Le sport et les femmes
p. 23-28
Résumé
« Place aux femmes » titrait un grand quotidien sportif à propos du championnat d’Europe féminin de basket en septembre 2001. Un tel souhait semble insolite... et suggère que le fait est rare. Qu’en est-il ?
Les femmes sont de plus en plus nombreuses à pratiquer des activités physiques et sportives. En 2000, hommes et femmes « sportifs » âgés de 15 à 75 ans se répartissent à peu près à égalité : 55 % d’entre elles « font du sport » au moins 1 fois par semaine contre 65 % des hommes [1]. La marche, le vélo, la natation et la gymnastique sont les disciplines les plus fréquemment citées par les femmes ; pour leurs homologues masculins, il faut ajouter aux trois premiers cités les sports de boules, le football et le « jogging ».
Les femmes sont deux fois moins nombreuses que les hommes à détenir une licence sportive, et trois fois moins nombreuses à participer à des compétitions sportives.
Alors qu’elles sont globalement majoritaires dans le corps enseignant, elles sont relativement moins présentes dans l’enseignement de l’éducation physique et sportive, et sont minoritaires dans l’animation sportive. Leur accès à des postes de responsabilité au sein des organisations sportives est encore exceptionnel : cela se vérifie aussi bien dans les instances administratives, techniques que politiques.
Texte intégral
1La population française compte aujourd’hui 25 millions de femmes de 15 ans et plus, soit davantage que les hommes du même âge (23,4 millions). De plus en plus nombreuses à se présenter sur le marché du travail au cours des 20 dernières années, elles sont 10,5 millions à être actives contre 13 millions pour les hommes. Cependant, comparées aux hommes, elles sont relativement plus fréquemment salariées à temps partiel ou sur des contrats à durée déterminée, plus souvent au chômage et y restent plus longtemps. Or elles ont en moyenne une meilleure formation initiale [2].
48 % des « pratiquants sportifs » en 2000 sont des femmes
2En 2000, 79 % des femmes et 88 % des hommes de 15 à 75 ans déclarent pratiquer des activités physiques et sportives définies selon un concept large (voir « pour comprendre ces résultats » p. 26). La déclaration n’est faite spontanément que par 54 % des femmes, mais par 69 % des hommes. À l’origine de cette différence d’appréciation, deux raisons principales : d’une part la pratique des femmes est plus autonome, c’est-à-dire moins liée à l’adhésion à une structure sportive, et d’autre part elles optent pour des disciplines qui, notamment après 50 ans, relèvent davantage de l’entretien de la forme physique que de la pratique intensive d’un sport (Tabl. 1). Ainsi un peu moins de 18 millions de femmes ont au moins une activité physique et sportive.
Tableau 1 – Taux de pratique sportive selon l’âge en % de la classe d’âge concernée1
FEMMES | HOMMES | |
15/29 ans | 90 | 96 |
30/39 ans | 82 | 89 |
40/49 ans | 81 | 85 |
50/59 ans | 73 | 84 |
60/69 ans | 71 | 83 |
70/75 ans | 59 | 66 |
Ensemble | 79 | 88 |
3Les disciplines très diverses déclarées ont été regroupées en une quarantaine de familles (voir encadré 1). Les plus fréquemment citées par les femmes sont la marche (notion de marche « ballade » distincte de la marche sportive), la natation, le vélo, la gymnastique (Tabl. 2). Ces trois premières activités sont également les plus signalées par les hommes. Cependant l’ordre est différent, et surtout s’y ajoutent d’autres sports, les sports de boules, le football, premier sport collectif et le « jogging ».
4À l’inverse, la gymnastique, la danse, le patinage artistique seraient l’apanage des femmes. Les activités dans lesquelles les « sportives » sont majoritaires sont le plus souvent des disciplines individuelles (Tabl. 3). Celles-ci, comme la gymnastique ou le patinage artistique, sont nettement moins médiatisées que les sports dominés par les hommes, tels que le football et le rugby. Selon le conseil supérieur de l’audiovisuel, en 1999 plus de 850 heures d’antenne sur les chaînes hertziennes ont été consacrées au football et au rugby, contre 30 à la gymnastique et au patinage artistique.
Tableau 3 – Les activités dans lesquelles les femmes sont majoritaires
ACTIVITES REGROUPEES | Nombre total d’activités en millions | Femmes en % |
Gymnastique | 5,2 | 79 |
Danse | 1,3 | 80 |
Patinage glace | 0,5 | 71 |
Equitation | 0,9 | 60 |
Marche | 18,6 | 57 |
Natation | 15,3 | 53 |
5Les femmes, lorsqu’elles pratiquent une activité, le font beaucoup plus fréquemment que les hommes en dehors des clubs et des associations : 22 % des « sportives » déclarent appartenir à un club contre 32 % des hommes. Cette différence de comportement existe à tous les âges.
ENCADRÉ 1
Pratiquants et activités regroupées
Les personnes interrogées sur leurs pratiques physiques et sportives ont cité des activités détaillées (près de 200). Aussi a-t-il été nécessaire de les regrouper en un nombre de familles restreint, pour obtenir des effectifs suffisants dans chaque famille. Des disciplines proches ont été réunies au sein de chaque famille pour obtenir des groupes cohérents.
Si pour le football, le rugby et les sports collectifs en général, activités détaillées et activité regroupée sont très proches, les familles telles que « vélo », « marche », « natation » rassemblent des disciplines variées.
Par exemple, la gymnastique inclut ici aussi bien la gymnastique artistique que la gymnastique d’entretien, le stretching, le yoga... Une femme déclarant faire du yoga et de la gymnastique artistique est comptée pour un dans les pratiquants de gymnastique. Mais, au sein de la famille gymnastique, yoga et gymnastique artistique constituent deux activités distinctes. Les 3,5 millions de femmes ayant cité au moins une activité de gymnastique (tabl. 2) pratiquent 5,2 millions d’activités (tabl. 3) relevant de la famille « gymnastique ».
6Elle est en partie due à la nature des disciplines choisies : il est plus facile de faire de la marche ou de la natation en dehors d’une organisation que pratiquer le rugby ou les arts martiaux... Un peu moins de 15 % des femmes et 32 % des hommes entre 15 et 75 ans qui font du sport sont licenciés.
7Pour l’ensemble de la population, y compris les jeunes de moins de 15 ans, près de 14 millions de licences ont été délivrées en 2000, et environ 33 % sont détenues par des femmes (Tabl. 4). Cependant les femmes sont le plus souvent minoritaires dans les fédérations les plus importantes (Tabl. 5).
Tableau 4 – Les licences sportives délivrées en 2000
FEDERATIONS SPORTIVES | Nombre de licences en milliers | Femmes en % |
Unisport olympiques | 6 627 | 27 |
Unisport non olympiques | 2 407 | 18 |
Multisports scolaires et universitaires | 2 552 | 44 |
Multisports handicapés | 39 | 34 |
Multisports affinitaires et groupements nationaux | 2 260 | 64 |
Ensemble des fédérations | 13 886 | 33 |
8Deux fois moins nombreuses parmi les licenciés de 15 ans et plus, les femmes sont trois fois moins nombreuses que les hommes dans les compétitions, officielles ou non (« pour comprendre ces résultats » p. 26) : 2 millions de femmes pour 6,4 millions d’hommes. Elles sont en moyenne nettement plus jeunes qu’eux : 30 ans contre 35 ans. La compétition officielle attire 5 % des « sportives » et 20 % des « sportifs ». Cette faible participation des femmes à la compétition peut s’expliquer en partie par le manque de disponibilité des femmes lié souvent à la double contrainte familiale et professionnelle. Au quotidien, les femmes disposent en moyenne de 40 minutes de temps libre de moins que les hommes [2].
L’enseignement, l’animation et la diffusion du sport restent du domaine des hommes
9Outre le rôle de l’histoire et du partage des rôles entre les sexes, les choix sportifs des femmes sont aussi liés à l’approche du sport dans leur enfance ou leur adolescence. L’égale accessibilité à la pratique sportive commence à l’école, avec l’enseignement de l’éducation physique et sportive : les fonctions d’enseignement qui relèvent de l’éducation nationale (professeurs d’éducation physique et sportive) sont assurées par prés de 32 000 agents publics dont 46 % sont des femmes. Ce pourcentage varie peu et s’avère plutôt faible comparé au poids des femmes dans le corps enseignant, autour de 60 % pour les certifiés et agrégés.
10Alors qu’à l’université plus de la moitié des étudiants sont des femmes, la filière STAPS (Sciences et techniques des activités physiques et sportives) compte 32 % de femmes en 2000 (contre 38 % en 1994) [3]. La place des femmes est encore plus faible parmi les professeurs de sport, dépendant du ministère de la Jeunesse et des Sports, remplissant le plus souvent des fonctions de conseil technique ou d’animation : 17 %.
11Ce département ministériel délivre également des brevets d’Etat d’éducateurs sportifs (BEES), environ 8 000 du 1er degré (niveau IV de qualification), et quelques centaines du second degré (niveau II). Les premiers permettent notamment d’accéder au statut d’éducateur dans la filière sportive de la fonction publique territoriale, et les seconds à celui de conseiller pour les activités physiques et sportives. En 2000, 27 % des BEES du 1er degré délivrés l’ont été à des femmes. Les sports d’expression et de maintien, les activités équestres et les activités de la natation concentrent 70 % des diplômes obtenus par celles-ci. La part des femmes dans les sports collectifs ou les sports d’opposition est dérisoire. On trouve seulement 15 % de femmes parmi les détenteurs du 2e degré de ce brevet (Tabl. 6).
ENCADRÉ 2
La place des femmes dans le haut niveau
Parmi les 6 000 sportifs de haut niveau, sportifs licenciés placés par leur fédération sportive dans une logique de performance au sein des Equipes de France lors des grandes compétitions internationales, on compte un tiers de femmes.
En janvier 2001, la Commission nationale du sport de haut niveau s’est prononcée pour la suppression de la distinction entre les pratiques masculines et féminines dans la procédure de reconnaissance des disciplines de haut niveau.
Au fil des années, la participation des femmes aux jeux olympiques (JO) s’est accrue. L’ouverture de nouvelles épreuves féminines plus nombreuses que les nouvelles épreuves masculines à l’occasion de chaque olympiade permet de combler le retard entre hommes et femmes. Ces dernières représentaient 11 % des athlètes aux JO de Rome en 1960, 21 % aux JO de Moscou en 1980 et 38 % aux JO de Sydney en 2000.
Lors des championnats du monde d’athlétisme en 2001, les femmes ont pu disputer de nombreux titres qui ne leur étaient pas ouverts 18 ans auparavant ; le dernier titre à conquérir, « le 3 000 m steeple », leur sera ouvert en 2003.
Les femmes accèdent rarement aux responsabilités techniques ou politiques
12Parmi les cadres techniques placés auprès des fédérations en 2000, les femmes représentent 12 % des conseillers techniques sportifs (114 sur 1 191), elles occupent 9 % des postes d’entraîneur national (34 sur 361) et 4 % de ceux de directeur technique national (2 sur 49).
13Après les élections de 2000/2001, 4 fédérations sportives sur 101 ont une femme pour présidente : la course d’orientation, l’équitation, la Fédération française pour l’Entraînement physique dans le monde moderne (FFEPMM) et la Fédération sportive des sourds de France.
14À la suite des élections municipales de 2001, dans les 100 communes chefs lieux de départements, 12 femmes occupent le poste d’adjoint chargé des sports contre 7 en 1997.
15La place des femmes dans le sport certes progresse, mais très lentement.
16Mission statistique
POUR COMPRENDRE CES RÉSULTATS
17Les résultats sur la pratique sportive des femmes et des hommes sont issus des données de l’enquête « pratiques sportives 2000 » du ministère de la Jeunesse et des Sports et de l’Institut National du Sport et de l’Éducation Physique, menée en juillet 2000 auprès d’un échantillon de 6 526 personnes représentatif de la population âgée de 15 ans à 75 ans révolus se trouvant en France métropolitaine ou dans les DOM (par l’institut CSA).
Le concept de pratique sportive est très large
18Il est employé quelle que soit la fréquence déclarée de pratique d’activités physiques et sportives au cours d’une année.
La compétition au sens de l’enquête
19Le mot compétition recouvre :
les compétitions officielles organisées dans le cadre des activités des fédérations sportives, avec une licence,
les manifestations sportives avec classement mises en place par tout type d’organisateur, avec ou sans licence requise. Leurs résultats ne débouchent pas sur des titres fédéraux. Par exemple : les marathons, les tournois de tennis, etc.
les rassemblements, organisés de façon spontanée ou par des associations, qu’elles soient affiliées ou non au mouvement sportif, par exemple, les rassemblements de roller, etc.
L’appartenance à un club ou à une association au sens de l’enquête
20La question posée est « êtes vous membre d’un club ou d’une association ? ». En conséquence, même employé seul, le mot « club » désigne un club ou une association.
21Appartenir à un club ou une association n’implique pas une prise de licence délivrée par une fédération. Inversement les personnes interrogées peuvent être titulaires d’une licence sans se considérer membre d’un club sportif ou d’une association sportive.
Bibliographie
RÉFÉRENCES
[1] La France Sportive.- Premiers résultats de l’enquête « Pratiques sportives 2000 », MJS - STAT Info no 01 -01 mars 2001
[2] Femmes et hommes. Regards sur la parité.- édition 2001, INSEE - Statistique publique
[3] Les sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS), DPD note d’information no 01-39 – Août 2001
[4] Assises nationales Femmes et Sport.- 29 et 30 mai 1999 – Actes –, Ministère de la Jeunesse et des Sports
[5] « En 2000, les femmes représentent un tiers des dirigeants sportifs ».- Insee Rhône-Alpes – Résultats no 87, septembre 2001
[6] Rencontre Régionale du Sport en Midi-Pyrénées « Femmes et Sport ».- 18 mai 2000 – Actes –, Direction régionale et départementale de la Jeunesse et des Sports
Notes de bas de page
1 Proportion d’individus ayant déclaré pratiquer au moins 1 activité physique et sportive
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Données et études statistiques : jeunesse, sports et vie associative
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