Cambodge
Tensions latentes en temps de crises
Cambodia - Latent Tensions in Times of Crises
p. 186-214
Résumé
As ASEAN Chair in 2022, Cambodia navigated through a complex geopolitical environment, with the heightened rivalry between China and the United States, the Russia-Ukraine conflict and the Myanmar crisis. While 2022 saw the return of tourists and foreign investors, and the economic outlook looks promising for 2023, there are signs that Cambodia is still recovering from the various effects of the covid-19 pandemic. For most Cambodians, 2022 was dominated by inflationary pressures driven by higher global fuel and fertilizer prices, and economic hardships due to growing risks posed by climate change. These issues work as more or less visible tension lines, and contribute to increasing social and economic inequalities at different scales. Within this context, the Government strengthened state control and stepped up its means of oppression against its critics. Ahead of the national elections in 2023, the ruling party won the local elections in June and endorsed Prime Minister Hun Sen’s eldest son as the next prime ministerial candidate.
Entrées d’index
Mots-clés : répression, élections locales, présidence de l'ANASE, traite des êtres humains, pressions inflationnistes, changement climatique
Index géographique : Cambodge
Keywords : crackdown, local elections, ASEAN Chairmanship, human trafficking, inflationary pressures, climate change
Texte intégral
1Le Cambodge s’est acheminé au cours de l’année 2022 vers une sortie de la crise sanitaire. Si les célébrations de Chaul Chhnam (Nouvel An khmer) en avril – qui ont entraîné le déplacement du même nombre de personnes qu’en 20191 –, suivies de la suppression de l’obligation du port du masque en extérieur, ont marqué une étape notable, le retour à la normalité s’est surtout traduit par la reprise à un rythme effréné des projets d’investissements privés et d’aménagements publics. Le régime a affiché ses dernières réalisations, souvent accomplies grâce à l’aide et à l’investissement de la Chine : du nouveau stade dans la périphérie de Phnom Penh à l’autoroute reliant Sihanoukville à la capitale, en passant par l’embellissement du bord de mer à Kep et l’achèvement de la rénovation des infrastructures de Siem Reap. Par leur rôle dans la stratégie nationale de développement, ces projets de grande envergure sont progressivement devenus une source de légitimité pour le parti au pouvoir.
2Dans le même temps, une grande partie de la population a fait face aux répercussions durables de la pandémie en matière économique et sociale qui, conjuguées au changement climatique et aux crises alimentaire et énergétique mondiales, ont fortement affecté ses conditions d’existence. Avec la présidence de l’ASEAN, le pays s’est retrouvé en première ligne sur le dossier birman. Dans ce contexte de crises plurielles, le Premier ministre Hun Sen a fait entériner son projet de passation du pouvoir à l’approche du scrutin national de juillet 2023.
Une consolidation autoritaire dans la perspective des élections de 2023
3En dépit d’agitations sociales et de tentatives d’organisation de l’opposition, 2022 s’est inscrite dans la continuité des années précédentes avec l’affermissement du tournant autoritaire du régime à travers son instrument de prédilection, le droit. Une série de procès, le vote d’amendements constitutionnels controversés et l’application de lois coercitives ont ainsi caractérisé l’agenda politique.
Un futur candidat pour le Parti du peuple cambodgien
4L’année 2021 s’était achevée avec l’investiture du fils aîné de Hun Sen, Hun Manet (45 ans), actuellement aux commandes de l’Armée de terre, en tant que futur candidat au poste de Premier ministre. Alors que le congrès du Parti du peuple cambodgien (PPC) a validé une nouvelle fois la transmission familiale du pouvoir en juillet 2022, la position de Hun Manet semble peu contestée, bénéficiant notamment d’un fort soutien de l’organisation officielle de jeunesse du parti (Section centrale de la jeunesse du PPC), dont il a la tête et dont il organise les réseaux à l’étranger. Le calendrier de la transition apparaît néanmoins incertain. Dans une série de déclarations, Hun Sen, également président du PPC, a délivré des messages contradictoires, allant de son maintien au pouvoir pour six à dix ans supplémentaires à l’ouverture de la succession après les élections de 2023. À la suite de la promulgation d’amendements de la Constitution sur les procédures de remplacement d’un Premier ministre en cas de démission ou de décès et sur le rôle des gouvernements intérimaires ou de transition, la passation, parée d’une nouvelle légitimité constitutionnelle, pourrait s’accélérer2.
5La préparation de cette succession ne concerne pas uniquement le poste de Premier ministre : l’arrivée au pouvoir de Hun Manet devrait coïncider avec un remaniement gouvernemental complet. Répondant déjà à l’objectif « d’injecter du sang neuf dans l’exécutif »3, le portefeuille de l’agriculture échoit en octobre à Dith Tina (43 ans), fils du président de la Cour suprême en poste depuis 1998 et beau-frère du ministre de l’Environnement en poste depuis 2013. En l’absence d’alternances politiques, les plus hauts dignitaires du parti au pouvoir ont bénéficié jusqu’ici d’une rare longévité. Alors qu’ils prennent de l’âge et que leur légitimité fondée sur la victoire contre les Khmers rouges et la fin de la guerre civile s’érode progressivement, l’arrivée de nouveaux entrants, souvent éduqués à l’étranger – pour partie les héritiers biologiques de la génération précédente – participe à pérenniser le pouvoir du parti.
6Initié depuis quelques années, le renouvellement générationnel s’étend aujourd’hui à toutes les institutions politiques – tant pour des fonctions élues que des postes nominatifs – et administratives, civiles comme militaires. La promotion de cette nouvelle génération engendre une multiplication des postes à responsabilité, patente au niveau central avec les positions de secrétaires d’État et sous-secrétaires d’État. C’est également à l’échelle provinciale que se retrouve ce mouvement, confirmé en juillet par la désignation à la tête de la province de Preah Vihear de Kim Rithy (42 ans), fils d’un ancien commandant suprême adjoint de l’armée sous sanctions états-uniennes. Au moins quatre nouveaux gouverneurs adjoints ont été nommés dans chaque province, dans le cadre de l’élargissement dans tout le pays des conseils des gouverneurs, annoncé en juin. Parmi eux, on retrouve des fils de ministres en poste, de parlementaires aujourd’hui décédés et d’anciens gouverneurs4. L’arrivée des héritiers se vérifie aussi hors du parti dirigeant, en particulier au sein du FUNCIPEC (Front uni national pour un Cambodge indépendant, neutre, pacifique et coopératif) qui a élu en février à sa direction Norodom Chakravuth (52 ans), fils aîné du prince Norodom Ranariddh, ancien co-premier ministre, décédé en novembre 2021. Si la prégnance des pratiques lignagères n’est pas nouvelle dans la politique cambodgienne – Sam Rainsy, figure centrale de l’opposition, est lui-même fils et petit-fils de ministres –, elle concerne, pour le parti au pouvoir, de « jeunes » dynasties et se combine à l’arrivée de non-héritiers. Ce renouvellement générationnel marque la fin de l’ère post-Pol Pot, plus que ne l’a fait sans doute la confirmation en appel de la condamnation à la prison à perpétuité de Khieu Samphan, dernier survivant du régime khmer rouge, pour génocide, en septembre 20225.
Une opposition politique divisée et une société civile exsangue
7Le Parti du sauvetage national du Cambodge (Cambodian National Rescue Party, CNRP), coalition depuis 2012 du Parti Sam Rainsy (dirigé par Sam Rainsy) et du Parti des droits de l’homme (dirigé par Kem Sokha), était devenu la principale force d’opposition après les élections législatives de 2013. Après sa dissolution à la fin 2017 par la Cour suprême, le PPC a sans cesse continué d’affaiblir les opposants au régime. En dépit de l’expiration en novembre 2022 de la suspension des droits politiques des anciens cadres du CNRP, Sam Rainsy et Kem Sokha, respectivement numéro un et numéro deux du parti, font face à la justice cambodgienne et ont acté la rupture de leur alliance. Le procès pour trahison de Kem Sokha, arrêté en septembre 2017, touche à sa fin. Débuté en 2020 et interrompu par la pandémie, il a repris en janvier 2022 et le verdict est attendu pour mars 2023. À l’écart de la politique depuis lors, hormis quelques rencontres avec des diplomates étrangers et ses partisans, Kem Sokha tente de se désolidariser publiquement de Sam Rainsy, en exil depuis 2015. Avec les autres figures exilées de l’opposition qui ont tenté de revenir au Cambodge en 2019, ce dernier fait face à plusieurs condamnations motivées politiquement. En juin 2022, à l’issue d’un procès de masse mettant en accusation 150 personnes, une soixantaine d’opposants a ainsi été condamnée à des peines de prison allant de cinq à huit ans. Un autre procès collectif a suivi en décembre, avec des sentences comprenant pour certains l’inéligibilité.
8L’émergence du Candlelight Party (CP), successeur du Parti Sam Rainsy, a néanmoins laissé espérer un retour à des élections compétitives. Le parti a organisé une campagne pour les élections locales de juin en parvenant à enregistrer ses candidats dans la quasi-totalité des communes, malgré les menaces et les intimidations dont il a fait l’objet6. Quoiqu’il ait remporté près de 22 % du vote populaire lors des élections communales, il n’obtient la direction que de 4 communes sur l’ensemble du territoire (1 652 communes) face au PPC qui sort grand vainqueur. En vue du prochain scrutin, le Khmer Will Party a annoncé sa décision de rejoindre le Candlelight Party, mais une plus large coalition de l’opposition paraît exclue. Les menaces de Hun Sen au cours du mois d’octobre, motivées par les liens du CP avec Sam Rainsy, combinées à la plainte pour diffamation visant son vice-président Son Chhay, font resurgir le spectre d’une dissolution7.
9Dans une logique de consolidation autoritaire, le PPC a muselé, outre l’opposition politique, l’ensemble des critiques en ciblant journalistes, activistes et citoyens ordinaires, souvent dans la crainte d’une soi-disant « révolution de couleur »8. Les syndicalistes sont particulièrement concernés par la répression9. Les anciens employés mobilisés du casino NagaWorld de Phnom Penh, licenciés massivement en 2021, ont fait l’objet de violences physiques répétées, ainsi que d’arrestations sous prétexte d’infractions aux mesures de la loi sur le covid-19. Le contrôle s’exerce aussi en ligne à travers plusieurs dispositifs juridiques et devrait s’accroître avec la mise en place imminente d’un portail internet centralisé, initialement prévu pour début 2022 et largement interprété comme un instrument de surveillance numérique10.
Sous les projecteurs internationaux
10Dernier entrant dans l’ASEAN (1999), le Cambodge a obtenu sa présidence tournante pour 12 mois pour la troisième fois, avec la devise « Relever les défis ensemble » (Addressing challenges together). Entre crise politique birmane, guerre en Ukraine, tensions et trafic humain en Asie, les défis ont en effet abondé pour le pays qui a réitéré à cette occasion sa neutralité – de façade selon de nombreux commentateurs – à l’égard de la Chine. Le Cambodge est également apparu en 2022 sur la scène culturelle internationale avec les réclamations de ses œuvres d’art pillées ou mal acquises pendant les conflits cambodgiens.
Présidence de l’ASEAN et activisme diplomatique
11Dès la fin 2021, le Cambodge a pris un rôle actif dans la médiation de la question birmane, avec les tentatives de Hun Sen de discussion avec la junte militaire, malgré une profonde division au sein du bloc régional. En dépit des critiques, le Premier ministre s’est rendu en janvier 2022 au Myanmar, alors que le gouvernement militaire avait été exclu du précédent sommet de l’organisation en réponse à son manque de coopération dans la résolution de la crise. S’en sont suivies des visites en mars et en juillet du vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères Prak Sokhonn, devenu envoyé spécial de l’ASEAN, qui a pu rencontrer les autres parties prenantes, hormis Aung San Suu Kyi. L’exécution de militants birmans pro-démocratie en juillet a poussé à l’adoption progressive d’une position plus dure envers la junte militaire.
12Le mandat régional a donné un rôle de premier plan à Hun Sen, invité en mai à la Maison Blanche au moment du sommet spécial États-Unis - ASEAN, prenant la parole en septembre à la 77e Assemblée générale des Nations unies à New York, reçu quelques jours plus tard au Japon par le Premier ministre Fumio Kishida, co-organisant en décembre le 45e anniversaire des relations ASEAN - UE à Bruxelles et rencontrant peu après Emmanuel Macron à Paris. Les projecteurs internationaux ont aussi convergé vers Phnom Penh lorsque la ville a hébergé en novembre le sommet de l’ASEAN. Outre les chefs d’État régionaux, des délégations de plus d’une douzaine de pays, dont les États-Unis, la Chine et le Japon, ont participé, avec la présence notable de Joe Biden. La fin de la présidence de l’ASEAN ne devrait pas marquer un coup d’arrêt au rôle régional du Cambodge, avec la nomination d’un de ses ressortissants au poste de secrétaire général de l’ASEAN, Kao Kim Hourn11, ministre délégué auprès du Premier ministre, en charge des Affaires étrangères et de l’ASEAN.
Trafic humain et pressions internationales
13Si le Cambodge a renforcé son rôle régional en 2022 en prenant appui sur son influence multilatérale, il a fait face à des critiques dans sa lutte contre le trafic de dizaines de milliers de travailleurs asiatiques à l’intérieur de ses frontières. Les victimes sont attirées au Cambodge par des promesses d’emplois bien rémunérés dans des casinos et des hôtels, puis elles sont forcées de vivre dans des complexes sous surveillance et d’escroquer des utilisateurs en ligne par diverses combines, entre hameçonnage (phishing), fausses romances sur des sites de rencontre et investissements frauduleux dans des crypto-monnaies12. Leurs conditions de travail sont variables selon les enclaves, mais la plupart des victimes font l’objet d’une confiscation de passeport, d’heures supplémentaires obligatoires et de privations variées ; beaucoup sont rançonnées sous prétexte de « frais de recrutement » ou victimes de violences physiques si elles n’atteignent pas les quotas exigés. Ces centres ont essaimé dans tout le pays, majoritairement dans les provinces côtières et frontalières où se trouvent les zones économiques spéciales. Cible d’une grande partie des investissements chinois, Sihanoukville est une plaque tournante de réseaux criminels transnationaux, dont les modes opératoires ont évolué vers la traite d’êtres humains, à la suite de l’interdiction des jeux en ligne illégaux en Chine continentale et au Cambodge en 2019, et du départ consécutif de nombreux touristes13. Après avoir initialement ciblé les ressortissants chinois – jusqu’à l’enlèvement – ce phénomène s’est orienté exponentiellement vers le trafic de travailleurs venus d’Asie du Sud-Est14 dans le contexte de la pandémie : les retombées économiques de la crise ont renforcé l’attrait d’un emploi rémunérateur pour les victimes, alors que le Cambodge était le premier pays à alléger à l’échelle régionale les conditions d’entrée sur son territoire.
14La pression internationale en faveur d’une action gouvernementale s’est intensifiée pendant des mois, à mesure que s’accumulaient les enquêtes et les rapports sur des faits de trafic humain, de travail forcé et de torture. Depuis la fin de l’année 2021, les ambassades des pays sud-est asiatiques collaborent avec les autorités locales et centrales cambodgiennes pour libérer leurs ressortissants retenus dans les enclaves. Les autorités chinoises ont également tenté de s’attaquer à cette criminalité, impliquant et visant leurs citoyens. Si les descentes de police dans les centres d’escroquerie ont augmenté dès le début de l’année 2022, le gouvernement a tardé à reconnaître la gravité des crimes, les réduisant souvent à des jeux d’argent illégaux en ligne. Le changement de ton sur le travail forcé est survenu à la suite d’un drame en août : plusieurs dizaines de travailleurs vietnamiens sont filmés en train de s’évader d’un casino dans la province de Kandal et de sauter dans une rivière pour échapper à leurs poursuivants, provoquant la mort par noyade de l’un d’entre eux, âgé de 16 ans. L’affaire intervient après le déclassement du Cambodge dans le rapport annuel des États-Unis sur la traite des humains (Trafficking in Persons Report, 2022), considérant que les efforts déployés dans ce domaine étaient insuffisants – ce qui peut rendre le pays inéligible à des financements non humanitaires et non liés au commerce. Parallèlement, le problème du trafic humain dans le Sud-Est asiatique atteint une audience mondiale, par le relais de médias non régionaux, tandis que de nombreux pays alertent leurs populations quant aux dangers des offres d’emplois suspectes provenant du Cambodge.
15Face aux conséquences sur l’image du pays et, potentiellement, sur le tourisme et les investissements étrangers, les autorités cambodgiennes ont lancé à partir de septembre une vaste campagne d’opérations de sauvetage des victimes et de démantèlement des réseaux criminels. Alors que les responsables sont largement impunis et les victimes souvent criminalisées et expulsées pour séjour illégal, la gestion de cette crise fragilise la position régionale du pays.
Ni Chine, ni États-Unis ? La neutralité cambodgienne en question
16La présidence de l’ASEAN par le Cambodge en 2012 avait dévoilé sa proximité avec la Chine, confirmée tout au long de la décennie. Malgré l’impact du covid-19, les investissements directs étrangers chinois ont augmenté de manière significative en 2021, tandis que le Cambodge devenait un important bénéficiaire de la diplomatie vaccinale chinoise. Pékin et Phnom Penh ont par ailleurs confirmé en 2022 la participation de la Chine à des travaux d’expansion et de modernisation de la base navale cambodgienne de Ream. Cette dernière est l’objet d’une controverse depuis 2019 : si les États-Unis et de nombreux experts y voient un accès stratégique et exclusif accordé à la marine chinoise, le Cambodge et la Chine maintiennent leurs dénégations. Les rapports bilatéraux entre Phnom Penh et Washington se sont envenimés avec la succession de sanctions états-uniennes15, dont un embargo sur les armes à destination du Cambodge et de nouvelles restrictions à l’exportation depuis fin 2021.
17Mais le dialogue est allé en s’améliorant entre les deux pays avec les voyages respectifs de Joe Biden et de Hun Sen pour les sommets multilatéraux, ainsi qu’avec la visite remarquée de ce dernier à l’ambassade des États-Unis à Phnom Penh en fin d’année16. Côté cambodgien, la perspective de la passation du pouvoir nécessiterait un tel rapprochement, afin qu’Hun Manet soit légitimé internationalement ou, du moins, hérite d’une situation diplomatique stable. Les États-Unis sont en outre l’un des principaux marchés d’exportation du pays, conduisant le PPC à y développer ses réseaux pour contrecarrer l’influence de l’opposition dans la diaspora, et le gouvernement à rémunérer des cabinets nord-américains pour faire du lobbying auprès des autorités fédérales17. Si la Chine reste le premier investisseur et donateur au Cambodge18, la Corée du Sud et le Japon sont par ailleurs très présents dans le pays. Cette politique déjà ancienne de diversification (et de compétition) des bailleurs de fonds est devenue d’autant plus nécessaire avec le mécontentement croissant de la population cambodgienne à l’égard de la présence chinoise. Dans les arènes internationales, le Cambodge s’est dissocié de la Chine sur la question ukrainienne : alors qu’on supputait son abstention, le pays a surpris en co-parrainant les résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies condamnant l’invasion et les référendums d’annexion russes19.
Collaboration internationale et restitution du patrimoine cambodgien
18Depuis plus d’une décennie, le Cambodge s’efforce de récupérer ses objets d’arts trafiqués illicitement entre les années 1970 et 1990. Une unité d’investigation du ministère de la Culture et des Beaux-arts, composée d’archéologues, d’historiens de l’art, d’enquêteurs et d’avocats, en lien avec de nombreuses institutions étrangères, a inventorié des milliers d’antiquités d’origine suspecte, en croisant les témoignages d’anciens pilleurs de temples avec la documentation disponible. La localisation d’une partie de ces antiquités a été facilitée par la découverte du rôle d’intermédiaire qu’a joué Douglas Latchford entre pilleurs et marché international de l’art20. Le collectionneur britannique installé en Thaïlande, inculpé en 2019 aux États-Unis, est mort en 2020, avant son procès. Si sa fille s’est engagée en début 2021 à restituer au Cambodge sa propre collection khmère, les artefacts vendus – dont certains n’ont jamais été référencés – sont dispersés à travers le monde. Les recherches se poursuivent grâce aux livres d’art publiés par Latchford et à ses dossiers personnels. En enquêtant sur ses trusts offshore, une équipe de journalistes au sein des « Pandora Papers » a mis la lumière en octobre 2021 sur un certain nombre d’institutions culturelles prestigieuses ayant acquis, par son biais ou celui de ses associés, des objets d’art khmers suspectés d’avoir été volés21. Les indices sont plus minces pour les collections privées : des propriétaires ont pu être identifiés par des photos publiées dans deux articles d’Architectural Digest ou, plus régulièrement, au moment de la revente aux enchères des objets. Ces avancées ont toutefois permis une accélération historique des restitutions de sculptures khmères en provenance des États-Unis en 2021 et 2022.
19Vouées en Occident à une contemplation esthétique ou à une commercialisation, à leur retour sur le sol cambodgien les statues restituées prennent une forte signification culturelle et politique. Incarnant ancêtres et esprits, elles sont la quintessence d’une culture cambodgienne essentialisée fondée sur le passé glorieux de l’ancien Empire khmer22. Accompagnée de gestes symboliques, la reprise de contrôle sur le patrimoine cambodgien représente la restauration de l’histoire et de la souveraineté nationales ébranlées par les conflits, et conforte un sentiment identitaire. Les processus de restitutions devraient se poursuivre dans les prochaines années : le ministère cambodgien de la Culture aurait essuyé jusqu’ici des refus de la part du Metropolitan Museum of Art mais serait en relation avec d’autres musées nord-américains. Il a aussi examiné des collections muséales britanniques, incluant le British Museum, et se tournerait désormais vers les collections de musées asiatiques.
20Capitalisant sur ces succès, le Cambodge a appelé à intensifier la coopération intergouvernementale au niveau régional en matière de trafic illicite de biens culturels23. Réunissant ministres de la culture de l’ASEAN et experts internationaux, une conférence s’est tenue à Siem Reap début septembre pour encourager davantage de rapatriements et de prévention, deux points figurant également dans la déclaration adoptée quelques semaines plus tard par la conférence mondiale consacrée à la culture, sous l’égide de l’UNESCO.
L’économie cambodgienne à l’épreuve de difficultés persistantes
21Après une année de récession en 2020, le PIB du Cambodge a rebondi en 2021. La crise sanitaire maîtrisée, les indicateurs des institutions financières internationales concernant la croissance économique se sont améliorés pour 2022 comme pour 2023. La Banque asiatique de développement a maintenu ses prévisions à 5,3 % en 2022 mais a abaissé celles de 2023 à 6,2 % contre 6,5 % en raison d’une croissance mondiale plus faible24. Pour la Banque mondiale, le PIB augmenterait de 4,8 % pour 2022 et de 5,2 % pour 202325. Les moteurs de croissance axés sur l’exportation de produits manufacturés et sur la construction ont soutenu cette relance. Si les projections macroéconomiques sont favorables, les retombées de la pandémie et du changement climatique ont amplifié les formes de vulnérabilité financière, exacerbant les disparités dans un contexte global de forte inflation. Le taux de pauvreté, qui avait diminué de manière constante entre 2009 et 2019, principalement du fait de la croissance des revenus du travail non agricole, serait de nouveau en hausse26.
Une reprise économique fragilisée par l’inflation
22Aggravées par la guerre en Ukraine, les perturbations des circuits d’approvisionnement mondiaux ont suscité une inflation des prix à la consommation au Cambodge avec des augmentations significatives des coûts du carburant, des engrais et des denrées alimentaires27, pesant fortement sur le niveau de vie des ménages28. Selon le Fonds monétaire international, le taux moyen d’inflation est passé de 2,9 % en 2021 à 5,2 % en 202229.
23Le pays est particulièrement exposé à la hausse des prix de l’énergie d’une part, en raison de ses importations nettes de combustibles, relativement élevées par rapport au PIB, et à celle des intrants agricoles d’autre part, essentiels pour sa production de riz. La combinaison des pressions du marché et du changement des conditions climatiques pousse en effet depuis quelques années de nombreux petits exploitants agricoles familiaux à accroître leur utilisation de pesticides et d’engrais30. Se détournant de variétés locales de riz pour optimiser leurs rendements, ils ont recours à des espèces commerciales importées nécessitant une eau plus régulée et une quantité importante d’intrants chimiques pour protéger les pousses. Alors que les précipitations excessives et les inondations de la mousson ont sévèrement endommagé les terres agricoles31, principalement dans le nord-ouest du pays, les niveaux de production alimentaire domestique devraient baisser en 2022 et, malgré les dons aux populations sinistrées, des pénuries ne sont pas à exclure.
Une diversification des sources de revenus toujours freinée par la crise sanitaire
24Depuis le début des années 2000, les transformations touchant l’accès à la terre agricole et aux ressources naturelles au Cambodge ont conduit les populations rurales à diversifier leurs activités vers le salariat et des activités hors agriculture, créant une interdépendance mutuelle entre espaces urbains et ruraux. La crise sanitaire a considérablement mis à mal l’équilibre de ce système socio-économique en entravant l’accès aux opportunités d’emploi non agricoles.
25Beaucoup de ménages à faibles revenus ont fait face à une diminution de leurs ressources avec l’interruption des migrations de travail – surtout saisonnières – de leurs proches à l’étranger. Près de 260 000 travailleurs cambodgiens ont perdu leur emploi dans la région à cause de la pandémie de covid-19 et sont revenus dans le pays jusqu’à décembre 2021, majoritairement depuis la Thaïlande. Si les migrations transfrontalières ont pu reprendre en 2022, les transferts de fonds ont chuté pour les pays d’Asie du Sud-Est (-3,4 %), le Cambodge étant le deuxième pays le plus impacté selon l’ASEAN Migration Outlook.
26Les familles rurales dépendent aussi fortement de l’aide matérielle de leurs membres ouvriers non qualifiés dans les villes – le secteur de la confection pour les femmes, les chantiers de construction pour les hommes. L’industrie textile a été touchée dès 2020 avec les annulations de commandes par les marques mondiales provoquant fermetures d’usines et pertes d’emplois, aggravées pendant le pic épidémique de 2021. La relance en 2022 a exacerbé les tendances existantes à la flexibilisation et à l’intensification du travail, les propriétaires et les directeurs d’usine cherchant à récupérer les bénéfices perdus par une production plus élevée à un coût inférieur32. Les ouvrières textiles, après avoir assumé l’essentiel des coûts de l’effondrement du secteur, supportent désormais les charges de la reprise économique. La revalorisation à 200 dollars du salaire minimum dans l’industrie textile au 1er janvier 2023 ne suffira pas à compenser cette perte de revenus accentuée par l’inflation. Les rémunérations sont également insuffisantes dans le secteur plus informel de la construction, caractérisé par une forte sous-traitance et des temps de travail irréguliers. Les conditions sont particulièrement difficiles pour les briquetiers en servitude pour dettes auprès de leurs patrons et pour les ouvriers du bâtiment vivant avec leurs familles sur les chantiers par manque de moyens33.
27Interrompu par la pandémie, le tourisme représente une part notable des sources de revenus alternatives à l’agriculture des communautés rurales. L’éco-tourisme se développe de manière croissante et le secteur des services a bénéficié du retour des touristes internationaux en 2022, dont le nombre a dépassé à la fin du mois d’août le million prévu à l’origine pour l’année entière34. Dans les lieux plus reculés, leur absence se fait cependant toujours sentir. Quant aux destinations touristiques les plus fréquentées, leur mise en valeur se fait au détriment des commerçants et résidents locaux. L’embellissement du front de mer à Kep oblige les vendeurs de rue à démanteler leurs étals, tandis que la préservation du site archéologique d’Angkor, dans la crainte de son élimination de la liste du patrimoine mondial reconnu par l’UNESCO, s’accompagne d’évictions et de relocalisations contraintes35.
La montée des niveaux d’endettement privé
28L’impact de la crise sanitaire ne s’est pas limité à une baisse de revenus ; il a renforcé l’endettement croissant des ménages pour financer leurs dépenses36. Les familles endettées avant la crise sanitaire se sont tournées vers des emprunts auprès de leur entourage et d’acteurs privés, afin de rembourser les prêts aux taux d’intérêt conséquents37 obtenus auprès d’institutions de microfinance et de banques38. L’arrêt et le ralentissement des activités, insuffisamment compensés par les aides gouvernementales, ont étendu le recours au microcrédit par un plus grand nombre de ménages. Les petits agriculteurs se résignent à accumuler les dettes pour s’adapter aux aléas climatiques, et sont en proie à des difficultés grandissantes pour les rembourser en raison de l’inflation et des mauvaises récoltes39.
29Le volume des prêts croît rapidement depuis deux décennies – pour la consommation quotidienne, l’amélioration de l’habitat, les frais de santé et les dépenses d’éducation – sans que les revenus moyens progressent au même rythme. Les stratégies d’accommodement des ménages face au surendettement, entre sacrifices et travail supplémentaire, génèrent des effets cumulatifs sur leur santé et l’éducation des enfants, voire mènent à la perte de bétail ou, en dernier ressort, de terrains agricoles. Accéléré par la pandémie, ce cercle vicieux fait craindre une crise généralisée.
Des défis environnementaux et sociaux interconnectés
30Parallèlement au braconnage et à la commercialisation de la faune sauvage40, le Cambodge est concerné par l’exploitation de ses ressources naturelles – forêts, sable, minerais – depuis plusieurs décennies, faisant face à une situation écologique préoccupante, aux conséquences sociales lourdes. Si les projets développementalistes se font bien souvent aux dépens des populations locales, certaines tentatives de défense de l’environnement par les autorités ont également participé à menacer leurs revenus et, plus largement, leur mode de vie.
Faim de terre, soif de sable
31Le sable est à l’échelle globale la ressource naturelle la plus consommée dans le monde après l’eau. Au Cambodge, l’exportation à l’étranger du sable de rivière a officiellement repris malgré son interdiction en 201741, et son extraction intensive s’est poursuivie avec un coût environnemental élevé. Alors que l’effondrement de berges se fait plus fréquent42, on attribue aussi au dragage des effets délétères sur l’équilibre sédimentaire du Mékong. Si les volumes exacts de prélèvement sont inconnus, la demande de sable de rivière, ingrédient essentiel du béton, croît aussi au fur et à mesure que le secteur de la construction, source majeure de croissance du pays, se développe. Le matériau est surexploité pour les projets de poldérisation qui prolifèrent, tant sur les îles dans le lit du Mékong près de la capitale43 que sur le littoral, de Sihanoukville aux alentours de Kep plus récemment44, dans une logique de conquête de nouvelles terres constructibles.
32Les empiètements se font également sur les dernières superficies inondables dans la périphérie de Phnom Penh. Le sable est massivement utilisé pour l’assèchement des marécages et le comblement des lacs Boeung Tamok et Boeung Tompoun. En passe de disparaître, ces bassins, qui assuraient la récupération des eaux pluviales, amplifient les risques d’inondations dans la capitale. La croissance de l’industrie du sable a certes créé des opportunités – temporaires et précaires – pour les acteurs de la filière que sont les dragueurs, mais s’est surtout révélée destructive pour les agriculteurs urbains45. Tandis que les résidents de ces plans d’eau font face à des déplacements forcés et ne peuvent pas trouver à se loger dans la ville devenue trop chère, les parcelles remblayées sont destinées à des institutions gouvernementales, à des promoteurs immobiliers et à un ensemble d’individus connectés aux plus hauts responsables du parti au pouvoir46. Le Tonle Bati, destination touristique à cheval sur les provinces de Takeo et de Kandal, serait le prochain lac concerné par un projet de développement47.
Des menaces sur l’écosystème aux pressions des mesures environnementales sur les populations rurales
33Cette dynamique de privatisation s’étend également aux forêts. Si le taux annuel de déforestation décline, des portions d’aires protégées – parc nationaux, réserves naturelles et sanctuaires de faune – sont régulièrement requalifiés en terrains privés. Les concessions foncières sont un moteur prédominant de dégradation et de destruction des forêts au Cambodge48, s’accompagnant de spoliations de terres et de conflits fonciers. La dernière affaire en date d’abattage forestier, celle du Phnom Tamao, situé à une quarantaine de kilomètres au sud de la capitale, remonte à août 2022. Plus de la moitié de la forêt a été cédée à des magnats, dont le promoteur immobilier Leng Navatra49. En l’espace d’une semaine, 500 hectares ont été déboisés. La condamnation générale de la part de militants écologistes et du grand public a conduit néanmoins à une intervention politique y mettant un terme et appelant à une reforestation50. Peu d’espoirs subsistent que ce recul fasse jurisprudence au vu du maintien de concessions dans des parcs nationaux plus éloignés de Phnom Penh ; mais les candidatures en gestation de sites naturels cambodgiens à la liste du patrimoine mondial naturel de l’UNESCO devraient mener à une mise en valeur de (certaines) ressources naturelles pour leur attractivité touristique potentielle.
34La perte des forêts alluviales sur les plaines inondées autour du Tonlé Sap – la plus grande réserve d’eau douce intérieure du Sud-Est asiatique – a fait spécifiquement l’objet de mesures environnementales. Depuis 2011, la zone de conservation est divisée en trois secteurs : les zones 1 et 2, où l’agriculture est autorisée, et la zone 3, qui est la plus proche du lac et où l’agriculture et la pêche sont officiellement interdites. Les communautés locales utilisaient librement des portions de la zone 3 jusqu’à fin 2021, quand a commencé une vaste opération interministérielle de récupération des terres protégées, de replantation et d’arrestations pour occupation illégale – souvent pour défrichement et conversion en terres arables. Si les données satellitaires montrent une diminution de l’activité de déforestation en 2022, les habitants ont du mal à survivre sans ces activités agricoles vivrières et commerciales dont ils dépendent depuis des années51.
35Après des années de surpêche non régulée et de réduction générale des stocks de poissons dans le lac, les activités de pêche sont de moins en moins rentables, d’autant plus que le gouvernement a fait appliquer strictement à partir d’avril les prohibitions de pêche dans la zone de conservation, l’interdiction générale de la pêche électrique et les réglementations sur la taille des filets. Sous couvert de préservation de la nature, les amendes, arrestations et saisies d’équipements ont ciblé les communautés riveraines – souvent vietnamiennes52.
36De manière générale, la rhétorique gouvernementale impute la perte du couvert forestier à l’exploitation illégale du bois et à la pratique de l’abattis-brûlis des populations locales plutôt qu’à l’accaparement des terres et à la coupe du bois par les milieux d’affaires et les plantations agro-industrielles ; la diminution des poissons serait de même la conséquence de la pêche illégale et de la pollution par les populations vivant sur le Tonlé Sap plutôt que des sécheresses récurrentes et de la construction de nouveaux barrages hydroélectriques sur le Mékong53. Occultant la responsabilité des élites nationales et provinciales, ce discours ignore la pression foncière élevée qui, conjuguée à la perte de biodiversité et à l’érosion des sols, laisse peu de choix aux communautés rurales, autres que d’empiéter davantage sur l’environnement. La mise en application des mesures visant à sanctuariser le Tonlé Sap tend alors à achever d’affecter les conditions d’existence des riverains, les poussant à migrer pour trouver d’autres sources de revenus ou de nouvelles surfaces arables.
Conclusion
37En 2023, le Cambodge continuera de s’affirmer régionalement avec l’organisation des Jeux d’Asie du Sud-Est, alors que l’organisation et la tenue des élections générales en juillet rythmeront la politique intérieure. Si les espoirs d’un retour du pluralisme politique sont minces, la succession future de Hun Sen persistera certainement à alimenter toutes sortes de conjectures. Malgré les écueils sociaux et environnementaux de sa politique développementaliste, le gouvernement ne devrait pas changer de cap, misant sur l’afflux d’investissements étrangers et l’amélioration de la connectivité du pays par des méga-projets. Les chantiers des deux nouveaux aéroports de Siem Reap et de Phnom Penh se poursuivent, tandis que sera lancée courant 2023 la construction de deux ponts, l’un pour relier la capitale à la province de Kandal en enjambant le Tonlé Sap et le Mékong, l’autre pour connecter les provinces de Kratie et de Kompong Thom en franchissant le Mékong. Sont également prévus un nouveau port en eaux profondes à Kampot d’ici 2025, et la partie cambodgienne de l’autoroute reliant Phnom Penh à Hô Chi Minh-Ville à l’horizon 2027.
Annexe
Fiche Cambodge
Nom officiel : Royaume du Cambodge
Capitale : Phnom Penh
Superficie terrestre : 181 040 km²
Population totale en 2021 (sources : Banque mondiale et Nations unies) : 16,9 millions d’habitants (25 % urbains et 75 % ruraux).
Langue officielle : khmer
Données politiques
Nature de l’État : monarchie constitutionnelle
Nature du régime : parlementaire
Suffrage : universel (à partir de 18 ans)
Chef de l’État : S.M. le roi Norodom Sihamoni (depuis octobre 2004)
Premier ministre : Hun Sen (depuis janvier 1985)
Ministre des Affaires étrangères : Prak Sokhonn (depuis avril 2016)
Ministre de la Défense : Tea Banh (depuis juin 2006)
Président de l’Assemblée nationale : Heng Samrin (depuis mars 2006)
Indicateurs démographiques et sociologiques
Principaux groupes ethniques (CIA-The World Factbook, est. 2019-2020) : Khmers (95,4 %), Cham (2,4 %), Chinois (1,5 %), autres (0,7 %)
Religions (CIA-The World Factbook, est. 2019) : bouddhistes (97,1 %), musulmans (2 %), chrétiens (0,3 %), autres (0,5 %)
Chronologie
JANVIER 2022
05 • Le président du Comité des droits de l’Homme du Cambodge, Keo Remy, est nommé président de la Commission intergouvernementale des droits de l’homme de l’ASEAN pour un mandat de trois ans.
12 • Bin Chhin, vice-Premier ministre chargé du Conseil des ministres, et Miguel de Serpa Soares, Secrétaire général adjoint aux Affaires juridiques et conseiller juridique des Nations unies, signent l’entrée en vigueur d’un accord additionnel entre l’ONU et le Cambodge sur l’arrêt des Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens (CETC) et sur leur transition.
FÉVRIER 2022
1er • Afin de répondre à la demande de main-d’œuvre, les travailleurs migrants commencent à retourner en Thaïlande après deux ans de fermeture des frontières.
09 • Le prince Norodom Chakravuth est élu président du parti Front uni national pour un Cambodge indépendant, neutre, pacifique et coopératif (FUNCINPEC).
MARS 2022
02 • Le Cambodge décide de coparrainer et de voter en faveur de la résolution de l’ONU exigeant que la Russie retire immédiatement ses forces militaires du territoire ukrainien.
17 • Au sein de l’opposition, 21 membres, dont les anciens dirigeants du Cambodia National Rescue Party (CNRP), Sam Rainsy et Mu Sochua, sont condamnés à des peines allant de cinq à dix années d’emprisonnement pour avoir tenté de renverser le gouvernement.
AVRIL 2022
14 - 16 • Les Cambodgiens célèbrent le Nouvel An khmer pour la première fois depuis 2019.
MAI 2022
05 • Début de la construction d’un grand port international en eau profonde dans la province de Kampot, destiné à devenir un hub maritime majeur pour le pays et qui sera composé d’un terminal à conteneurs, d’une zone économique spéciale, d’un hub logistique, d’une zone de libre-échange, ou encore d’une raffinerie de pétrole.
21 • Début de la campagne électorale pour les 17 partis candidats aux élections communales du 5 juin 2022. Jusqu’au 3 juin, ils sont autorisés à organiser des défilés et des rassemblements politiques.
JUIN 2022
05 • À l’issue des élections communales, le Parti du peuple cambodgien (CPP) remporte 9 376 sièges, dont 1 648 postes de chef de commune, contre 2 198 sièges dont quatre postes de chef de commune pour le principal parti d’opposition, le Candlelight Party, tandis que sept autres partis gagnent quelques sièges.
11 • En réaction à la décision de la junte birmane d’exécuter quatre opposants politiques, le Premier ministre cambodgien, Hun Sen, dans une lettre au dirigeant birman, Min Aung Hlaing, appelle ce dernier à reconsidérer la sentence, ajoutant qu’elle déclenchera de fortes réactions négatives de la part de la communauté internationale.
JUILLET 2022
02 • Fin de la seconde visite du ministre des Affaires étrangères cambodgien, Prak Sokhonn, en Birmanie en tant qu’envoyé spécial de l’ASEAN. S’il a rencontré le général Min Aung Hlaing et d’autres responsables du Conseil d’administration de l’État du Myanmar (SAC), ainsi que les représentants de sept groupes armés ethniques signataires d’un accord de cessez-le-feu avec le SAC, la junte a cependant refusé qu’il rencontre Aung San Suu Kyi.
08 • Le Conseil des ministres approuve un projet d’amendement à la Constitution sur huit articles établissant la façon dont le Premier ministre est nommé et le pouvoir de l’Assemblée nationale sur les membres du gouvernement, validé par le Conseil constitutionnel le 13, puis par l’Assemblée nationale le 28, le Sénat le 5 août et enfin par le roi le 6 août. Le 14 juillet, dans une conférence de presse, le ministre de la Justice, Koeut Rith, assure que l’amendement est voué à assurer la paix et la stabilité du pays et n’affectera pas le pluralisme démocratique malgré les critiques de l’opposition, qui dénonce un affaiblissement du multipartisme et du pouvoir de l’Assemblée nationale, ainsi qu’un amendement permettant à Hun Sen de transférer le pouvoir à son fils.
16 - 17 • À l’issue d’un congrès extraordinaire de son Comité central, le Parti du peuple cambodgien (PPC), indique dans une déclaration que ses membres soutiennent la candidature d’Hun Sen au poste de Premier ministre lors des prochaines élections ainsi que la candidature future de son fils, Hun Manet, au même poste.
AOÛT 2022
26 • Le ministre de l’Intérieur Sar Kheng annonce que les autorités ont secouru 865 étrangers victimes de trafics d’êtres humains entre le 1er janvier et le 20 août 2022. Face aux appels de plusieurs pays pour les aider à libérer leurs citoyens et aux accusations sur le manque d’action du gouvernement cambodgien, le ministre exprime son engagement à lutter contre ces trafics.
SEPTEMBRE 2022
17 • Hun Sen ordonne aux autorités provinciales et locales de réprimer les jeux d’argent illégaux dans tout le pays, sous peine d’être évincés de leur poste. À la suite de cette directive, près de 500 personnes sont arrêtées à Phnom Penh et à Sihanoukville.
22 • Le tribunal spécial chargé de juger les Khmers rouges émet son ultime décision avant dissolution, confirmant en appel la condamnation à la prison à perpétuité de Khieu Samphan, ancien chef d’État du Kampuchéa démocratique, pour génocide.
28 • Sortie de « Life of a Pagoda Boy », un film hagiographique revenant sur l’enfance d’Hun Sen, riche en symbolisme surnaturel.
OCTOBRE 2022
03 • Suppression de toutes les formalités de voyage liées au covid‑19 pour effectuer un voyage au Cambodge, toutes frontières confondues. Les autorités cambodgiennes lèvent l’obligation de présenter une preuve de vaccination à l’entrée du territoire, ainsi que l’obligation de test à l’arrivée pour les personnes non vaccinées.
04 • Le Premier ministre, Hun Sen, annonce que la Birmanie n’est pas invitée au sommet de l’ASEAN, pour la deuxième année consécutive.
14 • Le Cambodge vote en faveur de la résolution du Conseil de sécurité de l’ONU condamnant l’annexion par la Russie de quatre territoires ukrainiens.
19 • Un tribunal cambodgien condamne Sam Rainsy à la prison à perpétuité. La condamnation prononcée par contumace résulte d’une décision prise en août 2022 et s’additionne aux 47 ans qu’il accumule déjà pour des condamnations antérieures. Le tribunal lui retire tous ses droits politiques.
NOVEMBRE 2022
08 - 13 • Sommets de l’ASEAN à Phnom Penh.
16 • Kry Masphal, directeur adjoint de l’agence cambodgienne chargée de la protection de la faune et de la flore sauvages est arrêté à New York. Il est accusé d’être impliqué dans un réseau de contrebande de plusieurs millions de dollars visant à exporter une espèce de singe menacée d’extinction vers les États-Unis dans le but d’utiliser les spécimens pour la recherche médicale.
DÉCEMBRE 2022
22 • L’ancienne vice-présidente du CNRP, Mu Sochua, et 35 autres membres de l’opposition sont condamnés par un tribunal de Phnom Penh. Ils sont accusés de complot dans une affaire liée à la tentative de retour d’exil de Sochua en 2021. Il s’agit du cinquième procès collectif depuis la dissolution du CNRP en 2017 par la Cour suprême.
Portraits
Or Vandine, figure de la lutte contre le covid‑19
Or Vandine a passé toute sa carrière, entamée dans les années 1980, dans le secteur de la santé. Fille de médecin, elle devient elle-même docteure en médecine en 1988. Après avoir exercé un temps à l’hôpital provincial de Siem Reap, elle est la première femme cambodgienne à obtenir une bourse Fulbright en 1994, alors que le programme vient tout juste d’être relancé. Elle se rend aux États-Unis et achève un master en santé publique à l’université de Yale. À son retour au Cambodge en 1996, elle coordonne des projets sanitaires financés par la Banque mondiale et la Banque asiatique de développement. En 1998, elle accède aux postes de directrice du cabinet du ministre de la Santé et de responsable du département de contrôle des maladies transmissibles. Après avoir travaillé un temps pour l’Organisation mondiale de la santé puis géré les subventions internationales de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme, elle est promue en 2006 au poste de directrice du département de la coopération internationale du ministère de la Santé. En 2013, elle est placée à la tête de la Direction générale de la Santé et est nommée secrétaire d’État six ans plus tard.
En sa qualité de porte-parole du ministère de la Santé, Or Vandine incarne depuis 2020 la lutte contre la propagation du coronavirus. On lui attribue le succès de la stratégie nationale de vaccination pour ses rôles de présidente de la Commission ad hoc pour la vaccination contre le covid‑19 et de porte-parole de la Commission interministérielle de lutte contre le virus en 2021 dans un contexte d’aggravation épidémique. Sa popularité se confirme en 2022 avec les campagnes de rappel, la publication d’un ouvrage paru en avril sur la maîtrise de la crise sanitaire et ses interventions sur la variole du singe (mpox). Certains commentateurs avancent qu’elle pourrait devenir ministre de la Santé après les prochaines élections54.
VannDa et Baramey Production, fers de lance de l’industrie musicale cambodgienne
Alors que la musique était dominée au Cambodge par le karaoké et l’appropriation de morceaux étrangers aux thèmes sentimentaux dans les années 1980 et 1990, une nouvelle scène musicale a émergé dans les années 2000, facilitée par le développement du numérique55. Transnationale par ses liens avec les communautés de la diaspora cambodgienne, elle réunit des compositions originales aux genres, rythmes et esthétiques variés. Au Cambodge, elle se constitue depuis peu en industrie, avec la professionnalisation des acteurs de la filière et l’arrivée sur le marché d’acteurs mondiaux majeurs (Spotify en 2021). Le label Baramey Production, co-fondé en 2016 par la chanteuse khméro-américaine Laura Mam (36 ans), est central dans cette transformation à travers son engagement contre le piratage et ses partenariats avec des entreprises cambodgiennes pour promouvoir et sécuriser les revenus de ses artistes.
Parmi ces derniers, figure depuis 2019 le rappeur, auteur-compositeur et producteur VannDa (25 ans) – Mann Vannda de son vrai nom. Originaire de Sihanoukville et issu d’un milieu modeste, il rejoint la capitale en 2016 où il commence à se faire connaître par des morceaux parus de manière indépendante. Avec Baramey, VannDa sort son premier album $kull the Album (2020). Ses textes évocateurs et incisifs prennent des accents patriotiques en 2021, lorsqu’il collabore avec Kong Nay, joueur réputé de luth chapey, pour le morceau Time To Rise, alliant l’anglais au khmer et le rap aux sonorités traditionnelles. Représentant les deux artistes au Musée national du Cambodge (Phnom Penh), le clip vidéo, qui fait partie d’une campagne publicitaire de la société de télécommunication Cellcard, compte un million de vues sur YouTube en 24 heures et dépasse désormais les 100 millions de vues, atteignant une audience régionale et internationale56. Ce succès conduit à un accord entre Baramey Production et la branche asiatique du groupe Warner Music, spécialisée dans la distribution globale de labels indépendants (Alternative Distribution Alliance), une première pour un label cambodgien. VannDa continue quant à lui son ascension fulgurante, devenant le premier artiste à faire des tournées domestiques, et lance un second album, SKULL 2, en deux parties, avec des collaborations régionales. L’artiste et son label construisent une scène musicale internationalisée et grand public au Cambodge, cultivant des liens avec les conglomérats et le pouvoir politique en évitant toutes paroles subversives57.
Arrêt sur image
Début juillet, le Premier ministre Hun Sen et sa femme Bun Rany, comme l’ensemble des élites cambodgiennes, ont assisté aux noces d’Ung Rithy et de Phan Sophanisa, largement relayées sur les réseaux sociaux et dans les médias cambodgiens. En tant qu’invités de marque, ils ont participé au rituel de la coupe symbolique des cheveux des mariés pendant la cérémonie58. Plus que tout autre événement de la vie sociale, les mariages sont un moment de cristallisation du capital social des familles concernées.
Les parents du marié sont respectivement président et vice-présidente du groupe Chip Mong. Sa grand-mère, Pheap Heak, est la fondatrice de ce puissant conglomérat familial, détenant comme ses deux fils le titre d’oknha, ancienne distinction nobiliaire désormais octroyée aux élites économiques en échange de contributions financières aux projets de développement national. La mère de la mariée est la dernière fille de Chea Sophara, vice-Premier ministre et ministre de l’Aménagement du territoire ; son père, sous-secrétaire d’État au ministère de l’Économie, est le fils de Moeung Samphan, secrétaire d’État à la Défense.
L’entrée de la troisième génération des élites post-génocide sur le marché matrimonial confirme la poursuite de la concentration du pouvoir par des pratiques d’intermariages. En 2022, deux des cousins de la mariée ont adopté des stratégies d’alliance similaires : l’un s’est fiancé en mars avec la fille du gouverneur de Phnom Penh, tandis que sa sœur a épousé en décembre le fils d’un autre sous-secrétaire d’État au ministère de l’Économie. Un des petits-fils d’Hun Sen serait en outre fiancé à une petite-fille de Cham Prasidh, ministre d’État détenteur du portefeuille de l’Industrie.
Notes de bas de page
1 « Three-day Khmer New Year Holiday Attracts 4.6 million Visitors », Agence Kampuchea Presse, 17 avril 2022.
2 Benjamin Lawrence, « Cambodia’s Constitutional Amendments : Consolidating Control and Securing Succession Plans », ConstitutionNet, 28 septembre 2022 (https://constitutionnet.org/news/cambodias-constitutional-amendments-consolidating-control).
3 Nov Sivutha et Ry Sochan, « Senior energy official tapped as new agriculture minister », The Phnom Penh Post, 10 octobre 2022.
4 Selon les recherches doctorales de l’auteure menées de 2018 à 2023 sur les modalités de sélection du personnel politico-administratif et sur la reproduction des élites cambodgiennes depuis 1979.
5 Après treize années d’audiences et trois sentences, le travail des Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens s’est en effet achevé quelque peu dans l’indifférence. Ce tribunal spécial, dont les coûts s’élèveraient à un total de 337 millions de dollars, passe désormais à une phase de trois ans axée, entre autres initiatives, sur la conservation des documents, la sensibilisation du public et le soutien aux victimes, avant sa complète dissolution. Cf. Andrew Haffner, « The Good, Bad and Ugly as Khmer Rouge Tribunal Reaches End of the Road », VOD, 30 septembre 2022 ; Sarah Williams, « Khmer Rouge Tribunal leaves a mixed legacy », East Asia Forum, 9 novembre 2022.
6 Shaun Turton et Bopha Phorn, « Cambodia’s reborn opposition under pressure ahead of local polls », Nikkei Asia, 30 mai 2022.
7 Fiona Kelliher, « Five Years on, Cambodian Opposition Faces Familiar Plight », VOD, 28 octobre 2022.
8 L’expression fait référence aux révolutions ayant mis fin à des régimes dans l’espace est-européen et postsoviétique, parfois interprétées comme des conséquences de manipulations internationales. Adoptant cette perspective, des hauts cadres du PPC ont agité la crainte d’un tel mouvement impulsé de l’étranger.
9 Keat Soriththeavy et Michael Dickison, « Thousands of Workers Swept Up in a Year of Union Busting », VOD, 16 décembre 2022.
10 Robin Ramcharan, « The National Internet Gateway and the Future of Digital Authoritarianism in Cambodia », Kyoto Review of Southeast Asia, n° 33, 31 août 2022 (https://kyotoreview.org/issue-33/future-of-digital-authoritarianism-in-cambodia/).
11 Pour un portrait ancien, voir : Alain Candille et Jérémy Jammes, 2011, « Cambodge. L’exécutif durcit le ton », in Arnaud Leveau et Benoît de Tréglodé (dir.), L’Asie du Sud-Est 2011. Les événements majeurs de l’année, Bangkok-Paris, IRASEC-Les Indes savantes, p. 131-154.
12 Lianne Chia, Cheryl Tan et Ray Yeh, « Inside the elaborate set-up of a scam HQ, staffed by people forced to scam », CNA, 23 octobre 2022.
13 Nicholas Farrelly, Alice Dawkins et Patrick Deegan, 2022, Sihanoukville. A Hub of Environmental Crime Convergence, Global Initiative Against Transnational Organized Crime.
14 Ce type de trafic s’est par ailleurs aussi développé au Laos, dans la ZES du Triangle d’Or de la province de Bokeo, et parmi les travailleurs migrants se trouvent des Indonésiens et Malaisiens. Voir à ce sujet les chapitres Laos, Indonésie et Malaisie, dans ce volume.
15 Pour un historique, voir : Kimkong Heng, « Mending Cambodia-US relations: A Cambodian Perspective », Kyoto Review of Southeast Asia, n° 32, 27 février 2022 (https://kyotoreview.org/issue-32/mending-cambodia-us-relations-a-cambodian-perspective/).
16 Ry Sochan, « PM’s visit to US embassy seen as a turning point in relations », Phnom Penh Post, 25 décembre 2022.
17 Chanrith Ngin, « Having it Both Ways? Cambodia’s Superpower Balancing Act », FULCRUM, 16 juin 2022.
18 Pour un état des lieux des relations bilatérales entre la Chine et le Cambodge, voir : Vannarith Chheang et Pheakdey Heng, 2021, « Cambodian perspective on the Belt and Road Initiative », in Joseph Chinyong Liow, Hong Liu et Gong Xue (dir.), Research Handbook on the Belt and Road Initiative, Cheltenham-Northampton, Edward Elgar Publishing, p. 176-190.
19 Ian Storey, « The War in Ukraine: Cambodia’s Surprisingly Hard-line Stand », FULCRUM, 25 mai 2022.
20 Matthew Campbell, « The Epic Temple Heist That Looted a Nation’s History », Bloomberg, 29 juin 2022.
21 Delphine Reuter et Malia Politzer, « How we tracked Cambodian antiquities to leading museums and private galleries », International Consortium of Investigative Journalists, 5 octobre 2021. Voir aussi : Pandora Langlais, « Hidden Money, Stolen Art: the Impact of the “Pandora Papers” on the Art World », The Journal of Cultural Heritage Crime, 3 février 2022.
22 Communiqué de presse du ministère de la Culture et des Beaux-Arts, « The repatriation of 30 Khmer Cultural Objects from the United States to the Kingdom of Cambodia », 8 août 2022.
23 Pour un état des lieux en Asie du Sud-Est, voir : Étienne Clément, 2021, « Le trafic illicite des biens culturels en Asie du Sud-Est », in Christine Cabasset et Claire Thi Liên Tran (dir.), L’Asie du Sud-Est 2021. Bilan, enjeux et perspectives, Bangkok-Paris, IRASEC-Les Indes savantes, p. 81-106.
24 Asian Development Bank, 2022, Asian Development Outlook 2022 Update (September).
25 Sodeth Ly et Wendy R. Karamba, 2022, Cambodia Economic Update: Navigating Global Economic Headwinds, Washington, World Bank.
26 Wendy R. Karamba, Kimsun Tong et Isabelle Salcher, 2022, Cambodia Poverty Assessment: Toward a More Inclusive and Resilient Cambodia, Washington, World Bank.
27 United Nations World Food Programme – Ministry of Agriculture, Forestry and Fisheries, 2022, Cambodia: Market & Seasonal Monitoring Update – August 2022.
28 World Bank, 2022, Macro Poverty Outlook for East Asia and the Pacific. Country-by-country analysis and projections for the developing world.
29 International Monetary Fund, 2022, Cambodia: 2022 Article IV Consultation-Press Release; Staff Report; and Statement by the Executive Director for Cambodia, Country Report No. 2022/371.
30 Vincent Guermond, Laurie Parsons, Long Ly Vouch, Katherine Brickell, Sébastien Michiels, Gráinne Fay, Milford Bateman, Giacomo Zanello, Nithya Natarajan, Dalia Iskander et Fiorella Picchioni, 2022. Microfinance, Over-indebtedness and Climate Adaptation: New Evidence from Rural Cambodia, Royal Holloway, University of London.
31 Nai Ngay, « Flood Displaced Residents Return Home, But Rice Fields Need Restoration », CamboJA News, 26 octobre 2022.
32 Sabina Lawreniuk, Katherine Brickell et Lauren McCarthy, 2022, Building Forward Worse: How covid-19 has accelerated the race to the bottom in the global garment industry, Royal Holloway, University of London.
33 Dara Mech, « Debt Bondage Worker Freed From Kampong Cham Brick Kiln », VOD, 31 octobre 2022 ; Andy Ball, « Cambodia’s At-Risk Construction Workers Raise Families On-Site », New Naratif, 6 avril 2022.
34 Moro Kort Kheav, « As Many as 2 million International Tourists Expected in Cambodia in 2022 », Cambodianess, 11 septembre 2022.
35 Andrew Haffner, « Displaced From Angkor: Desolate Land, Uncertain Futures Await Residents », VOD, 28 septembre 2022.
36 Katherine Brickell, Theavy Chhom, Sabina Lawreniuk et Hengvotey So, 2022, « Global precarity chains and the economic impact on Cambodia’s garment workers », in Hyun Bang Shin, Murray Mckenzie et Do Young Oh (dir.), covid-19 in Southeast Asia: Insights for a post-pandemic world, Londres, LSE Press, p. 97-107.
37 Le taux d’intérêt a été plafonné à 18 % par la banque centrale cambodgienne en 2017 pour les institutions de microfinance – ce qui n’a pas eu d’impact sur l’offre de microfinance, qui continue à croître fortement.
38 Phasy Res, 2021, Microfinance in Times of covid-19. Consumer Protection and the Loan Restructuring Process in Cambodia, Siem Reap, Center for Khmer Studies.
39 Niseiy Sao Phal, « Debt and Land Degradation: Lake Farmers’ Plight », Cambodianess, 13 juin 2022.
40 Tout particulièrement le commerce des macaques à longue queue qui, depuis le début de la pandémie et l’arrêt de la vente d’animaux sauvages par la Chine, sont fournis de manière croissante par le Cambodge aux laboratoires nord-américains. Alors que la demande décuplait avec les essais vaccinaux, le nombre de macaques de fermes d’élevage s’est révélé insuffisant, intensifiant leur capture à l’état sauvage. Cf. Rich Schapiro, Anna Schecter, Andrew W. Lehren et Anton L. Delgado « How the race for a covid vaccine enriched monkey poachers and endangered macaques », NBC News, 17 décembre 2022.
41 Andrew Haffner, « Fleets of Sand Barges Cross Border as Exports Quietly Restarted », VOD, 25 octobre 2022.
42 Pour un exemple, voir : Meng Kroypunlok, « Takhmao Riverbank Collapses, Gov’t Blames Heavy Rains Upstream », VOD, 10 mai 2022.
43 Céline Pierdet, 2022, « La reprise de poldérisation à Phnom Penh (Cambodge) : un défi social et environnemental », L’Information géographique, vol. 86, n° 3, p. 95-111.
44 Sovann Sreypich, « Kep vendors and fishermen worried about land reclamation impacts », CamboJA News, 15 mars 2022.
45 Melissa Marschke, Jean-François Rousseau, Laura Beckwith, Lukas Van Arragon et Laura Schoenberger, 2021, « Displaced Sand, Displaced People: The Livelihood Impacts of Sand Mining (Cambodia) », AFD Research Papers, n° 205, p. 1-22.
46 Gerald Flynn et Vutha Srey, « Cambodia’s elites swallow up Phnom Penh’s lakes, leaving the poor marooned », Mongabay Environmental News, 7 octobre 2022.
47 Keat Soriththeavy, « Tourist-Friendly Tonle Bati Next in Line as Lake Losses Ramp Up », VOD, 24 juin 2022.
48 Maren Pauly, Will Crosse et Joshua Tosteson, 2022, « High deforestation trajectories in Cambodia slowly transformed through economic land concession restrictions and strategic execution of REDD+ protected areas », Scientific Reports, vol. 12.
49 Pour son portrait, voir : Julie Blot, 2022, « Cambodge. Acrobaties diplomatiques sur fond de pandémie », in Christine Cabasset et Jérôme Samuel (dir.), L’Asie du Sud-Est 2022. Bilan, enjeux et perspectives, Bangkok, IRASEC, p. 205-229.
50 Anton L. Delgado, « Reforestation follows Cambodian PM’s intervention », Southeast Asia Globe, 12 août 2022.
51 Danielle Keeton-Olsen et Long Ly Vouch, « Farmers feel the pressure after conservation crackdown around Cambodia’s Tonle Sap Lake », Mongabay Environmental News, 20 juillet 2022.
52 Gerald Flynn et Vutha Srey « Fisheries crackdown pushes Cambodians to the brink on Tonle Sap lake », Mongabay Environmental News, 26 août 2022.
53 Abby Seiff, 2022, Troubling the water. A Dying Lake and a Vanishing World in Cambodia, Lincoln, Potomac Books-University of Nebraska Press.
54 David Hutt, « Is Or Vandine Cambodia’s Future? », The Diplomat, 10 février 2022.
55 LinDa Saphan, 2017, « Cambodian Popular Musical Influences from the 1950s to the Present Day », in Hyunjoon Shin et Keewoong Lee (dir.), Sounds from the Periphery: Modernity and Development of Asia Pop 1960-2000, Séoul, Chaeryun, p. 262-296. Le rappeur praCh (Prach Ly) est considéré comme un pionnier de cette nouvelle vague. Cf. Sharon May, 2004, « Art of faCt: An Interview with praCh », Manoa, vol. 16, n° 1, p. 73-82.
56 Le média LiFTED consacre Time To Rise comme meilleure vidéo de l’année 2021 et choisit VannDa pour la couverture de son numéro de décembre. Cf. « 2021 has been VannDa’s time to rise », LiFTED, 15 décembre 2021. Pour un autre exemple, voir : Bopha Phorn, « Rapper VannDa Is a New Voice From Cambodia’s New Generation », Vice, 4 juillet 2022.
57 Jack Brook, « Cambodian Rap’s Beaten-Down Social Conscience », VOD, 8 juillet 2022. À l’inverse, le rappeur indépendant Kea Sokun souligne la corruption et la régression des droits de l’homme, ce qui a conduit en 2020 à sa condamnation à un an d’emprisonnement pour incitation à commettre un délit. Après sa libération, il sort en collaboration avec la LICADHO (Ligue cambodgienne pour la promotion et la défense des droits de l’homme) Lake of Tears en octobre 2022, critiquant les conséquences sociales du remblaiement des lacs pour des projets de développement immobilier, et Workers’ Blood en janvier 2023, sur la répression des manifestations ouvrières de 2014 par les autorités. Le ministère cambodgien de la Culture a appelé à la censure de ce dernier morceau sur les réseaux sociaux, dont le contenu serait « susceptible de provoquer l’insécurité et le désordre social », conduisant à son retrait par crainte de répercussions légales. Sur la liberté d’expression des artistes, voir : Reaksmey Yean, « Artistic Freedom in Cambodia: When Legal Safeguards Are Not Enough », ArtsEquator, 22 septembre 2022 (https://artsequator.com/artistic-freedom-cambodia/).
58 Vidéo, « Rithy & Sophanisa Wedding July 2022 », YouTube, 20 juillet 2022 (https://www.youtube.com/watch?v=CSSVN3_XDTU&t=296s [6:02]).
Auteur
Adélaïde Martin est doctorante en science politique à l’Institut des Sciences sociales du Politique (ISP, UMR 7220) – Université Paris Nanterre depuis 2018. Fellow du Center for Khmer Studies (Cambodge) en 2019, elle est actuellement associée à l’Institut de recherche sur l’Asie du Sud-Est contemporaine (IRASEC). Sa thèse porte sur les parcours transnationaux des cadres administratifs et politiques cambodgiens depuis les années 1970.
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