Chapitre 1. Les origines de l’Islam en Thaïlande
p. 11-32
Texte intégral
1.1 – Société agraire et vision du monde
1Le royaume du Siam s’est constitué dans une longue lutte pour s’affranchir de la tutelle des empires khmer et birman. Comme tous les royaumes deltaïques de l’Asie orientale, c’est sur la base d’une société agraire fondée sur la riziculture qu’il a pu s’édifier. Entre le monde birman centré sur le delta de la Salouen et le monde khmer centré sur celui du Mékong, c’est autour du Chao Phraya que va naître le Siam et se constituer la nation thaïlandaise. L’irrigation impose une intégration sociale poussée et un système pyramidal qui s’expriment par une dualité permanente de l’organisation de l’espace politique : d’une part, la forte cohésion des communautés villageoises qui disposent d’une certaine autonomie, et d’autre part un pouvoir central où le souverain est perçu comme « Fils du Ciel ».
2L’obéissance au souverain, pivot du système, doit être totale. Par magie sympathique et correspondance entre le cycle cosmique et l’attitude sociale, la conduite royale est censée agir sur le rythme des saisons au point que le souverain commande la régularité des pluies, indispensable aux récoltes10.
3Sur le plan religieux, la vision de l’espace est géométrique, avec les points cardinaux qui l’organisent et avec une rigoureuse stratification sociale à laquelle les individus ne peuvent échapper que par une future et hypothétique réincarnation dans un statut supérieur en fonction des mérites acquis au cours de leurs précédentes existences. Cette culture suggère la sagesse puisque toute révolte contre son statut présent est impossible et perturberait l’ordre naturel du monde. Cette sagesse postule que la quête de l’harmonie se doit d’être la clé de voûte de l’existence humaine. Garder sa sérénité, ne pas s’insurger, accepter avec une certaine distanciation les malheurs et les bonheurs que le monde apporte, telle est la philosophie que génère cette cosmogonie issue et inspirée des cycles agricoles.
4Le bouddhisme theravâda semble en effet s’accorder parfaitement à cet univers de rizières. Est-ce un hasard si l’un des symboles du bouddhisme est le lotus, qui fleurit sur celles-ci à l’époque où elles sont inondées ? Si les reptiles, qui les débarrassent des parasites de toutes sortes, sont des animaux sacrés ?
5Le bouddhisme se trouve donc en correspondance à ce monde agricole dépendant totalement du cycle des pluies et de l’irrigation. Univers où les échanges commerçants, limités, se font au sein ou entre des villages qui vivent en autosubsistance. Tout juste donnent-ils une partie de leurs récoltes au souverain et à son entourage, ce qui est perçu comme une sorte d’offrande à une divinité. Leur don exprime une reconnaissance de l’autorité qui se manifeste également par d’autres modes de contribution, comme la corvée.
6L’allégeance n’est pas exclusivement économique. Elle est aussi symbolique. Aussi, lorsque le royaume du Siam étendra son emprise en direction de la péninsule malaise, verra-t-on des principautés, converties à l’islam, accepter de verser, une fois tous les trois ans, un tribut sous forme de fleurs d’or (bunga mas). Cette vassalité ne relève pas, pour cette raison, d’une simple forme locale de féodalité : la réduire à cela interdirait de comprendre les rapports qui se sont instaurés entre les sultanats de la péninsule et la cour du Siam.
7L’islam, né dans le désert, est lié au négoce. La nature y est aride, aussi ne peut-on subsister sans d’intenses échanges. L’autre est indispensable et il faut réguler les rapports entre les hommes pour qu’une complémentarité puisse valablement exister. Dans les sociétés deltaïques de l’Asie orientale on a bel et bien affaire à une culture totalement différente. Comment donc l’islam, si étranger à cet univers, a-t-il pu s’implanter, même partiellement, parmi des riziculteurs assujettis au cycle des moussons ?
1.2 – Le temps du grand commerce : la route des boutres, la route de la soie
8Jusqu’au XIVe siècle, le Siam, en lutte avec ses deux voisins birman et khmer, est resté longtemps limité au territoire des plaines centrales où coule le Chao Phraya et ses affluents. Ce territoire, grenier à riz, au nord duquel était située sa principale capitale Sukhothai (1257– 1377), ne nécessitait guère, pour sa survie, d’échanges commerciaux avec l’extérieur. Entre l’Europe et la Chine, les routes du négoce passaient soit au nord, la fameuse route caravanière de la soie, soit au sud, la route maritime des boutres, ces navires faisant escale sur les côtes du détroit de Malacca ou dans l’archipel de l’Insulinde pour attendre le changement de mousson et continuer leur voyage.
9Solidement ancré sur son delta et ses plaines, le Siam ne subissait alors que peu les influences d’un monde lointain, ses deux voisins et rivaux partageant avec lui la même vision bouddhiste de l’univers. C’était un espace rural relié par un tissu dense de canaux, où les seuls groupes différents, mal intégrés, professant diverses formes d’animisme ou de brahmanisme ascétique11, vivaient dans les marges montagneuses, pratiquant une agriculture itinérante sur brûlis. Ces zones seront peu à peu intégrées au royaume du Siam, dont la puissance ne cessera alors de croître. Leurs habitants seront « siamisés12 » : mais le cœur du pays demeurera les plaines centrales. Même aujourd’hui, la différence entre les régions Isan (Nord-Est) et Nord, d’une part, et celle du Centre, d’autre part, continue à se faire sentir, en dépit de l’urbanisation rapide qui a entraîné, depuis quelques décennies, des déplacements de population13.
La route des boutres ou la religion comme ciment du négoce14
10Ayant élargi son espace originel avec l’émergence d’Ayutthaya (1350– 1767), c’est vers le sud que le Siam va poursuivre son expansion. Dans cette péninsule qui commande l’accès aux deux océans, en direction de l’Inde et du Moyen-Orient d’un côté et vers la Chine de l’autre, ce ne sont pas des montagnards animistes que rencontrent les émissaires du roi du Siam. Des comptoirs s’échelonnent alors le long des côtes, peuplés de communautés de diverses origines : Chinois surtout, qui s’affairent à troquer les marchandises, porcelaines et soieries, tissus indiens et épices, mais aussi commerçants indiens, turcs et arabes. A ces habitués du grand commerce, s’ajoutent ceux que l’on qualifie généralement de nomades de la mer (Bajau, Moken15 …) et des navigateurs malais provenant des îles de la Sonde (Bugis, Minangkabau, Achinais16, etc.) qui ont parfois pris racine sur place.
11Ces mosaïques ethniques reposent sur le négoce. C’est là leur seul dénominateur commun. Pêcheurs et agriculteurs y sont rares et vivotent chichement entre mer et jungle. La péninsule n’est pas une société agraire17. Sa richesse est portuaire. C’est de ces cités rivales que sont nées les principautés qui se disputent la maîtrise des grandes transactions18 ; principautés qui s’autodésignent parfois comme des royaumes tel celui, très ancien, de Langkasuka dont le cœur aurait été situé dans l’actuelle ville de Pattani.
12Lorsque la fortune leur sourit, l’influence géographique de ces principautés s’étend à d’autres zones habitées, à quelques ports moins chanceux qui se placent provisoirement sous leur coupe. Leur indépendance ne tient pas à leur puissance militaire, ni même à leurs richesses qui varient selon la conjoncture. Situées au carrefour d’influence traditionnelle d’Etats à vocation impériale (Angkor, Pégou, Ayutthaya), leur statut est précaire et les oblige souvent à se trouver des alliés lointains, prêts à les aider au cas où l’équilibre viendrait à être modifié, mais peu susceptibles de s’imposer dans ces comptoirs du bout du monde, que protégent souvent les ruses des océans. Envoyer des corps expéditionnaires par voie navale reste toujours une entreprise périlleuse. C’est davantage par le biais des affinités culturelles, doublées d’intérêts communs, que se tissent les connivences. La religion de ces alliés et clients pénètre donc nos principautés. Hindouisme, bouddhisme, taoïsme, confucianisme viennent cohabiter dans ces Babels tropicales, où l’on célèbre surtout le culte des affaires. L’islam arrive aussi, véhiculé par des Indiens ou des Malais récemment conquis par le message coranique. Mais pourquoi cette religion va-t-elle, en quelques décennies, s’étendre sur toute cette région ?
13Un parallèle s’impose. L’islam est né dans une zone de confins non contrôlée de trois empires : l’empire sassanide, l’empire byzantin, et le royaume abyssin. Les caravansérails du désert et les ports maritimes constituaient les fondements de son développement économique, les seules possibilités d’accumulation de capital. Des guerres incessantes opposaient ces cités concurrentes, anéantissant les promesses de prospérité. Une foi commune, nouvelle, surgie à la suite d’une grande sécheresse et de diverses perturbations, a apaisé ces tensions, créé un sens de la communauté d’intérêts. Elle est devenue le ciment social d’un nouvel ordre, tout à la fois politique, économique, culturel et moral. Face à une diversité productrice d’antagonismes, elle a eu pour projet de fonder une unité s’exprimant dans la croyance en l’unicité divine.
14Dans la péninsule malaise comme en Arabie, l’islam va permettre de réguler les oppositions entre principautés sans pour autant empêcher leur compétition. Il va codifier leurs rapports, les rendre moins brutaux et surtout légitimer les pouvoirs en place. Ce sont les souverains et les aristocrates qui se convertiront d’abord, entraînant dans leur sillage une grande partie de la population.
15L’islamisation de la péninsule est en marche. En 1450, l’islam devient religion d’Etat à Malacca. Et en 1457, c’est le royaume de Patani19 qui se déclare musulman. Il ne faudra que quelques décennies, au XVe siècle20, pour que la quasi-totalité de ses habitants adopte la foi des cours princières.
16Quelques Chinois, de-ci de-là, continueront à conserver les croyances de leurs ancêtres ou adopteront des cultes syncrétiques où l’influence hindouiste est patente21, alors que certains sultans continueront, curieusement, de porter le titre de rajah. Plus réticents, les nomades de la mer, communautés autonomes moins intégrées à l’activité portuaire, ne rallieront que peu la foi nouvelle. Ainsi les Moken persisteront pour la plupart dans leurs rites animistes.
17L’islamisation intervient à une époque où le Siam prend son essor. La conversion s’effectue dans une conjoncture particulière. Elle a autant pour mobiles des raisons politiques et commerciales que la satisfaction d’une quête spirituelle et cultuelle. Des attitudes antéislamiques persistent dans la pratique religieuse.
18Cela n’est pas particulier à cette région du monde. L’islam, présumé rigide, sait s’adapter aux conditions locales. Au Moyen-Orient, le développement du soufisme favorise cette adaptation et contribue à l’implantation de la religion nouvelle. Le culte des saints dans le monde berbère, des marabouts en Afrique noire, qui perdure aujourd’hui, montre que ce sont sans doute autant les sociétés qui « font » l’islam que l’islam qui « normalise » les sociétés. Aussi, si les cinq piliers de la foi sont reconnus, au moins sur le principe, constate-t-on des syncrétismes dans la pratique quotidienne, ainsi que des observances parfois bien atténuées. Certains auteurs relatent ainsi que tel souverain, ayant adopté la foi d’un commerçant venu des rives de l’Indus ou de Sumatra, se limitait à ne plus consommer de porc et à ne plus prier les « idoles22 ».
19Dans un univers tropical luxuriant, les interdits, nés dans une zone aride, subissent des érosions, des accommodements locaux. La croyance aux esprits de la nature, le goût du jeu (y compris des jeux d’argent), un respect craintif pour certains animaux23, sont parmi les éléments notables de la persistance des attitudes antérieures.
20L’islamisation entraîne l’essor des arts et une littérature apparaît, rédigée en caractères arabes, qui favorise le melting-pot d’une population cosmopolite. Le goût de la connaissance et de la compréhension du monde se développe. Des écoles coraniques voient le jour. Sur le plan économique, le troc décline au profit du recours généralisé aux transactions monétaires.
21Voilà donc le monde péninsulaire tel qu’il se présente aux émissaires de la cour du Siam dans leur pénétration vers le sud24. Les princes fraîchement gagnés à la foi du prophète ne voient pas en eux des idolâtres abhorrés qui viendraient les conquérir mais bien d’éventuels interlocuteurs avec lesquels on pourrait faire du commerce, et cela d’autant plus volontiers que les principautés sont en concurrence. Si la condition est qu’Ayutthaya souhaite qu’ils fassent allégeance à leur souverain, pourquoi pas ? C’est bien d’une vassalité toute formelle dont il s’agit, qui, en échange d’un tribut, leur ouvrira des possibilités de négoce avec le bassion du Chao Phraya. Il s’agit, pour ces potentats d’acheter les bonnes grâces du roi du Siam pour protéger leurs cités mais non de reconnaître son autorité, temporelle bien sûr, et encore moins spirituelle.
22Il y a là une équivoque de part et d’autre. Pour les Siamois, le versement d’un tribut correspond en quelque sorte à la reconnaissance du caractère sacré de leur monarque. Pour les princes musulmans, ces fleurs d’or et autres présents ne sont que le prix à payer, une sorte de taxe pour pouvoir poursuivre et développer tranquillement leurs fructueuses activités. Ces deux attitudes divergentes sont à l’origine d’une incompréhension que l’on retrouve aujourd’hui. Pour l’histoire officielle thaïlandaise, l’allégeance impliquait ipso facto une reconnaissance de la nation, de la religion et du caractère sacré de la monarchie siamoise, alors que pour les musulmans, cette soumission n’avait qu’une portée tactique et n’impliquait pas la reconnaissance d’un pouvoir « impie », notamment en termes de législation.
23Plus prosaïquement, on notera que ces principautés ne disposent guère des moyens militaires pour résister à la pression siamoise. Et les démonstrations de force ne manquent pas. Après une première tentative infructueuse en 1456, les troupes siamoises triomphent du sultan de Malacca qui accepte une soumission formelle (1459). Et lorsqu’en 1511, le Portugais Albuquerque s’empare de Malacca, les principautés péninsulaires ont presque toutes fait allégeance25 ; ce qui ne les empêche pas d’entretenir également des rapports de vassalité avec la Chine.
24Ces liens de reconnaissance d’un suzerain « protecteur » varient avec la conjoncture, et peuvent être remis en cause à la faveur d’un changement de souverain. Il serait ainsi un peu rapide de conclure que la péninsule est siamoise. L’image d’une nébuleuse de principautés satellites conviendrait davantage. C’est pourtant bien avec le Siam que le Portugal signe en 1516 un traité qui les engage. Cet accord, le premier conclu entre Ayutthaya et une puissance européenne, reconnaît la souveraineté de Lisbonne sur Malacca. Il autorise également l’implantation dans d’autres principautés de l’aire d’influence siamoise de négociants portugais. En 1538, on en dénombre plus de 300 résidant à Pattani.
25Avec le développement des échanges dans la péninsule où le Siam est devenu partie prenante, des migrations limitées commencent. Tandis que les Européens, Portugais et Hollandais, puis Anglais, se disputent avec acharnement le contrôle du détroit de Malacca, des Thaïs s’installent peu à peu dans les régions septentrionales de la péninsule, jusqu’à l’isthme de Kra. Certains négociants, islamisés, s’établissent sur les rives du Chao Phraya. Plus tard, par suite des rébellions malaises, certains insurgés, prisonniers, seront bannis du sud et expédiés dans diverses provinces, centrales ou septentrionales, où ils seront contraints de s’établir. Dans l’univers jusqu’alors exclusivement bouddhiste du Siam, l’islam fait une entrée discrète.
La route de la soie ou l’affluent chinois
26Si l’intégration d’une partie de la péninsule malaise à la Thaïlande moderne constitue la source principale de la présence d’une communauté musulmane dans ce pays, c’est aussi par le nord que, à la faveur de migrations, un autre islam, chinois celui-là, s’est faufilé, puis s’est développé.
27L’islamisation du monde chinois remonte au Xe siècle mais, contrairement à ce qui s’est passé dans le domaine insulindien, sa pénétration fut très lente. Dans ce qui est aujourd’hui le Sinkiang, il faudra sept siècles avant que les Ouïgours, peuple turcique, intègrent totalement à leur culture l’identité musulmane. Plus à l’est, ce sont les régions de X’ian, du Ningxia, du Kansu, du Shensi, qui sont situées sur une des branches de la voie caravanière en direction de Cambaluc (Pékin) où des Chinois se convertiront en grand nombre. Marco Polo note la présence de nombreux « mahométans » dans le pays. Certains seraient même d’importants personnages proches de l’empereur, parmi lesquels des architectes dont le style influencera l’aménagement de la capitale.
28Le poids politique de l’islam en Chine est alors sans doute bien supérieur au nombre de ses adeptes. Les connaissances techniques de ceux-ci ne se limitent pas à l’architecture. On les crédite de qualités guerrières et leur compétence militaire en fait des recrues toutes désignées pour les armées impériales, en particulier dans les marches occidentales de l’Empire, où ils seront parfois nommés gouverneurs. Ce sera notamment le cas au XIIIe siècle, à Dali, dans l’actuelle province du Yunnan.
29Certaines minorités adoptent également la foi nouvelle. Ceux que l’on désigne comme des Hui, ou musulmans chinois26 (et qui ne comprennent pas les Ouïgours turcophones) couvrent un éventail assez large de populations disparates dans cet immense territoire qu’est la Chine. Communautés qui ne sont guère en contact les unes avec les autres, elles développent des pratiques religieuses adaptées à leur environnement. Là encore, le mysticisme soufi joue un rôle décisif dans l’islamisation, en intégrant pour partie des rites autochtones. Ainsi, au Yunnan, vivent des Hui qui ne parlent pas chinois mais la langue bai, et s’habillent de vêtements traditionnels bai ; on remarque également que parfois les imams sont des femmes27.
30Le Yunnan joue un rôle important dans l’introduction, par la voie septentrionale, de l’islam en Thaïlande. Séparé du nord du Siam par les Etats Shan, le commerce y est florissant. De cette province de Chine, les riches plaines de la Salouen, du Chao Phraya et de la rivière noire au Tonkin sont relativement proches et les migrations temporaires vers ces régions sont constantes. Le Mékong, bien que difficilement navigable, surtout à la saison sèche, permet d’atteindre les confins nordiques du Siam. Ces liaisons n’ont jamais cessé et les échanges culturels s’établissaient naturellement. C’est certainement avec le royaume du Lan Na (qui fut définitivement intégré au Siam en 1876) que cette symbiose était la plus grande. Certes, la majorité des Yunnanais n’étaient pas musulmans ; mais il est vraisemblable que nombre de commerçants l’étaient. Toutefois, jusqu’à la première moitié du XIXe siècle où quelques uns s’établissent à Chiang Mai, peu s’installèrent durablement.
31En 1853, une rébellion conduite, au Yunnan, par Du Wen Hsiu, qui se fait appeler sultan Suleyman et dénomme son État le « Royaume du Sud Paisible » (Ping Nan Kuo), est écrasée après une vingtaine d’années de résistance28. Fuyant la répression, des milliers de Yunnanais musulmans s’exilent en Birmanie et au Siam. Ces réfugiés formeront le noyau des musulmans d’origine chinoise, dont les descendants resteront, pour l’essentiel, concentrés dans le nord du pays.
32Les combats qui ensanglantent le Yunnan après la proclamation de la république en 1911 nourrissent d’autres vagues d’émigration. Plus tard, durant la seconde guerre mondiale, la répression japonaise contre les musulmans chinois installés en Birmanie pousse ceux-ci à franchir la frontière et à rejoindre leurs coreligionnaires du Siam.
33Nombre d’entre eux s’installent dans de petites bourgades d’altitude, comme Pai, Mae Sai ou Fang et sont ainsi considérés par de nombreux Thaïs comme des gens des montagnes (chao khao), vocable qui regroupe toutes les tribus et groupes minoritaires concentrés près du Triangle d’Or29. En fait peu d’entre eux sont d’origine Miao ou Yi. Les mariages mixtes rendent de toute façon bien aléatoires les décomptages ethniques. Car plus le temps passe, plus les réfugiés yunnanais contractent des mariages avec des membres des autres communautés musulmanes, voire avec des Thaïs de souche qui adoptent d’autant plus facilement l’islam que celui-ci sait s’adapter, en particulier sur la place sociale réservée aux femmes. Leurs enfants sont élevés dans le respect des préceptes de l’islam, même si leur observance est bien atténuée et se limite souvent à la non-consommation de porc et au respect des rites d’inhumation30.
34Le dernier flux d’émigrés hui suit la victoire des armées de Mao Tse-toung. En 1949, des régiments entiers du Guomindang ne peuvent plus, la route leur étant coupée, participer à la retraite générale vers Taiwan et se trouvent contraints de gagner la Birmanie, où certains se reconvertiront dans le lucratif trafic de l’opium. Parmi ces soldats en déroute, figure le 93ème régiment, composé de musulmans qu’accompagnent leurs familles. Les tensions31 qui agitent leur premier pays d’accueil les contraignent à s’installer en Thaïlande, à Mae Salong surtout.
35L’islam yunnanais32 est l’un des cours d’eau qui vient alimenter le fleuve mélangé de l’islam thaïlandais ; il prend, on l’a vu, sa source dans la route de la soie, puis a bifurqué vers le sud au hasard des vicissitudes de l’Histoire.
36Par où est venu l’autre affluent, originaire de Perse ? A-t-il pris la route maritime ou la route caravanière ? Difficile de l’établir avec certitude ; peut-être les deux, car si des commerçants persans résidaient dans la péninsule, d’autres étaient signalés à Kashgar, dans le Sud– Ouest de la Chine actuelle. Si nous ignorons leur trajet, nous connaissons leur destination : la cour d’Ayutthaya, le cœur même du Siam.
37Ayutthaya, au début du XVIIe siècle, est une ville plus grande que Londres, quadrillée de canaux sur lesquels naviguent des barges grosses de marchandises. Cette activité portuaire incessante explique qu’elle soit mentionnée dans les textes en persan de l’époque sous le nom de Shar-i-Nav, « la ville des bateaux ». Son essor attire les commerçants venus de pays lointains qui s’y installent dans des quartiers spécifiques, véritables enclaves étrangères. La conquête, à la fin du XVIe siècle, des territoires du Tenasserim sur le golfe du Bengale, ouvre des accès maritimes vers l’Occident, qui font pendant à la voie ouverte vers la Chine et le Japon par le port de Petchaburi sur le golfe du Siam.
38C’est donc à un moment de soudain développement du commerce maritime vers les deux mers que les chroniques indiquent l’arrivée de deux frères originaires de la ville sainte de Qom en Perse. Sous le règne du roi Naresuan (1590– 1605), ils s’installent dans la capitale siamoise (en 1595 ou 1602, selon les sources). Sheikh Ahmad et Muhamad Saïd ne semblent pas avoir été des commerçants persans ordinaires, comme ceux qui, par le passé, venaient régler des affaires à Ayutthaya mais ne s’y attardaient guère. Il est vraisemblable que nos deux frères étaient accompagnés d’un nombreux équipage de domestiques et de collaborateurs. Quoi qu’il en soit, ils concourent à l’apparition d’un quartier persan à proximité du canal (klong) Krajan, où s’élève bien vite une mosquée dite Mosquée dorée.
39En quelques années, leur influence sur la cour se fait sentir : dans le domaine architectural, où commencent à être adoptées des arcades aux portes et fenêtres, mais surtout dans le domaine politique. Sheikh Ahmad devient conseiller du nouveau roi, Song Tham (1610-1628), et l’aide à asseoir son pouvoir contre ses opposants soutenus par certains samouraïs japonais de la capitale. Il est ensuite promu ministre du Commerce extérieur, un poste d’une importance décisive.
40A sa mort, à l’âge de 87 ans, la communauté persane de la capitale est très imposante et composée, outre de commerçants, de nombreux lettrés issus des classes aristocratiques d’Iran, intellectuels, poètes, architectes et artisans, qui sont consultés pour leur érudition et leur savoir-faire. Cette communauté est omniprésente dans les rouages du pouvoir royal et sa puissance va bien au-delà de son poids numérique. Elle maintient ses traditions religieuses empreintes de chiisme, observe la loi coranique – le quartier persan constitue alors une enclave avec ses règles propres.
41Il ne semble pas pour autant que la communauté musulmane se livre à un prosélytisme actif parmi la population. Les conversions s’effectuent principalement par mariage. Religion d’une communauté puissante et influente, l’islam ne s’adresse guère à la masse du peuple thaï. Il ne touche que les couches dirigeantes qui semblent attirées par la culture qu’il véhicule33. Pour prix de sa modestie religieuse, la communauté peut bénéficier de subventions royales pour édifier de nouvelles mosquées. Les musulmans sont exemptés de corvée et jouissent d’une attitude très tolérante tant qu’ils ne remettent pas en cause les fondements sacrés (bouddhistes) du pouvoir du souverain. La proximité entre le monarque et la communauté persane est telle qu’un voyageur et chroniqueur français de l’époque, Nicolas Gervaise34, croit deviner que le roi Narai (1657– 1688) est sur le point d’embrasser l’islam.
42Mais lorsque des Européens, dont le célèbre aventurier grec Constantin Phaulkon, obtiennent des responsabilités à la cour du Siam et que la pression occidentale commence à se faire sentir sur le royaume, la puissance des Persans diminue. Au XVIIIe siècle, leur rôle cesse d’être décisif. Si les métissages successifs ont contribué à les intégrer à la société thaïe de façon irréversible, le chiisme qu’ils professent ainsi que leur position sociale privilégiée empêchent une fusion véritable avec les autres composantes musulmanes du pays. Resteront seulement de leur période de gloire de grandes familles, souvent anoblies ; tels les Bunnag, qui domineront la scène politique pendant trois siècles35.
43De nos jours, les chiites ne constitueraient que 1 à 2 % de la population musulmane thaïlandaise36. Mais même dans les périodes les plus nationalistes de l’histoire contemporaine de la Thaïlande, sous Phibunsongkhram (de 1938 à 1944 et de 1948 à 1957) ou, plus tard, lorsque les musulmans seront a priori suspectés de possibles sympathies avec les sécessionnistes du Sud, les descendants des grandes familles pourront se permettre d’afficher leur identité. Ils donneront une image très « thaïe » de l’islam à l’extérieur comme à l’intérieur du pays. Ainsi, en 1962, Khunying Sangdao Siamwalla, une femme qui compte le Sheikh Ahmad parmi ses ancêtres, peut-elle constituer une fondation des femmes musulmanes se consacrant aux orphelins. C’est la même, au moment où la Thaïlande est perçue dans le monde arabe comme hostile aux musulmans (en raison de la répression au sud du pays), qui peut se permettre d’aller rencontrer les rois Fayçal et Hassan II, ainsi que les présidents Nasser et Kadhafi37.
44Ces entrevues n’ont guère, à l’époque, contribué à améliorer les relations entre le monde arabo-musulman et la Thaïlande, mais cette anecdote est révélatrice des espaces de liberté – en ce cas, politiques – laissés à la communauté musulmane d’origine persane. Personne n’aurait songé à émettre le moindre doute quant à sa fidélité à la monarchie et à la nation.
45Il est fort possible, quoique les éléments manquent pour étayer cette hypothèse, qu’un certain nombre de descendants de Persans moins introduits à la cour soient devenus sunnites par la suite ; ou, plus exactement, qu’ils n’aient conservé que quelques attributs de l’islam qui ne permettent plus, après quelques générations, d’opérer la différenciation38.
1.3 – Les autres sources de l’Islam thaïlandais
46L’islamisation relative du Siam n’est pas seulement le fruit de l’immigration. Elle est également le fait de l’extension, à la faveur des conquêtes, des frontières du Siam au-delà même de celles qui délimitent aujourd’hui la Thaïlande. Ce sont en effet des territoires actuellement situés au Cambodge et en Birmanie qui vont fournir d’importants contingents à l’islam thaïlandais.
47Lorsque le roi Naresuan (1590-1605) conquit le Tenasserim, nombreux étaient les Indiens musulmans à commercer sur ces côtes, à Moulmein, à Tavoy, à Mergui, où ils s’étaient établis depuis des générations. Si la majorité d’entre eux étaient originaires du Bengale proche, d’autres avaient leurs racines dans des régions bien plus lointaines du vaste sous-continent. L’incorporation de ces nouvelles provinces côtières au Siam favorisa les échanges et les mouvements de population. Le roi Narai (1656– 1688) aurait eu un ministre des Finances bengali. Et sa garde personnelle aurait compté des musulmans indiens.
48Aucun document officiel39 ne permet de préciser l’ampleur de ces mouvements. On sait néanmoins qu’en 1830 une petite communauté bengali originaire de Chittagong habitait dans la ville de Chiang Mai et faisait le commerce de bétail avec Moulmein.
49A partir du XIXe siècle, l’immigration indienne principalement orientée vers Bangkok se poursuit, limitée mais constante, en fonction de la situation qui prévaut dans l’Empire britannique des Indes mais également au Siam. Tous les Indiens ne sont pas musulmans : certains sont hindous ou sikhs et se consacrent au commerce, notamment des étoffes. Mais alors qu’hindous et sikhs ne pratiquent guère l’exogamie, les musulmans épousent volontiers plusieurs femmes parmi lesquelles des Thaïes, ce qui leur permet de davantage se fondre dans la société de leur pays d’accueil.
50L’autre communauté musulmane est constituée des descendants du vieux royaume du Champa, partiellement islamisé avant de succomber à l’offensive du Dai Viet en 1491 alors qu’il s’étendait sur la partie centrale du Vietnam actuel.
51Trouvant refuge dans l’Empire khmer, les Cham y firent souche. Entretenant des liens avec Ayutthaya, quelques-uns s’y établirent pour y former un corps de soldats volontaires qui recevront des terres pour prix de leur service. Mais c’est surtout après l’offensive sur le Cambodge menée par la cour de Hué en 1758 que les Cham deviennent en grand nombre des auxiliaires militaires du Siam. A l’époque du roi Taksin (1767– 1782), ils participent aux campagnes victorieuses contre les envahisseurs birmans. Guerriers reconnus pour leur bravoure, notamment dans les combats navals, ils sont une fois encore récompensés par l’attribution de terres et s’établissent pour la plupart non loin du Chao Phraya, dans ce qui deviendra Bangkok.
52Un siècle plus tard, on les retrouve en première ligne face aux canonnières françaises qui menacent Bangkok40 et surtout dans les tentatives siamoises pour enrayer la pénétration française au Cambodge. En plus de leurs qualités militaires, les Cham sont réputés pour le tissage de la soie.
53A ces groupes que l’Histoire a amené à se fondre dans la communauté siamoise s’en ajoute un autre, qui constitue également une composante de l’islam thaïlandais. Connus sous le nom de « Macassar », ils ont pour origine l’île de Célèbes (aujourd’hui Sulawesi). Ce sont des réfugiés qui, en 1666– 67, sous la houlette de leur prince Dai, furent accueillis après leur défaite dans la résistance à la conquête hollandaise entreprise par l’amiral Cornelius Speelman. Mais en 1686, après leur participation à un coup d’Etat avorté contre le roi Narai (ou, plus probablement, contre son puissant ministre grec, Constantin Phaulkon), beaucoup furent exécutés. Les survivants se seraient fondus dans la population, tout en continuant à pratiquer leur religion. Plus aucune communauté musulmane ne revendique aujourd’hui cette origine macassar.
Notes de bas de page
10 La conséquence, c’est qu’il détenait un rôle calendérique ; sa fonction déterminait non seulement la mesure de l’espace mais également celle du temps.
11 On appelle leurs adeptes rishi. Cf. Pierre Lefèvre-Pontalis, Notes sur les amulettes siamoises, Geuthner, Paris, 1926.
12 À l’époque dont il s’agit ici, nous préférons utiliser le terme de « siamisation », prélude à ce que l’on appelera « thaïcisation ». Sur l’utilisation du concept « thaï » et ses connotations ethniques et religieuses voir infra.
13 Mais l’attachement au village d’origine reste très fort, même après plusieurs générations. Lors des licenciements massifs suite à la crise de 1997-98, on a par exemple pu constater un important retour de salariés privés d’emploi dans des villages où ils n’avaient jamais vécu mais où demeurait une parentèle.
14 Qui s’est de fait souvent confondue avec celle des pinisis, des jonques, des sampans et des multicoques océaniens. En fait ce sont souvent les marins malais qui auraient assumé, à certaines époques en tout cas, le commerce d'un monde à l'autre.
15 Ces derniers n’ont cependant sans doute pas dépassé Singapour et l'archipel de Riau. Sur les Moken, voir les travaux de Jacques Ivanoff, en particulier le chapitre qui leur est consacré dans Pierre Le Roux et Jacques Ivanoff (eds), Identités Sud, regard sur trois minorités de Thaïlande, Prince of Songkhla University, Pattani, 1991.
16 Originaires d’Aceh, dans le nord de Sumatra.
17 Des découvertes archéologiques récentes à Yarang ont toutefois permis de mettre à jour des canaux d’irrigation, ce qui indique que l’agriculture n’était pas totalement absente.
18 Des fouilles sous-marines, entreprises à partir de 1997, ont permis la découverte de très nombreuses épaves de jonques au fond de la mer de Chine attestant de l’importance considérable de ces échanges. Au XVe siècle, ces navires, d’une taille sans équivalent ailleurs dans le monde, assuraient un volume de transactions largement supérieur à celui de l’Europe à la même époque.
19 L'orthographe « Patani » fait référence au royaume malais (1350-1909) qui englobait les trois provinces actuelles de Pattani, Yala et Narathiwat. On utilise l'orthographe « Pattani » pour qualifier l'actuelle province administrative thaïlandaise et la ville éponyme.
20 Il semble en fait que ce soit le souverain du Kedah, le Maharajah Derba Raja, qui se soit le premier converti, dès 1136. La destruction de son royaume, saccagé par les forces du royaume javanais de Majapahit, a cependant repoussé de plus de deux siècles le processus d’islamisation.
21 Les festivals « végétariens » avec les mortifications et les transes qui le ponctuent rappellent les épreuves du Thaipusam. On peut encore les observer aujourd’hui chaque année à Trang et à Phuket au mois d’octobre.
22 Voir A. Teeuw et David K. Wyatt, The Story of Patani, Coll. Bibliotheca Indonesica, Martinus Nijhoff, The Hague, 1970.
23 Angela M.R. Burr, dans sa thèse soutenue à l’Université de Londres en mai 1974 (Buddhism, Islam and Spirit beliefs and practices and their social correlates in two southern Thai coastal fishing villages), relève ainsi l’intense respect porté au(x) chat(s) dans les villages de Muthinung et Muthisong au nord de Songkhla, rappelant que ces félins symbolisent le tigre (p. 85).
24 La pénétration siamoise s’effectue sur plusieurs siècles. Dès la période de Sukhothai (XIIIe siècle), il semble établi que le royaume de Nakhon Si Thammarat entretient des relations de vassalité avec son grand voisin (cf. Raymond Scupin, « Islam in Thailand before the Bangkok Period », in Journal of the Siam Society, 1980).
25 Sauf l’État de Johore, appelé parfois empire de Johore-Riau. La formation par les Bugis et les Minangkabau des États malais du Negeri Sembilan et du Selangor se réalisera deux siècles plus tard. Ils profiteront alors des contradictions intereuropéennes et de la conquête temporaire, à la fin de la période d’Ayutthaya, d’une partie du nord de la péninsule par les Birmans. Pour résumer, disons que l’histoire malaise moderne met essentiellement aux prises trois acteurs principaux : les Siamois, les Malais (divisés) et les Européens (également divisés).
26 On trouve également pour les qualifier, dans les textes français du siècle passé, le terme de « Dounganes ».
27 Cf. Dru C. Gladney, Muslim Chinese: Ethnic Nationalism in the People’s Republic, Harvard University Press. Cambridge, 1991.
28 Selon Jean Chesneaux et Mariane Bastid (Des guerres de l’Opium à la guerre franco-chinoise 1840-1885, Ed. Hatier, Paris, 1969), plus de la moitié de la population aurait disparu lors de la répression. Ils relèvent que de nombreux Miao et Yi s’étaient joints à la révolte qui unissait musulmans et non-musulmans et dans laquelle on comptait des unités combattantes féminines. L’insurrection est totalement écrasée en 1874.
29 Sur ce « concept », on pourra se référer à Yves Goudineau et Bernard Vienne, « L’État et les minorités ethniques, la place des ‘ populations montagnardes’ (chao khao) dans l’espace national » in Stéphane Dovert (éd.), Thaïlande Contemporaine, IRASEC - L’Harmattan, Paris, 2001, p. 143-174.
30 Rappelons que les Thaïs pratiquent la crémation, suivant les traditions attachées au bouddhisme theravâda.
31 En outre, l’alliance entre la Chine populaire et le pouvoir en place à Rangoon ne leur permet plus de rester dans le pays. En janvier 1961, les troupes birmanes ont délogé de Kentung les forces nationalistes chinoises.
32 Il semble que l’on compterait des Hui dans les actuels courants chinois d’émigration clandestine vers la Thaïlande. Sur la situation des Hui du Yunnan aujourd’hui, voir l’article « Des minarets en Chine du Sud » dans le quotidien suisse Le Temps du 14 avril 2000.
33 On trouvera dans le protocole royal, des règles également en vigueur à la cour du shah de Perse. Il est cependant possible que ces normes aient été plutôt reprises des rois moghols. Cuisine et vêtements princiers sont en tout cas indiscutablement inspirés par le modèle persan.
34 Nicolas Gervaise, Histoire naturelle et politique du royaume du Siam, édité à Paris chez Claude Barbin en 1688. Rappelons que les archives siamoises ont été détruites lors de la prise d’Ayutthaya par les Birmans en 1767. Il est donc impossible de confronter les sources.
35 Sous les rois Mongkut et Chulalongkorn, des membres de la famille Bunnag ont occupé de nombreuses fonctions de responsabilité au plus haut niveau de l’État. Et ils ont continué par la suite à s’illustrer dans l’Université ou dans la diplomatie. Certains d’entre eux sont, cependant, devenus bouddhistes.
36 Une petite communauté chiite subsiste encore à Bangkok. Mais elle est surtout présente à Thonburi autour de la mosquée Charoenphol.
37 Sa rencontre avec Kadhafi date de 1978, c’est-à-dire d’une époque où le leader libyen était considéré par Bangkok comme un des principaux soutiens des guérillas musulmanes séparatistes. Sur l’itinéraire personnel et les origines de Khunying Sangdao, voir l’article du Bangkok Post du 2 juin 1995, intitulé « Thailand’s Muslim ambassador ».
38 Un phénomène semblable a eu lieu dans la communauté cham, le chiisme ayant, semble-t-il, influencé l’ancien royaume du Champa peu avant sa disparition.
39 Les premières archives dignes de ce nom n’apparaissent qu’en 1844 avec la création de la première imprimerie à Bangkok par un missionnaire américain, Dan Beach Bradley. Quant au « Journal Officiel » siamois, il naît seulement en 1874.
40 La moitié des volontaires cham aurait trouvé la mort dans ces combats. En récompense de cet héroïsme, des officiers cham furent anoblis.
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