biodiversité) et leurs fonctions sociétales (patrimoniales, identitaires, récréatives, symboliques), tout en évaluant les conséquences pour les usagers du monde rural. Il regroupe des champs d'étude en Auvergne, Guadeloupe et Martinique en France, avec Madagascar et le Costa Rica.
4 Les données, chiffres ou cartes, sont rarement datées ; les confusions dans les légendes ne peuvent être levées qu'à la suite d'un travail rigoureux d'ontologie ; des unités de référence doivent être précisées pour les comparaisons.
5 Déduction : Viabilité et ingénierie du développement durable, projet de l'ANR, Développement durable (2007-2010), dirigé par le LISC du Cemagref, Clermont Ferrand, dans lequel l'IRD/université de Fianarantsoa était partenaire.
Auteur
dominique.herve@ird.fr
est docteur en agronomie (INAPG), chercheur à l’IRD, UMR Gred. Il travaille sur les dynamiques d’usage des terres en milieu montagnard et les transitions agraires (Andes, Madagascar), en particulier sur la jachère, en modélisant la gestion des ressources naturelles et l’environnement au sein d’équipes interdisciplinaires.
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