Introduction
L’internationalisation de l’environnement Madagascar, un cas d’école
p. 13-37
Texte intégral
1Il est admis par les naturalistes (Mittermeier et al., 1998 ; 1999) que sept pays dans le monde abritent une richesse écologique exceptionnelle, comparable à celle de l’Amazonie. Madagascar fait partie de cet ensemble. « Un sanctuaire de la nature », « un joyau écologique », « un coffre-fort de la biodiversité », « un écrin d’une biodiversité inestimable », « un paradis de la nature »... Telles sont quelques-unes des formules fortes qui qualifient la nature à Madagascar et que reprend Sophie Goedefroit (2002). Cela nous renvoie aux impressions des premiers explorateurs découvrant l’île à travers la personne de Philibert Commerson (1771) : « Puis-je vous annoncer que Madagascar est la terre promise des naturalistes ? La nature semble s’y être retirée dans un sanctuaire privé »1.
2La Convention sur la diversité biologique (CDB) signée au Sommet de la Terre à Rio de Janeiro (Brésil) en 1992 par plus de 150 États va avoir pour conséquence de sensibiliser les pays du Sud à la conservation de ce qui constitue désormais leur capital naturel et de les inciter à mettre en place des mesures de protection. Vingt années se sont écoulées depuis, marquées par des tentatives de construction d’une gouvernance internationale en même temps que s’impose à travers le monde le constat d’échec en matière de lutte contre l’érosion de la biodiversité.
3Dans ce contexte, Madagascar apparaît comme un lieu paradigmatique de la construction des politiques environnementales, ce qui nous a incités à questionner l’histoire environnementale malgache et plus précisément celle des récits2 relatifs à l’intrication des mondes du social et de la nature sur les plans matériel, organisationnel et symbolique. Pour contribuer à cette mise en perspective, nous proposons dans cet ouvrage de croiser les regards de chercheurs et d’acteurs d’horizons disciplinaires variés sur une « administration de la nature et des hommes3 » caractérisée par l’institutionnalisation des modes de gestion de la rareté, plutôt que par la valorisation des richesses naturelles, dans le cadre de politiques publiques, nationales et internationales. Il s’agit aussi de suivre la construction et le mode d’intégration de ces politiques environnementales en mobilisant un regard géopolitique, ce qui nous paraît être un apport inédit dans la production francophone en sciences sociales sur le pays4.
4L’ouvrage s’inscrit dans une démarche de distanciation par rapport aux questions relatives à l’environnement dans son seul sens biophysique. Il n’est pas directement question de cet environnement même si celui-ci est toujours à l’arrière-plan. Après une contextualisation de la question environnementale, Madagascar est ensuite présenté comme un cas d’école en la matière puis sont déclinés les grandes lignes de l’ouvrage et ses objectifs.
L’internationalisation de l’environnement
5À partir des années 1990, émerge un processus à la fois politique, idéologique et scientifique au sein des politiques nationales et internationales appelé « écologisation ». Il tend à faire de la conservation de la nature un principe légitime du « bien commun » et un référentiel d’action collective et de gestion publique. Ce processus se traduit par l’intégration croissante de préoccupations environnementales dans le paradigme du développement, comme dans le comportement et les pratiques des différents acteurs, à tous les niveaux d’organisation. Dans le contexte de la mondialisation qui semble aller de pair avec une forme de normalisation politique, cette tendance majeure confronte les États à la difficulté de trouver des accords autour de ces questions.
6Ainsi, Madagascar a été reconnu comme un pays engagé en faveur de la conservation. Depuis 1988, l’île a été classée par l’UICN parmi les 25 biodiversity hotspots (fig. 1) prioritaires pour la conservation des ressources naturelles (Mittermeier, 1998 ; Myers, 1988 ; Myers et al 2000). L’île fait aussi partie des Global 200 (les écorégions) définies par le WWF (Olson et Dinerstein, 1998) et du groupe des « mégadivers », ensemble de pays à l’origine de la création du groupe de travail sur l’accès et le partage des avantages tirés des ressources génétiques de la Convention sur la diversité biologique (CDB). Enfin, la mise en place d’une politique environnementale ambitieuse en 1989, connue sous le nom de PNAE (Plan national d’action environnementale), avec l’appui de la Banque mondiale, des agences internationales et d’organisations non gouvernementales, est reconnue comme une initiative pionnière.
L’impact du Millenium Ecosystem Assessment (MEA)
7Depuis la CDB (1992) et la diffusion du paradigme de développement durable, il n’y a plus de politique publique, d’action en partenariat, de projet de développement qui ne fasse mention de la nécessité de prendre soin des ressources de la nature. La mise en œuvre de la CDB repose sur la tenue de Conférences de parties (COP) qui réunissent les pays l’ayant ratifiée tous les deux ans pour évaluer les politiques mises en œuvre, définir de nouvelles règles, trouver des accords. Les controverses liées aux multiples initiatives conduites dans ce cadre (milieux à protéger, participation des populations locales, modèles de gestion, marchés à mettre en place, indicateurs à définir, modes de financement à instaurer...) comme des retombées souvent décevantes, ont pour le moment servi l’adhésion du monde politique à la notion de services écologiques (ou écosystémiques), propulsant une nouvelle génération d’actions. Reconnues à l’origine pour leur valeur intrinsèque, les fonctions écologiques ont été instrumentalisées, une approche anthropocentrée de la nature s’étant imposée avec le Millenium Ecosystem Assessment (MEA, 2005). Celui-ci dénonce les risques que la société fait peser sur la capacité des écosystèmes à fournir des services et alerte les politiques sur l’urgence d’établir et de valider une échelle métrique de la « biodiversité » pour pouvoir la conserver. Aucun État n’a encore été en mesure de freiner l’érosion de la biodiversité et avec elle, « la réduction du nombre de services essentiels fournis aux sociétés humaines »5. Le coût de la restauration de ces services, s’ils venaient à disparaître, est considéré comme prohibitif. Désormais, la mesure de la valeur des services écosystémiques doit « permettre l’articulation entre les approches biologiques de la biodiversité et l’analyse économique » (Chevassus-au-Louis, 2009) afin que l’économie s’empare de ces fonctions pour leur donner un prix et les mettre en circulation sur un ou des marchés. Allant dans ce sens, Rio + 20 (juin 2012) se construit autour de la promotion d’une « économie verte ».
8La dernière COP qui s’est tenue en octobre 2010 à Nagoya (Japon) a été représentative de la déception plus globale suscitée par dix-huit années de négociations autour de la conservation de la biodiversité. L’adoption d’un nouveau plan stratégique (2011-2020) à l’issue de cette COP 10 a représenté de ce fait presque une gageure puisqu’il a été question de continuer l’expansion des aires protégées pour arriver à une moyenne de 17 % contre 13,5 aujourd’hui (en faisant passer les aires maritimes de 1 % à 10 %). Mais ce sont surtout les questions économiques et financières qui ont été au cœur des négociations avec, sous condition de ratification par les nations signataires de la CDB, la création d’un fonds mondial pour financer les mesures préconisées, et surtout, l’adoption d’un protocole APA (Accès aux ressources et partage des avantages tirés de l’usage des ressources génétiques) très attendu. D’après plusieurs observateurs, la domination des représentations issues de l’économie néo-classique comme étalon majeur des problèmes d’environnement laisse entrevoir la fabrication d’un marché financier mondial de la biodiversité par la création d’actifs naturels. Dans le 18 cas malgache, le pays porte de grands espoirs sur les REDD6 et les Paiements pour services environnementaux (PSE) qui apparaissent comme une nouvelle manne financière alors que Madagascar, bien qu’engagé dans des expériences pilotes, n’est pas encore éligible : on se demande comment intégrer les PSE parmi les instruments de financement des activités environnementales.
9Après deux décennies de récits sur le développement durable, émerge un nouveau récit, celui du financement durable qui reconceptualise l’action environnementale en l’adossant aux mécanismes du marché.
Une ruralité sacrifiée ?
10L’image de biodiversité exceptionnelle et de nature exotique à laquelle renvoie Madagascar en fait une figure d’autant plus emblématique de la conservation que cette biodiversité est présentée en danger face aux agissements des sociétés paysannes, principales utilisatrices des ressources naturelles et à ce titre considérées comme responsables des dynamiques de défrichement ; l’île rouge, de la couleur de ses sols ferrallitiques mis à nu par l’érosion, doit « redevenir verte » (Plan d’action Madagascar, 2006). Haut lieu du tourisme balnéaire et de nature, Madagascar est un Pays très rural (PTR) comptant plus de 18 millions d’habitants dont environ 70 % de ruraux. Malgré un patrimoine paysager et culturel exceptionnel bien que négligé par les autorités politiques, l’écologisation de l’espace rural et des forêts progresse au détriment des populations locales et de leur territoire. « Le point de vue sur la nature devient un point de vue légitime sur le territoire qui supplante progressivement celui de l’agriculture » écrivait C. Deverre, en 2004, à propos de la France rurale. Dans de nombreux pays d’Afrique, comme à Madagascar, la construction du lien entre diversité biologique et diversité culturelle comme fondement des politiques environnementales – désigné par certains chercheurs par le concept de « bioculturalisme » – n’a pas eu lieu (Escobar, 1998). À l’interface d’un objet scientifique et d’un engagement politique, ce rapprochement – que l’on peut interpréter comme une tentative de rupture avec l’ontologie des modernes – postule a priori une continuité sociale que d’autres récusent comme n’allant pas de soi7.
11Sans dispositions nationales d’accès aux ressources biologiques, il ne sera pas non plus question de requalification de savoirs locaux ni de partage des avantages, contrairement aux pays d’Amérique latine et plus spécifiquement au Brésil où les articles 8 et 15 de la CDB ont été interprétés à l’avantage des communautés autochtones et locales (Aubertin et al., 2007). En 1988, la déclaration de Belém, signée par les scientifiques présents au congrès annuel des ethnosciences, avait donné une nouvelle légitimité à leurs travaux en reconnaissant l’apport des savoirs indigènes au développement et la nécessité de les protéger sur le même modèle que les droits de propriété intellectuelle du monde industrialisé. Le Brésil s’était ensuite distingué par la mise en place d’une mesure provisoire (MP) en 2001 pour réguler les droits d’accès aux ressources et savoirs traditionnels. Depuis, la création du Conseil de gestion du patrimoine génétique (CGEN)8 à l’échelle nationale est la source de nombreuses polémiques opposant les différentes parties (populations locales, chercheurs, industriels, commerçants). Rien de tel à Madagascar, en manque de devises et qui semble prêt à jouer la carte de la marchandisation des fonctions de la biodiversité (Alvarado et Wertz-Kanounnikoff, 2007) à la recherche d’un financement durable.
12À côté de ces constatations, il faut garder à l’esprit que la perception de la question environnementale à Madagascar hérite d’un lourd passé de foresterie coloniale. Les difficultés de compréhension et de dialogue entre les tenants du conservationnisme et le monde paysan relèvent de représentations du monde contrastées bien qu’inscrites dans les mêmes dualismes (forêt/agriculture et conservation/ruralité). L’histoire de l’occupation humaine de l’île (peuplement et frontière agricole) n’est évidemment pas étrangère au fait que les populations rurales malgaches soient aujourd’hui victimes d’une vision très restrictive de l’environnement. En assimilant forêt et environnement, les conservationnistes font de l’enclosure de la forêt le principal outil des politiques environnementales mettant ainsi un terme au processus d’occupation pionnière, élément constitutif des dynamiques agraires locales. Les populations rizicoles des hautes terres considèrent la forêt comme une réserve foncière et de ressources et intègrent cet espace à leurs pratiques socioculturelles. Comment dépasser ces oppositions entre représentations, nécessité de la subsistance et conservation ?
13Confrontées à leur propre histoire, les populations rurales malgaches n’ont pas été en mesure de faire valoir leurs pratiques socioculturelles sur la scène publique et (ou) de participer à l’élaboration d’une pensée socio-environnementale qui fasse sens pour eux. Leur histoire environnementale regorge de conflits et de pratiques de résistance locale face à des processus de transfert9 mais ne peut ignorer les continuités sociales dans les conceptualisations culturelles de l’objet « environnement » comme dans la fabrication des territoires. Les crises politique et environnementale seront-elles susceptibles de relancer un processus dépassant les dichotomies classiques ? Qui sera en mesure de repenser localement les modèles agricoles traditionnels et leur contribution à l’aménagement des territoires ? La remise en cause du paradigme agricole dominant et l’impulsion donnée au modèle agro-écologique ne sont-elles pas des opportunités historiques dont doivent se saisir les populations rurales et les responsables politiques ? Ces questions nous semblent essentielles à formuler dans un pays confronté à de grandes inégalités sociales et à une importante paysannerie.
Une crise environnementale
14Le Millenium Ecosystem Assessment (2005) met en garde contre la réduction du « capital naturel de la Terre », synonyme de crise environnementale. Les positions divergent quant à l’origine de cette crise. Une approche de sociologie politique situe cette dernière dans une démarche normative d’élaboration des « problèmes environnementaux » (Sarrasin, 2005). La crise est une construction sociale dans la mesure où l’environnement existe en tant que problème seulement « à partir du moment où des acteurs ou des groupes d’acteurs intéressent des pouvoirs publics à se mobiliser pour en faire un objectif d’intervention ». Concernant plus particulièrement les pays du Sud, les plus riches en biodiversité mais aussi les plus demandeurs de « développement », une logique malthusienne marque les explications des économistes de la Banque mondiale (Kevin et Schreiber, 1995) : l’appauvrissement des populations dans un contexte de forte croissance démographique accentue les pressions sur les ressources. La péjoration environnementale devient elle-même facteur d’appauvrissement car elle réduit les ressources naturelles dont disposent les populations. La conférence de Johannesburg en 2002 avait été l’une des manifestations fortes de ce lien établi entre pauvreté et environnement10 (Aubertin, 2005). Le consensus international sur la lutte contre la pauvreté formalisé par les OMD (Objectifs du millénaire pour le développement) a abouti à une réorientation des objectifs des politiques d’environnement à l’échéance de 2015 (Blanc-Pamard et Rakoto Ramiarantsoa, 2010 ; Gastineau et al., 2010). Enfin, dans la lignée des approches sensibles à la problématique des « biens communs » (Hardin, 1968 ; Ostrom, 1990), une autre perspective met l’accent sur les structures et les droits d’accès aux ressources. Les travaux de J. Weber et J.-P. Revéret (1993) à Madagascar se sont situés dans ce champ en attirant l’attention sur l’importance des types d’appropriation des ressources dans les relations des hommes avec leurs espaces de vie. Pour les deux chercheurs, les politiques forestières malgaches ont abouti de facto à une situation de libre accès pour les populations locales, instaurant ainsi une dynamique de dégradation des ressources forestières.
15Ainsi, la dimension planétaire de la crise environnementale établie par le Millenium Ecosystem Assessment peut être interprétée sous différents angles, les dimensions économiques, sociales et politiques faisant partie intégrante de son internationalisation.
Madagascar, un cas d’école ?
16Sur le devant de la scène depuis le début des années 1990, Madagascar est devenu un véritable cas d’école et un acteur courtisé du processus de marchandisation de la nature, aux enjeux économiques désormais mondialisés. En 2003, le président Ravalomanana proclamait à Durban, où se tenait le 5e congrès mondial sur les parcs de l’UICN11, sa volonté de tripler la superficie des aires protégées de son pays, de 1,7 à 6 millions d’hectares, et ce en seulement 5 ans (Méral et al., 2008). Cet engagement portait le niveau de conservation à 10 % de la surface totale du pays, conformément aux recommandations de l’UICN dont le pays est membre par ailleurs. Cela s’est traduit par la création du SAPM (Système d’aires protégées à Madagascar). Le maintien ou la réhabilitation de corridors forestiers qui relient les aires protégées dans le but de restaurer la connectivité est devenu l’outil privilégié de cette politique. Plus récemment, Madagascar a créé une fondation pour les aires protégées et la biodiversité (Andriamahefazafy et al., 2007) puis s’est porté volontaire pour mettre en place une stratégie REDD, comme outil de financement de la conservation.
Un pays ancré dans la conservation
17Depuis le xixe siècle, au nom de la protection de la forêt, l’administration française a imposé une réglementation très stricte associée à une politique répressive et exclusive vis-à-vis de tout contrevenant à la législation forestière (Bertrand et al., 2009). Elle sera poursuivie par l’État malgache après l’indépendance, en 1960.
18Un changement radical intervient en 1975 avec l’orientation prônée par la Charte de la révolution socialiste malagasy et la nationalisation des activités économiques sous la présidence de Didier Ratsiraka. Le slogan « la terre à celui qui la travaille » est perçu comme une incitation à de nombreux défrichements et le relâchement administratif qui a accompagné la décentralisation des pouvoirs voit les cultures sur abattis-brûlis, pourtant décriées de longue date12, se développer (Rakoto Ramiarantsoa, 1995). Au début des années 1980, les discours officiels relient la dégradation des ressources forestières à la pauvreté des populations. C’est ainsi qu’en 1984 fut rédigée et adoptée la Stratégie nationale de la conservation et le développement durable (SNCDD). Les projets d’aménagement du territoire se fondent alors sur une approche générale de conservation et de restauration des sols, associée à la gestion et à la protection des forêts. À la même période, Madagascar se tourne vers les institutions issues des accords de Bretton Woods et, avec l’appui de divers bailleurs de fonds, s’investit dans des actions de conservation et de développement intégré, en y associant les populations. Il en résulte le projet Gestion et protection des forêts (GPF) à partir de 1989 et surtout la conception du Plan national d’action environnementale (PNAE). Appuyé par la Banque mondiale, les agences internationales et les organisations non gouvernementales, le PNAE est considéré comme une initiative pionnière. La Charte de l’environnement, adoptée sous forme de loi d’État, en constitue le cadre général d’exécution. Elle définit les objectifs, la stratégie à mettre en œuvre et les trois Programmes environnementaux (PE) quinquennaux à réaliser sur 15 ans. Ces dispositions institutionnelles expriment clairement l’« objectif essentiel de réconcilier la population avec son environnement en vue d’un développement durable » (Art. 6 de la Charte de l’environnement, ministère de l’Environnement, des Eaux et Forêts, 2004). Il s’agit d’inverser la « spirale de dégradation » en « intégrant la politique de l’environnement dans le développement global du pays » au bénéfice des populations les plus démunies par la conception de politiques de lutte contre la pauvreté. Si le premier PE reste conservationniste en substance, le deuxième innove en introduisant la gestion communautaire des forêts en réponse à une demande sociale forte de valorisation de « la capacité communautaire ». L’instrument légal de cette disposition est la loi Gelose (1996) fortement soutenue par la coopération française. Dans la foulée du Sommet de Rio 1992, de grandes espérances ont été exprimées vis-à-vis de cette foresterie communautaire (Ostrom, 1990) et des experts ont été mobilisés pour accompagner ces expérimentations sociales (Buttoud, 1995). Les propositions de transfert de gestion (Weber, 1995 ; Bertrand et Weber, 1995) feront de la Grande Île un pays pionnier « en matière de délégation de gestion des ressources naturelles, dans la sous-région de l’Afrique de l’Est » (Bertrand, 1999). Les ONG internationales et l’aide publique au développement sont centraux dans le financement de ce programme.
19Depuis 2009, le pays est pourtant mis à l’index car sa situation rime avec désastre environnemental (Draper, 2010 ; Randriamalala et Liu, 2010). Les chiffres qui circulent depuis des décennies dénoncent la destruction continue de la forêt. Les pertes annuelles restent importantes et oscilleraient entre 100 000 ha et 200 000 ha (Perrier de la Bâthie, 1921 ; FAO, 2002 ; Razanaka et al., 2001). Ce débat ancien auquel participèrent en leur temps les ingénieurs forestiers et scientifiques français est toujours d’actualité (Pollini, 2010).
Crise politique et désastre environnemental
20Au moment du renouvellement du PNAE (2009) et de la recherche de nouvelles sources de financement pour la conservation, le bilan de presque vingt années de politiques environnementales est mitigé tandis que l’instabilité politique et la pauvreté s’imposent comme des données structurelles. Les grandes ONG de la conservation ont pris pied à Madagascar et ont tendance à exclure les populations des territoires où elles conduisent des programmes de conservation. C’est le « retour aux barrières » après le constat d’échec des expériences de gestion participative (Hutton et al., 2005 ; Aubertin et al., 2008). Malgré une poursuite de transferts de gestion de forêts aux populations rurales, les attentes suscitées par ces initiatives ont souvent été déçues et de nombreuses critiques remettent en cause le bien-fondé des approches communautaires (Maldidier, 2001). De manière parallèle, l’île a rejoint le cortège des pays confrontés à des situations « d’accaparement des terres »13, l’ambiguïté des droits fonciers locaux autorisant ce type de transaction. Depuis la crise politique entraînant le remplacement, en mars 2009, du président Marc Ravalomanana par Andry Rajoelina, actuel dirigeant de la Haute autorité de transition (HAT), la communauté internationale qui a condamné ce coup d’État a suspendu ses financements à l’exception de l’aide humanitaire. Le service public de l’île, y compris celui en charge de la préservation de la nature, s’est alors quasiment effondré. Les observateurs notent que les sites riches en biodiversité ont été la cible, à des niveaux jamais égalés, d’exploitation illégale de bois tropicaux, bois de rose, palissandre et ébène, dans des parcs nationaux et des aires protégées (Draper, 2010 ; Randriamalala et Liu, 2010), spoliant les communautés qui en dépendent. La gestion de l’environnement est conditionnée à l’arrivée de devises pour financer le développement durable et maintenir l’autorité de l’État. L’inscription des forêts de l’Atsinanana (forêts humides comprenant six parcs nationaux répartis le long des marges orientales de l’île) sur la liste du patrimoine en péril par le Comité du patrimoine mondial de l’Unesco (2010) devrait permettre de bénéficier à nouveau d’un financement international : il s’agit de trouver les moyens d’empêcher les coupes illicites de bois et le braconnage visant les lémuriens, une espèce menacée.
21Madagascar est ainsi confrontée à la question du financement de sa politique de conservation, elle-même en lien avec des dispositions supranationales. « Verdir la grande île rouge » (Kaufmann, 2008) ne se fait pas en dehors de l’arène des structures dédiées à ces questions. L’ambition de cet ouvrage est de soulever le voile de la construction des politiques environnementales dans ce contexte de mondialisation, de crise et de ruptures à partir du cas malgache, que nous considérons comme paradigmatique, au même titre que peut l’être le cas amazonien, bien que son contraire.
Les postures défendues
22En privilégiant une lecture géopolitique de la question environnementale, l’ouvrage attire l’attention sur la façon dont ces deux dimensions – géopolitique et environnement – se lient, se relient ou se délient dans un pays aux enjeux environnementaux particulièrement sensibles. Depuis le Sommet de la Terre, les relations des sociétés à la nature sont devenues problématiques et le cas d’école malgache nous éclaire sur les déplacements qui s’opèrent face à ces nouvelles configurations.
Les objectifs
23Le regard que nous posons est double. Le premier se penche sur la compréhension des relations des hommes à la nature et des hommes entre eux en mobilisant la notion de gouvernementalité proposée par M. Foucault (2004 a, 2004 b), pour rendre compte de l’intériorisation des obligations ou des valeurs par les individus eu égard à la norme environnementale et d’une capacité à gouverner. Cette démarche est aussi présente dans la notion d’« environnementalité » (environnementality) proposée par A. Agrawal (2005) et que l’on pourrait traduire ici en termes de gouvernementalité environnementale. Celle-ci ne repose pas uniquement sur des institutions formelles, mais s’exerce aussi de manière diffuse dans des réseaux d’interdépendance complexe. La gouvernementalité réintroduit le politique là où la gouvernance efface le pouvoir et la profondeur historique en laissant supposer que tout est négociable ou équitable. On doit reconnaître que les oppositions entre une paysannerie qui façonne le territoire et des espaces de nature protégés sont loin d’être apaisées. Il est difficile de croire aux vertus d’un marché qui serait efficace en termes de redistribution des richesses et de conservation de la nature, tant la réalité est éloignée de ce type de « croyances ». La transition vers ce modèle est loin d’être acquise et risque de buter sur les mêmes impasses que les programmes précédents.
24Le second regard porte sur la dynamique scientifique elle-même : la réflexion s’inscrit dans un continuum connaissance/action que dessine depuis plus d’une décennie une « science globale » pensée et organisée au niveau mondial, au-delà des collaborations internationales habituelles et quels que soient les paradigmes et les contraintes des disciplines impliquées. L’internationalisation de la recherche renforce les liens de celle-ci avec le politique dans des questions touchant le devenir de l’humanité14. L’implication de la recherche dans l’élaboration de jeux de scénarios, outils considérés comme indispensables à l’action, est une réalité de plus en plus prégnante.
25Il s’agit plus globalement de comprendre comment l’entrée en politique de l’environnement (Pinton, 2007) redistribue les pouvoirs à l’échelle des territoires. Les normes internationales reconfigurent ces derniers et contribuent en même temps à l’émergence de nouvelles formes de gouvernement. Ces inflexions génèrent par ailleurs des orientations complexes, comme l’expansion des espaces de conservation dans un contexte politique d’implication des communautés locales dans la gestion des ressources (Smith et Scherr, 2002). À quels groupes sociaux bénéficie réellement la requalification territoriale par l’environnement, que ce soit dans le champ de l’économique ou de l’accès à de nouveaux droits ?
Une approche géopolitique du triptyque normes/acteurs/territoires
26La notion de géopolitique relève de plusieurs courants de pensée. J.R. Kjellen (1905) s’inspirant de F. Ratzel (1901) donne au mot Geopolitik son sens originel. Il s’agit de l’étude de l’État considéré comme un organisme vivant. La géopolitique considère l’influence des facteurs géographiques sur la politique et établit un lien direct entre l’épanouissement d’un peuple et l’espace vital (Lebensraum) dont il a besoin, l’idée fondamentale étant que le Lebensraum opère comme un sélecteur de traits culturels selon une perspective darwiniste15. L’école française (Lacoste, 2006 ; Laval, 1994) s’en distingue en mettant l’accent sur les intentions collectives pour mettre en évidence des rapports de force et des rivalités de pouvoirs territorialisés. Elle met les multiples échelles spatiales et temporelles des pouvoirs et des territoires au centre de son analyse (Fabre, 2009).
27L’intérêt porté aux changements d’échelles et aux pouvoirs « dans les négociations entre acteurs à propos des questions environnementales » (Bryant et Bailey, 1997), rapproche l’analyse géopolitique de la démarche en « écologie politique » qui « recherche du politique dans les causes, conditions et effets des changements environnementaux ». Historiquement distinct de ce qui a d’abord représenté un courant politique porté par les Verts en France, la Political Ecology ou PE regroupe les scientifiques qui étudient les relations de pouvoir à propos de la gestion de l’espace et de l’environnement en s’appuyant sur une approche historique et en combinant plusieurs niveaux d’analyse (Robbins, 2004). Leur approche conjugue les sphères politiques, technologiques, économiques et sociales dans la lecture des rapports hommes/nature (voir Christian Kull, ce volume). Rarement référencés dans des écrits majoritairement issus du monde anglo-saxon, les théoriciens français qui se reconnaissent dans cette posture scientifique se sont mobilisés pour devenir visibles et rejoindre ce qui constitue aujourd’hui un véritable « champ rhétorique spécifique » (Whiteside, 2002 cité par Chartier et Deléage, 2010).
28Dans cette approche géopolitique, les auteurs sont confrontés à des objets partageant les caractéristiques suivantes :
La première est celle du temps. Madagascar s’inscrit dans une histoire de l’environnement faite de ruptures, bifurcations, linéarités où domine le récit d’une destruction de la nature. Cette histoire de nature exotique (Kull, 2000) s’écrit dans des périodes et des temporalités cadrées au sein de l’arène multilatérale et déclinées en agendas. L’environnement, désormais condition du développement, doit assurer la durabilité des ressources.
L’alliance des disciplines est au cœur de l’ouvrage. Les textes montrent de nombreux rapports de connivence : économie, politique et histoire ; écologie et sociologie ; droit de l’environnement ; économie de l’environnement ; agronomie et modélisation ; géographie et écologie politique. Ils témoignent de l’élaboration d’une phase de recherche post-interdisciplinaire, phase de recomposition des savoirs sur la nature, la technique et la société qu’exige la nécessité de saisir les enjeux environnementaux actuels. D’une telle recomposition, peuvent apparaître d’autres disciplines diagonales qui dépassent le principe d’interdisciplinarité pour se constituer en savoirs post-disciplinaires16.
Enfin, le principe de connectivité, issu de l’écologie, a rejoint le monde des sciences sociales qui le présente comme la mise en relation de niveaux d’action et d’espaces différents.
29La combinaison normes/acteurs/territoires constitue un triptyque systématique accompagnant la question environnementale, telle que nous l’abordons dans cet ouvrage
30La notion de normes est adossée à la conservation de la biodiversité, expression clé des politiques environnementales. Ce n’est pas tant la biodiversité en elle-même qui nous mobilise mais ce qui se proclame et se met en place en son nom. Garante de la poursuite de l’évolution biologique pour les scientifiques, patrimoine naturel dont l’homme a l’entière responsabilité pour certains, source de richesses économiques pour les autres, la biodiversité s’est imposée dans la rhétorique collective et est devenue une norme, un critère d’évolution positive des systèmes écologiques ainsi que le reconnaît la CDB. Un référentiel de pensée se constitue à l’échelle planétaire, conçu en grande partie au sein des organismes et programmes comme le Pnue, le WWF et l’UICN et à travers les conventions et conférences internationales. La difficulté de constituer un monde commun sur ces bases peut devenir un problème à l’échelle locale. Comment la construction d’un ordre politique global de gestion du vivant s’accorde-t-elle à des dynamiques locales dans le sens d’une écologisation des pratiques ? On constate dans de nombreux pays l’apparition d’un paysage institutionnel instable avec la tentative via la CDB de définir des règles d’accès aux savoirs locaux, aux ressources biologiques et aux territoires. Suivant les lieux et les dispositifs, s’installe une remise en cause des relations de pouvoir « traditionnel » associée à l’affaiblissement de la légitimité de certains acteurs et cela au sein des administrations, dans les relations entre gouvernés et gouvernants ou encore au sein même des populations locales.
31La deuxième notion, celle d’acteurs, renvoie au constat de la fin du monopole étatique de l’action publique. Tel est le cas pour certaines populations locales, métamorphosées en acteurs potentiels du développement durable par les savoirs qu’elles véhiculent sur la nature mais aussi et surtout par leur proximité quotidienne avec celle-ci (Pinton, 2009). Ainsi, la construction des aires protégées sous contrôle des populations résidentes au Brésil repose plus sur le pari de leur intégration au processus politique que sur la certitude du caractère conservatoire de leurs pratiques. Au-delà des discours et des professions de foi, il est important de pouvoir identifier ces acteurs, de mesurer leur hétérogénéité et ce qu’elle suscite. Plusieurs niveaux de réalité sociale sont en effet en jeu. Portées tantôt par les États qui jouent le rôle de facilitateur, tantôt par des médiateurs à cheval entre plusieurs univers de sens, le cas des dynamiques participatives est particulièrement important à saisir. Que se joue-t-il dans ces interactions et ces mises en confrontation. L’usage aujourd’hui galvaudé de la notion de « gouvernance » renvoie à la complexification de la façon de gouverner en même temps qu’il exprime un questionnement sur le rôle de l’État, sur le déplacement de la frontière entre action publique et action privée par la multiplication de normes privées (référentiels, accords volontaires, labels, etc.) ou d’actions collectives se déroulant en dehors du cadre de l’action publique traditionnelle.
32Troisième et dernière notion, celle de territoires, devenue ces quinze dernières années un concept étroitement lié à la gouvernance de la biodiversité. L’évolution des modalités d’intervention de l’État s’accompagne de « l’émergence de nouveaux espaces politiques et l’apparition de dispositifs politiques qui ne s’inscrivent plus dans la limite des États-nations » (Abélès et Pandolfi, 2002). Dans le cadre de notre propos, le territoire est approché comme instrument du développement durable. Les politiques environnementales mettent en place des dispositifs territorialisés qui entraînent des recompositions et des reconfigurations. Elles convoquent le territoire comme nouvelle entité de gestion qui intervient en tant qu’opérateur, vecteur ou encore opportunité de changement. Le territoire est aussi un espace de mise en réseaux de lieux, autrement dit un territoire réticulaire, illustré par le Système des aires protégées à Madagascar (SAPM) depuis 2003. Dans ce pays, la spatialisation est une manière de retisser des liens entre éléments isolés, de créer de la « connectivité » : de la réserve au parc national, en passant par les corridors et les Paiements pour services environnementaux. Ce qui retient notre attention est bien l’idéologie territoriale à l’épreuve des politiques environnementales et la recherche de l’optimum territorial, du « gabarit » adéquat pour la conservation de la biodiversité. Il s’agit de savoir si les territoires « à l’épreuve des normes » (Boujrouf et al., 2009) peuvent être eux-mêmes source de changements, s’ils peuvent activer du changement et non pas seulement être des formes ou des supports d’adaptation aux changements qui seraient imposés d’ailleurs. L’ouvrage se décline en trois parties et le propos concerne l’espace terrestre. Les auteurs se répartissent entre des chercheurs qui analysent les facettes complémentaires de la conservation et des acteurs nationaux qui focalisent leur attention sur les questions de développement en lien avec la conservation environnementale. Au fil des contributions, la mise en écho de postures de recherche diversifiées permet d’interroger les modalités de construction et de mise en œuvre de projets politiques environnementaux.
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 Lettre du 18 avril 1771 adressée à Jérôme de Lalande, astronome et membre de l’Académie royale des sciences.
2 Le récit dont il est question ici renvoie renvoie à une narration basée sur une succession de faits, d’événements, et d’actions, que l’histoire alimente. L’analyse des interactions nature/société portent la problématique environnementale.
3 Titre emprunté à un programme de recherche mené dans le cadre de l’ACI « Sociétés et cultures dans le développement durable », ministère de la Recherche, 2004-2007.
4 On doit citer le numéro spécial d’Études rurales (2007, n°178) consacré à Madagascar qui interroge le positionnement des sciences de l’homme dans la problématique renouvelée du développement durable à partir du constat réitéré de « l’inadéquation des mesures globales du développement, qui prétendent pourtant coller au plus près de la réalité locale » (p. 21).
5 Voir les perspectives mondiales de la biodiversité (GB03) publiées par le Pnue.
6 Le REDD est un mécanisme financier destiné à réduire la déforestation et la dégradation des forêts des pays en développement. Il a été proposé lors de la Conférence des parties de la convention cadre sur les changements climatiques (COP 13, Bali, 2007). Depuis 2008, le programme Forest Carbon Partnership Facility FCPF de la Banque mondiale, auquel ont souscrit 39 pays dont Madagascar, teste des systèmes d’incitations positives pour développer des stratégies de REDD.
7 Consulter sur ce thème l’article de F. Kohler (Natures Sciences Sociétés, 2011) et le débat qu’il a suscité.
8 Un conseil interministériel attaché au ministère de l’Environnement fut créé pour encadrer et appliquer la mesure. Toujours en vigueur, cette MP constitue le principal instrument juridique relatif à l’accès aux ressources génétiques.
9 S. Goedefroit et J.-P. Revéret (2007 : 13) se réfèrent volontiers au terme de « détournement » de mesures au niveau le plus local, terme selon eux plus approprié car il renvoie à l’inventivité et la capacité de renouvellement et d’innovation des sociétés locales confrontées à des projets de développement.
10 Cette approche est contestée par Juan Martinez Alier (2002) qui défend l’idée d’une écologie des pauvres : la durabilité écologique s’accommode mieux de la pauvreté que de la richesse. On peut ainsi adhérer à l’idée que les pays à forte « empreinte écologique » sont les plus gros pollueurs.
11 Le titre du congrès était Au-delà des frontières.
12 En 1881 déjà, sous le régime des royaumes merina, le code des 305 articles interdit la pratique de l’agriculture sur brûlis (le tavy) sur l’ensemble de l’île, sous peine de « mise aux fers » (Blanc-Pamard, Rakoto, 2003). Les administrateurs coloniaux fustigeront aussi ces pratiques qui feront l’objet d’une forte répression.
13 En novembre 2008, la compagnie sud-coréenne Daewoo a annoncé avoir sécurisé un bail de 99 ans sur 1,3 million d’hectares de terres à Madagascar. La cession de ces terrains serait gratuite en contrepartie d’un investissement de 6 milliards de dollars sur 25 ans. Cette affaire a fait l’objet de controverses auprès de la population et de la société civile. Elle figure parmi les éléments de contestation de l’ancien régime et la transaction a été par la suite annulée par le nouveau régime en place (voir Ratiaray et Rambinintsaotra, ce volume).
14 On observe la multiplication de rapports scientifiques internationaux ayant pour ambition de sensibiliser les politiques à des problèmes de société : MEA, 2005 ; OMD, le rapport Stern, le rapport GOB2 ; le cahier technique de la CDB (scénarios de biodiversité : projection des changements de la biodiversité et des services écosystémiques pour le xxie siècle), etc.
15 C.P. Kottak (1980) se rapproche de cette perspective dans son analyse conduite dans le sud des hautes terres malgaches : les conditions naturelles sélectives ont déterminé l’histoire de quatre royaumes différenciés à partir d’une entité sociale homogène.
16 Voir les réflexions du géographe G. Bertrand (2002) sur une science de l’environnement « qui combine à un instant donné des éléments divers empruntés à différentes disciplines pour construire un champ d’investigation transversale ».
Auteurs
cbp@ehess.fr
est géographe, directrice de recherche au CNRS (Centre d’études africaines) et membre associé de I’UMR Gred. Elle s’intéresse à l’évolution des rapports nature/société. Ses recherches portent sur la gestion de l’environnement et sur les reconfigurations des savoirs, des pouvoirs et des territoires que les politiques environnementales induisent dans l’espace rural, principalement à Madagascar.
Florence.Pinton@agroparistech.fr
est sociologue, professeur à AgroParistech depuis 2008 et responsable de l’UFR Sociologies au sein du département de sciences économiques, sociales et de gestion (SESG) après avoir été quatre années en détachement auprès de l’équipe de l’IRD, Politiques de l’environnement à Orléans. Ses thèmes de recherche traitent des modes de valorisation de la nature et des politiques de conservation de la biodiversité en France et en Amazonie brésilienne. F. Pinton a notamment publié La construction du réseau Natura 2000 en France (la Documentation française 2007) et, avec C. Aubertin et V. Boisvert, Les marchés de la biodiversité (IRD Éditions 2007).
herve.rakoto@ird.fr
est géographe, professeur à l’université de Bordeaux-3, après un détachement auprès de l’IRD (UMR Gred). Ses recherches portent sur la connaissance et la compréhension des relations que les sociétés tissent avec leurs territoires selon trois axes : la gestion des ressources naturelles, les recompositions spatiales liées aux politiques environnementales, les dynamiques des sociétés rurales. Il est l’auteur de plusieurs articles et a coordonné l’ouvrage Ruralités Nords-Suds : inégalités, conflits, innovations (Paris, L’Harmattan, 2008).
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Le monde peut-il nourrir tout le monde ?
Sécuriser l’alimentation de la planète
Bernard Hubert et Olivier Clément (dir.)
2006
Le territoire est mort, vive les territoires !
Une (re)fabrication au nom du développement
Benoît Antheaume et Frédéric Giraut (dir.)
2005
Les Suds face au sida
Quand la société civile se mobilise
Fred Eboko, Frédéric Bourdier et Christophe Broqua (dir.)
2011
Géopolitique et environnement
Les leçons de l’expérience malgache
Hervé Rakoto Ramiarantsoa, Chantal Blanc-Pamard et Florence Pinton (dir.)
2012
Sociétés, environnements, santé
Nicole Vernazza-Licht, Marc-Éric Gruénais et Daniel Bley (dir.)
2010
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Acteurs et territoires
Jérôme Lombard, Evelyne Mesclier et Sébastien Velut (dir.)
2006