Chapitre 9. La non-réalisation des projets de fécondité
p. 239-259
Texte intégral
Introduction
1Depuis le milieu des années 1960, la fécondité a chuté dans la plupart des pays occidentaux, pour atteindre des niveaux parfois bien inférieurs au seuil de renouvellement des générations (Daguet, 2002 ; Grinblat, 2008). Pourtant, cette baisse ne s’est pas accompagnée d’une diminution comparable des intentions de fécondité, l’idéal familial se maintenant à plus de deux enfants par femme presque en Europe1. L’écart entre fécondité désirée et fécondité réalisée s’est donc progressivement inversé à mesure que la natalité a diminué. Alors que dans la phase de pré-transition démographique, les intentions déclarées sous-estimaient la fécondité réelle, c’est aujourd’hui l’inverse : les personnes déclarent en moyenne souhaiter plus d’enfants qu’elles n’en auront au terme de leur vie reproductive (Bongaarts, 1998).
2Les projets sont en effet parfois révisés à mesure que se constitue la descendance, le plus souvent à la baisse suite à l’expérience d’une première naissance qui fait prendre conscience aux parents des implications que la vie de famille entraîne sur leur quotidien (Régnier-Loilier, 2007). Plus globalement, bien que l’utilisation courante de moyens contraceptifs fiables offre aujourd’hui la possibilité de choisir le nombre d’enfants que l’on souhaite et le moment de leur venue, la maîtrise de la fécondité reste imparfaite. Un couple peut rencontrer des difficultés à concevoir ; à l’inverse, une grossesse peut survenir sans avoir été décidée. Ainsi, près d’un tiers des grossesses sont encore aujourd’hui non prévues en France, une large part d’entre elles se terminant par un avortement (Régnier-Loilier et Leridon, 2007). Et, pour 100 naissances vivantes, 6 étaient souhaitées « plus tard » dans la vie des personnes, 12 « plus tôt », 10 sont survenues alors que le répondant « n’y pensait pas » et 2 n’étaient pas du tout désirées (voir chapitre 8). Près d’un tiers des naissances ne surviennent donc pas au moment attendu, traduisant une relative imprévisibilité de la fécondité.
3Dans ce contexte, il n’est guère surprenant de constater un décalage relativement important entre les intentions de fécondité qu’expriment les personnes à un moment donné et la réalisation de leurs projets (voir par exemple Westoff et Ryder, 1977 ; Monnier, 1987 pour les années 1970, ou plus récemment Toulemon et Testa, 2005 ; Régnier-Loilier et Vignoli, 2011 ; Kapitány et Spéder, 2012).
4La confrontation des intentions à court terme et des comportements nécessite de disposer de données de panel (suivi de mêmes personnes sur plusieurs années). Celles-ci permettent non seulement de mesurer le pouvoir prédictif des intentions, mais aussi de repérer les situations plus ou moins favorables à la réalisation des projets et les changements de projet au fil du temps. Toutefois, en France, les enquêtes de ce type sont relativement peu nombreuses. Dans les années 1970, un échantillon d’environ 2000 femmes a été suivi sur une période de 5 ans (entre 1974 et 1979). Alain Monnier a ainsi montré la diversité des trajectoires qui existait, entre réalisation des projets et redéfinition des intentions (Monnier, 1987). L’enquête Intentions de fécondité conduite par l’Ined entre 1998 et 2003 a également permis d’interroger les mêmes personnes à trois reprises, mais l’exploitation des données n’a pu être pleinement réalisée en raison de biais sur les variables d’intérêt (notamment la question des intentions de fécondité) liés à une attrition trop sélective de l’échantillon (Mazuy et al., 2005). Ces données ont néanmoins permis de rapprocher les comportements féconds observés entre 1998 et 2003 des intentions déclarées initialement et de faire émerger certains facteurs favorisant ou contrariant la réalisation des projets. Parmi eux, le fait d’être en couple, la durée de l’union, l’âge, le nombre d’enfants déjà nés ou encore le degré d’intentionnalité sont autant de facteurs corrélés à l’arrivée d’un enfant (Toulemon et Testa, 2005). Les résultats de cette enquête révèlent également qu’en France, les personnes les plus diplômées réalisent plus souvent leurs intentions (ou anticipent mieux leur propre comportement). En revanche, ils ne montraient guère de comportements distincts entre les couples mariés et les couples non mariés. Avec les deux premières vagues de l’enquête Érfi de 2005 et 2008, Arnaud Régnier-Loilier et Daniele Vignoli (2011) ont pour leur part montré que les couples mariés avaient une probabilité significativement plus forte que celle des personnes en union libre de réaliser leur projet d’enfant en France. Toutefois, la période couverte par cette étude est plus brève : trois ans contre cinq ans dans celle de Laurent Toulemon et Maria Rita Testa (2005).
5Dans le prolongement des premiers résultats obtenus à partir des deux premières vagues de l’enquête Érfi, nous proposons ici d’élargir la fenêtre d’observation à six ans (en recourant aux trois vagues de l’enquête) mais aussi d’affiner l’analyse : le fait de ne pas avoir eu un enfant « dans les trois ans » alors que l’on en avait l’intention peut signifier un abandon du projet ou simplement un ajournement de celui-ci de quelques mois ou de quelques années, que seule la prise en compte des trois vagues d’enquête peut permettre d’appréhender.
6L’objectif de ce chapitre est triple. Il s’agit dans un premier temps de donner un aperçu général des trajectoires fécondes, de l’évolution des projets et de leur réalisation sur six ans. Après avoir créé un indicateur synthétique d’intention à partir des différentes questions de l’enquête (encadré 1) et l’avoir confronté au parcours génésique des personnes suivies, nous construisons une arborescence inspirée des travaux d’Alain Monnier (Monnier, 1987) afin de décrire la diversité des situations. Dans un deuxième temps, nous cherchons à identifier les facteurs corrélés à l’ajournement des projets de fécondité (c’est-à-dire à la survenue d’une naissance, mais plus tard qu’initialement envisagé) et ceux corrélés à la non-survenue d’une naissance après les six années d’observation. Pour ce faire, une analyse descriptive de l’arrivée d’un enfant au fil des six années observées est d’abord menée auprès des personnes ayant exprimé l’intention d’avoir un enfant dans les trois ans, selon leur situation conjugale et le nombre d’enfants déjà eus. Elle est ensuite complétée par une modélisation multinomiale afin de mettre en évidence les raisons (1) de l’ajournement ou (2) de la non-réalisation des intentions. Enfin, dans un troisième temps, nous nous intéressons « en miroir » aux personnes qui avaient déclaré initialement ne pas/plus souhaiter d’enfants ni dans les trois ans ni plus tard. À partir d’une régression logistique ordinaire, nous identifions les principales caractéristiques corrélées au fait d’avoir finalement eu un enfant au cours de la période observée.
Encadré 1. Champ de l’étude, formulation des questions et construction des indicateurs
Champ
Cette étude porte sur les personnes ayant répondu aux trois vagues d’enquête (2005, 2008 et 2011), en couple ou non, fertiles en 2005 et encore en âge d’avoir des enfants en 2008 (c’est-à-dire dont la femme est âgée de moins de 45 ans en 2008, puisque nous regardons la survenue d’un enfant non seulement entre 2005 et 2008 mais aussi au-delà). Cela représente 2 677 personnes(1).
Construction des indicateurs
La variable d’intention de fécondité a été construite à partir de différentes questions issues de la première vague d’enquête :
Q1. « Nous allons maintenant parler de vos intentions de fécondité. Vous-même, voudriez-vous avoir d’autres enfants, maintenant ou plus tard (en plus de celui que vous attendez) ? Oui/Non, mais peut-être plus tard/Non, ni maintenant ni plus tard/ Ne sait pas ».
Q2. Si « Oui », « Non, mais peut-être plus tard » ou « Ne sait pas » en Q1 : « Souhaitez-vous avoir un enfant dans les trois années à venir ? Non/Non probablement pas/Oui probablement/Oui/Ne sait pas ».
Q3. Si « Non », « Non probablement pas » ou « Ne sait pas » en Q2 : « Supposons que vous n’ayez pas d’ (autre) enfant dans les trois années à venir. Comptez-vous tout de même adopter ou avoir un enfant plus tard ? Non/Non probablement pas/Oui probablement/Oui/Ne sait pas ».
À partir des réponses à ces trois questions, un indicateur unique en 7 modalités (parfois regroupées selon les figures) a été créé : la personne a l’intention d’avoir un enfant…
– « Oui dans les trois ans » (réponse « Oui » en Q2) ;
– « Oui probablement dans les trois ans » (réponse « Oui probablement » en Q2) ;
– « Oui plus tard » (réponse « Oui » en Q3) ;
– « Oui probablement plus tard » (réponse « Oui probablement » en Q3) ;
– « Non probablement pas » (réponse « Non probablement pas » en Q3) ;
– « Non jamais » (réponse « Non, ni maintenant ni plus tard » en Q1 ou « non » en Q3) ;
– « Ne sait pas » (réponse « Ne sait pas » en Q3).
Concernant la réalisation des projets de fécondité, trois situations sont considérées :
– « Pas d’enfant du tout » : la personne n’a pas eu d’enfant entre 2005 et 2011 et n’en attend pas en 2011 (la femme n’est pas enceinte) ;
– « Enfant conçu entre 2005 et 2008 » ou « enfant conçu dans les trois ans » : la personne a conçu un enfant entre la première et la deuxième vague d’enquête. Les personnes qui attendaient un enfant lors de la première vague ne sont pas incluses (la question des intentions portait alors sur l’intention d’avoir un enfant « en plus de celui que vous attendez ») ;
– « Enfant conçu entre 2008 et 2011 » ou « enfant né plus tard » : la personne a conçu un enfant entre la deuxième et la troisième vague d’enquête. Les personnes qui attendent un enfant lors de la troisième vague sont donc incluses dans cette catégorie (on considère alors qu’elles ont réalisé leur projet de fécondité).
Si une même personne a eu plusieurs enfants sur la période observée (2005-2011), seul le premier enfant conçu depuis la première vague est considéré.
(1) Pour simplifier l’exposé des résultats, nous parlerons dans l’étude de personnes encore « en âge d’avoir des enfants ».
7Il s’agit donc ici de nous intéresser aux facteurs qui conduisent à s’écarter des intentions initiales, d’une part, pour les répondants qui avaient déclaré souhaiter un enfant dans les trois ans et qui ont retardé ce projet ou qui ne l’ont pas eu après six ans, d’autre part, pour ceux qui ne souhaitaient pas ou plus d’enfants mais qui en ont tout de même eu un.
I. Projet initial, réalisation et redéfinition du projet
1. Des intentions à leur réalisation, de multiples trajectoires
8Les trois vagues d’enquête permettent de confronter les intentions « dans les trois ans » à la réalisation ou non des projets sur deux périodes distinctes, 2005-2008 et 2008-2011. Dit autrement, on connaît l’intention de fécondité du répondant en 2005 (vague 1), le fait qu’il ait ou non engagé une grossesse dans les trois années qui ont suivi (2005-2008), ses intentions en 2008 pour les trois années suivantes et la survenue ou non d’une grossesse sur la dernière période d’observation (2008-2011). Une grande variété de situations est possible. La figure 1 n’en représente que quelques-unes, afin de mettre en regard l’arrivée ou non d’un enfant entre les deux premières vagues (2005- 2008) avec les intentions initiales et, en cas de non-survenue d’une grossesse, de montrer la redéfinition du projet et sa réalisation ou non sur la seconde période (2008-2011). Les hommes et les femmes sont considérés ensemble afin de disposer d’effectifs plus conséquents ; une analyse par sexe a été préalablement conduite et ne laissait guère entrevoir de grandes différences, autorisant ce regroupement.
Figure 1. Projets de fécondité (2005) et réalisation (2005 et 2008), redéfinition des projets (2008) et réalisation (2008-2011)

Champ : répondants aux 3 vagues, en âge d’avoir des enfants (n = 2677). Note : la catégorie « Dans les trois ans » regroupe les catégories « Oui dans les trois ans » et « Oui probablement dans les trois ans » ; la catégorie « Après trois ans » regroupe les réponses « Oui plus tard » et « Oui probablement plus tard » et la catégorie « Ne souhaite pas d’enfant » les réponses « Non probablement pas » et « Non jamais » (encadré 1). Lecture : 30 % des répondants ont déclaré en 2005 souhaiter avoir un enfant dans les trois ans. 38,4 % d’entre eux ont eu un enfant dans les trois ans. Parmi les répondants qui ont déclaré en 2005 souhaiter un enfant, 61,6 % n’en ont pas eu dans les trois ans qui ont suivi (2005-2008), 49,4 % d’entre eux ont réitéré leur souhait en 2008 d’avoir un enfant dans les trois ans qui suivaient ; et parmi ces derniers, 49,8 % ont conçu un enfant entre 2008 et 2011.
Source : Érfi-GGS123, Ined-Insee, 2005-2008-2011.
9À partir des intentions initiales (2005), nous pouvons suivre trois trajectoires principales. La première témoigne d’une absence de projet d’enfant. En 2005, les répondants déclarent ne pas souhaiter d’enfants, ni « dans les trois ans » ni « plus tard ». Ils sont plus de la moitié de l’échantillon dans cette situation (53 %) et dans 97 % des cas, aucune naissance n’est survenue dans les trois ans (2005-2008). De même, ils ne reviennent pas en 2008 sur leur choix initial de ne pas avoir d’enfant puisqu’ils demeurent en très grande majorité opposés au projet d’enfant, 88 % réitérant leur souhait de ne pas en avoir à l’avenir. Parmi eux, seuls 3 % en auront finalement un, entre 2008 et 2011. Le pouvoir prédictif des intentions « négatives » de fécondité apparaît donc très fort sur six années d’observation. Si cette trajectoire peut être le résultat de jeunes répondants, sans conjoint et sans projet de fécondité établi au moment de l’enquête, donc susceptibles de changer d’avis, il s’agit en réalité principalement d’hommes et de femmes ayant renoncé à avoir un enfant après en avoir eu précédemment (80 % étaient déjà parents d’au moins un enfant en 2005) et de personnes relativement plus âgées (37 ans en moyenne pour les femmes et 38 ans pour les hommes contre respectivement 27 et 29 ans pour celles et ceux qui indiquaient avoir l’intention d’avoir un enfant un jour). Il semble ainsi que la décision de ne plus avoir d’enfants soit relativement figée. Cette trajectoire représente 44 % de la population initiale d’hommes et de femmes en âge d’avoir des enfants.
10La deuxième trajectoire présente au contraire des projets de fécondité à court terme (dans les trois ans), mais dont le caractère prédictif peut être questionné. En effet, parmi le tiers des répondants (30 %) ayant déclaré souhaiter un enfant dans les trois ans en 2005, 62 % n’ont pas engagé de grossesse avant 2008. Deux principales options se dessinent alors en 2008. Pour la moitié d’entre eux, le projet est reconduit (49 % déclarant toujours en 2008 souhaiter un enfant dans les trois années suivantes), projet qui se réalise effectivement entre 2008 et 2011 dans un cas sur deux. Il s’agit donc pour ces personnes en moyenne assez jeunes (hommes de 29 ans, femmes de 26 ans) d’un projet qui se concrétise un peu plus tard que ce qui était initialement envisagé et, dans la très grande majorité des cas, il s’agit de l’arrivée d’un premier enfant. Toutefois, seconde option, un tiers des répondants n’ayant pas eu d’enfant entre 2005 et 2008 (malgré une intention positive émise en 2005) paraissent renoncer à leur projet en 2008, 35 % déclarant alors ne plus souhaiter d’enfants. Ces personnes en moyenne plus âgées (hommes et femmes de 36 ans en moyenne) étaient pour la plupart déjà parents d’au moins un enfant. Malgré tout, 17 % d’entre elles engagent finalement une grossesse entre 2008 et 2011 (soit une proportion nettement plus élevée que celle observée chez les personnes qui ne souhaitaient pas/ plus d’enfants dès 2005).
11Enfin, une troisième trajectoire représente des projets de moyen terme, avec le souhait en 2005 d’avoir un enfant « plus tard », au-delà de trois ans (17 %). Au cours des trois premières années d’observation, le comportement de ces personnes se rapproche de celles ayant déclaré ne pas souhaiter d’enfant ni maintenant ni plus tard (6 % seulement ont en effet engagé une grossesse entre 2005 et 2008). On peut s’interroger sur le sens de leur déclaration : souhaiter un enfant « plus tard » peut à la fois traduire une réelle volonté d’avoir un enfant dans un avenir plus lointain mais peut aussi être le résultat d’un projet hésitant. En réalité, il s’agit pour l’essentiel de jeunes (hommes de 24 ans et femmes de 23 ans en moyenne) qui n’ont pas encore d’enfant (dans près de 9 cas sur 10). Parmi ceux n’ayant pas eu d’enfants entre 2005 et 2008, 41 % ont une intention qui se précise en 2008 avec le souhait d’avoir un enfant « dans les trois ans » tandis que celle-ci demeure à horizon plus lointain, « après trois ans », pour 39 % d’entre eux.
12Au final, en comparaison avec les résultats d’Alain Monnier (1987), certaines similitudes apparaissent entre la fin des années 1970 et aujourd’hui : on retrouve d’abord dans les deux enquêtes un très bon pouvoir prédictif des intentions négatives de fécondité (intention de ne pas avoir d’enfants) et un pouvoir prédictif bien moins fort des intentions positives de fécondité, même si la confrontation de ces deux sources n’est que peu précise (encadré 2). Par ailleurs, nos résultats confirment que les intentions de fécondité doivent être analysées comme un processus dynamique, en évolution continue au fil des événements de la vie (Iacovou et Tavares, 2011). Ainsi, lorsque l’intention d’avoir un enfant en 2005 ne s’est pas traduite par une naissance entre 2005 et 2008, elle n’est pas nécessairement reconduite en 2008.
Encadré 2. Confrontation des enquêtes Érfi 2005-2011 et Fécondité 1974-1979 : un pouvoir prédictif des intentions de fécondité relativement stable depuis les années 1970
Une comparaison précise avec les travaux conduits par Alain Monnier (1987) à partir de l’enquête Fécondité de 1974-1979 s’avère difficile pour deux principales raisons. Tout d’abord, le champ d’étude n’est pas le même. L’enquête de 1974 ne porte que sur des femmes mariées ayant un enfant en bas âge, et les périodes d’observation diffèrent entre les deux enquêtes : deux ans (1974-1976) et trois ans (1976-1979) dans l’enquête Fécondité, contre trois ans (2005-2008) et trois ans (2008-2011) dans Érfi. En outre, la formulation des questions et les modalités de réponse ne permettent pas d’appréhender à l’identique les intentions de fécondité. En effet, dans l’enquête de 1974, les femmes interrogées pouvaient répondre « J’ai l’intention d’avoir un enfant ; j’ai l’intention de ne plus avoir d’enfant ; je n’ai pas d’idée précise » (Monnier, 1987, p. 820) ; or, dans l’enquête Érfi, on propose des horizons temporels définis (encadré 1). Une mise en regard demeure possible en rapprochant le champ d’observation d’Érfi de celui de l’enquête de 1974-1979, c’est-à-dire en ne considérant dans Érfi que les personnes en couple(1) ayant au moins un jeune enfant (moins de trois ans), et en admettant que les personnes qui souhaitent un enfant « dans les trois ans » ou « plus tard » (Érfi) sont des personnes ayant « l’intention d’avoir un enfant » (enquête de 1974).
Des tendances finalement similaires se dessinent alors entre les deux enquêtes avec notamment un très fort pouvoir prédictif des intentions « négatives » de fécondité (intention de ne pas avoir d’enfants) : 7 % des femmes et des hommes parents d’un jeune enfant et « ne souhaitant pas/plus d’enfants ni maintenant ni plus tard » en 2005 ont tout de même eu un enfant entre 2005 et 2008 contre 10 % des femmes mariées et mères d’un jeune enfant déclarant avoir « l’intention de ne pas avoir d’enfant » en 1974 qui ont finalement eu un enfant entre 1974 et 1976. La proportion de personnes n’ayant pas réalisé leurs intentions de ne pas avoir d’enfant apparaît toutefois supérieure dans l’enquête de 1974, sur une période d’observation pourtant plus brève. Cette différence n’a en fait rien de surprenant dans la mesure où la maîtrise de la fécondité s’est très largement accrue à la fin des années 1970 (voir chapitre 8). Le pouvoir prédictif des intentions « positives » de fécondité est en revanche moins fort que celui des intentions « négatives », tant dans Érfi que dans l’enquête de 1974. Dans Érfi, 51 % des hommes et des femmes en couple ayant un jeune enfant (de moins de trois ans) et ayant l’intention d’avoir un enfant « dans les trois ans » ou « plus tard » en 2005 ont engagé une grossesse entre 2005 et 2008, 71 % entre 2005 et 2011 ; dans l’enquête Fécondité, 46 % des femmes mariées mères d’un jeune enfant et ayant « l’intention d’avoir un enfant » en 1974 en ont eu un entre 1974 et 1976, 73 % entre 1974 et 1979(2).
(1) Marié ou non, les situations conjugales ayant largement évolué depuis les années 1970 (Rault et Régnier-Loilier, 2012). En outre, hommes et femmes sont regroupés afin de disposer d’effectifs suffisants (une étude stratifiée par sexe a cependant été menée mais ne laisse guère apparaître de différences).
(2) Cumul des proportions suivantes issues du schéma 1.1. de Monnier (1987 : 823) : 46,1 % des femmes ayant eu un enfant entre 1974 et 1976 auxquelles s’ajoutent 26,7 % de femmes n’ayant pas eu d’enfant entre 1974 et 1976 mais en ayant eu un entre 1976 et 1979.
2. La réalisation des projets de fécondité étroitement liée au degré d’intentionnalité et au nombre d’enfants déjà nés
13Comme nous l’avons vu (figure 1), l’horizon temporel des intentions de fécondité (dans les trois ans ou plus tard) détermine fortement la trajectoire féconde des personnes entre 2005 et 2011. Mais, à l’intérieur d’un même horizon temporel, le degré d’intentionnalité est lui aussi déterminant. Toutes parités atteintes confondues en 2005 (figure 2a), la moitié (50 %) des personnes ayant affirmé souhaiter un enfant dans les trois ans (réponse « oui ») ont effectivement eu un enfant entre 2005 et 2008 (65 % entre 2005 et 2011) contre à peine plus d’un quart (28 %) de celles ayant répondu « oui probablement » à la question des intentions (53 % entre 2005 et 2011). Le degré d’intentionnalité apparaît donc central pour appréhender les comportements, en accord avec le cadre théorique fondateur de l’analyse des intentions proposé par Ajzen (1991) : l’intention est en effet considérée comme un préalable nécessaire (mais non suffisant) à l’action.
14La prise en compte du nombre d’enfants qu’avait déjà le répondant en 20052 est un autre critère déterminant. Ainsi, les parents d’un enfant en 2005 (figure 2c) vivent plus fréquemment une grossesse que les autres, quelle que soit la période observée (28 % ont eu un enfant entre 2005 et 2008, proportion qui atteint 40 % si l’on élargit la fenêtre d’observation jusqu’en 2011). Ce constat vaut quel que soit le degré d’intentionnalité émis en 2005. Par exemple, 57 % des parents d’un enfant exprimant une intention ferme (« Oui ») d’en avoir un dans les trois ans en ont effectivement conçu un entre 2005 et 2008 (72 % entre 2005 et 2011) contre 47 % des personnes sans enfant (64 % entre 2005 et 2011) et 44 % des parents d’au moins deux enfants (55 % entre 2005 et 2011). Chez les parents d’un enfant, le processus préalable à la constitution d’une famille est alors déjà enclenché (la plupart des personnes sont en couple, ont achevé leurs études, disposent d’une situation professionnelle établie). En outre, dans le contexte français où la plupart des personnes souhaitent au moins deux enfants proches en âge (en raison notamment d’un ensemble de représentations négatives de l’enfant unique) et ne veulent pas laisser un espacement trop important entre chaque naissance3 (Régnier-Loilier, 2007), l’arrivée du deuxième enfant survient alors assez rapidement, en moyenne 3,4 ans après le premier4.
Figure 2. Proportion de personnes ayant conçu un enfant entre 2005 et 2011 selon les intentions déclarées en 2005

Champ : répondants aux 3 vagues, en âge d’avoir des enfants (n = 2677). Note : la catégorie « Peut-être ou plus tard » regroupe les réponses « Oui plus tard » et « Oui probablement plus tard ». Lecture (exemple « ensemble ») : 27,3 % des répondants ont conçu un enfant entre 2005 et 2011 (14,0 % entre 2005 et 2008 et 13,3 % entre 2008 et 2011). 49,4 % de ceux qui avaient l’intention d’avoir un enfant dans les trois ans (réponse « oui ») ont conçu un enfant entre 2005 et 2008, 15,7 % entre 2008 et 2011.
Source : Érfi-GGS123, Ined-Insee, 2005-2008-2011.
15La réalisation des intentions de fécondité des personnes sans enfant est en revanche moins fréquente dans la mesure où la décision d’entrer en parentalité représente un tournant majeur dans la vie des personnes. Elle dépend notamment du contexte dans lequel se trouve la personne. Hobcraft et Kiernan (1995) énumèrent notamment cinq conditions qui jouent sur la décision de devenir parent : avoir une relation conjugale stable, avoir achevé sa formation initiale, avoir un emploi qui procure une autonomie financière satisfaisante, avoir son propre logement et, enfin, avoir un sentiment général de sécurité quant à la stabilité politique, sociale et économique de son pays.
16Si le nombre d’enfants joue un rôle important dans la réalisation des intentions, la fermeté de celles-ci pèse également sur la survenue d’un enfant. Ainsi, dans le cas d’intentions peu marquées (« oui, probablement »), les naissances dans les trois ans sont rares, en particulier pour les personnes sans enfant (22 % contre 39 % chez celles ayant déjà un enfant en 2005). Ces dernières vivent en effet fréquemment seules en 2005 (environ une sur deux contre 14 % des parents d’un enfant), or la vie de couple est l’une des conditions préalables à l’arrivée d’un enfant (Régnier-Loilier et Perron, 2014 ; voir également section II.1 ci-après). Leur intention d’avoir « probablement » un enfant dans les trois ans semble alors pouvoir s’interpréter plutôt comme un souhait plus qu’un réel projet clairement défini, souhait qui conduit cependant à la survenue d’une grossesse un peu plus tard pour bon nombre d’entre elles (30 % ont conçu un premier enfant entre 2008 et 2011).
17Si, comme nous l’avons vu plus haut, l’absence d’intention d’avoir un enfant dans les trois ans ou plus tard se traduit très rarement par l’arrivée d’un enfant, une naissance survient cependant plus fréquemment lorsque hommes et femmes n’ont aucun enfant en 2005 avec, le plus souvent, un délai supérieur à trois ans (figure 2b). Si 21 % des personnes sans enfant qui déclaraient en 2005 ne pas en vouloir en ont finalement eu un dans les six ans (pour seulement 5 % entre 2005 et 2008), les personnes ayant déjà un enfant ou au moins deux enfants sont respectivement 8 % et 7 % seulement à avoir un nouvel enfant entre 2005 et 2011 (5 % et 2 % entre 2005 et 2008). Ainsi, l’absence de désir d’enfant à un moment donné peut être très circonstanciée (pas de conjoint à ce moment-là, difficulté à se projeter dans une vie familiale quand on est jeune, etc.), mais son pouvoir prédictif est questionnable. Identifier et chercher à caractériser les « sans enfant volontaire » dans une population encore en âge d’avoir un enfant, à partir des questions d’intention de fécondité s’avère donc relativement difficile (Debest, 2014).
18Après ce panorama général des trajectoires fécondes, nous allons chercher plus spécifiquement à caractériser la non-réalisation des intentions de fécondité, que celles-ci soient « positives » ou « négatives ». Pour ce faire, nous nous limitons à explorer deux des trois trajectoires décrites à partir de la figure 1. La première représente les personnes souhaitant en 2005 un enfant dans les 3 ans et qui, soit ont reporté sa venue (conceptions entre 2008 et 2011), soit n’en ont pas eu entre 2005 et 2011. La seconde correspond aux personnes ayant déclaré ne pas souhaiter d’enfants à l’avenir mais qui en ont finalement eu un. Nous laissons ainsi de côté la trajectoire minoritaire des personnes ayant indiqué en 2005 souhaiter un enfant « plus tard ». Comme nous l’avons vu, cette situation regroupe en effet des situations hétérogènes ; d’une part, des personnes sans enfant qui n’étaient pas encore prêtes à entrer en parentalité et, d’autre part, des parents d’un ou de plusieurs enfants mais qui abandonnent l’idée d’agrandir leur descendance.
II. Facteurs liés à la non-réalisation des intentions « positives » de fécondité
1. Être en couple cohabitant, un préalable essentiel
19En nous limitant aux personnes ayant l’intention d’avoir un enfant dans les trois ans, observons d’abord la survenue d’une grossesse au fil des 72 mois qui suivent la première vague d’enquête, selon la situation de couple de la personne en 2005 (figure 3). La réalisation du projet d’enfant à court terme est bien plus fréquente chez les couples mariés : plus de la moitié a un enfant dans les trente-six mois qui suivent contre deux couples non mariés sur cinq. Toutefois, au bout des six années d’observation, les deux catégories se rejoignent : 7 couples sur 10 ont alors eu un enfant. Ce résultat paraît cohérent, à la fois avec ceux de Toulemon et Testa (2005) qui ne notaient aucune différence entre couples mariés et non mariés dans la probabilité de survenue d’une naissance dans les cinq ans mais aussi avec ceux de Régnier-Loilier et Vignoli (2011) qui, pour leur part, notaient une moindre réalisation des intentions des couples non mariés après trois ans d’observation. Les écarts observés entre ces deux études ne sont donc pas contradictoires mais tiennent à des calendriers différents, sans doute dus à plusieurs facteurs : les couples mariés sont constitués depuis plus longtemps (six ans et demi en moyenne) que les couples non mariés (trois ans et demi), ils ont plus souvent déjà un enfant (or le passage au deuxième enfant est plus fréquent que l’entrée en parentalité : figures 2b, 2c et 2d) et leurs intentions sont également plus fermes (65 % des mariés ont répondu « Oui, dans les trois ans » contre 50 % des non mariés), facteur également clé de la réalisation (figure 2a).
Figure 3. Proportions cumulées de personnes ayant eu un enfant entre 2005 et 2011 (parmi celles qui en souhaitaient un dans les trois ans) selon leur situation conjugale en 2005

Champ : répondants aux 3 vagues, en âge d’avoir des enfants et ayant l’intention d’avoir un enfant en 2005 (« oui, dans les 3 ans » et « oui probablement dans les 3 ans » ; n = 773). Lecture : 55 % des personnes en couple marié en 2005 et souhaitant un enfant dans les trois ans ont conçu un enfant dans les 36 premiers mois qui ont suivi la première vague d’enquête.
Source : Érfi-GGS123, Ined-Insee, 2005-2008-2011.
20La réalisation des intentions est en revanche bien moins fréquente chez les personnes qui étaient en 2005 en « relation amoureuse stable » avec quelqu’un avec qui elles ne vivaient pas (25 % ont un enfant dans les trois ans) et plus encore chez les personnes seules (12 %), confirmant l’importance de cohabiter avec un partenaire pour avoir un enfant.
2. L’arrivée du premier enfant est aussi fréquente que celle du deuxième chez les personnes en couple cohabitant
21Comme nous l’observions déjà à partir de la figure 2, à degré d’intentionnalité comparable, l’arrivée d’un deuxième enfant est plus fréquente que l’entrée en parentalité. Si l’on considère l’ensemble des personnes ayant l’intention d’avoir un enfant dans les trois ans, c’est effectivement ce que l’on retrouve au fil du temps (figure 4a) : après trente-six mois d’observation, 34 % des personnes sans enfant en 2005 en ont eu un, contre une personne sur deux (49 %) ayant déjà un enfant. Mais l’arrivée moins fréquente d’un premier enfant tient en grande partie à la situation de couple des personnes. Dès lors que l’on raisonne à situation conjugale équivalente, en bornant l’observation aux personnes en couple cohabitant en 2005, l’arrivée d’un premier enfant n’est pas moins fréquente que celle d’un second enfant dans les trois ans (figure 4b). Plus encore, après six ans d’observation, les personnes en couple et sans enfant en ont plus souvent eu un (78 %) que celles qui étaient déjà parents d’un enfant (66 %).
Figure 4. Proportions cumulées de personnes ayant eu un enfant entre 2005 et 2011 (parmi celles qui en souhaitaient un dans les trois ans) selon le nombre d’enfants déjà conçus en 2005

Champ : répondants aux 3 vagues, en âge d’avoir des enfants et ayant l’intention d’avoir un enfant en 2005 (« oui, dans les 3 ans » et « oui probablement dans les 3 ans ») (figure a : n = 773 ; figure b : n = 500). Lecture : voir figure 3.
Source : Érfi-GGS123, Ined-Insee, 2005-2008-2011.
3. Caractéristiques des personnes ayant ajourné leur projet ou ne l’ayant pas réalisé
22Les premiers éléments qui ressortent de ce qui précède révèlent la multiplicité des facteurs qui entrent en ligne de compte dans la réalisation des intentions de fécondité : l’âge des personnes, leur degré d’intentionnalité, le nombre d’enfants déjà eus ou encore la situation conjugale. Mais beaucoup sont liés entre eux : le degré d’intentionnalité est par exemple fortement corrélé au nombre d’enfants déjà eus ou à la situation conjugale. Afin de mesurer l’effet propre des différents facteurs, mais aussi de voir si les facteurs corrélés à l’ajournement du projet sont les mêmes que ceux liés à sa non-réalisation, nous avons mis en place une régression multinomiale. En regard avec le fait d’avoir réalisé ses intentions initiales de fécondité (donc d’avoir conçu un enfant dans les trois ans, situation prise en référence), nous modélisons le fait d’en avoir conçu un, mais plus tard (entre trois et six ans après) (tableau 1, colonne b) et celle de ne pas en avoir conçu sur la période d’observation de six ans (tableau 1, colonne a). En plus des variables évoquées précédemment, susceptibles d’expliquer la non-réalisation des intentions de fécondité (âge, situation conjugale, nombre d’enfants en 2005, degré d’intentionnalité), nous testons l’effet d’autres caractéristiques :
le niveau de diplôme, les plus diplômés paraissant plus souvent réaliser leurs intentions (Toulemon et Testa, 2005) ;
la situation d’activité simplifiée en 2005 (actif occupé versus inactif ou chômeur5) et le fait d’avoir des fins de mois difficiles, les couples en situation de meilleure stabilité économique ayant plus fréquemment le nombre d’enfants qu’ils souhaitent (voir par exemple Rinesi, 2009) ;
l’origine des personnes ; les personnes de nationalité étrangère ayant une couverture contraceptive moindre (Régnier-Loilier, 2011), on peut supposer qu’elles ont une moins bonne maîtrise de la réalisation de leurs intentions de fécondité, mais aussi que du fait d’un recours moins fréquent à la contraception, elles auront eu plus fréquemment un enfant ;
la pratique religieuse, les comportements familiaux en dépendant de manière significative en France (Régnier-Loilier et Prioux, 2009) ;
et enfin le sexe.
Tableau 1. Propension (paramètres ß) à ne pas avoir réalisé son projet de fécondité pour les personnes qui souhaitaient un enfant dans les trois ans (modèle logit généralisé)

Champ : personnes ayant en 2005 l’intention d’avoir un enfant dans les trois ans (oui et oui probablement). Lecture (exemple colonne a) : un paramètre ß positif (resp. négatif) et statistiquement significatif indique que l’on est en présence d’un facteur qui augmente (resp. diminue) la probabilité de ne pas avoir eu d’enfant entre 2005 et 2011 plutôt que d’en avoir eu un entre 2005 et 2008 (référence), toutes choses égales par ailleurs. Plus la valeur de ce paramètre s’éloigne de 0 et plus l’impact de ce facteur est important. Légende : Réf. = situation de référence ; ★★★ = significatif à 1 % ; ★★ = à 5 % ; ★ = à 10 % ; sans ★ = non significatif.
23Source : Érfi-GGS123, Ined-Insee, 2005-2008-2011.Par rapport au fait d’avoir conçu un enfant dans les trois ans, les caractéristiques des personnes ayant ajourné leur projet (tableau 1, modèle b) diffèrent sensiblement de celles n’ayant pas du tout eu d’enfant sur la période (tableau 1, modèle a). En premier lieu, la probabilité de ne pas avoir eu d’enfant entre 2005 et 2011 augmente sensiblement avec l’avancée en âge, peut-être en partie à cause de la baisse de la fertilité avec l’âge, de même qu’avec le nombre d’enfants déjà eus (moins de chances d’avoir eu un enfant pour les parents en ayant déjà au moins deux), toutes choses égales par ailleurs. Les personnes les moins diplômées ont également une probabilité accrue de ne pas avoir d’enfant sur la période, confirmant une moindre anticipation de leurs propres comportements, déjà relevée dans l’enquête Intentions de fécondité 1998-2003 (Toulemon et Testa, 2005). Par rapport aux personnes en couple avec le même partenaire en 2005 et en 2008, celles s’étant séparées dans l’intervalle et, plus encore, celles qui n’étaient pas en couple en 2005 ni en 2008 ont davantage de risques de ne pas avoir eu d’enfant. En revanche, toutes choses égales par ailleurs, la modélisation confirme l’absence d’effet du statut matrimonial déjà relevé en figure 3. Enfin, l’origine géographique joue un rôle sur la propension à ne pas réaliser son projet de fécondité. Les immigrés se distinguent ainsi par une probabilité plus faible de ne pas avoir eu d’enfant sur la période.
24Moins de caractéristiques distinguent les personnes ayant ajourné la réalisation de leur projet à 2008-2011 de celles ayant engagé une grossesse dans les trois ans (tableau 1, modèle b). En particulier, l’avancée en âge n’a ici aucun effet significatif. Seuls les plus jeunes (moins de 25 ans en 2005, par rapport aux 25-29 ans en référence, âges les plus féconds) ont une probabilité significativement plus élevée d’avoir reporté l’arrivée de l’enfant. Il en est de même pour les personnes seules en 2005 et en 2008. En outre, on note une probabilité plus faible d’avoir reporté le projet d’enfants pour les inactifs, résultat difficilement interprétable à ce stade en raison du caractère trop agrégé de la catégorie (du fait de la faiblesse des effectifs observés, regroupement des personnes au foyer, en congé parental mais aussi des étudiants et des chômeurs). Au-delà des situations d’activité simplifiée et conjugale de la personne (ici en partie contrôlées), d’autres facteurs plus difficilement observables peuvent conduire au report de l’entrée en parentalité des plus jeunes : sécurité de l’emploi, attendre d’être sûr que le couple soit stable, avoir déjà profité de la vie de couple sans enfant, disposer d’un logement assez grand ou plus généralement que les deux conjoints se sentent « prêts » à devenir parents (Mazuy, 2009).
25Qu’il s’agisse de la pratique religieuse ou des difficultés financières en fin de mois, aucun effet significatif ne se dégage sur la réalisation des intentions, toutes choses égales par ailleurs. Enfin, parmi les variables de contrôle prises en compte, on ne note aucun effet du sexe du répondant mais, en revanche, un effet significatif du degré d’intentionnalité qui joue dans le sens attendu, à la fois sur la probabilité d’avoir reporté la réalisation du projet à 2008-2011 et sur celle de ne pas avoir conçu d’enfant sur la période.
26Ainsi, en écho aux résultats obtenus dans d’autres pays (Kapitány et Spéder, 2012), on observe en France la même prédominance des caractéristiques démographiques des personnes (âge, nombre d’enfants, situation conjugale) sur leurs comportements de fécondité. En outre, certains événements du cycle de vie comme la mise en couple ou la séparation s’avèrent très importants à prendre en compte pour comprendre la non-réalisation des intentions de fécondité. L’importance des évènements biographiques sur la fécondité suggère aussi de prendre en compte la trajectoire professionnelle des personnes. Nous verrons notamment que la survenue d’une période de chômage et sa durée peuvent retarder la concrétisation des projets de fécondité (chapitre 10).
III. Facteurs liés à la non-réalisation des intentions « négatives » de fécondité
27Outre la question de la non-réalisation des intentions « positives » de fécondité, finalement assez régulièrement étudiées dans différents contextes, l’étude de la non-réalisation des intentions « négatives » de fécondité (avoir un enfant après avoir déclaré ne pas en souhaiter) est bien moins fréquente. Cela tient en partie aux effectifs observés, la situation étant rare (cf. figure 1). Cette analyse n’était par exemple pas envisageable à partir des seules deux premières vagues de l’enquête. Avec la troisième vague de l’enquête, celle-ci devient possible, une petite centaine de personnes ayant eu un enfant entre 2005 et 2011 alors qu’elles n’en avaient pas l’intention. Nous avons ainsi modélisé la non-réalisation de l’intention de ne pas/plus avoir d’enfant exprimée en 2005 (tableau 2). Dans la mesure où un certain nombre de personnes ont changé d’intention entre 2005 et 2008 (certaines ne souhaitaient pas d’enfants en 2005 puis en souhaitent finalement un dans les trois ans en 2008 : figure 1), ce que l’on mesure ici n’est pas seulement l’échec du projet de ne pas avoir d’enfant mais aussi, pour certaines personnes, le changement d’intention6. La modélisation reprend les mêmes variables que dans le modèle du tableau 1.
Tableau 2. Probabilités (paramètres ß) d’avoir eu un enfant entre 2005 et 2011 versus ne pas en avoir eu (logit dichotomique) pour les personnes n’en souhaitant pas

Champ : personnes n’ayant pas l’intention d’avoir un enfant ni dans les trois ans ni plus tard (« non ni maintenant ni plus tard » et « non probablement pas plus tard »). Lecture : un paramètre ß positif (resp. négatif) et statistiquement significatif indique que l’on est en présence d’un facteur qui augmente (resp. diminue) la probabilité d’avoir eu un enfant entre 2005 et 2011, toutes choses égales par ailleurs. Plus la valeur de ce paramètre s’éloigne de 0 et plus l’impact de ce facteur est important. Légende : Réf. = situation de référence ; ★★★ = significatif à 1 % ; ★★ = à 5 % ; ★ = à 10 % ; sans ★ = non significatif.
Source : Érfi-GGS1-3, Ined-Insee, 2005-2011.
28Parmi les caractéristiques sociodémographiques, on observe en premier lieu un effet du sexe du répondant, les femmes ayant une moindre probabilité d’avoir eu un enfant entre 2005 et 2011 alors qu’elles avaient déclaré ne pas en souhaiter en 2005 (les intentions négatives de fécondité paraissent donc plus réversibles chez les hommes). L’âge joue également fortement, la probabilité d’avoir eu un enfant étant d’autant plus faible que la personne est âgée. Il en est de même concernant le nombre d’enfants déjà eus, la cohérence entre intention négative et comportements effectifs s’avérant meilleure chez les parents ayant déjà au moins deux enfants. La situation conjugale est ici également déterminante : sans surprise les personnes seules en 2005 et en 2008 ont moins de chances d’avoir eu un enfant et, inversement, celles s’étant mise en couple dans l’intervalle ont plus souvent accédé au titre de parent.
29Concernant les autres facteurs, le fait de déclarer une pratique religieuse augmente le risque d’avoir un enfant alors qu’on ne le souhaitait initialement pas. Il peut s’agir du résultat d’une injonction à constituer une famille dès lors que l’on est en couple ou à la conséquence d’une moindre couverture contraceptive chez les personnes des religions les plus pratiquantes (Régnier-Loilier, 2011). Enfin, contrairement à la réalisation des intentions positives de fécondité qui dépend étroitement du degré d’intentionnalité, on ne note ici aucune différence significative de comportement entre les personnes ayant répondu « Non, ni maintenant ni plus tard » à la question des intentions et celles ayant répondu « Non, probablement pas plus tard ».
Conclusion
30En concordance avec les précédentes études confrontant intentions et comportements effectifs de fécondité, nos résultats mettent en lumière une adéquation relativement faible entre l’intention ferme d’avoir un enfant dans les trois ans et la concrétisation du projet : seule une personne sur deux ayant l’intention d’avoir un enfant dans les trois ans (réponse « Oui ») l’a effectivement conçu sur la période.
31En premier lieu, de nombreuses raisons peuvent venir contrarier la réalisation des projets, comme un changement de situation résidentielle, familiale, conjugale, professionnelle (le chapitre 10 revient notamment sur l’incidence du chômage) ou encore le fait de rencontrer des difficultés à obtenir une grossesse. Mais l’importante proportion de personnes n’ayant pas eu d’enfant alors qu’elles déclaraient en avoir l’intention nous semble pouvoir relever d’une autre explication. Une étude qualitative (en cours d’exploitation), menée auprès d’une trentaine de répondants à l’enquête Érfi n’ayant pas réalisé leur projet d’enfant, met en évidence la pluralité des significations que les personnes mettent derrière une même réponse. Ainsi, une réponse « Oui dans les trois ans » signifie pour certains un projet très construit et partagé avec le conjoint tandis que dans d’autres situations, elle traduit plus un désir, un souhait du répondant sans que cela ne s’apparente réellement à une intention. Pour les plus jeunes, la question de l’enfant n’a alors parfois pas été discutée entre conjoints, voire même la personne n’envisageait pas d’avoir un enfant avec le partenaire avec qui elle était. Pour les plus âgés, c’est davantage la réticence du conjoint à avoir un autre enfant qui peut représenter un frein7. La possibilité qu’offrent les trois vagues d’Érfi d’observer la venue d’un enfant « dans les trois ans » (2005-2008), « plus tard » (2008-2011) ou « pas du tout » permet d’abonder dans ce sens. À degré d’intentionnalité comparable, la probabilité d’avoir un enfant reste très étroitement liée à l’âge : tandis que les plus jeunes tendent à avoir un enfant plus tard que prévu, les plus âgés renoncent plus souvent à leur projet.
32En revanche, le pouvoir prédictif des intentions négatives de fécondité (réponses « Non » et « Ni maintenant ni plus tard ») apparaît bien plus fort : seuls 3 % des personnes déclarant en 2005 ne pas/plus souhaiter d’enfants en ont eu un entre 2005 et 2008. Malgré la rareté de ces situations, nous nous sommes risqués à en rechercher certains déterminants. Une fois encore, l’âge demeure un facteur-clé, une fois contrôlés le degré d’intentionnalité (la probabilité d’avoir eu un enfant diminuant sensiblement avec l’âge) ainsi que le nombre d’enfants. On observe également un effet très fort de la mise en couple qui conduit à revenir sur ses intentions initiales, interrogeant du même coup la pertinence des questions d’intention de fécondité auprès des personnes seules.
33Malgré l’imprécision qu’il peut y avoir derrière les réponses aux questions d’intention de fécondité, dont le sens paraît varier selon la situation des personnes, leur prise en compte reste une dimension importante dans la compréhension du processus de construction des comportements de fécondité.
Bibliographie
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Références bibliographiques
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Notes de bas de page
1 Goldstein, Lutz et Testa (2003) ont montré qu’avec un idéal familial de 1,7 enfant en moyenne, l’Allemagne et l’Autriche faisaient figure d’exception dans l’Union européenne, taux qui reste cependant supérieur à l’indicateur conjoncturel de fécondité de ces pays (à 1,3 enfant par femme). Sobotka et Beaujouan (2014) ont également montré que le nombre idéal d’enfants avoisine 2 enfants en Allemagne et en Autriche.
2 Si la personne attendait un enfant en 2005, celui-ci est compté dans la descendance atteinte en 2005. En effet, la question des intentions interrogeait les personnes sur leur projet en plus de l’enfant attendu.
3 L’enfant unique souffre de représentations plutôt négatives en France (enfant replié sur lui-même, trop couvé par ses parents, etc.). En outre, l’espacement réduit entre les enfants répond à diverses préoccupations des parents (que les enfants puissent jouer ensemble, être complices, par exemple) et à leur souhait de consacrer un temps spécifique à la constitution de la famille, aux soins et à l’éducation des jeunes enfants pour ensuite pouvoir envisager d’autres projets.
4 Il s’agit de l’espacement moyen observé entre le premier enfant du répondant et l’arrivée de son deuxième enfant (né entre 2006 et 2011). Source : Érfi-GGS3, Ined-Insee, 2011.
5 Nous ne distinguons pas les étudiants en raison de la forte colinéarité avec l’âge, ni la situation de chômage en 2005 en raison du peu de cas observés dans le champ. Le chapitre suivant (chapitre 10) s’intéresse plus spécifiquement à l’effet du chômage de manière dynamique, c’est-à-dire au fait de connaître une période de chômage sur l’ensemble de la période d’observation (et non seulement la situation en première vague).
6 Les effectifs observés ne permettent pas de tenir compte du changement d’intention entre 2005 et 2008.
7 Or Magali Mazuy (2009) a bien montré à quel point il était important que les deux conjoints soient « prêts ensemble » avant de concevoir un enfant.
Auteurs
Docteur en sociologie, chargé de recherche à l’Ined et rattaché à l’unité Fécondité, famille, sexualité. Il enseigne également en master les méthodes d’analyse quantitative à l’université Paris-Sorbonne. Ses principaux travaux portent sur la fécondité, la diversité des conjugalités et les relations enfants-parents en France. Ses réflexions portent également sur la méthodologie d’enquête. Responsable de la mise en place des trois vagues de l’enquête Generations and Gender Survey en France (Étude des relations familiales et intergénérationnelles, Érfi) réalisées en partenariat avec l’Insee entre 2005 et 2011, il a également coordonné, avec Wilfried Rault (Ined), l’enquête Étude des parcours individuels et conjugaux (Épic, 2012-2013, en partenariat avec l’Insee).
Enseignant-chercheur en démographie à l’université de Paris-Ouest-Nanterre-la Défense (département de Sociologie) et rattaché à l’équipe Genre, travail, mobilités (GTM) du Centre de recherches sociologiques et politiques de Paris (Cresppa-UMR 7217). Ses recherches portent sur l’étude des histoires de vie en démographie, le passage à l’âge adulte et la formation de la famille en France et en Europe. Les dynamiques familiales et migratoires en Amérique latine constituent un autre de ses champs d’étude. Il participe à ce titre à plusieurs programmes de coopération internationale (GDRI : Mondialisation humaine, migration, travail, génération mobilisation sociale et frontières ; PICS : Naissances mexicaines/Nacimientos Mexicanos).
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L’enquête Étude des relations familiales et intergénérationnelles
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