Chapitre 4. Le devenir conjugal des personnes en relation non cohabitante
p. 111-135
Note de l’auteur
Cette étude a été réalisée dans le cadre d’un projet de recherche comparatif sur les couples non cohabitants en France et en Italie. L’auteur tient à remercier la Direction des relations internationales de l’Ined (DRIP) et l’université de Florence pour son accueil, ainsi que les deux relecteurs anonymes de la version initiale de ce chapitre.
Texte intégral
Introduction
1Si l’acronyme LAT, pour Living Apart Together, remonte à la fin des années 19701, le nombre de travaux démographiques portant sur les couples non cohabitants reste limité, bien qu’une attention particulière semble y être portée récemment2. Bien entendu, cela tient en partie aux données disponibles, le nombre d’enquêtes intégrant ce questionnement s’étant développé ces dernières années. C’est notamment le cas de l’enquête Érfi qui consacre un module spécifique de son questionnaire aux personnes ayant une relation amoureuse stable avec quelqu’un qui ne vit pas dans le logement3. Les estimations citées pour l’Europe se portent aux alentours d’une personne sur dix4. Encore faut-il s’entendre sur la définition que l’on donne au Living Apart Together. Irène Levin (2004) retient par exemple comme définition pour son étude qualitative, des « couples qui ne partagent pas le même logement » et « où les deux partenaires se voient eux-mêmes comme un couple et perçoivent que leur entourage proche les perçoit ainsi » (p. 227). Toutefois, la plupart des études quantitatives s’appuient sur une définition bien plus large, considérant l’ensemble des personnes ayant une relation amoureuse stable avec quelqu’un avec qui elles ne vivent pas comme étant en LAT, quelle que soit l’ancienneté de la relation ou la manière dont les partenaires se considèrent (en couple ou non).
2Cette définition finalement très large explique sans doute pour une part que l’interprétation du phénomène dans la littérature soit plurielle, comme le décrivent Simon Duncan, Julia Carter, Miranda Phillips et Sasha Roseneil (2013). L’importante part de la population concernée, récemment mise en évidence en raison de données désormais disponibles, conduit à la mise en avant du phénomène que l’on tend ainsi à percevoir comme relativement nouveau, voire comme l’expression d’une « nouvelle forme de conjugalité ». Ceci d’autant plus que certaines études font émerger une surreprésentation de femmes plus diplômées qui se retrouvent dans cette forme de relation par « choix ». Il pourrait s’agir de stratégies visant à reporter l’entrée en union pour suivre des études longues et ainsi pouvoir prétendre à un emploi qui permette d’échapper aux responsabilités domestiques et à une répartition des rôles trop traditionnelle (voir par exemple Di Giuglio, 2007, pour l’Italie). Cela n’est pas sans rappeler les modalités de diffusion de la « cohabitation juvénile », entendue comme le fait de vivre sous le même toit avant de se marier, il y a quelques décennies en France et plus généralement en Europe du Nord. Cette vison « moderne » de la mise en couple, appuyée par des proportions visiblement moindres de non-cohabitants en Europe de l’Est et avec moins souvent des raisons tenant au souhait de rester indépendant, serait le signe d’un individualisme croissant et abonderait dans le sens de la théorie de la seconde transition démographique (Liefbroer et al., 2012).
3Mais la part de personnes entretenant une relation amoureuse stable sans pour autant cohabiter avec leur amoureux (se) cache en fait une diversité de situations. Cette forme de relation peut certes s’inscrire dans la durée et être un choix, comme l’ont par exemple documenté Vincent Caradec (1997) chez les « jeunes couples âgés » ou encore Jenny de Jong Giervield (2004). Elles peuvent aussi correspondre à une (nouvelle) phase transitoire (Bawin-Legros et Gauthier, 2001) marquée par des difficultés accrues à acquérir l’indépendance et l’autonomie résidentielle (Régnier-Loilier et Vignoli, 2014), mais qui mène in fine à la cohabitation ou au mariage. Il s’agit ainsi d’une étape « qui ne débouche pas sur une nouvelle modalité conjugale émergente » (Bertaux-Wiame et Trippier, 2006). En ce sens, elle pourrait être rapprochée des périodes de « fréquentation » pré-matrimoniales que vivaient déjà nombre de futurs conjoints des années 1950 en France (Girard, 2012 [1964]). La forme de cette fréquentation a bien entendu évolué, tout comme le choix du conjoint, en étant moins marquée par le contrôle parental et familial et l’œil vigilant de l’entourage.
4Cette diversité de réalités qui se cachent ainsi sous l’acronyme LAT nous a conduit, lors d’une précédente étude, à proposer une typologie des personnes ne vivant ni seules ni en couple5, à partir des données de la première vague de l’enquête Érfi (Beaujouan et al., 2009). Quatre profils ont émergé : les jeunes gens, les monoparentaux, les hors familles et les séniors. Comme l’intitulé de chacun des groupes le laisse entendre, leur caractéristique d’âge et leur histoire conjugale et génésique les différenciaient nettement et, par-delà, leurs relations en elles-mêmes apparaissaient de nature fort différente, tant dans leur vécu (choix ou contrainte) et dans leur organisation (ancrage dans le temps, fréquence des rencontres) que dans leurs perspectives futures (intention de cohabiter). Les LAT apparaissent ainsi comme une catégorie très hétérogène qui, pour une part semble-t-il minoritaire (Duncan et Phillips, 2010 ; Liefbroer, 2012), peut se lire comme l’expression d’une forme d’individualisme mais, pour une autre, semble plutôt s’inscrire dans une forme de continuité représentant plutôt une étape vers la cohabitation (Duncan et al., 2013).
5Ce chapitre se donne pour objectif de prolonger nos premières observations en interrogeant le devenir conjugal des personnes identifiées dans la première vague de l’enquête Érfi (2005) comme ni seules ni en couple trois et six ans plus tard (les mêmes personnes ayant été interrogées à trois reprises), selon leur « profil ». Dit autrement, que sont devenus les jeunes gens, les hors famille, les monoparentaux et les séniors ? Sont-ils toujours en relation amoureuse non cohabitante avec la même personne, se sont-ils installés ensemble ou se sont-ils séparés ? D’une certaine manière, il s’agit d’interroger la pertinence de la typologie construite à partir des données transversales pour décrire la diversité du phénomène. Si certains groupes sont toujours dans la même situation, on pourra alors y voir les signes d’une nouvelle forme de conjugalité qui s’inscrit dans la durée, pouvant peut-être alimenter la vision moderne des LAT. Au contraire, si tel autre groupe a davantage opté pour la cohabitation, il conviendra alors de considérer leur situation passée comme une étape préalable à la vie sous le même toit. Enfin, si les personnes se sont principalement séparées, on pourra y déceler des signes de relations privilégiées mais peu durables, pouvant témoigner de premières expériences amoureuses.
I. Données, contrôles préalables et méthodes d’analyse
1. Repérage des personnes « ni seules ni en couple » dans l’enquête Érfi
6Lorsque le répondant n’avait pas indiqué vivre dans le logement avec un conjoint, la question suivante lui était adressée : « Avez-vous actuellement une relation amoureuse stable avec quelqu’un avec qui vous ne vivez pas ? Il peut éventuellement s’agir de votre époux/épouse si vous ne vivez pas ensemble6 ». Si tel était le cas, s’ensuivait une série de questions portant sur les raisons de ne pas cohabiter, la durée de la relation, son organisation pratique (fréquence des rencontres, distance séparant les domiciles), les perspectives de cohabitation à venir. Parmi les 10079 personnes interrogées en 2005, 1033 se trouvaient dans cette situation. Ramené à l’échelle de la population française de 2005 dans le champ, cela représenterait 3,8 millions de personnes « en relation amoureuse stable », situation qui ne doit cependant pas être confondue avec celle de « couples non cohabitants » qui, elle, ne rassemblerait que 1,4 million de personnes7 (Buisson et Lapinte, 2013).
7Trois ans (fin 2008) puis six ans plus tard (fin 2011), les mêmes personnes étaient recontactées pour répondre de nouveau à un questionnaire similaire. Il est ainsi possible de connaître leur situation conjugale à trois périodes différentes. Toutefois, comme dans toutes enquêtes panel, l’échantillon initial a connu une érosion importante au fil des vagues. L’étude des facteurs liés à l’attrition (voir chapitre 2) montre notamment une moindre participation des jeunes et des personnes seules aux vagues successives de l’enquête. Ces caractéristiques ayant présidé à la construction des quatre profils types de personnes en relation amoureuse stable, il se pourrait ainsi que l’attrition ait entraîné des biais dans la structure des échantillons longitudinaux que les variables de pondération ne corrigeraient pas de manière satisfaisante. Avant d’examiner l’impact de l’attrition sur la structure de notre population d’étude, rappelons d’abord brièvement la manière dont ces quatre groupes de ni seuls ni en couple ont été construits à partir de la première vague d’enquête.
2. Rappel de la construction des quatre profils types à partir de la première vague d’enquête
8De notre précédente étude (Beaujouan et al., 2009), plusieurs figures de la relation amoureuse stable émergeaient, pour lesquelles on posait l’hypothèse de logiques de fonctionnement et d’intentions de cohabiter fort différentes. Afin d’étudier les motivations et les projets en tenant compte des caractéristiques très hétérogènes de ces personnes, nous avons procédé à une classification issue d’une analyse factorielle des correspondances multiples (AFCM). Les variables telles que les motivations de la double résidence (choix ou contrainte), les projets de vie commune ou l’ancienneté de la relation (aspects de la relation que nous souhaitions analyser) n’étaient pas prises en compte. En revanche, la typologie était déterminée à partir du sexe, de l’âge, de la situation d’activité des partenaires, du nombre d’unions antérieures et de la distance séparant les logements des partenaires. De fait, les variables, tels le sexe, le fait d’avoir déjà vécu en couple et la durée du déplacement entre les deux résidences, même si elles participent au calcul des facteurs, étaient très largement dominées lors de la classification par les variables d’âge et de présence d’enfants. Au final, quatre groupes ont émergé :
un premier groupe, les jeunes gens, rassemble 42 % des non-cohabitants et se compose uniquement de personnes ayant moins de 25 ans, sans enfant, célibataires et, pour la plupart, n’ayant jamais vécu en couple. En raison de leur âge, trois fois sur quatre, l’un des deux partenaires est étudiant ;
un deuxième groupe, les monoparentaux, soit 9 % des non-cohabitants, regroupe principalement des femmes. La grande majorité a entre 25 et 54 ans, les divorcés y sont nombreux ;
un troisième groupe, les séniors, 14 % des non-cohabitants, rassemble les personnes de 55 ans et plus, ayant pour la plupart des enfants avec qui ils ne vivent plus et où, dans 9 cas 10, l’un des deux partenaires n’exerce plus d’activité professionnelle. Dans ce groupe, les histoires conjugales sont diverses, avec souvent plusieurs unions cohabitantes et une proportion importante de personnes veuves ;
un dernier groupe, les hors famille (35 %) se distingue plus par ses différences avec les trois autres profils que par une ressemblance entre ses membres. Il rassemble des personnes ayant entre 25 et 54 ans, la plupart sans enfant. Par ses caractéristiques, il se situe dans une position intermédiaire entre les jeunes gens et les monoparentaux, mais contrairement à la majorité des jeunes gens, les personnes de ce groupe sont indépendantes de leurs parents et, contrairement aux monoparentaux, elles n’ont pas d’enfants.
3. La question de l’attrition pour l’étude des relations amoureuses non cohabitantes
9L’échantillon a subi une érosion de près de 35 % entre les deux premières vagues et atteint 43 % en vague 3. Elle n’a pas été aléatoire. En particulier, elle a davantage touché les personnes vivant seules, dont certaines sont en relation amoureuse non cohabitante. Toutefois, cette dernière catégorie n’a pas été prise en compte en tant que telle lors de la construction des poids. Un examen de l’effet de l’attrition sur la structure des quatre groupes de ni seuls ni en couple décrits ci-dessus s’avère donc utile. De manière descriptive, on observe un taux d’attrition plus faible chez les couples cohabitants et à l’inverse plus élevé, tant chez les personnes n’ayant aucune relation que chez celles ayant indiqué être en relation amoureuse stable (tableau 1).
Tableau 1. Taux d’attrition entre les vagues selon la situation conjugale observée en 2005 (vague 1)

Source : Érfi-GGS123, Ined-Insee, 2005-2008-2011.
10Plus finement, en raison des caractéristiques spécifiques de chacun des quatre groupes de ni seuls ni en couple, on peut s’attendre à une attrition plus marquée chez les jeunes gens. La figure 1 met en évidence une attrition significativement moins forte chez les séniors que chez les jeunes gens, tant en vague 2 qu’en vague 3, ces derniers ne se distinguant cependant pas des deux autres groupes (hors famille et monoparentaux).
Figure 1. Taux d’attrition(a) des quatre profils de non-cohabitants, entre V1 et V2 et entre V1 et V3

(a) Proportions observées et intervalles de confiance au seuil de significativité de 5 %.
Source : Érfi-GGS123, Ined-Insee, 2005-2008-2011.
Figure 2. Répartition des quatre profils(a) de non-cohabitants observés en vague 1 sur l’échantillon complet de 2005, en le limitant aux répondants de 2008, à ceux de 2011

Lecture : la proportion de jeunes gens identifiés sur la base de l’échantillon complet de 2005 (1033 personnes en relation non cohabitante) est de 43 % en « 2005 », après application de la variable de pondération relative à la vague 1. Cette proportion reste inchangée (43 %) si on limite l’observation aux seuls répondants en relation non cohabitante en 2005 ayant répondu à la vague 2 de 2008 (resp. vague 3 de 2011) (soit 621 personnes ; resp. 530 personnes), après application de la variable de pondération relative à la vague 2 (resp. vague 3). Légende : (a) Proportions observées et intervalles de confiance au seuil de significativité de 5 %.
Source : Érfi-GGS123, Ined-Insee, 2005-2008-2011.
11Il est donc nécessaire de s’assurer que la pondération recale correctement notre population d’étude sur la répartition initiale observée en vague 1. Pour ce faire sont mises en regard (figure 2) :
la distribution de nos quatre groupes en vague 1, après application de la pondération relative à la vague 1 (2005) ;
la distribution observée toujours en vague 1 mais en limitant l’observation aux seuls répondants ayant pris part à la vague 2, après application du poids longitudinal de la vague 2 (2008) ;
et la distribution observée toujours en vague 1 mais en limitant l’observation aux seuls répondants ayant pris part à la vague 3, après application du poids longitudinal de la vague 3 (2011).
12La répartition des quatre groupes en vague 1 est identique, que l’on s’appuie sur l’échantillon complet de 2005, qu’on le limite aux seuls répondants à la vague 2 ou à ceux ayant pris part à la vague 3. Les poids apparaissent ainsi efficaces de ce point de vue et garantissent la représentativité de nos quatre groupes pour une analyse longitudinale.
4. Méthode
13Afin d’étudier le devenir des ni seuls ni en couple, nous utilisons les données longitudinales des vagues 1, 2 et 3 de l’enquête, en restreignant le champ d’observation aux personnes dans cette situation en 2005 (n = 1033 personnes en première vague). En raison de l’attrition, le nombre d’observations est de 621 en 2008 et 530 en 2011.
14Nous mettons en regard les personnes selon le groupe auquel elles étaient rattachées lors de la première vague avec leur situation conjugale trois et six ans plus tard. Elles peuvent être toujours en relation non cohabitante, être en couple cohabitant ou encore être seules. Dans les deux premières situations (en relation non cohabitante ou en couple cohabitant), cela peut être soit avec la même personne qu’en 2005, soit avec un nouveau partenaire, traduisant alors une rupture de la relation non cohabitante de 2005 (ou le décès du/de la partenaire8). Si elles sont seules, cela indique également que la personne s’est séparée de son compagnon ou de sa compagne de 2005 (ou le décès de celui-ci ou celle-ci).
15Dans un premier temps, nous considèrerons l’ensemble de ces « devenirs » puis, en raison des effectifs relativement restreints, nous nous limiterons à trois destins : être toujours non-cohabitant avec la même personne, avoir emménagé avec elle, ou s’être séparé (catégorie regroupant les personnes seules ou en couple, cohabitant ou non, mais avec un autre partenaire que celui de 2005).
16Dans un deuxième temps, nous procédons à une analyse descriptive évaluant pour chacun des groupes identifiés en 2005 les caractéristiques qui ont plutôt favorisé telle ou telle destinée de la relation.
17Enfin, à partir d’une régression multinomiale, nous modélisons la propension pour une personne 1) à s’être séparée 2) à avoir emménagé versus être toujours non-cohabitant avec le ou la même partenaire (situation de référence), en tenant compte de son groupe d’appartenance (profil) lors de la première vague et d’un ensemble de caractéristiques de la relation (intention de cohabiter, ancienneté de la relation, etc.). Ces modélisations sont répliquées pour la période 2005-2008 et pour la période 2005-2011.
II. Résultats
1. Le devenir conjugal des « ni seuls ni en couple » trois et six ans plus tard
18La figure 3 donne pour chaque profil de relation non cohabitante décrite en vague 1 leur situation conjugale en vague 2 et en vague 3. Notons au préalable que les proportions ici relevées peuvent être sujettes à discussion9. En première observation, l’ampleur des transitions observées entre les vagues confirme les observations de Haskey et Lewis (2006) sur la « fluidity with which people make transition in and out of relationships » (p. 42)10 : seuls 22 % des personnes ni seules ni en couple sont encore dans la même situation avec le même partenaire trois ans plus tard, proportion qui tombe à 11 % en troisième vague (six ans plus tard). Toutefois, les répartitions obtenues sont fort différentes selon les profils, confirmant l’hétérogénéité des non-cohabitants, tant dans leurs caractéristiques que dans leur devenir amoureux.
Figure 3. Évolution de la situation conjugale des quatre profils de non-cohabitants observés en vague 1

Lecture : figure 3a, entre 2005 et 2008, 36 % des jeunes gens se sont mis à cohabiter avec leur partenaire de 2005, 7 % avec un/une autre partenaire, 14 % sont encore en relation non cohabitante avec le/la même partenaire, 19 % avec un/une autre et 25 % sont seuls.
Sources : figure a : Érfi-GGS1-2, Ined-Insee, 2005-2008 (n = 621) ; figure b : Érfi-GGS1-3, Ined-Insee, 2005-2011 (n = 530).
19Si l’on se concentre d’abord sur les trois premières années du suivi (figure 3a), la catégorie des séniors s’avère être la plus stable en tous points : 6 sur 10 sont toujours en relation avec la même personne et parmi elles, 9 sur 10 sont encore en situation de non-cohabitation. La propension à avoir emménagé avec le partenaire de 2005 est faible (7 %). À l’opposé, la catégorie des jeunes gens se caractérise par sa plus grande instabilité. Plus du quart d’entre eux se retrouvent trois ans plus tard dans une nouvelle relation (cohabitante ou non), dont les deux tiers en étant toujours non cohabitant. Dans le même temps, c’est aussi dans cette catégorie que la transition de l’état de non-cohabitant à cohabitant (avec la même personne) a été la plus fréquente (36 % des cas). Les hors famille s’apparentent plutôt aux jeunes gens avec une propension assez élevée à avoir changé de partenaire (17 % contre 5-7 % des séniors ou des monoparentaux). À mi-chemin entre ces deux extrêmes, les monoparentaux s’apparentent un peu plus aux séniors par leur stabilité affective (6 sur 10 sont toujours avec la même personne) mais davantage aux jeunes gens et aux hors famille par leur plus fréquente transition vers la cohabitation (un tiers d’entre eux).
20Si l’on regarde six ans plus tard (figure 3b), le groupe des séniors continue à se distinguer nettement des autres : la proportion de personnes se retrouvant seules est certes de loin la plus élevée (43 %), pouvant traduire une rupture mais aussi le décès du partenaire (cette catégorie regroupant en 2011 des personnes âgées de 61 à 85 ans), mais la stabilité tant affective que dans sa forme conjugale continue de caractériser ce groupe : un tiers des séniors entretiennent encore une relation non cohabitante avec le même partenaire et seuls 10 % ont emménagé ensemble entre 2005 et 2011. En revanche, par rapport à 2005, près de la moitié des jeunes gens ont changé de partenaire (44 %) et parmi eux, 6 sur 10 partagent le même logement. Mais au final, ce groupe est celui pour lequel la proportion de personnes en relation non cohabitante en 2011 est la plus faible (20 %, dont deux tiers avec le même partenaire qu’en 2005). Pour ce groupe, la relation non cohabitante peut ainsi s’interpréter dans la majorité des cas comme une étape vers la cohabitation, s’apparentant à une « fréquentation » pré-cohabitationnelle mais, au regard de la proportion importante de changements de partenaires, également comme des premières aventures amoureuses caractérisées par leur brièveté. Hors famille et monoparentaux continuent d’occuper des positions intermédiaires, les derniers s’étant moins fréquemment engagés dans une cohabitation que les premiers.
21Dans notre précédente étude à partir des données de la première vague (Beaujouan et al., 2009), nous avions noté que les perspectives de cohabitation étaient très différentes selon les quatre groupes : alors que 84 % des jeunes gens, 72 % des hors famille et 61 % des monoparentaux avaient l’intention de cohabiter dans les trois années qui allaient suivre, ce n’était le cas que de 28 % des séniors. Dans les faits, on note ainsi que la cohabitation a été d’autant plus fréquente que le groupe avait l’intention de cohabiter.
22On retrouve cette relation en figure 4a : l’emménagement avec le partenaire de 2005 a été plus fréquent, quel que soit le groupe parmi celles et ceux qui avaient l’intention de cohabiter, que parmi celles et ceux qui n’en avaient pas l’intention, à l’exception toutefois des séniors (pour ces derniers, qu’ils aient déclaré vouloir ou non cohabiter, très peu se sont installés ensemble). Concernant la rupture de la relation, celle-ci n’apparaît pas dépendante du groupe parmi les personnes qui avaient l’intention de cohabiter (la relation s’est terminée dans 4 cas sur 10). En revanche, sa fréquence est très différente, selon les groupes, parmi celles qui n’avaient pas l’intention de vivre ensemble. Ainsi, trois ans plus tard, les trois-quarts des jeunes gens se retrouvent seuls ou en relation/couple avec une autre personne contre seulement 42 % des séniors. Le calcul des intervalles de confiance (au seuil de 5 %)11 confirme une relation significative entre l’intention de cohabiter et la probabilité de séparation chez les jeunes gens et chez les hors famille. Ainsi, l’intention de vivre ensemble apparaît à la fois comme un indicateur de la propension à s’installer ensemble (sauf pour les séniors), mais aussi à se séparer pour les jeunes gens et les hors famille.
Figure 4. Devenir conjugal des quatre profils de non-cohabitants observés en vague 1, trois ans après

* Effectifs inférieurs à 50. Lecture : figure 4a, 47 % des jeunes gens qui avaient en 2005 l’intention de cohabiter dans les trois prochaines années avec leur partenaire se sont séparés (« Relation terminée ») entre 2005 et 2008, 13 % sont toujours avec le/la même partenaire sans cohabiter et 40 % se sont installés avec lui/elle.
Source : Érfi-GGS12, Ined-Insee, 2005-2008 (n = 621).
23On retrouve exactement les mêmes tendances si l’on décompose le devenir des quatre groupes non plus en fonction de l’intention de vivre ensemble, mais selon la raison avancée pour justifier la non-cohabitation, entre contrainte et choix (figure 4b). Lorsque la non-cohabitation est perçue comme une « contrainte », la propension à s’être installés ensemble est identique pour trois groupes (4 cas sur 10), mais bien moindre pour les séniors. Lorsqu’il s’agit d’un « choix », la fin de la relation a été beaucoup plus fréquente chez les jeunes gens que pour les autres groupes.
24Cela suggère une corrélation forte entre intention de cohabiter et raison avancée pour justifier de la situation de non-cohabitation, mais que l’on ne retrouve en réalité que pour deux des quatre groupes, les hors famille et les séniors (figure 5).
Figure 5. Intention de cohabiter dans les trois ans pour chaque groupe selon la raison avancée (choix ou contrainte) pour justifier de la non-cohabitation(%)

Légende : Chi2, ns = non significatif à 10 % ; *** = significatif à 1 %. Lecture : 81 % des jeunes gens qui ont indiqué en 2005 ne pas cohabiter avec leur partenaire par « choix » avaient l’intention de cohabiter avec lui/ elle dans les trois prochaines années.
Source : Érfi-GGS12, Ined-Insee, 2005-2008 (n = 621).
25En revanche, pour les jeunes gens et les monoparentaux, raison et intention de cohabiter ne sont pas significativement liées (test du Chi2). On retrouve ici l’ambivalence des réponses soulevée par Duncan et al. (2013), pour ces deux groupes. Pour les jeunes gens, la notion de contrainte peut renvoyer au fait d’être encore chez ses parents et, quand bien même, à l’absence d’intention de cohabiter, comme nous l’enseigne l’enquête italienne Famiglia e soggetti sociali de 2009. Dans celle-ci en effet, on retrouve les mêmes modalités de réponse pour justifier de la non-cohabitation que dans l’enquête Érfi-GGS, mais avec un item supplémentaire : « Je n’y ai jamais pensé ». Ce dernier rassemble en Italie plus de 35 % des réponses des moins de 25 ans (âge de la catégorie jeunes gens) (Régnier-Loilier et Vignoli, 2014). Dans la version « classique » de l’enquête GGS et, ici, plus précisément dans l’enquête Érfi, l’absence de cette modalité a contraint les jeunes à se positionner entre choix et contrainte, sans que la question ne soit réellement appropriée à leur situation. Pour les monoparentaux, choix et contraintes peuvent se mélanger en un « choix contraint », comme le montrent les résultats de l’équipe de Simon Duncan (2013). La présence d’enfants d’une précédente union peut conduire à ne pas souhaiter cohabiter, situation qui pour certains peut être considérée comme un choix (en raison de mes enfants, je fais ce choix), mais pour d’autres comme une contrainte (ma situation – enfants à charge – me contraint à ne pas vivre avec mon partenaire). Ces apparentes contradictions (être non-cohabitant par contrainte mais ne pas souhaiter cohabiter, par exemple) montrent la complexité à définir précisément les choses.
Figure 6. Choix/contrainte et intention de cohabiter, selon les quatre profils de non-cohabitants

Lecture : 4 % des jeunes gens ont indiqué en 2005 ne pas cohabiter avec leur partenaire par « choix » et n’avaient pas l’intention de cohabiter avec lui dans les trois ans, 70 % ont indiqué ne pas cohabiter par « contrainte » et avaient l’intention de cohabiter, etc.
Source : Érfi-GGS12, Ined-Insee, 2005-2008 (n = 621).
26Si l’on examine de plus près le lien entre raison de la non-cohabitation et intention, les quatre groupes se différencient nettement (figure 6). Les jeunes gens sont très peu à voir leur non-cohabitation comme un choix et à ne pas avoir l’intention de s’installer avec leur partenaire (4 %) contrairement aux séniors (47 %) ; à l’inverse, ils voient massivement leur non-cohabitation comme une contrainte et ont l’intention de cohabiter (70 % contre 22 % chez les séniors). Or la combinaison entre raison de la non-cohabitation et intention de cohabiter détermine fortement le devenir des couples non cohabitants (figure 7). Cela explique donc en partie pourquoi très peu des jeunes gens sont encore en relation non cohabitante avec le même partenaire trois ans après et pourquoi la propension à devenir cohabitant est la plus élevée dans ce groupe (figure 3). Les réponses des monoparentaux apparaissent, en revanche, plus diffuses avec 32 % des personnes indiquant qu’elles ont l’intention de s’installer dans les trois ans et qu’elles ne cohabitent pas par choix, et 36 % par contrainte. Dans les faits, le devenir de ce groupe apparaît plus diversifié avec presqu’autant de séparés, de cohabitants et de personnes restées en relation non cohabitante (figure 3).
Figure 7. Devenir des ni seuls ni en couple selon le choix/contrainte et l’intention de cohabiter

Source : Érfi-GGS12, Ined-Insee, 2005-2008 (n = 621).
2. Quel devenir pour quelles caractéristiques ?
27On l’a vu, le devenir des relations non cohabitantes est très variable selon les quatre profils considérés, lesquels ont des caractéristiques spécifiques (par construction). En s’affranchissant désormais de la typologie construite en 2005, on souhaite voir quelles caractéristiques précises des personnes ou de la relation qu’elles vivent favorisent le fait d’être encore non-cohabitant trois ans plus tard (traduisant une forme de relation inscrite dans la durée), de s’être installé (indiquant que la non-cohabitation était une transition vers la cohabitation) ou que l’union ne soit plus en cours.
28Concernant d’abord les caractéristiques individuelles (tableau 2), la proportion de personnes toujours en relation « chacun chez soi » avec la même personne est d’abord nettement plus élevée avec l’âge : alors que 14 % des 30-39 ans sont encore non cohabitants, c’est le cas de plus de la moitié des 60-79 ans. En lien étroit avec l’âge, les retraités (aux deux vagues) et les veufs sont davantage restés dans la même situation conjugale qu’en 2005. La transition vers la cohabitation a davantage concerné les âges intermédiaires (22-39 ans), 46 % des 22-29 ans s’étant ainsi installés avec leur partenaire. Il s’agit d’un âge où les situations vis-à-vis de l’emploi se stabilisent, permettant d’accéder à un logement. Ainsi, l’emménagement en commun a été bien plus fréquent chez les étudiants ou les actifs en CDD de 2005 ayant accédé à un emploi à contrat indéterminé entre les deux vagues d’enquête12. Enfin, la relation s’est plus souvent terminée parmi les plus jeunes (53 % des 18-21 ans ne sont plus avec leur partenaire de 2005), donc sans surprise parmi les étudiants et les personnes vivant chez leurs parents.
Tableau 2. Devenir des relations non cohabitantes entre 2005 et 2008 selon différentes caractéristiques individuelles (% en ligne)

Lecture : 53 % des hommes en relation non cohabitante en 2005 se sont séparés de leur partenaire entre 2005 et 2008 (ou celle-ci est décédée), 18 % sont restés en relation non cohabitante avec elle et 29 % ont emménagé avec elle. Note : les pourcentages en italique sont calculés sur des effectifs inférieurs à 50. Ils ne sont présentés qu’à titre indicatif.
Source : Érfi-GGS12, Ined-Insee, 2005-2008.
29Au sujet des caractéristiques de la relation décrite en 2005 (tableau 3), les motifs plus précis que « choix » ou « contraintes » orientent d’abord sans surprise la relation non cohabitante dans des directions diverses : les personnes ayant motivé leur non-cohabitation par le souhait de maintenir leur indépendance sont encore, trois ans plus tard, dans une relation chacun chez soi dans 40 % des cas contre 18 % de ceux qui avaient avancé un motif relatif au travail ou aux études. Pour ces derniers, la transition vers la cohabitation a été bien plus fréquente (41 %). Enfin, les fins de relation ont été plus fréquentes chez les personnes ne se disant pas prêtes à cohabiter (55 %) ou indiquant que leur partenaire avait « une autre famille » (60 %), sans que l’on sache ce que recouvre exactement ce motif (déjà en couple avec quelqu’un d’autre ? D’autres enfants issus d’une précédente union ?).
30Les relations longues (5 ans ou plus) ont davantage perduré jusqu’en 2008 (45 % des relations datant de 5 à 8 ans en 2005 sont encore en cours trois ans plus tard), tandis que les relations les plus courtes (deux ans ou moins) ont plus souvent donné lieu à une séparation (52 %) et les relations en place depuis trois-quatre ans à une cohabitation (38 %). La non-cohabitation recouvre ainsi des réalités fort différentes, marquant pour certains, une inscription de cette forme conjugale dans le temps, pour d’autres, l’engagement dans une relation naissante où l’on se découvre et qui est donc empreinte d’incertitudes quant à sa pérennité et, pour d’autres encore, une fréquentation pré-cohabitationnelle.
Tableau 3. Devenir des relations non cohabitantes entre 2005 et 2008 selon différentes caractéristiques de la relation (% en ligne)

Lecture : cf. tableau 2. Note : les pourcentages en italique sont calculés sur des effectifs inférieurs à 50. Ils ne sont présentés qu’à titre indicatif.
Source : Érfi-GGS1-2, Ined-Insee, 2005-2008.
31La distance séparant les domiciles ainsi que la fréquence des rencontres sont de lecture et d’interprétation plus complexes. Les rencontres très fréquentes (signe possible d’une forte proximité entre partenaires et d’une bonne entente entre eux) ont plus souvent donné lieu à une cohabitation. La relation est en revanche restée plus souvent non cohabitante pour les partenaires se voyant « une fois par semaine » et a été plus souvent rompue lorsque les partenaires se voyaient « quelques fois par semaine ».
32Un bloc de questions destinées à identifier ce qui, d’après la personne, serait « mieux ou moins bien » si elle venait à emménager avec son partenaire et ce dont dépendait la décision de s’installer avec elle, était posé en première vague. La mise en regard des réponses avec le devenir de la relation (tableau 4) ne donne pas de résultats très nets ou, à tout le moins, difficiles à interpréter. De manière globale, les personnes indiquant que le fait de cohabiter serait « moins bien » pour faire ce qu’elles souhaitent au quotidien ont plus souvent connu une séparation ou sont davantage restées en relation non cohabitante. À l’inverse, le fait d’estimer que cohabiter serait « beaucoup mieux » pour faire ce que l’on souhaite au quotidien, pour sa situation financière ou encore pour la joie et la satisfaction que procure la vie a conduit à des emménagements bien plus fréquents.
Tableau 4. Devenir des relations non cohabitantes entre 2005 et 2008 selon la réponse à trois questions de perception (% en ligne)

Lecture : cf. tableau 2. Note : les pourcentages en italique sont calculés sur des effectifs inférieurs à 50. Ils ne sont présentés qu’à titre indicatif.
Source : Érfi-GGS1-2, Ined-Insee, 2005-2008.
3. Toutes choses égales par ailleurs
33Comme indiqué dans l’analyse descriptive, un certain nombre de caractéristiques sont en partie corrélées entre elles (par exemple, les raisons avancées pour expliquer la non-cohabitation et l’intention de cohabiter, variables elles-mêmes liées au profil). Afin de raisonner « toutes choses égales par ailleurs », une série de modélisations a été conduite. L’objectif est de voir, à caractéristiques comparables, la probabilité de ne plus être en relation amoureuse avec le partenaire de 2005 (1) ou de s’être mis à cohabiter avec lui/elle (2), plutôt que d’être toujours relation non cohabitante avec lui/elle (modèle de régression multinomiale). Deux modèles sont présentés : le premier porte sur la période 2005-2008, le second sur la période 2005-2011 (tableau 5).
Tableau 5. Probabilité (paramètres ß) que la relation soit terminée/de cohabiter versus être toujours en relation non cohabitante (modèle logit généralisé)

Légende : Réf. = situation de référence ; ★★★ significatif à 1 % ; ★★ à 5 % ; ★ à 10 % ; sans * non significatif. Lecture : un coefficient positif (resp. négatif) et statistiquement significatif indique que l’on est en présence d’un facteur qui accroît (resp. diminue) les chances que la relation soit terminée (resp. devenue cohabitante) plutôt que d’être toujours non cohabitant avec le ou la même partenaire.
Source : Érfi-GGS123, Ined-Insee, 2005-2008-2011.
34Dans la mesure où les « profils » définis en première vague sont inclus dans la modalisation et que ceux-ci ont été très largement déterminés par les variables d’âge et de présence d’enfants issus d’une précédente union, ces dernières caractéristiques ne sont pas prises en compte (colinéarité complète). Outre les quatre profils, les variables suivantes sont introduites dans le modèle :
le sexe du répondant : l’objectif est ici de voir si hommes et femmes se sont reconnus plus ou moins à « l’identique » dans la catégorie des « relations amoureuses stables non cohabitantes ». Dit autrement, si les hommes considèrent comme « stables » des relations plus récentes, il se pourrait qu’ils soient davantage restés en non-cohabitants ou qu’ils se soient séparés sur la période observée ;
les raisons de ne pas vivre ensemble, les regroupements proposés étant guidés par le souhait de disposer d’effectifs relativement conséquents dans chaque catégorie. Nous faisons ici l’hypothèse que les motifs relatifs au choix augmentent la propension à être toujours non cohabitant trois ou six ans plus tard, voire de s’être séparé ;
l’intention du répondant de cohabiter dans les trois ans, et l’avis du partenaire concernant la perspective d’emménager conjointement, les intentions étant des déterminants forts des comportements (voir par exemple chapitres 9 et 10 au sujet des intentions de fécondité) ;
quelques caractéristiques de la relation : son ancienneté d’abord, avec l’idée qu’une relation déjà ancrée de longue date traduit un choix fort ou des contraintes difficiles à surmonter et qu’elle a donc plus de chances de perdurer ainsi ; le temps nécessaire pour se rendre d’un domicile à l’autre, avec l’hypothèse que des distances longues peuvent conduire à affaiblir les liens entre partenaires et donc à une séparation plus probable ;
la situation de santé des partenaires : si l’un d’eux au moins souffre d’un handicap ou d’une incapacité à effectuer certaines activités quotidiennes, cela peut se traduire par des difficultés matérielles ou organisationnelles à cohabiter et donc à demeurer non-cohabitant ;
le fait d’avoir un parent souffrant de handicap ou d’incapacité, certaines études révélant que les couples non cohabitants pourraient se développer en raison de la nécessité de prendre en charge un parent dépendant (voir par exemple Levin et Trost (1999) pour la Suède, ou Milan et Peters (2003) pour le Canada) ;
enfin, le niveau de diplôme du répondant : en étant perçus comme plus individualistes, les diplômés du supérieur aurait une plus forte propension à ne pas cohabiter (Di Giulio, 2007).
35En référence aux hors famille, on observe une moindre propension des séniors à s’être séparés et à avoir emménagé ensemble, tant sur la période 2005-2008 que sur la période 2005-2011. Ainsi, les résultats de l’analyse descriptive sont ici confirmés, toutes choses égales par ailleurs (notamment l’intentionnalité et les raisons de ne pas cohabiter). La non-cohabitation se confirme comme un mode de conjugalité à part entière en deuxième partie de vie (le groupe des séniors se composant notamment de personnes veuves ou séparées). Sur la période 2005-2008, rien ne distingue significativement le devenir conjugal des trois autres groupes. Toutefois, après six années d’observation, les jeunes gens se distinguent des hors famille par une probabilité nettement plus élevée de s’être séparés ou d’avoir emménagé ensemble. La non-cohabitation s’apparente ainsi à une période de fréquentation durant laquelle les jeunes gens éprouvent leurs sentiments mais très peu semblent inscrire cette forme de relation à deux dans la durée. Leurs aspirations se portent rapidement vers une étape plus avancée de la formation du couple (vivre ensemble) ou vers d’autres expériences amoureuses.
36L’ancienneté de la relation abonde dans le même sens. Le groupe des séniors se caractérise par des relations en moyenne plus anciennes, lesquelles ont moins de risques de s’être soldées par une séparation ou d’avoir conduit à un emménagement après trois ans (comparativement à des relations de deux à moins de trois ans). Inversement, les relations récentes qui caractérisent la catégorie des jeunes gens se soldent plus fréquemment par une séparation ou un emménagement au bout de six ans d’observation.
37Toutes choses égales par ailleurs, le pouvoir prédictif des intentions est très largement confirmé : que l’observation porte sur trois ou six années, la probabilité d’emménager ensemble plutôt que de rester non-cohabitant est d’autant plus faible que le degré d’intentionnalité l’était. Il n’a en revanche aucune incidence sur la probabilité de s’être séparé. Ainsi, avoir ou non l’intention de vivre ensemble ne paraît pas pouvoir être interprété comme un indicateur de stabilité de l’union, toutes choses égales. De même, lorsque le partenaire estime qu’ils devraient vivre ensemble, la probabilité d’avoir emménagé est plus élevée mais aucun effet ne se dessine concernant la probabilité de s’être séparé. Toutefois, à six ans, l’hésitation du partenaire traduit une dualité de situation : d’un côté, les chances d’avoir emménagé sont plus élevées (l’hésitation ne traduisait donc sans doute pas une opposition à l’idée de résider ensemble mais à un besoin de temps) mais, de l’autre, celle de s’être séparée est également plus élevée (l’hésitation d’alors pouvant traduire des doutes quant au devenir de la relation).
38Si l’intention de cohabiter et les raisons de ne pas vivre ensemble sont corrélées, ces dernières n’ont toutefois aucun effet significatif sur le devenir de la relation entre 2005 et 2008. En revanche, au bout de six ans, en regard avec le motif des « contraintes professionnelles », les « choix » de ne pas cohabiter (quelles qu’en soient les raisons) se traduisent par une moindre propension à s’être séparés et à avoir emménagé ensemble. Il en est de même concernant les contraintes d’ordre autre que professionnel. Dit autrement, ce sont surtout les raisons professionnelles qui s’avèrent spécifiques, lesquelles ne paraissent pas pouvoir être considérées comme de véritables situations de couple non cohabitant puisqu’il existe le plus souvent un domicile conjugal reconnu comme tel par les deux conjoints (Charrier et Deroff, 2006). Après six ans, soit le couple les a surmontées et s’est (ré) installé sous le même toit, soit la relation n’a pas résisté à celles-ci.
Conclusion
39Le Living Apart Together est de plus en plus présent dans la littérature démographique et sociologique, mais ce concept ne nous semble pas suffisamment interrogé dans son contenu. On l’assimile trop souvent dans le langage courant (notamment dans les médias) à la notion de « couples non cohabitants ». À partir des données transversales de la première vague d’Érfi, nous avions tenté de montrer la pluralité des situations dans lesquelles se trouvaient les personnes ni seules ni en couple (Beaujouan et al., 2009). Quatre profils avaient émergé : les jeunes gens, les hors famille, les monoparentaux et les séniors. Si nous en avions montré les spécificités, notamment en termes d’ancienneté de la relation, d’aspiration à vivre ensemble et de raisons de ne pas cohabiter, seules des données longitudinales peuvent permettre d’étudier le devenir conjugal des personnes de chaque groupe. Quelle est leur propension à être resté dans la même situation, à avoir emménagé avec leur partenaire dans un logement commun ou à s’être séparé ?
40Deux principaux résultats méritent d’être soulignés. En premier lieu, les relations non cohabitantes s’avèrent dans leur ensemble très peu pérennes. Seules 22 % sont encore en cours trois ans plus tard, proportion qui tombe à 11 % si l’on regarde encore trois années après. Ces résultats ne laissent donc pas entrevoir de développement majeur d’une conjugalité non cohabitante qui serait choisie et inscrite dans la durée.
41En second lieu, les trajectoires conjugales (vers un emménagement avec le même partenaire, vers une nouvelle relation, cohabitante ou non, ou encore vers une situation de solitude) différencient nettement les quatre groupes de la typologie initialement construite. À peine une personne sur dix identifiée dans le groupe des jeunes gens en 2005 (vague 1) est encore en relation non cohabitante avec la même personne trois ans après (2008), et pour ainsi dire aucune six ans après (2011). À l’opposé, les séniors se caractérisent par leur plus grande stabilité, plus de la moitié étant encore dans la même situation après trois ans et le tiers après six ans.
42Les données longitudinales confirment donc une très grande diversité des situations qui se cachent derrière la catégorie Living Apart Together. En effet, si l’on justifie souvent l’importance d’étudier ce phénomène au regard des préoccupations sociales ou juridiques qu’il soulève (par exemple, estimer les besoins en logements pour les personnes seules : Haskey, 2005 ; soulever la question de l’absence de droits et de reconnaissance légale du partenaire non cohabitant : Lyssens-Denneboom et al., 2013), encore faut-il que l’on ait la possibilité de le mesurer précisément, donc d’en délimiter les contours. Or, l’analyse des « raisons » de ne pas cohabiter collectées dans les enquêtes par questionnaire, ne permet pas de distinguer de manière satisfaisante les différentes situations de la non-cohabitation, comme l’ont récemment montré Simon Duncan et al. (2013)13 et comme le suggèrent également nos résultats (la trajectoire conjugale dépend finalement peu des raisons, entre choix et contrainte). Pour sa part, John Haskey (2005) a montré à quel point pouvaient varier les estimations selon la définition retenue. Notamment, peut-on réellement y inclure les plus jeunes qui résident chez leurs parents ? Nos résultats suggèrent plutôt une réponse négative14. Il nous semble en effet peu pertinent de considérer comme une forme conjugale ce qui s’apparente en réalité à une fréquentation pré-cohabitationnelle de courte durée ou à des premières expériences amoureuses. En revanche, la situation des séniors, marquée par une grande stabilité de leur situation conjugale, mais aussi celle des groupes intermédiaires, nous semble mériter une attention plus particulière. La fragilisation des unions et le veuvage paraissent pouvoir s’accompagner de plus en plus de reconjugalisations sans cohabitation en réponse à des contraintes spécifiques. Vincent Caradec (1997) l’a par exemple mis en évidence chez les plus de 50 ans avec notamment le souhait de ne pas « imposer » un nouveau conjoint à leur famille afin de maintenir de bonnes relations avec elle, en raison de la possession d’une maison à laquelle certains sont particulièrement attachés ou à l’existence d’un passé conjugal qu’il ne s’agit pas d’oublier ou de renier. Irène Levin (2004) a pour sa part mis en évidence le refus et la peur des personnes séparées de reproduire les erreurs du passé en se remettant à cohabiter avec quelqu’un (Levin, 2004, par exemple).
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Références bibliographiques
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Annexe
Annexe
Figure A. Proportion de relations terminées entre 2005 et 2008 selon le profil et l’intention de cohabiter en 2005 (intervalles de confiance à 5 %)

Notes de bas de page
1 Voir par exemple Levin, 2004, pour le rappel de l’origine de cet acronyme (p. 227).
2 Des sessions spécifiques sont désormais dédiées au sujet dans les colloques, comme à l’Annual meeting de la Population Association of American ; l’appel à communication du colloque de l’Aidelf de 2014 invitait à explorer « les manières de se mettre (ou d’être) en couple, dont les couples semi-cohabitants, LAT (vivant ensemble séparément…) ».
3 Les enquêtes Fertility and Family Survey conduites dans les années 1980 intégraient déjà un questionnement à ce propos mais moins détaillé.
4 Cette part est néanmoins dépendante des questions posées dans les enquêtes, de la définition retenue, les contours du concept restant flous (Régnier-Loilier, 2014). Mais l’objet de notre propos est ici autre.
5 Cette expression issue du chapitre publié en 2009 dans Portraits de familles (Beaujouan et al., 2009) est reprise tout au long de ce chapitre.
6 Contrairement à certaines enquêtes, comme l’enquête américaine General Social Survey de 1996- 1998 (Ströhm et al., 2009) ou l’Omnibus Survey Sample au Royaume-Uni en 2002-2003 (Haskey, 2005), la question était ici posée sans restriction liée au fait d’être marié.
7 D’après l’enquête Famille et logements (Insee, 2011), où la question posée aux personnes était : « Êtes-vous actuellement en couple ? Oui, avec une personne qui vit dans le logement/Oui, avec une personne qui vit dans un autre logement/Non, mais vous avez déjà été en couple par le passé/Non, vous n’avez jamais été en couple ».
8 Lors des vagues 2 et 3 de l’enquête, une question était posée afin de savoir comment l’union non cohabitante décrite en vague 1 s’était terminée (par séparation ou par le décès du partenaire). Toutefois, la question n’a pas été posée de manière systématique en raison d’une erreur de filtrage dans le questionnaire (elle n’était posée qu’aux personnes qui étaient de nouveau en relation avec un nouveau partenaire mais pas à celles qui se retrouvaient seules).
9 Si la séparation d’un couple cohabitant conduit le plus souvent au déménagement de l’un des deux ex-conjoints, voire des deux, augmentant le risque d’attrition (perte de contact alors plus fréquente) et pouvant ainsi conduire à sous-estimer les séparations en longitudinal, on peut raisonnablement penser que la dissolution d’une union non cohabitante occasionne moins souvent un déménagement. En revanche, la mise en couple de personnes en relation non cohabitante a nécessairement conduit l’un des deux partenaires – voire les deux – à déménager. Il se pourrait alors que l’on sous-estime ici la proportion d’amoureux non cohabitants s’étant finalement installés ensemble. Nous nous contenterons donc de comparer les sous-groupes entre eux, sans prétendre à une mesure précise des transitions.
10 Catherine Villeneuve-Gokalp (1997) avait également mis en évidence en France que « peu de couples résistaient à une séparation résidentielle durable » : 5 ans après le début de l’union, seuls 12 % étaient encore ensemble dans deux domiciles (p. 1063).
11 Justifié par la faiblesse des effectifs dans certains groupes : voir figure A en annexe.
12 On suggère ici un lien causal, même si les effectifs et les informations disponibles ne nous permettent pas de le vérifier (il eut notamment été intéressant de confronter la date de sortie d’études et de contrat précaire avec la date d’emménagement).
13 Les raisons sont souvent multiples et contradictoires entre elles. De mêmes situations conduisent certaines personnes à considérer leur situation comme un choix, d’autres comme une contrainte.
14 Certaines études mentionnent toutefois comme raison de ne pas cohabiter la nécessité dans laquelle se trouve l’un des conjoints d’habiter avec un parent âgé dont il se sent responsable (voir par exemple Levin et Trost (1999) pour la Suède, ou Milan et Peters (2003) pour le Canada).
Auteur
Docteur en sociologie, chargé de recherche à l’Ined et rattaché à l’unité Fécondité, famille, sexualité. Il enseigne également en master les méthodes d’analyse quantitative à l’université Paris-Sorbonne. Ses principaux travaux portent sur la fécondité, la diversité des conjugalités et les relations enfants-parents en France. Ses réflexions portent également sur la méthodologie d’enquête. Responsable de la mise en place des trois vagues de l’enquête Generations and Gender Survey en France (Étude des relations familiales et intergénérationnelles, Érfi) réalisées en partenariat avec l’Insee entre 2005 et 2011, il a également coordonné, avec Wilfried Rault (Ined), l’enquête Étude des parcours individuels et conjugaux (Épic, 2012-2013, en partenariat avec l’Insee).
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