Chapitre 6. Le management des ressources humaines dans les services
p. 179-199
Texte intégral
1Le levier des ressources humaines est décisif en ce qui concerne la qualité des prestations de services. Comme nous l’avons montré dans les chapitres précédents, l’importance de ce levier tient à la nature même des services : intangibilité, coproduction. Les ressources humaines sont au cœur des contacts client. Ces contacts sont les « moments de vérité » dont l’aboutissement repose largement sur la compétence et le comportement du personnel en contact.
2La notion de management des ressources humaines dans les prestations de services devient un concept clé de la satisfaction du client. Par exemple, sur une chaîne de montage, si l’ouvrier spécialisé est de mauvaise humeur cela peut n’avoir aucune incidence sur l’efficacité de son travail. Par contre pour une hôtesse d’accueil la qualité du contact avec le client sera directement conditionnée par la qualité de la relation avec son responsable.
3Tous les spécialistes sont d’accord pour dire qu’il n’y a pas de management de la qualité sans un management de qualité, que 80 % des dysfonctionnements sont imputables à des erreurs de management et 20 % seulement à l’exécution !
4Pour preuve, cet article de Mike Abrashoff « Les idées du mois » dans la revue Management (no78 août 2001) :
5« Quand j’ai pris le commandement d’un bâtiment de la marine en 1997 (sous-marin), j’avais décidé de consacrer toute mon attention à mon équipage. Et c’est en le faisant que j’ai compris l’incroyable pouvoir qui était le mien. L’impact que j’avais sur les gens. Aujourd’hui, si quelqu’un ne va pas dans le sens que je souhaite, je veux comprendre pourquoi, et je me pose d’abord trois questions :
6Est-ce que je lui ai clairement défini l’objectif ?
7Est-ce que je lui ai donné la formation suffisante pour qu’il puisse réaliser sa mission ?
8Est-ce que je lui fournis le temps et les outils nécessaires P
9Dans 80 % des cas où les résultats ont été décevants, je découvre que la réponse à l’une de ces trois questions m’explique pourquoi. Soyez attentif à vos équipes ! En réalité, c’est comme si vous deviez les recruter chaque jour. Si vous voulez développer votre entreprise, vous devez développer vos salariés. Ce n’est pas de la philanthropie, c’est le meilleur calcul pour affronter la concurrence d’aujourd’hui. »
10Mike Abrashoff est le fondateur du cabinet de conseil Grassroots Leadership à Boston.
11Si les militaires s’intéressent aux techniques modernes de management des ressources humaines, remettre en cause leur style de management bien connu de tous, c’est bien la preuve que c’est un facteur clé de réussite d’une entreprise ! Notre expérience du terrain montre que la majorité des responsables de PME-TPE sont peu formés à ce qu’est le management des ressources humaines. Ils ne soupçonnent pas que c’est la clé de voûte de la qualité de leurs prestations.
12Nous allons donc voir d’abord quelles sont les lois du management moderne. Ensuite, nous verrons comment les adapter aux TPE et au secteur associatif.
1 - Du concept de Directeur à celui de Manager
1.1 - Les origines du concept de management
13Le concept du management est souvent ambigu, méconnu et controversé. Nous dirons que c’est un ensemble de démarches, de méthodes, de processus :
de conduite et de planification,
d’organisation,
d’allocation de ressources,
de contrôle,
d’activation et d’animation d’une entreprise ou d’une organisation.
14Dans les organisations, en effet, tout acte, toute mission, toute fonction se gèrent.
15Le management a une double fonction :
Gérer : donner les moyens
Manager, étymologiquement vient du breton « ménager » : occuper de la maison en l’approvisionnant en outils. La ménagère était la pièce où il y avait les outils de travail pour la cuisine. C’est aussi l’ensemble des couverts pour les repas.
Piloter : mener, conduire pour amener des énergies vers un objectif.
16Étymologiquement, « management » a aussi une racine italienne « maneggio » du latin « manus », la main. Il s’agit du dressage à « la main » du cheval.
17Les managers doivent être des meneurs d’hommes avant d’être des gestionnaires. Puisse cette étymologie leur rappeler leur mission de formation, d’entraînement, sans oublier que la même racine « manus » est aussi à l’origine de mots comme « manipuler » mais dans le sens de « mettre la main à la pâte » !
Une anecdote
Ayant acheté une voiture neuve dans un garage dont je connaissais bien le directeur, je téléphonais au service administratif pour savoir si ma carte grise était arrivée. De directeur en personne me répond. Je pense m’être trompé de ligne et m’excuse de l’avoir dérangé par erreur. Il me répondit que cela n’était pas une erreur mais que la secrétaire étant absente, il la remplaçait au service des cartes grises.
Est-il nécessaire de préciser que ce garage est connu dans la région pour la qualité de ses prestations.
18Très souvent, le responsable ne sait pas, par manque d’expérience. Cependant, il se croit obligé de donner des ordres. Or le rôle d’un responsable n’est pas de tout savoir ou de savoir mieux que les membres de son équipe, mais de prévoir, organiser, coordonner, former et informer.
19La notion de qualité est indissociable de la notion de management dans la mesure où la qualité est un enjeu humain pour mobiliser le personnel de l’entreprise.
20Compte tenu de ce qui vient d’être dit, nous remplacerons le « toujours plus » par « toujours mieux ».
21Pour cela, il faut une équipe. N’oublions pas que le personnel en contact élabore, avec le client, le service. Donc, c’est lui qui connaît le mieux les réactions du client. « C’est celui qui fait, qui sait ».
22Le terme « management » implique la notion d’équipe de travail et de motivation de cette équipe. Ceci est très important car les responsables de nos organisations sont encore trop souvent des « petits chefs », des chefs hiérarchiques !
1.2 - Le management et la non qualité du service
23Le manager bilingue
24Actuellement dans les PME, un manager devrait être un « bilingue ». En effet, dans les grandes entreprises, il y a deux langages :
25À la base, il y a le langage standard des « opérations et des choses concrètes » : groupes surchargés, matériel usé, clients irascibles, progression pédagogique etc. Au sommet, c’est le « langage standard de l’argent » : vente, coût, rendement de l’investissement... Entre les deux, le cadre intermédiaire, par exemple le green-keeper d’un golf doit comprendre les deux langages standards : celui du directeur de golf et celui des jardiniers de parcours.
26Mais dans le secteur des TPE - PME, bien souvent, il n’existe pas de cadre intermédiaire. Le responsable est à la fois manager (sans le savoir parfois) et cadre intermédiaire. C’est le cas du responsable d’une salle de fitness traditionnelle travaillant avec cinq à six personnes qui représentent la base, et son expert-comptable qui représente le sommet. Il doit donc être « bilingue ».
2 - Les lois du management motivationnel
2.1 - Qualité de service et motivation
27Il est bon de rappeler que l’efficacité et la qualité du service reposent sur l’envie de servir du personnel en contact. Le responsable qui n’a pas intégré ce postulat obtiendra des résultats médiocres. C’est le comportement volontaire du personnel qui produit une relation de service de qualité. La mission no 1 du responsable consiste donc à motiver son personnel.
2.2 - Un manager, des managements
28Il y a des lois du management, mais il n’y a pas de management universel. La règle de base est qu’il y a des managements différents en fonction des étapes dans la vie de l’entreprise, des individus.
29Par conséquent, manager des hommes est un métier puisque le manager devra utiliser des styles de management différents en fonction des circonstances. Or, force est de constater que la majorité des responsables des petites structures (PME, TPE, secteur associatif) n’a aucune formation en management des ressources humaines et qu’elle manage toujours de la même manière en fonction de sa propre personnalité. On comprend mieux pourquoi 80 % des dysfonctionnements viennent du management.
2.3 - Management et étapes de développement de l’entreprise de service
30Christian Lemoine, directeur du CRECI, cabinet de consultants spécialisé en management motivationnel, fut le premier à constater que dans la vie d’une organisation on rencontre systématiquement trois phases auxquelles correspondent trois styles de managements :
la phase pionnière,
la phase de croissance,
la phase d’excellence ou de croissance ralentie.
31a) La phase pionnière :
32Elle correspond au démarrage de l’activité (création d’entreprise, mise en place d’une nouvelle prestation...). C’est la phase de l’énergie. Durant cette phase trois grands types de motivation :
L’angoisse du lendemain
Les individus se battent pour survivre
Le plaisir d’apprendre
33La majorité des acteurs, dans cette phase, a le trac, car elle a le sentiment, à juste titre, de ne pas maîtriser leur métier. L’anxiété pousse l’entreprise et ses acteurs à préparer ce qu’ils ont à faire pour se sécuriser, donc ils sont plus performants.
34Il faut savoir que la compétence efficace n’est pas une constante. C’est une variable, elle dépend de la motivation. Un jeune, anxieux sur sa possibilité de bien faire, risque d’être plus performant qu’un ancien trop confiant et sûr de lui. Donc 1/3 de l’énergie vient de ce plaisir d’apprendre ou chaque mise en situation est l’occasion de se dépasser et d’acquérir de la compétence supplémentaire.
35Un avenir meilleur :
80 % des acteurs ont le sentiment d’être en route vers un avenir encore plus passionnant qu’hier et qu’aujourd’hui.
En phase pionnière, on n’a rien à perdre et tout à gagner. C’est le troisième tiers de l’énergie.
36Nous nous trouvons dans la situation d’un passionné de musculation, titulaire d’un brevet d’Etat qui monte sa salle de fitness. En général, il travaille avec son conjoint et un ou deux collaborateurs. Il assure l’accueil, l’animation de séances, l’entretien de la salle, la gestion du matériel, la comptabilité. Les journées de travail sont alors de 15 à 17 heures.
37En phase pionnière, l’angoisse du lendemain partagée par tous, la peur ne pas être au niveau et le sentiment d’aller vers quelque chose de super sont créateurs d’une énergie phénoménale.
38Le management en phase pionnière
39Dans cette phase, il n’y a pas besoin de projet à moyen terme ou à long terme. Ce qui compte, c’est le court terme. Il faut réussir.
40Le manager, qui est dans tous les cas un leader, doit avoir un comportement de meneur d’hommes, de commandant. C’est un directeur. La qualité n’est pas la préoccupation première, car avant tout il faut réussir. Le manager est proche du personnel, il est connu, il est l’interlocuteur direct, il participe, il met « la main à la pâte », car dans l’angoisse partagée, il faut une surveillance quotidienne.
41Remarque : Une organisation peut avoir des secteurs à différentes phases.
42b) La phase de croissance accélérée
43On ne peut pas rester en phase pionnière, car on travaille énormément et le rendement est trop faible. La logique veut que l’on passe en suite, en phase de croissance accélérée. Période où l’on est en train de réussir. On est connu, reconnu. Le marché monte dans le secteur privé, les adhérents augmentent dans le secteur associatif. C’est le deuxième souffle. On a une fatigue décroissante et des résultats croissants. Il faut alors avoir le souci de la qualité pour ne pas décevoir le client, l’usager, l’adhérent. Le système fonctionne parce que les gens travaillent et qu’ils sont payés de leurs efforts. L’excellence consiste à faire plus de résultats avec moins d’efforts et plus de plaisir.
44Notre responsable de salle de fitness est obligé de recruter du personnel pour faire face à l’augmentation de clientèle. Il n’a plus le temps de s’occuper de l’animation des séances. Il a délégué cette mission à un de ses collaborateurs.
45Le management en phase de croissance accélérée
46Dans cette phase, on a du mal à fournir et les gens attendent de leurs responsables qu’ils soient toujours des leaders, mais qu’ils soient également et surtout des organisateurs et des qualificateurs.
47En effet, notre responsable de salle de fitness doit maintenant coordonner les différentes activités qui se développent dans sa salle. Donc il doit être un organisateur.
48D’autre part, s’il a réussi c’est grâce à sa compétence en tant qu’opérationnel. Il va donc lui falloir conserver, exploiter et partager les savoirs individuels, sources de succès. Pour cela, il faudra formaliser les connaissances et les compétences utilisées et les transmettre aux nouveaux collaborateurs. Il est donc un qualificateur.
49Cette compétence est rarement développée par les responsables par crainte d’être dépossédés de leurs pouvoirs. C’est une des raisons principales de l’échec de l’entreprise.
50Dans cette phase de croissance accélérée. La réussite consiste pour le manager à faire fi du narcissisme personnel. Il n’y a rien de plus terrible que d’aller voir directement la base en passant par-dessus les responsables intermédiaires pour montrer ce qu’il faut faire (syndrome de Zorro).
51Il est préférable, en tant que directeur, d’aider le responsable d’animation à devenir un entrepreneur. Alors, le coordonnateur, qu’il est devenu, devient un chef d’entrepreneurs.
52c) La phase d’excellence ou de croissance ralentie
53Dans notre exemple du fitness la phase de croissance accélérée a permis l’ouverture d’une autre salle. Notre brevet d’État est devenu le Directeur général de la société qui gère les deux salles administrées par deux gérants. Les années ont passé, tout est pour le mieux. L’entreprise marche bien mais dans cette phase, les mêmes efforts donnent des résultats décroissants ou des efforts supérieurs donnent le même résultat. En effet, les opérationnels (animateurs d’activités) et les deux gérants de salle vivent sur leurs acquis.
54On entre dans un monde ou l’influence de la hiérarchie intermédiaire (les gérants) sera fondamentale. Le management devient une science exacte, la communication est importante. Il faut mettre les collaborateurs dans le secteur de l’impossible. L’ambition, c’est l’utopie moins un. C’est presque l’impossible et c’est faisable car si je réussis, c’est super.
55Le management dans la phase de croissance ralentie
56À ce niveau, l’entreprise n’existe que si le patron est exigeant et charismatique. C’est-à-dire qu’on ne manage pas de la même manière le jeune recruté en phase pionnière et qui entre dans la vie active, et cette même personne, avec laquelle on fonctionne depuis une dizaine d’années confortablement installée dans la vie sociale.
57Le manager ne doit jamais être indulgent. Il doit être exigeant et accompagnateur. Exigeant au niveau des objectifs à atteindre, accompagnateur en donnant les moyens pour atteindre ces objectifs.
58Pour résumer les différentes phases :
En phase I, les collaborateurs travaillent pour eux.
En phase II, ils travaillent pour le charisme du manager et le client.
En phase III, ils travaillent pour leur responsable direct (le gérant), s’il en vaut la peine.
En phase I, ils passent 15 heures au travail.
En phase II, ils passent des heures dans leurs loisirs.
En phase III, ils passent des heures dans des associations comme bénévoles ou dans un challenge personnel car c’est là qu’ils trouvent un meilleur patron. Ils recherchent une légitimité sociale.
59Lorsque l’on a faim, il faut du pain, lorsque que l’on a de l’argent, il faut du bonheur. Lorsque l’on a du bonheur, il faut une âme, c’est-à-dire un projet. Donc :
En phase I, il n’y a pas trop de projet, le management est d’influence faible.
En phase II, il faut un projet partagé, le management est de forte influence.
En phase III, il faut un projet d’entrepreneur, et un management du projet pour redonner envie aux chefs d’équipes. Quand on a plus envie, on cherche uniquement le plaisir, soit dans le concret, soit la fuite dans la drogue ou l’imaginaire. Il faut donc re motiver les collaborateurs.
60Dans cette troisième phase, nous pouvons énumérer, une série de commandements
61• Une ambition pluriannuelle quadrangulaire
62Un projet à 3, 5 ou 8 ans en route vers un horizon daté et défini sur quatre plans :
professionnel,
personnel,
familial,
social.
63En phase I, l’objectif à un an est motivant, car on n’est pas sûr d’y arriver.
64En phase III, l’objectif à un an n’est pas motivant parce que l’on sait que l’on pourra l’atteindre avec un peu d’énergie. Par contre, si l’objectif à un an est un objectif intermédiaire, un palier pour atteindre l’objectif final des 5 ans, il garde son aspect motivationnel.
65Les équipes sont toujours mobilisées quand leur responsable a une vision passionnante de l’avenir et que leur motivation s’appuie sur l’envie de construire un futur plus intéressant que le passé ou le présent.
66Une motivation positive : j’ai envie... provoque le désir, l’envie d’aller plus loin, le plaisir, l’apprentissage. Elle est durable.
67Un groupe humain en route vers un avenir qui le passionne est infatigable, invulnérable.
68Au contraire, la motivation négative, « Je ne veux pas », se concrétise par la peur et l’évitement.
69La peur de perdre engendre le stress et, à terme, l’échec.
70• Une passion M S M
71Une passion pour le Métier, le Service, la Mission qui est la nôtre. Le mot clé est le mot passion.
72Une passion pour le métier :
73C’est la passion pour une activité : exemple la musculation. Elle fait que l’on choisit de travailler dans le secteur où on va pouvoir assouvir sa passion.
74Une passion pour le service :
75C’est la loi du transfert motivationnel. La passion du dirigeant pour sa prestation de service engendrera la motivation du personnel pour son travail. Les questions à se poser sont les suivantes :
Sommes-nous un manager impulseur d’énergie ?
Quel est aujourd’hui notre degré de passion pour notre prestation de service ?
76Lorsque l’on discute avec un responsable de son activité, ennuyeux quand il parle, vous êtes sûr d’avoir saisi son niveau de motivation !
77Une passion pour la mission
78Elle se traduit chez les collaborateurs par la capacité à pouvoir définir en quelques mots la mission de l’entreprise, et surtout par la fierté qu’ils en retirent.
79On remarquera que lorsque l’on interroge des gens sur leurs métiers, ils ne nous parlent rarement, pour ainsi dire jamais, de l’objectif de leur travail, de la mission qui est la leur. Ils nous parlent de la technique qu’ils emploient pour travailler, des moyens qui sont les leurs quand ils sont en activité. Ils nous disent comment ils travaillent et rarement pourquoi ? (exemple : je suis professeur de tennis et j’entraîne l’équipe première du club).
80• Une évaluation quotidienne
81Les deux points précédents, une ambition pluriannuelle quadrangulaire et une passion MSM sont les sources de l’énergie.
82L’évaluation quotidienne est l’organisation de cette énergie qui permet à chacun de mesurer, en permanence, les résultats de son action. Une auto-évaluation quotidienne est nécessaire, car en s’évaluant tous les jours, on se motive tous les jours. Il n’y a pas de progrès possible s’il n’y a pas d’évaluation.
83Nous observons, dans notre culture judéo-chrétienne que l’évaluation personnelle est immédiatement perçue comme une agression.
84• Un challenge
85Souvent, le plaisir du jeu fournit l’énergie de la victoire. Une trop forte pression crée un phénomène de blocage et génère la défaite. Cela signifie que l’on ne gagne qu’en développant en permanence le plaisir du jeu, c’est-à-dire du challenge. On réalise un grand projet par des challenges successifs. Autrement dit, il faut des étapes intermédiaires pour accéder peu à peu à l’objectif final. Quand le manager s’intéresse, chaque jour, à l’action plus qu’au résultat, il génère le plaisir et la motivation.
86En effet, il est fondamental de se poser la question de savoir quel est le système d’évaluation de la qualité du travail. Ce système doit être centré sur le comment (comment tu t’y prends pour atteindre tes objectifs) plutôt que sur le résultat, (c’est-à-dire combien). Sinon la pression sur le résultat est trop forte. Elle engendre un stress et donc la démotivation. Ce type de management, par objectif, est un escalier mécanique que l’on gravit à l’envers.
87• Exercer un management positif et recompensateur
88C’est la relation managériale positive qui crée la motivation. Elle favorise l’apprentissage rapide, la compétence et les résultats.
89En phase I, on peut se centrer sur ce qui ne va pas.
90En phase II, il faut se centrer sur ce qui marche.
91En phase III, il faut se centrer sur le comment tu vas faire pour gagner. Il faut encourager, féliciter, être positif.
92C’est un climat favorable à la dynamisation des progrès de l’équipe. Il faut donc être capable de prouver aux collaborateurs que l’on connaît leurs actions et que l’on est satisfait. Il faut voir ce qui marche et en parler. Les managers négatifs fonctionnent à la volonté. Ce sont des gens qui travaillent quinze heures par jour. Ils veulent tout savoir et ils craquent. Les managers positifs ont pour mission de faire réussir les collaborateurs. Pour cela, ils s’appuient sur les qualités des individus jamais sur les défauts.
93• Une formation action
94Pour assurer la croissance d’une organisation, le manager doit d’abord développer la courbe de compétence de chacun de ces collaborateurs. Et ce, à chaque opération, car si les résultats augmentent et pas la compétence des collaborateurs, ceux-ci vont immédiatement penser qu’ils ont travaillé davantage, donc que le manager les a exploités. La croissance doit être proportionnelle à l’augmentation de la compétence. Quand on ne progresse pas dans ce secteur, on régresse. Ainsi, en même temps que l’on donne une mission à quelqu’un, on doit lui donner des outils pour pouvoir l’assumer (cf. paragraphe sur la lettre de mission, page 196).
95VOICI QUELQUES QUESTIONS QUI POURRAIENT ÊTRE POSÉES AUX MANAGERS :
Pourriez-vous écrire en deux pages les dix recettes de votre succès ?
Le problème d’un collaborateur, vous parait-il ?
une aubaine pédagogique ?
du temps perdu ?
Combien de temps consacrez-vous à la formation de vos collaborateurs ?
96• Une morale exemplaire
97En phase I, la fin justifie les moyens. On peut donc accepter quelques comportements déviants. Mais en phase III, il faut une morale exemplaire. La crédibilité du dirigeant est déterminée par sa capacité à définir et à faire respecter les valeurs et règles du jeu de l’entreprise. L’autorité hiérarchique se créée par des sanctions centrées non pas sur les mauvais résultats, mais toujours exclusivement sur des hors jeux. Le manager doit sanctionner immédiatement et sans appel les hors jeux. En effet, le hors jeu est le comportement qui consiste à ne pas respecter les règles de fonctionnement du groupe.
98Tandis que l’erreur est d’ordre technique. Un collaborateur peut commettre une erreur. Il s’y est mal pris et n’a pas abouti au résultat. L’erreur se « pardonne » et surtout, elle se corrige. En général pour le déculpabiliser, l’équipe aide l’individu à récupérer son erreur. Par contre, si la faute est morale (hors jeu) il n’y a pas discussion, elle doit être sanctionnée. C’est le « carton rouge ».
99Quelques remarques :
L’impossible devient accessible à la seule condition qu’il repose sur un désir profond, sur la réalisation d’un rêve profond, et non pas sur la folie sans fondement.
Un grand projet vient du fait qu’on a plus l’envie de vivre et moins celle de mourir (se rappeler de la symbolique du sport).
Le gagnant est celui qui rêve de l’avenir pour l’avenir, qui est réaliste dans l’année par sa stratégie et obsessionnel dans le quotidien : passion, raison, précision.
Nous entrons dans un monde ou la symbolique est primordiale.
La puissance, c’est la cohérence.
CE QU’IL FAUT RETENIR
1 - Le projet, qui est mien, s’impose car sinon je perds ma motivation à mener un projet réduit.
2 - La stratégie se négocie avec mes collaborateurs directs.
3 - L’assistance hiérarchique se module : ne me demandez pas de baisser mon exigence, demandez-moi plus d’assistance.
4 - La tactique se délègue : c’est-à-dire la mise en œuvre, les plans d’action. Le projet ne marchera pas si j’impose tout, si j’impose mon projet, ma stratégie, mes moyens, car les autres ne s’y retrouveront pas. Écoutez ce qui plaît à vos collaborateurs et incluez-le dans votre projet quadrangulaire aux aspects humains et sociaux.
Plus le plan est précis, plus on peut s’en évader, il devient flexible. Si les idées sont floues on se raccroche alors à certaines d’entre elles sans pouvoir en sortir (avoir la tête dans le guidon).
Quand vous lancez un projet, dites-vous bien que vous ne savez pas comment vous allez l’atteindre et que par conséquent il y aura nécessairement des contradictions dans votre comportement. L’important est de percevoir et de gérer les écarts. Vous gérerez les écarts en organisant l’assistance par des briefings (réunions de coordination avant l’action) et des débriefings (réunions de bilan et d’amélioration après l’action).
2.4 - Management motivationnel du personnel en contact
100Quatre grands principes :
101• La loi du contrat hiérarchique :
102Le personnel n’accepte de fournir des efforts que dans la mesure où on lui apporte, en échange, des contreparties précises.
103• La loi de l’apport hiérarchique obligatoire :
104Lorsque le reponsable a rempli la totalité de ses obligations, il acquiert automatiquement une crédibilité qui lui permet d’exiger, sans problème, une certaine somme d’efforts.
105• La loi du problème technique :
106Le personnel qui pose problème (erreur, routine, contestation ou inertie) est toujours un personnel qui a le sentiment diffus que le responsable ne respecte pas le contrat hiérarchique (apport hiérarchique insuffisant).
107• La loi de la forte crédibilité :
108Pour être crédible aux yeux du personnel, il faut apporter à chaque collaborateur une récompense, une sécurité, du rêve, (recompensation, sécurisation et sublimation). Lorsque ces trois apports sont réalisés, la crédibilité du cadre est alors maximale.
2.5 - Managements en fonction des caractéristiques du personnel en contact
109Nous avons vu que suivant les étapes de développement correspond un management adapté. Ce management doit être également modulé en fonction des caractéristiques du personnel.
110Le schéma 29 montre que ce management s’adapte en fonction de deux critères :
la motivation : M
la compétence : C
111En face d’un collaborateur non motivé et non compétent (ce qui ne devrait jamais arriver car cela est une erreur fondamentale de recrutement), il faut développer un management directif c’est-à-dire :
Imposition des objectifs
Imposition du plan d’action
Imposition des tâches à accomplir
Évaluation journalière
112Avec un collaborateur non motivé mais compétent, il faut développer un management persuasif : construire la motivation en appliquant tous les principes du management motivationnel vu précédemment.
113Avec un collaborateur motivé mais non compétent, il faut être qualificateur : former la personne soi par un transfert de compétence, toujours par un échange de compétences au sein de l’équipe de service sinon par une formation extérieure. N’oublions pas d’utiliser alors le concept de benchmarking (cf. Introduction).
114Enfin, avec un collaborateur motivé et compétent nous sommes en présence de la situation idéale pour déléguer (c’est-à-dire appliquer tous les principes du chapitre suivant). Notamment, dans ce cas de figure la délégation peut aller jusqu’à la définition des objectifs de la lettre de mission.
2.6 - Le management de la participation du client à la prestation de services
115La participation du client à la réussite de l’entreprise dépend des caractéristiques comportementales du pratiquant.
116Il y a trois catégories de clients :
117Les mono-fidèles : prenons l’exemple du golf. Ce sont les membres d’un club qui ne jouent que dans leur club rarement ailleurs. Avec eux, le potentiel de participation est considérable, d’où la possibilité, de créer avec eux, des commissions sportives.
118Les multi-fidèles : ce sont les membres de plusieurs clubs ou ceux jouant au green-fee dans d’autres golfs. Ce sont les plus difficiles. On peut augmenter leur participation, mais ils vont aussitôt comparer avec les autres lieux où ils jouent. Il faut donc traiter avec beaucoup de soin le processus de participation.
119Les indifférents : ce sont les joueurs au green-fee. Ils subissent avec indifférence ou agressivité toute velléité d’augmenter les participations. Donc pour réussir, il faut les faire sortir de leur indifférence.
120Ensuite, nous pouvons distinguer les gros utilisateurs des utilisateurs occasionnels. Ces derniers se prêtent mal à une augmentation de leur participation étant donné le peu d’usage qu’ils font du service. Par contre, le gros utilisateur a une connaissance excellente du service dans ses moindres détails. Il est parfois plus professionnel que le personnel en contact. Par conséquent, il est très réceptif à un accroissement de sa participation à condition qu’on le sorte de l’anonymat et que l’on reconnaisse sa compétence en tant que producteur de service, par exemple en lui donnant des avantages que les autres n’ont pas.
121On voit que ce problème est à gérer différemment dans un golf avec peu de membres et dans une salle de fitness où les clients sont en majorité des mono-fidèles et de gros utilisateurs.
122Enfin, il y a les clients actifs et les clients passifs.
123La tendance actuelle dans tous les services est à la participation active du client bien plus rentable sur tous les plans. Peut-être va-t-on, enfin, systématiser les pédagogies modernes, actives dans le loisir sportif.
124Il faut donc faire passer les clients passifs du côté des actifs. Pour ce faire, il est nécessaire de mettre en place un système de guidage par le biais d’une animation de la structure. On comprend que cela ne peut être fait au hasard et requiert des compétences spécifiques de la part du personnel en contact.
125Pour les actifs, il y a deux dimensions importantes : le temps et le contrôle de la situation du service. En effet, on peut accroître la participation à condition qu’elle fasse gagner du temps au pratiquant et qu’elle lui permette d’augmenter son contrôle sur la structure du service.
126Nous avons exploité ces caractéristiques dans un golf de Montpellier pour permettre au golfeur de travailler son putting et ses approches. Le milieu était aménagé, un certain nombre de consignes était affiché, l’aménagement était modifiable par le pratiquant, enfin le temps d’utilisation du parcours était court (pas plus de 5 à 10 minutes). Nous n’avons eu que des réactions positives à ce type d’initiative.
127Pour les clients passifs, les éléments pris en compte sont l’effort et le risque. Ils ont une perception aiguë de l’effort tant au plan intellectuel que physique si on augmente leur participation. Le changement lié à la mise en place d’une méthode plus participative leur fera perdre leurs repères et augmentera leur crainte de risque de non-performance du service. Cependant, il suffit de faire apparaître les avantages positifs pour que ces clients l’acceptent sans problème. Nous avons pu vérifier ce phénomène, toujours en golf, à partir d’un baptême beaucoup plus participatif que les baptêmes traditionnels (cf. chapitre 4 Le baptême de golf, pages 125-127).
128Lorsque l’on veut augmenter la participation du client, il faut donc d’abord tester la réaction des pratiquants les plus participatifs en se centrant sur le temps gagné et sur leur auto-contrôle de la situation. Puis intéresser les clients passifs en leur démontrant que l’effort est minime et le risque inexistant.
129Nous laisserons la conclusion sur le management de cette participation à Eiglier et Langeard1 :
130« Nous avons là les bases d’une fidélisation, d’une politique marketing qui consiste :
A maintenir avec le client ou l’adhérent une relation équilibrée sans effet de domination de l’un par l’autre
À accroître sa participation pour partager avec lui les gains de productivité ainsi dégagés, et développer son autonomie (sauf si désir du client de rester passif)
À l’informer sur les problèmes de fonctionnement du service et les efforts faits pour les résoudre ».
3 - Les outils du management motivationnel dans les services
131La grande majorité des managers de PME se refusent à déléguer pour deux raisons fondamentales :
132La non confiance vis à vis de la compétence des autres, en réalité due à leur propre incompétence à former leur personnel.
133La peur de perdre le pouvoir.
134Le résultat : ils veulent tout faire, tout savoir. Ils sont complètement débordés et ralentissent la marche de l’entreprise.
135La cause de tout cela est qu’ils ignorent que manager est un véritable métier, avec des techniques très précises qui ne s’inventent pas et nécessitent un apprentissage.
136La délégation de pouvoir est un des éléments de la réussite. Ce n’est pas une perte du pouvoir bien au contraire. Cela consiste à confier aux autres des tâches, des objectifs, des missions.
3.1 - Déléguer en attribuant des missions
137Traditionnellement, tout nouvel embauché dans une entreprise est un fonctionnaire puisqu’il lui est demandé d’assurer une fonction du service. Par exemple : enseigner, entretenir l’équipement sportif, etc.
138Il est donc vital de préciser le rôle de chaque collaborateur au sein de l’entreprise (produit ou service essentiel qu’il doit fournir), ainsi le collaborateur :
a la vision de ce qu’il doit faire,
est solidaire de l’entreprise,
est capable de canaliser son énergie.
3.2 - Le grand principe de la délégation
139Ne jamais remettre à demain ce qu’une autre personne peut faire aussi bien que vous aujourd’hui.
140• déléguer :
c’est faire faire,
ne pas tout faire,
ne pas laisser faire.
141Déléguer, c’est confier à un collaborateur des objectifs à atteindre après les avoir négociés avec lui, puis lui laisser une autonomie réelle quant aux moyens et aux méthodes à mettre en œuvre dans un cadre convenu. On fait ensuite le point sur les résultats à l’aide de procédures de contrôle définies à l’avance.
142Dans le cadre de cette délégation, la difficulté majeure pour le responsable est de résister au « syndrome de Zoro », d’être capable de rester en retrait et de ne pas intervenir, de ne pas se substituer à lui en effectuant le travail ou en prenant des décisions à sa place. C’est laisser le personnel en contact affronter et résoudre les difficultés de la mission.
143Cependant, le rôle du manager ne consiste pas à laisser son personnel se débrouiller seul. On doit si besoin est, lui apporter l’information, l’aide ou le conseil qu’il sollicite.
144À l’issue de la mission, on fait ensemble le bilan de l’expérience de cette délégation.
3.3 - Quatre étapes à la délégation performante :
Prévoir, Choisir, Organiser
Informer, Expliquer, Former
Contrôler à dates fixées
Valoriser et féliciter le délégataire
145Ce qui exclut
la délégation poubelle
la délégation permanente
la délégation sans contrôle
146Que peut-on déléguer ?
147Ce qui est :
prévisible
répétitif
facile
long
valorisant.
ce que d’autres peuvent faire aussi bien, et souvent mieux que soi.
ce qui peut permettre de dégager du temps.
3.4 - Pourquoi déléguer
148Pour celui qui délègue :
économiser du temps
motiver ses employés
identifier leurs potentiels
former ses collaborateurs
149Pour celui qui accepte la délégation :
se former et relever des défis
avoir une reconnaissance de ses compétences
se préparer à assumer une nouvelle fonction
3.5 - La lettre de mission
150C’est une sécurité pour le manager mais aussi pour le personnel puisqu’elle définit les règles du jeu. Elle précise le rôle de chaque collaborateur au sein de l’entreprise. Elle est adaptée annuellement en fonction de l’exercice à venir.
LETTRE DE MISSION = | DÉLÉGATION DE POUVOIR |
MANAGER | MANAGÉ |
Chaque année : | Qu’est-ce que j’accepte de la délégation ? |
Chaque mois : | Le point sur le plan d’action |
151Rédaction de la lettre de mission
152Étape 1 : Rédaction de la lettre
153Elle commence par un chapeau où le manager décrit l’objet essentiel de la délégation et le but à atteindre afin que le collaborateur puisse situer globalement son action au sein de l’entreprise. Ensuite, elle décrit les missions essentielles et indispensables, au maximum cinq, à la réussite des objectifs.
154Chaque mission est décrite de la manière suivante :
un titre donnant l’objectif de la mission (non en termes de tâches mais en termes d’objectifs, de stratégie, de définition des cibles.)
le service essentiel concerné
les activités concernées par cette mission
EXEMPLE DE LETTRE DE MISSION :
DIRECTEUR ADJOINT DE GOLF
Dans le cadre d’une politique d’amélioration de l’offre de services du golf, afin d’aboutir à une augmentation de 20 % de la clientèle, le Directeur adjoint devra assurer les missions suivantes :
Mission no 1 :
Le directeur adjoint est responsable de la satisfaction des membres :
- en négociant avec eux des solutions novatrices
- en respectant les engagements pris
• Objectifs : avoir 90 % de membres satisfaits.
Mission no 2 :
Responsable de l’adaptation et de la réactivité du personnel en contact vis-à-vis de l’évolution des besoins des différents segments de notre clientèle :
- par une veille sur l’évolution des attentes
- par une formation permanente du personnel (investir 6 % de la masse salariale en formation).
Mission no 3 :
Responsable de la gestion de la dynamique des motivations de la clientèle fidélisée :
- par une programmation structurée d’une animation du golf
• Objectif : avoir une animation différente chaque semaine.
Mission no4 :
Responsable de l’augmentation du chiffre d’affaire du proshop :
- par une offre plus diversifiée
• Objectifs : 10 % d’augmentation du chiffre d’affaire.
155Étape 2 : Définition du plan d’action
156Lorsque les missions sont acceptées par le collaborateur, on lui demande de préparer un plan d’action, de définir les démarches, les méthodes et les outils pour mener à bien les missions.
comment vas-tu t’y prendre pour remplir ta mission ?
prouve-moi, professionnalise ta réponse :
objectifs opérationnels
contenus (processus)
moyens (processeurs)
157Ensuite, on fixe un rendez-vous pour négocier avec le managé son plan d’action :
MANAGER | MANAGE | VALIDATION DU PLAN D’ACTION |
Incompétent | Compétent | Le manager se fait expliquer la pertinence du plan d’action |
Compétent | Compétent | Le manager vérifie la cohérence du plan d’action |
Compétent | Incompétent | Le manager fournit un plan d’action |
158Ceci est consigné par écrit, de façon précise, et accepté par les deux parties (signature de la lettre de mission et des pièces annexes).
159Étape 3 : Construction du planning
160Un planning de rendez-vous est arrêté pour une rencontre mensuelle de deux heures afin de faire le point sur les missions. Lors de ces entrevues, tous les sujets sont abordés.
161Conclusion : E = CM2
162L’Énergie déployée par le collaborateur dans sa mission est directement proportionnelle à sa Compétence, sa Motivation et les Moyens qui lui sont attribués.
163Le manager, le responsable, le dirigeant, le chef de projet se doivent donc de développer ces trois composantes.
4 - Adaptation des lois du management au secteur associatif
164Une expérience de trente ans de bénévolat dans le milieu associatif et de consultant dans deux fédérations sportives classées parmi les quatre fédérations françaises les plus importantes nous permet de constater l’évolution des difficiles rapports entre les dirigeants et les salariés administratifs et techniques.
165Ces difficultés sont dues à deux évolutions majeures :
l’augmentation des responsabilités civiles et maintenant pénales des dirigeants
l’augmentation du nombre de salariés dans les associations
4.1 - Le management est un sujet tabou
166Ces nouvelles responsabilités du dirigeant ajoutées aux exigences croissantes des pouvoirs publics pour la délivrance des subventions obligent le bénévole à un plus grand professionnalisme. Une enquête menée au mois de juin 2001 sur une des deux fédérations sportives montre :
que les dirigeants sont parfaitement conscients de l’évolution de leur statut. Par exemple d’être un employeur avec tout ce que cela comporte de :
connaissance du droit du travail,
capacité à recruter,
compétences de gestionnaire,
compétences managériales...
Qu’ils avouent, par rapport à cela, leur incompétence,
Mais qu’ils sont « allergiques » à toute référence, à des concepts venant du secteur marchand comme management, formation continue, compétence, conduite de projets, méthodes de résolution de problèmes, clients etc.
167Notre position de consultants investis dans le secteur associatif et dans le secteur privé, nous permet d’affirmer que le secteur associatif n’a pas le choix. Il doit s’approprier, en les adaptant, les concepts qui ont fait leurs preuves dans le secteur privé afin de pouvoir faire face aux exigences de plus en plus grandes de l’environnement : celles des adhérents, des pouvoirs publics, des sponsors. À ce sujet, il est intéressant de noter une demande de plus en plus appuyée d’assurance qualité donc de certification ISO 9000 vers les associations : les donneurs d’ordres n’hésitent pas à exiger des garanties plus solides pour pouvoir délivrer des financements. Cela vaut pour les fédérations vis-à-vis de leurs clubs.
168Une fois encore, la qualité de service devient incontournable.
4.2 - Le management motivationnel dans l’associatif
169Le dirigeant et le projet de club
170Les dirigeants et notamment le Président doivent définir un but à moyen ou long terme pour le club (projet pluriannuel). Ce but doit être un beau rêve de manière à être passionnant. Par définition, c’est un projet qui n’est pas élaboré en fonction du possible mais de l’impossible (exemples : faire gagner la coupe d’Europe à l’OM, ramener la Coupe Davis de tennis en France, etc.). Ainsi, chaque association doit avoir un rêve, une ambition, une passion (projet de club).
171Ce projet du dirigeant doit répondre aussi au principe quadrangulaire, « Qu’aimerais-je avoir réalisé au bout de mon mandat » :
sur le plan social
sur le plan personnel
sur le plan familial
sur le plan professionnel
172Le projet du dirigeant doit être inscrit dans son projet de vie, condition nécessaire à la réussite. Si cet aspect n’est pas respecté, que le projet du dirigeant pour le club se fasse au détriment de sa vie familiale ou professionnelle, ce sera obligatoirement un échec.
173D’ailleurs, force est de constater que les dirigeants les plus performants le sont parfois pour compenser leur échec dans les autres composantes du projet de vie.
174Le projet comprend :
175Un horizon, domaine de la passion et du rêve En effet, « il n’y a pas de vent favorable pour qui ne connaît pas son port » (Sénèque). Il n’y a pas d’énergie s’il n’y a pas une forte motivation et si cette motivation n’est pas orientée vers un point précis.
176Pour fixer cet horizon, le dirigeant doit définir :
177Une stratégie, domaine de la raison. Pour atteindre ce rêve, il faut arrêter de fantasmer et avoir un plan très précis sur plusieurs années. Ensuite, il convient d’être réaliste et concret car la difficulté à clarifier précisément ce que l’on souhaite profondément explique 95 % de nos non réussites.
178Pour définir cette stratégie, les outils privilégiés sont le diagramme causes-effet et le diagramme en arbre.
179Un plan d’action, domaine de la précision
180C’est l’étape des objectifs opérationnels à court terme (maximum un an), et surtout au quotidien.
181Pour cette étape les outils indispensables sont la grille de définition d’objectifs opérationnels, la définition du processeur, la construction des procédures.
182(cf. chapitre 5 Les Outils du Management de la Qualité d’une entreprise de service)
183La réussite du projet s’appuie sur un principe incontournable que tout concepteur de projet, tout manager doit connaître, mettre en application et vérifier : c’est le principe de la relation Gagnant/Gagnant.
184En effet, le projet passionnant du dirigeant pour son club devient un projet d’équipe. D’autres personnes vont s’investir, donner de l’énergie, du temps etc. mais pour donner il faut recevoir. Chacun, à son niveau, doit y trouver son compte, être convaincu d’avoir fait une bonne opération !
185Chacun doit avoir une espérance de « gain ». Évidemment nous ne faisons pas forcément référence aux aspects financiers surtout pour des bénévoles ! Mais qu’ils y trouvent une satisfaction en fonction de leur projet de vie, projet individuel, lui aussi quadrangulaire.
186Les étapes de développement de l’association
187Nous faisons ici référence aux phases de développement de l’entreprise.
188Une association est en phase pionnière dans les circonstances suivantes :
lors de sa création,
lors de la mise en place de l’organisation d’une manifestation exceptionnelle (exemple : on évolue au niveau départemental et on organise un championnat régional, on organise un méchoui pour tous les adhérents et leur famille...),
lors de la mise en place d’une nouvelle prestation (création d’une école de sport, création d’une équipe compétition ou d’un groupe de démonstration...).
189Une association est en phase de croissance accélérée lorsque :
elle augmente d’une manière significative ses effectifs.
190Une association est en phase d’excellence ou croissance ralentie lorsque
le club a atteint ses objectifs et n’a pas d’autre souci que de se maintenir,
les dirigeants et salariés fonctionnent ensemble depuis plusieurs années. Chacun a construit son territoire.
191Dans cette phase, les dirigeants sont confrontés au problème nouveau du vieillissement des brevets d’État qui a pour conséquence une motivation décroissante de ce type de personnel engendrée par :
la routine,
le manque de formation professionnelle,
la lassitude,
la baisse des performances physiques,
l’absence de plan de carrière.
192En conclusion, nous pouvons dire par expérience que les principes de management spécifique à chaque phase s’appliquent au système associatif et notamment dans la troisième phase avec mise en place de lettres de mission, de plans d’action et d’évaluation.
5 - Le dirigeant, un manager de projet
193Notre enquête met en évidence les nouveaux besoins en formation des dirigeants ainsi que la quasi-absence de demande explicite de formation. En effet, le manque de compétences est exprimé sous forme de constats et non de demande précise de formation. Par contre, une forte demande d’aide récurrente reste confuse, multiple en se référant aux tâches du dirigeant et non à sa mission, à son projet.
194Le dirigeant est obligatoirement un chef de projet donc un manager. Tout manager qui se respecte, avant de manager les autres, doit être capable de se manager lui-même. Nous renvoyons le lecteur aux nombreux ouvrages sur le self-management, la gestion du temps, la gestion du stress dont les principes sont, maintenant, bien connus de tous.
195Cependant, nous allons développer les caractéristiques du chef de projet ainsi qu’une grille de synthèse pouvant servir de test au dirigeant pour lui permettre de se situer par rapport à ce type de compétences.
5.1 - Les dix aptitudes du chef de projet
196Lionel Bellenger2 définit dix caractéristiques de base que doit posséder un manager :
1 - La consistance
197Être responsable, c’est avant tout être crédible. Être crédible, c’est d’abord montrer l’exemple en étant :
clair avec soi même,
cohérent,
respectueux et gardien des valeurs du groupe,
intègre,
et en tenant ses promesses.
198N’oublions jamais que « Les promesses restent gravées dans le granit de celui qui les reçoit et dans le sable de celui qui les fait ».
199Et en bannissant le principe « faites ce que je dis et ne faites pas ce que je fais » !
2 - L’écoute
200Un manager est quelqu’un qui sait écouter, être capable de se mettre à la place de son interlocuteur, faire preuve d’empathie. Pour cela il doit se rendre disponible (méfions-nous des responsables qui n’ont jamais le temps !), consacrer du temps à l’écoute en créant les conditions d’expression de ses interlocuteurs.
201On reconnaît la capacité d’écoute si, dans l’échange, il s’exprime prioritairement par des questions et non pas en termes de « il faut, il y a qu’à ».
3 - L’engagement
202L’engagement d’un individu se reconnaît à sa capacité de :
prendre des initiatives,
fixer des objectifs précis,
être réaliste,
mesurer les écarts entre le but poursuivi et le résultat obtenu.
203Force est de constater qu’une des particularités du bénévolat (ainsi que bon nombre de professionnels, hélas !) c’est d’avoir des objectifs flous et vague dont on ne pourra jamais évaluer le niveau de réussite.
4 - La combativité
204Au sens où le manager doit être capable :
d’accepter de prendre des risques,
de résister à l’incertitude,
de savoir faire face à l’échec,
de gérer son stress,
205En un mot être pugnace.
5 - La remise en cause
206Le premier critère de la remise ne cause est la volonté de rompre avec la routine. Cela consiste à :
accepter la critique,
revoir ses modes de fonctionnement,
mettre en cause ses méthodes de travail,
analyser et formaliser, en priorité, les procédures mises en place lorsque l’action a été une réussite.
207En effet, notre culture a développé une fâcheuse habitude à travailler sur l’échec et non sur la réussite. Or l’expérience prouve que cette dernière est bien plus efficace.
6 - La capacité à créer un réseau
208Un responsable ne doit en aucun cas rester replié sur son environnement proche. Il doit :
être curieux,
s’ouvrir sur l’entourage,
tirer partie des informations qu’il reçoit pour être novateur dans son secteur,
maîtriser son tissu relationnel notamment en dehors de son secteur d’activités.
209En un mot, avoir l’esprit benchmarking.
7 - L’organisation
210Globalement, c’est la compétence à conduire un projet donc à :
construire des plans d’action,
définir des plannings,
gérer les imprévus,
gérer son temps afin de ne plus jamais dire « Je n’ai pas eu le temps ».
8 - Être un rassembleur
211C’est :
penser groupe,
avoir envie de partager,
écouter les minorités,
créer une culture commune,
gérer les périodes de crise,
gérer les conflits.
9 - Être stratège
212C’est :
développer des tactiques,
anticiper,
être centré sur les moyens pour atteindre les objectifs,
avoir des scénarios de rechange,
brider la stratégie des adversaires du projet.
10 - Être un spécialiste
213C’est :
posséder un bagage technique du secteur concerné,
avoir de l’expérience,
avoir des connaissances historiques du secteur,
connaître les évolutions techniques,
posséder une culture générale.
214La grille, page 200, est un outil qui permet de formaliser par une courbe, le portrait de chacun en termes de compétences managériales et ainsi de mettre en évidence ses points forts et ses points faibles. À partir de là, chacun décidera de sa stratégie de progrès personnels.
215Nous conseillons fortement au lecteur de remplir lui-même cette grille puis, de la faire remplir par une personne de son entourage le connaissant très bien et de comparer ! Ne pas oublier de vérifier l’objectivité !
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