L’insertion internationale de la Nouvelle-Calédonie
p. 336-402
Texte intégral
1Coordinateur : S. Velut
2Experts : P. Baby, A. Riedacker
Introduction
3Cette partie aborde la question de l’insertion de la Nouvelle-Calédonie dans les dynamiques internationales relatives aux questions énergétiques. Il s’agit principalement de présenter le fonctionnement des marchés régionaux de l’énergie qui s’organisent à l’échelle du grand ensemble Asie-Pacifique et des mécanismes internationaux de réduction d’émission de GES, qui s’organisent principalement à partir de la Convention des Nations unies sur le changement climatique (UNCCC).
4Cet examen est motivé par trois raisons principales. La première tient à la dépendance durable de la N.-C. vis-à-vis des importations d’énergie et particulièrement de combustibles fossiles qui rend indispensable une vision prospective régionale. La seconde est le caractère inévitable du débat sur la position de la N.-C. par rapport aux émissions de GES, débat rendu complexe par le statut particulier de la N.-C. Enfin, une réflexion a été amorcée à l’occasion de la préparation du schéma d’aménagement 2025 qui considère explicitement la mondialisation et les instances d’intégration et de coopération internationale, comme une dimension indispensable pour l’avenir du territoire. Comme la politique étrangère demeure de la compétence de l’État français, la N.-C. peut à la fois jouer de cet effet de levier que représente la diplomatie française et, d’autre part, envisager de privilégier certains partenariats stratégiques notamment avec les pays de la région. Il n’existe pas en N.-C. de pôle reconnu de compétences joignant de façon pragmatique les recherches sur le grand ensemble Asie-Pacifique et les organes de décision1. En revanche, de nombreux liens d’échange et de coopération sont établis avec les pays voisins, avec un degré de formalisation plus ou moins poussé.
5Plus industrialisée que les petites îles du Pacifique, dont les problèmes énergétiques sont liés surtout à la consommation des ménages – c’est la question principale posée pour les îles Loyauté – la N.-C. est beaucoup plus petite que ses voisins immédiats (Australie, Nouvelle-Zélande) ou plus lointains (Indonésie, Philippines, Papouasie-Nouvelle-Guinée) qui disposent de ressources d’énergie fossiles plus abondantes et, pour certains, de fortes capacités technologiques. La problématique des GES et des changements environnementaux planétaires la place dans une position charnière : sujette aux évolutions climatiques qui pourraient mettre en danger son environnement – particulièrement les récifs coralliens et le lagon classés en 2008 par l’Unesco au patrimoine mondial – elle doit se poser comme lesÉtats industrialisés la question de la maîtrise de ses émissions de GES.
6Le troisième chapitre présente la façon dont la N.-C. pourrait envisager son insertion dans les dynamiques internationales des marchés de l’énergie et de réduction de GES. Il fait le point en particulier sur les organismes de coopération internationale qui pourraient fournir un appui à la N.-C., et sur les partenariats bilatéraux à privilégier.
7Cette présentation est motivée par le fait que les questions énergétiques se structurent notamment aux échelles internationales et mondiales ; a fortiori pour un territoire ne produisant pas d’énergie fossile et qui restera durablement dépendant des importations d’énergie fossile. Les questions énergétiques ne sont que peu abordées dans les organisations régionales auxquelles participe la N.-C., comme la CPS (Commission du Pacifique Sud) alors qu’elles sont centrales pour l’Apec (Asia-Pacific Economic Cooperation) dont font partie ces principaux voisins. De même, l’Asean (Association of South East Asian Nation) en a fait un axe privilégié de coopération.
1. Géopolitique de l’énergie
8Les marchés énergétiques ne sont ni totalement ni complètement des marchés mondiaux. Si le marché du pétrole est devenu un marché mondial, dans le sens où les modifications de prix ou les fluctuations des quantités produites et consommées ont des conséquences qui se font sentir à l’échelle mondiale (Darmstadter, 2006), il subsiste de fortes organisations à base géographique des marchés. Même pour le pétrole, les qualités produites conditionnent les possibilités de raffinage. Plus généralement, l’existence et la disponibilité d’infrastructures d’expédition et de réception, les qualités des énergies proposées, le respect des normes – sur les carburants, les taux de cendres ou de soufre, les tensions électriques, etc. –, les caractéristiques des besoins ne rendent pas les sources énergétiques aisément substituables les unes aux autres. Les évolutions, qu’il s’agisse de réorientation des routes d’approvisionnement, des changements de fournisseurs, du changement des combustibles pour la génération électrique, sont longues et coûteuses.
9Ces contraintes expliquent en partie l’organisation de marchés régionaux, dans lesquels la proximité entre partenaires permet de réduire les trajets, leurs coûts et les risques associés, en évitant par exemple certains des goulets d’étranglement du commerce international. Ces échanges sont également structurés par les acteurs économiques qui établissent des relations de partenariat, de présence à divers niveaux des filières et de complémentarité technologique. Mais des relations privilégiées entre fournisseurs et consommateurs vont à l’encontre de la diversification, premier principe de la sécurité énergétique, si elles deviennent trop exclusives.
10Ce chapitre s’appuie principalement sur des informations tirées d’organismes internationaux (Agence internationale de l’énergie, Apec, World Energy Council) nationaux (Energy information administration, Abare, IFP, ministères nationaux) et d’entreprises (BP, Total,) et de consultants dans le domaine de l’énergie (Oil and Gas journal, Petroleum Economist)2. Bien que le thème de la géopolitique de l’énergie fasse recette, il ne fait pas l’objet de nombreuses publications scientifiques facilement accessibles, tout particulièrement en ce qui concerne les stratégies des acteurs économiques. Certains documents produits par des consultants qui auraient pu être utiles n’ont pu être achetés avec le budget destiné à cette étude.
1.1. Demandes énergétiques et stratégies de sécurité
11Les statistiques globales de consommation de l’énergie montrent une croissance tirée par le grand ensemble Asie-Pacifique. La N.-C. fait partie de ce grand ensemble qui comprend les pays riverains de l’ouest du Pacifique, la péninsule indochinoise, l’Inde, le Pakistan et l’Océanie – mais pas les États de l’est du Pacifique qui figurent pourtant parmi leurs principaux partenaires commerciaux, ni la Russie dont la façade pacifique accueille de nombreux projets de développement énergétiques.
12Depuis la fin des années 1980, la consommation de cette grande région a été multipliée par 2,5, croissance qui n’est dépassée que par celle du Moyen-Orient, qui représente au total un volume moins important. Autrement dit, le grand ensemble Asie-Pacifique représente les deux tiers de l’augmentation de la consommation d’énergie mondiale, passée en vingt ans de 7 600 Mtep à 11 000 Mtep (BP). Sa consommation de pétrole a dépassé celle de l’Europe en 1992 et celle de l’Amérique du Nord en 2006. Sa consommation totale d’énergie primaire a dépassé celle de l’Amérique du Nord au début des années 2000.
13Cet accroissement est principalement attribuable au triplement de la consommation chinoise qui représente le volume le plus important (1 800 Mtep en 2007), mais les autres pays de la région connaissent aussi d’importantes augmentations, particulièrement le Japon, la Corée du Sud mais aussi la Thaïlande et la Malaisie.
14Les besoins sont couverts en premier lieu par le charbon qui représente presque la moitié de la consommation d’énergie primaire et dont la figure 2 montre la croissance régulière. Mais c’est le gaz qui augmente le plus vite, quoiqu’il ne représente en 2007 que 10 % de la consommation, mais cette part pourrait augmenter dans les prochaines années. À ce niveau de généralité, les énergies renouvelables non conventionnelles ne sont pas statistiquement significatives.
15Ce grand ensemble est par nature divers, tant par la taille des États que par leurs priorités en matière d’énergie. Tous partagent cependant une préoccupation pour la sécurité de leurs approvisionnements : au développement économique énergivore sans ressources nationales significatives du Japon puis de la Corée du Sud s’ajoutent les demandes des pays émergents qui posent le problème de l’accès aux ressources. Les États ont cherché à diversifier leurs ressources, particulièrement en développant des ressources locales et à utiliser d’autres énergies que le pétrole, tout particulièrement le charbon.
16Cela peut les conduire à des situations de concurrence, par exemple dans le cas des conflits sur l’accès à l’off shore, ou les ressources frontalières ; à des stratégies agressives des compagnies chinoises pour accéder à des ressources internationales (prises de participation au Soudan, au Kazakhstan, en Équateur, en Russie, en Indonésie, etc. – EIA) ; mais aussi à la recherche d’accords et de solutions communes, soit bilatérales soit multilatérales. Il existe par exemple un accord bilatéral dans le domaine du nucléaire entre la Chine et l’Australie, et de nombreux accords plus modestes de partage de production pétrolière.
17D’autre part, alors que le marché mondial du pétrole s’était structuré historiquement selon les complémentarités entre pays producteurs de l’Opep et pays consommateurs regroupés dans l’OCDE, le grand ensemble Asie-Pacifique est loin d’être aussi lisible. L’Australie fait partie de l’OCDE, mais c’est le principal exportateur d’énergie pour l’ensemble de la région. Les alliances régionales comme l’Asean sont partielles, l’Apec comprend également les États-Unis et certains pays latino-américains.
18La N.-C. s’inscrit en plein dans ces évolutions régionales, à la fois par la croissance rapide de ses besoins énergétiques portée, comme dans les pays émergents, par l’accroissement de l’activité économique et de la demande des ménages. Comme les autres pays de la région, elle fait appel au charbon pour les satisfaire. En ce sens, son modèle énergétique actuel se rapproche, de fait, plus de celui des économies émergentes de l’ensemble Asie-Pacifique que de l’Europe ou des petites îles. L’examen de ces marchés énergétiques régionaux est donc indispensable : l’analogie des comportements entre les pays de ce grand ensemble va dans le sens de l’existence de marchés régionaux de l’énergie au sens large, même si les marchés sont financièrement unifiés3.
1.2. L’organisation des échanges régionaux des énergies
1.2.1. Pétrole et produits pétroliers
19Malgré les efforts réalisés en exploration et production, le grand ensemble Asie-Pacifique est relativement moins bien doté en pétrole que les grandes régions productrices déjà connues. En 2007 comme en 1997, ce grand ensemble représente un peu moins de 4 % des réserves mondiales et un peu moins de 10 % de la production (tableau). Depuis dix ans, la production a reculé en Australie et en Indonésie et a augmenté significativement en Thaïlande et au Vietnam dont les réserves ont aussi considérablement augmenté. Des ressources pourraient également se trouver au large de la N.-C. dans la ZEE (cf. tableau).
20La demande de pétrole croissante en Asie Pacifique (East of Suez) face à la relative médiocrité des ressources met ce grand ensemble en concurrence avec les consommateurs européens et nord-américains (West of Suez) pour accéder au pétrole du Moyen-Orient. D’après M. Salameh (2003), l’Asie-Pacifique devrait acheter une part croissante du pétrole du Moyen-Orient, avec en conséquence un accroissement de leur dépendance pétrolière à l’égard d’un seul groupe de fournisseurs. « La signification stratégique de ces nouvelles relations énergétiques entre deux régions potentiellement turbulentes n’a pas été précisée. S’agira-t-il simplement d’innocentes relations commerciales ou cela peut-il remettre en cause ladomination des États-Unis dans l’ordre mondial ? » (Salameh p. 1087).
21Ces relations ont deux conséquences visibles. D’une part les efforts des pays asiatiques pour établir des partenariats avec des fournisseurs du Moyen-Orient, avec en particulier une avancée des compagnies chinoises en Afrique et au Moyen-Orient (mais aussi en Amérique du Sud). D’autre part, le commerce maritime emprunte le détroit de Malacca entre la Malaisie et l’Indonésie pour accéder au grand centre de raffinage de Singapour et aux ports du Pacifique. De cette route stratégique dépend la sécurité de l’approvisionnement de l’Asie orientale, dont différents pays participent à l’amélioration des conditions de navigation dans le détroit (Favennec, 2006 ; Fau, 2004).
22Cela justifie la recherche active de ressources pétrolières nouvelles en Asie-Pacifique, dans laquelle sont engagées toutes les grandes compagnies internationales. Des découvertes ont été faites en off shore, ce qui provoque différentes tensions entre États : c’est particulièrement le cas de la délimitation de la ZEE chinoise. Pour la N.-C., les espaces les plus prometteurs se trouvent à l’ouest de la Grande Terre, proches de la limite entre avec la ZEE australienne.
23L’organisation des échanges de produits pétroliers est plus complexe que celle des marchés pétroliers, puisqu’il y a un plus grand nombre de produits répondant à des spécifications différentes. La N.-C., qui ne dispose pas de raffinerie, est donc dépendante de ces disponibilités, même si du pétrole est découvert dans sa ZEE. Qui plus est sa demande en produits de raffinage, dominée jusqu’à présent par la demande en fioul pour la centrale de Prony, devrait d’une part diminuer avec la mise en service des centrales au charbon et, d’autre part, se réorienter vers les produits plus légers pour le transport terrestre, routier et maritime.
24Les capacités de raffinage se concentrent chez les grands pays consommateurs, particulièrement la Chine et le Japon. Les raffineries australiennes ont interrompu leurs livraisons pour la N.-C., car elles vendent intégralement leurs produits sur le marché australien, obligeant les importateurs néo-calédoniens à s’approvisionner à Singapour4.
25L’une des questions clés concernant la fourniture de carburants est celle des spécifications.
26En 2006, l’Australie a modifié ses normes, pour aller dans le sens d’une plus grande rigueur environnementale. Malgré ces exigences et le fait que les capacités de raffinage soient utilisées, l’Australie prévoit de pouvoir importer le carburant dont elle a besoin des principaux raffineurs de la région, particulièrement de Singapour, de Taïwan, d’Inde et de Corée du Sud. L’amélioration des raffineries asiatiques leur permet déjà de respecter la nouvelle norme australienne et devrait évoluer vers les normes européennes (Euro 4).
27D’après un rapport destiné au ministère australien des Ressources de l’Énergie et du Tourisme (Acil, 2008) de nouvelles capacités de raffinage sont en construction. En Inde, Reliance Petroleum a mis en service à Jamnagar une raffinerie d’une capacité de 600 kbj, qui double les capacités existantes dans ce port du Gujarat. Il s’agit d’une raffinerie complexe qui peut raffiner des pétroles lourds et produire des carburants de qualité pour l’exportation. Au Vietnam, la raffinerie de Dung Qhat doit commencer ses opérations en 2008 et pourrait être suivie par la construction de deux autres raffineries. En outre des plans d’expansion ou de construction de raffineries existent pour Taïwan et pour les pays du Golfe, qui devraient approvisionner sans problème les marchés asiatiques. Inversement l’Australie a diminué ses capacités de raffinages et celle de la Nouvelle-Zélande sont limitées alors que la demande a augmenté. Ainsi, les pays de l’Océanie devront importer de plus de plus de produits pétroliers des raffineries asiatiques.
28La question de la sécurité des approvisionnements est donc conditionnée par le transport maritime. La vulnérabilité du détroit de Malacca est souvent mise en avant (Favennec, 2006). Il s’agit d’un passage très étroit qui pourrait être coupé non seulement en raison d’actes de guerre ou de terrorisme, mais même sans agiter cet épouvantail, un problème technique (par exemple, l’échouage d’un pétrolier) pourrait compliquer ou interrompre la navigation (Fau, 2004).
29Ce risque ne semble pas préoccuper les importateurs australiens qui comptent sur les routes maritimes alternatives si un problème survenait. Certains passages (Ormuz) sont inévitables : ils représentent un enjeu mondial qui dépasse largement la N.-C. L’usage des routes maritimes alternatives ne va pas de soi (sinon on les utiliserait déjà) et même si elles pouvaient être utilisées pour desservir l’Océanie, se poserait le problème de l’approvisionnement des raffineries de Singapour, sans lesquelles les capacités de raffinage régionales ne pourraient faire face à la demande.
30Des tensions passagères sur les routes maritimes, ou à la suite de problèmes techniques dans les raffineries asiatiques, peuvent affecter l’approvisionnement de la N.-C., dont les réserves de carburant sont limitées. En effet, alors que les dispositions légales prévoient des stocks stratégiques égaux à 20 % de la consommation (73 jours), ceux ci ne dépassent pas 60 jours en raison de l’insuffisance des capacités de stockages. L’Australie et la Nouvelle-Zélande appliquent les règles de l’AIE et conservent 90 jours de stocks : une valeur sur laquelle la N.-C. pourrait s’aligner.
1.2.1.1. Que sait-on de la géologie de la zone, en termes de ressources énergétiques ?
31La Zone économique exclusive de N.-C. (ZEE, cf. figure 3) se situe entre deux provinces pétrolières importantes faisant l’objet d’exploitation : la Papouasie-Nouvelle-Guinée au nord, et la Nouvelle-Zélande (bassin de Taranaki) au sud. Ces trois régions ont un héritage géologique commun lié à l’ancienne marge orientale du supercontinent Gondwana, et reconnu pour son potentiel pétrolier. La N.-C. et les bassins sédimentaires off shore de sa ZEE sont considérés comme sous-explorés. L’état des connaissances présenté ici s’appuie essentiellement sur les publications de Lafoy et al. (1996), Vially et al. (2003), Brodien et al. (2003), Nouzé et al. (2005), Exon et al. (2007) et Collot et al. (2008) réalisées dans le cadre de grandes synthèses orchestrées par le Service de la géologie de Nouvelle-Calédonie (Dimenc) et l’Institut français du pétrole.
32Le contexte géodynamique à l’origine des grands traits structuraux de la N.-C. est un contexte orogénique globalement favorable à la génération et au piégeage des hydrocarbures. En effet, l’île de la N.-C. résulte de l’émersion d’un prisme orogénique (chaîne de montagne) qui s’est formé entre 36 et probablement 28 millions d’années, en se propageant vers l’ouest dans un contexte de subduction-obduction (Cluzel et al., 2001). Le système de bassins sédimentaires d’avant-pays associé à la surrection et à l’érosion de cette chaîne de montagne est préservé jusqu’à aujourd’hui à l’ouest de l’île. Dans un tel contexte orogénique, il est rare que les bassins sédimentaires associés au front montagneux ne soient pas le siège de génération et d’accumulation d’hydrocarbures, et il est donc logique de les explorer. Cela reste à faire et sera probablement fait dans les prochaines décennies.
33On peut différencier dans ces bassins sédimentaires trois domaines à potentiel pétrolier, qui diffèrent par leur contexte structural et géographique, impliquant différents coûts d’exploration et d’exploitation.
LES BASSINS SEDIMENTAIRES DE LA COTE OUEST DE LA GRANDE TERRE
34Ils sont positionnés sur le front de déformation du prisme orogénique néo-calédonien (figure 2) et sont donc en position très favorables pour l’accumulation des hydrocarbures, puisque c’est dans cette zone que l’on trouve généralement des structures géologiques préservées susceptibles de former des pièges, les plus courantes étant les plis anticlinaux. Cela est corroboré par des indices de pétrole et de gaz repérés le long de la côte ouest de la Grande Terre dès 1887, qui ont montré rapidement l’intérêt de ces bassins. Le plus célèbre de ces indices est la « Mine d’huile » de Koumac découvert à la base de la nappe des péridotites. Les premiers sondages sérieux ont été réalisés entre 1954 et 1955 par la SREPNC (Société de recherche et d’exploitation pétrolière en N.-C.) dans la structure géologique la plus favorable, qui est l’anticlinal de Gouaro situé près de Bourail. Ces sondages de reconnaissance, trop peu profonds (quelques centaines de mètres) ont confirmé la présence d’indices d’hydrocarbures, mais n’ont pas pu atteindre de niveaux réservoirs. Des études géologiques détaillées menées par l’IFP ont ensuite permis de confirmer la présence d’un système pétrolier actif – un niveau de roche mère génératrice d’hydrocarbures et au moins deux niveaux de réservoirs – étendu probablement à tous les bassins sédimentaires jalonnant la côte ouest. À partir de 1995, l’exploration de l’anticlinal de Gouaro reprend avec la Victoria Petroleum et l’acquisition d’une première campagne de sismique réflexion terrestre en N.-C. ; elle est suivie en 2000 d’un vrai forage d’exploration (Cadart-1). Ce forage a rencontré une accumulation de gaz non commerciale à l’époque. Il a montré aussi une faible qualité des niveaux réservoirs. Il s’agit là des rares et dernières activités d’exploration pétrolières réalisées en N.-C.
35Un potentiel pétrolier existe donc sur la côte ouest. Le système étudié montre qu’il y a eu une génération d’hydrocarbures, en grande majorité du gaz, mais qu’il reste à identifier de bons réservoirs et des pièges permettant des accumulations de gaz commerciales. Tout le monde s’accorde à dire qu’il faut acquérir de nouvelles données géologiques et géophysiques pour bien évaluer ces bassins on shore, ainsi que leurs prolongements en mer. L’IFP recommande de surcroît une exploration détaillée du lagon ouest, qu’il considère comme un des thèmes d’exploration pétrolière les plus intéressants (cf. figure 4). La région du Grand Passage au nord de l’île présente le même type d’intérêt.
LE BASSIN SEDIMENTAIRE DE LA NOUVELLE-CALEDONIE
36Ce bassin deep off shore fait également partie du système d’avant-pays associé à l’orogénèse néo-calédonien, et est séparé des bassins côtiers de N.-C. par le tombant du récif barrière (figure 1). Il contient les épaisseurs sédimentaires les plus importantes de la ZEE (jusqu’à 8 km) et a fait l’objet de nombreuses campagnes de géologie-géophysique (ZoNéCo, Faust, Noupalac), sans que toutefois un forage d’exploration pétrolière ait pu être réalisé. Ces études montrent que la partie nord du bassin de N.-C. a un substratum constitué de croute continentale – contrairement à sa partie sud – comparable à celle de la côte ouest néo-calédonienne, où il a été démontré l’existence d’un système pétrolier actif. Le contexte géodynamique de cette partie du bassin de N.-C. est donc considéré comme très favorable à la présence d’hydrocarbures. Vu l’ampleur du bassin et les épaisseurs sédimentaires, les quantités d’hydrocarbures liquides et gazeux générées pourraient être assez considérables. Le problème majeur réside dans l’importante tranche d’eau qui rend les coûts d’exploration très élevés. Cette tranche d’eau diminue en se rapprochant de la ride de Farway qui est une zone non moins intéressante.
LE BASSIN DE FARWAY ET SES BORDURES
37À l’ouest du bassin de la N.-C., la ride et le bassin de Farway, puis la ride de Lord Howe (cf. figure 1), semblent réunir eux-aussi des conditions favorables à la génération et au piégeage d’hydrocarbures. Les campagnes de géophysique Faust (1 et 3) et ZoNéCo 5 ont permis non seulement de confirmer l’intérêt du style structural et de l’épaisseur sédimentaire du bassin de Farway et de ses bordures, mais aussi de mettre en évidence la présence d’un important réflecteur sismique interprété comme la base d’un niveau d’hydrate de gaz, d’une extension de 80 000 km2. L’interprétation de ce réflecteur a été rediscutée après la campagne ZoNéCo 11 (Nouzé et al., 2005) qui montre que la présence d’hydrates de gaz reste à prouver. Plus récemment, Exxon et al. (2007) ont remis à l’ordre du jour le potentiel pétrolier du bassin de Farway en insistant sur quelques points forts : 1) une histoire géologique favorable à la génération d’hydrocarbures ; 2) un éventuel prolongement nord-ouest du bassin Taranaki de Nouvelle-Zélande, producteur d’huile et de gaz ; 3) la présence de diapirs pouvant former de bons pièges structuraux pour les hydrocarbures ; 4) la présence d’importants réflecteurs sismiques, sous une tranche d’eau variant entre 1 500 et 3 600 m, pouvant révéler des niveaux interstratifiés de gaz ou d’hydrates de gaz.
CONCLUSION
38Les bassins sédimentaires de la ZEE de N.-C. sont sous-explorés. Il n’a été réalisé qu’un seul forage d’exploration pétrolière sur l’ensemble de cette zone. Ce forage (anticlinal de Gouaro de la région de Bourail) et des études géologiques de surface ont confirmé l’existence d’un système pétrolier actif – surtout générateur de gaz – sur la côte ouest de la Grande Terre. Ce système pétrolier semble s’étendre aux lagons ouest et nord (zone du Grand Passage), et au bassin deep off shore de N.-C. Ce dernier, totalement inexploré, peut avoir généré par son étendue de grandes quantités d’hydrocarbures et est considéré comme un des bassins frontières pour l’exploration pétrolière du xxie siècle. Le bassin de Farway et ses bordures attirent l’attention des pétroliers, car cet ensemble se situe dans le prolongement nord-ouest du bassin de Taranaki de Nouvelle-Zélande, connu pour sa production d’huile et de gaz. Les campagnes récentes de géophysique y ont montré la présence de réflecteurs sismiques de grande étendue, pouvant être interprétés comme des niveaux interstratifiés de gaz ou d’hydrates de gaz.
39Ce qu’il reste à faire
40Il est important d’acquérir de nouvelles données géologiques et géophysiques pour finir de bien évaluer les bassins sédimentaires on shore et leurs prolongements en mer. L'inventaire de structures géologiques pouvant piéger des hydrocarbures, à terre ou recouvertes par une faible tranche d’eau (lagons ouest et nord), restent à faire. De nouvelles campagnes géophysiques sont nécessaires pour détecter de nouvelles structures.
41Pour la partie deep off shore, on ne pourra vraiment se prononcer qu’à partir des premiers forages d’exploration. C’est probablement les bordures du bassin de Farway (rides de Farway et de Lord Howe) qui seront les premières cibles d’exploration. Ces zones, où la bathymétrie est la moins forte, semblent présenter des structures géologiques (pièges structuraux et stratigraphiques), susceptibles de piéger des hydrocarbures ayant migré et provenant des parties profondes du bassin de Farway (« cuisine » de génération d’hydrocarbures). Avec la montée du prix du baril en 2008, l’industrie pétrolière internationale a montré récemment un regain d’intérêt pour ces prospects à fort potentiel, mais à coûts d’exploration élevés.
42L’évaluation du potentiel pétrolier des bassins deep off shore de la N.-C. ne peut se faire que dans un cadre régional, et leur exploration sera probablement menée en collaboration avec les pays voisins. La Ride de Lord Howe qui est concomitante aux ZEE de N.-C. et d’Australie a été présentée récemment comme un prospect pétrolier à moyen-court terme (Schéma Minier, gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, 2009), conditionné surtout par l’évolution du prix du baril.
1.2.2. Le gaz
43Le gaz s’affirme depuis une vingtaine d’année à l’échelle mondiale comme un combustible relativement abondant et moins polluant que les hydrocarbures liquides. Il a été privilégié par les grands consommateurs qui ont fait des investissements substantiels dans la construction de terminaux de regazéification et investi en conséquence pour utiliser cette énergie, plus propre que les hydrocarbures5.
44Les réserves sont très inégalement réparties à l’échelle mondiale et sont relativement modestes dans la région. Les principales sont en Indonésie avec un peu moins de 100 000 Gsqf, ce qui place ce pays au treizième rang mondial. Cependant l’AIE prévoit une assez forte augmentation de la production, particulièrement pour l’Australie qui devrait rester exportatrice de gaz pour au moins une décennie (EIA).
45La part de l’Asie-Pacifique pour le gaz est supérieure à celle qu’elle représente pour le pétrole, et sa croissance est plus rapide, particulièrement en Inde, en Birmanie (Myanmar), au Pakistan, en Thaïlande et en Australie. Ce dernier pays réaffirme son rôle de pourvoyeur d’énergie pour les marchés régionaux.
46L’augmentation de la part du gaz dans les consommations de ce grand ensemble répond à la réorganisation complète des échanges à partir du développement de terminaux d’expédition et de réception de GNL (Gaz naturel liquéfié). Il s’agit pour le moment d’une technologique qui n’est pas adaptée pour la N.-C. dont le marché est trop petit pour les solutions existantes6. La technologie des barges de stockage et de regazéification (FSRU/floating storage and regazeification units) permettraient d’avoir des installations sur mesure de moindre taille. Ce ne peut être une option qu’à moyen terme puisque le choix du charbon a déjà été fait dont l’installation dans le lagon serait inévitablement problématique.
47Le Japon a construit ses premiers terminaux de réception de gaz dès le début des années 1970 et dispose en 2007 d’une trentaine de terminaux de réception. Il a été suivi par la Corée du Sud qui s’équipe à partir des années 1980. La République populaire de Chine et Taïwan suivent dans les années 2000. Des projets sont en cours pour la réception de gaz en Thaïlande et à Singapour (IEA, 2007). Mais il existe aussi deux chantiers au Chili qui devraient rentrer en fonctionnement en 2009 et 2010 ou 2011 et importer également du gaz depuis les producteurs du Pacifique.
48Comme le montre le tableau 3, le commerce de gaz se fait en grande partie entre les pays de l’Asie-Pacifique. La Corée du Sud achète un peu moins de la moitié de son gaz à des fournisseurs régionaux, mais pour les autres importateurs cette part est bien plus élevée. Inversement, les producteurs de la région vendent exclusivement à ces grands consommateurs régionaux.
49Les projets actuels portent sur le développement de terminaux de gazéification dans tous les pays déjà exportateurs de la région, avec notamment un très fort développement pour l’Australie, ainsi que la création de nouveaux terminaux au Pérou et à Sakhalin (Russie) pour approvisionner le bassin Pacifique. D’autre part, il existe de grands projets de gazoducs internationaux avec notamment la création d’un réseau de gazoducs entre États de l’Asie du Sud (Sovacool, 2009) et l’extension de réseaux entre la Russie et la Chine. Ces grands projets n’émergent que lentement, freinés par le manque de confiance entre partenaires, mais n’en restent pas moins des thèmes centraux qui structurent les relations interétatiques et le fonctionnement des instances formelles d’intégration (Sovacool, 2009).
50D’après les prévisions de l’agence internationale de l’énergie (AIE, 2007), la Chine qui reçoit son gaz de l’Australie devrait compléter dans les prochaines décennies cette source par des importations provenant de Russie et d’Asie centrale.
51Même si la N.-C. est pour le moment – et sans doute pour longtemps – à l’écart de ce marché, il n’en reste pas moins que le développement de la production et de la commercialisation du gaz a plusieurs effets importants pour sa propre situation :
- la part croissante du gaz dans les bilans énergétiques des autres pays de la région soulage d’autant les pressions sur les hydrocarbures liquides et le charbon ;
- l’usage du gaz permet un moindre accroissement des émissions de CO2 des autres pays de la région, ou leur diminution si le gaz se substitue à d’autres carburants, soulignant par contraste la trajectoire défavorable de la N.-C. ;
- le commerce du gaz qui justifie de lourds investissements en terminaux GNL et gazoducs consolide des relations privilégiés entre partenaires structurant des échanges et des solidarités de fait entre les pays de la région, sans que la N.-C. y participe.
1.2.3. Le charbon
52C’est le charbon qui soutient la croissance de la consommation d’énergie en Asie-Pacifique. Il s’agit toutefois d’une source énergétique dont les caractéristiques sont très différentes de celles du pétrole et du gaz. Considéré comme « l’énergie du xxe siècle », le charbon est en passe de devenir celle du xxie. Délaissée par les États qui voyaient dans le charbon plus un problème social et environnemental qu’une solution pour leur sécurité énergétique, l’exploitation du charbon dépend largement des compagnies privées qui l’ont considérablement modernisées (Martin-Amouroux, 2008). Il s’agit d’un produit très différencié, les qualités de charbon pouvant avoir des usages industriels (charbon sidérurgique, coke) ou thermiques (charbon vapeur). Ce pondéreux requiert des installations logistiques spécifiques qui se transforment parfois en goulots d’étranglement. Il a plutôt mauvaise presse sur le plan environnemental, une réputation qui doit beaucoup à son passé, mais qui n’est plus entièrement justifiée pour les nouvelles technologies qui permettent de réduire les émissions de cendres et de poussière, mais pas encore celles de CO2.
53L’Indonésie et l’Australie sont les principaux fournisseurs de charbon sur les marchés régionaux, et exportent principalement vers le Japon et la Corée du Sud. L’Indonésie est en mesure de dépasser l’Australie pour les exportations, du fait d’une moindre demande interne de charbon. La Chine exporte également du charbon thermique sur les marchés régionaux, mais les volumes sont en baisse : ils sont passés de 73 Mt en 2003 à 45 Mt en 2007 et devraient continuer à décroître (Sagawa et Koizumi, 2009). Ces exportations, provenant principalement des provinces du Nord, sont compensées par des importations par les provinces du Sud provenant des pays voisins (Vietnam, Indonésie). La croissance de la demande de charbon en Chine pourrait amener l’État chinois à restreindre les exportations de charbon (Sagawa et Koizumi, 2009). La mise en service des centrales en construction au Japon, en Corée du Sud à Taïwan, Hong Kong devrait se traduire par une croissance soutenue de la demande de charbon.
54Cela pourrait aboutir à des tensions temporaires sur le marché du charbon et à des fluctuations de prix, mais à moyen terme les producteurs disposent de réserves suffisantes pour faire face à l’accroissement de la demande.
55L’importance de la demande du Japon et secondairement de la Corée du Sud en font un déterminant essentiel de la demande totale de la région, qui influencent directement les prix. Toutefois, le système de prix de référence basé sur des contrats à long terme entre les exportateurs australiens et les électriciens japonais a été progressivement abandonné au profit d’achat au prix du marché, déterminé à partir du prix FOB d’un chargement à Newcastle (Ekawan et al., 2006). L’amélioration des centrales thermiques japonaises et coréennes autorise l’emploi d’une plus grande variété de charbons que par le passé, ce qui ouvre des marchés aux producteurs. Même après la mise en service des centrales prévues, la N.-C. restera un petit importateur de charbon comparé aux principaux marchés du Pacifique.
56D’après les projections de l’Energy information administration (2009), l’Australie devrait devenir le premier exportateur mondial de charbon vapeur et de charbon sidérurgique devant l’Indonésie, suivi par l’Afrique du Sud, la Colombie et le Venezuela. La construction de nouveaux terminaux portuaires et l’extension des installations de Newcastle sont essentielles pour garantir la croissance de ces exportations, actuellement limitées par la saturation des infrastructures d’expédition (Martin-Amouroux, 2008). Des programmes sont en cours pour augmenter les capacités de charge de Newcastle en augmentant les capacités du terminal existant et en créant un nouveau terminal qui fera passer la capacité du port d’environ 110 Mt/an à 140 puis 170 Mt/an.
57La situation de la N.-C. ne diffère pas de celle de la grande région dans laquelle elle s’insère. Elle a d’ailleurs adopté les mêmes spécifications que l’Australie pour les carburants. La croissance de la demande énergétique portée par l’activité industrielle et les demandes des ménages et le recours au charbon sont conformes à la tendance générale. Sa petite taille l’empêche de bénéficier des possibilités du GNL et du nucléaire, l’oblige à dépendre également des capacités de raffinage extérieure et empêche les acheteurs calédoniens de peser sur les prix. Cette situation n’est pas forcément défavorable eu égard à la croissance des capacités de raffinage prévues, à l’instauration de normes plus rigoureuses pour les carburants et à l’augmentation des capacités d’exportation des producteurs de charbon. Elle plaide pour un suivi attentif des évolutions régionales notamment :
- pour s’aligner sur les spécifications de carburants correspondant au meilleur compromis entre la facilité d’acquisition et la minimisation des pollutions ;
- tirer parti des dynamiques se mettant en place au niveau régional pour organiser les activités dans le domaine de l’énergie.
1.3. Situations énergétiques des États de la région
1.3.1. L’Australie
58L’Australie, 16 millions d’habitants sur 9 millions de km2, renforce sa position d’exportateurs d’énergie sur les marchés régionaux avec le développement du charbon et du gaz, mais aussi de l’uranium. Il existe une conscience forte que le maintien de marchés d’exportations pour le charbon australien passe nécessairement par des solutions technologiques allant dans le sens du « charbon propre ».
59Il s’agit également d’une société consommant beaucoup d’énergie puisque se combinent la présence d’activités à très forte demande énergétique (mines en particulier), de grandes distances pour le transport et des formes d’urbanisme de faible densité (Newman et Kenworthy, 2008) associés à l’usage des véhicules individuels avec un goût certain pour les grosses cylindrées (style de vie « à l’américaine »). Ne disposant que de peu de ressources hydrauliques utilisables pour la production d’énergie, et refusant le développement d’une filière nucléaire, la production d’électricité est pour l’essentiel thermique et repose principalement sur des centrales à charbon.
60L’un des débats les plus vifs concernant l’énergie en Australie a porté sur la ratification et la mise en application du protocole de Kyoto, auquel l’Australie n’a adhéré qu’en 2007 après l’arrivée au pouvoir des travaillistes et du Premier ministre Kevin Rudd. Ces derniers ont repris largement à leur compte les propositions de l’économiste R. Garnaut (2006), auteur d’un rapport sur les possibilités de réduction des GES pour un État qui, non seulement en émet beaucoup, mais également qui sera particulièrement affecté par le changement climatique – notamment les sécheresses auxquelles sont imputées les grands incendies de l’été 2008-2009 et par le changement du niveau marin. L’histoire environnementale de l’Australie rend ce thème particulièrement sensible.
61Il existe toutefois une forte opposition des industriels à l’instauration de mesurescoercitives de réduction des émissions de GES. Étant donné le poids économique des activités à forte consommation énergétique, ces arguments ne peuvent être ignorés. Le gouvernement actuel propose une réduction très progressive des émissions de GES, et privilégie les recherches sur le captage et le stockage de CO2.
62La politique énergétique de l’Australie est partagée entre les États et le niveau fédéral (Commonwealth). Bien qu’il s’agisse d’une économie libérale, dans la tradition de la libre entreprise, le secteur de l’énergie n’en est pas moins piloté à ces différents niveaux, avec une forte prise en compte des intérêts des parties prenantes. Le département de l’énergie lance en 2009 la rédaction d’un livre bleu sur l’énergie, document de réflexion devant servir à orienter la politique énergétique dans les prochaines années. Des études spécifiques portent sur la vulnérabilité de l’approvisionnement en combustibles liquides (Acil, 2006).
63L’Australie développe activement différentes ressources énergétiques. La recherche et l’exploration du pétrole et du gaz sont actives et permettent à l’Australie d’exporter du gaz à partir du développement des gisements de la côte nord-ouest. Geoscience australia, service de recherche géologique, réalise des campagnes pour fournir aux investisseurs des données sur les potentiels géologiques du pays. Il est aussi actif dans des programmes de recherche sur la géothermie.
64L’action publique passe notamment par le soutien à des programmes de recherches public-privé pour développer de nouvelles technologies. Deux fonds de 500 M AUD chacun sont destinés aux énergies renouvelables et aux technologies du charbon propre. Des financements moindres sont destinés aux recherches sur l’efficacité énergétique des bâtiments et au développement des biocarburants.
65Un programme destiné à accroître la part des renouvelables sous la forme d’obligations à incorporer des énergies renouvelables (MRET – Renewable Mandatory Energy Targets). Les objectifs ont été principalement atteints avec le déploiement d’éoliennes, technologie la plus mature à l’heure actuelle. La production d’énergie éolienne est passé de 0,6 PJ en 2001-2002 à 6 PJ en 2005-2006 et à 22,5 PJ en 2006-2007 pour un parc installé de 1250 MW (Abare, 2009).
66Des travaux de recherche de haut niveau sont menés par le centre de Newcastle du CSIRO, organisme public de recherche fonctionnant sur projets, dans le domaine de l’énergie, ainsi que dans des laboratoires universitaires (notamment à l’ANU – Australian national university), en association avec des entreprises privées. Toutefois la plus grande part de la recherche est menée par les compagnies privées dont les dépenses en R&D ont beaucoup augmenté depuis le début de la décennie.
67Les technologies privilégiées sont :
- le solaire de concentration, avec différentes techniques (tour, auges) pour le CSIRO, mais aussi le développement de cellules photovoltaïques plus efficaces. Le potentiel solaire de l’Australie est énorme. L’équipement des toits des maisons en photovoltaïque et en dispositifs thermiques est un considérable gisement ;
- le captage et le stockage du CO2 est un enjeu majeur pour l’industrie du charbon. Un centre de recherche coopératif regroupant des acteurs publics et privés du secteur a vu le jour (CO2CRC), avec la participation de tous les principaux acteurs des secteurs pétroliers et charbonniers. Ce groupe conduit des recherches, avec en particulier un site pilote de stockage géologique dans l’État de Victoria, ainsi que différents programmes sur le captage du CO2 ;
- la gestion intelligente des réseaux (smart grids).
1.3.2. La Nouvelle-Zélande
68La Nouvelle-Zélande ne compte que 4 millions d’habitants sur un territoire de 270 000 km2. Son approvisionnement énergétique repose sur des ressources nationales (charbon, gaz, pétrole, hydro électricité) qui ne sont pas suffisantes pour éviter de recourir à des importations de pétrole et, de plus en plus, de produits pétroliers. La production de pétrole et de gaz décline à partir de 1997 avec l’épuisement des gisements de Maui, elle reprend depuis 2004 sur les gisements de Pohokura, Waihapa, Piakau et Stadford.
69Les énergies renouvelables sont particulièrement importantes. Elles représentent environ un tiers de l’énergie totale et deux-tiers de l’électricité. Cette situation exceptionnelle s’explique en partie par les conditions favorables pour les installations éoliennes, géothermiques et hydro-électriques. Il n’existe pas d’aides spécifiques pour les énergies renouvelables, hormis l’attribution de crédits de carbone aux projets dans le cadre de la politique nationale de réduction des émissions de GES. Les usages domestiques (chauffe-eau solaire) ont été fortement développés. Toutefois, en l’absence d’incitations financières, la croissance de la consommation énergétique se fait surtout à partir des ressources fossiles, si bien que la part des renouvelables diminue.
70La Nouvelle-Zélande a ratifié le protocole de Kyoto en 2002 et s’est engagée dans des programmes de contrôle de ses émissions de GES. Or, près de la moitié des émissions de GES en Nouvelle-Zélande provient de l’agriculture, ce qui rend difficile l’application de mesures de réduction. L’idée d’une taxe carbone ayant été abandonnée pour ne pas nuire à la compétitivité des industries, la Nouvelle-Zélande privilégie la mise en place d’un marché des permis d’émission.
71En 2007 la Nouvelle-Zélande a adopté une stratégie énergétique à l’horizon 2050 prévoyant notamment le renforcement des énergies renouvelables, dont la compétitivité relative serait supérieure à celle des énergies fossiles du fait des coûts associés aux émissions de GES. Outre les énergies déjà existantes, la stratégie insiste sur le potentiel de biomasse et les biocarburants pour les besoins du transport.
1.4. Les grandes entreprises
1.4.1. Les acteurs du pétrole et du gaz : entreprises privées et compagnies nationales
72Le marché du pétrole a été longtemps dominé par les grandes compagnies intégrées provenant d’Europe et d’Amérique du Nord (les sept sœurs) qui sont aujourd’hui largement concurrencées par les grandes compagnies des pays producteurs, des compagnies moyennes et les compagnies de pays consommateurs qui participent de leur stratégie de sécurisation des ressources énergétiques.
73Cette concurrence est vive en Asie-Pacifique où se combinent la croissance rapide des besoins énergétiques et des zones nouvelles d’exploration et de production.
74On y repère aussi bien les grands groupes mondiaux, comme ailleurs, mais également des compagnies nationales des pays producteurs et consommateurs, ainsi que des entreprises privées originaires de la région et qui y développent leurs activités. Certains groupes miniers comme BHP Billiton sont aussi présents dans la production de pétrole et de gaz en Australie.
1.4.2. Les acteurs du charbon et de la mine
75L’organisation du marché du charbon est bien différente de celle du pétrole et du gaz. Pendant la seconde moitié du xxe siècle, le charbon n’était plus une ressource stratégique mondiale comme par le passé, elle ne l’est demeurée que dans certains États (Allemagne de l’Est, États-Unis, Russie, Chine) qui y avaient recours pour satisfaire les besoins nationaux. Ailleurs, les politiques publiques ont davantage porté sur la fermeture de mines que sur le maintien de l’activité. Inversement les producteurs ont cherché des débouchés au charbon en réduisant leurs coûts.
76Cette évolution a redessiné la carte du charbon mondiale en favorisant les grands gisements exploitables à faible coûts.
77Les grandes entreprises productrices7 de charbon ne sont pas aussi géographiquement diversifiées que les producteurs de pétrole et de gaz. On trouve parmi les principaux producteurs mondiaux des groupes à base nationale comme Coal India (Inde) et Shenhua (Chine) qui réalisent toute leur production dans un seul pays, et principalement pour les besoins nationaux. Le géant charbonnier mondial Peabody n’est que peu diversifié : il extrait environ 200 Mt aux États-Unis et seulement 10 Mt en Australie, mais est actif sur les marchés internationaux et le trading.
78En Australie, la production de charbon est le fait de trois types d’entreprises. D’une part, des groupes charbonniers australiens spécialisés qui n’exploitent de gisements qu’en Australie (Anglo Coal), un grand conglomérat australien très diversifié (Westfarmer), des spécialistes du charbon et les trois grands groupes miniers diversifiés BHP Billiton, Xstrata et Rio Tinto.
79Le tableau des acteurs du charbon est évolutif. Les grandes compagnies pétrolières qui possédaient des actifs miniers (BP, Shell) les ont cédés à des entreprises minières. Ce désengagement qui a lieu dans les années 1990 s’explique par la baisse de rentabilité des mines de charbon, prises entre la diminution des prix d’achat et la rigidité de leurs coûts. Il a ouvert la porte aux groupes miniers mondiaux qui ont procédé dans les dernières années à de nombreuses opérations de fusion et d’acquisition.
80Les entreprises japonaises consommatrices de charbon (Mitsui, Mitsubishi) sont présentes dans le capital de certains groupes et de certaines mines, ce qui leur permet de renforcer la sécurité de leurs approvisionnements.
81Le groupe Vale, autre géant minier, n’exploite pas encore de mines de charbon, mais il a ouvert une unité de négoce en Australie. Il développe actuellement (2009) deux mines de charbon, l’une au Mozambique et l’autre dans le Queensland (site de Belvedere) en association avec la firme australienne Aquila, qui devrait entrer en production en 2011.
82La production indonésienne est organisée différemment, avec la présence de nombreuses entreprises locales mais qui s’appuient sur les réseaux commerciaux de Glencore-Xstrata et de BHP Billiton, ce qui leur a permis de pénétrer de façon agressive les marchés de l’Asie-Pacifique.
83Contrairement aux marchés pétroliers, qui ont été largement organisés par les producteurs contrôlant une ressource stratégique, les marchés du charbon sont plutôt le théâtre de la concurrence entre fournisseurs pour trouver des débouchés – ce qui est une situation plus favorable pour les acheteurs.
84Malgré cela et le développement de marchés spot, les principaux acheteurs emploient différentes stratégies pour s’assurer le contrôle d’une partie des ressources : prises de participation des acheteurs aux activités de production, contrats d’approvisionnements à long terme, regroupement dans des grands groupes diversifiées. Ces groupes sont leaders ou associés aux usines de nickel prévues en N.-C.
85Celle-ci ne peut intervenir directement sur l’organisation des marchés énergétiques d’échelle régionale – mais elle pourrait le faire par ses participations dans les sociétés minières et énergétiques (SLN, Koniambo, Enercal). Elle peut aussi trouver en Nouvelle-Zélande et surtout en Australie des situations comparables, par certains aspects, à la sienne, et qui ont donné lieu à des solutions intéressantes ou à des travaux de recherche dont elle pourrait bénéficier.
1.5. Les stratégies d’insertion internationale de la Nouvelle-Calédonie
86Nous allons aborder certains aspects de l’insertion internationale de la N.-C. concernant les thèmes énergie et climat, dont le reste du rapport a montré l’étroite imbrication et qui sont développés dans le chapitre suivant à propos des mécanismes de réduction des émissions de GES.
87La N.-C. présente, pour sa consommation énergétique, une situation analogue à celle des autres pays émergents de la région. Elle ne détient pas en 2009 les compétences de politique étrangère exercées par l’État français. La loi organique dans ses articles 28 et suivants reconnaît uniquement à la N.-C. la possibilité de devenir membre associé ou observateur d’organisations internationales. Cette compétence doit néanmoins être soumise à l’accord de la France.
2. Quels scénarios possibles d’insertion de la N.-C. dans la dynamique internationale de la Convention des Nations unies pour le climat ?
88La Convention cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC ou UNFCCC, en anglais), dénommée ci-dessous « Convention », constitue le cadre dans lequel toutes les actions concernant l’évolution du climat sont négociées au niveau international. La N.-C., tout comme les départements français d’outre mer (DOM) et comme les Communautés d’outre mer (ex territoires d’outre mer, COM), est actuellement, via la France, partie à cette Convention.
89Le protocole de Kyoto, dénommé ci-dessous « Protocole », est un instrument sous la Convention. Son but est de réussir à réduire effectivement les émissions de GES de la planète de manière organisée est contraignante, tout en évitant que la production alimentaire soit menacée, et de manière à ce que le développement puisse se poursuivre de manière durable. Contrairement aux DOM, les COM et la N.-C. ne sont pas soumis aux obligations de ce Protocole.
90Nous décrivons ci-dessous les obligations sous la Convention et sous le Protocole jusqu’en 2012. Au moment de la rédaction de cette expertise, les modalités générales d’engagements post 2012 ne sont pas connues (décembre 2009). Quant aux modalités d’applications précises, il se pourrait qu’il faille ensuite encore un ou deux ans pour les préciser. D’ici là, on ne peut donc que se risquer à faire quelques hypothèses sur les amendements qui pourraient être proposés au Protocole, et sur les évolutions possibles des marchés des droits d’émissions de GES. Rappelons cependant qu’aucun pays n’est juridiquement obligé d’adhérer à ces instruments internationaux de lutte contre le changement climatique. Même en acquérant un statut qui lui permettrait d’adhérer aux Nations unies, la N.-C. pourrait décider de n’adhérer ni à la Convention ni au Protocole, ou d’adhérer seulement à la Convention, sans adhérer au Protocole. L’inverse n’est en revanche pas possible.
91La situation actuelle pourrait-elle se perpétuer ? Comment pourrait-elle évoluer ? C’est ce que l’on tente de préciser dans le chapitre 4. Dans « Les émissions et les réductions d’émissions de gaz à effet de serre en Nouvelle-Calédonie » on a donné un aperçu des émissions de GES de la N.-C. Soulignons dès maintenant que le revenu par habitant des Néo-Calédoniens place sans ambiguïté la N.-C. dans le groupe pays industrialisés ayant à montrer la voie dans la lutte contre le changement climatique. Ces derniers doivent, en cas de ratification du Protocole, réduire ou sérieusement limiter l’augmentation de leurs émissions de GES d’ici à 2012. Ils ont également des obligations envers les pays en développement alors que ces derniers n’ont, d’ici à 2012, pas d’engagements contraignants de réduction de leurs émissions. Les émissions par habitant sur le territoire de la N.-C. sont par ailleurs supérieures à celles des habitants de la France métropolitaine et même des États-Unis sur leurs territoires respectifs… Le non-engagement de la N.-C. pourrait donc attirer l’attention internationale, notamment celle des petits États insulaires (PEI ou Aosis) qui ont fortement œuvré pour que les deux instruments des Nations unies sur le climat, la Convention et le Protocole, voient le jour.
92Plusieurs scénarios d’évolutions sont donc examinés. Nous étudierons notamment le cas de l’Islande (cf. chapitre 5), le plus petit pays développé ayant ratifié le protocole de Kyoto et ayant, à ce titre, pris des engagements de limitation de ses émissions de GES d’ici à 2012. Sa population (environ 300 000 habitants) est non seulement voisine de celle de la N.C., mais les activités industrielles qui y sont actuellement développées sont également tournées vers l’exportation. Le poids de ces dernières dans le bilan des émissions nationales de GES sous le format des Nations unies y est important. En analysant cette question il apparaîtra que la détermination du niveau de limitation ou de réduction des émissions de GES par pays dans le cadre des négociations de Kyoto est particulièrement mal adaptée aux petits pays ayant une économie de ce type. Ce point doit être souligné. L’Islande a donc dû demander et négocier, dans le cadre des conférences des Parties à la Convention, l’obtention d’un traitement spécifique sous le Protocole. N’étant pas membre de l’Union européenne, elle n’était en effet pas susceptible de bénéficier d’un partage du fardeau au sein de cette entité au moment des négociations de Kyoto, à la différence d’autres pays de l’Union européenne à 15. Il apparaît ainsi que, pour la N.-C., il conviendrait donc sans doute, tout comme pour l’Islande, de distinguer les activités industrielles, fortement intensives en GES ou en carbone8 mais dont les produits sont destinés à l’exportation, des autres activités du territoire. Cela aussi bien pour des approches volontaires, donc en dehors du cadre des engagements internationaux sous les Nations unies, que pour les communications nationales et autres engagements dans le cadre des Nations unies.
2.1. Historique et contexte des négociations
93Dans ce bref historique des négociations, développé plus particulièrement à l’intention des nouveaux négociateurs, nous insistons sur le contexte dans lequel les accords ont été élaborés9. Cela permettra de mieux comprendre la manière dont la N.-C. pourrait se situer, en tenant compte à la fois des menaces sur le climat et de son avenir économique.
2.1.1. Le rapport du Giec de 1990 et la mise en chantier de la Convention sur le climat10
94Cela a déjà été mentionné dans le chapitre 3 les concentrations de ces GES dans l’atmosphère sont passées de 280 ppm, au début de la révolution industrielle, à près de 400 ppm aujourd’hui.
95Le premier rapport du Giec de 199011, a conclu que les émissions de GES d’origine anthropique pouvaient modifier l’évolution du climat. Il a alerté le monde sur la nécessité de limiter ces émissions afin d’éviter des changements climatiques susceptibles de mettre en danger les écosystèmes, la production alimentaire et le développement durable.
96On pensait alors qu’au cours du xxie siècle, la température moyenne du globe pourrait augmenter de 2 à 6 °C, que le niveau de la mer pourrait augmenter de 40 à 80 cm, et que la répartition des précipitations pourrait fortement se modifier ; que les zones arides et semi arides pourraient devenir encore plus arides, et que certains pays à haute latitude (comme la Suède et la Norvège) auraient à s’adapter à des précipitations plus importantes. Notons que les incertitudes quant aux changements à venir sont dues non seulement à l’insuffisance des modèles climatiques, mais également à notre incapacité de prévoir jusqu’à quel point, et à quelle vitesse, les pays réduiront leurs émissions de GES d’origine anthropique aux cours du xxie siècle.
97« Aucun pays du monde, déclara alors Mostafa Tolba, Secrétaire général du programme des Nations unies pour l’Environnement, ne peut protéger son propre morceau de ciel, ni réduire les émissions de gaz à effet de serre sur son territoire uniquement. Nous avons besoin d’un véritable partenariat mondial ». Suite à ce premier rapport du Giec, les Nations unies décidèrent donc de mettre en chantier, dès le début de 1991, la CCUNCC (ou UNFCCC en anglais). Celle-ci fut finalisée en mai 1992, puis soumise à la signature des gouvernements dès juin 1992. L’accord des gouvernements n’est cependant pas suffisant. Les accords internationaux doivent en effet ensuite être ratifiés par les parlements ou organismes similaires habilités à engager leur pays dans des accords internationaux. La Convention n’entra donc en vigueur qu’en 1994, lorsque le nombre suffisant de parlements des pays l’eurent ratifiée.
98Comme l’indique son nom, cette Convention donnait un cadre ; elle fixait un certain nombre de principes (article 3) comme celui de la « responsabilité commune mais différentiée des pays » (article 3.1) et d’agir suivant les capacités « respectives » des pays. « Il appartient, en conséquence, aux pays développés Partie (de cette Convention) d’être à l’avant-garde de la lutte contre le changement climatique ».
99Cela a conduit à des obligations différentes selon la richesse des pays. Les pays figurant à l’annexe 1 de la Convention (les pays industrialisés) doivent, d’une part, fournir plus fréquemment l’inventaire de leur émissions de GES12 et des communications nationales pour préciser les actions qu’ils mènent pour réduire ces émissions. Ils ont, d’autre part, des obligations en direction des pays en développement (dits non annexe 1 car ne figurant pas sur cette annexe des pays industrialisés) ; des obligations financières et la promotion des transferts de technologie pour lutter contre le changement climatique ou s’y adapter.
100Au sein des pays en développement, on distingua différentes catégories de pays en fonction, d’une part, de leur vulnérabilité au changement climatique et, d’autre part, de leur vulnérabilité aux mesures de ripostes (c'est-à-dire à la réduction des consommations de combustibles fossiles) pour limiter les changements climatiques (article 4.7). Une attention particulière doit être accordée aux pays les moins avancés (article 4.8).
101Cette Convention cadre ne fixait toutefois pas d’objectifs contraignants de réductions quantitatives des émissions de GES. Tous les pays appartenant aux Nations unies, sauf ceux en guerre comme la Somalie, purent donc la ratifier, et la ratifièrent.
2.1.2. De la mise en chantier du protocole de Kyoto à son entrée en vigueur en 2005
102Conscients de l’insuffisance des objectifs et de l’absence de contraintes, les pays Parties à la Convention mirent ensuite en chantier le protocole de Kyoto sur la base du mandat de Berlin (1995). Ce dernier précisait que seuls les pays développés devaient, dans une première période, prendre des engagements de réductions quantifiées. Il convenait d’aboutir autour de 2010 (d’où la période 2008-2012), à des émissions inférieures au niveau de 1990. Les accords sur ce Protocole, appelé protocole de Kyoto, furent obtenus sur ces bases en décembre 1997.
103Avant de ratifier ce Protocole les pays de l’annexe 1 – c'est-à-dire les pays industrialisés – devant réduire leurs émissions voulaient savoir suivant quelles modalités il convenait de le faire pour respecter les engagements souscrits. Or, ce Protocole ne fixait pas les modalités précises d’application. De nombreux points n’y étaient pas précisés. D’où les longues négociations qui débouchèrent seulement en 2001, avec les accords de Bonn et de Marrakech.
104L’Union européenne, le Japon et presque tous les pays industrialisés figurant àl’annexe 1 de la Convention le ratifièrent alors. En revanche, le gouvernement des États-Unis qui l’avait signé ne le ratifia pas. Le Congrès s’y opposait tant que les pays en développement rapide comme la Chine, l’Inde et le Brésil, susceptibles de concurrencer l’économie américaine, ne prendraient pas également des engagements de réduction de leurs émissions. Ce qui était manifestement en contradiction avec le mandat de Berlin sur la base duquel le Protocole avait été élaboré. Il fallut donc attendre que la Russie le ratifie pour que ce Protocole puisse enfin entrer en vigueur, le 16 février 2005.
105L’Australie, comme très souvent dans les négociations internationales sur le climat, suivit les États-Unis. Mais elle décida ensuite, en 2007, de revenir sur sa décision.
106La N.-C. ne figure actuellement pas dans le périmètre territorial ayant à prendre des engagements sous le protocole de Kyoto. Mais, compte tenu du revenu par habitant des Néo-Calédoniens, intermédiaire entre celui des Néo-Zélandais et des Australiens, supérieur à celui Polonais13, c'est-à-dire de pays figurant à l’annexe 1 de la Convention, les obligations de ce territoire sous le Protocole devraient être du même type que ceux des autres pays industrialisés figurant à l’annexe B du Protocole.
2.1.3. La période post 2012, les nouveaux constats du Giec et la déclaration du G8 à Hokkaido, en 2008
107Entre-temps les travaux des scientifiques permirent de mieux cerner la question climatique. Les rapports du Giec de 2001 et de 2007 confirmèrent les craintes antérieures. La certitude que le changement climatique déjà observé et à venir est principalement d’origine anthropique est maintenant plus grande qu’en 1990.
108D’après des travaux récents, présentés à Copenhague en mars 2009, le niveau moyen des mers pourrait même, avec le rythme actuel des émissions, s’élever d’un mètre d’ici à 2100 (Ramstorf, 2009). Cette élévation est supérieure à celle prévue dans le quatrième rapport du Giec qui n’a analysé que les publications parues avant 2006. Au-delà de l’an 2100, cette élévation se poursuivrait. C’est un point que l’on n’avait pas souligné fortement avant le troisième rapport du Giec de 2001. Ces nouveaux résultats ne diminueront pas l’inquiétude des petites îles et des pays ayant d’importantes productions agricoles le long de zones côtières ou dans les deltas.
109Les scientifiques estiment maintenant que pour stabiliser le climat et éviter toute dérive incontrôlable il faudrait, d’ici à 2050, diviser les émissions mondiales actuelles par 2 (Giec 2007) ! En 2050, le climat serait alors plus chaud qu’actuellement d’environ 2 °C. En effet, même si l’on stoppait brutalement toutes les émissions anthropiques de GES, le réchauffement se poursuivrait encore pendant une trentaine d’années à cause de l’excédent de ces gaz déjà accumulé dans l’atmosphère. Mais, du moins espère-t-on, en divisant ces émissions par 2, pouvoir éviter des changements encore beaucoup plus importants et plus menaçants, qui sinon pourraient apparaître vers la fin de ce siècle et au xxiie siècle !
110C’est sur la base des résultats de recherche les plus récents analysés par le Giecque les chefs d’États, présents au sommet du G8, à Hokkaido en juillet 2008, ont adopté pour la communauté internationale l’objectif, non pas de stabilisation des émissions, mais de stabilisation du climat.
111Ce qui implique, d’ici à 2050, une division par 2 des émissions mondiales, et entre 2012 et 2020, des réductions d’émissions bien plus fortes que celles envisagées précédemment sous le protocole de Kyoto. Ces engagements seraient à prendre en décembre 2009 ou/et après, toujours dans le cadre de la Convention cadre sur le changement climatique, soit avec un protocole de Kyoto amendé, soit sous un nouveau Protocole (de Copenhague ?) qui pourraient reprendre une grande partie des obligations et modalités d’application du protocole de Kyoto.
112Depuis 2009, le président des États-Unis montre une nouvelle volonté de reprendre la place qui revient à son pays, dans la période post 2012, dans cette lutte contre le changementclimatique. L’issue dépendra de la position finale du congrès de États-Unis. Il y aura des discussions sur le niveau des réductions d’émissions à réaliser d’ici à 2020, sur l’année de référence pour déterminer ces réductions (1990, 2000 ou 2005). Dans quelle mesure et suivant quelles bases des pays comme la Chine le Brésil et l’Inde accepteront-ils de prendre des engagements de limitations de leurs émissions ?
113Yvo de Boer, Secrétaire de la Convention des Nations unies avait souligné, à Pozna’n, en décembre 2008, « que l’accord de Copenhague en décembre 2009 ne serait pas détaillé. « L’essentiel, estimait-il, est d’avoir de la clarté sur les engagements [de réduction des émissions de GES], sur le financement et sur les institutions (…) pour qu’ensuite il n’y ait plus de négociations sur les points fondamentaux ». Il pourrait donc y avoir ensuite, comme après le protocole de Kyoto, des négociations sur les détails, en quelques sortes sur les modalités d’applications. D’aucuns pensent même qu’un accord ne pourrait intervenir qu’après 2009.
Principales dates relatives aux actions concernant le changement climatique
1979. Première conférence mondiale sur le climat à Genève et deuxième choc pétrolier.
1985 et 1987. Réunion à Villach en Autriche, organisée par le PNUE (Programme des Nations unies sur l’environnement), l’OMM (Organisation mondiale de la météorologie) et l’ICSU (Conseil international pour la science), recommandant notamment de développer des recherches sur l’effet de serre.
1988. Décision de mise en place du Giec (Groupe intergouvernemental sur l’évolution du climat) sous l’égide des Nations unies, et en particulier de l’OMM et du PNUE.
1990. Remise du premier rapport du Giec alertant le monde sur les risques climatiques résultant des émissions de GES d’origine anthropique. L’assemblée générale des Nations unies décide alors de la mise en place du Comité intergouvernemental de négociation (CIN) pour l’élaboration d’une Convention cadre sur le changement climatique.
1991. En janvier, mise en place du CIN.
1992. En mai, approbation par les délégués des gouvernements de la Convention cadre sur le changement climatique. En juin, présentation de celle-ci à la Conférence des Nations unies sur le développement et l’environnement se tenant à Rio.
1994. Le 21 mars, entrée en vigueur de cette Convention, après ratification par les parlements d’un nombre suffisant d’États membres des Nations unies.
1995. Première conférence, à Berlin, des parties (CdP) à la Convention. Adoption du mandat de Berlin pour la mise en chantier d’un protocole avec des réductions d’émissions contraignantes.
1997. 3e CdP aboutissant au protocole de Kyoto, le 11 décembre 1997.
1998. 4e CdP : Plan d’action de Buenos-Aires prévoyant d’aboutir à la mise en place de règles d’application du Protocole.
2000. En mai, rapport spécial du Giec sur « L’utilisation des terres, les changements d’utilisation des terres et les forêts » répondant à la commande des négociateurs des pays des Nations unies (article 3.4 du Protocole), 6e CdP à la Haye en novembre : échec des négociations sur les règles d’application du Protocole.
2001. 7e CdP : Accords de Bonn, en juin, et de Marrakech, en novembre, relatifs aux règles d’application du Protocole. Troisième rapport du Giec indiquant que pour stabiliser le climat il faudrait diviser les émissions mondiales de GES par 2 d’ici à 2050.
2005. Entrée en vigueur du Protocole après ratification par les parlements d’un nombre suffisant d’États membres des Nations unies. CdP de Montréal précisant encore des règles d’application du Protocole pour la première période d’engagement (2008-2012) et début des négociations pour la période post 2012. Revirement des petits États insulaires quant à la prise en compte des boisements et des déboisements.
2006. CdP de Nairobi.
2007. Quatrième rapport du Giec confirmant la nécessité, déjà apparue dans le 3e rapport de 2001, de réduire très fortement les émissions de GES pour stabiliser le climat et éviter des évolutions incontrôlables. CdP de Bali et Plan d’action de Bali.
2008. Le G8 réuni à Hokkaido adopte l’objectif de division par 2, d’ici à 2050, des émissions mondiales de GES. CdP de Pozna’n, en Pologne. L’Union européenne s’engage à réduire ses émissions de GES de 20 % par rapport à 1990 et jusqu’à 30 % en cas d’accord international.
2009. CdP de Copenhague en décembre, au cours de laquelle on doit en principe finaliser les engagements de limitations et de réductions des émissions des pays des Nations unies pour la période 2012-2020.
2.1.4. Les négociations
114Les séances de négociations relatives à la Convention commencèrent début 1991, puis aboutirent à la version finale en mai 1992 à New York, après quatre réunions d’une quinzaine de jours chacune. Il faut en effet souligner que tant que l’ensemble des accords négociés n’est pas accepté, rien n’est accepté, pas même les textes qui ont fait l’objet d’accords détaillés dans les groupes de contacts ou en séances plénières. Il faut donc parvenir à un accord équilibré sur tous les points et acceptable par toutes les Parties.
115Comme tous les accords au sein des Nations unies, ceux-ci sont obtenus par consensus. Il devient ensuite assez difficile de renégocier les accords, même si parfois cela peut se justifier. C’est pourquoi il faut être présent, non seulement aux séances de négociations officielles, mais aussi dans les groupes de contact des négociations où s’élaborent les différentes propositions sur la base des différents intérêts des divers groupes de pays. Ce sont ces groupes de pays qui négocient au préalable des positions communes qu’ils défendent ensuite, en désignant un porte-parole pour les groupes de contact où s’élaborent les textes. Il faut aussi noter qu’il est impossible pour une petite délégation d’un pays d’être présent sur tous les sujets. Même pour les grandes délégations, les discussions peuvent parfois être difficiles à mener de front. En cas de consensus au sein d’un groupe de contacts les propositions sont soumises aux séances plénières. Un pays peut alors revenir éventuellement sur les consensus obtenus. Mais c’est toujours délicat, car à ce stade on remet en cause le travail du groupe de négociations, alors qu’il aurait fallu le faire en amont.
116L’ouvrage Au nom de ma délégation, même s’il date un peu et s’adresse plutôt aux négociateurs des pays en développement, peut être fort utile pour des négociateurs débutants des pays industrialisés14.
117Les ministres chargés de l’Environnement – mais parfois aussi d’autres ministres, notamment ceux chargés de l’Économie ou des Affaires globales (dans le cas des États-Unis) – des pays Parties à la Convention ou au Protocole prennent en général le relais des négociateurs à la fin des Conférences des Parties (les CdP ou COP en anglais). Ces dernières se tiennent en général en fin d’année15. C’est seulement en cas de litiges que les propositions des groupes de contacts – avec des parties de texte entre crochets, car n’ayant pas fait l’objet de consensus – sont ensuite soumises en séance plénière, puis éventuellement transmises au segment ministériel.
118Toutes ces négociations ont lieu en anglais. Le processus peut paraître assez laborieux, mais reste incontournable.
119Si les Nations unies ne reconnaissent que les États, ceux-ci peuvent, en revanche, composer leur délégation comme ils l’entendent. Le Canada mentionne souvent les peuples indigènes, mais ces derniers ne participent pas formellement en tant que tels aux négociations. Ils sont parfois présents dans des présentations parallèles, non officielles (side event dans le jargon international), pour y présenter les résultats de leurs travaux, ou leurs points de vue, tout comme les ONG nationales ou internationales accréditées, ou les organismes universitaires ou de recherches16.
120La francophonie organise régulièrement des sessions d’information et publie le bulletin Objectif Terres relatant l’évolution des négociations (http://www.iepf.org/).
Les groupes de négociation
Tous les accords doivent être pris par consensus. Il n’y a en général pas de vote formel. La complexité des négociations a conduit à réunir des groupes de pays ayant des intérêts et de visions communes. Ces groupes se sont mis en place dès la mise en chantier de la Convention cadre sur le changement climatique, en février 1991. Pour les ateliers de discussions, comme pour les groupes techniques de négociations, ce sont ces entités qui désignent leurs représentants. C’est pourquoi les États ont constitué des groupes de négociation.
On y distingue, comme toujours aux Nations unies, le groupe du G77 et de la Chine et le groupe des pays industrialisés. Mais ces deux grands groupes se sont subdivisés compte tenu de leurs intérêts et visions divergents. Le groupe des petits États insulaires en voie de développement (PEID ou Aosis) occupe dans ce cadre une place plus importante que dans les autres instances internationales.
Les groupes de négociations des pays figurant à l’annexe 1
Le groupe de l’Union européenne à 15 au moment des négociations de Kyoto comprend maintenant 27 membres.
Le Jusscannz était composé initialement de l’Australie, du Canada, du Japon, de la Norvège, de la Nouvelle-Zélande et de la Suisse. L’Islande pouvait également assister aux réunions de ce groupe. Il s’est par la suite subdivisé en groupe « Parapluie » ou Umbrella (États-Unis, Canada, Australie, Nouvelle-Zélande, Japon, Islande, Ukraine, Fédération de Russie…) et en groupe de l’Intégrité environnementale (Suisse, Corée du Sud et quelques autres pays). De nouvelles coalitions peuvent se former.
Le Canada, adhérent au protocole de Kyoto, et les États-Unis actuellement non adhérents, eurent donc des intérêts quelque peu divergents pour la première période d’engagements. Mais il est probable que leurs intérêts se rapprocheront de nouveau.
La création d’un groupe d’îles des pays développés fortement émetteurs de GES (Islande, etc.) pourrait sans doute être imaginée le moment venu.
Les groupes de négociations des pays ne figurant pas à l’annexe 1 : le G77 et la Chine
Le G77 et la Chine comprend l’ensemble des pays en développement, c'est-à-dire non pas 77 pays en développement et la Chine, mais quelque 140 pays.
Au sein de cet ensemble on trouve des groupes ayant des intérêts divergents et même parfois totalement opposés :
- le groupe des pays de l’Opep et celui des PEID (Petits États insulaire en développement) ;
- le Grulac qui comprend les pays de l’Amérique centrale et du Sud, à l’exception du Brésil et du Mexique ;
- le groupe des pays africains ;
- le groupe des PMA (Pays les moins avancés)17 ;
- le groupe des pays asiatiques, etc.
Il y a aussi des groupes non officiels, comme celui des pays émergents (Chine, Inde, Brésil, parfois Afrique du Sud)
De nouvelles coalitions peuvent évidemment apparaître.
2.2. La convention cadre sur le changement climatique et les obligations des pays l’ayant ratifiée
121Rappelons tout d’abord le but ultime de la Convention cadre des Nations unies sur le climat (article 2)
122« L’objectif ultime de la présente Convention et de tous les instruments juridiques connexes que la conférence des Parties pourrait adopter est de stabiliser, conformément aux dispositions pertinentes de la Convention, les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique. Il conviendra d’atteindre ce niveau dans un délai suffisant pour que les écosystèmes puissent s’adapter naturellement aux changements climatiques, que la production alimentaire ne soit pas menacée, et que le développement économique puisse se poursuivre de manière durable. »
123Les pays Parties à la Convention cadre des Nations unies, notamment les pays industrialisés figurant à l’annexe 1, ont des obligations spécifiques découlant notamment des articles 3, 4, 5, 6, 11 et 12 de la Convention. Seules les plus importantes sont mentionnées ci-dessous.
124On distingue deux grandes catégories de pays avec un sous-ensemble pour les pays en développement :
- les pays riches figurant à l’annexe 1 de la Convention (et en général à l’annexe B du protocole de Kyoto) ;
- les pays en développement (PED) ne figurant pas à l’annexe 1 qui ont des obligations plus souples ; ils doivent réaliser des communications nationales et des inventaires de leurs émissions, mais moins fréquemment que les pays de l’annexe 118. Ces inventaires et communications nationales sont obligatoires pour les pays en développement souhaitant bénéficier du MDP (Mécanisme de développement propre) à condition qu’ils aient ratifié le Protocole de Kyoto19 ;
- après la ratification de la Convention, il a été proposé et adopté par la conférence des parties que les pays en développement les moins avancés (PMA), au sens des Nations unies (car ayant un revenu par habitant inférieur à un certain niveau comme, par exemple, le Sénégal), pourraient se limiter à la réalisation d’un plan national d’adaptation au changement climatique (Pana). La plupart des PMA, un sous-ensemble des pays ne figurant pas à l’annexe 1, ont maintenant réalisé ces Pana, une condition indispensable, mais non suffisante, pour pouvoir bénéficier d’aides à l’adaptation aux changements climatiques ou de projets MDP (sous le mécanisme du développement propre) sous le protocole de Kyoto. Certains PMA ont cependant également réalisé des communications nationales.
Principales obligations des pays de l’annexe 1 sous la Convention
Inventaire national des émissions de GES (article 4a)
Ces inventaires par pays sont demandés aux pays de l’annexe 1 et aux PED. Ils doivent être réalisés selon les règles décrites dans les guides méthodologiques des inventaires du Giec (révision de 2006 http://www.ipcc.int) et suivant les formats décidés par la Convention (cf. notes du SBSTA – organe technique, sur les Inventaires http://www.unfccc.int/).
Ces émissions sont d’abord exprimées en poids pour chacun des gaz ; en gaz carbonique (CO2), méthane (CH4), protoxyde d’azote (N2O), en gaz industriels (HFCs, PFCs, et SF6). Ils sont ensuite convertis en équivalent CO2 en tenant compte des potentiels de réchauffement global (PRG) de chacun des gaz, pour un horizon de 100 ans, publiés par le Giec à la demande de l’UNFCCC20.
Ces émissions sont ensuite ventilées suivant diverses catégories ; (1) l’énergie, (2) l’industrie, (3) les solvants, (4) l’agriculture, (5) les changements d’affectation des terres et la foresterie, (6) les déchets et (7) autres, le cas échéant.
Ces inventaires peuvent faire l’objet d’audits par les Nations unies, les équipes d’audits comprenant des experts de pays de l’annexe 1 et de pays ne figurant pas dans cette annexe. Les guides méthodologiques du Giec (révisions 2006) pour les inventaires des émissions donnent, par grandes zones, des facteurs d’émissions par défaut permettant de calculer les émissions à partir de différents recensements21.
Le Giec recommande d’utiliser si possible des facteurs d’émissions améliorés, spécifiques à chaque pays ou à des sous-ensembles mieux définis, mais sous réserve de validation scientifique, notamment par des publications scientifiques. Ces inventaires servent à calculer les émissions et aussi les réductions d’émissions que devront réaliser les pays.
La catégorie 5, relative aux variations de stocks de carbone consécutives aux changements d’utilisation des terres et à la foresterie, a cependant un statut particulier, en raison des imprécisions des mesures22.
À ce stade, les émissions résultant des consommations d’énergie fossile à partir des soutes internationales (bunker fuel) pour les transports internationaux aériens et maritimes, en sont également exclues.
Seules les émissions ayant lieu sur le territoire du pays considéré sont comptabilisées pour chaque pays. Les émissions des produits et services importés ou exportés ne sont actuellement pas prises en compte dans ces comptabilités.
Il est à noter aussi qu’il est demandé aux pays d’améliorer d’abord la précision des émissions de GES issues des sources de GES clefs, c’est-à-dire représentant un pourcentage significatif des émissions du pays. On ne cherchera donc pas à préciser davantage les mêmes types d’émissions dans chaque pays. Les priorités dans l’amélioration de la connaissance des émissions dépendent donc des pays et des périmètres considérés.
En France c’est le Citepa (http://www.citepa.org/) qui réalise ces inventaires pour le compte du ministère (et jadis de la MIES). Mais c’est le gouvernement – le ministère en charge de cette question, qui est responsable de la transmission des inventaires aux Nations unies, sous le format requis.
Ces inventaires, à mettre régulièrement à jour, figurent dans les communications nationales des pays.
Les Communications nationales (article 4.1b)
Les communications nationales doivent être établies périodiquement suivant les décisions et les formats retenus par les CdP. Ces formats peuvent évoluer23. Dans l’annexe 1 du présent document figure la communication nationale de l’Islande. Ce qui permet de se faire une idée du type d’informations à fournir pour un petit pays figurant à l’annexe B.
Les communications nationales de la France sont disponibles sur le site http://www.effet-de-serre.gouv.fr./.Enfin toutes les communications nationales transmises à l’UNFCCC figurent également sur le site des Nations unies (http://www.unfccc.int/).
Remarque : les pays en développement, comme la Chine, l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud, ont également à réaliser des inventaires et des communications nationales, mais avec une fréquence moindre que pour les pays de l’annexe 1. Les pays les moins avancés, très peu émetteurs de GES par habitant, peuvent se contenter de réaliser des Programmes nationaux d’adaptation aux changements climatiques (Pana).
Communications diverses
Tout au long des négociations, il peut être demandé divers avis, diverses informations aux pays de l’annexe 1, et divers justificatifs d’actions, par exemple envers les pays non annexe 1 : sur les transferts de technologies (article 4.5 de la Convention), sur l’aide aux pays en développement les plus vulnérables (article 4.7 de la Convention) et aux pays les moins avancés (article 4.8 de la Convention), etc.
Autres engagements des pays de l’annexe 1
Les pays de l’annexe 1 remplissent en partie leurs obligations vis-à-vis des PED, via le Fonds mondial pour l’environnement (FEM) (http://www.gef.org/); financements pour des formations diverses pour des pays en développement, notamment pour la réalisation des inventaires, des communications nationales, des plans nationaux d’adaptation aux changements climatiques dans ces pays, etc.).
125L’ensemble des 26 articles régissant la convention cadre sur le changement climatique peut être consultée sur le site de l’UNFCCC (http://www.unfccc.int/) ou dans la brochure de 30 pages publiée par le PNUE.
126En résumé, les pays membres des Nations unies, inscrits à l’annexe 1 de la Convention, ayant ratifié cette dernière doivent se soumettre à diverses obligations dont les plus importantes sont les suivantes :
- la réalisation périodique des inventaires des émissions anthropiques de GES du pays, par leurs sources et via l’absorption par les « puits » de tous les GES non réglementés par le protocole de Montréal (article 4.1 a) ;
- la publication périodique, sous forme de « communication nationale », des programmes contenant les mesures adoptées par le pays pour atténuer les changements climatiques, c'est-à-dire pour réduire les émissions (mitigation en anglais), et pour s’adapter aux changements climatiques (article 4.1 b) (cf. annexe 1 à ce document) ;
- d’encourager et de soutenir la mise au point et la diffusion de technologies ou pratiques ou procédés qui permet de réduire ces émissions de GES (article 4.1 c) ;
- d’encourager la conservation et, le cas échéant, le renforcement des puits et réservoirs de tous lesGES (article 4.1 d), etc. ;
- de participer à l’aide et aux financements pour répondre aux besoins spécifiques des pays en développement ne figurant pas à l’annexe 1 (article 4.8), et en particulier aux PMA (article 4.9), etc.
127Ils doivent aussi répondre aux nouvelles demandes, très diverses, qui peuvent apparaître tout au long des négociations ayant lieu continuellement, sur la base du texte de la Convention. Ces obligations sont décidées lors des rencontres des Parties. C’est pourquoi, il est important de participer aux négociations et que les négociateurs connaissent parfaitement bien tous les articles (et les interprétations possibles), de la Convention, du Protocole et des accords de Bonn et de Marrakech. Car il s’agit alors, pour chaque pays, d’obtenir les arrangements nécessaires en faisant éventuellement valoir sa situation particulière. Il y a en outre régulièrement des procédures de soumissions écrites par les Parties, en fonction des demandes des négociateurs de la Convention. Plusieurs pays peuvent répondre collectivement. C’est ainsi que l’Union européenne répond au nom des divers pays qui la composent et qui lui proposent des réponses écrites discutées ensuite pour aboutir à une proposition commune. L’UE répond parfois aussi au nom d’autres pays partageant les mêmes visions24.
128Les communications nationales, avec les inventaires des émissions nationales, sont disponibles sur le site de l’UNFCCC.
129Actuellement la N.-C., partie à la Convention via la France, n’a besoin de fournir à l’UNFCCC ni d’inventaires spécifiques de ses émissions (celles-ci figurent dans la rubrique des émissions de la France, des TOM, des COM et de la N.-C., dans la communication de la France)25 ni de communications nationales spécifiques.
130C’est donc le gouvernement français qui reste responsable des éléments transmis ou à transmettre aux Nations unies.
3. Le protocole de Kyoto et les obligations des pays l’ayant ratifié
131L’ensemble des 28 articles régissant le protocole de Kyoto pour la période 2008-2012 se trouve sur le site de l’UNFCCC ou dans la brochure de 37 pages publiée par le PNUE.
132Pour les modalités d’applications, il faut en principe se référer aux différentes décisions adoptées par les Parties et adoptées en 2001 à Marrakech. La Mission interministérielle de l’effet de serre (MIES) en a fait un résumé de 59 pages que l’on pourra consulter pour approfondir ces questions (http://www.effet-de-serret.gouv.fr/).
3.1. L’intérêt du protocole de Kyoto et les lenteurs de sa ratification
133Comme la Convention signée en 1992 n’imposait aucune réduction quantifiée des émissions, les « pays parties » à celle-ci décidèrent, dès leur première conférence en 1995, d’élaborer un Protocole. Le mandat de Berlin de 1995, adopté par consensus par tous les gouvernements de pays, y compris par celui des États-Unis, stipulait alors que pour une première période les pays en développement n’auraient pas à prendre d’engagements. Ces derniers attendaient que les pays industrialisés réalisent de réelles réductions d’émissions, d’où d’ailleurs l’article 3.2 du Protocole exigeant qu’en 2005 ces derniers fassent la preuve des progrès réalisés (cf. annexe 1 montrant comment l’Islande s’est acquittée de cette tâche).
134Selon l’article 25 du protocole de Kyoto, il fallait, pour que ce Protocole puisse entrer en vigueur, la ratification d’au moins 55 pays parties à la Convention et que les émissions des pays signataires figurant à l’annexe 1 de celle-ci représentent au moins 55 % du volume total des émissions de dioxyde de carbone de l’ensemble des Parties visées à cette annexe B. En l’absence de la ratification par les États-Unis, ces modalités rendaient l’entrée en vigueur du Protocole extrêmement difficile. C’est en définitive seulement la ratification de la Russie qui permit de débloquer la situation et de franchir les seuils requis pour l’entrée en vigueur effective du Protocole en 2005. À défaut, il aurait fallut entamer de nouvelles négociations.
135Ces détails montrent tous les efforts nécessaires à l’élaboration d’un accord international quand ceux-ci sont contraignants et concernent le développement économique, comme c’est le cas pour le protocole de Kyoto. Chaque gouvernement cherche alors à préserver ses intérêts.
3.2. Les engagements de réduction sous le protocole de Kyoto entre 1990 et 2010
136Le partage du fardeau de la réduction des émissions de GES entre 1990 et 2010 retenu sous le protocole de Kyoto (6 gaz, issus des divers secteurs mentionnés dans l’annexe A de ce Protocole), au niveau mondial et au niveau de l’Europe, figure dans l’encadré ci-dessous. Notons qu’on a pris pour référence l’année 1990, car cela correspondait à la publication du premier rapport du Giec. Mais, à production industrielle constante, les émissions annuelles, notamment celles provenant du chauffage dans l’habitat, varient en fonction du climat de l’année. Pour 2010, on a donc été plus prudent. On a considéré la moyenne annuelle des émissions entre 2008 et 2012 d’où la période d’engagement 2008-2012, et non pas les émissions de l’année 2010.
Les engagements de réduction des émissions sous le protocole de Kyoto entre 1990 et 2010
(2010 = moyenne des émissions annuelles entre 2008 et 2012)
Les pays industrialisés se sont engagés à réduire leurs émissions annuelles, en moyenne de 5,5 % par rapport à 1990.
Répartition mondiale
– -8 % pour l'Union européenne ; -7 % pour les États-Unis ; -6 % pour le Japon, le Canada et la Pologne ;
– 0 % pour la Nouvelle-Zélande, la Fédération de Russie et l'Ukraine, etc. ; – +1 % pour la Norvège ; – +8 % pour l'Australie ; +10 % pour l’Islande26.
Répartition des objectifs de réduction des émissions au sein de l’Union européenne
– -28 % pour l'Allemagne et le Danemark ;
– -13 % pour l'Autriche ; -12,5 % pour la Grande-Bretagne ; -7,5 % pour la Belgique ; -6,5 % pour l'Italie ; -6 % pour les Pays Bas ;
– 0 % pour la France et la Finlande et +4 % pour la Suède ; +13 % pour l'Irlande ; +15 % pour l'Espagne ; + 25 % pour la Grèce ; + 27 % pour le Portugal.
Il faut aussi noter que les pays de l’UE à 15 sont solidairement responsables, vis-à-vis des Nations unies, de la diminution globale de 8 % des émissions de l’UE par rapport à 1990 (articles 4.4 et 4.5 du Protocole).
Les pays entrés récemment dans l’Union européenne n’ont pas bénéficié du partage de ce fardeau. C’est ainsi que la Pologne doit réduire ses émissions de 6 % alors que le Portugal peut les augmenter de 27 %. L’Islande, qui ne fait pas partie de l’UE, a en outre eu droit à un traitement particulier détaillé plus loin.
137Dans le cadre du protocole de Kyoto, l’ensemble des pays de l’annexe 1 devait s’acheminer vers des réductions d’émissions par rapport à 1990. Ces engagements furent toutefois modulés pour tenir compte des situations particulières des divers pays.
3.3. Comment furent déterminés les niveaux de limitation et de réduction des émissions des divers pays ?
138Il n’y a pas de document officiel justifiant du partage du fardeau climatique. C’est le résultat des négociations. On peut néanmoins donner quelques explications :
- Comme la croissance démographique des États-Unis est plus forte que celle de l’Union européenne, une différence de réduction des émissions de 1 % entre ces deux entités peut se comprendre.
- Comme la Norvège utilisait beaucoup d’hydroélectricité, il était difficile d’y réduire les émissions dans le secteur de l’énergie. On l’autorisa donc à augmenter ses émissions de 1 %.
- L’Union européenne à 15 avait pris collectivement l’engagement de réduire les émissions de 8 % par rapport à 1990, mais avait également envisagé un partage du fardeau en son sein :
- ainsi la Suède, la Finlande et la France, dont la part d’énergie nucléaire et d’hydroélectricité dans les productions d’électricité est élevée, furent-elles, dans le cadre de l’Union européenne, autorisées à maintenir leurs émissions au niveau de 1990 ;
- les pays ayant récemment adhéré à l’Union européenne (le Portugal, l’Espagne, l’Irlande et la Grèce) furent en revanche autorisés à augmenter leurs émissions ;
- l’Allemagne s’engagea à réduire les émissions bien au delà de 8 %. Cet effort paraissait réaliste compte tenu des économies d’énergies réalisables notamment dans l’ex Allemagne de l’Est.
139Rien n’interdit ensuite à chaque pays de décider de répartir les efforts de réduction des émissions comme il l’entend, pourvu que les actions soient compatibles avec les règles internationales ou européennes.
- L’Australie demanda, dès avant les négociations de Kyoto à ce que les émissions dues aux changements d’utilisations des terres et à la foresterie soient prises en compte, dans son cas, pour le calcul des engagements chiffrés. D’où l’article 3.7 du Protocole. C’était le seul pays de l’annexe 1 dont les émissions avaient augmenté depuis 1990, à cause des changements d’utilisation des terres (déboisements et défrichements divers, feux, etc.)
- Par contre la question n’avait pas été complètement mise sur la table en temps voulu pour l’Islande. Il fallut donc opérer des ajustements ultérieurement. Ce point sera détaillé plus loin.
140Les réductions d’émissions demandées sous le protocole de Kyoto aux pays industrialisés étaient très faibles (-5 % en moyenne d’ici à 2012 par rapport à 1990). On se contenta donc de partir des inventaires des émissions de GES que les pays étaient obligés de fournir aux Nations unies, mais sans tenir compte des émissions dues aux changements d’utilisation des terres et à la foresterie (sauf pour l’Australie comme mentionné plus haut). On pouvait ainsi, sur la base des inventaires fournis par les pays, réellement contrôler les engagements de réduction des émissions de GES que les pays s’étaient engagés à réaliser.
141C’était évidement une cote mal taillée, mais acceptable pour la plupart des pays, moyennant quelques ajustements. Pour l’Islande il fallut en revanche une négociation spécifique.
142Comment aurait-on concrètement pu faire autrement ? L’idéal aurait été de pouvoir déterminer précisément les émissions moyennes de GES par habitant pour chaque pays comme on a tenté de le faire avec la formule de « Kaya » utilisée pour les scénarios d’émissions du Giec, ou comme on pourrait le faire avec la formule « Kaya-Riedacker27 » quand on prend également en compte les émissions résultant des changements d’utilisations des terres.
143Formule de Kaya
144Émissions totales de GES = Population * [PNB/habitant * consommation d'énergie fossile par unité de PNB * émission moyenne de GES par unité de produit fossile].
145Formule de « Kaya-Riedacker »
146Émissions totales de GES = Population * [PNB/habitant * consommation de produits fossiles par unité de PNB28 * émission moyenne de GES par unité de produit fossile + Utilisation des terres par habitant * Efficacité territoriale des bioproductions * émission moyenne de GES par unité de bioproduit].
147Il aurait fallu, dans ce cas, pouvoir déterminer, par pays, les émissions résultant des importations des produits et des services, et défalquer celles attribuables aux exportations29 ? Mais l’on n’avait pas les données pour le faire précisément. Et en procédant ainsi, on n’aurait que difficilement pu contrôler les engagements des limitations ou des réductions des émissions dans les divers pays.
148C’est d’ailleurs aussi ce manque de données qui complique la mise en place d’une taxe carbone à l’importation de produits, en provenance de pays n’ayant pas pris d’engagements (pays non annexe 1 et États-Unis), vers les pays de l’annexe B ayant pris des engagements de réduction de leurs émissions de GES.
149L’approche visant à plafonner les émissions provenant des territoires de chaque pays était la seule possible et opérationnelle à court terme et la seule acceptable alors pour vérifier les engagements des pays.
150On a également pensé retenir d’autres approches, comme l’instauration d’une taxe forte sur les consommations d’énergies fossiles ou l’augmentation de l’efficacité énergétique. Mais aucune de ces options n’aurait pu garantir l’obtention de réductions d’émissions demandées par rapport à 199030.
3.4. La solution Islandaise
151Quelle solution a-t-on trouvé pour l’Islande ? Tout d’abord on a autorisé ce pays à augmenter ses émissions de 10 % par rapport à 1990. C’est le plus fort taux d’augmentation des émissions affiché pour les pays de l’annexe B quand on considère l’UE de manière globale31. Mais cela n’était pas suffisant. D’où la décision 14 CP.7 retenue dans les accords de Bonn et de Marrakech. Celle-ci a été spécialement élaborée pour résoudre le cas de l’Islande bien que le nom de ce pays n’y soit pas mentionné.
152Cette décision (cf. encadré) définit – pour la première période d’engagement et pour des pays dont les émissions représentent moins de 0,05 % des émissions des pays industrialisés en 1990 et figurant à l’annexe 1 (§ 2a) – des projets industriels isolés ou des extensions d’activités industrielles entrées en service après 1990.
- Quand les émissions des activité industrielles isolées de ces pays dépassent 5 % du total des émissions de gaz carbonique du pays en 1990 (ce qui serait aussi le cas si la N.-C. figurait à l’annexe B), celles-ci doivent être présentées séparément et ne pas figurer dans le total national des émissions inventoriées de la Partie, dans la mesure où ces émissions conduiraient à un dépassement du niveau des émissions autorisées sous le protocole de Kyoto (plus de 10 % d’augmentation par rapport à 1990 dans le cas de l’Islande).
- Il faut également d’autres conditions :
- (§ 2b) que l’on utilise des énergies renouvelables pour réduire les émissions par unité de produits obtenus dans ces sites industriels (comme l’Islande utilise beaucoup d’énergie géothermique y compris pour la production d’électricité, on a évidemment insisté sur ce point).
- (§ 2c) que l’on recourt aux meilleures pratiques environnementales et aux meilleures technologies pour réduire les émissions des procès industriels.
153Le paragraphe 5 demande également que tout pays recourant à cette décision rende compte, dans les soumissions des inventaires des émissions annuelles, des facteurs d’émissions utilisés dans le procès industriel, que l’on chiffre les réductions d’émissions qui seraient obtenues par l’application des points 2b et 2c et par l’utilisation des énergies renouvelables dans ces projets. Ces informations doivent ensuite être compilées par le secrétariat de la Convention pour permettre des comparaisons (§ 6).
154Il faut enfin que les émissions concernant ces sites restent inférieures, en moyenne, durant la première période d’engagement, à 1,6 million de tonnes de CO2 par an. Ces émissions sont alors exclues du champ du marché de droits d’émissions, dont les modalités de fonctionnement sont définies par l’article 17 du Protocole32.
Decision 14/CP.7
Impact of single projects on emissions in the commitment period
The Conference of the Parties, Recallingits decision 1/CP.3, paragraph 5 (d),
Recallingalso, its decision 5/CP.6, containing the Bonn Agreements on the Implementation of the Buenos Aires Plan of Action,
Having considered the conclusions of the Subsidiary Body for Scientific and Technological Advice at its resumed thirteenth session FCCC/SBSTA/2000/14,
Recognizing the importance of renewable energy in meeting the objective of the Convention,
1. Decides that, for the purpose of this decision, a single project is defined as an industrial process facility at a single site that has come into operation since 1990 or an expansion of an industrial process facility at a single site in operation in 1990;
2. Decides that, for the first commitment period, industrial process carbon dioxide emissions from a single project which adds in any one year of that period more than 5 per cent to the total carbon dioxide emissions in 1990 of a Party listed in Annex B to the Protocol shall be reported separately and shall not be included in national totals to the extent that it would cause the Party to exceed its assigned amount, provided that:
(a) The total carbon dioxide emissions of the Party were less than 0.05 per cent of the total carbon dioxide emissions of Annex I Parties in 1990 calculated in accordance with the table contained in the annex to document FCCC/CP/1997/7/Add.l;
(b) Renewable energy is used, resulting in a reduction in greenhouse gas emissions per unit of production;
(c) Best environmental practice is followed and best available technology is used to minimize process emissions;
3. Decides that the total industrial process carbon dioxide emissions reported separately by a Party in accordance with paragraph 2 above shall not exceed 1.6 million tons carbon dioxide annually on the average during the first commitment period and cannot be transferred by that Party or acquired by another Party under Articles 6 and 17 of the Kyoto Protocol;
4. Requests any Party that intends to avail itself of the provisions of this decision to notify the Conference of the Parties, prior to its eighth session, of its intention;
5. Requests any Party with projects which meet the requirements specified above, to report emission factors, total process emissions from these projects, and an estimate of the emission savings resulting from the use of renewable energy in these projects in their annual inventory submissions;
6. Requests the secretariat to compile the information submitted by Parties in accordance with paragraph 5 above, to provide comparisons with relevant emission factors reported by other Parties, and to report this information to the Conference of the Parties serving as the meeting of the Parties to the Kyoto Protocol.
3.5. Comment les pays peuvent-ils s’organiser pour respecter les limitations ou les réductions d’émissions auxquels ils se sont engagés sous le protocole de Kyoto ?
155Le respect des engagements sous le protocole de Kyoto se situe au niveau des États et non pas au niveau des acteurs de chaque pays. C’est ensuite aux États de décider des politiques à mettre en place. Dans ce cadre, ceux-ci peuvent décider des politiques et mesures spécifiques (taxes, subventions, avantages fiscaux divers, règlements, etc.) pouvant conduire aux respect des engagements pris, à condition que cela ne s’oppose pas aux règlements internationaux en vigueur ; notamment à ceux agréés dans le cadre de l’OMC, ou pour les pays de l’Union européenne, à ceux de l’Union européenne.
156Ils peuvent adopter diverses politiques et mesures, notamment pour les activités diffuses (petites industries, habitat, transport, agriculture, forêts, déchets, etc.) :
- des règlementations ;
- des subventions ;
- des taxes diverses que l’on appelle parfois aussi « taxes carbone domestiques »33, etc.
157La création de nouvelles taxes est toujours impopulaire. C’est le cas pour les « taxes carbone domestiques ». Sauf quand celles-ci sont, finalement et réellement, fiscalement neutres et lorsqu’on arrive à expliquer correctement l’intérêt de leur mise en œuvre au grand public34. Très récemment un parti ayant fait campagne dans ce sens vient de gagner lesélections dans l’État de Vancouver au Canada.
158À cela se rajoute, d’une part, la possibilité de prendre en compte, de manière facultative pour la première période d’engagement, l’article 3.4 du Protocole relatif à des comptabilités spécifiques des variations de stocks de carbone, c'est-à-dire dans l’espace rural (forêts, prairies, etc.). Nous revenons plus loin sur cet article.
159Ce dispositif est complété, d’autre part, par la possibilité d’utiliser les trois mécanismes de flexibilité retenus sous le protocole de Kyoto :
- la mise en place d’un marché des droits d’émissions ;
- la réalisation de projets MDP dans les pays en développement, dans le cadre du mécanisme de développement propre (article 12 du Protocole) ;
- la mise en œuvre conjointe (MOC) de projets dans des pays de l’annexe 1 ayant ratifié le Protocole (article 6 du Protocole).
160Nous n’insistons pas ici sur les politiques et mesures qui peuvent être prises par chaque pays. Celles-ci dépendent des « circonstances nationales ». L’Union européenne a beaucoup insisté sur ces politiques indiquées dans l’article 2 du protocole de Kyoto. Mais même pour le Mécanisme de développement propre, dont il est indiqué dans l’article 12 qu’il devait servir à promouvoir le développement durable dans les pays en développement, il a été impossible de se mettre d’accord au niveau international sur des critères à remplir. C’est chaque pays qui définit ce qu’il entend par « développement durable ». C’est donc principalement la limitation et la réduction des émissions de GES qui a retenu l’attention des pays et des négociateurs.
161Nous évoquons donc maintenant les modalités de prise en compte des variations de stocks de carbone dans l’espace rural et les instruments économiques de flexibilité, appelés « mécanismes de Kyoto ».
3.6 La prise en compte des forêts et des changements d’utilisation des terres sous le Protocole : les articles 3.3 et 3.4
162L’Union européenne et le groupe de pays des petites îles (Aosis) étaient fortement opposés, à la prise en compte des « puits » (augmentations des stocks de carbone dans la végétation), du moins pour la première période d’engagement (2008-2012). Cela, en principe à cause du risque de non pérennité de ces stocks (tempêtes, attaques parasitaires, incendies, etc.). Mais le Japon, les États-Unis, le Canada, etc. ainsi que les pays producteurs de pétrole voulaient qu’on prenne en compte toutes les émissions et réductions d’émissions, donc aussi celles attribuables à la gestion des forêts et aux changements d’affectations des terres dans les pays industrialisés (défrichement de forêt ou de prairies pour mise en culture, boisement de terres agricoles, etc.). Cette question fut à l’origine des désaccords entre l’UE et les Pays de l’Ombrelle (États-Unis, Canada, Japon, etc.)
163D’où les deux articles suivants, 3.3 et 3.4, avec une rédaction particulièrement ambiguë de l’article 3.4, sans laquelle l’accord de Kyoto n’aurait jamais pu être obtenu. Dans la pratique les comptabilités retenues pour la prise en compte de l’article 3.4 sous le protocole de Kyoto (mentionné ci-dessous) sont très compliquées et parfois dissuasives.
164Article 3.3
165« Les variations nettes des émissions de gaz à effet de serre par les sources et l’absorption par les puits résultant de l’activité humaine directement liées au changement d’affectation des terres et à la foresterie et limitées au boisement, au reboisement et au déboisement depuis 1990, variations qui correspondent à des variations vérifiables des stocks de carbone au cours de chaque période d’engagement, sont utilisées par les parties visées à l’annexe 1 (pays industrialisés), pour remplir leurs engagements (de limitation et de réduction des émissions de gaz à effet de serre) prévus au présent article (3). Les émissions des gaz à effet de serre par les sources et l’absorption par les puits associées à ces activités sont notifiées de manière transparente et vérifiable et examinées conformément aux articles 7 et 8. »
166Pour les négociateurs de pays forestiers, le reboisement concerne la régénération des peuplements après une coupe. Alors que sous cet article 3.3 on ne considère que les boisements et (re)boisements de terres qui n’étaient pas considérées comme boisées ou forestières en 1990 au sens du protocole de Kyoto35. L’interprétation de cet article a longtemps prêté à confusion.
167On notera aussi l’insistance sur les activités humaines « directes ». Les résultats de politiques agricoles conduisant à des reboisements spontanés ne peuvent donc pas être pris en compte sous cet article. Cela signifie que les augmentations des stocks de carbone sur d’anciennes terres agricoles, par suite de l’abandon des cultures, mais sans reboisements classiques, ne peuvent pas être pris en considération sous cet article, mais seulement sous l’article 3.4 (option forêts) présenté plus loin.
168On comptabilise par ailleurs les diminutions de stocks de carbone (« débits »), entre 2008 et 2012, résultant des déboisements d’origine humaine directe pour la mise en culture ou en prairie de forêts, ou à d’autres fins comme l’exploitation minière. C'est-à-dire seulement les actions suivies d’un changement d’affectation des terres.
169Dans les boisements ayant lieu après 1990, on doit comptabiliser les augmentations et les diminutions (par exemple, par exploitation forestière) des stocks de carbone entre 2008 et 2012.
170La prise en compte de cet article 3.3 est obligatoire dès la première période d’engagement. Celle de l’article 3.4 est en revanche facultative jusqu’en 2012.
171Les modalités de mesures de ces variations de stocks ont été précisées précédemment. L’Union européenne a longtemps bataillé pour que, faute de mieux, seul cet article 3.3 soit retenu. Sous cet article certains pays forestiers (comme la France et la Finlande), dont les stocks de carbone en forêt augmentaient, risquaient cependant d’avoir un débit difficilement acceptable.
172Article 3.4
173« Avant la première session de la conférence parties (…), chacune des parties visées à l’annexe 1 fournit à l’Organe subsidiaire du conseil scientifique et technologique, pour examen, des données permettant de déterminer le niveau de ses stocks de carbone en 1990 et de procéder à une estimation des variations des stocks de carbone au cours des années suivantes. À sa première sessions, ou dès que possible par la suite, la Conférence des Parties (…) arrête les modalités, règles et lignes directrices à appliquer pour décider quelles activités anthropiques supplémentaires ayant un rapport avec les variations des émissions par les sources et de l’absorption par les puits des gaz à effet de serre dans les catégories constituées par les terres agricoles et le changement d’affectation des terres et la foresterie doivent être ajoutées aux quantités attribuées aux Parties visées à l’annexe 1 ou retranchées de ces quantités et pour savoir comment procéder à cet égard, compte tenu des incertitudes, de la nécessité de communiquer des données transparentes et vérifiables, du travail méthodologique du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, des conseils fournis par l’Organe subsidiaire de conseil scientifique et technologique conformément à l’article 5 et des décisions de la conférence des Parties. Cette décision vaut pour la deuxième période d’engagement et pour les périodes suivantes. Une partie peut l’appliquer à ses activités anthropiques supplémentaires lors de la première période d’engagement pour autant que ces activités aient eu lieu depuis 1990. »
174C’est seulement après l’échec des négociations en 2000 que l’on trouva, en 2001, des accommodements pour la prise en compte, de manière facultative et partielle pour la première période, des variations de stocks (1) en forêts (hors article 3.3), (2) dans l’espace agricole (prairies et cultures) et (3) pour la revégétalisation de terres ne conduisant pas à des forêts (au sens de la FAO). Pour plus de précisions sur les variations de stocks de carbone biotique et les émissions de GES en forêt et dans l’espace rural, ainsi que sur les méthodes de mesures (cf. « Les émissions et les réductions d’émissions de GES en Nouvelle-Calédonie »).
175Concrètement, cet article impose à chaque pays de déterminer le niveau de ses stocks de carbone en 1990 dans la végétation et dans les sols suivant la méthodologies du Giec approuvées par les négociateurs dans le cadre de la Convention. Il s’agit là du stock de carbone dans l’espace rural pour l’année de référence afin de pouvoir déterminer les émissions nettes de GES. C‘est donc bien les variations de stocks de carbone qu’il importe de mesurer. Ce qui suppose d’avoir des mesures à intervalle régulier. Pour les nouveaux pays entrant dans le Protocole, des dérogations pourraient sans doute être demandées quant à l’année de référence.
176Comme déjà indiqué, on mobilisa le Giec pour éclairer le débat. D’où le rapport spécial sur « L’utilisation des terres, les changements d’utilisation des terres et les forêts » du Giec approuvé par les gouvernements en mai 2000 (cf. http://www.ipcc.int/). Mais les décisions finales furent prises par les négociateurs dans le cadre de l’UNFCCC. Soulignons ici que les négociateurs n’avaient d’ailleurs pas demandé au Giec de proposer des solutions. C’est pourquoi ce rapport n’en contient pas. Cela illustre, une nouvelle fois, la différence des missions du Giec et de l’UNFCCC.
177Les sous-ensembles de l’article 3.4 pour la première période d’engagement
1. Options pour les forêts non prises en compte sous l’article 3.3
178Pour cette catégorie il fut décidé que pour remplir les engagements, un pays pouvait prendre en compte de l’ordre de 15 % des augmentations de stocks entre 2008 et 2012. Cela permettait, le cas échéant, d’annuler le débit sous l’article 3.3. Dans la pratique cette valeur de 15 % ne figure nulle part : c’est un tableau, appelé tableau z, qui définit les augmentations de stocks pouvant être prises en compte par les divers pays. Le Canada et la Russie bénéficièrent de quelques largesses. Mais celles-ci resteront inutilisées pour le Canada, car le stock de carbone des forêts de ce pays n’augmente pas. Ce pays a donc finalement renoncé à la prise en compte de l’article 3.4 pour la partie « forêts ». Les pays dont les stocks n’augmentent pas n’ont évidemment pas intérêt à retenir cet article.
2. Option pour les terres agricoles cultivées et les prairies
179Pour cet ensemble, les comptabilités pour la première période d’engagement sont différentes des forêts. Le gain Kyoto pour les activités retenues ici, correspondra à la variation des émissions (de CO2 et des autres GES), entre 2008 et 2012 de la catégorie considérée, moins 5 fois la variation en 1990 dans cette catégorie36 ! Autant dire que la prise en compte de cet article est impossible pour les pays qui n’ont pas un suivi fin des changements d’affectation des terres agricoles (passage de cultures aux prairies et réciproquement) et de l’utilisation des intrants agricoles. En France métropolitaine, on utilise les inventaires Teruti réalisés par le service de statistiques du ministère chargé de l’Agriculture. Le Canada, qui a un suivi fin et très ancien des activités agricoles et des variations de stocks de carbone dans les sols, a retenu cette modalité. Mais de nombreux pays, dont la France, ne purent y recourir : certaines informations relatives à 1990 n’étaient par exemple pas disponibles pour certains DOM.
3. Option pour la revégétalisation des terres
180Entrent dans cette catégorie les activités prises en compte ni sous l’article 3.3 ni par les activités déjà mentionnées sous l’article 3.4, comme la gestion des haies, la revégétalisation des terres ne conduisant pas à des forêts, etc. Mais, là encore, la comptabilité était du même type que pour les terres agricoles cultivées et les prairies. La prise en compte effective de cette option présentait donc les mêmes difficultés.
181On trouvera des informations plus complètes sur ce sujet dans le livre Forêts et Changements climatiques de Riedacker, paru en 2004 (Éditions Silva Riat, publié avec l’aide de l’Union européenne et de la FAO).
3.7. Le marché des droits d’émissions (MDE)
182Nous considérons maintenant l’un des trois instruments de flexibilité du Protocole, le marché des droits d’émissions, parfois aussi appelé marché carbone, ou encore marché des droits à polluer. Ce mécanisme est destiné à limiter les « pollutions », tout comme les règlementations ou les normes (règlementations thermiques, émissions moyennes de CO2 par km pour les nouvelles voitures, etc.) : il oblige à réduire les émissions en fixant des plafonds pour les émissions, mais d’une manière différente et en général plus flexible que les règlementations. Encore faut-il que cette approche soit applicable, avec des coûts de transactions acceptables.
Le principe
183Ce mécanisme, autorisé sous l’article 17 du Protocole, doit permettre de réduire les émissions de GES au coût le plus bas possible. Son principe figurait déjà dans la Convention (article 3.3).
184En principe, il suffit que les pays responsables de la réduction des émissions provenant de leur territoire imposent une réduction d’émissions, par exemple de 10 %, à toutes leurs entreprises. Celles dont les coûts de réduction des émissions sont bas (entreprises du type A) peuvent décider de réaliser des investissements pour réduire les émissions chez elles et ainsi se mettre en conformité avec les demandes de l’État. Celles dont les coûts de réduction des émissions sont en revanche élevés (entreprises du type B) peuvent décider de ne pas réaliser des investissements et acheter des droits d’émissions à des coûts moindres sur un marché de droits d’émissions (MDE). Ce dernier étant alimenté par des réductions d’émissions excédentaires réalisées à moindre coût par des entreprises du type A. En fin de compte, quand tout se passe bien, l’État aura obtenu les réductions d’émissions souhaitées et les entreprises l’auront réalisé au coût le plus bas : les entreprise de type A auront réduit leurs émissions bien au-delà de ce qui leur était demandé et les entreprise du type B auront pu acheter des droits d’émissions vendus par les entreprises du type A, à des coûts moindre que s’il avait fallu réduire les émissions dans leur entreprise.
185Ce mécanisme permet également une certaine flexibilité. Imaginons qu’une amélioration de procès (par exemple, l’achat d’une nouvelle chaudière plus performante) soit prévue dans une entreprise de type B, mais seulement dans quelques années. En attendant, cette entreprise pourra acheter des droits d’émissions sur le MDE. Lorsqu’elle réalisera cet investissement, elle pourra espérer vendre des droits d’émissions sur le MDE dont elle n’aura pas besoin pour son propre compte. Elle pourra également les garder, afin de faire face à des obligations nouvelles à venir ou pour les vendre ultérieurement. En principe, via ce mécanisme, les coûts de réduction des émissions des différentes entreprises se rapprochent. Cela évite, dans une certaine mesure, des distorsions de traitements.
L’application concrète
a. La conformité des réductions d’émissions
186Pour que le système fonctionne bien, il faut pouvoir contrôler les émissions des entreprises. C’est pourquoi on n’a retenu dans un premier temps que les émissions de CO2 (et pas d’autres GES) provenant des combustibles fossiles des grandes entreprises, fortement consommatrices d’énergies fossiles. Ces dernières doivent en effet, notamment en France et depuis le premier choc pétrolier, déclarer précisément leurs achats d’énergies fossiles. On connaît donc leurs achats passés et actuels. Cela permet de calculer leurs rejets d’émissions de gaz carbonique d’origine fossile. Le périmètre des entreprises soumises à des réductions d’émissions et pouvant bénéficier de ce mécanisme de flexibilité est déterminé par les PNAQ (Plans nationaux d’allocation des quotas d’émissions)37. Les entreprises de ce périmètre ne peuvent recourir aux réductions d’émissions réalisées par d’autres entreprises, que si le gouvernement de leur pays les y autorise38.
187Il faut en outre que le non-respect des obligations de réductions soit assorti de fortes sanctions. Et il faut enfin vérifier que les réductions d’émissions des vendeurs, mises sur le MDE, aient été réalisées correctement, car sinon on obtiendrait des fausses réductions d’émissions, c'est-à-dire en quelque sorte de la « fausse monnaie ». C’est pourquoi les droits d’émissions vendus sur le MDE portent une référence permettant d’identifier l’origine des réductions d’émissions et d’appliquer, le cas échéant, des sanctions, notamment l’interdiction ultérieure d’accéder au MDE. On comprend donc que ce système, idéal sur le plan des principes, ne soit pas applicable aux petites entreprises dont on ne connaît pas les consommations d’énergies et dont on ne pourrait de toute façon pas vérifier les réductions d’émissions à des coûts acceptables. Les coûts de transactions seraient bien trop élevés. Il est donc exclu de l’appliquer, pour le moment et sans doute pour longtemps, dans les secteurs diffus comme les transports et l’habitat.
188Pour que ces marchés fonctionnent, il faut des vendeurs et des acheteurs, c'est-à-dire une taille minimale. On ne pourrait pas imaginer l’instauration de ce type de mécanismes dans des petits pays. L’Europe, le Japon, l’Amérique du Nord constituent des tailles suffisantes pour de tels marchés. Il serait impossible d’en mettre sur pied dans des petits pays comme la Suède ou la Finlande.
189Dans la pratique, une entreprise qui a besoin d’acquérir des droits d’émissions pourra s’en procurer de différentes manières : en s’adressant à une autre entreprise figurant dans le périmètre des PNAQ, directement ou via un courtier39, soit au marché des droits d’émissions, ou à l’une des six bourses de carbone européenne accueillant des droits d’émissions provenant du périmètre des PNAQ européens et, dans une certaine limite, des réductions d’émissions obtenues via des projets MDP (donc dans des pays en développement non soumis à des obligations de réductions d’émissions). La bourse Bluenext basée à Paris domine le marché comptant, et ECX (European Carbon Exchange) basé à Londres, les contrats à terme. Ces échanges permettent de fixer le prix de la tonne de CO240.
190Qu’en est-il des autres marchés de droits d’émissions (ou de carbone) ? Le marché européen – auquel participent également, depuis 2008, la Norvège et l’Islande, non membres de l’UE mais en tant que pays associés à l’Union européenne et se conformant à ses règles – couvrirait maintenant 80 % des échanges mondiaux de ces droits d’émissions de CO241.
191Le gouvernement Australien, qui espérait pouvoir instaurer un marché carbone en 2010 dans son pays, s’est vu pour le moment refuser cette possibilité en août 2009 par le Sénat. Le marché des États-Unis n’est pour l’instant qu’un marché limité de droits volontaire, mais sans obligation générale de réduction ou de limitation des émissions comme en Europe. Il ne reflète nullement le coût des réductions d’émissions.
b. L’égalité de traitement
192Il faut également que les États imposent des réductions d’émissions suffisantes à leurs entreprises. Pour préserver la compétitivité de certains secteurs (par exemple de l’industrie du verre en Allemagne, mais il y a beaucoup d’autres exemples), un État pourrait être tenté d’imposer des niveaux de réductions plus faibles à ce secteur. Pour éviter de telles distorsions, il faut un arbitrage au niveau des divers pays, par exemple au niveau de la commission dans le cas de l’Union européenne. C’est pourquoi les pays de l’UE doivent envoyer à Bruxelles les projets des réductions d’émissions qu’ils comptent imposer à leurs entreprises (le PNAQ). Ils ne peuvent les mettre en œuvre qu’après un arbitrage européen final.
193Comment déterminer par ailleurs le niveau de réductions des émissions à imposer ? Ce point est sans doute l’un des plus délicats. Quand le prix des combustibles fossiles est élevé les entreprises ont naturellement intérêt à augmenter l’efficacité énergétique, ce qui à production inchangée conduit à des réductions d’émissions de CO2. Le marché des droits d’émissions devient alors moins nécessaire pour obtenir des réductions d’émissions. Il en est de même quand l’activité économique se ralentit, comme durant la crise de 2009. En fin de compte, les marchés de droits d’émissions ne jouent pleinement leur rôle – sous réserves qu’on puisse y recourir – que lorsque l’activité économique augmente, quand les prix des énergies fossiles baissent et quand le niveau des réductions d’émissions imposé par les États à leurs entreprises est suffisamment fort.
c. L’attribution des droits d’émissions
194Jusqu’à présent les droits d’émissions (par exemple jusqu’à 90 % quand la réduction imposée est de 10 %) sont donnés gratuitement sur la base des émissions passées (grandfathering). On verra plus loin les projets pour la période post 2012.
d. La mise sur le marché des réductions d’émissions provenant des variations de stocks de carbone dans l’espace rural
195Il a été décidé, lors des accords de Bonn et de Marrakech, que les réductions d’émissions provenant des variations de stocks de carbone dans la végétation et dans les sols des pays de l’annexe B ne pourraient pas être mises sur le marché des droits d’émission. Si l’on tient compte des difficultés pour mesurer et vérifier précisément ces variations de stocks, cette décision est parfaitement justifiée (cf. « Les émissions et les réductions d’émissions de GES en Nouvelle-Calédonie »).
196On a, par ailleurs, vu précédemment la complexité de la comptabilité mise en place sous les articles 3.3 et 3.4.
e. La mise sur le marché européen de droits d’émissions (MDE) provenant de projets sous le MDP dans les pays en développement
197Les réductions d’émissions obtenues à travers les projets MDP dans les pays en développement (article 12 du Protocole) peuvent être mises en vente sur le MDE, mais dans la limite de 2,5 % des unités de quantité attribuées à chaque pays42. On craignait en effet que les projets MDP réduisent les efforts de réductions des émissions dans les pays de l’annexe B.
198En principe les réductions d’émissions temporaires (URCE-T) provenant de projets forestiers dans les pays en développement pourraient être mises sur les marchés des droits d’émissions. Les accords de Bonn et de Marrakech ne s’y opposent pas. Mais l’Union européenne n’a pas souhaité accueillir des réductions d’émissions de ce type sur son marché.
199Le lecteur trouvera d’autres détails dans la brochure « Changement climatiques : guide explicatif des accords internationaux »43.
3.8. Les actions de réduction des émissions sous le mécanisme de développement propre (projets MDP) (article 12)
200Primitivement les pays en développement avaient demandé, à travers le Brésil, la mise en place d’un fonds de développement propre pour des actions vertueuses pour le climat dans leurs pays. Cela aurait sans doute conduit à de fortes dépenses de la part des pays industrialisés de l’annexe B pour alimenter ce fonds, sous une forme ou sous une autre. Mais, par ailleurs, la Chine souhaitait profiter d’un mécanisme pour promouvoir des transferts de technologies. Il en résulta la mise en place d’un mécanisme de développement propre (MDP).
201Via ce mécanisme, une entreprise d’un pays de l’annexe B peut réaliser des réductions d’émissions dans un pays non-annexe 1 en règle avec ses engagements sous la Convention. En principe ces réductions d’émissions sont réalisées dans un autres pays, parce que l’entreprise qui les réalise espère pouvoir les obtenir à des coûts moindres que dans son entreprise ou que sur le marché des droits d’émissions.
202Mais pour acquérir des Certificats de réductions des émissions (CER) il faut pouvoir prouver que ces réductions d’émissions n’auraient pas été réalisées sans le projet. Il y a donc, pour les grands projets MDP, d’une part, une contrainte environnementale et, d’autre part, une contrainte économique. Faire la preuve de l’aditionnalité économique n’est cependant pas toujours facile. Il faut également l’accord des gouvernements des pays concernés, de l’entreprise et du pays où se réalise le projet sous le Mécanisme de développement propre. Il faut enfin que ce projet ait été réalisé sans APD (Aide publique au développement). Cette demande avait été faite par les pays émergents, en principe pour éviter le détournement de l’APD. Or, on sait bien que les investissements étrangers privés directs en Afrique subsaharienne et dans les PMA sont très faibles. Les négociateurs des PMA ne s’y sont pas opposés, pas plus d’ailleurs que les grandes ONG environnementales du Nord qui voulaient limiter le nombre de projets dans les pays non-annexe 1. Ceux qui voulaient un prix élevé pour les droits d’émissions avaient également intérêt à réduire l’offre de crédits carbone issus du MDP. Ils appuyèrent donc ces grandes ONG environnementales qui, par ailleurs, s’opposaient alors aussi, et pour les mêmes raisons, à la prise en compte des actions concernant les forêts dans les pays en développement. Mais cette distinction entre APD pour le développement et aides dédiées au développement propre a-t-elle un sens44 ?
203Quoi qu’il en soit cette conditionnalité explique en grande partie le très petit pourcentage de projets réalisés dans les PMA et l’extrême concentration des projets MDP en Chine, en Inde et au Brésil et en Asie du Sud-Est. À ce stade, plus d’un millier de projets ont été approuvés, essentiellement pour ces pays. En revanche, comme cela était prévisible, très peu de projets ont pu être soumis par les pays de l’Afrique sub-saharienne.
204Les réductions d’émissions obtenues peuvent être comptabilisées à partir de 2000. Les Certificats de réductions d’émissions (CER) obtenus par ces projets peuvent ensuite être cédés directement ou, mais dans une certaine limite, être mis sur le marché des droits d’émissions.
205Dans l’article 12 du protocole de Kyoto, il n’avait pas été fait mention de la possibilité de réduire les émissions via des projets forestiers dans les pays en développement. Cette catégorie de projet ne fut donc que difficilement acceptée par les pays de l’Union européenne. Seuls des projets de boisement de terres agricoles en 1990, effectués après 2000, devinrent finalement éligibles. Encore fallait-il pouvoir montrer que ces boisements n’induisaient pas des déboisements par ailleurs, dans le même pays. Seuls quelques rares projets sont en voie d’approbation. Les CER attribués sont en outre, dans ce cas, temporaires. En cas de disparition des stocks (par des feux, des tempêtes, des attaques parasitaires, etc.), les CER attribués doivent être remboursés avec d’autres réductions d’émissions. En principe ces CER issus des boisements devaient également pouvoir être mis sur le MDE. Mais comme cela a été mentionné plus haut, l’Union européenne n’a pas souhaité les accueillir sur son marché.
3.9. Les actions de réduction des émissions dans le cadre de mise en œuvre conjointe (projets MOC) entre deux pays de l’annexe B ayant des engagements de réduction de leurs émissions (article 6)
206Le principe pour ces projets est le même que pour les projets sous le MDP. Les réductions d’émissions ne peuvent toutefois être comptabilisées que sur une période plus courte, seulement entre 2008 et 2012 et non à partir de 2000, comme pour les projets MDP. Cependant, comme les deux pays concernés ont ici des engagements de réductions d’émissions contrôlés par ailleurs, les contrôles des réductions d’émissions au niveau des projets n’a pas besoin d’être aussi rigoureux que pour les projets MDP.
207Par ailleurs l’article 6 autorise certes très explicitement la réalisation des projets MOC forestiers. Dans la pratique cela reste cependant très difficile, notamment à cause de la complexité des articles 3.3 et 3.4.
208Les pays parties au protocole de Kyoto peuvent donc, sous une forme ou une autre, réaliser des projets MDP ou des projets MOC, et participer sous certaines conditions à un marché des droits d’émissions avec toutes les restrictions mentionnées.
209On trouvera des informations complémentaires sur ces mécanismes de projets sur : http://www.effet–de-serre.gouv.fr/, http://www.dree.org ou encore sur http://www.ffem.net/
210On pourra également consulter l’ouvrage paru en 2009 de Christian de Perthuis.
En résumé, les prises en compte des actions concernant les variations de stocks de carbone sous le protocole de Kyoto (forêts, praires, cultures, etc.) sont régies notamment :
– par les articles 3.2 et 3.3 et 6 dans le cas des pays industrialisés ;
– par l’article 12 pour les projets dans le cadre du MDP ;
– par diverses décisions de la CdP 7 de Marrakech et par diverses autres décisions approuvées au cours des CdP suivantes.
4. Les perspectives d’évolutions post 2012
211En juin 2009, on ignore encore quelles seront précisément les modifications apportées au protocole de Kyoto en décembre 2009, et par la suite. Mais on discute actuellement des trajectoires de développement à suivre par les divers pays afin de stabiliser le climat d’ici à 2050. Au moment de la mise en chantier du protocole de Kyoto, on ignorait encore qu’il faudrait à cette fin diviser les émissions mondiales par 2 en moins de cinquante ans.
212Cela requiert une mobilisation beaucoup plus importante, principalement dans les pays industrialisés, mais aussi dans les pays en développement à croissance rapide comme la Chine, l’Inde et le Brésil, ou dans les pays de l’OCDE ne figurant pas encore sur l’annexe 1 comme la Corée du Sud et le Mexique.
213On insiste donc désormais beaucoup sur les trajectoires à suivre – d’ici à 2020, et entre 2020 et 2050 – pour parvenir aux résultats escomptés.
214C’est dans ce contexte qu’il faut également analyser le revirement de position sur les déboisements dans les pays en développement que les Parties à la Convention avaient refusé de prendre en considération lors de la première période d’engagement sous le protocole de Kyoto.
215Il y aura également des évolutions dans les marchés des droits d’émissions, notamment au niveau de l’Union européenne. Mais les divers marchés du monde resteront sans soute segmentés. L’Union européenne estime en effet qu’il ne pourra y avoir un marché unique de droits d’émissions pour les pays de l’OCDE qu’au-delà de 2020.
216Chacun de ces points pourrait évidemment faire l’objet de plus amples développements.
4.1. La prise en compte des forêts après 2012
Dans les pays en développement
217Bien que les émissions brutes dues aux déboisements dans les pays en développement représentent entre 15 et 20 % des émissions de GES provenant des énergies fossiles, les petits États insulaires, tout comme l’Union européenne, s’étaient en effet fortement opposés à leur prise en compte lors de la première période d’engagement sous le Protocole. Pour l’Union européenne cette position peut se comprendre en tenant compte du fait qu’avant 2012 seuls les pays développés (de l’annexe 1) avaient à prendre des engagements de réduction de leurs émissions. Or, l’Union européenne considérait même, en 1997, que chaque pays de l’annexe B devait réduire les émissions chez lui, sans même recourir aux mécanismes de flexibilité de Kyoto évoqués précédemment (donc sans instauration de Marché des droits d’émissions et sans projets MDP ou MOC). Ce sont en effet surtout les émissions provenant des énergies fossiles qui dominent dans les pays de l’annexe 1.
218Les petits États insulaires, l’Union européenne et le groupe de « l’intégrité environnementale » mettaient alors en avant le risque de non-permanence des stocks de carbone dans les forêts et dans les sols.
219Mais en 2005, lors de la conférence de Montréal, sous l’impulsion de la nouvelle présidence des États insulaires en développement, notamment de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, la situation a radicalement changé. On considère maintenant que les déboisements dans les pays non-annexe 1 doivent être fortement réduits. Mais on ne connaît pas encore les mécanismes à l’aide desquels cela pourra être réalisé. Ni combien cela coûtera aux pays industrialisés. On imagine difficilement que la tonne de CO2 évitée via le déboisement puisse être rémunérée comme la tonne de CO2 évitée ou réduite en provenance des énergies fossiles.
220Cette question a été largement débattue lors des conférences de Nairobi en 2006, de Bali en 2007 et de Pozna’n (en Pologne) en 2008. Elle constituera sans doute l’un des points les plus difficiles à résoudre lors de la conférence de Copenhague en décembre 2009.
221Pourra-t-on rémunérer les émissions évitées par les déforestations évitées dans les pays en développement via le MDE ? Les avis sont partagés sur ce sujet. Très peu de personnes savent en effet combien il est difficile de mesurer précisément les variations de stocks de carbone en forêt. Ce point a été évoqué précédemment dans « Les émissions et les réductions d’émissions de GES en Nouvelle-Calédonie ».
222L’absence de possibilité de vérification sérieuse des réductions d’émissions pourrait conduire à la mise sur le marché de produits « toxiques ». C’est pourquoi, certains pensent qu’il serait préférable d’arriver à réduire les émissions via des actions financées par d’autres voies. On pense notamment à des prélèvements sur les rentrées d’argent que pourraient générer les ventes des droits d’émissions des MDE en 2012. Ou à des contributions spécifiques des pays de l’annexe 1. Une première synthèse de ces approches, qu’il serait trop long de détailler ici, a été présentée en mai 2009 à Ottawa, dans le cadre des conférences organisées par l’IEPF et l’ACFAS (Riedacker 2009)45. Comme le faisait remarquer une présentation marocaine, sans processus correctif, les forêts sèches resteront sans doute exclues des actions qui pourraient être mises en place pour éviter la déforestation. Seuls les déboisements évités des forêts à forte densité de carbone par ha, c'est-à-dire les forêts tropicales humides, pourraient éventuellement bénéficier de ces procédures.
223On peut en revanche penser que les boisements sous le MDP pourront se poursuivre suivant la formule actuelle, mais avec une plus grande acceptabilité de ces projets sur les MDE, notamment au niveau de l’Union européenne.
Dans les pays industrialisés
224On a vu précédemment certaines difficultés que l’on pouvait rencontrer dans la mise en œuvre des articles 3.3 et 3.4. Des correctifs seront donc sans doute également apportés pour leur mise en application.
4.2. Les marchés de droits d’émissions
225Pour la période post 2012 l’UE envisage de vendre les droits d’émissions aux enchères. Toute entreprise de taille suffisante, ayant de fortes émissions de CO2 pourrait ainsi en acquérir.
226Lors de la conférence de Bali (CdP 13, en 2007), ainsi que dans des ateliers de l’UNFCCC, plusieurs pays ont mentionné la nécessité de traiter à part les secteurs industriels et miniers très intensifs en carbone46 (ce qui est le cas de la filière nickel). Certaines entreprises soumises à la concurrence internationale présentant des risques de délocalisation de leurs activités pourraient cependant être exonérées partiellement, voire totalement, de l’obligation d’achat de tels droits d’émissions. Des groupes d‘industriels s’activent actuellement très fortement auprès de la commission de l’Union européenne. Tout cela montre qu’il est très important de suivre ce qui va se passer sur le marché des droits d’émissions en 2012, au niveau de l’Union européenne, et partout ailleurs dans le monde47.
227D’ici à 2012 tout dépendra de l’évolution de la conjoncture économique et des leçons qu’on tirera notamment de la mise en place d’un tel marché aux États-Unis ou en Amérique du Nord au cours des années à venir. Il faut en effet souligner que jusqu’ici les États-Unis, bien qu’ayant imposé ce MDE aux Européens, ne l’ont pas encore expérimenté à l’échelle de leur le pays. Il y existe certes un marché de CO2, mais comme il n’y avait pas d’obligation de réduction des émissions dans ce pays, la valeur de la tonne de CO2 y était symbolique : elle valait 10 à 20 fois moins que sur le marché européen !
228Il y a par ailleurs beaucoup de propositions pour utiliser les produits de la vente des droits d’émissions. Certains voudraient qu’une partie de la recette soit affectée à la mise en place de projets pilotes pour la séquestration géologique du CO2 examinée dans « Les émissions et les réductions d’émissions de GES en Nouvelle-Calédonie » (bulletin AIE sur les GES), notamment dans des pays en développement comme la Chine, l’Inde et l’Afrique du Sud. D’autres voudraient l’affecter aux projets de déboisements évités dans les pays de l’annexe 1 (cf. Pozna’n 2008). Mais bien d’autres utilisations sont encore envisageables.
4.3. Les relations internationales de la Nouvelle-Calédonie
229D’un point de vue régional, la N.-C. participe soit directement soit par l’intermédiaire de la France, soit avec la France à différentes organisations. Il peut s’agir de forums intéressants pour avancer conjointement sur les questions d’énergie et de climat, en affichant une position cohérente.
230Ces relations formelles sont organisées par l’État français, principalement par le haut Commissariat et le ministère de l’outre-mer qui associent les représentants de la N.-C. à certaines réunions. Les relations de fait entre la N.-C. et d’autres États du Pacifique, du fait des migrations de populations, des relations commerciales, des proximités culturelles, des échanges scolaires, des investissements croisés, ne semblent pas faire l’objet d’une stratégie systématique.
4.3.1. Les organisations régionales : l’énergie rattrapée par l’environnement
231La N.-C. participe à plusieurs organisations régionales. Celle dont le champ de compétences est le plus grand est la Communauté du Pacifique (CPS) qui comprend les îles du Pacifique, y compris les grands pays (Australie, Nouvelle-Zélande, États-Unis), mais il existe d’autres instances dont les compétences se recoupent en partie. Des regroupements sont à l’étude pour mieux utiliser les moyens disponibles.
Commission du Pacifique (CPS)
232Il s’agit de la plus ancienne des institutions de coopération régionale. La N.-C. en fait partie (comme la Polynésie française) à titre individuel.
233La CPS aborde trois domaines principaux : la terre (agriculture, forêt, sécurité alimentaire, etc.), la mer (pêche, navigation, océanographie) et la société (démographie, santé). Les questions énergétiques ne sont pas abordées en tant que telles. Elles sont introduites dans les réflexions sur le changement global, mais les discussions portent surtout sur la vulnérabilité des îles face aux changements environnementaux. La question de la biomasse est aussi étudiée.
234Toutefois la CPS ne s’intéresse pas pour le moment aux questions énergétiques dans leur globalité. Il s’agit de formes « classiques » de coopération pour le développement à partir de programmes ciblées et financés.
235Un rapport de 2006 souligne cependant la parenté des problèmes environnementaux des îles du Pacifique (Chape, 2006). Il insiste notamment sur les problèmes d’accès à l’énergie et la dépendance énergétique de la plupart des îles.
La commission de géosciences appliquées du Pacifique sud – South Pacific applied Geoscience commission (Sopac)
236Cette commission a abordé différentes facettes de la question énergétique. En particulier un programme (Pacific Islands Energy Policy and Strategic Action Plan, PIEPSAP) a porté, entre 2004 et 2008, sur la formulation des politiques énergétiques, le développement des énergies renouvelables et l’efficacité énergétique. Les équipes ont conseillé les petits États insulaires dans la formulation de leurs politiques énergétiques – mais pas la N.-C.
237D’autre part, la Sopac aborde l’océanographie dans le cadre du changement climatique. Son programme de suivi du niveau de la mer a porté sur les petits États insulaires.
Programme régional océanien de l’environnement (PROE) – Pacific regional environment program
238Cette organisation environnementale se penche également sur les questions de changement climatique et ses impacts sur les États insulaires du Pacifique. Le thème est principalement abordé à partir des problèmes d’impact du changement climatique et bien moins sur les émissions de GES.
4.3.2. Les forums commerciaux : la Nouvelle-Calédonie peu présente
Conseil de coopération économique du Pacifique – Pacific Economic Cooperation Council (PECC)
239Il s’agit d’un forum de discussion sur les questions de développement. Chaque comité national du forum est composé de représentants de l’État, des entreprises et de la recherche. Les territoires français du Pacifique sont membres associés, mais le comité français présidé par M. Rocard ne comporte pas de représentants des entreprises et de la société civile. A contrario les autres pays de la région ont des représentations étoffées avec une participation active de la société civile.
240Le PECC se fixe différents thèmes de travail. Les questions d’énergie n’en font pas partie pour la période actuelle : elles sont abordées par la coopération économique Asie-Pacifique (Apec).
Asia Pacific Economic Cooperation (Apec) : une vision stratégique de l’énergie
241L’Apec comprend les pays émergents du Pacifique et les grandes puissances (États-Unis, Canada, Japon, Corée du Sud). Ni la N.-C. ni la France n’en font partie, alors qu’il s’agit d’un des regroupements les plus importants. Il assume toutefois des positions qui sont pour le moment trop éloignées de celle de la N.-C. pour que celle-ci s’en rapproche. L’Apec défend le libre-échange entre ses membres et souhaite parvenir à brève échéance à supprimer toutes les barrières aux échanges et aux investissements entre les pays membres. Cetteposition est cohérente avec la domination des États-Unis sur ce forum.
242Pourtant, l’Apec est le groupe international qui a l’approche la plus complète sur les questions énergétiques dans la perspective de garantir la sécurité de l’approvisionnement de ses membres. Il existe des groupes de suivi de la situation énergétique à court et à moyen termes et diverses instances d’échange. En particulier, l’initiative Nautile rapproche les acteurs de l’énergie de différents pays pour partager références et instruments de prospective : cette construction d’une vision commune sur les problèmes énergétiques de la zone, et son partage entre les responsables est tout à fait essentielle (Von Hippel et al., 2008). La N.-C. ne peut l’ignorer.
243Par ailleurs, l’Apec organise des simulations de crise énergétique entre les pays membres pour élaborer des réponses communes par la mutualisation des stocks. Ceux-ci sont, en principe, plus importants dans les pays membres de l’OCDE qui doivent respecter la recommandation de l’AIE de 100 jours de stocks que dans les petits États qui ne disposent pas de capacité de stockage.
244L’Apec promeut également des instances de dialogue autour de la sécurité énergétique, avec en particulier l’initiative Nautile qui rapproche les acteurs de l’énergie des différents pays pour partager des références et des instruments de prospective.
245Participer à ces initiatives, éventuellement comme observateur, pourrait être intéressant pour la N.-C. qui s’apparente à bien des égards aux pays émergents du Pacifique – à ceci près que l’Apec est une association qui a pour objectif principal le libre-échange et les libres investissements dans les économies du Pacifique.
4.3.3. La coopération bilatérale
246N.-C. a peu de coopérations bilatérales formalisées avec les pays de la région, même s’il existe de nombreuses relations avec l’Australie, la Nouvelle-Zélande mais aussi les petites îles du Pacifique en raison de l’importante immigration qui en provient, particulièrement de Wallis-et-Futuna. Il s’agit bien évidemment d’une problématique qui dépasse celle de l’énergie, mais dans laquelle l’énergie peut prendre place.
247La France dispose de différents outils de coopération bien établis, particulièrement vers l’Australie et la Nouvelle-Zélande, à commencer par son réseau diplomatique. Les relations scientifiques et technologiques entre la France et l’Australie sont particulièrement fournies, soutenues par différents programmes (programme de coopération Fast : France Australian science and technology, réseau FEAST).
248D’autre part, la France se propose de renforcer ses relations de coopérations avec les pays océaniens en s’appuyant sur les collectivités d’outre-mer et en utilisant les moyens du Fonds européen de développement (FED).
249La N.-C. pourrait certainement tirer parti de ces différents programmes en s’insérant dans les réseaux de coopération pour bénéficier à la fois des dynamiques de recherche en science et en technologie avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande, mais aussi pour servir de point d’appui pour les actions de développement au bénéfice des autres îles du Pacifique.
250Il ne s’agit pas seulement d’un enjeu d’image, mais plus largement de positionner la N.-C. de façon favorable par rapport aux énergies renouvelables non conventionnelles (comme le solaire thermique – cf. « Les nouvelles technologies en matière de production et de stockage d’énergie »), les solutions innovantes pour le transport dans l’archipel et dans les villes (cf. « La maîtrise de l’énergie ») sont autant d’apports au développement des petits États insulaires. Inversement la N.-C. ne peut envisager d’apparaître comme l’un des principaux émetteurs de GES par habitant dans un ensemble où les changements environnementaux planétaires apparaissent extrêmement menaçants, sans proposer aussi des solutions de réduction des GES et/ou d’adaptation aux changements environnementaux.
5. Des options d’insertion de la Nouvelle-Calédonie dans la dynamique internationale sur le climat
5.1. Analyse juridique des obligations internationales découlant du protocole de Kyoto pour la Nouvelle-Calédonie
251De la non-applicabilité du protocole de Kyoto à la Nouvelle-Calédonie : le principe en matière de traités internationaux est que les traités auxquels la France est partie s’appliquent sur l’ensemble de son territoire, y compris à l’outre mer, sauf mention contraire expresse48. Une mention contraire expresse peut être établie par une réserve et une déclaration interprétative. Les premières sont prévues par la convention de Vienne qui définit dans son article 2, § 1.d la « réserve » comme une déclaration unilatérale, quel que soit son libellé ou sa désignation, faite par un État quand il signe, ratifie, accepte ou approuve un traité ou y adhère, et par laquelle il vise à exclure ou à modifier l'effet juridique de certaines dispositions du traité dans leur application à cet État. La déclaration interprétative est également une déclaration unilatérale par laquelle l’État vise à préciser ou à clarifier le sens ou la portée qu'il attribue à un traité ou à certaines de ses dispositions. Elle se distingue par le fait qu'elle peut être formulée à tout moment alors que la réserve doit être confirmée au plus tard lorsque l'État exprime son consentement à être lié par un traité (article 23, § 2), c'est-à-dire lors de sa ratification, acceptation ou approbation. La qualification d'une déclaration unilatérale comme réserve ou déclaration interprétative est déterminée par l'effet juridique qu'elle vise à produire, ce qui ne va pas toujours sans équivoque (cf. Walter Gehr, droit international des traités, http://web.me.com/waltergehr/Le_Droit_international_des_traités/Bienvenue.html
252Il ne ressort pas du protocole de Kyoto une intention différente s’agissant de la N.-C. En revanche, la France a émis une déclaration lors de la publication du protocole par décret n° 2005-295 du 22 mars 2005 portant publication du protocole de Kyoto à la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (JORF du 31 mars 2005). Pourtant, le protocole de Kyoto indique dans son article 26 qu’aucune réserve ne peut être faite au présent protocole. Il en ressort dès lors la question de la légalité de la déclaration émise par la France par ledit décret. En considérant que cette déclaration a pour objet de clarifier la portée attribuée aux dispositions du protocole de Kyoto, elle n’est pas illégale. La France clarifie en effet la non-applicabilité du protocole à la N.-C. en se fondant sur l’article 4 du protocole, qui se situe dans le cadre de l’engagement de la CE, qui ne s’applique pas à la N.-C. Finalement, cette déclaration a soulevé beaucoup d’interrogations alors qu’en droit, elle était inutile, mais avait pour objet de faciliter la compréhension de l’applicabilité territoriale du protocole de Kyoto.
253En effet, la clause territoriale dans le traité de Rome de 1957 instituant la Communauté européenne, résultant de son article 299 nouveau (ex article 227) § 2 et 3 précise que les dispositions du présent traité sont applicables aux départements français d’outre mer, aux Açores, à Madère et aux îles Canaries. Les pays et territoires d’outre mer font quant à eux l’objet d’un régime spécial d’association, mais le traité de Rome ne leur est pas applicable. Dès lors, la N.-C. ne se voit pas appliquer le droit communautaire.
254Une autre interrogation ressort de la rédaction même de la déclaration. Elle prévoit en effet que conformément à l’article 4, § 6 du protocole, la France demeure individuellement responsable du niveau de ses propres émissions dans le cas où le total cumulé des réductions d’émission ne pourrait être atteint.
255En résumé, dans le contexte juridique actuel, la N.-C. ne peut pas intégrer le protocole de Kyoto, puisqu’elle ne fait pas partie de l’Union européenne et que le droit communautaire ne s’y applique pas ; toutefois, la France est tout de même responsable de ce qui s’y passe, puisque la N.-C. fait néanmoins partie de la France. C’est pourquoi elle déclare sous la Convention l’ensemble des émissions y compris de la N.-C. conformément aux règles des Nations unies.
256Une contradiction doit être soulevée entre la non-applicabilité du protocole de Kyoto à la N.-C. et le code de l’environnement français : en effet, l’article L. 624-1 du code de l’environnement indique que les articles L. 229-1 à L. 229-4 du même code sont applicables à la N.-C. Or, ces articles sont relatifs à la lutte contre l’intensification de l’effet de serre et la prévention des risques liés au réchauffement climatique, qui sont reconnues comme priorité nationale. Cette applicabilité aurait dû conduire l’État (ou la N.-C.) à appliquer ces dispositions en N.-C. De plus, il découle de ces articles des textes réglementaires mettant en place le système d’échange de quota d’émission de GES et ses modalités de mise en œuvre (articles R. 229-1 à R. 229-27 du code de l’environnement) relatifs aux échanges communautaires mais non applicables à la N.-C., puisque celle-ci ne fait pas partie de l’Union européenne. Des possibilités existent cependant pour pouvoir être associé au marché européen des droits d’émissions puisque la Norvège et l’Islande y participeraient depuis 2008 (cf. plus haut).
5.2. Les scénarios d’insertion dans la dynamique de lutte contre les changements climatiques envisageable pour la Nouvelle-Calédonie
257Plusieurs scénarios peuvent donc être envisagés : soit la N.-C. reste en dehors du Protocole avec le statu quo actuel (scénario 1), soit elle envisage d’intégrer le protocole de Kyoto via la France avec accès au marché des droits d’émissions de l’Union européenne (scénario 2a), ou sans accès à ce marché (scénario 2b), soit elle adopte un fonctionnement inspiré de ce qui est demandé à l’Islande, mais sans adhérer formellement pour le moment ni à la Convention ni au protocole de Kyoto de manière autonome puisque seuls les États membres des Nations unies peuvent juridiquement adhérer directement aux traités et accords des Nations unies.
Scénario 1 – statu quo
258Si la N.-C. ne fait rien, elle ne se situe pas dans une situation juridique illégale puisque les textes ne lui sont pas applicables.
259À l’heure actuelle, la N.-C. remplit ses obligations envers la Convention via la France, car seuls des pays peuvent formellement devenir membres des Nations unies. Sous ce scénario la N.-C. est actuellement dispensée de prendre des engagements formels de limitation ou de réduction de ses émissions. Ce qui rend évidemment impossible, mais aussi inutile, le recours aux mécanismes de flexibilité de Kyoto pour compenser des émissions : de vente ou d’achat de droits d’émissions, de participation à des projets MDP ou MOC. Les grandes entreprises fortement émettrices de CO2, comme la filière nickel ou de production centralisée d’électricité, sont de ce fait en dehors du périmètre considéré par le plan national d’allocation des quotas d’émissions (PNAQ) de la France. Sous ce scénario la N.-C. doit donc seulement s’acquitter, avec la France, des obligations sous la Convention. À court terme, cela la dispense de réaliser des inventaires supplémentaires des variations de stocks de carbone dans les sols et dans les forêts pour remplir les obligations sous les articles 3.3 et 3.4 du Protocole (cf. plus haut)49.
260Les émissions de GES en N.-C. proviennent, d’une part, de la production du nickel – qui est exporté – et, d’autre part, des autres activités ayant lieu sur son territoire. Lors de la montée en puissance de la production de nickel, avec notamment la mise en route projetée de deux nouvelles usines, les émissions de GES ne peuvent qu’augmenter. Les émissions des autres activités peuvent diminuer grâce à diverses mesures.
261Mais ces diminutions ne permettront pas de compenser l’augmentation des émissions de GES qui résultera de la production accrue de nickel. Ce n’est sans doute que vers 2015 ou 2020 que les émissions provenant de cette production se stabiliseront. Il sera alors sans doute possible de commencer à afficher des objectifs de réduction des émissions de GES pour l’ensemble de la N.-C.
262D’ici là, il peut donc être utile d’avoir un affichage des émissions distinguant celles attribuables à la production du nickel de celles résultant des autres activités. La décision 14 CP7 adoptée dans le cadre des Nations unies pour l’Islande et mentionnée plus haut permet de justifier cette distinction.
Pour les activités ne concernant pas la filière de production de nickel
263La N.-C. peut pour ces activités, comme toutes les villes ou régions du monde, réduire ses émissions de GES de manière volontaire et le faire savoir. On a évoqué précédemment certains des points relatifs à la maîtrise de l’énergie. Les villes et les provinces pourraient sans doute aussi engager des actions de coopération dans le cadre de jumelages avec d’autres villes ou avec des pays de la sous région.
264Il est également possible ici de s’inspirer de la communication nationale de l’Islande (cf. annexe 1).
Pour les activités concernant la filière de production de nickel
265Rien n’empêche les entreprises de la filière nickel (ou également de production d’électricité) utilisant d’importantes quantités de charbon, de financer, si elles le souhaitent, des projets dans les pays en développement pour y réduire des émissions, mais en dehors des engagements internationaux sous le protocole de Kyoto. Cela implique seulement que les pays hôtes des projets concernés soient d’accord. Elles pourraient également, si elles le voulaient pour leur image de marque, acheter des réductions d’émissions sur un marché volontaire.
266Mais sous ce scénario il pourrait sans doute être utile de mettre en avant, s’ils étaient retenus, les projets de recherches sur la séquestration géologiques du CO2 proposés dans la « Les émissions et les réductions d’émissions de GES en Nouvelle-Calédonie ».
267La mise au point de ce genre de technologies apparaît à l’heure actuelle comme incontournable pour diviser les émissions mondiales de GES par 2 d’ici à 2050. En cas de succès, il sera possible de continuer à utiliser du charbon, l’une des ressources fossiles les plus abondantes et les moins chères du monde. Cette ressource est de surcroît abondante en Australie. Cela pourrait ensuite conduire à des transferts de technologies vers d’autres régions du monde. Compte tenu de ses roches la Papouasie-Nouvelle-Guinée pourrait peut-être également bénéficier des recherches qui pourraient être effectuées en N.-C.
268Comment pourrait-on justifier ce statu quo ? On peut tout d’abord remarquer que les industries fortement intensives en carbone (émissions de CO2 élevées par unité de production) ont un poids considérablement plus élevé dans l’économie de la N.-C. que dans les grands pays ou dans les grands ensembles (États-Unis, Europe, France, etc.). Aux États-Unis elles ne représentent que 6 % des émissions totales de CO2, 3 % de l’activité économique et 2 % des emplois (Houser et al. 2008)50. En N.-C. la situation est fort différente : le nickel représentait sans doute la moitié ou plus de la moitié des émissions de GES et 11 % de la valeur ajoutée en 2006. Il représentait aussi 97 % (en valeur) des exportations. Une production accrue de nickel, avec, par exemple, la mise en service de deux nouvelles usines pourrait améliorer le taux de couverture des importations51. Mais à court terme, peut-être jusqu’en 2015-2020, cela augmenterait inévitablement les émissions de GES de la N.-C.
269Par ailleurs tous les pays producteurs de nickel n’ont pas les mêmes obligations. La N.-C. est actuellement le premier exportateur mondial de nickel oxydé. Cuba, le Brésil, les Philippines et l’Indonésie et quelques autres pays de la ceinture tropicale n’appartenant pas à l’annexe B du Protocole (donc actuellement non soumis à des contraintes de réduction de leurs émissions) en exportent aussi. La Corée du Sud importe du minerai de la N.-C.52 et exporte des produits contenant du nickel. En revanche la Russie, le Canada et l’Australie53, qui produisent du nickel sulfuré, font partie de l’annexe B : ces pays doivent donc réduire leurs émissions de GES.
270Si la N.-C. ne fait rien, elle ne se situe pas pour le moment dans une situation juridique illégale puisque les textes ne lui sont pas applicables. Il n’y a donc pas d’action à avoir sur le plan juridique. Mais cette situation est-elle tenable à long terme ? Cela dépendra notamment des pressions que pourraient exercer la communauté internationale, les pays voisins et les autres pays producteurs et exportateurs de nickel. Il faudrait donc, dans le cadre des accords de Kyoto post 2012, être attentif aux évolutions des pays exportateurs mentionnés ci-dessus (changements de catégories de pays, types d’engagements post 2012, etc.) et aux facilités (octroi de droits d’émissions gratuits, fiscalité allégée, etc.) que ceux-ci pourraient accorder à leurs industries fortement intensives en carbone.
Scénario 2 –
271Si la N.-C. souhaite intégrer les discussions relatives au protocole de Kyoto dans le cadre de la France, pour les raisons développées ci-après il y aura des actions à mener sur le plan juridique54.
Aspects juridiques
272La contrainte concerne le droit communautaire. La confirmation de la légalité de cet argument avancé par la France conduit à une difficulté juridique. En effet, dans la mesure où la France ratifie le protocole dans le cadre de la CE, cette ratification ne peut s’appliquer à la N.-C., quelle que soit la modification des textes nationaux que la France peut envisager.
273Y aurait-il cependant eu une interdiction à ce que la France s’engage, d’une part, sous le protocole de Kyoto avec l’Union européenne (et respecte dans ce cadre ses engagements pour tous les territoires relevant de l’Union européenne) et, d’autre part, de manière spécifique pour la N.-C. ? Il ne semble pas que cela se soit posé dans le cadre des Nations unies jusqu’à ce jour. Mais cela ne paraîtrait pas impossible. Voici alors ce qui aurait pu se passer pour la première période d’engagement 2008-2012. Comme d’après le protocole de Kyoto, hors partage du fardeau dans le cadre l’Union européenne, la France doit diminuer de 8 % ses émissions par rapport à 1990 (0 % dans le cadre du partage du fardeau de l’Union européenne), la France aurait, semble-t-il pu ratifier le Protocole pour la N.-C., en demandant qu’on y applique une réduction de 8 % par rapport à 1990. Cela aurait exigé un effort de réduction des émissions supérieur à celui demandé pour l’ensemble « métropole + DOM », dans le cadre de la communauté européenne.
274En revanche, la N.-C. ne peut pas intégrer le protocole de Kyoto sans la France. En vertu du principe classique du droit international public, seule la France a le statut international d’État et est habilitée à conclure des traités dans le cadre des Nations unies et avec d’autres États ; la compétence de conclure des accords internationaux (au sens strict d’engager la collectivité concernée) reste de façon exclusive celle de la France.
275Les dispositions extensives de la LO dans ses articles 28 et suivants pour la N.-C. en matière de relations extérieures auraient pu sortir de cette situation, mais la reconnaissance de sa compétence internationale propre ne concerne que la possibilité de devenir membre ou membre associé d’organisations internationales ou observateur auprès de celles-ci. Cette compétence doit néanmoins être soumise à l’accord de la France. La République est libre d’associer telle ou telle institution territoriale à la négociation, à la conclusion voire à la procédure préalable à la ratification ou à l’approbation de tels traités mais non à la conclusion de tels accords : cette question relève du droit interne et chaque État peut régler dans sa constitution ou par un autre texte. C’est ce qui a été fait avec la LO de 1999 mais ce n’est pas suffisant. Sur ce sujet voir, J.Y. Faberon et J. Ziller, Droit des collectivités d’outre-mer, LGDJ, 2007, et V. Goesel-Le Bihan, « Les compétences internationales des collectivités d’outre-mer », Revue Lamy des collectivités territoriales, 2007.
276La loi organique de 1999 n’aide pas d’avantage à trouver une autre solution, puisque ses dispositions extensives en matière de compétence internationale ne s’appliquent pas à ce type de protocole (elles concernent le pouvoir de négocier et signer des accords avec un État, territoires ou organismes régionaux du Pacifique et avec les organismes régionaux dépendant des institutions spécialisées des Nations unies). De plus, il aurait été nécessaire de déterminer dans quel domaine de compétence cette matière est inclue. Or, les aspects climat et gaz à effet de serre n’ont à ce jour pas fait l’objet d’une attribution explicite et en matière de protection de l’environnement, la répartition des compétences est floue, peu lisible et l’enchevêtrement très important entre les quatre niveaux de responsabilités : État, N.-C., Provinces et Communes (cf. atelier Nouvelle–Calédonie 2025).
277À l’heure actuelle, et dans la mesure où la France a accepté de remplir conjointement avec les autres États membres de la CE ses engagements vis-à-vis du protocole de Kyoto, en application de l’article 4 du protocole, et que cet accord reste en vigueur jusqu’en 2012, conformément à l’article 3 § f du protocole, la N.-C. ne peut intégrer protocole de Kyoto dans les mêmes conditions que la France et les DOM, car elle n’est pas membre de l’Union européenne.
278La seule possibilité serait sans doute maintenant d’intégrer la révision du protocole à venir et qui entrera en vigueur en 2012. Pour ce faire, il convient :
- soit d’obtenir la modification de la rédaction du nouveau protocole, afin de permettre à la France de pouvoir intégrer une composante de son territoire à statut spécifique, laquelle ne serait pas comprise dans l’engagement communautaire puisque la N.-C. ne fait pas partie de l’Europe tout en permettant à la France de poursuivre, le cas échéant, ses engagements en tant qu’État membre de la CE et donc dans le cadre d’engagements conjoints avec les autres États membres ;
- soit de négocier des engagements spécifiques à la N.-C., mais distincts des engagements français, même si l’accord est signé par la France pour la N.-C., compte tenu de son statut, les négociations relatives à Kyoto soulèveront la question de la mutualisation avec les quotas français : compte tenu de ce qui a été développé ci-dessus et du statut de la N.-C., il conviendrait de négocier des quotas spécifiques pour la N.-C. distincts de ceux français, si l’Union européenne en était d’accord, ce qui permettrait en outre de responsabiliser les acteurs du territoire (négociation d’un accord spécial et spécifique), bien que la France à titre individuel en resterait tout demême responsable, en tant qu’État.
279Dans tous les cas, la N.-C. aurait sans doute intérêt à demander à être associée aux négociations au sein de la délégation française.
280Il serait également utile que la N.-C. élabore un dispositif prévoyant les modalités d’application des conventions internationales à son territoire.
281Pour cette option la N.-C. devra aussi réaliser les divers inventaires demandés, notamment ceux relatifs aux utilisations et aux changements d’utilisation des terres (articles 3.3 et 3.4).
282Avec un accès au marché de droits d’émissions de l’Union européenne.
283Si la N.-C. veut formellement entrer dans le processus de Kyoto post 2012, elle ne peut le faire actuellement que via la France.
284Pour s’engager dans cette voie, la N.-C. devra faire part de ses intentions, d’une part, à la France et, d’autre part, à l’Union européenne via la France (cf. les points juridiques évoqués ci-dessus) et que l’Union européenne accepte d’inclure la N.-C. dans son marché d’échange. Dans le cas contraire il faut examiner la solution (2b).
La Nouvelle-Calédonie devrait donc limiter l’augmentation de ses émissions, ou même réduire ces dernières.
- comme la France (hors partage de fardeau au niveau européen), comme suggéré plus haut ;
- comme l’Europe ;
- ou suivant des modalités particulières à négocier ; (avec par exemple un partage du fardeau différent entre la France et la N.-C.55, ou encore entre l’Union européenne et la N.C.56).
285Les industries du nickel et le producteur d’électricité centralisée de la N.-C. qui utilisent d’importantes quantités de combustibles fossiles seraient alors sans doute invités à réduire ou à limiter leurs émissions dans le cadre des PNAQ. Elles pourraient alors, à cette fin, recourir à des économies d’énergies et des réductions d’émissions de CO2 au sein de leurs entreprises ou encore recourir aux mécanismes de flexibilité de Kyoto ; à des projets MDP, ou MOC dans d’autres pays ou/et aux marchés de droits d’émissions. Et si les droits d’émissions sont vendus au moins partiellement aux enchères par l’Union européenne, comme cela est envisagé pour 2012, les entreprises néo-calédoniennes devraient en principe en acheter. Mais combien ? De quelles exonérations pourront-elles bénéficier ? Peut-on mettre en avant la nécessité d’équilibrer la balance commerciale ou le statut particulier de la N.-C. pour obtenir des droits d’émissions gratuits, voire des exonérations partielles ou totales ? Peut-on démontrer par ailleurs qu’il y a des risques de délocalisation de l’activité, ou de concurrence déloyale si ces entreprises devaient acheter ces droits d’émissions ? Une procédure est actuellement ouverte en ligne au niveau de la commission pour recueillir des avis sur cette question.
286Il existe, depuis décembre 2008, un « paquet climat » pour l’Europe et des engagements de réduction des émissions d’ici à 2020 d’au moins 20 % par rapport à 1990. Si d’autres pays s’engageaient également, l’Union européenne pourrait même afficher des ambitions plus fortes de réduction de ses émissions.
287Dans ces conditions, que pourrait réellement obtenir la N.-C. de l’Union européenne ? Serait-il possible de mettre en place un partage du fardeau européen comme en 1997, avantageux pour elle ?
288En l’absence d’un tel partage au niveau européen, qui devrait alors compenser les augmentations d’émissions de la N.-C. ?
Sans accès au marché des droits d’émissions de l’Union européenne
289En cas d’impossibilité d’accéder au marché des droits d’émissions européen, l’une des options du scénario précédent pour réduire les émissions disparaît. L’accès à des marchés volontaires resterait-il alors fermé pour la N.-C. ? La réponse serait vraisemblablement oui. Mais c’est un point qu’il conviendrait sans doute de mettre sur la table lors de négociations avec la France et avec l’Union européenne. Cela pourrait éventuellement constituer un argument pour faciliter l’accès de la N.-C. au marché européen, donc pour revenir au scénario (2a).
290En revanche la question du partage du fardeau entre la France (ou l’Europe) et la N.-C. demeurerait. Sauf, par exemple, si un accord pouvait être trouvé via une décision du type « 14 CP 7 » comme pour l’Islande, pour ne pas comptabiliser, sous certaines conditions, les émissions des nouvelles industries du nickel pour la période post 2012-2020.
Scénario 3 –
291Une approche inspirée de celle de l’Islande pour la période post 2012 mais sans adhésion formelle au Protocole pour la période post 2012
292L’Islande est un petit pays adhérent aux Nations unies. Mais, on a vu plus haut que pour ce pays, ayant beaucoup de points communs avec la N.-C., les approches retenues dans le cadre des négociations de Kyoto ne convenaient pas bien.
293Faute de pouvoir modifier l’approche générale, les Nations unies ont alors produit la décision 13 CP7 analysée plus haut.
294En se référant à cette décision et en agissant comme l’Islande, mais sans adhérer formellement au protocole de Kyoto, la N.-C. pourrait montrer, au niveau de la région Asie Pacifique comme au niveau international, que son approche est parfaitement légitime, car conforme aux décisions prises dans le cadre du protocole de Kyoto. La décision 13 CP7 a en effet été formellement adoptée par les Parties pour solutionner le cas de l’Islande.
295Une telle démarche ne supposerait pas nécessairement une adhésion formelle, directe et immédiate aux Nations unies. Cela impliquerait en revanche, sans prendre d’engagements formels au titre de la N.-C. dans les accords post 2012, de satisfaire progressivement à toutes les obligations de la Convention et du protocole de Kyoto révisées pour la période post 2012, notamment la réalisation des inventaires sous les articles 3.3 et 3.4.
296Sous ce scénario il faudrait donc rester attentif aux nouvelles contraintes et opportunités qui pourraient apparaître. Il faudrait également savoir si et comment la décision 13 CP7 pourrait être reconduite ou modifiée après 2012. Quels engagements prendra l’Islande pour la période post 2012 ?
297L’avantage de cette solution serait de rendre compatible le développement industriel de la N.-C. avec l’esprit de la lutte contre le changement climatique au niveau planétaire. Il n’y aurait pas à acheter de droits d’émissions. L’inconvénient, sans doute mineur dans ce cas, serait de ne pas pouvoir réaliser de projets MDP ou MOC. Mais la réalisation de projets volontaires reste toujours possible en dehors du cadre formel des Nations unies.
Analogies avec le Groenland et l’Islande
Le Groenland
298Cette entité vient d’obtenir en 2009 une certaine autonomie. Il n’est en outre plus membre de l’Union européenne depuis 1985. On y a découvert d’importants gisements de pétrole et de minerais dont l’exploitation va, au cours des prochaines années, fortement augmenter les émissions de GES par habitant de ce petit territoire d’une soixantaine de milliers d’habitants. Il se trouve donc dans une situation ayant bien des points communs avec la N.-C.
299C’est pourquoi il serait utile de s’informer régulièrement sur les intentions des gouvernements du Danemark et du Groenland, et sur leurs négociations, notamment pour les prises d’engagement post 2012.
L’Islande
300À la différence du Groenland, cette entité est indépendante et membre des Nations unies. Ce pays a donc pu prendre des engagements sous la Convention et sous le protocole de Kyoto. Mais, compte tenu du développement de nouvelles industries sur son territoire, les émissions y ont également augmenté. En 2006, elles étaient de 26 % supérieures au niveau de 1990 (European Environment Agency57), donc en apparence 16 % au-dessus des engagements de ce pays sous le Protocole. Mais il y a la décision 14 CP7 qui permet de présenter ces émissions de manière différente.
301Là encore, il pourrait être intéressant de nouer des contacts notamment pour connaître le devenir de la décision 14 CP7.
302Par ailleurs, si cela était souhaité par la N.-C., des communications sur le climat concernant la N.-C., inspirées par exemple des communications nationales de l’Islande, pourraient sans doute être insérées le moment venu dans les communications nationales de la France aux Nations unies. Celles-ci comprennent plusieurs chapitres : le premier décrit les spécificités nationales de l’Islande. Le deuxième donne des informations sur les inventaires de GES du pays et sur les évolutions en cours. Le troisième chapitre relate les politiques et mesures retenues dans le pays pour réduire ou limiter les émissions de GES. On y examine les secteurs de la production d’énergie, des transports, des pêches, de l’industrie, des déchets et de l’agriculture. Les actions relatives à la séquestration de carbone, c'est-à-dire du CO2, sont également mentionnées de même que les recherches en cours. Le quatrième chapitre présente des scénarios d’évolution des émissions tenant compte des politiques et mesures envisageables. Le cinquième chapitre concerne les impacts des changements climatiques et les adaptations envisagées. Le sixième chapitre mentionne comment l’Islande s’acquitte de ses obligations envers les pays en développement, c’est-à-dire comment ce pays participe à l’aide publique et aux transferts de technologies en direction des pays en développement. Le septième chapitre mentionne les recherches et observations relatives au climat. Et le dernier chapitre évoque les politiques de communications en direction de la population (article 6 de la convention).
5.3. Conséquences pour la Nouvelle-Calédonie d’une démarche d’intégration de ces discussions en termes de gouvernance
303Une Autorité devrait se voir attribuer ces questions dans la mesure où cela n’a pas été fait explicitement à ce jour et parce qu’il est nécessaire que des moyens humains et financiers soient octroyés à cette question.
304Bien que la lutte contre les GES et le changement climatique fasse partie de la protection de l’environnement, il ne semble guère approprié d’attribuer cette compétence aux Provinces, dans la mesure où il s’agit d’une compétence et de responsabilités politiques territoriales globales, qui doivent être centralisées. Les questions relatives au changement climatique ne peuvent être soumises à une réglementation et un effort différents et non homogènes au sein d’un même territoire.
305Cette attribution de compétence ne peut être effective juridiquement que par une insertion dans la loi organique de 1999 de façon explicite.
306Dès lors, en termes d’organisation administrative, la N.-C. pourrait soit mettre en place un service spécifique, soit insérer cette compétence au sein d’un service existant, comme celui de l’énergie, qui deviendrait énergie et climat, les discussions sur ces deux thèmes étant fortement liées. Mais il ne faudrait pas pour autant oublier les forêts, l’agriculture et la gestion des déchets (cf. également la fiche de recommandation n° 1 de la partie « Les émissions et les réductions d’émissions de GES en Nouvelle-Calédonie »).
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Site de l’UNFFCCC – http://www.unfccc.int Négociations des Nations unies sur le changement climatique (Convention cadre des Nations unies sur le changement climatique - CCNUCC ou UNFCCC en anglais) et protocole de Kyoto.
On y trouve tout l’historique des négociations, les accords, les décisions depuis 1992, les communications nationales des pays, etc. ainsi que les travaux en cours, l’annonce des ateliers et conférences, etc. sur ce site. Mais pour en extraire les informations pertinentes, il faut une certaine connaissance du processus des négociations.
On y trouve notamment les textes de la Convention cadre des Nations unies sur le changement climatique et du protocole de Kyoto en français.
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Pour les inventaires des émissions de GES de la France soumis à l’UNFCCC, réalisés par le citepa pour le gouvernement français, http://www.citepa.org
pour les mécanismes de Kyoto – http://www.dree.org
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sur le fonds français pour l’Environnement mondial – http://www.ffem.net
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Informations de la francophonie – Bulletin Objectif Terres : relate l’évolution des négociations, http://www.iepf.org/
Sur la Nouvelle-Calédonie
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Notes de bas de page
1 Le Centre des nouvelles études sur le Pacifique de l’Université de Nouvelle-Calédonie n’aborde pas la question de l’énergie. Seul son programme sur les mines pose la question de la géopolitique régionale.
2 Adresses web en bibliographie.
3 On peut trouver cette homogénéité de grands ensembles, par exemple dans les Amériques (Nord et Sud) et en Europe, pour des raisons différentes. Savoir s’il s’agit effectivement de marchés continentaux est une question qui dépasse le cadre de cette étude.
4 Le système ressemble à celui de la Réunion, dont les quatre importateurs se regroupent pour se fournir à Singapour.
5 L’utilisation de gaz naturel émet environ moitié moins de CO2 à contenu énergétique égal que les hydrocarbures liquides.
6 Les terminaux existants de réception ne font pas moins de 1 Gcf/an soit 1,23 Mtep : plus que les besoins cumulés de toute la Nouvelle-Calédonie… cf. deuxième partie.
7 Les informations sur les entreprises charbonnières sont dispersées. Celles qui sont utilisées ici sont tirées de l’ouvrage de J.-M. Martin-Amouroux (2008) et des documents des entreprises.
8 L’intensité en GES est déterminée par le niveau des émissions de GES par tonne de produit (de blé, de lait, de viande, d’acier, de nickel, etc.) exprimé en tonne d’équivalent CO2. Pour simplifier ou par abus de langage, on parle souvent d’intensité carbone. Dans la pratique cela entraîne malheureusement très souvent des confusions. C’est pourquoi nous rappelons la nécessité de toujours préciser les unités employées, car à une tonne de carbone correspond, après oxydation du carbone et génération de l’énergie, une émissions de 3,67 t de CO2.
9 On peut également recommander à ces nouveaux négociateurs de lire avec attention les diverses notes de cette partie.
10 Pour obtenir un aperçu rapide sur l’histoire de la mise en place de l’architecture pour lutter contre les changements climatiques au niveau mondial, on pourra consulter l’article « Effet de serre et politiques de luttes contre le changement climatique » d’A. Riedacker dans la revue Mondes en développement, vol 31 – 2003/1 n° 121 p. 47 à 70. L’ouvrage de F. Durand donne un autre éclairage plus complet, mais pas sur les négociations : Le Réchauffement climatique en débat, collection Ellipse, 2007, (187 p.). Enfin pour les marchés du carbone on pourra consulter utilement le livre de C. de Perthuis : Et pour quelques degrés de plus… Nos choix économiques face aux risques climatiques, édité par Pearson (306 p.) Il est bien documenté, d’accès facile. L’historique relatif à l’émergence du marché de carbone en Europe n’est cependant pas tout à fait exact. Il faut souligner que les négociateurs n’ont en général relaté que très ponctuellement des détails sur les jeux des acteurs au sein de ces négociations. On peut également, pour une information plus générale, lire le rapport de J. Le Déaut et de N. Kociusko-Morizet à la présidence de l’Assemblée nationale, (2006).
11 Le Giec a seulement pour vocation de faire régulièrement le point pour les décideurs sur l’état des connaissances relatives au changement climatique, et non pas de négocier des réductions ou des limitations d’émissions (cf. chapitre 3).
12 En dehors des émissions de GES considérées par ailleurs sous le protocole de Montréal, comme les CFC à cause de leur très grande nocivité pour la couche d’ozone.
13 2025 Schéma d’aménagement et de Développement de la Nouvelle-Calédonie, (2009), p. 113.
14 Joyetaa Gupta (2001) Au nom de ma délégation Guide de survie des négociateurs des pays en développement sur le climat, Préface de l’ambassadeur Raul Estrada Oyuela, 102 p., édité par Climate Knowledge Network (www.cckn.net), Version en français édité par Enda www.enda.sn J. Gupta de l’Institute for Environmental Studies d’Amsterdam.
15 Les séances de négociations ont lieu deux fois par an, en général au printemps à Bonn, et en fin d’année dans le pays accueillant la CdP. L’IEPF organise également, avant ces réunions internationales, des réunions d’information pour les négociateurs des pays francophones. Mais comme les intérêts des pays au sein de cet ensemble sont très divergents, on ne peut évidemment pas y négocier des positions communes. Les informations échangées sont néanmoins forts utiles. On pourra également consulter « Objectif Terre » l’organe des pays francophones, qui résume, en français, les décisions prises lors des négociations.
16 Pour la N.-C., une ONG pour le climat ou encore l’Université pourraient demander une accréditation au sein des Nations unies. Cette ONG pourrait aussi s’associer à d’autres ONG internationales. Cette accréditation ne donne cependant pas le droit de négocier, mais seulement d’être observateur dans les réunions ouvertes.
17 Qui a été présidé pendant quelques temps par Tuvalu.
18 La Chine, l’Inde et le Brésil n’ont fourni, jusqu’à ce jour, qu’une communication nationale.
19 Les pays industrialisés comme l’Islande et la France ne peuvent réaliser de projet MDP que dans un pays en développement satisfaisant à ses obligations sous le Protocole. En revanche, ils peuvent réaliser des projets MOC (de Mise en œuvre conjointe) dans un autre pays industrialisé de l’annexe B ayant ratifié le Protocole, suivant le même principe que les projets MDP. En son sein, chaque pays de l’annexe B est libre de décider des mécanismes de projets ou des politiques qu’il souhaite mettre en œuvre pour obtenir les réductions d’émissions auxquelles il s’est engagé.
20 Pour la première période d’engagement, il convient d’appliquer les PRG retenus en 1997 et non ceux, légèrement différents, proposés en 2001 dans le troisième rapport du Giec.
21 Ainsi, pour le calcul des émissions de méthane par fermentation entérique des vaches et des déjections, on tient compte du climat et de la nourriture moyenne ingérée, de leur activité de traction, etc. Pour les émissions de protoxyde d’azote (N2O) au champ on tient compte des apports d’azote minéral et organique. On tient également compte de la production de N2O dans les usines produisant des nitrates, et de toutes les consommations d’énergie fossiles. Ces dernières ne figurent pas sous la rubrique agriculture, mais dans l’industrie. Pour la production de chaux et de ciment, on tient compte à la fois des émissions de CO2 provenant des consommations d’énergie fossile et des émissions de CO2 dans le procès, etc.
22 Sous le protocole de Kyoto, pour la période 2008-2012, cette catégorie est par exemple généralement exclue du calcul des engagements chiffrés par pays
23 Cf. Eggleston et al. (2006) et Giec -IPCC (2006) pour les directives actuelles, approuvées en 2006 par la CCNUCC qui dérive des directives de 1996 révisées.
24 Cette procédure de consultation est légèrement différente de celle adoptée par le Giec pour les questions scientifiques. Dans ce dernier cas, ce sont les pays qui sont invités à faire directement leurs remarques aux groupes d’experts du Giec. Il faut bien distinguer ici les deux processus intergouvernementaux : celui du Giec concernant la science et celui des Nations unies sous la Convention et le Protocole prenant en compte les avis et visions des pays dont les intérêts sont souvent divergents.
25 Cf. Chang et al. (2009).
26 Avec des conditions particulières précisées plus loin.
27 Agromag. décembre 2008.
28 À l’exception des énergies fossiles servant à la bioproduction, (donc à l’utilisation des terres), ainsi qu’aux conversions des phytomasses en bioproduits alimentaires et non alimentaires qui sont imputés à ces derniers.
29 C’est pour cette raison que l’utilisation de l'empreinte écologique, exprimée en ha par habitant, est inappropriée quand elle ne tient pas compte des flux entrants et des flux sortants. Le conseil économique, social et environnemental de la France, dans son rapport sur les indicateurs de mai 2009, n’a d’ailleurs pas retenu l’empreinte écologique parmi les indicateurs pertinents (Rapport Le Clézio, 2009).
30 Avec une voiture plus économe en carburant, on consommera moins de carburant par km et on émettra moins de CO2. Mais on pourra parcourir des distances plus grandes avec la même quantité de carburant, et dans ce cas ne pas diminuer en fin de compte les émissions (effet rebond). La majorité des économistes préfère donc aujourd’hui l’approche cap and trade qui consiste à fixer un plafond pour les émissions par pays, puis à introduire des mécanismes de flexibilité, comme ceux instaurés sous le Protocole, afin de réduire les distorsions de traitements entre entreprises. (Lord Stern, 2009 ; de Perthuis, 2009). D’où la poursuite actuelle des discussions pour fixer de nouveaux engagements de réduction par pays. Cela ne concerne pas les actions à mener par ailleurs dans chaque pays.
31 Ce n’est plus vrai quand on entre dans le détail, compte tenu du partage du fardeau intra européen ; l’augmentation du niveau des émissions autorisé pour l’Espagne, le Portugal et la Grèce est en effet supérieure à celle autorisée pour l’Islande (cf. encadré).
32 Mais que se serait-il passé si les émissions supplémentaire des projets isolés ou des extensions de projets avaient, en moyenne annuelle, dépassé 1,6 million de tonnes de CO2 ? Aurait-on pu faire appel à des projets MDP sous l’article 12 du Protocole pour compenser les émissions dépassant ce seuil ? La décision 14/CP.7 reste muette sur cette possibilité.
33 Qui sont différentes des « taxe carbone à l’importation, ou aux frontières » d’importations vers des pays de l’annexe B (ayant pris des engagements de réduction de leurs émissions) de produits (services ?) en provenance des pays n’ayant pas pris de tels engagements (Pays en développement, États-Unis…).
34 Comme en Suède où, dès 1991, le gouvernement a instauré une taxe carbone, mais seulement sur le fioul domestique destiné au chauffage, notamment pour sauver sa filière bois énergie, au moment où les bas prix du pétrole la mettaient en péril. Celles-ci non seulement sauva cette activité, mais conduisit également à l’abaissement du prix du bois énergie livré aux chaufferies, car les industriels avaient alors plus de visibilité et de garantie pour des marchés à venir ! Elle permit également de réduire le poids du pétrole dans les importations. Dans d’autres pays, ne s’étant pas dotés de ce type de politique, à la fois vertueuse pour l’environnement et protectionniste, les entreprises spécialisées dans les filières bois énergie qui avaient émergé après les chocs pétroliers de 1986, durent bien souvent, soit se reconvertir dans d’autres secteurs (comme la gestion des déchets), ou disparaître. La reconstruction de filières prit alors beaucoup de retard.
35 Au sens du Protocole, les peuplements d’arbres fruitiers, les palmeraies, mais aussi les terrains revégétalisés dont le couvert forestier peut dépasser, à l’âge adulte, 30 % et les arbres une hauteur de 3 à 5 m (comme dans le cas des terrains miniers), sont considérés comme des forêts (cf. « Les émissions et les réductions d’émissions de GES en Nouvelle-Calédonie »).
36 Donc si les émissions moyennes annuelles entre 2008 et 2010 sont identiques à celles de 1990, le gain sous la comptabilité du protocole de Kyoto est nul.
- Si les émissions annuelles durant cette période 2008-2012 sont inférieures à celles de 1990, il y aura un débit même si l’activité entre 2008 et 2010 continue, par exemple, à augmenter les stocks de carbone.
- En revanche, si l’activité allait dans un sens défavorable en 1990 et va dans un sens favorable entre 2008 et 2012 il y a, sous la comptabilité du protocole de Kyoto, parce qu’on a inversé la tendance qui prévalait en 1990, un gain supérieur au gain réel moyen pour l’atmosphère entre 2008 et 2012.
37 En Europe un peu plus de 11 000 installations industrielles (y compris les producteurs d’électricité) sont soumises à ce régime.
38 Les États ne peuvent en général pas demander aux entreprises soumises au PNAQ de réaliser la totalité des réductions qui s’imposent à leur pays dans le cadre des engagements sous le Protocole. Le restant des réductions d’émissions doit être obtenu dans des secteurs en dehors du périmètre du PNAQ. Si les entreprises soumises au PNAQ peuvent librement échanger entre elles au niveau européen, elles ne peuvent en revanche, pour satisfaire leurs obligations de réduction d’émissions, s’adresser à des entreprises européennes hors PNAQ, sauf en y étant spécifiquement autorisées par leur gouvernement : les réductions d’émissions réalisées en dehors du PNAQ pourraient en effet alors être vendues à un autre pays, ce qui interdirait ensuite leur utilisation par le pays pour satisfaire les obligations de réduction nationales hors PNAQ !
39 Selon les transactions bilatérales ne représentent que 10 % des échanges entre entreprises les trois quarts des échanges se faisant via des courtiers qui recherchent des offreur de droits d’émissions. Un acquéreur de droits d’émissions peut également réaliser directement des projets MDP ou MOC pour son propre compte. Cf. Christian de Perthuis, op. cit.
40 Cf. Christian de Perthuis, op. cit.
41 Cf. Christian de Perthuis, op. cit.
42 Pour la France 2,5 % des 92 % d’émissions en 1990.
43 Mise à jour en 2005, 59 p. (http://www.effet-de-serre.gouv.fr).
44 Nous ne le pensons pas. La Suède qui concentre son APD au développement durable, ne le pense pas non plus. Le ministre des Affaires étrangères de ce pays qui préside l’Union européenne au deuxième semestre 2009, donc aussi pour les négociations de Copenhague, l’a encore confirmé publiquement à Paris le 8 septembre 2009.
45 Riedacker (2009) « L’Initiative climat et développement : boisement et déforestation évitée : les défis ». Congrès de l’ACFAS, Ottawa, mai 2008, 12 p.
46 Pour la production d’énergie électrique (cf. Bangladesh, MISC 1, la Corée et le Japon, MISC 4 et 5, les Aosis mention dans les approches sectorielles évoquées dans les ateliers :
- de fer et d’acier – Japon MISC 4 et 5, la Corée du Sud dans les approches sectorielles évoquées au cours des ateliers ; -de ciment (cf. Japon MISC 4 et 5 Aosis et Corée du Sud dans les approches sectorielles évoquées dans les ateliers ;
-d’aluminium (Japon MISC 4 et 5, Corée, dans les approches sectorielles évoquées dans les ateliers) ;
- de produits de l’industrie chimique (cf. Corée, dans les approches sectorielles évoquées au cours des ateliers) ;
- de pâtes et papiers (cf. Corée du Sud dans les approches sectorielles évoquées dans les ateliers).
47 Cf. “The effects of a revision of the emissions trading directive for the period starting in 2013 on the European fertilizer industry. Pellervo Economic Research Institute Reports 2008 Helsinki 200, 50 p.
48 L’article 29 de la convention de Vienne sur le droit des traités internationaux de 1969 prévoit en effet qu’ « à moins qu’une intention différente ne ressorte du traité ou ne soit par ailleurs établie, un traité lie chacune des parties à l’égard de l’ensemble de son territoire ».
49 Il est d’ailleurs très probable que les stocks de carbone, notamment dans les forêts de la N.-C., n’augmentent que peu. Mais cela reste bien sûr à valider par des mesures mentionnées dans « Les émissions et les réductions d’émissions de GES en Nouvelle-Calédonie ».
50 T. Houser, R. Bradley et al., (2008) “Leveling the carbon playing field International competition and US Climate Policy Design”, Peterson Institute for International Economics and World Resources Institute, 95 p.
51 « 2025 Schéma d’aménagement et de Développement de la Nouvelle-Calédonie » (2009). Le rapport de 9 ateliers du diagnostic Nouvelle-Calédonie, p. 89, 115 et 116.
52 La Corée du Sud ne figure pas dans les pays de l’annexe B. Mais comme le revenu par habitant y est supérieur à celui en Russie, qui elle en fait partie, il y aura certainement des pressions fortes pour que l’appartenance des divers pays aux diverses catégories soit révisée pour les engagements post 2012. Ce pays participait d’ailleurs au Forum des économies majeures (MEF) qui s’est tenu les 25 et 26 mai à Paris. Le MEF comprend le G8, les grands pays émergents (Chine, Inde, Brésil, Afrique du Sud et Mexique), ainsi que la Corée du Sud, l’Indonésie et l’Australie qui émettent plus de 80 % des émissions de GES du monde.
53 « 2025 Schéma d’aménagement et de développement de la Nouvelle-Calédonie » (2009) p. 117.
54 Il convient toutefois de rappeler que même dans ce cadre elle ne pourra sans doute pas intégrer le protocole de Kyoto avant 2012.
55 Les augmentations d’émissions accordées à N.-C. pourraient alors éventuellement être compensées par des réductions d’émissions plus fortes au niveau de la France.
56 La Norvège a en effet des obligations de réduction de ses émissions d’ici à 2012 différentes de l’Union européenne.
57 “Greenhouse gas emission trends and projections in Europe 2008”. Tracking progress towards Kyoto targets EEA Report n° 5 /2008 p. 136 et 137.
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