Thème 20. La perte de masse grasse
p. 471-481
Texte intégral
Questions et réponses
Points clés
■ Pour les sportifs de haut niveau, qui supportent généralement une charge d’entraînement journalière élevée, réduire les apports énergétiques quotidiens plutôt que d’accroître la dépense énergétique constitue la stratégie la plus simple à mettre en place.
■ Sur le plan qualitatif, la meilleure stratégie nutritionnelle pour perdre de la masse grasse consiste à :
– réduire la consommation des aliments gras, salés et sucrés,
– supprimer toute consommation d’alcool,
– réduire la consommation des glucides, sans néanmoins descendre en dessous de 4 g de glucides par jour et par kilo de poids de corps, en privilégiant les aliments à index glycémique élevé,
– maintenir les apports protéiques pour limiter la perte de masse musculaire, mais ce, en préservant de bons apports en micronutriments.
■ Il est recommandé, d’une part, de prendre le temps de rester à table (entre 40 et 45 minutes) pour favoriser la sensation de satiété, et d’autre part, de répartir ses apports au cours de la journée plutôt que de les regrouper à l’occasion des trois repas.
■ La perte de poids ne doit pas dépasser 1 kg par semaine (environ 1,5 % du poids). Au-delà de ce seuil, la perte de poids s’explique principalement par la déshydratation et une perte de masse musculaire, l’un comme l’autre ayant un effet néfaste sur la performance.
■ Il est important de se fixer des objectifs raisonnables de perte de poids et de limiter les périodes de régime durant l’année. Des restrictions alimentaires chroniques ne peuvent pas laisser espérer une bonne santé et un haut niveau de performance.
Comment contrôler l’alimentation pour perdre de la masse grasse ?
1Les variations de la masse corporelle du sportif dépendent de sa balance énergétique. Cette dernière représente la différence entre les apports énergétiques alimentaires et les dépenses consécutives, d’une part, au fonctionnement basal de l’organisme, et d’autre part, aux entraînements. Pour perdre du poids, il est nécessaire que cette balance soit négative (c’est-à-dire que les apports caloriques soient quotidiennement inférieurs à la quantité d’énergie dépensée) lors d’une période suffisamment prolongée.
2Deux stratégies principales possiblement complémentaires sont ainsi envisageables. La première consiste à augmenter la charge d’entraînement, en volume et/ou en intensité, sans modifier son comportement alimentaire habituel. Pour des sportifs de haut niveau, cette stratégie est cependant souvent difficile à mettre en œuvre, du fait de la charge d’entraînement quotidienne déjà très élevée. La seconde stratégie, qui consiste à perdre du poids en réduisant la quantité calorique apportée par l’alimentation, apparaît plus adaptée, ce d’autant plus qu’il est possible d’en accroître les effets en améliorant conjointement la qualité des apports alimentaires.
3Pour être efficace, un régime restrictif doit donc permettre de réduire les apports caloriques quotidiens, tout en assurant des apports suffisants en glucides, protéines et micronutriments. Des études scientifiques ont ainsi montré que les apports énergétiques pouvaient être quotidiennement réduits de 500 à 1 000 kcal pour favoriser la perte de poids (sans toutefois être inférieurs à 2 000 kcal, pour préserver la santé du sportif). Il s’agit donc de :
Préserver des apports glucidiques suffisants. S’il est recommandé de réduire les apports quotidiens en glucides lors d’un régime alimentaire destiné à perdre de la masse grasse, ceux-ci doivent néanmoins rester supérieurs à 4-5 g.kg-1.j-1 pour garantir la synthèse de l’hormone de croissance, préserver le système immunitaire et maintenir le niveau de performance du sportif. Lors des repas, il est préférable de privilégier des glucides à indice glycémique élevé et des aliments riches en fibres, afin de favoriser une sensation prolongée de satiété et de limiter les envies de grignotage. L’absorption de glucides à index élevé ne doit être envisagée que durant et après les séances d’entraînement, puisque c’est uniquement dans ces contextes particuliers qu’ils seront respectivement directement consommés ou utilisés pour restocker les réserves en glycogène.
Maintenir des apports protéiques adaptés. Lors d’un régime restrictif, un apport protéique suffisant doit nécessairement être assuré pour préserver la masse musculaire du sportif. À défaut, un phénomène d’atrophie peut être constaté, lequel engendrera une baisse des qualités de force et de vitesse du sportif. À cet égard, il paraît judicieux de programmer une collation riche en acides aminés ramifiés à l’issue des séances d’entraînement qui engendrent des dommages musculaires importants, afin de limiter les mécanismes de dégradation des protéines post-exercice.
Assurer des apports en micronutriments suffisants. Les micronutriments (vitamines, minéraux et oligoéléments) interviennent dans toutes les grandes fonctions physiologiques de l’organisme, notamment dans celles que sollicite fortement l’exercice physique (métabolisme énergétique, immunité, transmission nerveuse...). Il convient donc, lors d’un régime restrictif, d’en maintenir un apport suffisant par l’alimentation. Pour y parvenir simplement, il est notamment intéressant de privilégier une consommation importante de fruits et légumes, très riches et présentant l’avantage conjoint de posséder une densité calorique faible.
Limiter les aliments gras, sucrés et salés. La quantité d’énergie calorique apportée par un gramme de lipide (9 kcal) est plus de deux fois supérieure à celle contenue dans un gramme de glucide (4 kcal). On comprend donc aisément que les apports lipidiques sont ceux qu’il est nécessaire de limiter lors d’un régime alimentaire restrictif destiné à perdre de la masse grasse, d’autant que les réserves en lipides de l’organisme sont très importantes, y compris chez des sportifs présentant une masse grasse faible. Dans la littérature scientifique, il est ainsi généralement conseillé de faire passer de 30-35 % à 20 % des apports caloriques journaliers la contribution des lipides à l’énergie totale apportée par l’alimentation. Dans la mesure où certains lipides ont un rôle structurel et interviennent dans la synthèse des anticorps ou encore de certaines hormones, il conviendra toutefois de ne pas totalement limiter leurs apports, en veillant notamment à maintenir la consommation de certaines huiles de haute qualité (huile de colza, huile d’olive...) et la consommation régulière de poissons gras (saumon, thon, maquereau...).
-Supprimer toute consommation d’alcool. L’alcool représente en soi une source d’énergie non négligeable, puisque l’éthanol a une densité énergétique de 7,1 kcal.g-1 (contre seulement 4 kcal.g-1 pour les glucides et les protéines). La consommation d’alcool est donc susceptible de majorer les apports énergétiques du sportif (Cf. Fiche no 13 Les effets de l’alcool, p. 375). Malheureusement, l’alcool a également des effets indirects sur le métabolisme, puisqu’il réduit l’oxydation des graisses, favorise l’augmentation de la taille des adipocytes (i.e. les cellules graisseuses) et accroît la concentration des triglycérides dans le sang. En d’autres termes, boire de l’alcool favorise une balance lipidique positive et, en conséquence, l’augmentation de la masse grasse à moyen terme, notamment au niveau abdominal. Ce constat est d’autant plus vrai que la consommation d’alcool est fréquemment associée à l’ingestion d’aliments gras et sucrés, qui ne font que renforcer davantage ces effets néfastes de l’alcool sur la composition corporelle et le poids. Limiter la consommation d’alcool s’impose donc comme une règle incontournable pour les sportifs soucieux de réduire leur masse grasse.
Pourquoi la vitesse à laquelle on mange et la fréquence des repas influencent-elles la perte de poids ?
4Des études ont montré que la vitesse à laquelle est consommé un repas influence le comportement alimentaire dans les heures qui le suivent. Ainsi, plus un individu mange rapidement, plus il aura tendance à grignoter avant le repas suivant. Il est donc recommandé de prévoir un temps passé à table suffisant (au minimum, de 30 à 35 minutes ; dans l’idéal, entre 40 et 45 minutes) et ce, plus encore lors des régimes restrictifs, où l’envie de grignoter peut être encore plus pressante.
5D’autres travaux ont par ailleurs mis en évidence que la fréquence des repas influence la composition corporelle pour un apport calorique quotidien donné. Leurs résultats ont ainsi révélé que les individus qui répartissent leurs apports alimentaires en quatre à six prises quotidiennes, plutôt qu’en trois, présentent une meilleure composition corporelle (i.e. un taux de masse grasse plus faible). Ce type de stratégie permettrait en effet de stimuler le métabolisme, de diminuer la faim et le grignotage, tout en favorisant le contrôle de la glycémie et de la production d’insuline. Si aucune étude n’a encore interrogé l’influence de la répartition quotidienne des prises chez des sportifs à l’occasion d’un régime restrictif, ces données laissent penser qu’il pourrait être intéressant de répartir les prises alimentaires en programmant des collations plutôt que de se limiter aux traditionnels trois repas. Enfin, ces résultats soulignent qu’il n’est pas judicieux de supprimer le petit déjeuner pour parvenir à perdre du poids.
À quelle vitesse est-il préférable de perdre du poids en contrôlant son alimentation ?
6Des études montrent que la perte de poids doit être de 0,5 à 1 kg par semaine (environ 1 à 1,5 % du poids de corps) pour être efficace, c’est-à-dire pour se caractériser par une baisse de la masse grasse. Rechercher une perte de poids plus rapide n’apparaît pas profitable, dans la mesure où cela s’explique alors principalement par la déshydratation chronique et des carences nutritionnelles majeures, qui engendrent une baisse importante de la capacité à s’entraîner et une réduction de la masse musculaire. Une étude récente a d’ailleurs confirmé ce résultat en comparant l’effet d’une perte rapide de 5 kg (en quatre semaines) à une stratégie d’amaigrissement plus lente (en douze semaines). Pour les deux groupes, une séance hebdomadaire de musculation avait de plus été programmée pour limiter les risques d’atrophie musculaire. Les résultats ont montré que les sportifs du groupe « perte lente » avaient perdu 5 kg en diminuant davantage leur masse grasse que les sujets du groupe « perte rapide », et ce, tout en augmentant significativement leur masse musculaire. Il ressort ainsi que le sportif doit anticiper longtemps à l’avance une perte de poids, afin qu’il n’y ait pas de baisse du niveau de performance. Ces données suggèrent par ailleurs qu’il est préférable de limiter les variations de poids au cours de la saison dans les sports où le poids est un critère de performance.
Quels sont les risques, pour le sportif, d’une restriction prolongée des apports caloriques ?
7S’il est normal de veiller au contrôle de son poids dans de nombreuses disciplines sportives et de planifier des régimes restrictifs lorsqu’il dépasse exagérément le poids optimal pour la pratique de son activité, il convient néanmoins de toujours garder en tête que ces pratiques doivent demeurer contrôlées. Plusieurs études épidémiologiques ont en effet mis en exergue que la pratique du sport de haut niveau s’accompagne d’une prévalence des troubles du comportement alimentaire. Dans cette perspective, il est important d’encadrer les régimes restrictifs mis en place par les athlètes pour s’assurer que ceux-ci ne sont pas trop drastiques ou prolongés. Des restrictions caloriques chroniques trop importantes (apport énergétique quotidien inférieur à 2 000 kcal) peuvent en effet mettre en danger la santé du sportif (Cf. Fiche no 7 Les troubles des conduites alimentaires, p. 294).
En pratique
1. Améliorez la qualité des apports alimentaires
2. Jouez sur la quantité des apports alimentaires
3. La perte de poids : première stratégie
La composition du petit déjeuner
La composition du déjeuner et du dîner
Le choix des aliments
4. Si la perte de poids est insuffisante : stratégie 2
8Ce sont les mêmes éléments que pour la première stratégie. Seule la répartition change : le déjeuner et le dîner sont, chacun, scindés en deux prises.
9 Appliquez un plan hydrique adapté.
La répartition des repas de la journée
Recette
Dos de cabillaud poché aux aromates, tian de légumes niçois
10Pour 2 personnes
11Préparation : 30 minutes
12Cuisson : 45 minutes
13Difficulté :
Tian de légumes
14■ 2 tomates moyennes
15■ 1 oignon doux
16■ 1 courgette verte
17■ 1 courgette jaune
18■ 1 aubergine violette
19■ 1 gousse d’ail écrasée
20■ 10 g d’huile d’olive
21■ Thym frais
22■ Sel, poivre
23Préchauffer le four à 180 °C.
24Laver les légumes et les couper en tranches.
25Dans un plat à gratin, disposer les rondelles de légumes en alternant tomate, oignon, courgette, aubergine. Bien les serrer.
26Arroser d’un filet d’huile d’olive et disposer sur le dessus l’ail écrasé et le thym effeuillé.
27Assaisonner légèrement.
28Cuire au four pendant 40 minutes.
Le cabillaud
29■ 2 dos de cabillaud avec la peau (140 g chacun)
30■ 1 étoile de badiane
31■ 1 feuille de laurier
32■ 1 branche de thym
33■ 15 g de gros sel
34Désarêter les pavés de cabillaud. Les conserver au froid.
35Faire chauffer 1 litre d’eau dans une casserole, ajouter la badiane, le laurier, la branche de thym et le gros sel. Laisser infuser quelques minutes à petit frémissement.
36Plonger les pavés de cabillaud 8 minutes dans l’eau frémissante.
37Égoutter.
Montage
38■ 5 g de feuilles de basilic
39■ 10 g d’aneth
40■ 10 g de cerfeuil
41■ 5 g de ciboulette
42■ 5 g d’huile de colza
43■ 5g d’huile de noix
44■ 10 g d’olives noires
45Disposer le tian de légumes dans l’assiette.
46Poser le cabillaud sans la peau avec la petite salade d’herbes assaisonnée et les olives.
Commentaire
47Ce plat n’apporte que 45 Cal pour 100 g, ce qui correspond à une densité énergétique faible (nombre de calories pour 100 g). Il est riche en protéines, nécessaires pour prévenir la perte de masse musculaire au cours d’une période de perte de poids. Il constitue également une source intéressante de vitamines et de minéraux (vitamines du groupe B, vitamine C, vitamine E, iode, potassium, magnésium). Pour compléter l’apport un peu faible en glucides, on peut accompagner ce plat de quelques tranches de pain complet ou aux céréales, et terminer par un fruit.
Analyse nutritionnelle par personne
Énergie (Cal) | Glucides (g) |
320 | 19 |
Lipides (g) | Protides (g) |
12 | 34 |
Auteurs
PhD. Service Recherche, Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (INSEP), 11, avenue du Tremblay, 75012 Paris, Mission « Nutrition » à l’INSEP
Service médical – INSEP, Mission « Nutrition » à l’INSEP
Diététicienne-nutritionniste, Mission « Nutrition » à l’INSEP
PhD. Service Recherche, Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (INSEP), 11, avenue du Tremblay, 75012 Paris, Mission « Nutrition » à l’INSEP
Diététicien-nutritionniste, Mission « Nutrition » à l’INSEP
PhD. Centre national de rugby (PDMS), Marcoussis, Mission « Nutrition » à l’INSEP
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