Chapitre V.
Tendances récentes de la mobilité (1954-1968)
p. 145-165
Texte intégral
1Le chapitre III retraçait l’évolution de la mobilité de 1881 à 1962. Nous nous proposons maintenant d’évaluer l’évolution de la mobilité entre les deux dernières périodes intercensitaires : 1954-621 et 1962-68.
La mesure des migrations au recensement2
2En 1962, on a posé, la question suivante : où habitiez-vous au 1-1-1954 ?
3Au recensement de 1968, la question était répétée sous la même forme : où habitiez-vous au 1-1-1962.
4Cette méthode de mesure introduit certains biais entre le volume réel des migrations au cours de la période et l’effectif de migrants survivants que l’on dénombre. On omet d’abord les migrations suivies d’un décès avant le second recensement. Ce premier biais pose en pratique peu de problèmes pour l’analyse.
5Il n’est pas le seul : une personne qui a effectué deux migrations3 au cours de la période est supposée n’en avoir effectué qu’une si son heu de résidence au second recensement diffère de son lieu de résidence en début de période.
6Dans ce premier cas, de loin le plus fréquent, la mesure des migrations entre recensements conduit à l’omission d’une migration.
7Dans les cas plus rares où la personne est revenue au second recensement dans son heu de résidence au premier, on omet deux migrations puisqu’on n’en recense aucune.
8Le mode de dénombrement utilisé au recensement conduit donc à une sous-estimation des migrations survivantes, c’est à dire non suivies d’un décès, dont nous avons évalué l’ordre de grandeur sous diverses hypothèses en annexe VIII.
9Le tableau XXXIX (sexes réunis) donne les taux non corrigés des omissions, qui fournissent une limite inférieure des taux réels, et des taux corrigés sous deux hypothèses : une hypothèse moyenne sur les omissions et une hypothèse forte qui fournit une limite supérieure des taux réels.
10En l’absence de toute donnée sur les migrations omises, ces estimations sont approximatives, mais permettent néanmoins d’encadrer les taux réels.
11La sous-estimation est, toutes choses égales par ailleurs, d’autant plus forte que l’intensité des migrations est plus forte. Nous verrons qu’elle est beaucoup plus élevée pour les changements de commune que pour les changements de région (tableau XXXIX). Pour une définition donnée de la migration, elle est plus forte aux âges de forte mobilité : la sous-estimation des changements de commune vers 25 ans est loin d’être négligeable, nous l’avons estimée à 20 % des migrations dénombrées sous une hypothèse moyenne sur les migrations omises.
12L’inconvénient qui résulte des omissions dépend de l’utilisation des données. Pour la première partie de ce chapitre (Etude de la mobilité de 1954 à 1962), nous avons calculé des limites inférieures et supérieures des résultats, qui encadrent les résultats moyens.
13Il serait illusoire de vouloir obtenir le volume exact des migrations au moyen du recensement, en posant une question sur les déplacements successifs. L’intérêt de l’information ne saurait justifier qu’on alourdisse sensiblement une question posée à l’ensemble de la population.
14Les migrations pourraient faire l’objet d’enquêtes spécifiques plus approfondies sur des échantillons4
Les migrations de 1954 à 1962
15Le tableau XXXVI bis donne le nombre de personnes ayant changé de commune, canton, département ou région de 1954 à 19625.
Tableau xxxvi bis – effectifs de migrants par ages entre le 1.1.1954 et le recensement de 1962 (migrants survivants denombres au recensement de 1962).

Tableau xxxvii. – taux annuels moyens(1) (en p. cent) selon l’age. periode 1954-1902 (8 ans 2 mois).


Graphique 23. – Taux annuels de migration selon l’âge 1954-1962. (Taux non corrigés des migrations omises). Sexes réunis.
16En rapportant ces nombres de migrants au nombre de survivants de chaque groupe d’âges6, on obtient des taux de migrations entre 1954 et 19627. On les ramène, en divisant par la longueur de la période, à des taux annuels donnés dans le tableau XXXVII et portés sur le graphique 23 (sexes réunis).
17L’intensité des changements de commune est 3 à 4 fois supérieure à celle des changements de région. Les courbes présentent un creux entre 10 et 20 ans : les enfants plus jeunes ont, en moyenne, des parents plus jeunes, donc plus mobiles. L’intensité des mouvements migratoires varie avec l’âge. Si leur valeur maximale, atteinte vers 25 ans, est trois fois plus élevée que les valeurs minimales atteintes dans les derniers groupes d’âges, les distances parcourues ne varient guère.
18Le tableau XXXVIII donne une répartition des migrants dénombrés par groupes d’âges. Contrairement à ce que l’on aurait pu penser, la structure par âge des migrants dépend assez peu de la définition de la migration : les jeunes adultes ne vont pas “plus loin” que les vieillards.
Tableau xxxviii. – repartition des migrants par age pour differentes definitions de la migration. (periode 1954-62).

19Les taux de migration, tous âges réunis, apparaissent indépendants du sexe (v. tableau XXXVII). Ce n’est plus le cas lorsque l’on compare les taux par âge. Quelle que soit la définition de la migration, on retrouve entre les deux sexes les mêmes différences : les taux par sexe sont sensiblement égaux aux jeunes âges, puis la mobilité augmente plus vite pour le sexe féminin ; ceci pour deux raisons au moins :
Les migrations matrimoniales : lorsque les deux conjoints habitent dans des endroits différents, c’est le plus souvent la femme qui se déplace pour rejoindre son mari.
Les migrations de la campagne à la ville : les femmes sont moins liées à la campagne que les hommes, qui peuvent envisager de reprendre une exploitation agricole.
20Après 30 ans, se produit un retournement : la mobilité des hommes dépasse celle des femmes sauf pour le dernier groupe d’âges (75 ans et plus)8.
Calcul de nombres moyens de déplacements (indices du moment)
21Les taux précédents fournissent un renseignement sur la mobilité à un âge donné. Nous en avons déduit des nombres moyens de déplacements. Ce calcul donne des indices du moment : nous avons estimé quel aurait été, pour un groupe de 100 personnes et dans les conditions de mobilité observées entre 1954 et 1962, le nombre moyen de changements de commune, de canton, de département et de région entre tel et tel âge.
22Nous avons retenu trois intervalles : 0 – 20 ans, 20 – 50 ans et 50 – 70 ans, puis nous avons cumulé les résultats pour obtenir des indices du moment entre 0 et 70 ans.
23Nous avons fait deux hypothèses, explicitées en annexe IX, dont les incidences sur le résultat final peuvent être tenues pour négligeables en première approximation.
24Sous ces hypothèses, les taux annuels du tableau XXXIX peuvent être considérés comme des taux annuels, au cours de l’année moyenne de la période 1954-62 et relatifs aux groupes d’âges : 0 – 4,1 ans ; 4,1 – 20 ans ; 20,1 – 30,1 ans... 60,1 – 70,1 ans.
25Le calcul d’indices du moment se mène alors de façon classique : on multiplie chaque taux annuel par groupe d’âges, par la durée passée dans ce groupe puis on cumule entre les deux limites d’intervalles.
26Le tableau XXXX donne les résultats sous les trois hypothèses retenues pour les migrations multiples et les retours.
27L’incertitude sur les migrations multiples et les retours laisse subsister une imprécision qui diminue lorsqu’on passe des changements de commune aux changements de région : le nombre moyen de changements de commune entre 0 et 70 ans est connu à 12,6 % près9, celui des changements de région à 3,6 % près.
Tableau xxxix. – valeurs limites des taux annuels de migration (sexes reunis 1954-62). p. cent par an

28Selon les conditions de mobilité observées entre 1954 et 1962, un groupe de 100 personnes auraient effectué en moyenne à 70 ans, 240 changements de commune, 196 changements de canton, 98 changements de département, 64 changements de région ; ou, en d’autres termes : 64 changements de région, 34 changements de département sans changement de région, 142 changements de commune sans changement de département.
29Il s’agit de résultats moyens relatifs à l’ensemble des Français autrement dit de groupes de mobilité très différente.
30Notons enfin l’importance des migrations entre circonscriptions proches : selon le calcul précédent, parmi 100 personnes dont la mobilité par âge serait celle de la période 1954-62, 64 effectueraient un changement de région entre 0 et 70 ans. Ces changements ne sont pas des changements entre régions situées à des distances moyennes, entre le Limousin et la Franche-Comté par exemple. Une partie importante d’entre eux a lieu entre régions contigües. Une partie des changements de région sont des changements à plus courte distance que certaines migrations à l’intérieur des régions.
Tableau xxxx. – cumul des taux annuels de migration (indices du moment, 1954-62 = nb moyen de deplacements pour 100 personnes)

31Période 1962-68 : anticipant sur les résultats de la fin de ce chapitre, nous avons appliqué des taux d’évolution de la mobilité de 1954-62 à 1962-68, aux valeurs précédentes des indices du moment. On obtient pour la période 1962-68 les valeurs suivantes :
32Nombre moyen de déplacements pour 100 personnes, entre 0 et 70 ans10 : Indice du moment (période 1962-68, hypothèse moyenne sur les migrations omises : k = 1) ;

Migrations et taille des localités
33L’INSEE donne, depuis le recensement de 1962, les effectifs de changements de classe de localité ; les changements de localité11 à l’intérieur d’une même classe n’ont pas été dénombrés au recensement de 1962.
34Les taux calculés en rapportant les départs d’une classe, ou les arrivées à destination de cette classe, à sa population, ne seraient pas comparables entre eux ; ce qu’on peut voir sur un exemple simple :
35Les communes rurales représentaient, en 1962,36,5 % de la population française. L’effectif de la classe 10 à 20 000 habitants représentait, à la même date, 4,4 % de la même population.
36Dans le premier cas, celui des communes rurales, les immigrants ne peuvent provenir que de 63,5 % de l’ensemble de la population ; dans le second cas de 95,6 %.
37Calculés à partir des changements de classe, les taux mesurent une attractivité propre à chaque classe, modifiée par l’importance de sa population. Ils ne sont pas directement comparables12.
38Pour calculer des taux comparables entre eux, nous avons estimé les changements de localité à l’intérieur d’une même classe. En rapportant l’ensemble des arrivées dans les communes d’une classe13 à sa population, on obtient des taux d’immigration corrigés de l’influence des effectifs de classes.
39On obtient, de la même façon, des taux14 d’immigration et de migration nette15 par classe de localités. Ces taux figurent dans le tableau XXXXI (p. 159) et sont représentés sur les graphiques 24, 25 et 26.
40D’une façon générale, les taux d’émigration et d’immigration sont beaucoup plus élevés que les taux de migration nette. En d’autres termes, les soldes migratoires sont la différence de deux courants, en sens inverse, beaucoup plus importants.
41On pense parfois que les mouvements migratoires sont surtout dus à un déséquilibre de l’emploi entre villes et campagnes ou entre régions. La faiblesse des soldes migratoires relativement à l’ensemble des mouvements, incite à croire que ce motif est loin d’être le seul. Plus que le déséquilibre entre main-d’œuvre et emplois offerts, ce sont d’autres motifs, qui peuvent aussi être professionnels, comme la recherche d’une situation meilleure, une promotion, ou l’exercice d’une profession qui n’est pas représentée à l’endroit où l’on se trouve, qui sont à l’origine d’une grande partie des changements de localité.
42Les taux d’émigration et d’immigration par âge diffèrent surtout par leur niveau : plus la taille des villes est grande et plus les taux sont faibles : les émigrants partent chercher ailleurs ce qu’ils ne peuvent trouver sur place, le plus souvent un emploi ; ils sont d’autant plus nombreux, en valeur relative, que la taille des villes est plus faible. Les emplois quittés par les émigrants sont repris par des immigrants (selon une hypothèse très schématique).

Graphique 24. – Taux d’émigration16 selon la taille des localités. (Taux en 8,2 ans, migrations enregistrées du 1.1.1954 au recensement de 1962).

Graphique 25. – Taux d’immigration17 selon la taille des localités (Taux en 8,2 ans, migrations enregistrées du 1.1.1954 au recensement de 1962).

Graphique 26. – Taux de migration nette18 (Taux en 8,2 ans, migrations enregistrées du 1.1.1954 au recensement de 1962).
Tableau xxxxi. – taux(1) d’emigration, d’immigration et de migration nette par classe de localite(1) et groupe d’ages (periode du 1.1.1954 au recensement de 1962. taux en 8,22 annees).

43A l’explication proposée plus haut (dimension des marchés de l’emploi), s’en ajoute sans doute une autre : le volume des migrations entre deux zones et notamment entre une ville et la zone d’influence, dépend du rapport de la population de la ville à celle de cette zone. Il est vraisemblable que ce rapport diminue, en moyenne, avec la taille des villes.
44Le renouvellement est particulièrement rapide dans les villes petites et moyennes : c’est dans les petites villes, celles qui avaient une population comprise entre 2 et 5 000 habitants au recensement de 1962, que l’émigration et l’immigration sont les plus élevées. Environ la moitié de ceux qui habitent ces localités à 20 ans les ont quittées à 30 ans.
45On considère parfois les communes rurales et les petites villes comme des milieux d’une grande stabilité. Il n’en est rien ; la forte mobilité de leur population peut être intéressante à connaître pour des études sociologiques. Dans ces localités, les relations sociales entre adultes jeunes s’établissent dans un milieu changeant et sont souvent rompues par des séparations.
De 1954-62 à 1962-68
46Comment a évolué l’intensité de la mobilité entre les deux dernières périodes intercensitaires (1954- 62 ; 1962-68) ? Au moment de l’étude, nous ne disposions que de données fragmentaires sur la seconde période : changements de commune et de région séparées en 4 groupes d’âges (v. tableau XXXXII). Nous les avons comparées aux données de la période précédente, agrégées en 4 groupes et données dans le même tableau.
47On ne peut comparer directement les taux annuels de chaque période pour trois raisons :
Les groupes d’âges en fin de période ne coïncident pas exactement, mais se chevauchent parfois de part et d’autre, à un an et plus rarement à 2 ans près (pour les deux premiers groupes d’âges).
La durée des périodes intercensitaires est différente. La seconde est plus longue de deux ans19 ; lorsque les groupes d’âges en fin de période coïncident, l’âge moyen à la migration est en pratique supérieur d’un an au cours de la seconde période.
On vérifie facilement que les biais qui peuvent en résulter dans les comparaisons de groupe à groupe sont minimes. Il semble inutile de tenter de les rectifier compte tenu d’un troisième biais dont l’incidence sur la comparaison paraissait a priori beaucoup plus importante :
48La proportion de migrations omises augmente, toutes choses égales par ailleurs, avec la durée de la période. Elle est plus élevée au cours de la première période.
Tableau xxxxii. – effectifs de migrants par groupe d’ages. taux par periodes ; taux annuels(1). (sexes reunis, en p. cent/an).

49Nous avons évalué, en annexe X, l’incidence maximale de ce troisième biais sur la comparaison des taux.
50Le tableau XXXXII donne les valeurs des taux annuels, non rectifiés des migrations omises, au cours des deux périodes.
51Le tableau XXXXIII donne le rapport r des taux non rectifiés des migrations omises et le rapport r2 des valeurs rectifiées20. r2 mesure l’évolution réelle de la mobilité de 1954-62 à 1962-68.
Tableau xxxxiii. – evolution de la mobilité de 1954-62 a 1962-68 (sexes reunis).

52Pour les changements de région, l’influence des migrations omises est très faible et les deux valeurs r et r2 sont très proches. On n’a donné que le rapport r des taux non rectifiés.
53Nous examinerons successivement le cas des changements de commune et des changements de région.
54On doit mettre à part le premier groupe d’âges pour lequel la comparaison n’a pas de sens en raison des différences d’intervalles.
55L’examen des trois groupes suivants indique une augmentation très forte de la mobilité entre communes, de l’ordre de 20 % et sensiblement indépendante de l’âge.
56L’augmentation des changements de région est un peu moins élevée et variable selon les groupes d’âges. De 18 % en moyenne, elle aurait augmenté davantage aux jeunes âges.
57L’augmentation de la mobilité a sans doute été intermédiaire pour les changements de département. Nous avons retenu une augmentation de 19 % d’une période à l’autre, soit un taux annuel de croissance de 2,5 % par an ou encore un doublement en 27 ans.
Conclusions
58Cette dernière valeur va nous permettre de situer l’évolution récente de la mobilité par rapport aux tendances à long terme dégagées au chapitre III à partir du calcul des taux de changements de département.
59De 1881 à 1962, nous avions observé une augmentation irrégulière correspondant à un doublement en 110 ans environ. (Tableau XXII, graphiques 14 et 15).
60L’augmentation a d’abord été plus lente de 1881 à 1936 : elle correspond à un doublement en 137 ans (v. tableau XXXXIV).
Tableau xxxxiv. – rythme d’accroissement de la mobilite par periode : temps de doublement de l’intensite des changements de departement.

61Au cours des deux périodes suivantes, 1946-54 et 1954-62, l’augmentation est beaucoup plus rapide. Malgré l’interruption de la guerre l’intensité des changements de département entre 1946 et 1954 se situe au-dessus de la tendance 1881-1936.
62La période 1954-62 marquera encore une augmentation sensible par rapport à la précédente : +18,7 % soit une augmentation annuelle de 2,3 % ou encore un doublement en 30 ans.
63On voit donc que l’augmentation observée entre 1954-62 et 1962-68, + 2,5 % par an, s’inscrit dans une modification du rythme de croissance de la mobilité depuis la seconde guerre mondiale. Elle correspond à un doublement en 27 ans.
64Il ne faut pas conclure trop vite à une multiplication par quatre ou cinq du rythme d’accroissement de la mobilité depuis la seconde guerre mondiale : l’évolution récente ne se poursuit que depuis une vingtaine d’années et l’étude à long terme du chapitre III a montré que la mobilité avait une inertie faible, susceptible de variations fortes autour d’une tendance ascendante21.
65Il faut aussi noter que l’évolution observée concerne l’ensemble des changements de département. Au chapitre III, nous avons distingué deux types de migrations : migrations de redistribution, qui correspondent à une évolution de la localisation des activités économiques et migrations compensées22.
66Sans donner une mesure exacte du comportement de la population quant à la mobilité, les migrations compensées en constituent un meilleur indicateur que l’ensemble des mouvements. Elles ont augmenté beaucoup plus vite, au rythme d’un doublement en 70 ans depuis le début du siècle.
67La part des migrations de redistribution dans l’ensemble des mouvements est au contraire en diminution. L’augmentation de la mobilité depuis la guerre est pour l’essentiel une augmentation des mouvements compensés ; de 1954-62 à 1962-68, par exemple, la réduction des migrations de redistribution entre villes et campagnes d’une part, entre régions d’autre part23, s’est accompagnée d’une croissance particulièrement forte du niveau général de la mobilité, voisine de 19 % d’une période à l’autre.
68Pour tenter de mesurer le changement du rythme d’accroissement de la mobilité depuis la guerre, il nous paraît préférable de comparer l’accroissement des mouvements compensés. L’accroissement de ces mouvements est connu en longue période ; compte tenu de ce qui a été dit plus haut, l’accroissement de l’ensemble des mouvements depuis la guerre est sans doute assez proche de celui des mouvements compensés.
69La comparaison des mouvements compensés fournit une mesure, sans doute imparfaite, mais meilleure, du changement de comportement de la population.
70Les valeurs observées depuis la guerre (doublement en 30 ans environ) sont alors à comparer à l’augmentation des mouvements compensés depuis le début du siècle (doublement en 70 ans).
71Ainsi mesuré, le rythme d’accroissement de la mobilité est en augmentation moins rapide que ne le laisseraient supposer les résultats du tableau XXXXIII. Le changement de rythme reste néanmoins important : il correspond à une multiplication par 2 ou 3 du rythme observé en longue période.
72En conclusion, malgré certains problèmes d’enregistrement, propres aux migrations et discutés au début de ce chapitre, il est possible, comme pour la fécondité et la mortalité de calculer des indices du moment. Les nombres moyens de déplacements entre âges résument le niveau de la mobilité au cours d’une période donnée : nombres moyens de changements de commune, de département ou de région, entre tel et tel âge (ou au cours de la vie), dans les conditions observées au cours de la période. Par ailleurs, la mobilité par âge apparaît à peu près indépendante de la définition des migrations.
73L’évolution du niveau d’ensemble de la mobilité a encore augmenté très fortement au cours de la dernière période intercensitaire (1962-68). La croissance de la mobilité se poursuit maintenant depuis une vingtaine d’années à un rythme, très supérieur aux périodes précédentes, de l’ordre de 2,5 % par an (doublement en 30 ans environ).
74Plus qu’à une redistribution de la population, ces valeurs particulièrement élevées correspondent, pour l’essentiel, à une évolution très rapide de de la mobilité intrinsèque.
Notes de bas de page
1 Un article récent de M. Smiray et L. Elie donne une analyse des migrations entre 1954 et 1962 complémentaire de ce chapitre.
2 Sur le dénombrement des migrations au moyen des recensements, v. G. Calot, note méthodologique sur les migrations. Ref. bibliographique n° 7. Une question spéciale sur les migrations a été posée, pour la première fois, au recensement de 1954. Elle n’a pas à notre connaissance fait l’objet d’une exploitation.
3 Les migrations triples, quadruples... peuvent être négligées.
4 Un article de D. Courgeau, reposant sur des données américaines, suédoises, et sur les résultats d’une enquête menée à l’INED, fournira prochainement une solution beaucoup plus précise au problème de l’estimation des migrations omises (à paraître dans la revue Population en 1973).
5 Migrations de 1-1-1954 au recensement de 1962 dans chaque groupe de générations classées par âge au 1-1-1963.
6 Sous réserve que la mortalité des migrants soit identique à celle des non migrants, ces taux sont débarrassés de l’effet perturbateur de la mortalité : le nombre de migrants survivants d’un groupe d’âges est rapporté à l’effectif de survivants de ce groupe (migrants et non migrants).
7 Les survivants au recensement de 1962 sont regroupés, comme dans tous les tableaux du recensement, en groupes d’âges au 1-1-1963 (ce qui permet de suivre des générations à travers des recensements effectués à des époques différentes de l’année).
8 Ces différences expliquent que l’étude longitudinale conduise, pour les générations récentes, à observer une “surmobilité féminine”. Compte tenu des différences de structure par âge des migrants et migrantes, le cumul de la mobilité féminine avant 45 ans est supérieur au même cumul pour les hommes.
9 Ecart relatif entre la valeur moyenne et les limites.
10 Dans un groupe dont la mobilité serait, à chaque âge, celle qui a été mesurée de 1962 à 1968.
11 Localité : commune rurale, ville isolée, ou agglomération multicommunale. Les localités sont réparties en 8 classes, des communes rurales à l’agglomération parisienne.
12 Dans le même ordre d’idées, signalons un autre piège : les taux d’émigration hors d’une région ne sont pas directement comparables entre eux : dans un pays de densité uniforme où existerait une certaine loi de migration selon la distance, les taux d’émigration seraient d’autant plus élevés que la taille de la région (ou sa population) serait plus faible. Il en va de même des taux d’immigration.
D’autres éléments rendent très délicate la comparaison de taux d’émigration ou d’immigration par région : différences de composition socio-professionnelle, forme et situation des régions (dans une région périphérique, par exemple la contrainte de distance joue davantage que dans une région centrale), différences des proportions de population urbaine (les villes attirent une part notable des migrants des zones proches) etc.
13 Y compris celles que nous avons estimées : les arrivées d’une localité de la même classe.
14 La population dans cette classe en 1954, survivante en 1962.
15 Excédent des arrivées sur les départs.
16 Migrations enregistrées rapportées à la population de la classe au recensement de 1954.
17 Migrations enregistrées rapportées à la population de la classe au recensement de 1962.
18 Migrations enregistrées rapportées à la population de la classe au recensement de 1964,
19 Au décalage près qu’introduisent les différences de dates entre recensements.
20 Valeurs calculées en annexe X (v. tableau I de cette annexe).
21 Néanmoins la réduction des fluctuations de la croissance économique depuis la seconde guerre mondiale atténue sensiblement les fluctuations de la mobilité.
22 Il s’agit de la mobilité de redistribution par rapport au lieu de naissance. Pour plus de détails, v. chapitre III et plus particulièrement le graphique 19.
23 V. tableaux XXVIII et XXXIII du chapitre IV.
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