Chapitre 7
Des femmes en périurbain : la réinvention d’un mode de vie ?
p. 149-172
Texte intégral
Introduction
1Si les différenciations de genre structurent les pratiques spatiales, elles sont encore plus marquées dans les espaces périurbains, où l’on observe, pour les femmes, « une rétraction de l’espace de vie » (Dodier, 2012, p. 163). Leurs modes de vie dans ce type d’habitat semblent souvent osciller entre différentes formes d’hyper-mobilité contrainte et de sédentarité subie. Quel que soit l’angle d’approche choisi, leur quotidienneté témoigne d’une inégalité de vécu par rapport aux hommes. Ces observations sont encore plus vraies en ce qui concerne les familles de condition sociale plus modeste résidant dans les espaces périurbains lointains (Rougé, 2005 ; Lambert, 2015), dans lesquels les hommes continuent d’être mobiles, notamment dans le cadre de leur activité professionnelle, tandis que les femmes apparaissent plus « captives ».
2Les travaux français questionnant le genre comme forme de différenciation dans la structuration des pratiques spatiales se sont développés depuis plusieurs années (depuis Haumont, 1966 ; Coutras, 1996 ; Denèfle, 2004 ; Di Méo, 2011 et plus récemment, Raibaud, 2015). Moins nombreux, en revanche, sont ceux qui s’intéressent à ces dimensions dans les espaces périurbains (Cailly et Dodier, 2007 ; Dodier, 2012 ; Debroux, 2013 ; Lambert, 2013, 2015, 2016a). Bien souvent centrés sur l’analyse des mobilités quotidiennes (Baudelle et al., 2004 ; Motte-Baumvol, 2007 ; Ortar, 2008 ; Aragau et al., 2012), ces travaux s’accordent sur l’existence d’une forte intersectionnalité des dimensions genrées de la vie quotidienne et mettent en évidence l’imbrication des rapports sociaux de sexe à d’autres types de rapports, qu’ils soient de classe, d’âge, d’origine…
3Le texte présenté ici reprend ces réflexions en centrant le propos sur la manière dont se réagencent, au cours du temps, les rapports sociaux de sexe dans l’espace périurbain. La première partie présente l’expérience de mobilité périurbaine et souligne les différenciations discursives dans le choix d’une maison individuelle en accession, selon trois dimensions principales : économique, matérielle et symbolique. Pour nombre de ménages, le choix de la localisation apparaît souvent contraint, et l’on peut repérer, selon les sexes, des registres de discours différenciés dans les modalités de construction du nouveau cadre de vie. Ces installations résidentielles arrivées à terme, la deuxième partie revient sur les « tactiques » et les « ruses » mises en œuvre par les femmes pour dépasser leur captivité. Témoins de la force des contraintes, ces « arts de faire » (De Certeau, 1990) mettent en exergue des ressources, des soutiens ou des liens susceptibles d’activer une appartenance territoriale. Bien que resserrées dans l’espace local, ces capacités d’action n’en sont pas moins source d’ancrage. Elles participeraient d’une tentative, plus ou moins aboutie, de positionnement dans un espace social « en train de se faire » (Roch, 1998, p. 144). La troisième partie vient alors souligner dans quelle mesure l’installation périurbaine, malgré des premières années parfois douloureuses pour ces femmes surtout au regard du mythe pavillonnaire entretenu par les professionnels de l’immobilier (banquiers, constructeurs de maisons individuelles, lotisseurs, etc.), finit toutefois par acquérir, à force d’ajustements et de temps, un pouvoir symbolique susceptible d’initier d’autres rapports à l’espace domestique comme à l’espace social local.
Méthodes et terrains
4L’enquête s’est déroulée en deux vagues. La première est issue d’une thèse (Rougé, 2005a) pour laquelle 38 entretiens ont été réalisés entre 1998 et 2000 dans sept communes de la couronne périurbaine toulousaine. Parmi ces entretiens, 23 concernaient les deux membres du couple. Dans le secteur retenu pour ce chapitre, à savoir le Sud de l’aire urbaine, 16 familles ont été rencontrées dans trois ensembles pavillonnaires : deux petits lotissements commercialisés dans les années 1980, dans des communes situées à plus de 35 kilomètres de Toulouse (Lavernose-Lacasse et Poucharramet), ainsi qu’un secteur de pavillons sur parcelles libres, développé dans les années 1990, à Saint-Julien, commune située à plus de 50 kilomètres de Toulouse. Sur les 16 familles rencontrées en 1999, nous n’en avons retrouvé que 8 lors de la seconde vague d’enquête en 2007 (Rougé et Bonnin, 2008). Les informations recueillies sur les anciens résidents rencontrés auparavant et ayant déménagé sont minces et ne proviennent que des échanges menés auprès d’autres ménages, souvent installés juste après leur départ. Sur le départ des interrogés de la première vague d’enquête, trois raisons majeures apparaissent et s’entrecroisent : la première est de l’ordre de la sphère professionnelle (licenciement et/ou mutation), la deuxième semble liée à des dimensions plus familiales et personnelles (divorces, maladie…) et la troisième concerne les conditions financières (surendettement).
5Lors de la première vague d’enquête, en 1999, une passation de questionnaires a été réalisée auprès de 35 ménages de ces trois ensembles pavillonnaires pour permettre à la fois d’approcher ces familles, en amont de la phase d’entretiens, et en même temps esquisser leur profil social dominant : en l’occurrence, ici, « modestes » à « petits moyens » (Cartier et al., 2008). L’entrée par les représentants des ménages révèle une importance des tranches d’âges comprises entre 35 et 54 ans, et donc un processus d’accession amorcé au début des années 1980. Les couples avec enfants sont surreprésentés. Enfin, la plupart des chefs de famille sont actifs, près de la moitié, dans le lotissement de Poucharramet, sont ouvriers (secteurs du bâtiment, mécanique, services publics). À Lavernose-Lacasse, la répartition est plus homogène entre ouvriers, employés et professions intermédiaires (dans les branches commerciales, l’immobilier, la banque-assurance, les services publics ou aux entreprises). La part des femmes en activité est nettement moindre – à peine plus de la moitié. Elles occupent plus souvent des postes relevant majoritairement de la catégorie des employés ou se déclarent au chômage. Enfin, un tiers d’entre elles se dit sans profession ou inactive. Ainsi, plus de deux cinquièmes des ménages de ces trois ensembles pavillonnaires sont, de manière permanente ou temporaire, « monoactifs » professionnellement. En termes de statut d’occupation, ces lotissements sont majoritairement composés de propriétaires en accession, dont beaucoup étaient précédemment locataires dans le parc collectif – privé ou public – de l’agglomération toulousaine (par exemple dans les quartiers dits « prioritaires » du Mirail et d’Empalot à Toulouse ou encore à Muret, commune située dans l’agglomération). Le tableau de synthèse en annexe permet d’approcher les parcours sociorésidentiels singuliers qui composent le matériau des entretiens réalisés.
6La deuxième vague d’entretiens réalisés en 2007 auprès des 8 ménages a permis, par une analyse monographique et longitudinale (voir encadré 1), de conjuguer les temporalités, d’appréhender les diverses sphères de la vie sociale et leurs relations, d’en repérer les ajustements individuels et de couple et d’envisager les phénomènes de stratification à l’échelle de configurations sociolocales spécifiques. Il faut préciser que ces enquêtes n’ont pas d’emblée été menées dans un souci d’analyse des rapports sociaux de sexe, mais plutôt dans l’optique d’étudier les modes de vie périurbains dans leur ensemble. Aussi, le propos développé ici doit être considéré comme un ensemble de propositions et de questionnements autour des rapports sociaux de sexe dans l’habitat pavillonnaire périurbain, plutôt que comme une recherche menée selon un protocole bien cadré.
Encadré 1. Description des terrains d’enquête et de leur évolution dans le temps
La situation toulousaine est marquée par une forte croissance de la population, une hausse des prix de l’immobilier et du foncier et une poursuite des logiques de périurbanisation. Hier relativement homogènes dans leur morphologie (communes peu équipées, lotissements isolés des bourgs, importants signes de malfaçons…), les espaces périurbains se sont modifiés physiquement au contact de l’urbanisation, selon des modalités différentes, et ont été absorbés par l’agglomération toulousainea.
Lors de la deuxième vague d’enquête, en 2007, le lotissement de Lavernose-Lacasse est incorporé au noyau urbain, à la fois par l’encerclement de nouvelles habitations (lotissements, résidences fermées, petits collectifs) et par l’aménagement des espaces publics (trottoirs, pistes cyclables). À l’intérieur du périmètre, les changements sont moins évidents. Les espaces publics sont peu valorisés mais les maisons semblent mieux entretenues, certaines ayant même été transformées. Entre 1999 et 2006, d’après le recensement, la commune a accueilli plus de 600 personnes, et atteignait à cette date une population totale de 2 561 habitants. La municipalité a autorisé la poursuite d’un développement pavillonnaire, mais aussi d’un ensemble d’immeubles collectifs de 1 à 2 étages, comprenant 60 logements, situés entre le noyau villageois initial et ce lotissement. Cette expansion a permis l’ouverture d’un petit supermarché, en plus des commerces existants. Par ailleurs, la commune a rejoint la Communauté d’Agglomération du Muretainb, créée en 2004 sous les injonctions au regroupement en intercommunalités.
Le lotissement de Poucharramet reste, quant à lui, « éloigné » du noyau villageois, et ce malgré l’augmentation de la population de la commune (850 habitants en 2008, soit 200 habitants supplémentaires d’une enquête à l’autre). En effet, la municipalité privilégie la poursuite d’une urbanisation pavillonnaire diffuse dans une direction opposée au secteur étudié. La desserte routière du lotissement, juste après le cimetière, offre toujours une image de désolation et semble moins entretenue. À cet égard, le décalage avec le cœur villageois du village est perceptible, en particulier dans le traitement des espaces publics. Enfin, la commune est partie prenante, depuis 2003, de l’EPCI Communauté de Communes du Savès (autour du bourg de Rieumes, situé au sud-ouest de l’agglomération toulousaine), permettant de ce fait un élargissement du bouquet de services pour ses habitants.
Dans la commune de Saint-Julien, la plus éloignée de Toulouse, l'urbanisation progresse, avec la construction de nouveaux pavillons et même d’un lotissement à la sortie du village. L’ensemble tend à s’agglomérer autour du noyau villageois initial. Depuis 1996, la commune est intégrée à la Communauté de Communes du Volvestre, elle-même prenant place dans le Pays Sud Toulousain. La municipalité affirme, au fil des années, la vocation récréative et touristique de la commune (ouverture d’un village « gaulois » à visée pédagogique et scientifique, rajout de la mention « sur Garonne » à sa dénomination, rachat de l’agence postale par la municipalité pour y installer un commerce multiservices…).
a. Entre 1982 et 2011, l’agglomération toulousaine est passée de 541 000 à 900 000 habitants, et le nombre de communes concernées de 47 à 73. L’aire urbaine, quant à elle, comptait, en 2011, 1,250 million d’habitants répartis sur 453 communes (Insee, 2014).
b. Cet Établissement public de coopération intercommunale (EPCI) de l’agglomération toulousaine s’organise autour de la ville de Muret, sous-préfecture de la Haute-Garonne. Par cette intégration, la commune a vu s’étoffer l’offre en services (petite enfance, transports à la demande…).
I. Les femmes et les hommes face à l’accès à la maison individuelle en périurbain
7Les nombreuses enquêtes menées sur les pavillonnaires, depuis N. Haumont (1966) jusqu’aux derniers travaux d’A Lambert (2015, 2016), soulignent à quel point, pour la majorité des ménages, les avantages du statut de propriétaire par rapport à celui de locataire s’articulent autour de trois dimensions : l’économique, le matériel et le symbolique. On peut cependant se demander si le registre discursif varie dans le temps dans tel ou tel champ selon que l’on interroge l’homme ou la femme. Déjà différenciés au moment de l’accession à la propriété, ces registres varient selon les rôles et les pratiques effectives de chacun des membres du couple.
1. L’installation en périurbain : un choix et une adapation genrés
8Les discours recueillis lors des deux périodes d’enquête révèlent que l’installation dans ces nouveaux espaces est plus une « obligation » qu’un véritable « choix », en raison des fortes contraintes financières liées au décalage entre le prix des terrains et la relative faiblesse des revenus des ménages1. Les hommes expliquent souvent leur décision de devenir propriétaire d’une maison individuelle par des arguments de nature économique : « c’est de l’argent qui n’est pas perdu », c’est « ne pas donner un loyer pour rien ». Dans bien des cas, cet acte est même décrit comme la marque de l’inscription dans une normalité pour un ménage ayant des enfants (Bourdieu et al., 1990). Par cette démarche, les hommes éprouvent la satisfaction d’avoir pu inscrire la famille dans un lieu, lui assurant par là même, d’une certaine façon, sa protection. L’accès à la propriété offre la perspective de l’acquisition d’un patrimoine et de sa possible transmission. Y transparaît, pour ces anciens locataires, l’impression d’une liberté retrouvée dans le rapport au logement ; ce que soulignait déjà avec justesse N. Haumont dans les années 1960, en opposant locataires des grands ensembles et nouveaux pavillonnaires : « Je suis chez moi et je fais ce que je veux » (M. A., 1998). L’emploi récurrent des expressions « chez soi », « à soi », « pour soi » marque bien le besoin d’une maison comme « lieu de l’autonomie, de la liberté et du pouvoir faire » (Haumont, 2001 [1966], p. 129). Pour ces hommes, l’accession à la propriété a un rôle assurantiel dans un contexte de précarisation du marché du travail et d’effritement des mécanismes de protection sociale (Abdelnour et Lambert, 2014).
9Les discours des femmes se situent plutôt dans un autre registre, en lien avec leur rôle de mère et d’épouse, et font ressortir d’autres éléments de valorisation. Pour elles, l’accession à la propriété d’une maison individuelle est avant tout l’instrument d’une meilleure gestion de l’espace domestique, que ce soit en termes d’éducation des enfants, d’espace disponible ou encore de confort par rapport au logement précédent :
On était trop à l’étroit, on voulait que les filles aient une chambre chacune, qu’elles puissent avoir un coin à elle, avec leur jouet, leur monde et puis pour moi aussi qu’il y ait plus d’espace, pour le linge, des placards… (Mme H., 1998).
10L’espace, le plus grand confort, la possibilité de coins et de recoins, la présence d’un jardin sont constamment évoqués pour asseoir le bien-fondé d’un tel choix.
11À ce désir d’acquisition d’une « maison à soi » s’ajoute, pour la quasi-totalité des ménages rencontrés et sans distinction de genre, le souci de se séparer socialement et géographiquement d’un environnement dans lequel ils ne se sentent pas ou plus à leur place : le logement collectif, bien souvent dans le parc social, situé en ville ou dans sa proximité immédiate. Les discours convergent pour souligner à quel point ce projet a été envisagé comme un moyen de quitter « à tout prix » un espace urbain jugé comme négatif :
H : L’appartement, il y a toujours des voisins en dessous, au-dessus et à côté, et avec les enfants c’est pas facile, alors que là on est tranquille finalement ! F : L’appartement par lui-même il n’était pas mal, mais c’était l’entourage [au Mirail], […], et puis, la cité, c’était trop dangereux pour les enfants (M. et Mme A., 1998).
12Le projet d’accession se réalise alors dans le cadre d’un dispositif très contraint par le budget disponible (Rougé, 2005a). Comme le souligne très justement E. Joseph-Affandi dans une enquête auprès de ménages de conditions proches ayant entrepris une installation dans une commune périurbaine de Marseille, « ce qui se joue dans leur mobilité spatiale, c’est une mobilité sociale qui ne peut être que changement d’espace, avec toutefois les limites inhérentes à leur situation économique. […] Leur mobilité est toute mobilisation » (1993, p. 107). Pour ces ménages, l’acquisition du bien se fait au prix d’un montage financier serré, avec des taux d’effort particulièrement élevés (Cuturello et Godard, 1982) et des durées d’emprunt souvent supérieures à 20 ans (Lambert, 2016b). Ainsi, peu de ménages déclarent avoir bien maîtrisé la localisation :
Oui, on a regardé plus près, mais quand on s’est renseignés sur les impôts fonciers et les prix des terrains et qu’on a vu que c’était quand même assez cher pour nous, alors on est venus là ! Bon c’est vrai que ça faisait plus loin pour aller travailler, mais c’est un choix parce que ça fait plus campagne (M. B., 1998).
13Quelques femmes reviennent, parfois, à la suite de leur mari, sur le détail de leur parcours résidentiel et sur ce « choix » de localisation, ce qui permet de saisir toute la tension qui s’exerce sur les finances du ménage :
On avait quand même demandé s’il pouvait [l’OPHLM] nous trouver un logement plus grand vu que la famille s’agrandissait, mais les seuls appartements qu’ils nous proposaient, c’était au Mirail et il était hors de question d’aller là-bas, alors ensuite on s’est renseigné sur Blagnac (commune limitrophe à Toulouse), mais dans ce cas alors pour acheter, mais c’est tellement cher là-bas aussi, même les maisons collées les unes aux autres c’était pas dans nos prix, donc on s’est dit, eh bien, autant aller un peu plus loin et puis quitte à s’éloigner autant partir à la campagne, […]. Ici c’était presque 10 fois moins cher qu’à Blagnac ou Cugnaux (communes limitrophes à Toulouse) pour une vraie maison et un grand jardin… (Mme H., 1998).
14Corollaire de cette tension, ces maisons construites par le lotisseur et habitées dès leur mise « hors d’eau », nécessitent bien souvent une forte mobilisation financière qui se ressent sur la qualité du bien acquis. Elles sont soit mal construites et/ou mal finies, soit réduites au strict minimum habitable, et nécessitent alors une forte mobilisation physique, essentiellement de la part des hommes :
Oui, beaucoup, des travaux à la pelle, il y a d’abord eu la laine de verre et c’est moi qui ai dû la payer en plus, ils sont partis et ils m’ont laissé tout en l’état […], il n’y avait pas les gouttières, il n’y avait rien… (M. A., 1998).
15S’ils pèsent financièrement et physiquement, ces défauts de construction impactent aussi fortement la vie quotidienne du ménage :
Tout, il faudrait tout refaire parce que ça pose des problèmes avec les meubles, l’électroménager, les prises, l’évacuation des eaux, enfin tout, il faudrait tout refaire… (Mme F., 1998).
16Sur ce sujet, les discours des femmes traduisent une mobilisation morale qui passe par une gestion stricte des besoins quotidiens (habillement, loisirs, alimentation…) et un contrôle permanent des flux monétaires :
C’est sûr qu’on ne s’achète pas des affaires tous les deux mois (Mme A., 1998).
17Quant aux dépenses les plus importantes (vacances, travaux…), celles-ci restent bien souvent sous le contrôle du mari (Cuturello et Godard, 1982 ; Perrin-Heredia, 2010 ; Lambert, 2015), et oscillent alors entre résignation et gestion de bas de laine : « […] alors la cuisine encastrée je suis en train de la faire petit à petit, c’est un meuble par mois… » (M. B., 1998).
18L’ensemble de la maisonnée est donc fortement mobilisé, avec parfois la crainte de ne pas pouvoir aller jusqu’au bout du projet résidentiel :
Par contre, ça a été dur quoi ! On avait des crédits à 13 voire 14 % au début donc si vous voulez, la maison, on l’a payée trois fois, quoi ! Par la force des choses, on a dû renégocier le crédit, c’est-à-dire que j’ai eu un accident de travail et j’ai été obligé de m’arrêter de travailler pendant une période, et donc nos revenus ont baissé. Donc on a fait un dossier de surendettement et par la suite ça s’est amélioré, et maintenant on est propriétaires, oui ! Le rêve s’est réalisé mais on a eu chaud ! (M. E., 2008).
On a eu du mal à y arriver, mais ça y est on a presque fini de payer la maison … (M. B., 2008).
19L’objet « maison individuelle » est un bien qu'il faut essayer de garder et ce, malgré, parfois, un profond désenchantement, tant ces maisons, de leurs propres aveux, « ne prennent jamais de valeur » (Mme D., 1998) ou ne correspondent pas toujours aux attentes :
H. : C’est vrai qu’on n’a pas vraiment la maison qu’on voulait. F. : Mais bon … on a déjà un toit et c’est déjà pas mal ! (M. et Mme B., 2008).
20De telles restrictions interviennent alors même que le spectre de la saisie immobilière est une réalité bien présente, ne serait-ce que par les exemples observés dans le voisinage :
Ils avaient des problèmes d’argent, des problèmes classiques, une maison, des petits boulots, des ennuis d’argents et puis des disputes et puis l’instabilité, etc. (Propos d’un voisin interrogé lors de la deuxième enquête).
21Un tel rapport au logement, teinté de sacrifices et de restrictions relatives à tout ce qui ne concerne pas l’accession, peut parfois se transformer en piège ; en particulier pour certaines femmes.
2. Distinctions de genre dans le rapport à la mobilité quotidienne
22À côté de ce quotidien fait de préoccupations partagées par l’ensemble de la famille, se dessine une différence sexuée majeure dans le maintien d’une mobilité autonome. Dans la plupart des familles rencontrées, la mobilité autonome de la femme semble en effet secondaire : sur les 16 femmes interrogées, trois d’entre elles n’ont pas accès à une automobile individuelle et deux ne possèdent pas le permis de conduire au moment de l’achat de la maison. Les hommes gardent au cours du temps un potentiel de mobilité et un rapport à l’extérieur liés à l’exercice d’une profession hors du domicile, alors que pour les femmes, les rapports à la mobilité quotidienne se modifient. Bien souvent en congé maternité lors de l'installation, elles espèrent, à la fin de celui-ci, pouvoir relocaliser leur activité ou trouver un autre emploi à proximité du nouveau lieu de résidence. Il s’agit par là de réduire autant que possible la contrainte que représente le déplacement domicile-travail, afin de pouvoir davantage se consacrer à l’éducation des enfants. L'exigence de relocalisation après la migration périurbaine se justifie, pour certaines, par la contrainte budgétaire dans l’achat d’un second véhicule :
Là, pour le moment je suis en congé maternité, mais je ne reprendrai pas le travail sur Toulouse, je démissionnerai parce que de toute façon on ne pourra pas fonctionner, on n’a qu’une voiture pour le moment, c’est vrai que lui il travaille de nuit et de week-end et moi je travaillerais le jour, mais ça ferait juste avec le temps de trajet, et puis s’occuper des filles, non ça serait trop galère, donc je chercherai du travail dans le coin, Saint-Julien ou à côté à Cazères… (Mme H., 1998).
23Comme le souligne A. Testenoire : « la liberté de circulation entre les espaces, dont les hommes bénéficient ou qu’ils revendiquent, contraste avec l’assignation des femmes à un espace restreint. […] Leur coexistence nécessite des arrangements qui ne sont pas dénués de rapports de pouvoir » (2006, p. 118).
24Cependant, la nécessité économique de travailler est telle que ces femmes finissent souvent par accepter – dès la fin du congé maternité – la première offre d’emploi qui se présente dans un marché local pas ou peu connu. Ce retour à l’emploi s’effectue alors « en pointillé » (Dieu, Delhaye et Cornet, 2011) et s’accompagne d’une forte division sexuée du travail (Testenoire, 2006). Les activités rémunérées, même occasionnelles, proviennent avant tout d’une volonté d’améliorer le quotidien et de « faire plaisir » aux enfants. Quelquefois, la reprise d’une activité professionnelle est impossible à entreprendre en raison de mobilités fortement restreintes. Les entretiens avec les femmes ont révélé l’importance de la biactivité comme préalable à l’accession – une double activité garante de l’obtention des prêts bancaires pour ces catégories de ménages aux niveaux d’apport personnel faibles ou nuls. Ces femmes espéraient, le moment venu, pouvoir trouver un emploi à proximité du domicile. Cet espoir, bien souvent déçu, finit par accroître les difficultés selon un schéma récurrent : un congé maternité, suivi d’une non-reprise de l’emploi, d'un accroissement des problèmes financiers, d’un frein à l’achat du deuxième véhicule ou à la formation au permis de conduire. Les revenus globaux du ménage s’en trouvant durablement affaiblis, ces femmes ont le sentiment d’être écartées de la vie professionnelle. Cet écart est d’autant plus marqué que les marges d’autonomie des deux conjoints ne sont pas identiques, comme le révèle cet échange :
H. : C’est pas trop mal desservi ici, il y a des bus qui passent. F. : Où tu vas toi ! des bus, deux bus, un le matin à 7 h 30 qui part à Toulouse et un autre le soir à 18 h 30 qui en revient, alors tu m’as compris, tu parles d’une desserte ! H. : Mais il y a la gare pas trop loin, au Fauga (3km) ? F. : Ah oui ! Et tu y vas comment toi à la gare sans voiture ? (M. et Mme A., 1998).
25L’absence de mobilité impose alors la figure de la « femme au foyer », situation bien souvent vécue comme un enfermement domestique : « Ce que je fais : pas grand-chose, je regarde la télé » (Mme E., 1998). Semblant vivre en état de quasi-dépendance vis-à-vis du mari, ces femmes sont souvent nostalgiques de leur ancien lieu de résidence – du moins dans son aspect fonctionnel. Femmes au foyer plus par accident que par choix, elles ne vivent pas leur situation de la même manière que celles pour qui ne pas travailler s’apparente davantage à un « choix » (davantage le cas chez les ménages aux revenus plus confortables). Cette sédentarité subie des épouses (Rougé, 2005a et b) ne semble pas rester sans effet sur les rapports sociaux de sexe à l’intérieur du couple, tant la complémentarité des rôles masculins et féminins est revendiquée : à l’épouse est dévolue la fonction de « fée du logis » (Paravacini, 1990), à l’homme, la tâche de « rapporter l’argent ». Ces femmes laissent transparaître un discours de découragement où seul existe leur rôle de mère et d’épouse, au point parfois d’avoir perdu toute autonomie, tout repère :
Mais maintenant je ne me sens pas bien ici, tu vois, dès que tu t’en vas, je ferme le portail à clé et je m’enferme chez moi, tu vois où j’en suis arrivée, je me sens encore plus mal qu’à la Reynerie, tu vois, toi, c’est pas pareil, tu vas travailler, tu pars à Toulouse, tu vas te balader avec ton boulot, mais moi je fais rien, la seule chose que je vois c’est la voisine d’à-côté et la télévision (Mme A., 1998).
26Fragilisées dans leur dynamique personnelle, leur quotidien en maison individuelle périurbaine s’apparente en quelque sorte au lieu des insignifiances (Lefebvre, 1968) tant le désenchantement est grand et le statut de femme au foyer loin d’être vécu sereinement :
C’est vrai, je ne sors pas parce que les voisins c’est pas ça, et puis ici on ne peut rien faire sans voiture, et puis il n’y a rien de fait pour ceux qui n’ont pas de voiture, et puis la maison des fois c’est jusque-là, parce que bon, tous les jours on voit des trucs et puis on se fait du souci, alors c’est vrai que des fois je tourne en rond et puis la télé c’est bon […]. Non il n’y a rien, même pour aller jusqu’au village, j’y vais à pied et puis tu crois qu’il y en a une qui vous dirait, ‘tiens je t’emmène’, non, elles sortent dans leur coin, celles qui peuvent et puis sinon on ne s’entend pas entre nous (Mme A., 1998).
27Cependant, au fil des années, certaines arrivent à engager des tactiques pour accroître leur mobilité et s’ajuster à ces environnements.
II. Tentatives d’ajustement et bricolage d’un quotidien moins cloisonnant
28Au regard des changements dus à la poursuite de l’urbanisation des communes (voir encadré 1) et d’un processus de modification du peuplement, est-il possible de repérer des « capacités de réappropriation » (Rénahy, 2010, p. 15) de la part des femmes ? En quoi celles-ci participent-elles d’une renégociation dans les relations de couple et dans leur rapport au lieu de résidence ?
1. Un réajustement des conditions de vie
29Lors du retour sur le terrain, en 2007, les configurations sociales des trois ensembles pavillonnaires ont évolué différemment. Dans celui de Lavernose-Lacasse semble se dessiner une relative complexification des modèles familiaux des ménages interrogés lors de la première enquête (départ des enfants, accueil des parents…). Ici, 11 familles ont été remplacées et 4 d’entre elles ont pu être rencontrées2. En revanche, dans celui de Poucharramet, la situation sociale des ménages reste proche de l’enquête précédente : maintien de familles avec enfants, ces derniers étant cependant relativement plus âgés (sur 10 enfants, 5 ont plus de 20 ans). La décohabitation apparaît donc ici plus tardive, peut-être également plus difficile. Quant au secteur de Saint-Julien, il est marqué par un fort développement des pavillons et par l’arrivée de ménages avec de jeunes enfants. Sur le champ de l’emploi et du statut professionnel, on constate, dans l’ensemble des terrains, trois évolutions majeures : un relatif recentrage des statuts sociaux autour des profils d’employés et de professions intermédiaires, moins de ménages en situation de mono-activité et un nombre accru de retraités.
30Pour la plupart des ménages auparavant en difficulté, la contrainte financière liée à l’accession s’est desserrée. Les plus anciens ont remboursé leurs emprunts (M. et Mme. E. et M. et Mme F.) ou sont près d’y parvenir : « On a eu du mal à y arriver, mais on a presque fini de payer la maison » (ménage B., 2008). Les autres, arrivés dans les années 1990, sont toujours accédants avec, pour certains, des emprunts dont les délais courent encore de 15 à 17 ans. Cette contrainte est toutefois perçue avec plus de sérénité, en raison d’une dynamique économique, démographique et immobilière positive, caractéristique de la région toulousaine3 :
E. : Au début c’est vrai que mon mari n’était pas chaud, il n’avait pas envie de s’engager mais ça ou payer un loyer. L. : Disons que c’est pas un truc à la légère non plus ! Il faut pouvoir assurer. E. : Oui mais regarde la maison elle prend de la valeur, à Toulouse tout prend de la valeur. L. : Oui c’est sûr ! Même si on doit la vendre maintenant on fait une petite plus-value (ménage C., 2008).
31Les « bons côtés » finissent par l’emporter sur les « à-côtés », aujourd’hui minimisés dans un discours où les pratiques de rationalité économique dominent. Ces familles revendiquent le fait de ne pas s’être laissées tenter par les sirènes du crédit facile, comme leurs anciens voisins.
32Si la fin (annoncée) des remboursements participe d’un changement dans la gestion du quotidien, pour beaucoup de ménages l’insertion professionnelle de la conjointe semble davantage jouer dans les variations de la condition périurbaine. Passé les premières années de l’installation, la meilleure connaissance des configurations locales permet d’opérer des situations d’adaptabilité. Quelques-unes ont trouvé des heures de ménages dans les environs (Mme F.). Certaines gardent des enfants ou des personnes âgées chez elles, au domicile d’autrui, ou au sein de structures spécialisées développées dans le cadre des EPCI (Mmes D. et E). Cet emploi de dépannage, ou activité d’appoint, exercé parfois au noir quand il se réalise à domicile (Lambert, 2013), apporte un complément financier dans le budget du ménage et débloque l’accès au financement du permis de conduire puis du véhicule personnel :
Je suis aide ménagère chez les personnes âgées et donc je me déplace chez les uns et les autres, je travaille à mi-temps et je me déplace maintenant en voiture, parce qu’il n’y a pas longtemps que j’ai la voiture, mais avant je me déplaçais en mobylette, […] je reste dans les parages (Mme F., 2008).
33D’autres ont pu profiter du développement économique du bassin d’emploi local, souvent réduit, mais qu’elles apprennent à connaître :
J’ai travaillé quelques mois chez un exploitant agricole du côté de Rieumes et ça m’a plu, il avait besoin d’une aide […], du coup j’ai entamé une formation en alternance pour être responsable d’exploitation […], je commence en septembre avec un CDI à temps plein (Mme G., 2008).
34Bien souvent, ces femmes se résignent aussi à occuper un emploi qui ne correspond pas à leurs qualifications, ni à leurs attentes initiales (Ortar, 2008). Pour nombre d’entre elles, la fonction publique territoriale permet d’obtenir des mutations et des opportunités d’emplois à proximité du domicile ; c'est à elles que s’adressent les politiques d’emploi en faveur des services à la personne (aides à domicile, assistante maternelle). D’une façon générale, la situation professionnelle de ces femmes apparaît meilleure que lors de la première enquête. Ces retours sur le marché du travail, bien que difficiles à maintenir dans la durée pour toute une série de raisons (conciliation fragile entre le travail et les obligations familiales, contrats souvent précaires, conditions de travail peu valorisantes, accès toujours compliqué au lieu de travail…), offrent néanmoins l’expérience d’un extérieur et peuvent amorcer un infléchissement dans les rapports de couple (Testenoire, 2015, p. 32). Seule la situation d’une épouse (ménage A.) toujours à l’écart du marché de l’emploi pour « raisons médicales » vient souligner le maintien d’un sentiment de captivité au domicile. Sa vie quotidienne locale, bien que plus développée, reste insatisfaisante à ses yeux car elle ne peut en profiter que par l’intermédiaire de son mari. Confrontée aux transformations du lieu de résidence et aux mouvements dans le voisinage, cette femme se sent encore plus isolée :
Les voisins ils changent, ce sont des « rich men » maintenant ! […] Il n’y en a pas un qui si il me croise sur la route me prenne [dans sa voiture], à part juste le voisin, là, qui travaille dans l’armée (Mme A., 2008).
35Afin de mieux comprendre les trajectoires professionnelles de ces femmes, et la place qu’elles occupent dans la sphère locale dix ans après leur installation, il aurait été utile de s’intéresser de plus près à leurs différences secondaires, et notamment à l’importance du travail dans leur identité. Si les entretiens recueillis ne permettent pas d’aller plus loin, il semble néanmoins possible d’avancer que ce « retour à l’emploi » permet une autre mise en visibilité de soi et semble faciliter la (re)construction de liens sociaux au-delà des alentours du logement et du lotissement, voire du village périurbain lui-même.
2. Faire avec l’espace ou les diverses facettes d’un rapport au local
36Les arbitrages professionnels s’accompagnent aussi de reconfigurations dans le domaine familial. Ainsi, le départ des enfants, leur insertion professionnelle avec maintien au domicile ou leur installation dans un logement à proximité, jouent un rôle central dans la manière dont les femmes vont pouvoir s’inscrire dans l’espace local. Il en est de même avec l’arrivée d’un parent à domicile ou l’installation d’amis proches dans les environs. Ces changements modifient la perception de l’espace du quotidien et se conjuguent aux relations nouées par l’intermédiaire des enfants (Cailly et Dodier, 2007) :
On a commencé à se faire des amis dans le coin, du côté de Rieumes, ou même à Poucharramet, leurs enfants et les nôtres étaient amis, et puis on a sympathisé et petit à petit […] On a de la famille qui vient de s’installer du côté de Saint-Sulpice-sur-Lèze, du coup on se voit un peu plus qu’avant (Mme G., 2008).
37Portées par les dynamiques nouvelles qui affectent leur environnement dans plusieurs domaines, les femmes rencontrées mobilisent au maximum les ressources de proximité : usage intense des commerces locaux, des équipements et des services qui se sont développés. À ce titre, il convient de souligner le rôle joué par les EPCI dans la refonte des services aux populations, ou dans la mise en œuvre de politiques publiques locales. Ainsi, par exemple, la Communauté de Communes du Savès (autour de Rieumes) a mis en service un minibus gratuit qui sillonne les villages des environs pour accéder au bourg principal les jours de marché :
Cette navette, c’est super, j’ai l’impression une fois par semaine d’aller à la ville. Même si je n’ai pas vraiment de courses à faire j’y vais quand même, je rencontre d’autres personnes et puis les fruits et les légumes y sont moins chers (Mme E., 2008).
38Comme d’autres publics perçus comme potentiellement « captifs », les personnes âgées et les jeunes (Berger et al., 2013), les femmes sont directement concernées par les actions de développement des politiques de mobilité à l’échelle locale ou départementale (offre de transports en commun le jour de manifestation dans le bourg local, transport à la demande, amélioration de pistes cyclables…). Ces femmes utilisent également davantage leurs réseaux sociaux, constitués avec le temps, pour augmenter et faciliter une mobilité chèrement acquise : pratique de l’accompagnement, du covoiturage, de l’emprunt de véhicule. L’ensemble de ces ajustements contribue à atténuer le sentiment d’isolement observé quelques années auparavant. Dans l’ensemble, elles apparaissent moins repliées sur elles-mêmes et au sein de l’espace domestique que par le passé. La perception des alentours du logement, du lotissement et du village périurbain lui-même, évolue peu à peu. L’espace se structure, devient plus lisible, plus praticable, et surtout plus agréable pour certaines d’entre elles, en particulier quand une petite centralité commerciale voit le jour ou qu’un espace naturel valorisé devient accessible (comme par exemple, le lac entre Poucharramet et Rieumes). Cet ensemble de pratiques (re)localisées offre un appui au (re)tissage de liens, même ténus et constitue « un support d’identification et de construction des identités sociales. » (Fol, 2010, p. 28).
39Le développement de services et de commerces dans ces espaces périurbains (Bonnin-Oliveira et al., 2014)4 laisse entrevoir des fonctionnements nouveaux à l’échelle de configurations proches des bassins de vie (op. cit.). Il en est ainsi de Muret, la sous-préfecture, de Rieumes avec son marché hebdomadaire, son supermarché et sa piscine, ou encore de Roques-Sur-Garonne avec son nouveau centre commercial. Certains ménages réorientent même leurs achats alimentaires au profit d’une offre en circuit court (par exemple vers des producteurs locaux pour les produits frais), ou sollicitent davantage les commerçants du secteur, comme ce couple de Saint-Julien qui a décidé de faire appel aux services d’un revendeur local, à Cazères, pour l’achat, l’entretien et la réparation des appareils électroménagers.
40Ainsi, des marges de manœuvre apparaissent et des imaginaires plus positifs s’infiltrent dans les représentations de la situation résidentielle : promenades en lisière de la commune, balades avec le chien le long des chemins ruraux, sorties à vélo… Autant de modalités de territorialisation qui, bien que circonscrites spatialement, n’en sont pas moins vectrices d’une meilleure connaissance des lieux et d’une multiplication des rencontres. L’attachement au lieu grandit et active une recherche d’ancrages qui transparaît dans le souci d’amélioration du logement. Cet ensemble de « petits mouvements » consolide l’impression de sécurité matérielle – « la maison à soi », « le rêve », « le château » –, mais aussi sociale par la reconstruction progressive d’un cadre relationnel, au-delà de la famille nucléaire (Testenoire, 2015, p. 31).
41De tels ajustements dans les pratiques et les socialisations s’accompagnent d’une transformation des représentations de l’espace local et des imaginaires (Bacqué et Vermeersch, 2013). Sont-ils suffisants, cependant, pour engager un processus d’insertion dans l’espace social local ?
III. Les modalités de repositionnement dans des espaces sociaux différenciés : quelques pistes
42Les changements dans l’exercice de la quotidienneté – tels que nous avons pu seulement les approcher ici – offrent-ils des supports à de « petits déplacements sociaux » (Lahire, 2004) ? Permettent-ils un réagencement des rapports sociaux de couples (Testenoire, 2015) ? En quoi l’acquisition d’une connaissance de l’espace et l’activation d’un processus d’interconnaissance donnent-elles à l’espace résidentiel – et au domicile – une signification renouvelée ? Si la deuxième enquête laisse à penser que se développent des socialisations supports à l’expression d’un collectif localisé – un « nous » –, celui-ci s’exprime toutefois de manière différenciée selon les lotissements étudiés et selon les sexes5.
1. Une ressource d’autochtonie reconnue mais encore peu revendiquée
43Dans le secteur pavillonnaire étudié à Lavernose-Lacasse, le temps a joué en faveur d’un apaisement des rapports interpersonnels et de la conflictualité sociale. Les tensions observées lors de la première enquête semblent s’être effacées au fil des années, en lien peut-être avec le départ des ménages ayant connu les situations les plus difficiles, et l’arrivée de nouveaux ménages plus aisés financièrement : « Maintenant c’est plus tranquille, c’est plus les mêmes gens qu’il y avait au début » (M. D., 2008). Ce renouvellement, perçu par l’ensemble des ménages du lotissement, est globalement apprécié parce que marqueur d’un changement social – même s'il n’est jamais évoqué comme tel – d’une partie des occupants et donc de l’image du lotissement. Embellissement des maisons, amélioration de l’entretien des jardins, implication locale, familles plus calmes, sont autant de signes perçus comme « allant dans le bon sens ».
44Ces arrivées de ménages aux trajectoires sociales considérées comme semblables, et auxquels il devient possible de s’identifier, couplées à une relative amélioration des conditions matérielles, offrent les conditions d’un moindre repli sur soi. Se dessinent alors des objectifs communs et des intérêts partagés à défendre (l’amélioration physique du lotissement, son changement de nom pour modifier son image, la continuité de l’urbanisation avec le noyau villageois…) :
H. : C’est vrai que pendant longtemps, on s’est sentis un peu abandonnés par la mairie, rien n’était vraiment fini, il y avait des difficultés avec les lumières, la route était mal entretenue, les gens se garaient n’importe comment, pas grand-chose n’était fait ! F. : Mais là maintenant il y a un monsieur qui s’y connaît. H. : Oui, parce qu’il fait de la politique et il est au conseil municipal et il essaye de faire bouger les choses. F. : Oui, il nous a dit que l’année prochaine, ça se mettrait en route. H. : Qu’ils refassent les routes, finissent les trottoirs, ils vont mettre d’autres arbres aussi … (M. et Mme B., 2008).
45Ce nouvel arrivant, présent au conseil municipal, est perçu comme un intermédiaire – une personne-ressource – susceptible d’aider le lotissement et ses résidents à s’intégrer progressivement à la « culture locale ». Il permet, en quelque sorte, et après plus de vingt ans, l’amorce d’une « autochtonisation».
46L’appartenance à un espace local moins replié sur le lotissement passe par une implication dans la politique municipale avec, comme dans bien des communes périurbaines, une opposition à la poursuite du développement de l’urbanisation. Derrière ce refus de l’urbanisation, pour le moins paradoxal compte tenu des aménités qu’elle procure, il y a une volonté de récuser les discours sur la densité, de marquer sa contestation face à la construction d’immeubles mais aussi de souligner la saturation de certains équipements ou le retard dans leur développement :
Même pour tout ce qui est associatif il n’y a pas de salle, [...] construire c’est bien mais derrière il faut pouvoir accueillir (M. A., 2008) ; les infrastructures, l’assainissement, les routes, les loisirs, il faut que tout suive et ça coûte cher (Mme D., 2008).
47Les mêmes enquêtés peuvent cependant reconnaître que ce développement a aussi, à terme, des effets positifs sur le lotissement :
Ils ont agrandi les trottoirs pour les harmoniser avec les nouveaux lotissements, c’est pratique parce que maintenant les enfants à vélo ou les mamans avec les poussettes peuvent aller jusqu’au village. On se sent plus proches du village par rapport à avant, et le village se rapproche de nous vu que la pharmacie est venue se mettre vers ici. C’est ce que je disais à C. l’autre jour « t’as vu on est moins loin du village, il s’approche de nous ! (Mme D., 2008).
48Hier isolées et stigmatisées6, ces familles – et à l’intérieur de celles-ci, les femmes – côtoient de nouveaux ménages plus récemment installés (retraités, ménages plus jeunes...) qui entreprennent des travaux, tentent d’instaurer des relations de voisinage, participent à une animation locale, municipale et parfois intercommunale. Avec le temps et, par l’intermédiaire des épouses, de leur insertion sur le marché du travail, de l’accès à une conformité, des liens noués, ces ménages se sentent plus en conformité avec la société locale. Celle-ci s’est renouvelée et ils y apparaissent moins comme des « étrangers ». Le sentiment de « captivité » observé hier diminue au profit de dynamiques d’ancrages issues d’une ancienneté résidentielle, d’un accommodement à la vie périurbaine, du développement de sociabilités et d’une recomposition des relations de voisinage. Outre le logement, d’autres lieux organisent le quotidien. Comme le souligne M. Roch, « ils affichent par là une forme de réussite, à savoir, s’être affranchi d’une condition sociale et spatiale – celle de la location en immeuble collectif de banlieue – et ce même sans arriver à s’insérer complètement dans une société locale encore en train de se faire » (Roch, 1998, p. 144). Autant de signes susceptibles de leur donner l’impression d’être plus proches des référentiels des classes moyennes périurbaines qui ont nourri la première vague de périurbanisation dans les années 1970 (Jaillet, 2004 ; Berger et al., 2014).
2. Une ressource d’autochtonie revendiquée mais restreinte et non reconnue
49Dans le lotissement de Poucharramet, la constitution d’un « nous » apparaît davantage structurée par le seul effet du temps et la relative stabilité du peuplement. Il prend alors la forme d’une solidarité de proximité – de voisinage ou plus familiale – et découle de l’affirmation d’une spécificité au regard du reste du village qui, aux yeux des résidents, les a « mis à côté ». Ce « nous » du lotissement se construit par rapport à un « eux » du reste du village, comme en réponse à une stigmatisation encore prégnante :
H. : On est appelés « la cité », oui ! C’est la cité, la cité, alors moi je me fâche, je dis non ! Non ! Vous allez au Mirail, vous appelez ça « la cité », je veux bien. Mais là, non ! F. : On est encore des parachutés, on est encore des pièces rapportées quoi. On ne sera jamais Poucharramettois, jamais ! On sera toujours des « estrangès » ! » (M et Mme E., 2008).
Au début, le maire, il m’a traité de parachuté alors vous savez, ça fait mal, quoi ! Les enfants allaient à l’école ici mais on est encore des parachutés. Pourtant, j’ai fait partie du comité des fêtes, du club de pétanque, j’ai même créé le club de foot, mais on ne sera jamais des Poucharrametois (M. F., 2008).
50C’est ici que les discours sur l’importance de la famille et de l’entraide entre voisins (prêts de voiture, prêts de matériels, accompagnements…) semblent les plus revendiqués. Ici que se dessinent aussi les changements de pratiques les plus marqués (forts usages des commerces et services du bourg de Rieumes depuis la mise en place de la navette), et que l’usage de la maison va bien au-delà du domestique et devient, en elle-même, une ressource (garde d’enfants, accueil de parents, mise en culture du jardin, invitation des voisins pour des apéritifs et des dîners…). Ce « nous » semble impulsé, structuré, voire solidifié par les épouses (échanges, trocs, aides mutuelles…), même si rien de bien formalisé dans les entretiens ne permet de l’affirmer. Comme vu plus haut, c’est également dans ce lotissement que les enfants, bien qu’adultes, sont restés au domicile, ce qui n’est pas étranger à leur précarité sur le marché du travail. Par ailleurs, et on retrouve là des dimensions approchées dans d’autres contextes – en particulier ceux où domine un vieillissement des occupants (Morel-Brochet et Rougé, 2017), le voisin devient une personne de confiance et permet la réinstauration d’une forme de vie villageoise qui, dans les contextes périurbains, prend alors tout son sens (Dodier, 2012).
51Ces évolutions apparaissent presque « alternatives » ou « réactives » par rapport au modèle pavillonnaire périurbain plus traditionnel. La « captivité » initiale deviendrait là enracinement – certes un peu forcé – et révélerait des formes de sociabilité que l’on pourrait presque qualifier de populaires, tant elles s’appuient sur une familiarité et une dépendance (Dupuy, Coutard et Fol, 2002) au lieu et au voisinage immédiat. Cette entraide, couplée à quelques légères améliorations apportées par l’action publique locale (signalétique, réfection de la voirie envisagée…), agit comme une bouffée d’oxygène dans un quotidien toujours teinté de préoccupations. Toutes ces tactiques, en tant « qu’art de faire » du faible, pourraient s’apparenter à ce que J.-N. Rétière qualifie de ressource d’autochtonie : cette socialisation, bien que productrice d’un mieux-être, ne produit pas de la reconnaissance au-delà du seul ensemble pavillonnaire (Rétière, 2003).
Conclusion : pour une analyse longitudinale des espaces périurbains
52Même si elles peuvent sembler mineures et mériteraient d’être investiguées davantage, les évolutions des situations personnelles et familiales combinées aux transformations des espaces périurbains étudiés laissent entrevoir une possible renégociation, pour chaque individu, de « sa » place au sein de ces environnements. Moins resserré sur le domicile, le quotidien de ces ménages – et en particulier des femmes – laisse apparaître une meilleure gestion de l’espace par l’acquisition d’une capacité d’aller et de venir, de « choisir » de rester à la maison ou d’aller « faire un tour ». Le principe de proximité – parce qu’il n’est plus seulement enfermement – semble alors jouer positivement. Les trajectoires sociospatiales se singularisent selon l’évolution du peuplement, les positions sociales des ménages, la teneur des transformations spatiales et les actions des politiques locales. Malgré des conditions d’installation qui sont sources d’instabilité et d’incertitude, les familles qui sont restées et « ont tenu bon », arrivent à façonner un modèle de réalisation de soi relativement satisfaisant.
53Ce retour sur enquête vient appuyer les résultats d’autres travaux et souligne à quel point le projet d’accession à la propriété, outre l’acquisition d’un logement, est aussi projet d’inscription dans l’espace résidentiel, de pratiques, de représentations et de perceptions. Toutefois, il peut être un vecteur d’identifications sociospatiales très inégalement réparties selon les positions et les trajectoires sociales et résidentielles, les histoires familiales, mais également selon les contextes périurbains.
Bibliographie
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Tableau récapitulatif des 8 ménages sélectionnés en 1999-2007

Notes de bas de page
1 Aux dires des ménages et selon la commune, les prix – maison et terrain pour une surface de 600 à 800 m2 – oscillent, pour la période 1979-1985, entre 235 000 francs (35 768 euros) et 350 000 francs (53 272 euros) et atteignent, dans les années 2000, 700 000 à 1 200 000 francs (soit 106 544 à 182 648 euros).
2 Leurs propos sont exploités ici uniquement à titre seulement illustratif. Pour une analyse plus détaillée, voir Rougé et Bonnin, 2008 et Rougé, 2011.
3 Dans la région toulousaine, les prix des marchés les moins chers ont connu des augmentations bien supérieures aux marchés haut de gamme, et plus particulièrement les maisons dans le périurbain (Cusin, 2013, p. 145).
4 Rappelons que ces enquêtes ont été menées dans des espaces périurbains métropolitains, mais qu’en est-il de la validité de ces résultats pour des espaces périurbains/ruraux situés loin de grandes villes, et sans maillage en bourgs et petites villes... ?
5 Le fait de n’avoir pu interroger qu’un seul ménage ne permet pas d’intégrer la commune de Saint-Julien dans cette réflexion.
6 Le lotissement se nomme « Les Graves » en raison de la présence de gravières, et il est facile d’imaginer ce qu’une telle dénomination peut produire.
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