Annexe 2. Cahier des charges de l’expertise collégiale
p. 243-249
Texte intégral
INTRODUCTION
Le contexte de la saisine
1L’extension rapide de plusieurs maladies transmises par des insectes vecteurs concomitante à une extension progressive de l’aire de répartition de certaines de ces espèces a provoqué une recrudescence des maladies vectorielles au cours de ces dernières années. Cette menace constitue une préoccupation majeure de santé publique, tant dans sa composante humaine qu’animale, et rend nécessaire de procéder à une véritable « refondation » de la politique de lutte antivectorielle.
2Quatre ministères et un secrétariat d’État – le ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire ; le ministère de l’Agriculture et de la Pêche ; le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ; le ministère de la Santé, de la Jeunesse et des Sports, et le secrétariat d’État chargé de l’Écologie – ont, par lettre en date du 18 janvier 2008, saisi conjointement l’Institut de recherche pour le développement (IRD) afin de mener une réflexion très large devant déboucher sur des propositions pour une refonte de la politique de lutte antivectorielle en France (régions métropolitaines et régions ultra-marines). Le ministère de l’Intérieur, de l’Outre-mer et des Collectivités territoriales s’est associé secondairement à la saisine.
3La demande porte sur deux formes classiques d’une expertise en santé publique avec, d’une part, une expertise des connaissances et, d’autre part, une expertise des décisions possibles et des conditions de mise en œuvre. Il s’agira de procéder à un état des lieux des structures, des pratiques, des moyens actuels de surveillance entomologique et de leurs points critiques, des méthodes existantes et opérationnelles, ainsi que des modalités de lutte antivectorielle actuellement utilisée. Sur la base de cet état des lieux et d’une hiérarchisation des risques pour la santé humaine et animale, des recommandations seront formulées afin d’améliorer la politique actuelle de lutte antivectorielle en métropole et dans les régions ultra-marines.
4Le résultat de ces travaux constituera la base d’une nouvelle stratégie globale de lutte antivectorielle préventive à visée de santé publique humaine et animale.
La méthode de l’expertise collégiale à l’IRD
5L’IRD assure, au titre de ses missions, la réalisation d’expertises scientifiques collectives dites « expertises collégiales ». Outil original de transfert des connaissances scientifiques vers la sphère des décideurs et dirigeants, l’expertise collégiale permet de fournir en un délai bref, à la demande d’un ou plusieurs commanditaires, et dans le cadre d’une relation contractualisée, une analyse scientifique pluridisciplinaire sur un sujet déterminé à partir d’une revue complète et ciblée de l’état de l’art, assortie de conclusions et recommandations.
6En tant que telle, et c’est en particulier ce qui la différencie de l’activité stricto sensu de production de la connaissance scientifique, elle est appelée à venir à l’appui d’une prise de décision, le plus souvent dans le domaine des « politiques publiques ». Elle constitue donc une forme originale de valorisation de la recherche.
7L’expertise collégiale telle que conçue et mise en œuvre à l’IRD par son Département expertise et valorisation (DEV), relève d’un modèle méthodologique désormais assez éprouvé (9 expertises publiées, 2 en cours), certifié ISO 9001.
8Elle est conduite par un collège d’experts de compétences complémentaires placé sous la responsabilité d’une coordination scientifique, et suivie par un comité de pilotage rassemblant les représentants du (des) commanditaire(s). Au terme de l’expertise, le rapport final et ses recommandations sont remis au(x) commanditaire(s). Dans les mois qui suivent, l’expertise est publiée aux éditions de l’IRD dans la collection « Expertise collégiale » sous la forme d’une synthèse, assortie des contributions intégrales des experts.
DÉFINITION ET OBJECTIFS DE LA LUTTE ANTIVECTORIELLE (LAV)
Définition
9La lutte antivectorielle, dans son acception la plus large, comprend la lutte et la protection contre les arthropodes (insectes et acariens), vecteurs d’agents pathogènes à l’homme et aux vertébrés, et leur surveillance. Elle inclut les arthropodes nuisants lorsque ceux-ci sont des vecteurs potentiels ou lorsque la nuisance devient un problème de santé publique ou vétérinaire.
10La lutte antivectorielle s’appuie sur des méthodes de lutte variées en fonction des vecteurs, des contextes épidémiologiques et socio-économiques. Elle inclut la lutte chimique, biologique, génétique, l’action sur l’environnement, l’éducation sanitaire, la mobilisation sociale, ainsi que l’évaluation permanente des méthodes.
Objectifs
11L’objectif de la lutte antivectorielle est de contribuer, aux côtés d’autres acteurs de la santé publique, à minimiser les risques d’endémisation ou d’épidémisation, à diminuer la transmission d’agents pathogènes par des vecteurs, à gérer les épidémies de maladies à vecteurs, dans un cadre stratégique formalisé.
OBJECTIFS DE L’EXPERTISE
12Les résultats de l’expertise collégiale doivent permettre de mieux prévenir et de mieux gérer les épidémies à venir. Le but est de travailler en amont de la maladie sur la lutte antivectorielle. En conséquence, les objectifs de l’expertise seront de :
- Éclairer la réflexion sur les évolutions indispensables dans ce domaine.
- Réaliser un état des lieux des méthodes et moyens actuels.
- Formuler des recommandations sur les méthodes, les moyens et l’organisation, pour améliorer la politique actuelle de lutte contre les vecteurs.
CONTEXTE
13Le contexte synthétisera les principales données épidémiologiques :
- pathologies actuellement transmises par les vecteurs en France ;
- prévalence des infections par zone géographique ;
- liste des épidémies humaines et animales survenues au cours des dix dernières années en France et dans les pays frontaliers ;
- établissement de fiches sur les maladies anthropo-zoonoses ainsi que sur les maladies animales ;
- hiérarchisation des risques : classement en trois niveaux sur les critères de morbidité, mortalité et conséquences socio-économiques ;
- du nuisant au vecteur.
LISTE DES QUESTIONS DE L’EXPERTISE COLLÉGIALE
14La présente expertise collégiale s’articulera autour de cinq grands thèmes majeurs, eux-mêmes déclinés en un ensemble de questions.
Thème 1 – Périmètre de l’analyse
Question 1 « Quel est le cadre législatif et réglementaire ? »
- Au niveau français : sur le territoire métropolitain, des DOM-ROM (Guadeloupe, Guyane, Martinique et Réunion), de la collectivité départementale de Mayotte et de la collectivité d’outre-mer Wallis-et-Futuna
- Au niveau européen ?
- Au niveau international ? (règlement sanitaire international (RSI) établi par l’OMS, législation en vigueur dans les pays frontaliers des COM et des DOM1 et Mayotte)
- Quelles sont les similitudes et divergences entre les différents dispositifs ?
- Existe-t-il des dérogations et pourquoi ?
- Quel est le droit des assurances ?
Question 2 « Comment s’organise la gouvernance ? »
- Quelles sont les modalités d’application des textes et des politiques aux différents niveaux chargés de la lutte antivectorielle en France ?
- Quels sont les différents acteurs de la lutte antivectorielle ainsi que leurs rôles et responsabilités ?
- Comment organiser une gouvernance capable de répondre aux objectifs de la lutte antivectorielle ?
- Quelles coordination des acteurs et adaptabilité en cas d’alerte ?
Thème 2 – Mise en œuvre
Question 1 « Quelles sont les stratégies de la lutte antivectorielle en France ? »
- Identification des zones géographiques, des types de vecteurs ou de maladies.
- Quelles sont les capacités d’anticipation et de réponse à une émergence ?
- Comment s’organise le contrôle sanitaire aux frontières (mise en place du règlement sanitaire international) ?
Question 2 « Quelles sont les modalités organisationnelles et les ressources humaines ? »
- Quelle est l’interaction des acteurs de la lutte antivectorielle avec le réseau d’épidémio-surveillance ?
- Quels sont les seuils de déclenchement d’une intervention spécifique ?
- Quel cadre d’emploi pour les personnels de terrain : personnels sédentaires ou personnels actifs (on entend par « actifs » des métiers de terrain à caractère pénible, à risque ou dangereux…) ?
Question 3 « Quels sont les réseaux d’information, d’éducation et de communication ? »
- Quelles sont les modalités et les cibles de la communication publique ?
- Comment la communication agit-elle sur la participation communautaire ?
- La communication et l’éducation à la santé induisent-elles une meilleure participation communautaire ?
- Comment obtenir une mobilisation pérenne des communautés ?
- Comment coordonner les moyens d’information, d’éducation et de communication en cas d’alerte ?
Question 4 « Quelles sont la perception et l’acceptabilité de l’efficacité de la lutte antivectorielle par les populations ? »
- Quels sont les niveaux de perception des différentes populations lorsqu’elles sont touchées par l’épidémie ?
- Quels sont les facteurs anthropologiques qui expliquent ces différentes perceptions ?
- Comment peut-on évaluer le niveau de satisfaction et d’adhésion des populations ?
Thème 3 – Évaluation de la lutte antivectorielle
Question 1 « Quelles sont les pratiques et les modalités d’évaluation de la lutte antivectorielle ? »
- Pourquoi faut-il évaluer la lutte antivectorielle ?
- Comment évaluer la lutte antivectorielle ?
- Quelles sont les difficultés de la mise en place de la lutte antivectorielle ?
- Pourquoi l’évaluation de la lutte antivectorielle est-elle peu développée en France ?
- Existe-t-il des rapports d’évaluation de la lutte antivectorielle publiés dans le monde ?
- Quels sont les outils d’évaluation : indicateurs et unités de mesure ?
Question 2 « Quelles sont les approches économiques de la lutte antivectorielle ? »
- Quels sont le coût et le financement de la lutte antivectorielle et de la lutte contre les nuisants ?
- Quels sont les coûts comparés de la lutte antivectorielle et de la prise en charge d’une épidémie ?
- Quelle est l’efficience de la lutte antivectorielle ?
Question 3 « Comment peut-on évaluer les effets non intentionnels ? »
- Quelles sont les différentes pratiques de lutte suivant les territoires (comparaison) ?
- Quels sont les effets non intentionnels des insecticides ?
- Quels sont les effets non intentionnels de l’usage répétitif des répulsifs ?
- Quels sont les effets sur le comportement humain ?
- Les assurances couvrent-elles les préjudices éventuels ?
Thème 4 – Les outils d’anticipation
Question 1 « Quelle est la contribution de l’évaluation des risques vectoriels à l’évaluation du risque épidémique ? »
- Quels sont les dispositifs d’évaluation des risques sanitaires ?
- Peut-on prédire l’ampleur et la sévérité d’un risque d’épidémie ?
- Une alerte entomologique implique-t-elle une alerte épidémiologique ?
- Quel peut être l’appui de la modélisation ?
Question 2 « Quelles sont les coopérations régionales et internationales ? »
15■ Quels sont les mécanismes de coopération régionale et internationale existants à l’heure actuelle en France métropolitaine et en régions outre-mer ?
Question 3 « Quelles sont les formations existantes et quels sont les besoins en formation ? »
- Quelles sont les formations initiales et continues offertes actuellement ?
- Quels sont les niveaux de formation en matière de lutte antivectorielle au sein des structures ?
- Existe-t-il une adéquation entre les formations et les besoins ?
- Quels sont les manques ?
Question 4 « Comment la recherche contribue-t-elle à l’amélioration de la lutte antivectorielle ? »
- Comment mesurer l’efficacité et la sélectivité des insecticides utilisés ?
- Quels sont les mécanismes de résistance aux insecticides ?
- Quels sont les nouveaux insecticides utilisables ?
- Quels sont les moyens alternatifs de lutte ?
- Comment améliorer la connaissance de la biologie des vecteurs ?
- Quel est l’appui de la recherche en sciences sociales et des comportements ?
Thème 5 – Les exemples non français
Question 1 « Quels sont les modèles d’action à l’international ? »
- Quels sont les différents modèles opérationnels ?
- Quels enseignements peut-on en tirer ?
Notes de bas de page
1 Départements d’outre-mer : Guadeloupe, Guyane, Martinique, la Réunion.
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