I. Le premier Haut comité de la population (décret du 22 février 1939)
p. 9-11
Texte intégral
1Pour coordonner et stimuler l’action des départements ministériels dans la lutte contre la dépopulation, et dans l’intention de donner à la France un Code de la famille, M. E. Daladier, alors président du Conseil, instituait, par un décret du 22 février 1939 un Haut comité de la population dont la mission était ainsi définie par l’article 1 de ce texte :
2« Le Haut comité de la population coordonne les efforts et suit l’application des mesures prises par les divers services ministériels en ce qui concerne le développement de la natalité, le peuplement rural, la déconcentration urbaine, la politique française relative à la pénétration, au séjour et à l’établissement sur le territoire français des étrangers et à leur intégration dans la population française. »1.
3Cet organisme devait, sans création de service, sans crédit spécial, élaborer en quatre mois le Code de la famille. Il n’est pas inutile de rappeler sa composition ainsi que les méthodes qui ont présidé à ses travaux.
4En dehors du président du Conseil qui n’a pu assister aux séances, mais auquel il était rendu régulièrement compte du travail accompli, le Haut comité de la population comprenait cinq membres désignés tant en raison de leur autorité qu’en raison de leurs connaissances des problèmes traités2 et un secrétaire.
5Les différentes questions à étudier furent réparties entre les membres du comité qui ont présenté personnellement les rapports, assistés ou non de membres du Conseil d’Etat. De hauts fonctionnaires des ministères intéressés au problème démographique participaient également aux délibérations. Leur présence a sans doute plusieurs fois retardé le travail du comité, mais elle a permis d’éviter la méfiance des administrations à l’égard de tout ce qui s’élabore en dehors d’elles. Le Haut comité utilisa également une disposition du décret du 22 février 1939 selon laquelle toute personne pouvait être appelée à siéger en raison de sa compétence particulière.
6Les relations avec les différents ministères furent assurées par le secrétaire du comité qui veilla à ce que les membres et les rapporteurs fussent tenus informés des travaux accomplis ou en cours au Parlement, dans les administrations, et des ouvrages ou articles relatifs aux questions démographiques. Aucune suggestion utile n’a été formulée dans le pays sans qu’elle ait été communiquée aux membres du comité.
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7Dès son installation qui eut lieu le 4 mars 1939, après avoir entendu un rapport de son secrétaire définissant un plan de travail, le Haut comité de la population se mettait au travail. Il poursuivait ses recherches régulièrement, se préoccupant des répercussions financières des mesures qu’il envisageait et, le 30 juin 1939, après avoir tenu souvent plusieurs séances par semaine, il pouvait remettre au chef du Gouvernement, précédés d’un long rapport qui n’a pas été publié, les textes arrêtés au cours d’une première session. Ces textes ont fait l’objet d’une ultime révision par les soins du ministre du Travail chargé par le président du Conseil de cette mission. Ils sont devenus le décret du 29 juillet 1939 relatif à la famille et à la natalité française, dit Code de la famille.
8Il n’est pas inutile de rappeler ici les têtes de chapitres de ce code qui, par son ampleur, a placé la législation française en tête de toutes les législations de l’espèce :
– Aide à la famille : primes à la première naissance et allocations familiales généralisées, prêt à l’établissement des jeunes ménages ruraux et contrat de salaire différé, assistance à la famille.
– Protection de la famille : protection de la maternité (lutte contre l’avortement, création de maisons maternelles, lutte contre la mortalité infantile), protection de l’enfance.
– Protection de la race (outrage aux bonnes mœurs, substances vénéneuses, alcoolisme).
– La famille et l’enseignement (enseignement démographique, surveillance médicale des établissements d’enseignement).
– Dispositions fiscales.
9Après la déclaration de guerre, le Haut comité de la population se réunit à nouveau et, conformément à son texte organique, suivit l’exécution des textes mis en vigueur en vertu du décret-loi précédent, tout en proposant de nouvelles mesures.
10L’application même du décret du 29 juillet 1939 nécessitait en effet l’élaboration d’un grand nombre de textes, à savoir :
119 règlements d’administration publique,
12 décrets,
8 arrêtés.
12Le secrétariat du Haut comité participa activement à la rédaction de ces textes qui, pour la plupart, furent publiés pendant le premier semestre de l’année 1940. Le Haut comité dont la présidence pouvait désormais être assurée officiellement par un de ses membres3 prépara également le texte devenu le décret-loi du 29 novembre 1939, relatif à la prophylaxie des maladies vénériennes et un projet de décret modifiant et complétant le décret du 29 juillet 1939 en vue de permettre l’application pour le temps de guerre de certaines réformes. Ce dernier projet comprenait notamment des mesures spéciales d’aide à la famille et de lutte contre l’alcoolisme. A la suite des observations du Gouvernement, un texte beaucoup plus complet comprenant trois titres fut arrêté peu de temps avant les événements de mai 1940. Il contenait l’institution des allocations prénatales, une modification des textes sur le recrutement de l’armée et des mesures tendant à protéger la population contre l’alcoolisme et contre la tuberculose, ainsi qu’un texte relatif aux allocations de logement.
13A ces textes organiques s’ajoutaient des dispositions diverses concernant le contrat de salaire différé, l’octroi de certaines prestations d’assurances sociales et la juridiction professionnelle médicale.
14De nombreuses interventions furent faites également par le Haut comité auprès des services de l’information et de l’état-major de l’armée.
15Seuls les événements de 1940 ont empêché le projet précédent qui avait reçu l’accord des différents départements ministériels, notamment celui du ministère des Finances, d’avoir force de loi.
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16Pendant l’occupation ennemie, alors que le Haut comité de la population avait été supprimé par le Gouvernement de Vichy, plusieurs anciens membres de cet organisme4 se réunirent périodiquement et étudièrent les mesures à prendre après la guerre pour résoudre le problème démographique. Ainsi furent mis au point des projets relatifs à la lutte contre l’avortement, à l’aide à la famille, aux allocations de logement, au crédit familial, aux pensions de retraite.
Notes de bas de page
1 Ces termes ont été repris intégralement dans le texte du 3 avril 1945.
2 MM. Pernot, Landry, Philippe Serre, Boverat, Roujou. Le nombre des membres fut porté à 7 en février 1940 par l’adjonction de MM. Sauvy et de La Lande de Calan. M. Jacques Doublet, auditeur au Conseil d’Etat, était secrétaire du Haut comité.
3 « Le Président du Conseil peut désigner un vice-président parmi les membres du Haut comité de la population. Le vice-président du Haut comité de la population a qualité pour correspondre au nom du président du Conseil avec les départements ministériels représentés au Haut comité. » (Décret du 27 octobre 1939).
4 Mm. Pernot, Landry, Boverat, Sauvy, Doublet
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