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Une relation diplomatique et stratégique accommodante

p. 23-24


Texte intégral

1En relations internationales le cas de la Malaisie représente une anomalie, un modèle hybride. Selon une perspective conventionnelle des relations internationales, un petit État situé à proximité d’un État fort opte généralement soit pour une politique de ralliement opportuniste (bandwagoning) afin d’en tirer des bénéfices ou pour se conformer à l’attitude adoptée par d’autres États, soit pour une stratégie de rééquilibrage (balancing), multipliant les alliances politiques afin de faire contrepoids au pouvoir dominant (Kuik, 2008 : 159 et suivantes ; Kuik, 2013). Or la Malaisie ne suit ni l’un, ni l’autre de ces modèles car elle refuse de s’aligner sur la Chine, tout en évitant de la provoquer en s’alliant de manière exclusive avec une puissance rivale. La position de la Malaisie vis‑à‑vis de la Chine est l’exemple même de la stratégie dite de couverture (hedging) : issu du monde de la finance, ce terme désigne en relations internationales une stratégie selon laquelle un pays cherche à minimiser les risques en prenant simultanément des positions opposées. Cette stratégie de couverture se traduit dans les faits par une relation ambiguë entre la Malaisie et la Chine.

2Les relations diplomatiques bilatérales ont considérablement évolué entre les deux pays depuis la proclamation de la République populaire de Chine en 1949 : la défiance des premières années (1949 à 1974), qui s’est prolongée tant que le Parti communiste malaisien était actif (1989), a récemment laissé place à un partenariat privilégié (chapitre 1). Dans le contexte de montée en puissance de la Chine, la Malaisie a su s’accommoder des ambitions régionales de Pékin en y voyant, davantage qu’une menace, une réelle source de nouvelles opportunités économiques à ne pas compromettre. Le gouvernement malaisien a donc opté non pour la confrontation mais pour l’approfondissement d’une relation constructive. Néanmoins, comme le montrent les relations maritimes entre les deux pays (chapitre 2), la Malaisie demeure vigilante quant au respect de sa souveraineté nationale et elle incarne au sein de l’Asean une position ferme, mais toujours dans l’accommodement et le compromis. Néanmoins, les relations entre la Malaisie et la Chine ne relèvent pas uniquement du registre des relations bilatérales d’État à État et sont loin de devoir être retracées exclusivement sur le plan de la politique étrangère. Elles se dessinent aussi, au niveau individuel et collectif, sur un plan sociopolitique, à partir de ressorts socioculturels (chapitre 3). Les facteurs ethniques et religieux, de même que les nouvelles mobilités individuelles (touristes, étudiants) dépendent tout à la fois de l’état des liens diplomatiques bilatéraux et les nourrissent. Ils contribuent également à alimenter, à une échelle médiane, intersociétale (entreprises, associations, collectivités locales, etc.), le rapprochement économique entre les deux pays.

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