Description de la paroisse de Pernå dans l’archipel du golfe de Finlande, située dans les départements de Nyland et Degerby1
p. 283-288
Texte intégral
1.
1L’Académie des sciences n’ignore pas que l’on a entrepris un mesurage géographique de la Finlande ; cependant, afin que l’organisation et le but d’un tel travail paraissent d’autant mieux, je vais mentionner quelques attendus de la gracieuse instruction que Sa Royale Majesté a établie le 27 octobre 1747.
2Sa Royale Majesté a trouvé bon de faire mesurer par une Commission de géomètres la surface exacte de la Finlande et d’en faire décrire la constitution et les principales caractéristiques, afin que Sa Royale Majesté puisse ensuite gracieusement exhorter ses sujets à user des moyens de subsistance propres à la constitution naturelle de chaque lieu, que l’on s’applique ainsi à l’exploitation idoine des terres et que les habitants puissent espérer atteindre leur plénitude de force, etc.
2.
3Cette entreprise est sans conteste une de celles qui importent le plus à nos temps, démontrant du même coup le souci digne de louanges que le roi a de la Finlande.
3.
4La Commission se compose d’un directeur, d’un observateur et de vingt géomètres qui, chacun à sa manière, ont consacré des efforts et un zèle incroyables, ce qu’ils font encore quotidiennement à présent. Il est regrettable pour la commission et pour le bien public que le directeur, monsieur Olof Ehrnström, un solide savant orné des plus nobles couronnes de l’honneur et de la vertu et qui était possédé d’un incommensurable zèle dans ses entreprises, ait été enlevé par la mort à la fleur de son âge, il y a deux mois, à Vasa […]
5[Les paragraphes 4 à 12 contiennent une description géographique et économique de la paroisse de Pernå.]2
13.
6Les forces économiques d’un pays provenant d’une grande quantité d’habitants et de son emploi diligent, il faut porter la réflexion sur l’avancement de ces deux situations. Nous avons déjà montré ici que, dans la paroisse telle qu’elle est à présent, il y a plus de subsistances fournies par l’agriculture qu’il n’en est besoin ; peut-être la pêcherie dans les îles donnera-t-elle à l’avenir un moyen de subsistance encore plus avantageux. Il faut donc d’abord se préoccuper de favoriser la propagation des gens. On ne peut faire venir personne d’autres régions du royaume vers la Finlande ; d’ailleurs un tel déplacement comporte toujours des difficultés. Le meilleur moyen demeure donc, comme on l’a dit, d’autoriser des mariages à l’âge approprié et d’encourager la division des fermes par laquelle on pourra empêcher le départ, si fréquent ici, des familles vers le voisinage. Mais je dois, pour ne pas trop m’étendre, repousser à plus tard l’exposé de la manière de procéder à cet encouragement. Je rapporte cependant le merveilleux relevé qui suit, que monsieur le Pasteur Habermann a fait avec beaucoup de zèle de la quantité des personnes aujourd’hui à Pernå et qu’il a donné à la Commission d’arpentage.
14.
7Tableau du nombre de personnes dans la paroisse de Pernå ; réparties suivant l’âge et le sexe :

15.
8Il suit du tableau précédent que l’on peut compter 25 personnes, petites et grandes, par manse3. On voit également comment le nombre des personnes d’un sexe donné parfois augmente, parfois diminue à chaque âge, et qu’ainsi le sexe masculin est plus nombreux à sept reprises, le féminin à quatorze. La quantité du sexe masculin se rapporte à celle du féminin comme 1 011 à 1 132 dans les plus petits nombres. Mais à l'âge où, chez nous, ont coutume de se produire les mariages, l’inégalité n’est pas si grande : en effet, entre 20 et 35 ans d’âge, le nombre des hommes se rapporte à celui des femmes comme 377 : 394. Et quoique, ici comme ailleurs, la Nature se comporte pareillement, et que, chaque année, un peu plus de garçons que de filles viennent au monde, il est cependant plausible que la guerre ait plus entamé le sexe masculin et rendu l'inégalité plus grande qu’elle n’est habituellement du fait du sexe. Il serait d’ailleurs souhaitable de pouvoir rassembler de tels relevés des personnes, ainsi que les registres des nés et des morts, chaque année et dans toutes les régions du royaume ; ainsi, non seulement l’histoire naturelle atteindrait sa perfection dans cette perspective, mais on pourrait encore établir sur des fondements solides la préoccupation que l’on doit avoir de la multiplication et du travail du peuple, et prévenir les maladies et autres accidents qui empêchent ou perturbent habituellement l’accroissement de celui-ci.
16.
9Suivant ce que nous apprennent les précédents relevés de la surface cultivée et de la quantité d’habitants dans cette paroisse, il me faut ajouter les observations suivantes :
- Sur chaque manse de la paroisse de Pernå, viennent chaque année 33 arpents ou 16 ½ tonnes de semence, ainsi que 25 personnes, mais à cause des très fréquentes gelées dans cette paroisse et de la pauvre condition bien connue de l’agriculture, ce qui est semé ne donne au plus que le troisième grain, ce qui fait 49 ½ tonnes de grains par manse, et pas encore deux tonnes pour la subsistance de chaque personne. Ce qui ne suffit pas à un jeune homme, et encore moins à un valet de ferme adulte : ainsi, le grain perdu et vendu pour rapporter le revenu nécessaire est obligatoirement obtenu par brûlis, manière de produire qui ne suffit pas à obtenir la subsistance, sans compter que, ainsi, la terre subit des dommages indescriptibles, comme il est montré dans les présents Mémoires de l’Académie des sciences, dans la 3e livraison de cette même année.
- Suivant le 12e paragraphe, cette paroisse a l’opportunité, outre les anciennes terres, de cultiver en tout 40 nouveaux arpents, c’est-à-dire 20 tonnes de semence par an et par manse. Or, comme les paysans sont encouragés à continuer de partager les terres et à mieux cultiver, en supprimant la gelée4, on pourrait, suivant un calcul mesuré, obtenir, sauf la semence, une récolte du 10e grain, ce qui ferait 200 tonnes de grains par manse ; si l’on en ôte 4 tonnes pour quelque dépense, et 8 tonnes de vente, ce qui fait en tout 12 tonnes, il reste 188 tonnes de grains, soit la subsistance en pain pour 48 personnes par manse, et à peu près 4 tonnes de farine par valet.
- La paroisse de Pernå est composée de 170 5/8 manses, ce qui, en regard de l’espace qu’elle a, de la réserve de bois, des possibilités de pêcherie, du proche débit dans la ville de Degerby5, et de différentes sortes de subsistances, peut être aisément réparti en huitièmes, avec 6 valets par huitième et 48 par manse ; il y aurait, avec des améliorations, non seulement 8 190 personnes, ou presque encore une fois autant qu’il y en a à présent, qui pourraient séjourner dans cette paroisse ; on pourrait encore disposer, pour le commerce et les échanges en général, de 2 047 tonnes de grains par an, en comptant 12 tonnes par manse, comme on l’a rappelé dans la précédente observation.
10De semblables observations peuvent être faites sur la disposition actuelle et espérée des pâtures et de l’élevage ; afin de ne pas être trop long, je les réserve cependant pour une autre occasion ; en attendant, voilà une introduction qui suffit à donner un aperçu des forces et des faiblesses de cette paroisse, soit autant de ce qui lui manque que de ce qui pourrait être modifié par une meilleure économie.
11[Il y a encore, p. 276, deux paragraphes de considérations générales.]
Notes de bas de page
1 Ce texte est paru pour la première fois en suédois sous le titre « Beskrifning Öfver Pernå Socken, belägen i Skärgården vid Finska viken, uti Nyland och Degerby Höfdingedöme » in Jacob Faggot, Kungl. Svenska Vetenskaps Academiens Handlingar, vol. 11, 1750, p. 257-268 [NdT].
2 Les passages entre crochets sont des résumés de ce qui n’a pas été traduit [NdT].
3 Voir note 32, Wargentin, Mémoires de 1754-1755, Troisième pièce [NdT].
4 Les savants suédois partageaient l’opinion très commune que la gelée provenait des tourbières et des marais de forêt. La culture de ces terres diminuait donc la gelée et améliorait le climat [NdT].
5 Degerby, aujourd’hui Lovisa, est une ville située dans le Nyland, fondée en 1745 et dont le nom changea dès 1752. Degerby/Lovisa était le chef-lieu du petit département de Kymmenegård et Savolax (aboli en 1775) [NdT].
Auteur
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Essai sur le principe de population suivi de Une vue sommaire du principe de population
Nouvelle édition critique enrichie
Thomas Robert Malthus Jean-Marc Rohrbasser et Jacques Véron (éd.) Éric Vilquin (trad.)
2017
Essai sur les probabilités de la durée de la vie humaine
Addition à l'Essai (1760)
Antoine Deparcieux Cem Behar (éd.)
2003
Naissance des sciences de la population
Pehr Wargentin Nathalie Le Bouteillec et Jean-Marc Rohrbasser (éd.)
2017
Éléments de statistique humaine ou démographie comparée (1855)
Achille Guillard Jacques Véron et Jean-Marc Rohrbasser (éd.)
2013