Chapitre 3. Ni seuls ni en couple
Les relations amoureuses non cohabitantes
p. 87-112
Note de l’éditeur
Une première version de ce chapitre est parue une première fois sous le titre « Neither single, nor a couple. A study of living apart together in France », A. Régnier-Loilier, É. Beaujouan, C. Villeneuve-Gokalp in Demographic Research, vol. 21, article 4, 2009, et est reproduites ici avec l’aimable autorisation de la revue.
Texte intégral
1En France, les formes de vie conjugale se sont diversifiées depuis une quarantaine d’années. Le principal changement par son ampleur a été le développement des unions hors mariage à partir de 1972, d’abord comme mode d’entrée en union, puis comme forme d’union stable. Dès le début des années 1990, neuf couples sur dix se mettaient en ménage sans être mariés et, dix ans plus tard, la moitié des premières naissances avait lieu hors mariage. En 1999, le Pacte civil de solidarité (Pacs) a été créé pour offrir un cadre institutionnel aux couples cohabitants qui ne souhaitaient pas le mariage ou aux couples homosexuels qui n’y avaient pas accès. Son succès est croissant, et environ 148000 Pacs ont été célébrés en 20082. Depuis une vingtaine d’années, sociologues et démographes sont attentifs à une autre forme d’union, celle des couples qui ne vivent pas ensemble en permanence. Ce mode de vie conjugale peut autant concerner des personnes qui n’ont contracté aucun lien légal que des couples mariés.
2Les études réalisées dans les pays occidentaux sur ce que les Anglo-Saxons désignent par Living apart together (LAT) ont pour objectif d’évaluer la fréquence de ces unions, leur évolution et leurs motivations. Réalisées à partir d’enquêtes qui posent une question sur l’existence d’un partenaire non cohabitant, ces études se heurtent à un problème de définition. La plupart des auteurs proposent une série de questions mêlant critères objectifs et critères subjectifs : existence d’une résidence commune, ancienneté de la relation, choix ou contrainte de la séparation, etc. Cependant, le principal inconvénient de ces méthodes est la nécessité de poser de (trop) nombreuses questions. Levin et Trost (1999) proposent comme définition « deux conjoints qui ont chacun leur propre logement, dans lequel d’autres personnes peuvent résider, qui se définissent eux-mêmes comme un couple et pensent que leur entourage les perçoit comme tel ». Haskey (2005) suggère pour sa part de décrire en quelques phrases une relation de LAT (sur des critères restant à définir) et de demander aux répondants de situer leur adhésion à cette définition sur une échelle de corésidence.
3En 1986, pour la première fois en France, une enquête Ined-Insee s’intéressait à ces couples. L’enquête Situations familiales indiquait que 2 % des personnes mariées et 7 % des personnes qui avaient déclaré être « en couple » non marié avaient « toujours conservé deux domiciles ». Proches d’eux par la séparation résidentielle et leur engagement amoureux, un quart des hommes et un tiers des femmes qui se présentaient comme des personnes « seules » déclaraient avoir « une relation amoureuse stable » (Leridon et Villeneuve-Gokalp, 1988). Huit ans plus tard, une nouvelle enquête sur les Situations familiales et l’emploi (ESFE, 1994), réalisée par l’Ined et l’Insee auprès des 20-50 ans s’intéressait de nouveau à ces relations non cohabitantes ou semi-cohabitantes (chacun des conjoints a sa résidence personnelle, mais ils peuvent occuper ensemble l’une d’elles une partie du temps). Il en ressortait qu’elles ne s’étaient pas développées depuis 1986. Relativement fréquente en début d’union, la séparation résidentielle était rarement maintenue parce qu’elle restait plus souvent contrainte que choisie, aussi bien par les personnes qui considéraient « être en couple » que par celles qui se présentaient comme « seules » (Villeneuve-Gokalp, 1997). En outre, chez les plus jeunes, le désir d’indépendance ne résistait pas longtemps à l’annonce d’une naissance3 et à la charge financière de deux logements. À quelques exceptions près, la séparation résidentielle n’était pérenne que pour ceux qui avaient déjà « l’expérience d’une rupture » et ne souhaitaient plus d’enfants. L’enquête ESFE montrait également que les principales différences entre relations conjugales non cohabitantes et relations amoureuses stables portaient sur les projets et la fréquence des rencontres : six couples sur dix avaient le projet de vivre ensemble dans les deux ans, contre 45 % des « amoureux » et les premiers étaient plus nombreux que les seconds à se voir tous les jours (41 % contre 25 %). En revanche, la répartition entre séparation résidentielle contrainte ou choisie ne différait que de 10 % (Villeneuve-Gokalp, 1997). La manière de définir la relation dépendait fortement de l’âge et du passé des partenaires : ceux qui avaient déjà vécu en couple ou qui étaient plus âgés et pouvaient avoir connu plus d’expériences sentimentales se présentaient plus souvent comme un couple que les plus jeunes. Le début de leur relation était aussi plus ancien. De ces biographies différentes, il résulte que 42 % des personnes qui évoquaient des engagements amoureux avaient entre 21 et 24 ans et les deux tiers entre 21 et 30 ans. Au contraire, parmi les personnes en couple non cohabitant, seulement 40 % avaient moins de 30 ans.
4L’allongement des études, le développement des valeurs individualistes (de Singly, 2000 ; Kaufmann, 1999), l’augmentation des ruptures des deuxièmes unions, mais aussi l’abondance des reportages sur ces couples qui ne vivent pas ensemble ont-ils finalement favorisé le développement d’un mode de relations plus indépendantes ? L’enquête Erfi de 2005 s’est intéressée à son tour aux relations avec deux domiciles. Néanmoins, les questions permettant de savoir si les partenaires considèrent qu’ils forment ou non un couple n’étaient pas posées4. Leur absence empêche d’observer, par une comparaison avec les enquêtes de 1986 et 1994, une éventuelle évolution de la définition du couple qui serait indépendante de la cohabitation5. Mais une comparaison de l’ensemble des relations non cohabitantes entre ESFE et Erfi reste possible si l’on regroupe les couples non cohabitants et les relations amoureuses stables dans ESFE6. Les différences observées entre les deux enquêtes ne sont pas significatives : parmi les 21-49 ans, sept personnes sur dix résident avec un conjoint et une sur dix se sent liée durablement à un partenaire non cohabitant. Non seulement la proportion de personnes engagées dans une relation stable n’a pas augmenté quelle que soit la tranche d’âge considérée (figure 1), mais encore l’ancienneté de ces relations est identique, de même que la fréquence des rencontres des partenaires et leur perception du caractère choisi ou contraint de leur éloignement.
Figure 1. Proportion de personnes en couple cohabitant et en couple non cohabitant en 1994 et 2005, selon l’âge

Champ : ensemble de la population des 21-49 ans.
Sources : Ined-Insee, Erfi-GGS1, 2005 ; Ined-Insee, ESFE, 1994.
5Dans un premier temps, nous dégagerons à partir d’Erfi les principales caractéristiques des personnes âgées de 18 à 79 ans engagées dans une relation stable non cohabitante (sexe, âge, situation d’activité mais aussi histoire conjugale et génésique) et nous nous intéresserons aux raisons qu’elles donnent à leur séparation résidentielle. Puis, à partir d’une analyse des correspondances multiples (ACM), nous dégagerons différents profils-types de ces personnes afin d’étudier les caractéristiques de la relation et les projets des conjoints.
I. Les caractéristiques des partenaires et les raisons d’une séparation résidentielle
6Pourquoi deux personnes qui se sentent liées l’une vis-à-vis de l’autre par un sentiment amoureux solide ne vivent-elles pas ensemble ? La connaissance des caractéristiques démographiques et professionnelles des personnes engagées dans cette forme d’union est un préalable nécessaire à sa compréhension. En effet, ce mode de relations est adopté par des personnes très différentes et dont les caractéristiques semblent correspondre à des étapes de la vie : des jeunes attendant d’accéder à l’autonomie financière pour quitter le domicile parental ; des femmes vivant seules avec leurs enfants après une séparation ; des personnes plus âgées, souvent veuves, souhaitant préserver leur indépendance. La diversité des situations permet d’interpréter les motivations données par les intéressés.
1. Ni seuls ni en couple, qui sont-ils ?
7La proportion de personnes âgées de 18-79 ans vivant une relation stable non cohabitante est de 8 %, la même pour les hommes et pour les femmes (soit un peu plus de 3,8 millions d’individus) ; mais elle varie fortement avec l’âge, le statut matrimonial, l’histoire conjugale et génésique.
a. Plus souvent des jeunes
8L’âge médian à la première union a augmenté légèrement au fil des générations, passant de 23,3 ans pour les hommes et 22,2 ans pour les femmes des générations 1946-1950, à respectivement 25,2 ans et 23 ans pour les générations 1976-1980. Mais on ne quitte pas pour autant le foyer parental plus tardivement qu’il y a une trentaine d’années (Régnier-Loilier, 2006) et, lorsqu’on le quitte, c’est moins fréquemment pour s’installer avec un conjoint (voir le chapitre 16). Une période s’intercale ainsi, durant laquelle les jeunes « s’essayent » à la relation amoureuse jusqu’à la rencontre du premier partenaire avec lequel ils penseront « faire couple » avant même de vivre éventuellement avec lui/elle. Être ensemble « chacun chez soi » (Villeneuve-Gokalp, 1997), est d’abord un mode de relation qui concerne les plus jeunes : 26 % des hommes et 31 % des femmes entre 18 et 24 ans et encore 15 % et 12 % (respectivement) entre 25 et 29 ans, contre 8 % de l’ensemble des 18-79 ans. Les amoureux non cohabitants sont ainsi plus jeunes (les hommes sont en moyenne âgés de 34 ans et les femmes de 35 ans) que les personnes vivant en couple cohabitant (49 et 47 ans) ou seules (38 et 49 ans) (tableau 1).
9Parce qu’il est adopté majoritairement par des jeunes, ce type de relation apparaît pour une large part comme transitoire à un moment charnière de la vie, entre études et activité, entre foyer parental et autonomie résidentielle, entre dépendance et indépendance financière. De fait, beaucoup vivent encore chez leurs parents (37 % des hommes et des femmes), situation rarissime chez les couples cohabitants (dans moins de 1 % des cas, le couple réside chez les parents de l’un des conjoints, et le plus souvent la situation est inverse : le couple accueille le parent devenu dépendant). Par ailleurs, lorsqu’ils vivent seuls et en dehors du foyer parental, tous ne sont pas en situation d’indépendance vis-à-vis de leurs parents, notamment lorsqu’ils sont étudiants : 90 % des ménages d’étudiants se situeraient au-dessous du seuil de pauvreté, proportion qui tombe à 20 % quand on ajoute les ressources des parents (Robert-Bobée, 2002). À titre d’indicateurs, 21 % vivent dans un logement d’une seule pièce contre moins de 5 % de l’ensemble des personnes interrogées et seulement 80 % d’entre eux possèdent un lave-linge contre 96 % de l’ensemble des personnes interrogées. En outre, si l’un des amoureux vit dans un logement indépendant, ce n’est pas nécessairement le cas de son partenaire qui, lui, peut encore vivre chez ses parents7.
10Le caractère transitoire se retrouve notamment dans la plus forte proportion d’étudiants vivant une relation amoureuse sans cohabiter : un sur trois est dans ce cas, la vie en couple étant à l’inverse encore rare (8 % des étudiants et 17 % des étudiantes vivent avec un conjoint). Les situations de précarité, comme le chômage, semblent également représenter un frein à la vie commune puisqu’on note une proportion plus forte d’amoureux non cohabitants chez les femmes et les hommes en recherche d’emploi (14 % des chômeurs et 11 % des chômeuses). À noter que ces situations de chômage traduisent aussi pour une part les difficultés d’insertion sur le marché du travail que rencontrent les jeunes sortis depuis peu du système éducatif. Enfin, et toujours en lien avec l’âge, la proportion d’amoureux non cohabitants est plus importante chez les hommes et chez les femmes célibataires (respectivement 17 et 18 %).
11Une première figure de la relation non cohabitante se dessine ainsi sous les traits d’une situation conjugale transitoire associée aux jeunes âges. Mais ce mode de relation ne concerne pas seulement les jeunes et n’est pas uniquement synonyme d’entrée progressive dans une primo conjugalité. Un tiers des amoureux non cohabitant ont 40 ans ou plus (29 % des hommes et 33 % des femmes), près de la moitié ont un emploi et un peu moins de 10 % sont retraités.
Tableau 1. Situations conjugales selon les caractéristiques sociodémographiques (%)

Champ : ensemble de la population des 18-79 ans.
Source : Ined-Insee, Erfi-GGS1, 2005.
b. Des personnes séparées
12Les personnes qui ont déjà vécu en couple et connu une rupture constituent un autre groupe de couples non cohabitants : elles gardent plus longtemps leur indépendance résidentielle que celles qui n’ont pas encore de « passé conjugal ». Parmi celles-ci, seulement 6 % des hommes et 7 % des femmes sont en couple sans résider avec leur partenaire tandis que 12 à 13 % des hommes et 10 à 12 % des femmes qui ont déjà vécu une rupture sont dans cette situation (tableau 1). Les divorcés adoptent encore plus souvent ce mode de relation (17 %) que les personnes qui n’étaient pas mariées avec le conjoint dont elles se sont séparées.
13Lorsqu’ils n’ont pas d’enfants d’un précédent lit, la situation conjugale des hommes et des femmes est la même : un tiers vivent seuls, la moitié en couple cohabitant et un peu plus d’un sur dix en couple avec deux résidences. Ces proportions sont semblables pour les hommes qui ont des enfants mais ne vivent pas avec eux. Les femmes qui ne vivent pas avec leurs enfants sont plus souvent seules (60 %), mais il s’agit moins d’une différence de genre que d’une différence d’âge, les femmes étant en moyenne plus âgées que les hommes. En effet, après une rupture parentale, peu de jeunes mères sont séparées de leurs enfants en raison du jeune âge de ceux-ci.
c. Des résultats confirmés « toutes choses égales par ailleurs »
14Pour étudier les relations non cohabitantes en démêlant ce qui relève de l’âge de ce qui dépend de la biographie conjugale et familiale, une régression logistique a été mise en place. Pour les personnes ayant un conjoint, nous avons estimé les probabilités de ne pas vivre avec lui plutôt que de vivre avec lui, selon leurs caractéristiques sociodémographiques, en distinguant les hommes et les femmes. La lecture de ce modèle nécessite de garder à l’esprit qu’une approche transversale des unions a pour conséquence une sous-représentation des plus courtes, en l’occurrence des unions non cohabitantes. En effet, celles-ci se terminent plus rapidement que les unions cohabitantes (44 % des relations non cohabitantes en cours ont moins de deux ans) soit parce qu’elles sont rompues assez rapidement, soit parce qu’elles sont transformées en unions cohabitantes (Villeneuve-Gokalp, 1997)8. Nous n’avons pas pu introduire simultanément dans le modèle l’âge, la situation d’activité et la corésidence avec les parents en raison d’une trop forte colinéarité entre l’âge et les deux autres variables (par exemple la plupart des étudiants ont moins de 25 ans, ainsi que la plupart des personnes qui habitent encore chez leurs parents). Cependant, la proportion de personnes en couple cohabitant vivant avec un parent est quasi nulle, alors qu’elle est importante (37 %) parmi les non-cohabitants.
15Pour éviter cette hétérogénéité évidente dans la population qui aurait pu écraser les résultats de la régression, nous avons préféré ne pas inclure dans le modèle les personnes vivant encore chez leurs parents.
16Finalement, les variables retenues dans l’analyse sont l’âge, la nationalité (puisque venir travailler en France peut être un motif de décohabitation pour les étrangers), l’histoire conjugale passée, ainsi qu’une variable recomposée compilant le statut d’activité et la catégorie socioprofessionnelle du répondant et celle de son conjoint. Cette variable indique la catégorie professionnelle du répondant lorsqu’il a un emploi, son statut de chômeur si c’est le cas, et regroupe en « inactif » tous les autres cas : étudiants, retraités, au foyer ou en congé parental. Pour les raisons de colinéarité avec la variable d’âge exposées auparavant, les étudiants et retraités n’ont pas pu être distingués.
17La figure 2 propose, pour les femmes et pour les hommes en couple, les probabilités estimées de vivre « chacun chez soi » plutôt que de vivre dans un même logement. Cette probabilité est de 12 % pour les hommes et de 13 % pour les femmes dont la situation correspondrait en tout point à la situation de référence, à savoir : être de nationalité française, avoir entre 30 et 39 ans, être employé, avoir un conjoint employé, avoir déjà vécu en couple et ne pas avoir d’enfant d’une union précédente.
18Pour les deux sexes, l’effet du jeune âge sur la propension à ne pas vivre avec son conjoint est tout d’abord largement confirmé, la probabilité estimée atteint 72 % pour les hommes et 68 % pour les femmes de moins de 25 ans, à autres caractéristiques identiques, et elle est encore de 38 % pour les premiers et 33 % pour les secondes chez les 25-29 ans. À l’inverse, après 40 ans, la probabilité estimée de ne pas cohabiter décroît significativement pour les hommes, mais pas pour les femmes : elle tombe à 6 % pour les 50-59 ans, puis à 4 et 2 % pour les 60-69 ans et les 70-79 ans. La relation amoureuse non cohabitante apparaît donc moins probable aux âges élevés côté masculin, notamment, parce que les ruptures d’union par veuvage sont moins fréquentes chez les hommes9. Cet effet n’apparaît pas côté féminin, la probabilité des femmes à vivre une relation non cohabitante restant stable à tout âge au-delà de la trentaine. Ayant plus souvent la garde des enfants en cas de séparation, elles se remettent aussi moins souvent à vivre en couple que les hommes lorsqu’elles rencontrent un nouveau partenaire, elles cohabitent moins souvent avec lui que ne le font les hommes (Cassan, Mazuy et Clanché, 2005).
19Toutes choses égales par ailleurs, « l’attrait » de la cohabitation est moins fort pour les personnes ayant déjà vécu en couple que pour celles n’ayant jamais cohabité, en particulier lorsqu’elles ont des enfants : la probabilité estimée de garder leur indépendance résidentielle atteint alors 34 % chez les femmes et 31 % chez les hommes contre respectivement 13 % et 12 % lorsqu’ils n’ont pas eu d’enfants d’un premier lit. Avoir des enfants d’une précédente union sans vivre avec eux favorise également la séparation résidentielle, mais dans une moindre mesure : la probabilité est de 27 % chez les femmes et de 24 % chez les hommes.
Figure 2. Probabilités estimées de ne pas vivre avec son partenaire vs cohabiter avec son conjoint (modèle logit)

Source : Ined-Insee, Erfi-GGS1, 2005.
20Les situations professionnelles des conjoints interviennent finalement assez peu dans la décision de cohabiter ou non. Seule la catégorie « inactivité » chez les hommes augmente la propension à vivre séparément de son conjoint, mais nous y avons regroupé des situations trop hétéroclites pour pouvoir l’interpréter (retraite, études et inactivité). Quelques différences apparaissent cependant selon la catégorie socioprofessionnelle du conjoint. En particulier, les conjointes d’ouvriers se mettent plus souvent « en ménage » que les autres femmes. Des travaux sociologiques antérieurs ont déjà signalé que dans les couches populaires, vivre en couple constituait une sécurité matérielle (de Singly, 1987 ; Schwartz, 1990).
21Enfin, pour les hommes, le risque de vivre loin de leur conjointe est plus élevé pour les étrangers que pour les Français (18 % contre 12 %). À l’évidence, cette différence résulte de l’immigration de travailleurs puisqu’on ne l’observe pas chez les femmes : pour elles, les probabilités de vivre séparées de leur conjoint sont indépendantes de leur nationalité.
2. Une séparation plus contrainte que choisie
22Les répondants étaient invités à se prononcer sur le caractère voulu ou subi de leur séparation résidentielle et sur les motifs de ce choix ou de cette contrainte. Lorsqu’il s’agissait d’un choix, ils devaient préciser s’il était le leur uniquement, « imposé » par le conjoint ou commun aux deux partenaires (encadré).
23La majorité des non-cohabitants ont indiqué que les circonstances les contraignaient à vivre séparément (figure 3), sans fortes différences entre hommes et femmes (64 % des hommes et 61 % des femmes). Les motifs professionnels sont les plus fréquents (environ 4 fois sur 10), lesquels correspondent le plus souvent à un éloignement géographique du lieu de travail de l’un des partenaires. Les femmes avancent un peu plus que les hommes des raisons financières ou de logement, les hommes davantage de raisons professionnelles ou personnelles. En particulier, ils sont deux fois plus nombreux que les femmes à indiquer que leur conjointe « a une autre famille » (13 % contre 7 %). Bien que la formulation de la question soit équivoque (on peut avoir une autre famille soit parce que l’on a un autre conjoint, soit parce que l’on élève seul ses enfants, soit parce que l’on reste auprès d’un parent âgé10), on peut supposer que l’écart entre hommes et femmes tient au fait que dans la majorité des cas, les femmes séparées qui avaient des enfants en ont eu la garde.
24La séparation est présentée comme un choix commun par 18 % des hommes et 23 % des femmes et comme un choix personnel, non partagé par le conjoint, par 17 % des hommes et 15 % des femmes. Logiquement, on attendait des proportions similaires pour les modalités « je veux vivre séparément » et « mon conjoint veut vivre séparément » mais cette dernière réponse n’est proposée que par 1 % des hommes et des femmes. Ce paradoxe révèle une grande difficulté à reconnaître que le conjoint soit seul à vouloir vivre sans l’autre.
25Les raisons du choix sont majoritairement liées au souhait de garder son indépendance ou au sentiment de ne pas être prêt. Ces deux motivations relèvent cependant de deux logiques différentes. La première marque plutôt un refus de cohabiter qui se traduit par une relation plus installée dans la durée (la relation est engagée depuis 6,7 ans en moyenne), tandis que la seconde rend davantage compte d’une situation transitoire, moins durable (la relation dure depuis 2,4 ans en moyenne). Le désir de préserver son indépendance est plus masculin (60 %) que féminin (46 %) alors que le sentiment de ne pas se sentir prêt est plus féminin (40 % contre 31 %). Les motifs financiers ou la présence d’enfants paraissent en revanche avoir peu de poids dans la décision. Si l’on demande à l’un des conjoints quelles sont les raisons de son ami(e), là encore les écarts entre hommes et femmes sont importants : 60 % des hommes déclarent que leur amie souhaite garder son indépendance et 29 % qu’elle ne se sent pas prête. Les femmes se partagent entre celles qui pensent que leur compagnon veut rester indépendant (44 %) et celles qui pensent qu’il ne se sent pas prêt (43 %).
Encadré. La relation amoureuse stable non cohabitante : entre choix et circonstances
Q1. Vivez-vous séparément par choix ou parce que les circonstances vous empêchent de vivre ensemble ?
1. Je veux vivre séparément
2. Mon conjoint et moi avons décidé de vivre séparément
3. Mon conjoint veut vivre séparément → Q3
4. Les circonstances nous y obligent → Q4
5. Autres raisons
Q2. (Si 1 ou 2 en Q1) Pourquoi voulez-vous vivre séparément ? 1. Pour des raisons financières 2. Pour préserver mon indépendance
3. À cause des enfants
4. Je ne me sens pas encore prêt à cohabiter
5. Autres raisons
Q3. (Si 2 ou 3 en Q1) Pourquoi votre conjoint(e) a-t-il choisi de vivre séparément ? 1. Pour des raisons financières
2. Pour préserver son indépendance
3. À cause des enfants
4. Il ne se sent pas encore prêt à cohabiter
5. Autres raisons
6. Ne sait pas
Q4. (Si 4 en Q1) Quelles circonstances ?
1. Pour des raisons professionnelles 2. Pour des raisons financières
3. Pour des questions de logement
4. En raison de l’état de santé du conjoint 5. À cause de problèmes juridiques
6. Votre conjoint a une autre famille
7. Autre
Figure 3. Les raisons de vivre séparément par sexe (%)

Champ : ensemble des personnes ayant déclaré vivre une « relation amoureuse stable non cohabitante ».
Source : Ined-Insee, Erfi-GGS1, 2005.
26Ces résultats traduisent les attentes différentes des hommes et des femmes et la propension des individus à attribuer à leur conjoint les mêmes attentes qu’eux : 60 % des hommes suivent leur désir d’indépendance et 60 % pensent que leur partenaire a ce même désir ; 46 % des femmes souhaitent rester indépendantes et 44 % attribuent la même attitude à leur conjoint. La proposition « Je ne me sens pas prêt à cohabiter » a obtenu l’approbation de 31 % des hommes pour eux-mêmes et 29 % des hommes pensent que leur conjointe approuverait cette proposition. Les femmes sont 40 % à être d’accord pour elles-mêmes et 43 % pour leur conjoint. Les divergences n’apparaissent qu’en croisant les raisons données par le répondant pour lui et pour son conjoint, lorsqu’il a déclaré que le choix était commun (ce qui demanderait à être vérifié) : 44 % des hommes déclarent que tous deux souhaitent garder leur indépendance contre 33 % des femmes ; à l’inverse, les hommes déclarent moins que les femmes (20 % contre 30 %) que l’un et l’autre ne se sentent pas prêts à cohabiter.
II. Différentes figures de la relation amoureuse non cohabitante
27Plusieurs figures de la relation amoureuse stable se dégagent ainsi de la description qui précède, mais dont on imagine que les logiques de fonctionnement et les intentions de cohabiter doivent différer. Afin d’étudier les motivations et les projets en tenant compte des caractéristiques très hétérogènes des non-cohabitants, une classification de ces personnes a été établie. L’analyse des correspondances multiples (ACM) est un outil efficace pour établir des rapprochements entre des individus qui vivent une même expérience, selon quelques-unes de leurs caractéristiques. La classification « sur facteurs », effectuée à partir des coordonnées factorielles issues de l’ACM, permet de dresser une typologie des « non-cohabitants », nette des effets de structures.
1. Typologie des non-cohabitants à partir de l’analyse des correspondances multiples
28Nous ne pouvions pas déterminer la typologie à partir de variables telles que les motivations de la double résidence (choix ou contrainte), les projets de vie commune ou l’ancienneté de l’union, qui sont précisément les aspects de la relation que nous souhaitons analyser. Nous nous sommes donc appuyés, d’une part, sur les caractéristiques individuelles des intéressés (le sexe, l’âge, la nationalité, le statut d’activité des conjoints) et, d’autre part, sur la situation au début de la relation (le nombre d’unions antérieures, l’état matrimonial légal, la distance entre les logements des partenaires). Certaines de ces caractéristiques n’ont pu être introduites comme variables actives dans l’analyse : le statut matrimonial légal, à la fois trop corrélé au nombre d’unions antérieures et parfois dépendant de la relation actuelle (quelques couples non cohabitants sont mariés ensemble) ; le statut d’activité, trop lié à l’âge ; la nationalité, certaines classes rassemblant un nombre d’individus insuffisant (tableau 2).
29L’analyse des correspondances multiples s’appuie donc sur le sexe, l’âge, le nombre d’unions antérieures et la distance entre les logements des partenaires. Seules ces variables « actives » sont prises en compte dans les calculs qui déterminent la position sur les axes ou la participation des modalités à la construction des classes. Les autres variables, dites « illustratives » viennent simplement compléter l’observation en se positionnant par rapport aux partitions déjà définies.
Tableau 2. Choix des variables actives et illustratives dans l’ACM et la classification

Source : Ined-Insee, Erfi-GGS1, 2005.
30Sur les deux premiers axes de l’ACM (figure 4), trois groupes principaux ressortent :
un groupe de jeunes, sans union cohabitante préalable ni enfant, généralement encore étudiants, qui déclarent souvent ne pas cohabiter en raison de contraintes financières ;
un groupe de personnes plus âgées, dont une partie est veuve et sans enfant au foyer, qui considèrent fréquemment avoir choisi ce mode de relation ;
des personnes avec des enfants au foyer, âgées de 25 à 54 ans, ayant déjà connu une union.
31L’exploration préalable des données par l’ACM a mis en avant des sous-groupes, déterminés presque exclusivement par l’âge et par la présence ou l’absence au foyer d’enfants nés antérieurement à l’union. Grâce à la classification sur facteurs, chaque individu est alors rattaché au groupe avec lequel il a le plus de caractéristiques communes. Le modèle fixe un nombre optimal de quatre partitions.
32Les modalités qui ont le plus fortement contribué à la formation d’une classe sont celles dont les valeurs tests sont les plus élevées. Elles sont présentées dans le tableau 3 ainsi que, pour chacune des modalités, la proportion d’individus de cette modalité retenue dans la classe. Par exemple, 65,3 % des personnes en relation amoureuse stable non cohabitante sans union antérieure se trouvent parmi les Jeunes gens (pour l’appellation de chacune des classes, cf. infra).
33Compte tenu du nombre restreint de variables et modalités actives, le risque de prépondérance de certaines modalités lors du découpage en classe est élevé. Cependant, même sommaire, la classification obtenue répond à notre objectif, celui de trouver le découpage net des effets de structure le plus adapté à l’étude. De fait, les variables, tels le sexe, le fait d’avoir déjà vécu en couple ou non et la durée du déplacement entre les deux résidences, même si elles participent au calcul des facteurs, sont totalement dominées lors de la classification par les variables d’âge et de présence d’enfants.
2. Description des quatre profils
34Le premier groupe est composé uniquement de Jeunes gens de moins de 25 ans, sans enfant, célibataires (99 %) et n’ayant jamais résidé en couple (sauf 9 %). Dans ce premier groupe, les femmes sont un peu plus nombreuses que les hommes parce qu’elles commencent leur vie amoureuse un peu plus tôt. En raison de leur âge, trois fois sur quatre l’un des deux partenaires au moins est étudiant (tableau 4).
35Un deuxième groupe se dégage : les Hors famille, ainsi nommés parce qu’ils ne dépendent plus de leurs parents et n’ont pas (encore) d’enfant (74 %), ou ne résident pas avec eux (26 %). À quelques exceptions près, tous ont entre 25 et 54 ans. C’est le seul groupe où les hommes sont plus nombreux que les femmes (57 %). Plus des trois quarts des Hors famille sont célibataires, 14 % divorcés, 2 % sont encore mariés avec un conjoint dont ils sont séparés et 6 % sont mariés avec leur conjoint actuel ; dans ce cas, deux fois sur trois celui-ci est étranger et le regroupement familial n’a pas eu lieu.
Figure 4. Analyse des correspondances multiples sur les individus en relation amoureuse non cohabitante

Source : Ined-Insee, Erfi-GGS1, 2005
Tableau 3. Typologie (%), valeurs-tests et proportion de la modalité dans chaque classe

Source : Ined-Insee, Erfi-GGS1, 2005.
Tableau 4. Caractéristiques des différents profils des personnes en couple non cohabitant (%)

Lecture : 45 % des Jeunes gens sont des hommes.
Source : Ined-Insee, Erfi-GGS1, 2005.
36Le troisième groupe est celui de parents en situation de monoparentalité, principalement des femmes (77 %). Tous ont également entre 25 et 54 ans, sauf 3 % qui sont plus jeunes et 29 % plus âgés. Parmi ces Monoparentaux, les divorcés sont nombreux (41 %) et seulement 4 % sont mariés, 3 sur 4 avec leur conjoint actuel. La plupart d’entre eux ont un compagnon Hors famille.
37Enfin, le quatrième groupe rassemble les personnes de 55 ans et plus. Passé cet âge, les individus sont dégagés des obligations quotidiennes liées aux enfants ou à une activité professionnelle : leurs enfants, s’ils en ont, ne résident pas avec eux (70 % en ont) parce qu’ils sont devenus adultes ou sont des adolescents résidant chez leur autre parent. Enfin, neuf fois sur dix, au moins l’un des deux conjoints n’exerce plus d’activité professionnelle. Par commodité, nous désignerons ce groupe comme celui des Seniors, en raison de leur âge plus élevé que celui des autres groupes. Si la situation professionnelle, un âge minimum et l’absence d’enfants au foyer participent à la cohérence de ce groupe, les histoires conjugales les plus diverses y sont regroupées : 20 % des Seniors n’ont jamais vécu en couple tandis que 22 % ont connu plusieurs unions cohabitantes ; 26 % sont veufs, situation rare chez les plus jeunes ; 3 % n’ont pas divorcé d’un conjoint précédent et 12 % sont mariés avec leur conjoint actuel.
38Les frontières entre ces profils sont parfois floues : les Hors famille occupent une position intermédiaire entre les Jeunes gens et les Monoparentaux, les trois quarts d’entre eux n’ont pas d’enfant, mais plus de la moitié ont déjà vécu en couple et leur âge comme leur activité les rapprochent encore des Monoparentaux. L’absence d’enfant au foyer est commune aux Seniors et aux Hors famille et naturellement aux Jeunes gens, mais les plus âgés ont déjà franchi les principales étapes de leur vie familiale et professionnelle, tandis que les autres n’en sont qu’au début ou à mi-parcours.
39Parmi les personnes engagées dans une relation non cohabitante, 42 % sont des Jeunes gens, 35 % des Hors famille, 14 % des Seniors et 9 % des Monoparentaux (tableau 4). Ce sont effectivement les jeunes qui sont le plus souvent engagés dans ce type de relation puisque 28 % de l’ensemble des 18-25 ans ont un partenaire avec lequel ils ne résident pas. Mais l’ordre n’est plus le même entre les autres groupes. En effet, parmi les personnes ayant entre 25 et 54 ans, celles qui vivent avec un enfant d’une union précédente adoptent plus souvent ce mode de vie (14 % d’entre elles) que celles qui n’ont pas d’enfants ou qui ne vivent pas avec eux (6 %). Quant aux 55-79 ans, ils ne sont que 4 % à avoir un compagnon ou une compagne stable, mais « à distance ».
III. Quelques caractéristiques de la relation
1. Distance entre les domiciles et fréquence des rencontres
40Globalement, la distance entre les deux domiciles peut être parcourue en moins de 25 minutes pour la moitié des couples. Quatre fois sur dix, le temps de trajet est inférieur à un quart d’heure, mais une fois sur trois il dépasse une heure, ce qui sous-entend presque toujours l’usage d’un véhicule motorisé qui peut être l’avion pour les plus éloignés. La durée du parcours qui sépare les domiciles de chacun des partenaires a été utilisée pour dégager les quatre profils, mais sa contribution est faible, l’éloignement géographique ne permettant pas d’opposer les couples non cohabitant dès lors que leurs autres caractéristiques étaient prises en compte (tableau 5). Les Jeunes gens et les Monoparentaux mettent cependant dix minutes de moins pour se retrouver (différence des médianes) que les Hors familles et les Seniors. Les Jeunes gens, en majorité des étudiants, résident fréquemment à moins d’un quart d’heure l’un de l’autre (47 % d’entre eux). À l’opposé, 23 % des Hors famille ont plus de deux heures de transport, les distances les plus importantes étant associées aux contraintes professionnelles.
Tableau 5. Temps de parcours entre les deux domiciles et fréquence des rencontres

* Nombre de fois par semaine.
Source : Ined-Insee, Erfi-GGS1, 2005.
41Près de la moitié des couples se voient plus de trois fois par semaine et seulement 17 % ne se rencontrent pas toutes les semaines. La plus grande proximité des Jeunes gens permet au tiers d’entre eux de se voir tous les jours. Cependant, le temps de trajet n’est pas le seul déterminant de la fréquence des rencontres. Lorsque les deux partenaires résident à moins d’une demi-heure l’un de l’autre, la moitié des Jeunes gens se voient six fois par semaine contre quatre à cinq fois (4,6 fois) pour les Monoparentaux et cinq fois pour les Hors famille et les Seniors. La fréquentation d’un même établissement d’enseignement peut expliquer les rencontres quasi quotidiennes des premiers.
2. L’ancienneté de la relation
42Plus que par l’organisation des rencontres, ces couples se distinguent par l’ancienneté de leur relation. En toute logique, la relation ne peut être que récente pour les plus jeunes et s’élever avec l’âge. Son ancienneté est inférieure à vingt mois pour la moitié des Jeunes gens, à vingt-neuf mois pour les Hors famille, à trente-six mois pour les Monoparentaux et à sept ans et demi pour les Seniors. Parmi ces derniers, 46 % entretiennent cette relation au moins depuis dix ans (tableau 6).
Tableau 6. Ancienneté de la relation (médiane et répartition)

Source : Ined-Insee, Erfi-GGS1, 2005.
43L’âge ne suffit pas à expliquer une ancienneté plus ou moins grande de la relation. Les conjoints vont chercher à abréger la séparation résidentielle si elle est dictée par les circonstances, et à la faire perdurer si c’est un choix. Effectivement, parmi les personnes âgées de 25 et 54 ans, l’ancienneté médiane de la relation est de quarante-trois mois pour les couples où l’un des conjoints au moins tient à conserver son indépendance et de trente mois si la séparation est subie. Si l’un des conjoints ne se sent « pas encore prêt à cohabiter », l’ancienneté médiane est de vingt-cinq mois. Autant que les motivations données à la double résidence, l’intention de vivre ensemble ou son refus explique la durée des unions.
IV . Les motivations de la séparation résidentielle et les projets
1. Séparation contrainte ou choisie, provisoire ou durable
44Les différents sens des unions cohabitantes se lisent à la fois dans la manière dont les conjoints perçoivent les raisons de leur séparation résidentielle et dans leurs éventuels projets de vie commune : six couples sur dix vivent leur séparation comme une contrainte (tableau 7) et sept sur dix ont l’intention de vivre ensemble dans les trois ans (tableau 8). Intentions et raisons de vivre séparés dépendent étroitement les unes des autres, mais moins qu’on ne pouvait s’y attendre : si 81 % de ceux qui présentent leur séparation comme une obligation font le projet de vivre ensemble dans les prochaines années et 62 % de ceux qui ne se sentent pas prêts, c’est aussi le cas d’une personne sur deux qui assure pourtant avoir choisi la séparation. Comment interpréter cette apparente contradiction ? Toutes les séparations professionnelles ne sont pas contraintes, certaines peuvent avoir été « choisies » dans le but de favoriser une carrière professionnelle. Dans ce cas, l’éloignement géographique n’est pas perçu comme une contrainte, mais comme un choix et le rapprochement des conjoints est déjà programmé.
45Près des trois quarts des Jeunes gens déclarent que leur séparation est imposée, la principale raison donnée étant l’absence d’indépendance financière et, corrélativement, l’impossibilité de financer un logement, pour 30 % d’entre eux (tableau 7). Les jeunes sont aussi les plus nombreux à prévoir une résidence commune dans les trois ans (84 %) (tableau 8). La poursuite des études (trois fois sur quatre au moins l’un des conjoints est étudiant) ou l’absence d’emploi (une fois sur dix pour l’un des conjoints au moins) explique la fréquence de cette réponse qui diminue pour les autres groupes, sans jamais totalement disparaître. Le désir d’indépendance chez ces jeunes qui n’ont encore jamais vécu en couple est rare (6 %) et seulement un sur dix ne se sent pas encore mûr pour le faire.
46À l’opposé, plus de six fois sur dix, les Seniors ont fait le choix de garder le domicile personnel de chacun (tableau 7) et près de sept sur dix ne pensent pas s’installer dans un logement commun dans les prochaines années (tableau 8). Leur décision correspond à un désir d’indépendance durable pour 41 % et provisoire pour 11 % qui attendent d’être prêts11. L’ancienneté de l’union, près d’une fois sur deux supérieure à dix ans, confirme la résolution des Seniors de ne pas se (re)mettre en ménage (tableau 6). Plus encore que les séparés et divorcés, les veufs (26 %, tableau 4) choisissent cette forme d’union par égard pour leur conjoint décédé ou pour leurs enfants, ou encore pour garder leur patrimoine, en particulier leur maison (Caradec, 1996) : les trois quarts des veufs vivent seuls par choix. En revanche ceux qui n’ont jamais vécu en couple (20 %) ne sont pas tous des « célibataires endurcis » refusant de changer leurs habitudes, au contraire la moitié d’entre eux ressentent la séparation résidentielle comme imposée par les circonstances, contre 34 % seulement de ceux qui ont déjà vécu en couple.
47Les Hors famille et les Monoparentaux se situent entre ces deux positions. Pour les premiers, l’éloignement est vécu plutôt comme une contrainte (55 %) et 72 % envisagent de vivre ensemble dans les trois ans. Une part importante des Hors famille qui ont choisi la séparation n’ont fait ce choix que pour une période limitée. Cependant, deux Hors famille sur dix ne pensent pas cohabiter.
48Pour les Monoparentaux, la séparation est aussi souvent un choix (47 %) qu’une contrainte (46 %). Leur désir d’indépendance n’est pas plus développé que celui des Hors famille, mais vouloir rester seul avec ses enfants est un autre choix que font 11 % des Monoparentaux. Cette décision peut être prise dans l’intérêt des enfants, mais aussi par le parent qui souhaite conserver pour lui-même un quotidien qui lui convient. À l’instar des autres groupes, une partie des Monoparentaux qui ont déclaré que leur séparation était un choix ne la concevait que comme un choix temporaire.
Tableau 7. Les raisons de la séparation résidentielle

Source : Ined-Insee, Erfi-GGS1, 2005.
Tableau 8. Intention de vivre ensemble dans les 3 ans

Source : Ined-Insee, Erfi-GGS1, 2005.
2. Les obstacles à la cohabitation
49Les enquêtés étaient invités à se prononcer sur les conséquences qu’entraînerait une résidence commune. Son principal attrait était la joie et la satisfaction de vivre ensemble, plaisir qui se complète par ses conséquences sur la vie sexuelle. Cette position est partagée par toutes les personnes qui entretiennent une relation stable. Mais, indépendamment du lien amoureux, du désir de partager le quotidien ou au contraire de garder son indépendance, les projets dépendent du contexte extérieur. C’est ce que tentait de cerner la série de questions « Dans quelle mesure votre décision de vivre avec votre conjoint dans les trois années à venir dépend-elle des facteurs suivants : de votre situation financière personnelle ? de votre travail ? de votre logement ? de votre santé ? de vos relations amoureuses ? de vos enfants ? ». Pour les Seniors, la question sur l’emploi doit être comprise comme l’attente de la retraite. Peu d’individus ayant répondu que leur projet dépendait de leur santé, nous avons exclu cette réponse de cette présentation afin de l’alléger.
50Pour chaque question, cinq modalités de réponse étaient proposées allant de « pas du tout » et « non concerné » à « énormément ». Pour interpréter les réponses, nous avons calculé un score en donnant la valeur 3 pour chaque réponse « énormément », 2 pour « beaucoup », 1 pour « un peu », 0 pour « pas du tout » et « non concerné ». Puis, nous avons calculé la réponse moyenne pour chaque question, en distinguant les personnes concernées selon leur profil et leurs intentions à trois ans (figure 5). Un score faible indique un facteur peu influent ou concernant peu de gens. C’est pourquoi les scores sont toujours plus élevés pour les personnes qui souhaitent vivre ensemble que pour celles qui souhaitent garder leur indépendance.
51Sans surprise, l’évolution du sentiment amoureux est la première condition à la vie commune. Mais, alors qu’elle paraît très importante aux Jeunes gens, les Seniors semblent y attacher une importance bien moindre. L’ancienneté de la relation permet de comprendre ce résultat déconcertant : plus la relation est ancienne, moins les conjoints doutent de sa solidité et moins ils répondent que leur projet en dépend.
52Après le sentiment amoureux, globalement, la décision de vivre en couple ou non dépend, par ordre décroissant, de l’emploi, de la situation financière et du logement. Pour les Hors famille qui comptent cohabiter, l’importance du logement dépasse celle de la situation financière. Pour tous les Monoparentaux et pour les Seniors sans projet de vie commune, la situation financière et parfois le logement sont plus déterminants que l’emploi. Toutes ces conditions à la cohabitation sont à la fois plus présentes et plus fortes chez les Jeunes gens qui débutent dans la vie que pour les autres couples. La figure 5 indique que les réponses « pas du tout » (le plus souvent, un score faible signifie une forte proportion de réponses « pas du tout ») augmentent avec l’âge. La raison en est que les motifs proposés sont bien adaptés à la situation des jeunes et le sont de moins en moins à mesure que l’âge s’élève. Les Seniors, par exemple, ne font plus dépendre un changement de leur mode de vie de changements professionnels, financiers ou résidentiels qui n’ont plus guère de chances de se produire à leur âge. Les raisons de la double résidence se situent donc ailleurs. Pour les parents, la décision de vivre en couple peut dépendre de leurs enfants. Cette question était adressée à tous les Monoparentaux et à une partie des Hors famille et des Seniors. Mais, seuls les Monoparentaux, parce qu’ils résident avec leurs enfants, et seulement s’ils désirent vivre avec leur partenaire, ont déclaré que leur décision dépendait de leurs enfants.
Figure 5. Les facteurs dont dépend la décision de vivre en couple

Source : Ined-Insee, Erfi-GGS1, 2005.
Conclusion
53Les unions non cohabitantes sont-elles appelées à se développer ? Trois enquêtes de l’Ined réalisées à dix ans d’intervalle ne montrent aucune évolution. Pourtant, le refus croissant des femmes de renoncer à leur carrière professionnelle pour rejoindre un conjoint, l’augmentation des ruptures d’unions et des remises en couple qui peuvent survenir à des âges de plus en plus élevés, l’affirmation des valeurs individualistes enfin, sont autant d’incitations au développement de ce mode de relation. En outre, on remarque une similitude entre les unions cohabitantes du début des années 1970 et les unions sans domicile commun d’aujourd’hui. La cohabitation hors mariage est d’abord apparue chez les étudiants et les jeunes sans emploi avant de se diffuser au reste de la société. Ce sont aujourd’hui ces mêmes catégories qui entretiennent le plus fréquemment une relation stable non cohabitante. Dans un premier temps, le mariage suivait de près la cohabitation, aujourd’hui six couples non cohabitants sur dix ont l’intention de vivre ensemble dans les trois ans. À partir de 1972, l’âge au mariage s’est élevé tandis que l’âge à la première mise en couple est resté stable et que la cohabitation est devenue un mode de vie durable. Plus récemment, l’âge à la première cohabitation s’élève, qu’en sera-t-il du « Vivre séparés ensemble » ? Le désir d’enfant puis sa naissance est et restera un évènement déclencheur de l’installation des conjoints dans un logement commun. Ceux que nous avons désigné comme les Jeunes gens et les Hors famille souhaitent d’ailleurs très majoritairement vivre ensemble dans les trois ans, avec probablement un projet d’enfant à la clé. Au contraire, ceux qui ont déjà des enfants et vivent avec eux ou sont trop âgés pour en avoir sont moins motivés pour vivre en couple.
54Le mariage a longtemps suffi à définir le couple, puis avec le développement des unions informelles, une résidence commune l’a remplacé. Sur quel(s) critère(s) peut-on s’appuyer pour définir un couple lorsque les conjoints vivent séparément ? La relation des Jeunes gens est plus fusionnelle que celle de leurs aînés : ils se retrouvent quasiment tous les jours, souhaiteraient pouvoir vivre ensemble et en font le projet. Avec l’âge, les choix professionnels, les ruptures et les enfants, les relations non cohabitantes deviennent de plus en plus réfléchies, de contraintes elles deviennent choisies. Mais cette exploration des relations amoureuses stables non cohabitantes ne débouche pas sur une définition du couple, encore moins sur un indicateur permettant de les compter. Peut-être faut-il rompre, au moins provisoirement, avec l’idée qu’un indicateur doit pouvoir être « vérifié » ou doit être « objectif » et laisser aux personnes concernées la possibilité de se déclarer elles-mêmes : en couple non cohabitant, engagées dans une relation sérieuse non conjugale ou dans une relation sans engagement.
Bibliographie
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Références bibliographiques
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Notes de bas de page
2 Source : ministère de la Justice-SDSED.
3 La diminution de l’infécondité au fil des générations ne peut que conforter cette pression en faveur de la cohabitation (Régnier-Loilier, 2007).
4 Si le conjoint n’était pas absent plus de trois jours par semaine ou s’il l’était plus longtemps en raison de ses études ou de son activité professionnelle, il était inscrit d’emblée dans le tableau de composition du ménage (TCM). Si le conjoint occupait un autre logement plus de la moitié de la semaine sans y être contraint par son activité, il ne figurait pas dans le TCM et l’enquêté était considéré comme une personne vivant seule. Il avait cependant la possibilité de déclarer qu’il était engagé dans une « relation amoureuse stable ».
5 La seconde vague d’Erfi, réalisée à l’automne 2008 auprès des personnes déjà interrogées en 2005, permettra ce type d’étude, le questionnement ayant été précisé, mais uniquement dans la version française du questionnaire GGS.
6 Pour rendre comparable les enquêtes ESFE et Erfi, nous avons considéré dans ESFE que toutes les personnes dont le conjoint était inscrit dans le TCM étaient en couple cohabitant, même si leur conjoint n’était pas présent en permanence. En revanche, nous avons regroupé les personnes qui avaient déclaré être en couple mais dont le conjoint n’était pas inscrit dans le TCM avec les personnes seules entretenant « une relation amoureuse stable ». Les personnes entretenant une relation depuis moins de trois mois ont été regroupées avec les personnes « seules ayant une relation amoureuse stable » dans les deux enquêtes. Cette décision a été prise par analogie avec la définition de la cohabitation pour les couples (un minimum de trois mois). Même après avoir exclu les relations inférieures à trois mois, certaines relations ont une ancienneté trop courte pour les considérer déjà comme des relations « stables », mais les partenaires anticipent sans doute leur solidité.
7 L’enquête Erfi de 2005 ne donne pas cette information, laquelle est présente dans la seconde vague (2008).
8 Un contrôle par la durée depuis le début de la relation pour limiter ce problème n’est pas possible, puisque dans l’enquête, l’origine en termes de durée diffère avec le type d’union : elle se situe au début de la liaison pour les relations amoureuses non cohabitantes et au moment de la cohabitation pour les autres.
9 Ceci s’explique par le fait que les hommes ont une espérance de vie plus courte que celle des femmes, différence accentuée par le fait qu’au sein d’un couple, les hommes sont en moyenne plus âgés que leur conjointe.
10 Pour la Suède, Levin et Trost (1999) et pour le Canada, Milan Peters (2003) signalent que l’une des raisons des LAT est la nécessité dans laquelle se trouve l’un des conjoints d’habiter avec un parent âgé, dont il se sent responsable.
11 Sur le caractère choisi ou subi de ces relations, les résultats des enquêtes françaises convergent avec ceux observés à l’étranger : d’une part, les séparations volontaires augmentent avec l’âge (Haskey, 2005), d’autre part, les motivations et les projets des couples formés après 50 ans sont très spécifiques à cet âge. Aux Pays-Bas, une personne sur trois ne cohabite pas si la relation a commencé après 50 ans (de Jong Gierveld, 2004).
Auteurs
Chercheuse en démographie au Centre for Population Change (University of Southampton). Elle a réalisé sa thèse sur les « trajectoires conjugales et fécondes des hommes et des femmes après une rupture en France » sous la direction de France Prioux (Ined-Université Paris-I Panthéon-Sorbonne). Ses recherches actuelles portent sur les évolutions passées de la fécondité au Royaume-Uni. Elle poursuit également ses travaux sur les déterminants de la séparation et de la remise en couple et sur la fécondité tardive.
Chargé de recherches à l’Institut national d’études démographiques, et rattaché à l’unité « Fécondité, famille, sexualité ». Docteur en sociologie, il travaille sur les comportements contemporains de fécondité et la planification des naissances. Ses récents travaux portent également sur la conjugalité, les conséquences qu’un divorce ou une séparation peuvent avoir sur les relations qu’entretiennent ensuite enfants et parents, ou encore sur la méthodologie d’enquête (influence des conditions d’entretien sur les réponses, attrition dans les enquêtes longitudinales). Il est responsable scientifique des trois vagues de l’enquête Erfi (2005, 2008 et 2011) et a animé entre 2006 et 2008 le groupe d’exploitation de la première vague de l’enquête Erfi qui a donné naissance au présent ouvrage. Il participe en outre à la préparation d’autres enquêtes (« Formation et déformation des couples » (Ined) prévue en 2012, « Fécondité, contraception et dysfonction », Inserm, 2010).
Chercheure à l’Ined, rattachée à l’unité « Fécondité, famille, sexualité ». Elle a travaillé sur les modes de vie en couple, les biographies familiales des enfants de parents séparés et le départ des enfants de chez leurs parents. Actuellement, ses recherches portent sur l’adoption et l’accouchement « sous X ».
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