Introduction de la partie 2
Entre génétique et adaptations physiologiques
p. 72-73
Texte intégral
1Si les relations entre les facteurs génétiques et la performance sportive sont bien réelles au regard des arguments développés jusqu’ici, leur déterminisme reste relatif. Bien que la génétique influence indéniablement les performances d’un sportif, il serait extrêmement réducteur de chercher à expliquer une performance par ce seul filtre. Aussi, si l’impact de l’héritage génétique peut être appréhendé pour des facteurs qui influencent la performance telle que la taille, cet impact reste beaucoup plus difficile à isoler pour d’autres facteurs-clé, telle que l’entraînabilité des qualités physiques, par exemple. Comme le développeront successivement les auteurs du Chapitre 4, « Individualisation de l’entraînement : une entrée physiologique », c’est généralement avant tout en évaluant les qualités physiques individuelles et leur réponse à l’entraînement qu’il est possible d’appréhender la plasticité d’un sportif à son entraînement et la capacité de son potentiel génétique à exprimer un très fort potentiel de performance sur le plan physique, pour un sport donné.
2Aussi, bien que l’expression du potentiel physique lors de tests standardisés et de son évolution en réponse à un programme d’entraînement soit intrinsèquement liée aux caractéristiques génétiques du sportif, il demeure dans les faits très complexe de pouvoir pondérer la part relative des progrès attribuables à la génétique, de celle relative aux autres facteurs d’influence en jeu, notamment relatifs à l’entraînement et aux stratégies de récupération mises en place. Il est ainsi toujours inévitablement nécessaire pour les entraîneurs de procéder à un subtil apprentissage par essai-erreur, consistant à évaluer méticuleusement la manière dont chaque sportif répond à l’entraînement en fonction des caractéristiques de ce dernier (en termes d’intensité, de fréquence, de volume et de type de contraintes) et des habitudes de vie du sportif (hygiène de vie, nutrition, sommeil, stress, etc.).
3Chaque séance, chaque cycle d’entraînement, chaque saison devient alors une parfaite opportunité pour le sportif, son entraîneur et l’ensemble des membres du staff d’apprendre à mieux doser les ingrédients permettant d’optimiser son niveau de performance.
4Si l’accumulation de l’expérience reste incontournable pour la mise en place de ce processus, il est pour autant possible d’accélérer l’apprentissage fait de chaque expérience. Pour ce faire, de nombreuses stratégies simples mais efficaces peuvent être mises en place :
- en prenant le temps d’analyser les réponses immédiates et différées de chaque séance d’entraînement en termes de fatigue ressentie par l’athlète, de charge interne et de charge externe ;
- en confrontant ces réponses à ce qui était attendu par le staff ;
- en évaluant régulièrement l’évolution des déterminants prioritaires de performance pour objectiver les effets de l’entraînement ;
- en cherchant à identifier si des régularités, des « signatures » individuelles émergent en termes de relation entre les contenus d’entraînement, la charge de travail imposée et la réponse du sportif.
5Tel que cela sera développé dans le Chapitre 9, « Du monitoring au suivi individualisé », certaines évolutions technologiques récentes facilitent considérablement cette démarche en permettant de capitaliser et de mettre à profit davantage d’informations sur le sportif au quotidien. Il devient ainsi de plus en plus accessible de pouvoir individualiser l’entraînement, à condition de maîtriser ces nouveaux outils sur la base d’une méthodologie de travail simple mais robuste, permettant de construire au quotidien des choix éclairés fondés sur de véritables temps d’analyse, appuyés sur des faisceaux d’indices pertinents.
6Nous verrons également dans le Chapitre 4 qu’au-delà de cette stratégie de régulation fine au quotidien, il est possible de gagner du temps en orientant l’entraînement en amont grâce à la mise en place de tests destinés à profiler les sportifs. L’accumulation des connaissances scientifiques permet en effet aujourd’hui d’identifier quelles stratégies d’entraînement sont susceptibles de maximiser les progrès en fonction du profil que possède un sportif. Sans occulter l’importance de bien réguler l’entraînement au quotidien, ces connaissances peuvent aider à gagner du temps en identifiant plus tôt les méthodes d’entraînement susceptibles d’atteindre plus rapidement les résultats escomptés. Ce point est essentiel car le champ de la haute performance en sport s’apparente souvent à une véritable course contre la montre, qui impose d’être efficient dans les choix mis en place pour parvenir à optimiser les marges de progression du sportif aux différentes étapes clé de sa carrière.
Auteur
Physiologiste du sport, spécialisé dans les problématiques de méthodologie de l'entraînement
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