Chapitre 8. Genre et migrations dans l’enfance et l’adolescence au Mali1
p. 203-224
Texte intégral
Introduction
1Les migrations dans l’enfance ne sont pas un phénomène nouveau en Afrique de l’Ouest. Les pratiques anciennes de circulation des enfants au sein de la parenté élargie (fosterage, confiage) ont été amplement étudiées depuis les années 1970 par des anthropologues (Goody, 1969 ; Goody, 1982 ; Dupire, 1988 ; Lallemand, 1993) et des démographes (Isiugo-Abanihe, 1985 ; Antoine et Guillaume, 1986 ; Vandermeersch, 2000), principalement du point de vue des solidarités et des alliances communautaires. Depuis les années 1990, de nouvelles approches et d’autres regards disciplinaires sont venus approfondir les connaissances et la compréhension de ces pratiques anciennes de mobilité et leurs évolutions, avec notamment le souci de revisiter la catégorie des « enfants confiés » (Guillaume et al., 1997 ; Jonckers, 1997 ; Howard, 2011 ; Jacquemin, 2012), ou encore de saisir d’autres dimensions de ce phénomène à l’échelle des familles mais aussi des individus, et notamment des enfants eux-mêmes (Bledsoe, 1990 ; Moran, 1992 ; Pilon, 2003 ; Akresh, 2004 ; Alber, 2004 ; Jacquemin, 2004 ; Verhoef, 2005 ; Notersman, 2008 ; Porcelli, 2011). Au-delà des pratiques de confiage, la question des migrations des enfants et des adolescents bénéficie ces dernières années d’un intérêt croissant en sciences sociales (Knörr et Nunes, 2005 ; Hashim et Thorsen, 2011 ; Child Migration Research Network2), avec une attention particulière portée aux « migrations indépendantes », c’est-à-dire réalisées par les enfants sans leurs parents biologiques (Whitehead et Hashim, 2005 ; Yaqub, 2009). Ces études, essentiellement qualitatives, ont surtout mis l’accent sur la capacité d’action des jeunes migrants, en adoptant leur point de vue – à travers leurs discours et le vécu de leurs expériences – plutôt que celui des familles (Hashim et Thorsen, 2011 ; Evers et al., 2011).
2Par ailleurs, depuis les années 2000, les enfants et adolescents migrants ont été l’objet d’une mobilisation accrue des institutions internationales – du Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef), du Bureau international du travail (BIT), de l’organisation internationale pour les migrations (OIM) – et des organisations non gouvernementales (ONG), qui ont attiré l’attention sur la précarité et la vulnérabilité de certaines catégories d’entre eux : enfants des rues, enfants soldats, orphelins du sida, enfants réfugiés, enfants travailleurs (Dottridge, 2002 ; De Lange, 2007). Néanmoins, au vu de la diversité des pratiques et des enjeux associés, le thème des enfants migrants reste encore largement à investir (Razy et Rodet, 2011), en particulier dans ses dimensions quantitative et genrée.
3D’un point de vue statistique, les enfants et adolescents migrants demeurent largement « invisibles », le plus souvent considérés soit comme « accompagnants » (migrants passifs) dans le cadre de migrations familiales, soit comme victimes de trafics. Les publications institutionnelles émanant d’organismes internationaux, comme l’OIM ou le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), celles des recensements nationaux de la population, ou encore celles relatives à des enquêtes démographiques sur les migrations, fournissent rarement des mesures spécifiques du phénomène migratoire dans l’enfance (Deleigne et Pilon, 2011). Pourtant, dans des contextes africains en pleine mutation – marqués par l’urbanisation croissante, le développement de l’économie marchande, notamment informelle, la crise économique, l’essor des processus d’individualisation –, on observe un développement important des migrations de travail, y compris dans l’enfance et l’adolescence (UNFPA, 2006 ; BIT, 2012). Par ailleurs, dans le cadre du programme d’Éducation pour tous (EPT), lancé par la communauté internationale au début des années 1990, la scolarisation s’est développée non seulement en milieu urbain mais également en milieu rural, l’école étant devenue un nouvel élément constitutif de la période de l’enfance et un facteur de migration (Pilon, 2003). Pour autant, les liens entre migration et scolarisation restent peu étudiés (Deleigne et Pilon, 2011).
4Sur l’ensemble de ces questions, la problématique du genre est assez rarement abordée. Tandis que cette nouvelle orientation de recherche – genre et migration – s’est consolidée en pointant notamment les relations de pouvoir qui se jouent entre les femmes et les hommes (Donato et al., 2006), elle a encore assez peu imprégné le champ des migrations dans l’enfance et l’adolescence. L’accent a néanmoins été mis ces dernières années sur les migrations des jeunes filles3 (Temin et al., 2013). En Afrique de l’Ouest, plusieurs recherches menées dans des contextes sociaux différents ont notamment mis en évidence le développement des migrations de travail des jeunes filles originaires du monde rural et employées comme domestiques chez des particuliers dans les grandes villes ou capitales africaines (Delaunay, 1994 ; Lambert, 1999 ; Linares, 2003 ; Delaunay et Enel, 2009 ; Thorsen, 2010 ; Le Jeune, 2006 ; Jacquemin, 2011 ; Lesclingand, 2004b et 2011 ; Hertrich et Lesclingand, 2012 et 2013).
5La migration est devenue, en Afrique de l’Ouest comme dans de nombreuses autres parties du monde, un phénomène majeur dans la socialisation des enfants et des jeunes (Juarez et al., 2013). Au-delà des descriptions de différences sexuées, il apparaît aussi important de s’interroger sur la façon dont les normes de genre influencent les parcours migratoires des filles et des garçons, et comment ils s’en trouvent à leur tour influencés tout particulièrement aux âges de l’enfance et de l’adolescence qui sont des périodes de vie où se construisent les identités féminines et masculines.
6Dans le cadre d’une population rurale du Sud-Est du Mali, et à partir de matériaux originaux issus d’un suivi de population mis en place en 1987, nous nous proposons ici d’analyser l’évolution des migrations dans l’enfance et l’adolescence sous l’angle du genre en combinant approches quantitative (de type longitudinal) et qualitative (analyse d’entretiens). Après avoir montré comment les périodes de l’enfance et de l’adolescence ont évolué sous l’effet des pratiques migratoires et de la scolarisation, nous mettons l’accent sur les migrations indépendantes et analysons l’expérience, très contrastée, des enfants et des adolescents des deux sexes.
I. Population et données
7Nos analyses sont développées à partir d’un système de collecte longitudinal mis en place en 1987 dans une population rurale du Mali croisant des données d’enquêtes à la fois quantitatives et qualitatives.
1. Une population rurale du Sud-Est du Mali
8La zone d’étude se situe en milieu rural, au sud-est du Mali, dans la région de Ségou et dans l’aire ethnique des Bwa, à proximité du Burkina Faso. Les villages concernés se situent trouvent à 450 kilomètres de la capitale, Bamako, et à 30 kilomètres des villes les plus proches, Tominian et San. L’agriculture, qui y constitue l’activité principale, est essentiellement orientée vers l’autosubsistance et se pratique dans le cadre d’un mode de production familial. Du point de vue sociopolitique, les familles se structurent autour de patrilignages tandis que l’organisation économique repose sur un groupe domestique, la zû, à la fois unité de production agricole et de consommation (Hertrich, 1996).
9Du point de vue démographique, la mortalité dans l’enfance a significativement diminué depuis plusieurs décennies mais reste encore forte – le risque de décéder avant l’âge de 5 ans est de 140 pour 1000 – tandis que la fécondité se maintient à des niveaux élevés – autour de 8 enfants par femme et 9 par homme. Il s’ensuit un accroissement naturel important élevé, de l’ordre de 3 % par an, en partie absorbé par des migrations, à l’intérieur du Mali ou dans les pays limitrophes4. Dans les années 1990, les modalités d’entrée en union ont par ailleurs connu des changements significatifs avec un recul de l’âge au mariage des jeunes femmes, un appariement conjugal plus égalitaire et une moindre intervention des familles dans les processus matrimoniaux (Hertrich, 2007). Ces évolutions dans les modalités d’entrée en union sont en outre concomitantes de l’essor des migrations féminines adolescentes (Hertrich et Lesclingand, 2012).
2. Des données longitudinales et des entretiens semi-directifs
10Les résultats présentés dans ce chapitre exploitent les données du projet Suivi longitudinal au Mali (Slam) de l’Institut national d’études démographiques (Ined). Le système de collecte a été mis en place dans sept villages, sous forme rétrospective, en 1987-1989, et s’est poursuivi sous forme prospective, à raison d’un nouveau passage sur le terrain tous les cinq ans, le dernier ayant eu lieu en 2009-2010. Nous utilisons ici les données de l’enquête biographique, réalisée exhaustivement à l’échelle de deux villages – soit 1750 habitants en 2009 – auprès de l’ensemble des résidents et d’une partie des émigrés (Hertrich, 1996). Chaque nouveau passage donne lieu à la mise à jour des biographies existantes et à l’enregistrement complet de celles des nouveaux venus (naissances, immigrants). L’enquête recueille les histoires matrimoniale, génésique, migratoire et religieuse complètes. Le questionnaire migratoire enregistre l’ensemble des déplacements d’au moins trois mois, de la naissance jusqu’à la date de sortie d’observation. Chacun donne lieu au recueil d’informations d’ordre chronologique (rang, saison, année, durée), sur le type de la migration, classé en catégories prédéfinies (familiale5, travail, installation, confiage6, scolaire, visite, retour, etc.), sur les conditions du déplacement (avec qui et chez qui, activité exercée, bénéfices, etc.). La base de données compte 3181 biographies d’individus enquêtés au titre de résidents à l’un au moins des cinq passages de l’enquête (1987-1989, 1994, 1999-2000, 2004-2005, 2009-2010). Nos analyses portent plus particulièrement sur les générations nées avant 1995, soit 2123 individus (1143 femmes et 980 hommes).
11Ce dispositif d’enquêtes par questionnaire a été complété par des enquêtes qualitatives. On dispose ainsi d’un corpus d’une soixantaine d’entretiens semi-directifs réalisés en 2002, sous la forme de récits de vie auprès de femmes et d’hommes appartenant à trois groupes de générations différentes7. Les personnes interviewées ont notamment raconté le vécu de leur enfance et de leur adolescence. Ces entretiens permettent de prendre en considération le ressenti et la perception de la migration par les intéressé-e-s même si, comme toute information rétrospective, les discours recueillis à l’âge adulte ne témoignent pas d’une expérience immédiate.
II. Des contextes scolaire et migratoire en forte évolution
12L’analyse conjointe de ces données quantitatives et qualitatives permet dans un premier temps de mettre en évidence des changements qui se sont opérés durant ces dernières décennies et qui ont affecté l’environnement et le vécu de l’enfance et de l’adolescence : d’une part, le développement récent de la scolarisation depuis les années 1990, d’autre part, l’essor, plus ancien, de la mobilité des enfants et des adolescents.
1. Un développement récent de la scolarisation
13Comme le rappelle Marie-France Lange (2003, p. 4) :
Le développement du système scolaire malien n’a guère connu de période faste, ni durant la période coloniale ni au cours des trois premières décennies qui ont succédé à l’indépendance. Un modus vivendi semblait s’être imposé entre des dirigeants peu enclins à développer la scolarisation et des populations qui ont surtout formulé des stratégies défensives face aux pouvoirs étatiques (Gérard, 1997).
14Le processus de scolarisation ne s’est véritablement enclenché au Mali qu’à partir des années 1990, suite à la chute de la dictature de Moussa Traoré en 1991 et à l’avènement d’un régime démocratique, et dans le contexte international de l’Éducation pour tous. La décennie 1990 constitue à ce titre une véritable « rupture – positive – dans le développement de la scolarisation » au Mali (ibid.).
15L’évolution de la proportion d’individus qui sont ou ont été scolarisés au cours des générations confirme ce « tournant » des années 1990-2000 (figure 1). La tendance observée au niveau national est plus marquée encore dans la zone d’étude8, où l’accès à l’école, rare jusqu’aux années 1980 – inférieur à 10 % pour les filles et à 20 % pour les garçons –, atteint aujourd’hui un niveau comparable à celui du Mali rural – 53 % pour les filles et 55 % pour les garçons nés en 1995-1999. Dans la zone étudiée, c’est à partir des années 1990 que la politique des « écoles de base » – c’est-à-dire des écoles fondées, gérées et souvent entièrement financées par les parents d’élèves – s’est développée9, motivant les communautés à créer des structures scolaires et à scolariser leurs enfants. Les premières écoles sont apparues en 1992 dans les deux villages les plus peuplés10, puis au cours des années 2000 dans les autres – à l’exception d’un village qui demeure toujours sans école.
Figure 1. Individus qui sont ou qui ont été à l’école, par générations et par sexe (%)

Source : recensement général de la population et de l’habitat, 2009 et enquête renouvelée 2009-2010 sur l’ensemble des sept villages.
16Cette augmentation récente est confirmée par les taux de scolarisation au moment des deux derniers recensements nationaux (1998 et 2009). La proportion d’enfants scolarisés a plus que doublé parmi les 7-12 ans, passant de 22 % à 48 %, et a également connu une augmentation substantielle chez les 13-15 ans – près de 40 % de scolarisés en 2009 – et les 16-18 ans.
17En l’espace de dix ans, le taux de scolarisation des filles de 7-12 ans, qui était bien inférieur à celui des garçons en 1998 (13 % contre 30 %), a triplé et a rattrapé celui des garçons (figure 2).
Figure 2. Taux de scolarisation par groupe d’âges en 1998 et 2009, selon le sexe

Source : enquête renouvelée 2009-2010 sur l’ensemble des sept villages.
18Les progrès réalisés ont donc été considérables, en termes d’essor de la scolarisation et de rapprochement entre les sexes ; cependant « l’éducation pour tous » est encore loin d’être acquise, à peine un enfant d’âge scolaire sur deux étant effectivement scolarisé en 2009.
2. L’essor des migrations dans l’enfance et l’adolescence
19Antérieures au développement de la scolarisation, les migrations des enfants et des adolescents ont connu, dès la fin des années 1970, des évolutions significatives, se traduisant pour les dernières générations observées par une quasi-généralisation de l’expérience migratoire avant l’âge de 18 ans (tableau 1).
Tableau 1. Individus ayant réalisé au moins une migration avant l’âge de 18 ans, selon le type de mobilité (%)

20Parmi les individus nés dans les années 1950, la mobilité dans la petite enfance était encore marginale : 8 % des garçons et 14 % des filles avaient déjà migré avant l’âge de 7 ans. C’est à partir des générations nées dans les années 1960 que la mobilité aux jeunes âges s’accroît allant jusqu’à toucher, avant l’âge de 7 ans, 30 à 40 % des générations nées après 1970 ; et, avant l’âge de 12 ans, près de la moitié (figure 3). La tendance a été plus spectaculaire encore aux âges de l’adolescence, l’expérience migratoire devenant, au sein des dernières générations suivies, une pratique quasi généralisée avant l’âge de 18 ans – 81 % des hommes et 95 % des femmes né-e-s dans la première moitié des années 1990.
Figure 3. Individus ayant migré au moins une fois avant les âges de 7, 12, 15(a) et 18(a) ans (%)

(a) Pour les générations 1995-1999 et 1990-1994 (respectivement après 12 ans et 17 ans), estimation par extrapolation, fondée sur les quotients de première migration de la précédente cohorte. Champ : ensemble des individus nés avant 2005, enquêtés comme résidents à l’un au moins des passages de l’enquête (1987- 1989, 1994-1995, 1999-2000, 2004-2005 ou 2009-2010). Source : enquêtes biographiques.
21La mobilité est ainsi devenue une pratique largement partagée, mais les motifs de ces déplacements dans l’enfance et l’adolescence varient selon l’âge et ces expériences migratoires ne sont pas vécues de manière identique par les garçons et les filles.
III. Des expériences genrées
22Si filles et garçons migrent désormais quasiment tous avant l’âge de 18 ans, leurs motifs de déplacement diffèrent selon l’âge et le genre, dessinant des itinéraires et des vécus migratoires contrastés entre les deux sexes.
1. Pratiques migratoires
23Dès l’enfance, entre 7 et 12 ans, certaines pratiques migratoires apparaissent fortement contrastées selon les sexes : à la différence des migrations en famille, qui représentent, quelles que soient les générations, une expérience fréquente et indifférenciée selon le sexe11, le confiage concerne davantage les filles, représentant, avec une relative stabilité dans le temps, plus du tiers de leurs migrations contre moins d’une sur cinq pour les garçons, entre 7 et 12 ans (figure 4). Ces migrations de confiage se réalisent principalement en milieu rural : il s’agit surtout de déplacements internes à l’aire ethnique des Bwa, mais aussi de migrations ville-village, par exemple pour des enfants nés en ville ou y ayant passé le début de leur enfance dans le cadre d’une migration familiale, qui sont ensuite envoyés dans le village d’origine d’un des parents pour y être élevés.
24Par ailleurs, tandis que les migrations scolaires12 apparaissent dans les parcours migratoires des jeunes garçons, elles restent toujours quasi absentes du côté des filles (figure 4).
25Dans la classe d’âges suivante, entre 13 et 15 ans, les profils migratoires masculins et féminins se rapprochent à mesure que les déplacements à but économique s’imposent, représentant trois migrations sur quatre à partir des générations nées dans les années 1960 pour les hommes et dans les années 1970 pour les femmes (figure 4). Cependant, les pratiques concrètes et les représentations qui entourent ces déplacements juvéniles de travail témoignent de spécificités sexuées : la destination – à dominante rurale pour les garçons, urbaine pour les filles ; le type d’activités – gardiennage de troupeaux pour les garçons, emploi domestique pour les filles ; les modes de rémunération – principalement en têtes de bétail pour les garçons et en numéraire pour les filles – et l’usage de la rétribution acquise – les garçons en donnent l’intégralité à leur père ou leur famille tandis que les filles dépensent en ville leur argent pour rapporter des biens personnels constituant ainsi leur trousseau de mariage – manifestent explicitement les différences entre les sexes de ces expériences migratoires de travail (Lesclingand, 2004b et 2011 ; Hertrich et Lesclingand, 2013). Par ailleurs, les migrations scolaires se poursuivent mais quasi uniquement du côté des garçons tandis que chez les filles, les migrations matrimoniales13 avant 16 ans disparaissent progressivement.
26Entre 16 et 18 ans, le profil migratoire des jeunes hommes est proche de celui de la classe d’âges précédente, tandis que celui des jeunes femmes est marqué par l’importance des migrations matrimoniales (figure 4). Cependant, au fil des générations féminines, ce poids des déplacements liés à l’entrée dans la vie conjugale diminue – au profit des migrations de travail –, traduisant le recul de l’âge à l’entrée en union des femmes14 (Hertrich et Lesclingand, 2012). Pour les femmes, l’entrée en union marque un arrêt – souvent définitif – des déplacements de travail, très circonscrits à la période de jeunesse alors que les migrations masculines pour ce motif se poursuivent à l’âge adulte (Lesclingand, 2004a).
Figure 4. Évolution des types de déplacement par sexe, générations et classes d’âges (%)
Entre 7 et 12 ans

Champ : ensemble des migrations réalisées entre 7 et 12 ans, 13 et 15 ans, 16 et 18 ans (hors migrations de retour) des individus nés avant 1995 pour les migrations réalisées entre 7 et 12 ans, sont prises en compte les générations 1995-1999), enquêtés comme résidents à l’un au moins des passages de l’enquête (1987-1989, 1994-1995, 1999-2000, 2004-2005, 2009-2010). Source : enquêtes biographiques.
2. Itinéraires migratoires
27À l’exception des migrations familiales où les enfants accompagnent ou rejoignent l’un au moins de leurs parents, les autres types de mobilité (confiage, scolaire, économique) sont des migrations que l’on qualifie d’« indépendantes » dans la mesure où elles s’effectuent sans les parents biologiques (Whitehead et Hashim, 2005).
28Dans les dernières générations suivies, peu nombreux sont les femmes et les hommes qui n’ont pas expérimenté une forme de mobilité indépendante au cours de leur enfance et/ou de leur adolescence : un tiers des hommes et une femme sur six seulement (tableau 2). C’est entre 12 et 15 ans que l’intensité des migrations juvéniles indépendantes a le plus significativement augmenté au fil des générations, tout particulièrement du côté des jeunes filles (tableau 2).
Tableau 2. Individus ayant réalisé au moins une migration indépendante (confiage, scolaire, travail), avant les âges de 7, 12, 15 et 18 ans (%)

29Parmi ces « migrants indépendants », certains n’ont expérimenté qu’une seule forme de migration tandis que d’autres ont connu plusieurs types de déplacements. L’analyse de ces itinéraires entre confiage, migration scolaire et migration de travail – avec d’éventuelles combinaisons entre ces trois formes – avant l’âge de 18 ans, dessine des spécificités sexuées distinguant les parcours des filles de ceux des garçons (figure 5).
Figure 5. Typologie d’itinéraires migratoires indépendants, par sexe et par générations (%)

Champ : ensemble des individus enquêtés comme résidents à l’un au moins des passages de l’enquête et ayant réalisé au moins une migration indépendante avant l’âge de 18 ans, nés entre 1950 et 1995. Source : enquêtes biographiques.
30Tout d’abord, les filles restent – au fil des générations mais dans des proportions différentes – principalement concernées soit par des expériences de confiage uniquement, soit par des parcours déroulant successivement confiage puis travail (emploi domestique urbain), soit exclusivement par ce dernier type de migration. Au fil des générations, si le confiage comme unique expérience migratoire pendant l’enfance s’est raréfié au profit de celle liée au travail, la part des filles expérimentant successivement le confiage puis le travail est restée relativement stable depuis les générations 1970 – autour de 20 %.
31Contrairement à la pratique du confiage qui se réalise à des âges très jeunes et qui relève quasi systématiquement de la décision des adultes – parents ou membres de la famille –, la migration de travail intervient au seuil de l’adolescence et relève d’une décision individuelle, non imposée par la famille. Elle est devenue une étape quasi obligatoire de l’entrée dans la jeunesse des filles, et les rares femmes qui n’ont pas expérimenté cette forme de mobilité ont d’autant plus de mal à l’accepter (encadré 1) (Hertrich et al., 2012).
32À travers les récits recueillis, les expériences de confiage dans l’enfance se traduisent ordinairement par la participation des filles aux travaux domestiques ; elles sont d’ailleurs parfois, dès le départ, explicitement motivées par un besoin de main-d’œuvre. Mais elles se différencient cependant nettement des migrations urbaines de travail des filles employées comme domestiques, expériences qui se caractérisent par des modalités de placement, des conditions, un environnement et un rapport social de travail, et surtout un mode de rétribution spécifiques.
33Alors que les déplacements des filles sont le plus souvent associés à une mise au travail, les trajectoires migratoires des garçons dans l’enfance et l’adolescence présentent une plus grande diversité, du fait notamment de la part plus importante prise par l’école, soit directement dans le cadre de migrations scolaires, soit indirectement à l’occasion d’un confiage (figure 5). Les migrations de travail vers la ville restent toutefois toujours prédominantes dans le parcours des garçons, et pas nécessairement vécues comme des expériences concurrentes à l’école mais plutôt comme une autre forme d’éducation (encadré 2).
34Concernant les pratiques de confiage, les récits de vie recueillis donnent à voir les difficultés que peut parfois provoquer la séparation familiale associée au placement d’un enfant. Dans le souvenir qu’elles et ils ont reconstruit – parfois des décennies plus tard – de cette expérience vécue dans leur enfance, plusieurs femmes et hommes ont ainsi souligné les peurs, les manques affectifs ou de soins, les problèmes relationnels ou encore le sentiment de vulnérabilité accrue en l’absence de leurs parents biologiques. Ces ressentis ont été exprimés par les enquêté-e-s des deux sexes, à travers des récits parfois détaillés, avec des exemples ou des descriptions de leurs émotions, ou au contraire dans des formulations beaucoup plus elliptiques, se référant notamment à des schèmes relationnels généralistes sur les interactions enfants/ parents/tuteurs : « Ce n’est pas la même chose de vivre avec tes parents de sang, qu’être avec tes parents familiaux, c’est différent » (Omihan, née à la fin des années 1970 et confiée à l’âge de 10 ans pour plusieurs années.)
35Un autre point commun dans l’expérience des filles et des garçons migrants réside dans les modalités de prise de décision à l’origine de leur déplacement, lesquelles diffèrent sensiblement selon les types de mobilités les plus répandus pour les deux sexes : migrations de confiage ou de travail, pour lesquelles l’âge au départ est en revanche devenu une variable déterminante. Qu’il concerne filles ou garçons, le confiage est le plus souvent le fruit d’une décision d’adultes – soit un ou les parents de l’enfant, soit le ou la récipiendaire qui en fait la demande –, ce qui n’empêche pas que l’enfant puisse être consulté voire que son consentement puisse avoir un poids décisif, ni qu’elle ou il puisse juger l’expérience positive. Par contraste, la décision de « partir à l’exode », selon la formule vernaculaire, c’est-à-dire en migration de travail – en ville pour les filles ; chez les Peuls ou, à un âge plus avancé, en ville également pour les garçons – correspond le plus souvent à une décision que les adolescents prennent eux-mêmes, fussent-ils encouragés par leur(s) parent(s) ou contraints par des comportements sociaux désormais dominants donc normatifs. Ainsi, ce type de migration – devenu un marqueur fort du passage de l’enfance à la jeunesse pour les deux sexes – a la spécificité de revêtir une dimension importante de prise d’autonomie. Les départs « en cachette » qu’organisent certaines filles promptes à contourner un refus parental de migrer, tout comme à l’inverse les regrets durablement exprimés rétrospectivement par des femmes ou des hommes ayant été efficacement empêchés de réaliser leur projet migratoire durant cette période spécifique de leur vie, en témoignent de manière significative (Hertrich et Lesclingand, 2013).
Encadré 1. Parcours migratoires féminins : du confiage au travail, sans passer par l’école
Bawa, une enfant confiée
Née avant 1950 au village, Bawa y passe son enfance avec ses parents et ses frères et sœurs jusqu’à l’âge de 9 ans. Un grand-oncle résidant dans un village distant de six kilomètres vient alors la chercher pour seconder sa femme aux travaux domestiques, suite à la naissance de jumeaux. Bawa affirme qu’elle n’aurait pas pu refuser, mais que l’idée de partir lui plaisait. Elle garde un bon souvenir de cette expérience, qui a duré trois ans, au cours desquels elle n’a quasiment pas revu ses parents. De retour dans son village natal, elle est ensuite partie se marier dans un autre village à l’âge de 14 ans.
Omihan, du confiage au travail
Omihan est née au village à la fin des années 1970. À l’âge de 2 ans, elle part à Bamako avec ses parents et ses frères aînés. Non scolarisée, elle est ensuite confiée dans son village natal à l’âge de 10 ans, à la demande d’un oncle paternel. À l’âge de 15 ans, elle part en cachette avec deux amies jusqu’à la ville de San. De retour au village après quelques mois d’emploi domestique, c’est avec l’accord de ses parents qu’elle repart peu après, cette fois à Bamako, où elle travaille un an comme domestique.
Sabere, une jeunesse confisquée
Sabere est née au village au début des années 1980. Non scolarisée, elle n’a pas quitté son village natal jusqu’à l’âge de 11 ans : elle est alors confiée à l’épouse d’un parent résidant dans un grand village relativement éloigné, pour « aider à faire la cuisine ». Participant aux travaux domestiques et champêtres, Sabere passe cinq ans dans cette famille, rendant une visite annuelle à ses parents. Elle retourne finalement dans son village natal à 16 ans avec l’idée de partir travailler en ville, comme ses amies ; ses parents sont d’accord. Mais la procédure de son mariage arrangé par les familles est enclenchée une semaine après son arrivée : Sabere se retrouve troisième épouse d’un homme de quinze ans son aîné. Ce mariage lui laisse le souvenir amer d’une jeunesse difficile – « parce que je me suis mariée avant toutes mes copines » –, surtout parce qu’il l’empêcha de partir en ville. Quelques années plus tard, Sabere regrette encore de ne pas l’avoir fait pendant l’adolescence, tant la migration urbaine est représentée comme ouvrant vers d’autres types de savoirs – « on dit généralement que si on part en ville, on a un peu plus de connaissances » –, a fortiori pour les filles qui, comme elle, ne sont pas passées par l’école.
Source : enquête qualitative 2002.
Encadré 2. Parcours migratoires masculins : entre école et travail
Christophe, le travail contre l’école
Né dans les années 1950, Christophe a grandi avec ses parents et ses frères et sœurs. Il est inscrit dans l’unique école qui existait alors dans la zone, à 6 kilomètres de son village natal. Il aimait l’école : « Je cherchais une certaine connaissance. […] ça a changé beaucoup de choses dans ma vie, puisqu’aujourd’hui si tu ne vas pas à l’école, tu ne peux pas comprendre grand-chose à la vie ». Mais Christophe a choisi de stopper sa scolarité au bout de cinq ans, pour partir travailler chez les Peuls et gagner des bœufs : « En ce temps-là moi je ne pensais pas à l’avenir mais au présent ». Selon lui, ses parents ne pouvaient s’opposer à sa décision, car il était déjà « une grande personne » : il avait 11 ans. Il réalise alors deux migrations de travail d’une dizaine de mois chez les Peuls, entrecoupées d’un séjour d’un an au village, où il se marie six ans après son retour. Il reprend par la suite des migrations saisonnières de travail à Sikasso puis en Côte d’Ivoire, avant de s’installer durablement au village dans les années 1990. Dicko, un confiage scolaire
Jusqu’à l’âge de 6 ans, Dicko vit en famille dans son village natal, où il est né dans les années 1960. Il est ensuite confié dans un autre village chez un oncle, pour qui il effectue les mêmes petits travaux que pour ses parents. À l’âge de 9 ans, il est de nouveau confié, cette fois avec le projet d’être scolarisé, chez un oncle à Ségou. Vis-à-vis des travaux quotidiens, son vécu est différent, puisqu’il en est à présent dispensé : « je n’étais pas là pour ça, j’entendais qu’on allait m’inscrire à l’école ». Deux ans plus tard, il retourne au village, où il peut poursuivre sa scolarité, mais il pense qu’il aurait été meilleur élève en restant inscrit à l’école de Ségou. C’est ensuite à l’âge de 20 ans qu’il réalisera sa première migration de travail, aux plantations caféières et cacaoyères de Côte d’Ivoire.
Arefo, des migrations tardives
Dans les années 1970, Arefo passe toute son enfance avec ses parents et ses frères et sœurs au village natal. Dans l’entretien réalisé en 2002, il exprimait encore vivement ses regrets de ne pas avoir migré pour travailler chez les Peuls dans son adolescence, en raison d’un refus catégorique de son père qui voulait le maintenir au village pour garder ses propres bœufs. Cependant, à 16 ans, Arefo entame une série de migrations urbaines de travail (à Kati, Bamako et jusqu’en Côte d’Ivoire) au cours desquelles, par-delà les gains matériels, il apprend le Bambara et « s’ouvre l’esprit », ce qui à son retour lui vaut une considération accrue de la part de sa famille et des autres villageois.
Baptiste, une enfance à l’école
Né dans les années 1980, Baptiste a été envoyé à l’école à l’âge de 11 ans chez son grand-père maternel résidant dans l’aire boo : il y reste durant huit ans. Chaque année, il revient passer les vacances scolaires chez ses parents. « Parce qu’il ne progressait pas dans les études » (selon sa mère), Baptiste a finalement interrompu sa scolarité à 19 ans pour venir se marier dans son village natal.
Source : enquête qualitative 2002.
Conclusion
36Chez les Bwa du Mali, moins de la moitié des femmes et des hommes né-e-s avant les années 1950 ont connu, durant leur enfance et leur adolescence, une expérience de vie en dehors de leur village natal. Aujourd’hui, très rares – moins de 10 % – sont celles et ceux qui n’ont pas quitté au moins une fois leur village avant l’âge de 18 ans. Certaines formes de mobilité dans l’enfance restent fortement sexo-spécifiques, comme le confiage qui, associé ou non à d’autres formes de mobilité, concerne encore un tiers des filles – contre seulement un garçon sur dix – tandis que dans le contexte récent du développement de la scolarisation, les mobilités scolaires touchent pour l’instant principalement les jeunes garçons. Par ailleurs, bien qu’en net recul au fil des générations, les migrations matrimoniales – des jeunes femmes en raison du mariage – restent présentes chez les 16-18 ans.
37L’ampleur prise au fil du temps par les migrations de travail des filles pourrait être le signe d’une certaine convergence entre les parcours migratoires féminins et masculins durant l’adolescence ; cependant les conditions dans lesquelles ces migrations de travail sont expérimentées et les représentations qui entourent ces pratiques de mobilité appellent à nuancer cette apparente similitude. Contrairement aux expériences de confiage qui peuvent être douloureusement vécues et exprimées comme telles, les femmes et les hommes portent un regard très positif sur leurs migrations de travail valorisées à la fois comme un « moment de vie » particulier mais aussi pour les acquis et la « bonne image » de soi qu’elles procurent, particulièrement vis-à-vis des pairs. Néanmoins, les apports de ces dernières renvoient à des conceptions sexuellement différenciées du travail. Du côté des garçons, la « valeur ajoutée » des migrations de travail – notamment celles réalisées chez les éleveurs peuls où ils sont employés comme bouviers – est directement associée à la nature et au contenu des tâches accomplies, plus particulièrement à travers la force physique et les nouvelles responsabilités acquises. En revanche, l’expérience migratoire des filles est moins valorisée directement pour le travail qu’elles ont effectué en ville, mais plutôt à travers d’autres domaines, spécifiques à l’expérience urbaine – acquisition d’une nouvelle langue, ouverture d’esprit, propreté, habillement – mais relativement détachés de la prise en considération du labeur accompli (Hertrich et Lesclingand, 2013). Le développement récent de la scolarisation qui conduit actuellement environ un enfant sur deux – fille comme garçon – à l’école s’est accompagné de la création d’une offre scolaire locale, donnant ainsi la possibilité d’aller à l’école dans son village. Les migrations scolaires ne s’avèrent désormais nécessaires qu’à un âge plus tardif15, dans le cadre d’un prolongement de la scolarisation.
38Au fil des générations, les temps de l’enfance et de l’adolescence ont ainsi été significativement affectés par une diversification des espaces de vie et des lieux de socialisation, via l’école et via la migration, avec des différences selon le genre encore marquées mais qui tendent à s’estomper pour les dernières générations (Lesclingand et Pilon, 2014). Du côté des garçons, la tendance à une substitution du temps passé en migration de travail par celui à l’école (au village ou en migration) réinterroge la manière de penser la relation complexe entre scolarisation et travail dans des contextes où les modes d’éducation et de socialisation ne passent pas exclusivement par l’école (Abebe, 2011 ; Jacquemin et Schlemmer, 2011).
39Comme en témoignent les récits des filles et des garçons, l’importance accordée, non pas tant à la rétribution monétaire du travail réalisé en migration – même si celle-ci apparaît plus explicitement revendiquée du côté masculin –, mais à sa dimension d’expérimentation de la vie urbaine et des attributs matériels et symboliques qui y sont attachés, met en questions, à moyen terme, la coexistence de ces deux formes d’éducation et de socialisation pendant l’adolescence. Si les migrations de travail pendant cette période de la vie, peuvent sans doute, mécaniquement et par un effet de concurrence direct, tendre à diminuer au profit de scolarités plus longues (au village ou hors du village), il n’est pas certain qu’elles deviennent une expérience partagée uniquement par les non-scolarisé-e-s.
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Notes de bas de page
1 Cette recherche a bénéficié de l’appui financier de l’Agence nationale de la recherche (ANR) dans le cadre du projet Dynamique de la parentalité et de l’enfance en milieu rural africain (DyPE) (ANR-12-BSH1-0005-01). Elle exploite les données du projet Suivi longitudinal au Mali (Slam) de l’Institut national d’études démographiques (Ined), réalisé sous la responsabilité scientifique de Véronique Hertrich (http://slam.site.ined.fr).
2 Réseau de recherche créé en 2005 à l’initiative de plusieurs chercheur-e-s de l’université de Sussex : www.childmigration.net
3 En témoignent par exemple le programme Girls on the Move du Population Council en 2011-2012, ou l’axe Migration, Women and Girls développé dans le cadre du consortium de recherche Migrating out of Poverty en 2010-2015.
4 Dans la zone étudiée, on n’a pas observé jusqu’à présent de migrations internationales vers l’Europe.
5 Est définie comme familiale la migration d’un enfant – et plus largement de tout individu célibataire – qui rejoint ou se déplace avec l’un au moins de ses deux parents.
6 Est classée comme confiage la migration d’un enfant confié à une famille ne résidant pas dans le même lieu (village) que son père et sa mère – y compris les confiages pour motifs scolaires qui sont néanmoins distingués des confiages sans scolarisation sur le lieu de la migration.
7 Avant 1952 ; 1953-1972 ; 1973-1985.
8 Les statistiques scolaires ont été calculées sur l’ensemble des sept villages suivis par le projet Slam.
9 La loi d’orientation sur l’éducation n° 94-010 du 24 mars 1994 leur a conféré un statut officiel (Lange, 2003).
10 Autour de 1000 résidents au recensement local de 2009.
11 Les migrations familiales représentent entre 30 et 50 % des migrations réalisées entre 7 et 12 ans, pour les garçons comme pour les filles.
12 Les migrations scolaires sont des migrations dont le motif déclaré par la personne enquêtée (parent ou jeune lui-même) est la scolarisation – le plus souvent dans le cadre de la poursuite d’études. Ces migrations peuvent se réaliser dans le cadre d’un confiage ou non.
13 Les migrations matrimoniales s’inscrivent dans un système de virilocalité, qui conduit les jeunes épouses à aller résider dans le village de leur époux, au moment de leur mariage.
14 L’âge médian à la première union pour les générations 1985-1989 est de 19,7 ans pour les femmes et de 23,1 ans pour les hommes, soit une augmentation de l’ordre de deux ans pour les premières et d’un an et demi pour les seconds par rapport aux générations nées dans les années 1960.
15 Au moment de l’entrée dans le deuxième et le troisième cycles.
Auteurs
est sociodémographe, maîtresse de conférences à l’université Nice-Sophia-Antipolis, rattachée à l’Unité mixte de recherche migrations et société (Urmis), et chercheuse associée à l’Ined (unité Démographie, genre et société). Ses travaux de recherche portent sur la mobilité des jeunes et des enfants, en lien avec la scolarisation, les logiques familiales et leur incidence sur les rapports de genre. Elle participe à des projets de recherche sur la pratique des mutilations sexuelles féminines en contexte migratoire, en France et en Europe. Elle a notamment publié avec A. Andro et E. Cambois « Long-term consequences of female genital mutilation in a European context : self perceived health of FGM women compared to non-FGM women » dans la revue Social Science and Medicine, 2014.
Marie.lesclingand@unice.fr
Démographe, est directeur de recherche à l’IRD, membre du Ceped (UMR 196). Depuis une quinzaine d’années, ses travaux de recherche portent sur les processus de scolarisation en Afrique subsaharienne, principalement à travers l’analyse quantitative (données censitaires et d’enquêtes ménages) des pratiques familiales en matière de scolarisation, qui l’ont aussi conduit à s’intéresser davantage au phénomène des migrations dans l’enfance. Il mène également une réflexion critique sur la question des statistiques et indicateurs en éducation. Il a récemment publié avec K. Ségniagbéto, « Confiage, domesticité et apprentissage à Lomé à la veille de l’indépendance » dans le Journal des africanistes, 2014.
Marc.pilon@ird.fr
Sociologue chargée de recherche à l’IRD, est membre du Laboratoire population environnement développement (LPED, UMR 151) de l’université Aix-Marseille et de l’IRD. Après des recherches doctorales sur les transformations de la domesticité juvénile à Abidjan, elle a poursuivi des travaux en post-doctorat à l’Ined sur les migrations de travail et les migrations scolaires des enfants dans le cadre du projet Suivi longitudinal au Mali (Slam) coordonné par V. Hertrich. Ses recherches actuelles portent notamment sur les activités, l’éducation et les trajectoires des enfants migrants à Dakar. Sa thèse, dont est issu l’ouvrage Petites bonnes d’Abidjan. Sociologie des filles en service domestique, L’Harmattan, 2012, a reçu en 2010 le Prix sur les études de genre décerné par la Ville de Paris.
Melanie.jacquemin@ird.fr
Directrice de recherche à l’Ined, s’intéresse principalement aux dynamiques démographiques et familiales en Afrique subsaharienne, dans une perspective de genre. Ses recherches portent notamment sur la transition de la nuptialité, l’évolution des formes de conjugalité et de rapports à l’enfant, et sur l’influence des migrations juvéniles dans le changement social en milieu rural. Les questions méthodologiques (qualité et comparabilité des données) et éthiques (restitution aux enquêtés) font également partie de ses recherches. Elle pilote un suivi de population au sud-est du Mali dans le cadre du projet Suivi longitudinal au Mali (Slam) depuis 25 ans. Elle a récemment publié avec S. Lardoux « Âge à l’entrée en union des femmes en Afrique. Les données des enquêtes et des recensements sont-elles comparables ? » dans la revue Population, 2014.
Hertrich@ined.fr
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