Chapitre 4 ■ Les violences sur mineur·e·s dans la famille et son entourage
p. 149-181
Note de l’auteur
Note portant sur l’auteur1
Texte intégral
1Trois décennies après la ratification de la Convention internationale des droits de l’enfant introduisant le concept d’intérêt supérieur de l’enfant, la réprobation sociale des violences sur mineur·e·s s’est accrue en France comme dans les autres pays occidentaux. Celles-ci ont été progressivement érigées en problème social, politique et de santé publique, à la faveur de procès pénaux largement médiatisés, avec notamment dans les années 1990-2000, les affaires Dutroux en Belgique2 ou Outreau en France3, mais aussi, sous l’impulsion des mobilisations féministes des années 1970-1980, et surtout des actions récentes menées par les associations de protection de l’enfance, des soignant·e·s, des organisations internationales4 et des témoignages de victimes (Debauche, 2015 ; Tursz et Cook, 2015 ; Adamsbaum et Rey-Salmon, 2013 ; Boussaguet, 2009). Plus récemment, les pouvoirs publics ont, de surcroît, inscrit cette cause à l’agenda politique. Le 1er mars 2017, la France lançait le premier plan interministériel de mobilisation et de lutte contre les violences faites aux enfants (2017-2019). Dans ce contexte, la législation française s’est également renforcée pour prévenir et sanctionner les actes de violences à l’encontre des mineur·e·s (voir encadré 1).
2Bien que le problème des violences sur mineur·e·s tende à être reconnu et malgré l’intervention des pouvoirs publics, dès la fin du xixe siècle, dans la sphère familiale5, la famille reste principalement perçue comme une sphère de protection et il demeure impensable d’associer les violences à cet espace de vie (Pascoal et Poeschl, 2004), d’autant plus lorsque les actes violents sont commis sur des enfants, désormais considérés comme particulièrement vulnérables. Certaines figures sociales stéréotypées, comme celle du père corrigeant ses enfants, de l’homme « pédophile » externe à la famille ou encore de l’agresseur·e « psychopathe » ou mal intégré, tendent aussi à invisibiliser les auteur·e·s et les situations de violences qui ne correspondent pas à ces clichés (Le Caisne, 2014 ; Dussy, 2013 ; Ambroise-Rendu, 1998).
Encadré 1. Principales évolutions juridiques depuis la fin du xxe siècle
Depuis la loi du 10 juillet 1989 (n° 89-487) relative à la prévention des mauvais traitements à l’égard des mineur·e·s et à la protection de l’enfance, les dispositions législatives oscillent entre la mise en place des dispositifs d’intervention socio-éducative dès l’exposition de l’enfant à un danger, et l’accentuation des mesures de répression lorsque l’enfant a subi des violences. Ainsi est créé, en 2004 (loi n° 2004-1 du 2 janvier 2004), l’Observatoire national de l’enfance en danger (Oned), depuis devenu l’Observatoire national de la protection de l’enfance (ONPE), dont l’objectif est de « mieux connaître le champ de l’enfance en danger pour mieux prévenir et mieux traiter ». La loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance, confirmée et complétée par la loi n° 2016- 297 du 14 mars 2016, met en place les cellules départementales de recueil des informations préoccupantes (Crip) afin d’organiser les procédures de suivi et d’évaluation des révélations de situations de danger, tant sur le plan administratif que judiciaire.
Les dispositions pénales ont également créé de nouvelles infractions pour protéger les enfants victimes de violences ou mis en péril, aggravé les pénalités notamment en matière d’infraction à caractère sexuel et introduit une procédure pénale dérogatoire (art. 706-47 et s. du Code de procédure pénale) plus contraignante à l’égard des personnes mises en cause (notamment avec la loi n° 98-468 du 17 juin 1998). La minorité de 15 ans est une circonstance aggravante présente dans la quasi-totalité des modalités de sanction des atteintes aux personnes.
La prescription de l’action publique pour des faits de violences, d’agression sexuelle ou de viol commis sur mineur·e·s, relève également depuis 1989, d’un régime dérogatoire régulièrement modifié (en dernier lieu par la loi du 3 août 2018), pour faciliter la poursuite des auteur·e·s. Ainsi, le point de départ du délai de prescription n’est plus fixé au jour de la commission des actes, mais reporté à la date anniversaire des 18 ans de la victime mineure au moment des faits, et le délai est allongé par rapport au délai de droit commun. Il peut être porté à 10 ans ou 20 ans pour les délits en principe prescrits par 6 ans, et à 30 ans pour les crimes prescrits ordinairement par 20 ans (art. 7 et 8 du Code de procédure pénale).
En outre, le législateur est intervenu à plusieurs reprises pour faciliter la révélation, le signalement des agressions et atteintes sur mineur·e·s. Il sanctionne la non-dénonciation de ces faits (par exemple art. 434-3 du Code pénal) et écarte les poursuites disciplinaires, civiles ou pénales à l’encontre des praticien·ne·s qui dérogent au secret professionnel en informant les services administratifs ou judiciaires des violences commises sur mineur·e·s dont ils ont eu connaissance dans le cadre de leur pratique (art. 226-14 du Code pénal).
La loi du 10 juillet 2019 (n° 2019-721), modifiant l’article 371-1 du Code civil, est venue préciser que « l’autorité parentale s’exerce sans violences physiques ou psychologiques », formule soulignant la prohibition des violences éducatives ordinaires.
3Ces représentations sociales expliquent en partie le manque de données chiffrées à l’échelle nationale sur les multiples formes de violences intrafamiliales commises à l’encontre des enfants, qui est l’une des critiques formulées à l’encontre de la France par le Comité des droits de l’enfant des Nations unies (Committee on the Rights of the Child, 2016). Les enquêtes quantitatives nationales antérieures à l’année 2015 se sont soit principalement focalisées sur le recueil des violences sexuelles extra et intrafamiliales subies dès l’enfance (Enveff 2000 ; CSF 2005-20066 essentiellement), soit ont enregistré un large spectre de violences verbales, psychologiques, physiques ou sexuelles vécues depuis l’enfance (EVS 2005-20067) mais sans identifier les auteur·e·s ou les sphères de survenue des faits (ONPE, 2016 ; Guyavarch, 2010 ; Bajos et Bozon, 2008 ; Jaspard et al., 2003c).
4L’enquête Virage est ainsi la première enquête en population générale qui permet de mesurer et d’explorer finement les violences psychologiques, physiques et sexuelles vécues par les mineur·e·s au sein de la famille ou de l’entourage proche, ainsi que les combinaisons entre ces différents types de violence. Soulignons toutefois que des recherches sur ce sujet ont été entreprises dans diverses disciplines (histoire, sociologie, anthropologie, droit, médecine…). Mais, contrairement aux États-Unis par exemple, la France ne dispose pas de centres de recherches ni de revues scientifiques dédiés exclusivement au problème des violences, a fortiori sur mineur·e·s, ce qui ne facilite pas la mise en commun des savoirs acquis.
I. Appréhender les violences vécues avant l’âge de 18 ans dans le contexte d’une enquête
1. Ce que révèlent les violences sur les rapports de pouvoir dans la famille
5L’objectif de ce chapitre est de mettre au jour les situations de violences commises sur des mineur·e·s de moins de 18 ans par des membres de la famille ou des proches, nommées ici violences « intrafamiliales » et « parafamiliales ». Ces situations sont révélatrices des rapports de pouvoir et de domination dans la famille qui, à l’instar des relations conjugales, structurent les relations entre adultes de la parenté et enfants, de manière différenciée selon le sexe du parent et de l’enfant. Si les relations entre adulte et enfant sont, par construction, asymétriques, la violence est utilisée dans cet espace de vie comme un moyen de maintenir cette hiérarchisation entre l’adulte et l’enfant, mais aussi sans doute entre les filles et les garçons. Les données collectées sur les violences sexuelles (Debauche et al., 2017 ; Bajos et Bozon, 2008) mettent en évidence l’intrication des rapports de domination de sexe et d’âge qui s’expriment dans ces violences. Ces auteur·e·s montrent en effet que les violences sexuelles sont exercées sur des enfants des deux sexes, quasi exclusivement par des hommes, mais davantage sur les filles que sur les garçons, et si les femmes continuent à subir des violences sexuelles à l’âge adulte, les hommes en sont alors quasiment exempts. La domination des adultes sur les enfants des deux sexes se double ainsi d’une domination des hommes sur les femmes et les filles. Cette intrication des rapports de domination se manifeste-t-elle aussi lorsque les violences sont (également) physiques et/ou psychologiques ? Autrement dit, les violences des adultes sur les enfants sont-elles aussi des violences de genre ?
6Pour répondre à cette question principale, ce chapitre dresse un panorama quantitatif des situations de violences subies avant l’âge de 18 ans et éclaire les mécanismes de ces violences. Il décrit les situations auxquelles les femmes et les hommes ont été confrontés durant leur enfance et adolescence au sein de la famille ou parmi les proches et répond à des questions spécifiques. Filles et garçons sont-ils aussi nombreux à subir des violences ? S’agit-il des mêmes situations de violences ? Qui sont les auteur·e·s des faits ? Les hommes et les femmes dénoncent-ils les violences vécues aux jeunes âges de la vie dans des proportions similaires ?
7La première partie de ce chapitre est consacrée à la description statistique des situations de violences para et intrafamiliales, vécues par les femmes et les hommes avant l’âge de 18 ans. La deuxième partie examine les caractéristiques familiales des personnes ayant déclaré de telles violences. La troisième et dernière partie s’intéresse à leur parole autour de ces violences, c’est-à-dire à ce qu’elles ont révélé ou mis sous silence, ainsi qu’aux démarches entreprises pour dénoncer ces faits et aux obstacles rencontrés lors du parcours de révélation des actes subis.
2. Susciter la déclaration des violences subies avant l’âge de 18 ans
8Sans prétention d’exhaustivité, ce chapitre s’intéresse aux violences interpersonnelles de nature psychologique, physique et sexuelle, vécues par les personnes interrogées alors qu’elles étaient âgées de moins de 18 ans au moment des faits, et commises par des membres de la famille ou des proches8. Les faits rapportés couvrent ainsi les périodes d’enfance et d’adolescence. Ils peuvent remonter à quelques années pour les personnes les plus jeunes de l’échantillon (âgées de 20 ans au moment de l’enquête) et à plus d’une soixantaine d’années pour les plus âgées (âgées de 69 ans au moment de l’enquête). À ce titre, la production de statistiques sur des événements rétrospectifs et de surcroît sensibles pose, à bien des égards, des questions méthodologiques (Cavalin, 2010b ; Bajos et Bozon, 2008 ; Jaspard et al., 2003c). Dans l’enquête Virage, les questions sur les violences subies dans la sphère familiale ou proche viennent après plus d’une trentaine de minutes d’entretien téléphonique et ont été hiérarchisées9 (voir encadré 2), pour permettre une meilleure réception des questions sensibles, minimiser les refus, mais aussi pour faciliter la remémoration des événements lointains. En dépit de toutes ces précautions méthodologiques, le recueil rétrospectif reste tributaire des biais de mémoire de l’interwievé·e, pouvant entraîner des erreurs et des imprécisions, voire une reconstruction a posteriori de l’histoire de vie. En outre, ce mode d’interrogation est dépendant des différences de sensibilité selon l’âge et la génération, du contexte socio-historique lors de la passation de l’enquête, ainsi que de la relation entre l’enquêté·e et l’enquêteur·trice, favorisant plus ou moins la déclaration de violences. Malgré ces limites, le questionnement rétrospectif évite les problèmes éthiques et juridiques complexes liés à l’interrogation de mineur·e·s sur des situations difficiles qu’ils ou elles peuvent être en train de vivre, et alors que l’autorisation parentale pour une telle enquête est obligatoire.
II. Panorama des situations de violences vécues avant l’âge de 18 ans
9Par son questionnement rétrospectif, l’enquête Virage permet d’appréhender les violences interpersonnelles auxquelles les personnes interrogées ont été confrontées avant l’âge de 18 ans au sein de leur famille ou parmi les proches hors conjoint·e10. L’avant-dernière partie du questionnaire (module « famille et proches ») recueille, au travers de huit questions principales, les violences psychologiques, physiques et sexuelles subies par les femmes et les hommes dans la sphère familiale ou dans l’entourage proche, depuis l’enfance jusqu’au moment de l’enquête. Dans cette même section du questionnaire, chaque acte de violence fait ensuite l’objet d’un questionnement détaillé. La fréquence des faits, l’âge de l’enquêté·e au début et à la fin des faits, le nombre d’auteur·e·s impliqués, leur sexe et leur lien avec l’enquêté·e sont enregistrés. La première partie du questionnaire (module « caractéristiques sociodémographiques ») contient en outre des questions évoquant des actes violents vécus au cours de l’enfance et de l’adolescence (voir encadré 2).
1. L’épreuve de la violence dans l’enfance concerne une part importante de femmes et d’hommes
10Parmi le spectre des violences para et intrafamiliales sur mineur·e·s recueillies, les violences psychologiques sont fréquemment mentionnées (tableau 1) : 11,7 % des femmes contre 8,0 % des hommes âgés de 20 à 69 ans au moment de l’enquête, déclarent qu’un membre de la famille ou un proche avait l’habitude de hurler, casser des objets créant une ambiance tendue et angoissante, et 6,3 % des femmes contre 3,3 % des hommes, rapportent avoir subi des insultes, des humiliations ou des critiques répétées avant l’âge de 18 ans.
Encadré 2. Liste des principales questions exploitées
Les questions sur le climat familial durant l’enfance et l’adolescence sont recueillies dans le premier module du questionnaire « caractéristiques sociodémographiques ».
« Vous-même au cours de votre enfance et adolescence, avez-vous…
Constaté entre vos parents de graves tensions ou un climat de violence ? »
« Au cours de votre enfance et adolescence, vous-même ou un de vos proches avez-vous connu les situations suivantes…
Sévices ou coups répétés sur vous-même ? Sur vos frères et sœurs ? Sur votre père ? Sur votre mère ? »
Les violences vécues dans le cadre familial ou dans l’entourage proche depuis l’enfance (y compris les douze derniers mois précédant l’enquête) sont recueillies dans l’avant-dernier module du questionnaire « famille et proches ». Chacune des questions est précédée de l’expression suivante : « Depuis votre enfance jusqu’à aujourd’hui11, est-ce qu’une personne de votre famille ou un proche, autre qu’un·e conjoint·e… ».
Violences psychologiques :
« … a ou avait l’habitude de hurler, casser des objets, créant une ambiance tendue et angoissante ? »
« … a ou avait l’habitude de vous insulter, de vous humilier, de critiquer votre apparence physique, vos opinions ou vos capacités ? »
Violences physiques :
« … vous a frappé·e, donné des coups avec des objets ou a commis d’autres brutalités physiques sur vous ? »
« … vous a enfermé·e ou séquestré·e, vous a mis·e à la porte ou vous a laissé·e au bord de la route ? »
« … vous a menacé·e avec une arme ou un objet dangereux, a tenté de vous étrangler, de porter atteinte à votre vie ou de vous tuer ? »
Violences sexuelles :
(Pour les femmes) « … a contre votre gré, touché vos seins ou vos fesses, vous a coincée pour vous embrasser, s’est frotté ou collé contre vous ? »
(Pour les hommes) « … s’est contre votre gré, frotté ou collé contre vous ? »
(Pour les deux sexes) « … vous a forcé·e à faire ou à subir des attouchements du sexe, a-t-il essayé ou est-t-il parvenu à avoir un rapport sexuel avec vous contre votre gré ? » (Pour les deux sexes) « … vous a forcé·e à d’autres actes ou pratiques sexuels ? »
11Dans la première partie du questionnaire (module « Caractéristiques sociodémographiques »), plusieurs questions apportent un regard complémentaire sur l’existence de violences au sein de la famille, en particulier du couple parental. Ces violences sont aujourd’hui de plus en plus reconnues comme une forme de violence psychologique à l’encontre des enfants (Centre Hubertine Auclert, 2017 ; Zaouche Gaudron et al., 2016 ; Sadlier et al., 2015 ; Séverac, 2015). Ainsi, 12,6 % des femmes et 10,6 % des hommes disent avoir constaté, au cours de leur enfance et adolescence, de graves tensions ou un climat de violence entre leurs parents (tableau 1). Les « graves tensions » dans un couple peuvent néanmoins s’apparenter à une interaction conflictuelle entre les partenaires sans relation d’emprise d’un partenaire sur l’autre. A contrario, dans un contexte de violences dans le couple, l’auteur·e établit un rapport de domination sur sa ou son partenaire en visant son intégrité psychologique, physique voire sexuelle (Brown et Jaspard, 2004). Comme la formulation de la question mélange deux phénomènes (tension et violence) (voir encadré 2), son interprétation en tant qu’exposition à des violences conjugales concerne assurément une partie de ces enquêté·e·s mais il serait excessif d’affirmer que tel est le cas pour l’ensemble des individus composant ces 12 %.
Tableau 1. Fréquence des violences para ou intrafamiliales débutées avant 18 ans selon le sexe (%)

12La question sur les coups et sévices répétés vécus par la mère et commis par le père durant l’enfance et l’adolescence de l’enquêté·e, ne présente en revanche aucune ambiguïté. Ces faits sont rapportés par 1,2 % des femmes et 0,6 % des hommes. Les sévices ou coups répétés sur les frères et sœurs sont déclarés par 1,3 % des femmes et 0,8 % des hommes. Les répondant·e·s ayant relaté des sévices ou des coups répétés sur leur père sont très minoritaires. Les proportions de femmes et d’hommes exposés aux violences conjugales sur leur mère devraient a priori être équivalentes. Sans exclure que les violences conjugales puissent être plus fréquentes lorsque la « fratrie » est composée de filles, deux autres hypothèses peuvent être faites quant à la surdéclaration de ces violences par les femmes. Les filles pourraient être davantage prises à partie ou tout au moins plus souvent présentes lors des violences. Une différence de perception entre les sexes pourrait également intervenir. Les femmes, étant plus touchées que les hommes par le problème des violences dans le couple à l’âge adulte, qualifieraient davantage les faits passés comme violents en écho avec leurs propres expériences.
13S’agissant des brutalités physiques endurées avant l’âge de 18 ans, 6 % des femmes et 5,8 % des hommes déclarent avoir été frappés, avoir subi des coups avec des objets ou d’autres brutalités physiques, et 2,8 % des femmes contre 1,9 % des hommes mentionnent des sévices ou des coups répétés au domicile parental ou chez un autre membre de la famille. Les autres formes de violences physiques sont plus rares. Les enfermements, séquestrations, mises à la porte et les abandons sur le bord de la route subis avant 18 ans sont cités par 1,6 % des femmes et 1,4 % des hommes. Les menaces avec une arme ou un objet dangereux et les tentatives d’étranglement ou de meurtre survenues avant 18 ans sont mentionnées par 1 % des femmes et 0,7 % des hommes.
14Les violences sexuelles subies durant l’enfance et l’adolescence dans le cadre familial ou proche, sont aussi davantage rapportées par les femmes que par les hommes. Les attouchements des seins, des fesses, les baisers forcés et les actes de pelotage12 avant 18 ans concernent 3,7 % des femmes interrogées et les actes de pelotage, 0,4 % des hommes. Bien qu’une part de cet écart de déclaration entre les sexes puisse mécaniquement s’expliquer par une différence de définition (voir encadré 2), nous pouvons toutefois penser qu’il existe une réelle différence d’exposition entre les femmes et les hommes aux actes de pelotage. Enfin, les viols et les tentatives de viols ainsi que les autres formes d’agressions sexuelles débutés avant 18 ans sont respectivement déclarés par 1,5 % et 2,4 % des femmes et par 0,3 % et 0,5 % des hommes.
2. Des violences qui commencent à des âges très jeunes
15Notre échantillon est hétérogène en termes d’âges, puisque nous interrogeons de manière rétrospective des personnes âgées de 20 à 69 ans. Toutefois, la durée d’exposition au risque de subir une violence au sein de la famille ou parmi les proches avant l’âge de 18 ans est la même pour l’ensemble des répondant·e·s. Il n’est donc pas nécessaire de restreindre notre échantillon à une tranche d’âges spécifique pour étudier les âges de survenue des violences13. Néanmoins, il est probable que les générations les plus âgées au moment de l’enquête (40-69 ans), pour lesquelles ces événements sont anciens, aient daté les faits avec une moins grande fiabilité que les générations les plus jeunes (20-39 ans).
16Si le questionnaire Virage ne recueille pas les âges au début des actes violents désignés dans le module « caractéristiques sociodémographiques », mais seulement leur période d’apparition (l’enfance et l’adolescence), nous connaissons l’âge auquel les violences para ou intrafamiliales désignées dans le module « famille et proches » se sont produites la première fois et l’âge auquel elles ont eu lieu pour la dernière fois si elles se sont répétées.
17De manière générale, nous observons que les violences sur mineur·e·s subies au sein de la famille ou du proche entourage commencent très jeunes, et ce indépendamment du sexe de l’enquêté·e (figure 1). Plus précisément, la moitié des personnes déclarant des violences psychologiques avant 18 ans les ont vécues pour la première fois pendant l’enfance, les médianes se situant entre 6 et 10 ans selon les faits pour les femmes et entre 7 et 8 ans pour les hommes. Les brutalités physiques débutent aussi à de très jeunes âges, avant 7 ans pour la moitié des enquêté·e·s, tandis que les autres violences physiques plus sévères14 commencent plus tardivement. À titre illustratif, la moitié des femmes et des hommes qui ont déclaré ce type de fait avant 18 ans mentionnent des menaces physiques, des tentatives d’étranglement ou de meurtre avant l’âge de 12 ans. Quant aux violences sexuelles sur mineur·e·s, elles débutent fréquemment bien avant la pré-adolescence, tant chez les femmes que chez les hommes ayant révélé ces faits. La moitié de ces femmes rapportent avoir subi des attouchements des seins, des fesses, des baisers forcés, des actes de pelotage avant l’âge de 10 ans, avoir vécu des viols, des tentatives de viols avant l’âge de 9 ans, et avoir enduré d’autres formes d’agressions sexuelles avant l’âge de 8 ans. La moitié des hommes déclarent avoir subi des actes de pelotage avant l’âge de 9 ans, et avoir vécu des viols, des tentatives de viol ou d’autres agressions sexuelles avant l’âge de 10 ans. Ces chiffres soulignent donc la précocité de l’épreuve de la violence que peuvent endurer des enfants au sein de la famille ou de l’entourage proche.
Figure 1. L’âge de la première violence para ou intrafamiliale déclarée selon le sexe, pour les femmes et les hommes âgés de 20 à 69 ans

Champ : hommes et femmes âgés de 20 à 69 ans, vivant en France métropolitaine, en ménage ordinaire et déclarant des violences para ou intrafamiliales avant l’âge de 18 ans. Légende : (1) pour les femmes, cette catégorie recouvre aussi les attouchements des seins, des fesses et les baisers forcés. Lecture : 25 % des femmes âgées de 20 à 69 ans déclarant avoir subi des viols ou des tentatives de viol avant leur majorité, ont vécu ces violences avant l’âge de 6 ans, 50 % avant l’âge de 9 ans et 75 % avant l’âge de 13 ans.
Source : enquête Virage, Ined, 2015.
3. Des violences qui se répètent fréquemment et perdurent dans le temps
18La formulation des questions saisissant les violences psychologiques sous-entend que ces faits se sont reproduits (voir encadré 2). En revanche, les violences physiques ou sexuelles peuvent avoir eu lieu une ou plusieurs fois. Les répondant·e·s ont donc été interrogé·e·s sur la répétition des violences physiques et sexuelles, depuis leur survenue jusqu’au moment de l’enquête. L’échantillon est ici restreint aux personnes âgées d’au moins 30 ans, âge auquel les violences dans la famille sont quasiment toutes terminées15 (figures 2 et 3).
19Les résultats montrent que les violences physiques ou sexuelles commises par des membres de la famille ou des proches avant l’âge de 18 ans sont répétées, la proximité du lien entre l’auteur·e des violences et l’enquêté·e facilitant la réitération (figure 2). En effet, 93 % des femmes et 91 % des hommes déclarant des brutalités physiques ont mentionné que ces faits se sont produits plus d’une fois. Une part importante des personnes qui rapportent avoir été enfermées, mises à la porte, abandonnées sur le bord de la route, ou bien qui déclarent des menaces physiques, des tentatives d’étranglement ou de meurtre, ont également subi ces actes de façon récurrente. Les violences sexuelles ne font pas exception. Par exemple, parmi les enquêté·e·s rapportant des agressions sexuelles avant 18 ans, 50 % des femmes et 43 % des hommes les ont vécues 5 fois ou plus ou bien sur une ou plusieurs périodes.
Figure 2. Distribution de la répétition des violences para ou intrafamiliales débutées avant 18 ans, pour les femmes et les hommes âgés de 30 à 69 ans (%)

Champ : hommes et femmes âgés de 30 à 69 ans, vivant en France métropolitaine, en ménage ordinaire et déclarant des violences para ou intrafamiliales avant l’âge de 18 ans. Note : différences entre femmes et hommes non significatives selon le test du Chi-2 au seuil de 5 %. Légende : (1) pour les femmes, cette catégorie recouvre aussi les attouchements des seins, des fesses et les baisers forcés. Lecture : parmi les hommes âgés de 30 à 69 ans déclarant avoir été frappés, subi des coups avec des objets ou d’autres brutalités physiques avant 18 ans, 6 % ont vécu ces actes 1 fois, 18 % entre 2 et 4 fois, 73 % 5 fois ou plus ou bien sur une ou plusieurs périodes.
Source : enquête Virage, Ined, 2015.
Figure 3. L’âge de la dernière violence para ou intrafamiliale déclarée selon le sexe, pour les femmes et les hommes âgés de 30 à 69 ans mentionnant des violences répétées

Champ : hommes et femmes âgés de 30 à 69 ans, vivant en France métropolitaine, en ménage ordinaire et déclarant des violences para ou intrafamiliales répétées avant l’âge de 18 ans. Lecture : 25 % des femmes âgées de 30 à 69 ans déclarant avoir subi des viols, des tentatives de viol avant leur majorité, ont vécu ces violences pour la dernière fois avant l’âge de 11 ans, 50 % avant l’âge de 13 ans et 75 % avant l’âge de 16 ans. Légende : (1) pour les femmes, cette catégorie recouvre aussi les attouchements des seins, des fesses et les baisers forcés.
Source : enquête Virage, Ined, 2015.
20Jusqu’à quel âge est-on exposé aux violences au sein de la famille ou parmi les proches ? L’âge à la dernière violence déclarée varie selon le type d’acte subi et le sexe de l’enquêté·e. En moyenne, les violences psychologiques puis physiques durent plus longtemps que les violences sexuelles, notamment pour les femmes. Pour la moitié des personnes déclarant des violences sexuelles répétées et débutées avant 18 ans, ces violences ont eu lieu pour la dernière fois avant la fin de la pré-adolescence, alors que pour la moitié des individus mentionnant des violences physiques répétées, la dernière fois se situe avant la fin de l’adolescence (figure 3). Les âges médians aux dernières violences sexuelles se situent entre 13 et 14 ans selon les actes pour les femmes et entre 12 et 13 ans pour les hommes, et les âges médians aux dernières violences physiques sont de 16 ans pour les femmes et se situent entre 15 et 16 ans pour les hommes. Enfin, il semblerait plus difficile pour les hommes et surtout pour les femmes, d’échapper aux violences psychologiques qui persistent encore à l’âge adulte pour certain·e·s.
4. Près d’1 femme sur 5 et 1 homme sur 8 révèlent des violences
21L’Enquête nationale sur les violences envers les femmes en France (Enveff, 2001) est la première enquête sociodémographique à avoir construit un indicateur synthétique de violences dans le couple résumant les réponses des femmes « à vingt-deux questions portant sur des actes de violence commis par le ou la conjoint·e au cours des douze derniers mois » (Jaspard et al., 2003c). Mais jusqu’à présent, aucun indicateur de violences para ou intrafamiliales sur mineur·e·s n’a été développé, faute de dispositif statistique adapté avant la réalisation de l’enquête Virage (2015). Or, la construction d’un indicateur s’avère nécessaire pour apprécier la réalité des situations de violences vécues par les enfants et les adolescents au sein de la famille ou de l’entourage proche, mais aussi pour comprendre comment les violences psychologiques, physiques et sexuelles vécues avant l’âge de 18 ans se combinent. En outre, il permet d’approcher le continuum des violences. Enfin, il sert à identifier des groupes de mineur·e·s plus exposés que d’autres aux violences et à explorer leurs trajectoires de vie.
22Dans ce chapitre, deux indicateurs globaux de violences para ou intrafamiliales sur mineur·e·s ont ainsi été construits. Le premier indicateur synthétise les réponses (positives ou négatives) de l’ensemble des répondant·e·s âgés de 20 à 69 ans aux questions sur les violences survenues dans la sphère familiale ou proche avant l’âge de 18 ans, en excluant la question sur l’existence de graves tensions ou d’un climat de violence entre les parents. Il fournit donc une estimation restreinte du phénomène. Le second indicateur, qui introduit, en revanche, la question sur l’existence de graves tensions ou d’un climat de violences entre les parents, fournit une estimation large du phénomène. Trois autres sous-indicateurs ont également été construits : un indicateur de violences psychologiques (estimation « restreinte » et estimation « large ») ; un indicateur de violences physiques ; et un indicateur de violences sexuelles. Des précisions sur leurs modes de construction se trouvent dans l’encadré 3 et en annexe (voir tableau A).
Encadré 3. La construction des indicateurs de violences para ou intrafamiliales sur mineur·e·s
L’indicateur global de violences para ou intrafamiliales sur mineur·e·s synthétise les réponses (positives ou négatives) de l’ensemble des 27268 femmes et hommes âgés de 20 à 69 ans aux questions qui recueillent les violences survenues dans la sphère familiale ou proche (voir encadré 2). Il prend en considération le nombre de faits mentionnés, leur nature (psychologique, physique, sexuelle), leur concomitance et tient compte de la répétition de chaque acte lorsque l’information est saisie dans le questionnaire (voir annexe, tableau A).
En amont de son élaboration, trois sous-indicateurs de violences para ou intrafamiliales ont été construits (voir ci-dessous et en annexe, tableau A) :
- un indicateur de violences psychologiques para ou intrafamiliales débutées avant 18 ans, lui-même subdivisé en deux sous indicateurs. Le premier indicateur résume les réponses aux questions sur les violences psychologiques vécues avant 18 ans, en excluant la question sur l’existence de « graves tensions ou d’un climat de violence entre les parents ». Dans le second indicateur, nous introduisons une question supplémentaire (« avoir constaté de graves tensions ou un climat de violence entre les parents »). Nous obtenons donc deux estimations de la fréquence des violences psychologiques para ou intrafamiliales sur mineur·e·s : une estimation « restreinte », au sens où elle se réfère à une définition restrictive des situations de violences, et une estimation « large », incluant des situations de graves tensions entre les parents ;
- un indicateur de violences physiques para ou intrafamiliales débutées avant 18 ans qui traduit les réponses aux questions sur les violences physiques endurées avant 18 ans ;
- un indicateur de violences sexuelles para ou intrafamiliales débutées avant 18 ans qui, de manière symétrique, condense les réponses aux questions sur les violences sexuelles subies avant 18 ans.
L’indicateur global s’obtient par le regroupement des valeurs prises par les indicateurs de violences psychologiques (estimation « restreinte » ou « large »), physiques et sexuelles. Ainsi, l’indicateur global fournit deux estimations (une estimation « restreinte » et une estimation « large ») de la fréquence des violences para ou intrafamiliales débutées avant 18 ans et comprend cinq niveaux : le niveau 0 rassemble les personnes qui n’ont pas déclaré de violence ; le niveau 1 correspond à un niveau de violences « peu sévère » ; le niveau 2 correspond à un niveau de violences « sévère » ; le niveau 3 dit « très sévère » regroupe les personnes qui ont subi des violences répétées et qui ont cumulé de multiples actes violents dans l’enfance et l’adolescence.

23Ainsi, selon l’estimation « restreinte », toutes générations confondues, près d’1 femme sur 5 (17,6 %) et 1 homme sur 8 (12,9 %) déclarent avoir subi des violences para ou intrafamiliales débutées avant l’âge de 18 ans (tableau 2). D’après l’estimation « large », près d’1 femme sur 4 (22 %) et près d’1 homme sur 5 (18 %) mentionnent avoir vécu des violences para ou intrafamiliales débutées avant 18 ans.
24Les hommes les plus âgés au moment de l’enquête (les 50-69 ans) rapportent, toutefois, moins fréquemment des violences para ou intrafamiliales débutées avant l’âge de 18 ans (figure 7a, estimation restreinte, pages suivantes). Ces répondants peuvent avoir oublié certains actes anciens, et leur sensibilité aux violences peut être plus faible, notamment concernant les « violences éducatives ordinaires » qui pouvaient être admises comme relevant du « droit de correction » des parents sur leurs enfants, ou considérées comme constitutives de la masculinité. En outre, les problèmes de santé générale et psychique, les tentatives de suicide, les consommations d’alcool à risque sont significativement plus fréquents parmi les personnes ayant vécu ces violences16. Une mortalité plus élevée de ces individus pourrait donc participer à une diminution de leur présence au sein de la population avec l’avancée en âge. Les femmes âgées de 50 à 69 ans déclarent également moins de violences dans l’enfance (figure 7a, estimation restreinte). En revanche, parmi la population féminine âgée de 20 à 49 ans, la fréquence des situations de violences dans l’enfance est plus élevée, la fréquence maximale se situant parmi celles âgées de 40 à 49 ans (figure 7a, estimation restreinte). Ces résultats traduisent peut-être chez celles-ci une prise de conscience progressive des violences subies avec l’avancée en âge. Autres hypothèses, ces différences seraient dues à un effet de cycle de vie ou encore à un effet de génération. Certaines femmes âgées de 40 à 49 ans au moment de l’enquête, peuvent être à une période de leur vie où elles connaissent des séparations, liées parfois à des relations de couple empreintes de violence. Dans ce contexte, il est possible qu’elles relisent leur enfance au regard de ces violences. Dans ces cohortes (nées entre 1966 et 1975), avoir eu une éducation « stricte » voire « violente » alors que les modes éducatifs se transformaient, pourrait aussi être davantage perçu comme peu tolérable.
Tableau 2. Fréquence des situations de violences para ou intrafamiliales débutées avant 18 ans selon le sexe, estimation restreinte et estimation large (%)

Figures 4 à 7. Fréquence des situations de violences para ou intrafamiliales débutées avant 18 ans selon l’âge et le sexe (%)

Champ : hommes et femmes âgés de 20 à 69 ans, vivant en France métropolitaine, en ménage ordinaire. Lecture : parmi les femmes âgées de 20 à 29 ans au moment de l’enquête (estimation restreinte), 7,2 % ont subi des violences para ou intrafamiliales « peu sévères » avant 18 ans, 5,4 % des violences « sévères » et 5,4 % des violences « très sévères » (figure 7a).
Source : enquête Virage, Ined, 2015.
25Par ailleurs, les femmes déclarent s’être trouvées plus souvent en situation de violences très sévères au cours de leur enfance et adolescence que les hommes (figures 7a et 7b). Autrement dit, elles déclarent avoir été davantage confrontées à un cumul de violences que le sexe masculin. Par exemple, 5,6 % des femmes âgées de 20 à 69 ans contre 2,3 % des hommes âgés de 20 à 69 ans, ont rapporté des violences para ou intrafamiliales très sévères durant l’enfance et l’adolescence (figure7a, estimation restreinte).
5. Les auteur·e·s de violences psychologiques ou physiques se distinguent des auteur·e·s de violences sexuelles
26Qui sont les auteur·e·s des violences ? Les questions du module « famille et proches » permettent d’apporter des réponses à cette interrogation. Pour chaque acte de violence, l’enquête enregistre avec précision le ou les auteur·e·s des faits.
27Le père en première position ou la mère en seconde position commettent la majorité des violences psychologiques et physiques sur les enfants des deux sexes (tableau 3). Cependant, ces violences ont tendance à être exercées davantage sur les enfants du même sexe que le parent : en cas de violences physiques, les hommes mettent davantage en cause leur père que les femmes, et les femmes mentionnent plus souvent leur mère que les hommes. Les frères et demi-frères et, dans une moindre mesure les sœurs et demi-sœurs, ainsi que les oncles sont aussi responsables d’une part non négligeable des violences psychologiques et physiques. Par ailleurs, les beaux-pères (voire les belles-mères) sont plus fréquemment déclarés comme les auteurs des violences psychologiques ou physiques lorsque les répondant·e·s ont résidé avec un beau-parent à l’adolescence.
28Quant aux auteur·e·s de violences sexuelles para ou intrafamiliales sur mineur·e·s, ce sont principalement des hommes, cohabitant ou non avec l’enfant au moment des faits et ayant agi seuls la plupart du temps. Les femmes ayant rapporté des violences sexuelles avant 18 ans dénoncent le plus souvent17 les oncles (20 %), les hommes proches de la famille (17 %), les pères (14 %), les autres hommes de la parenté (11 %), les autres hommes18 (11,1 %), les frères et demi-frères (10 %), les amis proches (8 %), ou bien les grands-pères (6 %). Concernant les hommes, ils citent le plus fréquemment les oncles (16 %), les frères et demi-frères (14 %), les autres hommes de la parenté (11 %), les pères (10 %), les amis proches (10 %), les autres hommes proches de la famille (10 %), les autres hommes (10 %), ou encore les voisins bien connus de la famille (6,8 %). Les beaux-pères sont également souvent désignés comme auteurs de violences sexuelles lorsque les femmes ont résidé à l’adolescence avec leur mère et leur beau-père. Enfin, les agressions sexuelles commises sur des mineur·e·s par des femmes sont rares, seuls quelques enquêté·e·s, plutôt des hommes, les ont désignées comme auteures des faits.
Tableau 3. Les auteur·e·s des violences para ou intrafamiliales débutées avant 18 ans selon le type de violence et le sexe (%)

III. Les liens entre les caractéristiques familiales à l’adolescence et les violences vécues avant l’âge de 18 ans
29Si la fréquence des violences varie selon le sexe et les générations, nous pouvons supposer qu’elle est également liée aux caractéristiques familiales des enquêté·e·s. Pour tester cette hypothèse, nous effectuons plusieurs régressions logistiques sur la probabilité de déclarer des violences avant l’âge de 18 ans dans la sphère familiale ou de l’entourage proche, en contrôlant les caractéristiques familiales des enquêté·e·s (nombre de frère·s et/ou sœur·s, configurations familiales, catégories socioprofessionnelles du père et de la mère lors de l’adolescence des enquêté·e·s). Nous ne prenons pas en considération le niveau d’études des répondant·e·s puisqu’il est très majoritairement atteint après le commencement des violences.
1. À caractéristiques familiales semblables, les effets de sexe et de génération persistent
30Des analyses, « toutes choses égales par ailleurs », confirment la surexposition des femmes aux violences au sein de la sphère familiale ou du proche entourage, notamment en matière de violences sexuelles (voir annexe, tableau B). À sexe, âge, taille de la fratrie19, configuration familiale et origine sociale des parents contrôlés, par rapport aux hommes, les femmes20 ont plus de risques de rapporter des situations de violences avant 18 ans (OR = 1,5) dans cet espace de vie que de ne pas en rapporter, ainsi que de mentionner des violences psychologiques (OR = 1,6) et de déclarer des violences sexuelles (OR = 6,4) que de ne pas en déclarer. Le sexe n’a en revanche pas d’effet significatif sur la probabilité de déclarer des violences physiques au cours de l’enfance et de l’adolescence. Par ailleurs, les résultats des régressions logistiques attestent que les plus jeunes (20-49 ans) ont un peu plus de risques de déclarer des situations de violences para ou intrafamiliales subies avant 18 ans que leurs aîné·e·s (50-69 ans).
2. Les violences para ou intrafamiliales vécues avant l’âge de 18 ans concernent tous les milieux sociaux
31Si nous examinons à présent, les caractéristiques familiales à l’adolescence des enquêté·e·s21, nous constatons que, « toutes choses égales par ailleurs », avoir grandi dans une fratrie composée d’au moins deux frères et/ou sœurs accroît la probabilité de déclarer des violences para ou intrafamiliales avant 18 ans (tableau 4). Ceci s’explique notamment par le fait que les frères et sœurs ont parfois été auteur·e·s de violences sur les enquêté·e·s lorsqu’ils étaient mineur·e·s.
32Avoir vécu en l’absence d’un parent à l’adolescence accroît encore plus fortement, pour les deux sexes, la probabilité de déclarer des violences (OR compris entre 2,9 et 6,6 pour les femmes, et entre 2,3 et 4,7 pour les hommes). Mais les liens entre la configuration familiale à l’adolescence et les violences dans l’enfance sont en réalité complexes, les résultats doivent donc être interprétés avec prudence. L’existence de violences commises sur l’enfant peut entraîner la séparation des parents, voire motiver l’éloignement de l’enfant confronté à des violences parentales. En outre, les violences envers la mère et l’exposition de l’enfant à celles-ci peuvent aussi être un motif de séparation du couple parental, et se poursuivre après la séparation22. Inversement, cette surexposition aux violences peut être la conséquence du mode de vie lui-même. Les répondant·e·s qui ont vécu durant leur adolescence avec un beau-père et qui déclarent des violences, citent en effet fréquemment leur beau-père comme étant l’auteur des faits.
33La prise en compte de l’origine sociale met en évidence que l’expérience des violences concerne des mineur·e·s issus de tous les milieux sociaux, même si les fils d’agriculteurs semblent énoncer moins de violences. En d’autres termes, les professions du père et de la mère n’ont pas d’influence sur la probabilité de déclarer des violences para ou intrafamiliales avant 18 ans. Les seules exceptions pour lesquelles la déclaration de violence apparaît plus élevée concernent l’absence d’activité professionnelle du père, tant chez les femmes que chez les hommes, les situations où la mère est de profession intermédiaire (pour les hommes seulement) ou encore lorsque la mère est artisane, commerçante ou cheffe d’entreprise (pour les femmes seulement). La corrélation entre l’inactivité professionnelle du père et les violences dans l’enfance avait déjà été mise en lumière dans l’Enveff (Jaspard et al., 2003b). Plusieurs pistes peuvent être avancées pour expliquer ce lien, dans un contexte social où l’inactivité professionnelle du père contrevient à la norme (1,9 % chez les 20-44 ans). Les difficultés sociales et l’infériorisation sociale du père pourraient favoriser les situations de violence. Le lien pourrait aussi être indirect : d’autres problèmes peuvent être à l’origine à la fois de l’inactivité et de situations de violences. L’analyse des données révèle que les problèmes d’alcool du père sont beaucoup plus souvent cités en cas d’inactivité professionnelle de celui-ci et qu’ils sont fortement corrélés aux violences psychologiques, physiques et dans une moindre mesure aux violences sexuelles. La causalité pourrait aussi être inverse dans certains cas, l’absence d’activité professionnelle du père pouvant être une conséquence des violences qu’il a exercées, en cas de condamnation notamment.
Tableau 4. Probabilité d’avoir déclaré des violences para ou intrafamiliales débutées avant 18 ans, pour les femmes et les hommes âgés de 20 à 44 ans (modèle logit)

IV. La révélation et la non-révélation des violences vécues avant l’âge de 18 ans et les démarches entreprises pour les dénoncer
34Après le recueil des violences para et intrafamiliales subies tout au long de la vie dans le module « famille et proches » du questionnaire, l’enquêté·e devait indiquer le fait qui lui semblait le plus marquant dans son histoire de vie23 et préciser sa perception du niveau de gravité : « sans gravité », « assez grave » ou « très grave ». Si le fait le plus marquant, ou l’unique violence mentionnée par la personne, était « assez grave » ou « très grave », le module « famille et proches » investiguait les réactions, les répercussions à court et long terme et les recours auprès des institutions. A contrario, si la personne jugeait l’acte subi sans gravité, elle passait directement à la suite du questionnaire. Contrairement aux précédentes analyses, les résultats présentés ici portent ainsi sur les actes les plus marquants (ou sur les uniques actes mentionnés) débutés avant 18 ans et qualifiés d’« assez graves » ou de « très graves » au moment de l’enquête par les répondant·e·s (1938 femmes et 821 hommes âgés de 20 à 69 ans).
1. La majorité des personnes se confient au sujet des violences subies
35La majorité des personnes ont parlé avant l’enquête des violences « assez graves » ou « très graves » commencées avant l’âge de 18 ans : 87,4 % des femmes et 79,6 % des hommes se sont confiés au sujet des violences psychologiques subies avant 18 ans, et 80,9 % des femmes et 81,3 % des hommes ont révélé les violences physiques subies avant 18 ans (tableau 5). Cependant, parler de ces violences apparaît plus difficile en cas de violences sexuelles pour les hommes. Tandis que 81,6 % des femmes déclarent avoir parlé des violences sexuelles « assez graves » ou « très graves » débutées avant 18 ans, seuls 65,7 % des hommes l’ont fait.
36La temporalité de la révélation des faits est aussi dépendante du type de violence vécue. Près de la moitié des femmes et des hommes qui se sont confié·e·s au sujet des violences sexuelles subies dans l’enfance, l’ont fait au bout de dix ans ou plus après leur survenue, alors qu’en cas de violences psychologiques ou physiques, les femmes et hommes se livrent beaucoup plus tôt, souvent le jour même.
37À qui se confie-t-on et par qui est-on soutenu lorsqu’on dénonce les violences para ou intrafamiliales subies durant l’enfance et l’adolescence ? Précisons que les répondant·e·s avaient la possibilité de citer un ou plusieurs confidents (famille, proches, associations, soignant·e·s, autres professionnel·le·s).
38Parmi les personnes qui ont parlé des agressions subies avant 18 ans, environ 3 individus sur 5 se sont confiés à 1 ou 2 personnes. Quel que soit le type de violence déclarée, les femmes comme les hommes se livrent le plus souvent à des membres de la famille, des ami·e·s ou bien en parlent à l’âge adulte à leur conjoint·e (tableau 6). Dans une moindre mesure, les professionnel·le·s de santé (médecins, infirmier·ères) sont aussi un appui, en particulier pour les femmes qui leur parlent des agressions endurées pendant l’enfance. Au-delà d’être des confidents, les ami·e·s, le ou la conjoint·e, la famille et les soignant·e·s sont, la plupart du temps, un soutien pour la personne qui témoigne de son vécu. Cependant, alors que les membres de la famille sont les personnes à qui les femmes ont le plus fréquemment parlé des violences sexuelles (en dehors de leur conjoint·e), leur absence de soutien est relativement élevée. Enfin, les recours à la police, à la gendarmerie, au personnel scolaire, aux services sociaux, aux associations ou encore à la consultation d’avocat·e·s sont moins fréquents et les femmes qui en ont parlé à la police ou la gendarmerie rapportent peu de soutien de leur part.
Tableau 5. La révélation des violences para ou intrafamiliales assez ou très graves débutées avant 18 ans selon le type de violence et le sexe (%)

Tableau 6. Interlocuteurs choisis pour se confier et leur soutien selon le type de violence et le sexe (%)

2. Les violences font rarement l’objet de démarches judiciaires
39La très grande majorité des personnes rapportant des violences para ou intrafamiliales « assez graves » ou « très graves » avant l’âge de 18 ans n’entreprennent pas de démarches pour dénoncer les faits24 (tableau 7). Ainsi, la plupart des personnes concernées ne déposent pas de main courante ni de plainte. Et lorsque des démarches ont été entreprises, c’est souvent par une autre personne, sans doute en raison du jeune âge des victimes au moment des faits. Toutefois, les violences sexuelles sont davantage dénoncées aux autorités judiciaires, et elles font plus souvent l’objet d’un dépôt de plainte que les autres situations de violences familiales. Le constat de cette sollicitation de la justice pénale relativement plus présente en matière d’infraction à caractère sexuel peut être comprise comme la perception d’une plus grande gravité de l’acte subi qui ne devrait pas rester impuni, sans réaction sociale, et peut-être aussi comme une meilleure connaissance de son caractère répréhensible, tout particulièrement quand il est commis sur des enfants.
40Ce recours limité aux institutions soulève la question des obstacles susceptibles d’entraver la dénonciation des violences para ou intrafamiliales subies avant 18 ans. Les réponses des hommes et des femmes montrent que plusieurs raisons s’entremêlent. La première raison évoquée est le jeune âge de l’enquêté·e qui, rappelons-le, était âgé·e au moment des faits de moins de 18 ans au commencement des violences (figures 8 à 10, pages suivantes). Les autres obstacles relèvent de l’inefficacité supposée de la démarche judiciaire. Pour plus de la moitié des déclarants et déclarantes, « cela n’aurait servi à rien », quel que soit le type de violence concerné et une majorité des hommes et des femmes interrogées « ont préféré trouver une autre solution ». Le problème probatoire est également soulevé pour toutes les formes de violences, mais encore davantage pour les violences sexuelles pour près de 30 % des femmes et 23 % des hommes. Rappelons que les femmes ayant parlé des faits à la police ou la gendarmerie n’ont pas été systématiquement soutenues. Il semblerait que celles-ci anticipent de ne pas être crues ou qu’une décision défavorable soit rendue à l’issue de la procédure judiciaire. Les résistances au signalement expriment également des dimensions plus subjectives relevant des sentiments éprouvés. C’est alors la honte et/ou la volonté de dissimuler à autrui l’acte subi qui écarte de la voie judiciaire, sentiment encore davantage présent à propos des violences sexuelles (49 % des femmes interrogées et 56 % des hommes). La crainte face à des épreuves supplémentaires que pourrait faire endurer le parcours judiciaire est à nouveau plus prégnante en matière de violences sexuelles (66 % des hommes et 56 % des femmes). Cette crainte existe aussi à l’égard des conséquences pour d’autres membres de la famille chez les répondant·e·s confronté·e·s à des violences sexuelles en particulier (56 % des femmes et 49 % des hommes).
Tableau 7. Démarches judiciaires entreprises pour dénoncer les violences para ou intrafamiliales assez ou très graves débutées avant 18 ans selon le type de violence et le sexe (%)

Figures 8 à 10. Raisons entravant les démarches judiciaires à la suite des violences para ou intrafamiliales assez ou très graves débutées avant 18 ans selon le type de violence et le sexe (%)
Figure 8. Violences psychologiques assez ou très graves
Figure 9. Violences physiques assez ou très graves
Figure10. Violences sexuelles assez ou très graves
Champ : hommes et femmes âgés de 20 à 69 ans, vivant en France métropolitaine, en ménage ordinaire et déclarant des violences para ou intrafamiliales « assez graves » ou « très graves » avant l’âge de 18 ans, mais n’ayant pas dénoncé les faits aux autorités. Lecture (figure 8) : parmi les hommes âgés de 20 à 69 ans n’ayant pas dénoncé les violences psychologiques assez ou très graves débutées avant 18 ans, 60 % ne l’ont pas fait parce qu’ils étaient trop jeunes au moment des faits.
Source : enquête Virage, Ined, 2015.
Conclusion
41Tandis que les enquêtes nationales françaises antérieures à 2015 ne permettaient pas de mettre au jour les multiples formes de violences vécues par les femmes et les hommes durant l’enfance et l’adolescence, au sein de la sphère familiale ou proche, l’enquête Virage vient combler ces lacunes. Les résultats, établis au moyen d’un questionnement rétrospectif auprès de 27268 femmes et hommes âgés de 20 à 69 ans, montrent que l’épreuve de la violence a concerné une part importante des personnes lorsqu’elles étaient mineur·e·s. Selon l’estimation « restreinte », toutes générations confondues, près d’1 femme sur 5 (18 %) et 1 homme sur 8 (13 %) déclarent avoir subi des violences para ou intrafamiliales avant l’âge de 18 ans. Les femmes sont surexposées à ces violences dans l’enfance, surtout aux violences sexuelles, par rapport aux hommes. « Toutes choses égales par ailleurs », les femmes ont en effet plus de risques de déclarer des violences psychologiques (OR = 1,6) et nettement plus de risques de déclarer des violences sexuelles (OR = 6,4) que les hommes. Le sexe n’a en revanche pas d’effet significatif sur la probabilité de déclarer des violences physiques au cours de l’enfance et de l’adolescence : les femmes et les hommes mentionnent des violences physiques dans des proportions similaires.
42Ces violences, de quelque nature qu’elles soient, ont commencé à de très jeunes âges, ont souvent été répétées et ont perduré plusieurs années aussi bien chez les femmes que chez les hommes. En outre, elles ont affecté des personnes de toutes origines sociales. Les enquêtes nationales Enveff (2000), EVS (2005-2006) et CSF (2005-2006) affirmaient déjà que les violences sexuelles concernaient des personnes indépendamment de leur appartenance sociale (Cavalin, 2010a ; Bajos et Bozon, 2008 ; Jaspard et al., 2003a et 2003b). L’enquête Virage vient donc étendre ces constats aux situations de violences para ou intrafamiliales vécues par les mineur·e·s, mais aussi apporter des éléments de réponse concernant le profil des auteur·e·s de violences. Alors que le père en premier lieu ou la mère en second lieu sont souvent mentionnés en cas de violences psychologiques et physiques, les hommes de la famille (pères, frères et demi-frères, oncles, grands-pères, autres hommes de la parenté, beaux-pères…) ou les hommes proches de la famille sont fréquemment mis en cause en cas de violences sexuelles. Ces résultats mettent ainsi en lumière une intrication des rapports de domination de sexe et d’âge qui s’exprime de manière différenciée selon les types de violences subies. Les violences sexuelles manifestent un double rapport de domination, essentiellement d’hommes adultes ou plus âgés que l’enfant, sur des enfants des deux sexes, mais surtout sur des filles. L’intrication des rapports de domination est plus complexe pour les violences physiques et psychologiques. Les pères ou les mères – voire les beaux-parents s’il y en a – en sont les principaux auteur·e·s. Les pères sont cependant davantage auteurs de violences physiques et psychologiques que les mères, ce qui révèle une persistance du modèle patriarcal. Quant aux mères, elles semblent épargner davantage les fils que les filles. Il n’est néanmoins pas exclu que les hommes sous-déclarent davantage les violences commises par leur mère que celles commises par leur père.
43Si la plupart des personnes se sont confiées au sujet des violences « assez ou très graves » vécues au cours de l’enfance et de l’adolescence, généralement à des membres de la famille, des ami·e·s ou à leur conjoint·e, les résultats montrent que les révélations sont parfois tardives et rares sont les personnes qui ont entrepris des démarches afin de dénoncer les violences endurées, les principaux obstacles évoqués étant le jeune âge au moment des faits ainsi que l’inefficacité ou l’inutilité supposée de la démarche judiciaire.
Annexes
Tableau A. Description des valeurs prises par les différents indicateurs de violences para ou intrafamiliales débutées avant 18 ans

Tableau B. Probabilité d’avoir déclaré des violences para ou intrafamiliales psychologiques, physiques ou sexuelles débutées avant 18 ans, pour les femmes et les hommes âgés de 20 à 69 ans (modèle logit)



Notes de bas de page
1 Les auteures remercient le groupe de travail sur les violences para ou intrafamiliales sur mineur·e·s pour leurs conseils dans l’élaboration de ce chapitre. Ce groupe était composé de Dominique Baux (SSMSI du ministère de l’Intérieur), Flora Bolter (ONPE), Elizabeth Brown (Ined), Justine Dupuis (Ined), Clémence Helfter (Cnaf), Gilles Séraphin (Université Paris Nanterre).
2 Marc Dutroux a été poursuivi et condamné pour assassinats, enlèvements, séquestrations, viols et agressions sexuelles sur plusieurs mineures.
3 Dans cette affaire, plusieurs adultes ont été poursuivis et condamnés pour viols, agressions sexuelles, corruption de mineur·e·s et proxénétisme à l’encontre de douze mineur·e·s.
4 L’Organisation des Nations unies, le Conseil de l’Europe, etc.
5 Voir par exemple Denis Darya Vassigh, 2012, « L’action juridique en faveur des enfants maltraités dans la deuxième moitié du xixe siècle », Criminocorpus, Justice des mineurs ; http://0-journals-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/criminocorpus/1912.
6 Enveff : Enquête nationale sur les violences envers les femmes en France ; CSF : Contexte de la sexualité en France.
7 EVS : Événements de vie et santé.
8 Ceci exclut les violences extrafamiliales, les violences institutionnelles, politiques, terroristes, la pédopornographie, le cyberharcèlement, les actes d’enlèvement, ou encore l’exploitation des mineur·e·s.
9 Le questionnaire Virage recueille, dans l’ordre, les violences psychologiques, puis physiques et enfin sexuelles.
10 La consigne lue aux enquêté·e·s et précédant les questions du module « famille et proches » était la suivante : « Les questions portent sur des faits qui ont pu se produire au cours de votre vie, depuis votre enfance jusqu’à aujourd’hui, avec vos parents ou conjoints de vos parents, une personne de votre famille ou proche de la famille, des amis intimes ou encore une personne qui vous aide régulièrement dans vos activités de la vie courante. Les faits concernant un·e de vos conjoint·e ne seront pas évoqués maintenant, mais plus tard ».
11 Pour chaque acte, l’âge à la première violence était enregistré, ce qui nous permettait de repérer les violences ayant débuté avant l’âge de 18 ans.
12 Par pelotage, on désigne le fait que quelqu’un « s’est frotté ou collé » contre le gré de l’enquêté·e (voir encadré 2).
13 Par ailleurs, les structures par âges des échantillons de femmes et d’hommes ayant déclaré des violences sont similaires.
14 Enfermements, séquestrations, mises à la porte, abandons au bord de la route ; menaces physiques, tentatives d’étranglement, de meurtre.
15 La durée d’exposition au risque de subir des violences para ou intrafamiliales est ainsi la même pour les individus âgés d’au moins 30 ans. Cette restriction permet aussi de ne pas sous-estimer la fréquence de réapparition des faits et l’âge aux dernières violences, tout en conservant un effectif suffisant.
16 Voir le chapitre 12.
17 Les répondant·e·s pouvaient citer un ou plusieurs auteurs.
18 En désignant des personnes de la famille ou des proches, la consigne du module laissait les enquêté·e·s libres de la délimitation du champ de la parenté et de la proximité. Les « autres » hommes et femmes, dont la relation avec l’enquêté·e ne figurait pas dans la liste proposée, peuvent être le fils ou la fille du beau-parent (qui sont aussi parfois présentés comme des frères et sœurs), un autre enfant de la famille d’accueil, de l’internat ou autre, voire une personne extérieure à la famille.
19 Par « taille de la fratrie », on désigne le nombre de frère·s et/ou sœur·s de l’enquêté·e.
20 L’échantillon porte sur les personnes âgées de 20 à 69 ans.
21 L’échantillon est ici restreint aux personnes âgées de 20 à 44 ans. La profession et catégorie socioprofessionnelle de la mère apparaît assez mal renseignée pour les générations les plus anciennes, qui ont rapporté plus massivement qu’attendu une absence d’activité professionnelle. En outre, l’inactivité professionnelle des mères ayant beaucoup régressé pour les cohortes les plus jeunes, elle n’a plus la même signification sociale. Contrôler par la génération dans les régressions n’est donc pas suffisant pour neutraliser les biais de déclaration et les changements générationnels dans l’activité professionnelle des mères.
22 Voir le chapitre 6.
23 Si l’enquêté·e a déclaré plusieurs violences.
24 Il peut s’agir ici d’une main courante ou bien d’un dépôt de plainte avec constitution ou non de partie civile.
Auteurs
Doctorante en démographie au Centre de Recherche de l’Institut de Démographie de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (Cridup). Elle a été lauréate d’un contrat Cifre à la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) et est en accueil scientifique à l’Ined. Elle étudie les violences intrafamiliales commises à l’encontre des mineur·e·s et leurs conséquences sur les parcours de vie dans une perspective de genre. Avant son doctorat, elle a travaillé comme chargée d’études à l’Ined et a notamment participé à la coordination et à la conception de l’enquête Virage.
Juriste, est maîtresse de conférences HDR, université de Nantes, Laboratoire de recherche Droit et changement social (UMR CNRS 6297), co-responsable pédagogique du master (1 et 2) Sciences sociales et criminologie, Faculté de droit et des sciences politiques de Nantes. Ses axes de recherche principaux portent sur l’évolution de la justice pénale, les violences, les relations entre violences et santé. Ses récents travaux ont notamment porté sur la répression des mutilations sexuelles féminines, les violences sexuelles et la pratique judiciaire de la correctionnalisation de l’infraction de viol, et les données chiffrées relatives aux violences sexuelles.
Maîtresse de conférences à l’Institut de démographie de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (Idup) et chercheuse associée à l’Ined. Après avoir travaillé sur la santé aux âges élevés et les maltraitances envers les personnes âgées, elle centre ses recherches sur les liens que santé générale et santé mentale entretiennent avec les violences et les rapports sociaux de sexe, d’âge et de classe. Outre l’enquête Virage, elle participe à une recherche sur la santé des femmes migrantes hébergées dans des hôtels (enquête DSAFHIR, réalisée par l’Idup et l’Observatoire du Samusocial).
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Trajectoires et origines
Enquête sur la diversité des populations en France
Cris Beauchemin, Christelle Hamel et Patrick Simon (dir.)
2016
En quête d’appartenances
L’enquête Histoire de vie sur la construction des identités
France Guérin-Pace, Olivia Samuel et Isabelle Ville (dir.)
2009
Parcours de familles
L’enquête Étude des relations familiales et intergénérationnelles
Arnaud Régnier-Loilier (dir.)
2016
Portraits de famille
L’enquête Étude des relations familiales et intergénérationnelles
Arnaud Régnier-Loilier (dir.)
2009
Inégalités de santé à Ouagadougou
Résultats d’un observatoire de population urbaine au Burkina Faso
Clémentine Rossier, Abdramane Bassiahi Soura et Géraldine Duthé (dir.)
2019
Violences et rapports de genre
Enquête sur les violences de genre en France
Elizabeth Brown, Alice Debauche, Christelle Hamel et al. (dir.)
2020
Un panel français
L’Étude longitudinale par Internet pour les sciences sociales (Elipss)
Emmanuelle Duwez et Pierre Mercklé (dir.)
2021
Tunisie, l'après 2011
Enquête sur les transformations de la société tunisienne
France Guérin-Pace et Hassène Kassar (dir.)
2022
Enfance et famille au Mali
Trente ans d’enquêtes démographiques en milieu rural
Véronique Hertrich et Olivia Samuel (dir.)
2024