Préface
p. 9-10
Texte intégral
1Le Generations and Gender Programme (GGP) est une infrastructure de recherche dédiée à l’étude des parcours de vie incluant les dynamiques familiales, les relations de genre, et les échanges entre générations. Il s’agit d’une infrastructure unique en sciences sociales, tant par sa composante longitudinale et internationale que par sa couverture, sur toute la période de l’âge adulte. Fondée il y a plus de 15 ans, elle compte à ce jour des données de plus de vingt pays en Europe et outre-mer1. Sa banque de données inclut les histoires de vie de plus de 200000 individus et s’est taillée une place importante au sein du paysage européen des grandes infrastructures de recherche.
2La France a joué dès le départ un rôle-clé au sein du programme GGP. La présence de l’Ined au sein du Consortium de Recherche qui dirige ce programme s’est traduite par une implication à la fois au niveau du développement du questionnaire, de la collecte de données, et de l’évaluation, de l’harmonisation et de l’analyse de ces données. En outre, l’Ined fait aussi partie de l’équipe de coordination du GGP dont la mission est de gérer tout le cycle de vie des données incluant leur documentation, leur archivage et l’accès aux fichiers.
3Ce volume s’appuie sur les trois vagues de l’Étude des relations familiales et intergénérationelles (Érfi) qui est la contribution de la France au GGP. Ces trois enquêtes ont été administrées en 2005, 2008, et 2011 sur un large échantillon d’hommes et femmes de 18 à 79 ans (en 2005). La combinaison des données de ces trois enquêtes, incluant des données rétrospectives et prospectives offre, dès lors aux chercheurs, un panorama des plus riches permettant de dresser à la fois un portrait détaillé des parcours de vie de la population française, de même qu’une analyse de ses causes et conséquences. L’exercice n’est cependant pas facile tant par la difficulté de traiter de telles données que par la complexité des modes de vie et des parcours familiaux. Les chapitres inclus dans cet ouvrage combinent donc une analyse statistique rigoureuse et une étude poussée des questions de fond. Le résultat est un volume qui donne un éclairage unique sur les transformations familiales et surtout sur leur grande diversité. Cinq thèmes principaux sont abordés : les questions méthodologiques, les dynamiques conjugales, la fécondité, le travail, et les transferts entre générations. Par ailleurs, les questions de genre sont abordées au sein de chaque chapitre afin de mettre en évidence les écarts (ou non) de comportements et d’attitudes entre hommes et femmes.
4 À la lecture de ces chapitres, je soulignerais trois forces majeures. Tout d’abord, une grande finesse et une rigueur méthodologique. Cela inclut une réflexion continue sur la qualité et la validité des données, mais aussi sur les problèmes spécifiques aux données longitudinales, soit la saisie entière et complète des biographies individuelles rétrospectives de même que le phénomène d’attrition (e.g. chapitres 1, 2 et 3). En outre, le travail minutieux s’apparente parfois à celui du détective tentant de tracer et d’identifier l’origine, la cause et les conséquences du problème en question.
5On notera aussi la richesse des analyses incluant un souci de décrire et de comprendre les grandes tendances, sans en négliger leurs nuances et diversité. Il s’agit d’un exercice délicat, exigeant un bon cadrage de l’objet de recherche, une solide description des données, de même que l’analyse détaillée des variations au sein de la population. Les données étant issues d’un large échantillon, elles permettent en outre un éclairage sur des phénomènes ou des comportements moins fréquents. On trouve ainsi des analyses sur les personnes vivant « ni seules ni en couple » (chapitre 4), des ménages ayant recours aux aides domestiques (chapitre 16) de même que l’infécondité et la fécondité tardive (chapitre 11). En outre, l’analyse des données prospectives permet de saisir la stabilité ou l’instabilité des modes de vie ainsi que leurs intentions et réalisations (e.g. chapitres 8, 9, 10).
6Enfin, le volume se distingue à la fois par l’étendue des sujets qu’il couvre et par son originalité, que ce soit en termes de croisement entre le travail et la famille (chapitres 12 et 13), de phénomènes peu étudiés tels la beau-parentalité (chapitre 7) et/ou d’approches statistiques. On y retrouve donc, non seulement, l’étude des histoires conjugales en termes d’événements démographiques mais aussi en termes de dynamique entre conjoints (e.g. chapitre 5) et de transferts entre générations (chapitre 15). L’étude du climat conjugal du point de vue des enfants (chapitre 6) utilise par ailleurs une approche originale et procure par le fait même une perspective nouvelle. On notera aussi l’utilisation de données quantitatives et qualitatives pour l’étude des décisions et trajectoires de retraite (chapitre 14).
7Je conclurais donc cette préface en félicitant l’éditeur de ce volume, Arnaud Régnier-Loilier, de même que toute son équipe pour un travail superbe et surtout pour cette riche contribution au GGP. Les questions abordées dans cet ouvrage sont examinées avec les données françaises du GGP, mais elles ouvrent toute grande la porte pour des comparaisons internationales, défis que la communauté internationale des chercheurs s’empressera sûrement de relever au cours des prochaines années. Pour cette contribution et ces pistes de recherches, nous vous remercions.
Notes de bas de page
1 Les pays suivants ont administré au moins une vague de l’enquête : Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Bulgarie, Estonie, France, Géorgie, Hongrie, Italie, Japon, Lituanie, Norvège, Pays-Bas, Pologne, République tchèque, Roumanie, Russie, Suède. À ceux-ci s’ajoutent des données harmonisées de l’Espagne, des États-Unis et du Royaume-Uni.
Auteur
gauthier@nidi.nl
Coordinatrice du Generations and Gender Programme et chercheure au NIDI (Netherlands Interdisciplinary Demographic Institute).
Chercheure sénior au Netherlands Interdisciplinary Demographic Institute (NIDI) et professeure honorifique à l’université de Groningen aux Pays-Bas. Elle travaille principalement sur les questions de politiques familiales et réconciliation travail-famille ainsi que sur les questions de fécondité et de parentalité. Ses récents travaux portent sur les mères au foyer en Europe et sur l’investissement des parents auprès de leurs enfants. Elle dirige depuis 2013 le projet Generations and Gender Programme.
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