Chapitre VII.
La notion de cycle en démographie. La fécondité post-transitionnelle est-elle cyclique ?
p. 187-213
Texte intégral
« Le facteur dominant, en dernier ressort, dans l’histoire, c’est la production et la reproduction de la vie immédiate ».
ENGELS
1Selon ses principaux théoriciens, la transition démographique serait une phase de déséquilibre provisoire de la population. Après cette phase, un nouvel équilibre apparaîtrait, par ajustement de la fécondité à la mortalité. L’idée d’un déséquilibre durable, voire permanent, est, en revanche, exclue.
2L’hypothèse d’Easterlin se réfère précisément à ce comportement de sortie de transition. Elle admet que la fécondité post-transitionnelle oscille de manière cyclique autour d’un niveau devant également, à terme, garantir le remplacement des générations.
3Il est encore trop tôt pour vérifier de façon assurée la validité d’un tel postulat car ce stade ultime n ’est atteint que par une fraction limitée des pays du monde et, à l’échelle du temps long, depuis une époque récente : toute tentative de généralisation paraît donc prématurée. Il existe cependant une vingtaine de pays où, depuis près d’un demi-siècle déjà, le taux net de reproduction du moment avoisine l’unité. Une première étude est donc possible, à l’issue de laquelle une typologie, provisoire, des cheminements de la fécondité post-transitionnelle peut, d’ores et déjà, être proposée.
*
**
4La notion de cycle de fécondité s’est, depuis peu, répandue en démographie. Faisant suite à une reprise durable après la guerre, la chute de la fécondité observée dans le monde industriel au cours des deux dernières décennies a créé une oscillation qui, par ses aspects, rappelle la configuration d’un cycle. Traditionnellement peu courante dans la littérature démographique, l’idée de cycle a d’abord été appliquée à la croissance de la population totale, notamment par Pearl et Gini1 ; plus explicite, Cowgill (1949) distingue plusieurs types théoriques de cycles de croissance de la population. Ramenés à des phases de l’histoire, ces types sont, schématiquement, les suivants :
les cycles « primitifs » (ou anciens), dus à des crises de mortalité2, caractéristiques des sociétés pré-industrielles ;
les cycles « modernes », liés à l’antériorité et à la plus grande rapidité de la baisse de la mortalité par rapport à la baisse de la fécondité lors de la transition démographique ;
les cycles « futurs »3 (que l’on peut aujourd’hui dire actuels), déterminés par des augmentations et des diminutions successives de la natalité, dans un contexte de mortalité quasi invariable.
5Ces trois types de cycles, que nous dénommerons ici « prétransitionnel » « transitionnel » et « post-transitionnel », respectivement, répondent à des réalités tout à fait différentes, tant par leur temporalité que par le mécanisme qui les sous-tend. Le second, par exemple, décrit un phénomène séculaire, unique, correspondant à une rupture d’équilibre, donnant lieu à une croissance démographique sans précédent, alors que les deux autres sont des phénomènes répétitifs, de moindre durée, tenant, pour le premier, aux variations de la mortalité et pour le dernier, aux variations de la fécondité. Autrement dit, dans la phase « post-transitionnelle »4, ce sont les variations de la fécondité qui sont principalement responsables des fluctuations du taux de croissance de la population. La théorie d’Easterlin, qui postule l’existence de cycles de la fécondité et en décrit les mécanismes, se réfère donc à la réalité post-transitionnelle : après la phase de diminution séculaire, la fécondité connaîtrait des fluctuations cycliques.
La genèse de l’idée de cycle démographique chez Easterlin
6C’est à l’occasion de travaux d’histoire économique, alors qu’il cherche à mettre en évidence l’existence de cycles Kuznets5 sur l’économie américaine d’après-guerre (jusque 1958), qu’Easterlin (1961) en vient à formuler l’idée de cycles de la fécondité. S’appuyant sur des séries macro économiques à long terme (1870-1955), Kuznets (1958) avait montré l’étroite correspondance entre les mouvements de la demande globale et l’intensité des flux de migration nette et, par là, des vagues de croissance de la population américaine jusque la Première Guerre mondiale (la migration étant alors le déterminant principal du rythme de croissance démographique). Pour la période suivante, Kuznets constate que les mécanismes ont changé : avec la restriction de l’immigration (1924), les flux migratoires perdent, à partir des années 20, leur rôle moteur dans la croissance démographique et la fécondité prend peu à peu le relais. Se fondant toujours sur l’expérience américaine, Easterlin émet l’hypothèse de l’existence de cycles de la fécondité, qu’il croit, du reste, déjà relever au xixe siècle6, bien que la façon peu marquée et souvent en écho aux vagues migratoires, à travers les ondulations de la natalité7 de la population blanche. Mais le cycle d’après-guerre apparaît d’une autre ampleur et d’une autre nature que les précédents (qu’il pense liés à des cycles Kuznets), et il va s’efforcer de lui trouver une explication propre, sans toutefois saisir, comme l’a fait Sauvy, dès 1948, qu’il peut s’agir, à descendance finale des générations donnée, de l’implication inévitable de l’entrée dans l’ère post-transitionnelle de maîtrise de la fécondité : « devenue très basse, la natalité présente une grande élasticité. C’est là – écrit Sauvy (1948) – un fait nouveau, qui apparaît, pour la première fois, à l’observation de la période 1925-1950 et qui tient à la disproportion entre la durée de la fécondité (supérieure à 30 ans) et la durée nécessaire à l’achèvement d’une famille. Si chaque personne décidait d’avoir seulement deux enfants dans le cours de la période de procréation, il lui resterait une importante marge pour l’accomplissement de ce programme. La natalité pourrait être extrêmement basse dans les périodes défavorables et exceptionnellement élevée dans les périodes d’optimisme et de plein emploi. »
L’explication du cycle de fécondité d’après-guerre
7Au point de départ, l’argumentation d’Easterlin est assez exploratoire. Cherchant à comprendre les origines de la reprise des années 40, il met en avant la conjonction de trois circonstances favorables : la forte expansion économique, la restriction de l’immigration et le faible taux d’entrée sur le marché du travail. Autrement dit, il se fonde sur une inversion de conjoncture économique globale, privilégiant ainsi, dans la ligne de Kuznets, les mouvements profonds de l’histoire économique. Puis, progressivement, le raisonnement s’affine et s’appauvrit, l’auteur retenant, de façon explicite, comme variable déterminante de la fécondité, le statut économique relatif des seuls jeunes adultes (Easterlin, 1968 et surtout 1973), avant d’aller jusqu’à définir des fluctuations démographiques autogènes (1976 et 1980), issues d’un pur effet de génération (la fécondité d’une génération donnée étant supposée être une fonction inverse de l’effectif relatif de cette génération) et pouvant se répéter à l’infini8. Le modèle explicatif prend, dès lors, une tournure systématique9 puisque l’effectif relatif des générations serait censé déterminer non seulement leur fécondité, mais leur nuptialité, leur divortialité, leur suicidité, leur criminalité, etc. Autrement dit, l’auteur voit dans cette variable une des clés du fonctionnement des sociétés modernes, puisque même la stagflation relèverait de l’encombrement provoqué par l’entrée de cohortes nombreuses aux âges adultes. En ce sens, il définit une théorie générale de l’équilibre social. Cette dernière version nous a paru par trop schématique pour être retenue dans l’analyse qui suit ; aussi nous référerons-nous à la formulation intermédiaire, plus nuancée, de l’auteur (1973).
8Easterlin postule que la fécondité d’un couple est fonction de la comparaison de deux éléments : le niveau de consommation désiré (lui-même dépendant de l’expérience de niveau de vie vécue lors de l’adolescence dans le milieu familial d’origine) et des gains réalisés quelques années plus tard lors de la phase d’insertion professionnelle (saisis à travers les revenus10 des jeunes). Autrement dit, non pas du revenu absolu, mais du revenu relatif11 : « On peut considérer – écrit Easterlin – que l’équilibre entre les possibilités de gains des jeunes adultes et le niveau de vie qu’ils souhaitent atteindre dépend, pour une large part, de la comparaison d’expériences de gains (ou de carrières professionnelles) entre ces jeunes adultes et leurs parents... Cette situation comparative sera dénommée ici « statut économique relatif » des jeunes adultes. »
9Dès lors, dans les classes pleines pour lesquelles la compétition est plus vive et les perspectives de carrière moins favorables, se creuse ainsi un fossé entre les revenus et les aspirations, qui se traduit par une frustration, donc une moindre propension à se marier et à procréer ; inversement, les enfants issus de ces classes creuses, promis à un plus brillant avenir, auront tendance à se marier plus et plus tôt, et à créer de plus grandes familles, d’où, dans l’effectif des cohortes de naissances, des fluctuations cycliques, susceptibles de se perpétuer sur de longue périodes.
10Avant d’établir un bilan à la fois sur la nature des mouvements de fécondité observés depuis 1930 et sur les mécanismes qui peuvent en être à l’origine, nous ferons d’abord une présentation critique rapide des travaux existants sur la question, selon qu’ils s’inspirent de la logique d’Easterlin ou, au contraire, cherchent à l’amender, voire à la réfuter.
I. – Les tests de l’hypothèse d’Easterlin
11Sur l’hypothèse dite d’Easterlin, deux types de travaux ont été menés, les uns fondés sur des tests démographiques, les autres sur des tests économétriques.
1) Les tests démographiques
12Les premières études ont porté, soit sur les États-Unis seuls (Easterlin, 1961 et 1968), soit sur les pays anglo-saxons (États-Unis, Canada, Australie, Angleterre-Galles : Easterlin et Condran, 1976) depuis la guerre. Les auteurs rapprochent les taux bruts de natalité ou les indices de fécondité du moment (tantôt les taux par groupe quinquennal d’âges, tantôt les indices synthétiques) du nombre relatif de jeunes adultes12 (15 à 35 ans) par rapport à celui des adultes installés (35 à 65 ans), considéré comme un proxy du statut économique relatif. Le même travail a été entrepris plus tard sur la France par Leridon (1978) sur la période 1946-1976 et par Boyer (1979), sur huit pays, dont les États-Unis, le Canada et l’Angleterre (déjà étudiés par Easterlin et Condran), la France, la Belgique, les Pays-Bas, la Suède et la Finlande, sur les années 1948-1972. Dans la plupart des cas, les auteurs relèvent une bonne correspondance entre les séries étudiées, en admettant cependant parfois, comme chez Easterlin-Condran, qu’il puisse s’agir d’une « pure coïncidence ». Avec O’Connell (1978), l’échantillon s’enrichit puisqu’il se compose de seize pays (dont sept déjà considérés ; les huit ci-dessus, moins les Pays-Bas) et envisage une période plus longue (commençant vers 1930), avec introduction de décalages temporels entre séries, mais le principe se différencie quelque peu, puisque l’auteur raisonne sur le seul groupe d’âges 20-34 ans, mettant en parallèle le taux comparatif de fécondité des femmes et le nombre absolu des hommes à cet âge. Il établit ainsi entre les deux variables une liaison significative inverse dans dix pays (dont tous ceux – sauf la France – pris en compte par les précédents auteurs, mais aussi le Danemark, la Norvège et la Nouvelle-Zélande), positive dans trois pays (Autriche, Suisse, Japon) et non significative pour trois autres : France, Portugal, Hongrie ; la conclusion est donc loin d’être tranchée.
Les limites de ces tests
13Deux grandes questions se posent à propos de tels travaux : la pertinence théorique du raisonnement proposé, la validité empirique des outils de vérification utilisés.
14– La pertinence théorique : admettre qu’il puisse y avoir un lien entre l’effectif d’une génération et sa fécondité n’est, en soi, rien que de très classique dans l’argumentation économique13. On conçoit, en effet aisément que, toutes choses égales d’ailleurs, l’augmentation de l’offre de travail se traduise par des difficultés d’insertion pour les jeunes, ceux-ci ayant, par contrecoup, pour sauvegarder leur niveau de vie, tendance à réagir sur la seule variable qui soit à leur portée : le choix du nombre d’enfants. A supposer donc que l’évolution du rapport des groupes d’âges 35-64/15-34 ans soit un facteur déterminant de la fécondité présente, on doit néanmoins alors convenir que la fécondité future dépend certes, par ce biais, de la fécondité passée14, mais aussi, dans une certaine mesure, ce que l’auteur ne dit pas, des variations comparées de la mortalité et surtout des migrations internationales au sein des deux groupes de générations concernées. Or, on sait le rôle non négligeable qu’ont joué les migrations internationales dans l’évolution des structures par âge aux âges adultes de nombreux pays européens au cours de l’après-guerre : compte tenu de la prédominance des jeunes adultes parmi les migrants, l’immigration devrait, dans ces conditions, avoir un rôle dépressif sur la fécondité, cependant qu’à l’inverse l’émigration devrait contribuer à un relèvement de la fécondité15 (ce qui reste à vérifier). Par ailleurs, si le lieu de confrontation des aspirations aux réalités est le marché du travail, alors, c’est la composition par âge16 de la population active plutôt que celle de la population totale qui est à prendre en compte car c’est elle qui détermine pour partie les besoins de renouvellement de la main-d’œuvre et la variation des taux d’activité. Dès lors que ces taux tendent à augmenter, ils peuvent, en cas d’insuffisance de la demande globale, à leur tour, contribuer à aggraver la concurrence et le sentiment d’encombrement et, par là, pousser à retarder, voire restreindre la constitution des familles. C’est, du reste, la logique qui prévaut, avec différents arguments microéconomiques supplémentaires, dans l’analyse économique du développement du travail salarié féminin.
15Dans un tel modèle, le rôle déterminant revient donc à l’offre de travail, mais le raisonnement suppose que soient réalisées deux conditions essentielles (qui se ramènent à la clause habituelle « toutes choses égales d’ailleurs ») : absence de variation dans l’évolution de la demande globale, constance des taux d’activité par âge. Ce qui est loin d’être le cas : l’activité économique a connu des rythmes très différenciés depuis la guerre ; d’autre part, il peut y avoir compensation, au moins partielle, entre les variations de taux d’activité aux divers âges17.
16– La validité empirique : comme nous l’avons vu, l’hypothèse d’Easterlin n’a été testée, dans un premier temps, que sur des pays appartenant à l’économie atlantique, c’est-à-dire plus ou moins situés dans la mouvance des États-Unis ou, du moins, appartenant à la même communauté culturelle anglo-saxonne. La relativement bonne concordance des résultats ne saurait, dès lors, trop frapper, mais, dès que, avec O’Connell ou même Boyer, l’univers sort de cette sphère, les conclusions se font plus nuancées. Le choix des pays a, semble-t-il, été fait par exclusion, plus en fonction des moyens, c’est-à-dire des statistiques disponibles, que des objectifs (quitte à se donner les moyens, au besoin à l’aide de techniques d’estimation indirecte, quand les données n’existent pas) ; ce faisant, les auteurs en viennent à définir un univers biaisé (les pays dont les statistiques sont discontinues ou imparfaites ont des caractéristiques particulières qui peuvent les éloigner de la norme internationale – si tant est qu’il en existe une – et dont on ne peut pas ne pas tenir compte dans une théorie, qui se veut générale, des comportements de fécondité après la transition). Enfin, bien qu’elle soit essentielle à la crédibilité de la démonstration, l’adéquation du champ temporel retenu à l’objectif visé laisse, le plus souvent, à désirer. Ce choix qui, pour les mêmes cas, peut varier d’un auteur à l’autre, n’est que rarement explicité, alors qu’il est décisif pour les résultats de l’ajustement empirique. La seule justification claire que nous ayons trouvée figure dans l’article d’Easterlin et Wachter (1978) : la date de 1940 est prise comme point de départ de l’observation car la Seconde Guerre mondiale a, selon eux, introduit une coupure radicale dans l’histoire économique (du moins aux États-Unis) ; jusqu’à la guerre, la croissance économique est selon eux, commandée principalement par l’évolution de la demande globale, alors que, depuis, elle est plutôt sous la dépendance de l’offre de travail18.
Examen des résultats
17La première des questions qui se pose, s’agissant de travaux où la notion de cycle est abondamment sollicitée, est de savoir si l’existence de cycles au sens plein du terme (alternance de phases d’expansion et de contraction selon une certaine régularité temporelle) est réellement avérée. Cette matérialité du cycle peut se rechercher aussi bien sur les indicateurs transversaux que sur les indices longitudinaux mais, compte tenu de la moins grande variabilité des indices longitudinaux19, le test le plus favorable est donc constitué par l’examen de l’évolution des descendances finales des générations. Or, qu’il s’agisse de l’amplitude ou de la périodicité (ou, à tout le moins, de l’intervalle séparant le minimum du maximum, ou vice-versa), la régularité statistique constitutive du cycle est malaisée à déceler. Voici, en effet, quelques observations réunies sur différents pays occidentaux à partir de l’une des études citées :

Source : Boyer P., Caillot P. et al., 1979.
18Malgré le petit nombre d’observations retenu, la variabilité des expériences est assez frappante. En dehors des cas de fluctuation « longue », qui correspondent au modèle attendu, on relève l’existence de plusieurs cas de fluctuation « courte » (intervalle entre minimum et maximum inférieur à 20, voire à 10 ans). Or, l’existence de tels cas est contraire à la logique implicite du modèle d’Easterlin, selon laquelle l’intervalle séparant ces extremums devrait être du même ordre que l’âge moyen à la maternité. Par ailleurs, le calendrier et l’amplitude des oscillations sont si différenciés, pour des pays parfois géographiquement très proches (Belgique, France et Pays-Bas, par exemple), que l’on peut légitimement s’interroger sur le contenu alors donné à la notion de cycle de fécondité, le seul dénominateur commun étant le retournement des courbes20.
19La seconde question est de savoir si, dans les cas où une covariation avec le ratio démographique d’Easterlin a pu être démontrée, l’origine des fluctuations n’est pas susceptible d’explications autres que celle proposée. S’agissant de la France, par exemple, on observera que le minimum de fécondité correspond à la génération 1896 et le maximum à la génération 1928. Or, ces générations ont été perturbées par des événements sans précédent : le première atteint 18 ans en 1914 et voit son régime matrimonial particulièrement affecté par les pertes de guerre subies dans les classes d’âges masculines correspondantes ; inversement, la génération 1928 atteint 18 ans en 1946 et vit sa période féconde sous le signe de la reconstruction et de l’expansion extraordinaire des « trente glorieuses ». Nous reviendrons sur ce point.
2) Les tests économétriques
20Les tests économétriques sont autrement plus délicats que les tests démographiques ; ils peuvent, en effet, relever de spécifications multiples, dont la justification apparaît, a posteriori, toujours plus ou moins sujette à discussion. Nous donnerons d’abord la définition du concept de revenu relatif telle qu’elle apparaît chez Easterlin, avant de présenter les différentes variantes possibles, sans sortir du cadre théorique de l’auteur.
21Pour Easterlin, la notion de revenu relatif fait appel à la comparaison entre le niveau de vie connu chez ses parents dans la phase de dépendance adolescente et celui vécu lors des premières années de vie active. La mesure de ce revenu peut s’obtenir de diverses manières ; l’un des indices proposés consiste à rapporter le revenu réel des jeunes chefs de famille de 14 à 25 ans à celui correspondant des chefs de famille de 35-44 ans, cinq ans plus tôt (c’est le groupe d’âges des parents potentiels) un autre à rapporter sans décalage temporel les revenus réels des hommes des groupes d’âges 20-24 ans à ceux de leurs homologues de 25-34 ans21. On postule que la fécondité est une fonction positive du revenu relatif ainsi défini, autrement dit, qu’elle procède, schématiquement, de la comparaison entre un trend de croissance économique (taux de croissance du revenu national) et un effet d’ancienneté22 (taux de croissance du revenu avec l’âge). Observons au passage que le niveau de consommation est défini globalement, par référence aux gains du chef de famille, sans que soient pris en compte, ni la taille de famille, d’origine ou actuelle (à travers un nombre d’unités de consommation), ni l’éventualité de revenus autres, en particulier issus d’une activité de la mère. En outre, puisque, dans la logique adoptée, la fécondité résulterait d’une confrontation entre des données objectives (le revenu présent) et des attentes subjectives (une espérance de consommation), certains auteurs ont, dans leurs tests, introduit des indices psychologiques tels que le revenu subjectif (l’idée que l’on a de son propre revenu) ou l’appréciation portée sur les conditions économiques futures.
22Toujours sur le cas des États-Unis, des tests ont été conduits à partir de statistiques de revenus réels, tant macroéconomiques (Thornton, 197823), que microéconomiques (Mc Donald, 197824). L’un et l’autre montrent l’absence d’effet positif du revenu sur la fécondité. D’autres travaux, tels ceux de Seiver (197825), ont été menés de manière plus approfondie, en introduisant une distinction, importante, selon la parité de naissance ; il a été établi que le revenu du mari exerce un effet positif sur la venue des deux premiers enfants, mais négatif pour les suivants.
23Les conclusions des travaux d’Easterlin ne sont elles-mêmes guère plus convaincantes. Contentons-nous ici de reprendre les deux principales critiques, formulées par Sweezy (1971) : d’une part, le modèle proposé ne rend pas compte du comportement de fécondité de l’entre-deux guerres ; les années 20, en particulier, caractérisées à la fois par une forte expansion économique26 et un ralentissement des migrations internationales, auraient dû enregistrer une reprise de fécondité, or, on a assisté à une chute rapide27, à tel point que la baisse relative est plus forte avant la crise économique (1925-1929) que pendant (1929-1933) ; d’autre part, le revenu relatif des jeunes continue à augmenter après 196228 et jusque vers 1968, au moment même où la fécondité connaît sa plus forte baisse.
24On ne manquera donc pas d’être frappé par le caractère arbitraire des choix qui sont faits, dès lors qu’il s’agit de saisir l’évolution d’un revenu relatif : les termes de référence possibles sont multiples. Cette diversité de tests applicables n’est pas sans expliquer le caractère souvent contradictoire des résultats obtenus. Soulignons, par ailleurs, que la notion de revenu relatif telle qu’elle est saisie à travers les indices de mesure indiqués, ignore certains phénomènes qui ont joué un rôle considérable dans l’évolution du statut comparé des groupes d’âges au cours des dernières décennies : le développement du crédit et des transferts intergénérationnels.
II. – Quelques prolongements
25Les travaux d’Easterlin servent, depuis une dizaine d’années, de point de focalisation ; ils tendent à structurer l’ensemble des recherches économiques sur la fécondité d’après-guerre aux États-Unis. De par leur caractère simple, séduisant (car conforme à l’esprit néo-malthusien dominant) et de par leur relativement bonne adéquation à la réalité américaine d’après-guerre, tout au moins sur les années 40 et 50, ces travaux ont suscité d’abondantes discussions, d’où sont sortis aussi bien des enrichissements du cadre analytique fourni que des modèles alternatifs, reposant sur des fondements théoriques opposés. Nous ne nous intéresserons qu’aux propositions empiriquement vérifiables dans une logique intertemporelle sur des séries chronologiques29.
26Pour Oppenheimer (1977), par exemple, la mesure par Easterlin du niveau de vie souhaité n’est pas appropriée, puisqu’elle ne prend en considération ni le nombre, ni l’âge des enfants (les adolescents étant de gros consommateurs), ni même l’adaptation possible des ressources aux charges familiales par un développement de l’activité professionnelle des mères. Cet argument a ceci de nouveau30 qu’il permet de sortir de la discussion classique et quelque peu stéréotypée sur le lien entre fécondité et activité féminine : il admet que la liaison entre les deux phénomènes puisse ne pas être à signe unique, étant négative, certes, avec la fécondité présente, mais positive avec la fécondité passée (une quinzaine d’années plus tôt). Dans une telle perspective, l’augmentation des taux d’activité féminine à partir des années 60 serait, pour une certaine part, la conséquence du baby-boom, mais en aggravant la concurrence pour l’emploi, elle contribuerait à détériorer le statut relatif des jeunes couples et, par là, à faire baisser leur fécondité. Loin donc de contredire le schéma d’Easterlin, cette analyse ne fait que l’amender.
27Pour Butz et Ward (1979), au contraire, qui s’inspirent de la ligne tracée par l’école de Chicago (Becker, Mincer et surtout Willis) et partent de réflexions microéconomiques sur la famille, notamment sur le coût d’opportunité du temps des mères, le raisonnement est tout autre. Il existe, selon eux, une dichotomie essentielle entre ménages où la femme exerce une activité professionnelle et ménages où la femme n’en exerce pas. Là où elle ne travaille pas, la fécondité serait une fonction positive du revenu du mari, cependant que là où elle travaille, la fécondité serait toujours positivement liée au revenu du mari, mais négativement au revenu de la femme31. Bien qu’elle paraisse a priori plus conforme au modèle de comportement économique de la famille nucléaire urbaine contemporaine, tout au moins chez les couples jeunes où les deux conjoints exercent une activité salariée, cette hypothèse n’a pas, à nos yeux, été démontrée de manière convaincante par les auteurs ; ils limitent, en effet, leur calcul au seul groupe d’âges 20-24 ans (qui ne fournit qu’un tiers environ du total des naissances) et à la seule période 1947-197532 : en laissant de côté les années 1940-1946, ils ne peuvent évidemment prétendre expliquer la reprise d’après-guerre33. Ce modèle a été testé sur l’Angleterre par Ermisch (1979), mais, à nouveau, le choix de la période (1955-1975) ôte tout intérêt à l’exercice : il s’agit précisément de comprendre l’alternance de deux mouvements de sens contraire et pas seulement la baisse récente.
28Souvent guidés par un empirisme aveugle, les travaux économétriques d’ajustement de la fécondité – dont nous n’avons livré qu’un aperçu – tendent à se multiplier et à se diversifier, laissant une impression de confusion théorique. Par ailleurs, ce n’est un secret pour personne que le succès des estimations est obtenu par construction, seuls n’étant retenus que les résultats conformes à l’hypothèse testée, les autres étant négligés. C’est pour cette raison qu’il nous a paru indispensable de revenir à l’essentiel en examinant, sur le plus grand nombre de cas possible, si la réalité obéit au schéma easterlinien, et si, auquel cas, il n’existe pas d’alternative au modèle explicatif avancé.
III. – Cinquante ans de reproduction nette
29Au lieu de raisonner sur l’indicateur conjoncturel de fécondité nous prendrons comme variable dépendante le taux net de reproduction du moment, que nous désignerons par le symbole Ro. Par rapport à la précédente, cette variable a l’avantage d’intégrer un effet possible de la mortalité sur la fécondité34 (dont on peut raisonnablement penser que, durant les années 1930 et 1940, il était encore loin d’être négligeable, tout au moins dans les milieux défavorisés de certains pays), rendant ainsi moins trompeuses les comparaisons entre pays ou entre époques : du point de vue des comportements, seul, en effet, importe pour les couples, le nombre d’enfants survivants. Le recours à un indice synthétique permet d’alléger la présentation tout en évitant la délicate question des différences de distribution de fécondité à travers le temps et l’espace, comme tout indicateur conjoncturel, R0 est soumis aux aléas de l’histoire et enregistre, de ce fait, les effets de calendrier ; il y a donc tout lieu de penser que ses variations sont liées aux conditions économiques générales, une situation dépressive entraînant, à descendance finale prévue donnée, un retard dans la constitution des familles, inversement, une situation favorable incitant les couples à anticiper leurs projets familiaux. Il se prête ainsi au cadre de raisonnement proposé par Easterlin.
30La date de départ retenue est 1930. C’est, en effet, vers cette époque, que l’on voit la plupart des pays occidentaux entrer dans le régime de fécondité dirigée ou post-transitionnelle, les taux nets de reproduction tendant alors vers l’unité. Tous les pays développés35 – hormis les pays d’Europe de l’Est où, depuis la guerre, les taux ont pu subir l’empreinte de politiques démographiques volontaristes changeantes – disposant de données suffisamment fiables36 (tant sur les données d’état civil que sur les structures par âge) pour autoriser la reconstitution des séries sur l’ensemble de la période 1930-1982 ont été retenus (voir annexe). L’échantillon ainsi obtenu se compose de dix-huit pays.
Des cheminements différenciés
31Si la situation actuelle de la fécondité dans le monde développé frappe par la relative homogénéité des niveaux enregistrés de pays à pays, les parcours décrits sont très différenciés d’un cas à l’autre, l’avant-guerre ayant marqué une certaine convergence des courbes, suivie, dans l’après-guerre, d’une très nette divergence, elle-même précédant le grand mouvement de convergence internationale observé depuis 1960. L’examen des courbes de reproduction nette (en trait gras sur nos graphiques) amène ainsi à distinguer, en schématisant quelque peu, cinq types d’évolutions :
Figure VII. 1. – Reproduction nette et structure par âge. Type 1

Figure VII.2. – Reproduction nette et structure par âge. Type 2.

Figure VII.2. – Reproduction nette et structure par âge. Type 2

Figure VII.3. – Reproduction nette et structure par âge. Type 3

Figure VII.3. – Reproduction nette et structure par âge. Type 3

Figure VII.4. – Reproduction nette et structure par âge. Type 4

Figure VII.5. – Reproduction nette et structure par âge. Type 5

32• L’ondulation longue très ample, d’allure cyclique régulière, autour de l’horizontale (seuil de remplacement des générations). Ce type ne s’observe véritablement que dans les trois pays anglo-saxons d’outre-mer, soit, par ordre de régularité décroissante du « cycle » : Les États-Unis, le Canada et l’Australie (figure VII.1A à VII.1 C). L’ajustement graphique à une courbe sinusoïdale est satisfaisant, bien que les valeurs actuelles soient loin de consacrer, comme le voudrait une définition rigoureuse du cycle, le retour aux valeurs minimales initiales, ou plutôt, en l’espèce, aux valeurs minimales intermédiaires centrales : ainsi, au Canada par exemple, la valeur de Ro à la fin des années 70 est très sensiblement inférieure à ce qu’elle était à la fin des années 30 (0,85 au lieu de 1,15).
33• L’ondulation longue assez ample, à caractère « quasi » cyclique : le tracé est moins régulier, moins apparenté à une branche de sinusoïde, la dissymétrie entre la phase ascendante et la phase descendante est forte. Peuvent être rattachés à ce second type : la Norvège, l’Angleterre-Galles, la France, les Pays-Bas, la Finlande et le Danemark, caractérisés, si l’on excepte la pointe de récupération des années 1946-1947, par des courbes unimodales à fort relief (figures VII.2A à VII.2F). L’écart séparant le maximum d’après-guerre du minimum actuel est de l’ordre de 0,5 à 0,7 enfant en moyenne par femme, au lieu de 0,7 à 1,0 dans le cas des pays anglo-saxons d’outre-mer.
34• L’oscillation, faible, irrégulière, plutôt longue. Ce troisième type se rencontre en Suède et en Suisse, où R0 décrit une courbe au tracé bimodal relativement plat, mais aussi en Allemagne fédérale, en Autriche et en Belgique (figures VII.3A à VII.3E), où le profil est unimodal tardif (maximum de fécondité vers 1965 au lieu de 1950). L’amplitude de variation est de 0,4 à 0,5 seulement.
35• Les variations faibles, erratiques, sans trend accusé, sauf depuis le milieu des années 70 (effondrement). Ce schéma est caractéristique des pays d’Europe méridionale, à transition démographique récente (figures VII.4A à VII.4C) : Italie, Espagne, Portugal.
36• Un trend descendant abrupt, sans ondulation cyclique apparente depuis le franchissement du seuil de remplacement des générations : le Japon qui, dans cet échantillon, constitue un type à lui seul37.
37En dehors de ce constat analytique de diversité des évolutions post-transitionnelles, l’examen des courbes conduit à faire quatre observations de portée générale : 1) dans la quasi-totalité des cas de figure, l’existence de cycles de longue durée au sens strict, c’est-à-dire au sens de fluctuations symétriques renouvelées selon un même processus, n’apparaît pas vérifiée ; 2) la fécondité d’après-guerre semble présenter un caractère nouveau qui en fait autre chose qu’une reprise après le « plongeon de crise » des années 30, il y a asymétrie des évolutions ; ainsi, le mariage est plus général et plus précoce vers 1960 que vers 1930. Cette différence de nature contredit a priori l’idée de répétition inhérente à la notion de cycle ; 3) aucun cycle complet n’a, jusqu’à présent, été observé dans un pays quelconque, tout au plus un demi-cycle ou l’amorce d’un cycle ; 4) enfin, là où l’évolution apparaît de type cyclique, l’amplitude et la périodicité des mouvements sont assez variables. Souvent même la temporalité, mesurée par le décalage temporel entre les extremums des courbes de fécondité, est par trop éloignée de l’intervalle intergénérationnel moyen pour relever d’une explication de type easterlinien.
38Faute de séries chronologiques suffisamment longues, pluriséculaires, sur le comportement des populations en régime malthusien, il est donc prématuré de conclure à l’existence de cycles longs de fécondité. Tout au plus peut-on détecter pour certains pays à transition plus ancienne, notamment en Amérique du Nord, en Australie et en Europe du Nord, l’amorce d’un mouvement d’allure cyclique, dont rien ne prouve, du reste, qu’il soit appelé à se poursuivre38.
39Voyons maintenant si les variations de fécondité sont apparentées à celle du statut relatif des jeunes, saisi à travers la proxy que constitue le ratio des effectifs des groupes d’âges 35-64/13-34 ans, ou rapport du nombre d’adultes « mûrs » au nombre d’adultes « jeunes »39 que nous désignerons par r.
Fécondité et structure par âge
40Sur l’ensemble des graphiques présentés plus haut, nous avons fait figurer l’évolution de ce ratio. Le cas des États-Unis, qui a inspiré la thèse de l’évolution entre structure par âge et fécondité du moment, a servi à l’étalonnage. On ne s’étonnera donc pas de relever, dans ce cas, la très étroite correspondance entre les deux courbes (figure VII.1 A) et surtout la très forte élasticité (coefficient égal à 2) de la fécondité par rapport à la répartition par âge : toute variation de la densité relative d’adultes mûrs s’accompagne d’une variation de même sens, deux fois supérieure, de la fécondité nette. La même échelle, correspondant à une élasticité de l’ordre de deux, a été retenue pour l’ensemble de notre échantillon ; ce faisant, nous saisissons la réactivité comparée de la fécondité par rapport à la composition par âge.
41Nous parvenons ainsi au bilan suivant :
La covariation est assez satisfaisante entre les deux séries (coefficient de corrélation positif, supérieur à 0,60, significatif à 5 %) dans sept cas : États-Unis, Canada, Australie, France, Belgique, Finlande, Pays-Bas. Dans ces pays, les retournements des deux courbes sont à peu près synchrones (décalages, dans un sens ou dans l’autre, inférieurs ou égaux à quatre ans) ; en revanche, dans un nombre de cas non négligeable, l’évolution est carrément inverse (Autriche, Suisse, et surtout Allemagne fédérale et Japon). La conclusion dominante pour les sept cas restants est, soit l’absence de lien apparent entre les deux phénomènes (Angleterre, par exemple), soit le caractère erratique, instable, de la liaison existante.
La réactivité apparente des courbes de fécondité est très variable puisque, pour un même niveau de fécondité, on peut avoir, suivant les cas, un nombre d’adultes mûrs tantôt nettement inférieur à celui du nombre de jeunes adultes, tantôt sensiblement supérieur (ainsi, lorsque R0 franchit le seuil de remplacement, la variable r s’échelonne sur tout un continuum, allant de 0,78 à 1,09) et surtout, une même variation de R0 peut correspondre à des variations de r très contrastées, la comparaison sur ce plan la plus édifiante étant celle des États-Unis et du Canada (figures VII.1A et VII.1 B).
42Ainsi, dans les cas où la covariation entre les deux phénomènes est manifeste, l’élasticité de R0 par rapport à r est si différenciée (très forte aux Pays-Bas, mais très faible – près de quatre fois moindre – en Norvège, par exemple : voir les figures VII.2A et VII.2D) qu’on peut nourrir quelque doute sur le caractère déterminant d’une explication des changements de fécondité par les transformations de la structure par âge, surtout dans les pays où cette élasticité est très faible. Finalement, si l’on considère l’ensemble des pays où le schéma de fécondité nette du demi-siècle écoulé peut être qualifié de « cyclique » ou « quasi-cyclique » (types 1 et 2 définis ci-dessus), force est de constater que la covariation des évolutions temporelles ne se vérifie que dans un nombre restreint de cas : États-Unis et Australie principalement et, de manière moins claire, Canada, France et Pays-Bas. Rien ne prouve cependant que le parallélisme alors observé ne relève du hasard et que l’ondulation de la fécondité n’implique pas des mécanismes causaux autres que ceux avancés ici.
43A l’issue de cette mise au point, assez négative, on peut être tenté de proposer quelque explication alternative, sous réserve, là encore, de soumission à l’épreuve des faits.
Retour à l’histoire
44La fécondité étant un comportement profond, sensible, à travers ses mouvements conjoncturels, aux aléas de l’histoire (guerre, crises, etc.) on peut s’étonner du caractère mécanique, an-historique du schéma d’Easterlin : les grands événements qui ont façonné le xxe siècle (y compris dans les structures par âge des populations) sont absents. Le raisonnement suppose implicitement une certaine symétrie entre l’effondrement récent de la fécondité et la reprise d’après-guerre, et une analogie entre l’expérience des années 30 et l’expérience actuelle, ceci en dépit des différences fondamentales de contexte social (degré de salarisation, condition féminine, état des mœurs et des techniques contraceptives, etc.) et économique (niveau de vie, protection sociale, internationalisation des économies, stagflation). Il nous paraît donc souhaitable de revenir à des explications moins partielles.
45Le point le plus délicat est, à l’évidence, l’interprétation de la reprise des années 40. Or, si l’on considère la fécondité des années 40 et 50, on ne manque pas, à première vue, d’être frappé par la liaison statistique négative entre l’ampleur de la crise économique des années 30 et l’importance de la reprise de la fécondité ; en effet, si l’on excepte les puissances de l’Axe (dans lesquelles des politiques natalistes ont été mises en œuvre avant la guerre), plus le taux de chômage a été élevé, plus la reprise a été forte40 : États-Unis, Canada, Pays-Bas, Norvège, Belgique sont dans ce cas. Dans tous ces pays41, le taux de chômage42 a dépassé 20 % et souvent pendant une durée de plusieurs années. Compte tenu de la quasi-absence de couverture sociale, le chômage était synonyme de misère et on peut concevoir que le souvenir de ces années noires, bientôt suivies par la tragédie de la guerre, ait pu imprégner durablement les mentalités collectives et qu’en conséquence, par le contraste qu’il faisait surgir, le retour au plein emploi ait pu contribuer à un changement radical d’esprit, si net que la reprise soit autre chose qu’une simple récupération des naissances empêchées ou différées par les circonstances. Aux États-Unis, notamment, le choc psychologique de la dépression aurait été d’autant plus profond que l’économie, longtemps à dominante agraire, en croissance continue et forte (extension du marché interne), était restée jusqu’alors peu vulnérable aux crises et que les années 20 avaient donné l’illusion d’une expansion indéfinie, jusqu’à totale résorption de la pauvreté.
46L’effondrement de la fécondité au cours des dix ou vingt dernières années, marquant une convergence rapide entre pays, qui rompt avec les tendances à la diversification que l’on avait connues au lendemain de la guerre, pourrait, en revanche, comme semble l’indiquer le mode de diffusion géographique de la baisse (Amérique du Nord, puis Europe occidentale, enfin Europe méridionale), relever de transformations profondes des modes de vie, dépassant les frontières nationales : il n’y a pas concomitance, ni simple décalage temporel uniforme, entre la rupture des courbes de fécondité et la rupture des séries longues macroéconomiques. Pareille convergence, en dépit du maintien de différences considérables de niveau de vie, de taux de croissance économique, de taux d’activité féminine ou de degré d’exposition à la crise internationale, semble reléguer à l’arrière-plan les tentatives d’explication purement économiques. En toute hypothèse, il paraît douteux qu’une même logique ait pu être à l’œuvre à la fois dans la reprise et dans la rechute.
Conclusion
47En l’état actuel des observations, il est prématuré de conclure à l’existence de cycles et, a fortiori, de mécanismes autorégulateurs de la fécondité : rien n’exclut, en particulier, que les tendances actuelles ne conduisent à un déséquilibre permanent. L’histoire ne se répète pas, elle est faite de changements et de ruptures successifs ; la fécondité est commandée par un faisceau complexe et mouvant de facteurs qui déborde largement les cadres analytiques étroits dans lesquels certains auteurs cherchent à l’enfermer. Sur le seul cas des États-Unis, qui a inspiré les travaux les plus abondants, nous avons vu que, dans sa variante la plus élaborée43, le modèle d’Easterlin rendait relativement bien compte de la reprise d’après-guerre, mais était, en revanche, assez inadéquat pour la période de baisse44, et que, à l’opposé, le modèle alternatif de Butz et Ward s’avérait approprié pour la période de baisse mais inapte à saisir la reprise. Autant dire qu’il n’existe pas d’explication simple et généralisable de l’évolution de la fécondité : ses ressorts échappent, pour partie, à la rationalité ; ses mouvements n’ont sans doute pas fini de nous étonner.
Bibliographie
Des DOI sont automatiquement ajoutés aux références bibliographiques par Bilbo, l’outil d’annotation bibliographique d’OpenEdition. Ces références bibliographiques peuvent être téléchargées dans les formats APA, Chicago et MLA.
Format
- APA
- Chicago
- MLA
Références bibliographiques
BANKS, J. A. : Prosperity and parenthood, Londres, 1954.
BECKER, G. S. : An economic analysis of fertility, in Demographic and Economic Change in Developed Countries, Princeton University Press, 1960.
BOYER, P., CAILLOT, P., RICHARD, A. et ROMIER, G. : L’autorégulation de la fécondité dans les pays industriels, rapport pour le Commissariat Général du Plan, 1979, 148 p.
BUTZ, W. P., WARD, M. P. : The emergence of countercyclical U S. Fertility, AER, juin 1979, pp. 318-328.
10.1086/220486 :COWGILL, D. O. : The theory of population growth cycles, The American Journal of Sociology, sept. 1949, pp. 163-170.
EASTERLIN, R. A. : The American Baby-Boom in Historical Perspective, AER, 51, 1961, pp. 869-911.
EASTEBLIN, R. A. : Population, labor force and long swings in economic growth. The U S. experience, New York, NBER, 1968, Chapitres 4 et 5.
EASTERLIN, R. A. : Relative economic status and the American fertility swing, in E.B. Sheldon (éd.) : Family economic behaviour : problems and prospects, Philadelphia, Lippincott, 1973, pp. 166-223.
10.2307/1971619 :EASTERLIN, R. A. : The conflict between aspirations and resources. PDR, sept. 1976, pp. 417-426.
EASTERLIN, R. A. et CONDRAN, G. A. : A note on the recent fertility swing in Australia, Canada, England and Wales and the United States, in H. RICHARDS (éd.). Population, factor movements and economic development, . Studies presented to Brintey Thomas, Cardiff, University of Wales Press, 1976, pp. 140-151.
EASTERLIN, R. A., WACHTER, ML. et WATCHER, S. M. : Demographic influences on economic stability : the U S. experience, PDR, n° 1, 1978, pp. 1-22.
EASTERLIN, R. A. : Birth and fortune, the impact of numbers on Personal welfare, New York, Basic Books, 1980, 205 p.
ERMISCH, J. : The relevance of the « Easterlin Hypothesis » and the « New Home Economics » to fertility movements in Great Britain, Population Studies, mars 1979, pp. 39-57.
FESTY, P. : La fécondité des pays occidentaux de 1870 à 1970, INED-PUF, Travaux et Documents, Cahier n° 85, Paris, 1979, 401 p.
GRAUMAN, J. : « Comment » in Demographic and Economic Change in Developed Countries, Princeton, 1960, pp. 275-284.
KUZNETS, S. : Long swings in the growth of population and in related economic variables, Proceedings of the American Philosophical Society, 102, 1958, pp. 25-52.
10.2307/1529142 :LE BRAS. H. : Eléments pour une théorie des populations instables. Population, n° 3, 1971, pp. 525-572.
10.2307/1531829 :LERIDON, H. : Fécondité et structures démographiques : une hypothèse sur l’évolution de la fécondité depuis 1940, Population, 1978, n° 2, pp. 441-447.
OPPENHEIMER, V. K. : The life cycle squeeze : the interaction of men’s occupational and family life cycles, Demography, mai 1974, pp. 227-245.
SAUVY, A. : La reprise de la natalité dans le monde. Population, n° 2, 1948, pp. 249-270.
10.4324/9781351315845 :SIMON, J. L. : Research in population economics, vol. 1, Jai Press Inc., 1978.
SWEEZY, A. : The economic explanation of fertility changes in the U.S., Population Studies, juillet 1971, pp. 255-267.
YULE, G. U. : On the changes in the marriage and birth-rate in England and Wales during the past half century ; with an enquiry as to their probable causes. Journal of the Royal Statistical Society, 1906, 69, pp. 88-132.
Annexe
TAUX NET DE REPRODUCTION (pour une femme), 1930-1982
– Pour les dernières années, estimation de l’auteur d’après les valeurs des indicateurs conjoncturels de fécondité (voir Population, 1981, n° 4-5) et une évaluation des probabilités de survie notées Sa, jusqu’à l’âge moyen à la maternité (compte tenu de l’évolution récente comparée des taux de mortalité infantile et de ces probabilités de survie dans les dernières tables publiées).
– Les données porteuses d’un astérisque ont été obtenues à l’aide de méthodes d’estimation indirecte. Il s’agit, le plus souvent, de données antérieures à la guerre. Nous avons utilisé trois catégories de données : les structures par âge aux recensements successifs, la série des taux bruts de natalité, la série des taux de mortalité infantile ti. En associant les deux premières, on peut reconstituer de façon assez robuste la série des indicateurs conjoncturels de fécondité /. Dans un second temps, on évalue la probabilité de survie Sa. (égale au rapport R0/ R, du taux net au taux brut de reproduction du moment) en opérant une régression linéaire sur l’évolution du rapport ti/Sa dans les pays où la mortalité a connu une évolution analogue à celle du pays étudié.
Certaines informations complémentaires ont été utilisées :
• Autriche : la valeur de R0, publiée pour les années 1934-1935 (Statistisches Jahrbuch, 1980).
• Espagne et Portugal : la série des indicateurs conjoncturels de fécondité , publiée dans Monnier, A., « L’Italie, l’Espagne et le Portugal : estimation démographique », Population, 1980, n° 4-5, pp. 927-959. Enfin, pour l’Espagne seule, les valeurs de R0 pour les périodes 1930-31, 1935-36 et 1940-41, publiées dans Saez : « La fécondité en Espagne depuis le début du siècle », Population, 1979, n° 6, pp. 1007-1022.
• États-Unis : la valeur de R, publiée pour l’année 1935 et les périodes 1930-35 et 1935-40 (Historical Statistics of the U.S., Washington, 1975).
• Italie : la série des indicateurs conjoncturels de fécondité (voir Festy, P., op. cit., 1979).
• Japon : tableaux statistiques publiés en japonais par l’Institut de Recherche Démographique de Tokyo, donnant R et Ro pour 1930.
Sources : Annuaires Démographiques des Nations Unies, 1954, 1965 et 1978.

* Estimation.
Notes de bas de page
1 Voir notamment : Pearl, R. : The Biology of Population Growth, New York, 1930, p. 22 et Gini, C. : Population (Harris Foundation Lectures), Chicago, 1929.
2 Certains historiens de la population parlent de « houles trentenaires » (voir, par exemple, Goubert, P. : Beauvais et le Beauvaisis de 1600 à 1730, 1960, 653 p. ; Dupâquier, J. : La population rurale du Bassin parisien à l’époque de Louis XIV, Paris, 1979, 440 p), mais il semble qu’il s’agisse de fluctuations dans le nombre des naissances, dont le mécanisme est ignoré et dont l’universalité est loin d’être démontrée : rien de semblable n’est observé par exemple sur l’Angleterre ancienne (1541-1871), cf. Wrighley, E.A. et Schofield, R.S. : The population history of England, 1541-1871, a reconstruction. Londres, 1981, 779 p.
3 Cowgill mentionne également un quatrième type de cycle, qui peut être considéré comme une variante du troisième : il s’agit d’une fluctuation des effectifs de la population, liée à une augmentation du taux de natalité, elle-même suivie d’un accroissement, immédiat (pression sur les ressources) ou différé (vieillissement des générations concernées) du taux brut de mortalité.
4 L’expression : « pays ayant achevé sa transition démographique » est souvent employée dans des travaux sur la fécondité, mais sans être définie avec précision. Nous admettons ici, par convention, que la fécondité dite « post-transitionnelle » consacre le retour à un niveau égal ou inférieur au seuil de remplacement des générations.
5 Cycle économique long de l’ordre de 20 ans. S’agissant d’établir des liens en longue période entre économie et démographie, notons qu’il eût été plus approprié de raisonner sur les cycles Kondratieff (50-60 ans), particulièrement si la variable démographique motrice est la fécondité (il en va autrement pour les migrations internationales) dont on sait qu’elle a amorcé une reprise au début des années 1940. Or, selon différents auteurs, un nouveau cycle Kondratieff serait apparu précisément vers 1940.
6 Dès 1906, Yule avait fait, sur l’Angleterre, des observations similaires sur l’existence de cycles de la natalité au xixe siècle.
7 Les résultats sont peu convaincants, à la fois parce que l’auteur raisonne sur les taux bruts de natalité (donc ignore les effets possibles des variations de structure par âge) et parce qu’il utilise un procédé statistique qui peut s’avérer trompeur (recours à des moyennes quinquennales, dont il étudie les variations d’une période quinquennale à la suivante, entre 1855-1859 et 1955-1959).
8 La seule question est alors celle de l’impulsion initiale.
9 Mais, de façon curieuse, parallèlement, l’auteur développe, en collaboration, une thèse où il essaie de concilier sa théorie du revenu relatif et la théorie micro-économique de l’allocation du temps : Easterlin, R.A. : Pollak, R.A. et Wachter, M.L. : Toward a more general model of fertility determination : endogenous preferences and natural fertility, in : Population and economic change in developing countries, The University of Chicago Press, 1980, pp. 81-149.
Le caractère mécanique et aveugle de l’exercice ressort des résultats de certaines projections : comment, en effet, justifier, à l’horizon 1995, une fécondité hollandaise quatre fois supérieure à la fécondité suisse ? C’est pourtant le résultat obtenu par l’auteur (cf. Artzrouni, M.A. et Easterlin, R.A. : Birth history, age structure and post world war II fertility in ten developed countries : an exploratory empirical analysis, Genus, juillet-déc. 1982, pp. 81-99).
10 L’idée de l’ajustement de la fécondité au taux de salaire réel est ancienne ; on la trouve chez Ricardo (Principes d’économie politique, 1817), selon qui la « tendance invétérée des individus à s’adonner aux délices de la société domestique » n’est freinée que par le principe de réalité.
11 L’hypothèse du revenu relatif apparaît chez Brady, D.S. et Friedman, R.D. (Savings and the income distribution, Studies in Income and Wealth, National Bureau of Economic Research, Nex York, 1947), et de manière plus nette, appliquée à la fécondité, chez Banks (1954) et surtout chez Grauman (1960) qui, transposant la loi de l’offre et de la demande, le premier, postule explicitement une relation directe entre la taille relative d’une génération et sa fécondité.
12 Le calcul porte, soit sur le seul sexe masculin, soit sur l’ensemble des sexes.
13 Les projections démographiques habituelles partent néanmoins d’une hypothèse d’indépendance entre fécondité et structure par âge.
14 Encore que les paramètres de la relation restent à définir, seul le sens étant indiqué, de manière purement qualitative.
15 Si, du moins, le pays de départ est lui-même entré dans la phase post-transitionnelle de maîtrise de la fécondité, condition qui n’est que rarement remplie.
16 Et aussi la composition par qualification.
17 C’est ce que l’on a observé dans les pays de l’OCDE, lors de la récession économique récente : diminution notable des taux après 55 ans, face à l’entrée des cohortes nombreuses et à l’extension de l’activité féminine.
18 Outre le fait qu’il soit loin d’être démontré, cet argument nous paraît nécessaire, sans être suffisant : encore faut-il que la fécondité soit elle-même susceptible d’être soumise aux variations de l’offre de travail, donc qu’elle soit entièrement dirigée.
19 N’étant qu’une moyenne pondérée, sur 25-30 ans, des indices du moment, les indices longitudinaux décrivent une évolution plus régulière, plus lisse.
20 Portant sur un plus grand nombre de pays, les données établies par Festy (1979) confirment ce constat d’hétérogénéité puisque, en Italie, par exemple, la descendance minimale est atteinte dans les générations qui, en France, connaissent le maximum (1929-1930) et l’intervalle séparant le minimum du maximum est de l’ordre de 4 à 5 ans seulement.
21 On notera qu’un tel choix n’est pas cohérent avec l’hypothèse de comportement retenue et surtout totalement contradictoire avec la nature du test démographique puisque les deux groupes d’âges ainsi rapprochés appartiennent à la même fraction jeune (moins de 35 ans).
22 Si on suppose l’indépendance entre le rythme de croissance économique et le profil de gains par âge.
23 Voir Simon, J.L. (ed.), 1978.
24 Voir Simon, J.L. (ed.), 1978.
25 Voir Simon, J.L. (ed.), 1978.
26 Et vraisemblablement une amélioration du statut relatif des jeunes.
27 Ce point amène à constater que la distinction entre fécondité transitionnelle et fécondité post-transitionnelle (dirigée) s’impose clairement.
28 Conçue en 1961, la théorie d’Easterlin s’adapte, jusqu’à cette date, relativement bien à la réalité observée, mais, en dépit des démentis successifs, elle n’a, depuis lors, pas été modifiée dans ses principes.
29 Les propositions, du reste souvent inversibles, de la nouvelle économie des ménages, n’ont été le plus souvent, quand elles l’ont été, testées que sur des données d’enquête très partielles.
30 Easterlin (1968) utilise l’argument, mais il n’en tire pas toutes les implications.
31 En privilégiant comme variable explicative fondamentale de la fécondité la position relative des femmes sur le marché du travail, de tels travaux aboutissent à des projections contraires à celles de l’école d’Easterlin : maintien d’une fécondité basse, voire poursuite de la baisse.
32 L’ajustement graphique obtenu n’est, d’ailleurs, guère satisfaisant. Enfin, depuis 1975, l’évolution de la fécondité n’est pas conforme à ce que laissaient attendre Butz et Ward.
33 Or, le moins que l’on puisse dire concernant les États-Unis, est que l’on n’assiste pas, comme le voudrait ce modèle, durant les années 40, à une chute de l’activité féminine, pas plus que l’on n’enregistre l’évolution inverse dans les années 30.
34 Par le biais du remplacement d’enfants morts en bas âge.
35 A l’exclusion toutefois des moins peuplés, tels que le Luxembourg ou la Nouvelle-Zélande.
36 La Grèce et la Yougoslavie ont, pour cette raison, été exclues.
37 Mais pourrait bien illustrer le cas de bon nombre de pays peu développés aujourd’hui en transition rapide.
38 Au États-Unis, par exemple, où la baisse a été entamée il y a plus de vingt-cinq ans, aucun signe de retournement durable et sensible, c’est-à-dire à la mesure de la baisse enregistrée, ne s’est encore manifesté.
39 Sexes réunis.
40 Le cas de la France pourrait relever d’un autre type d’explication, notamment politique (adoption du Code de la Famille et des ordonnances de 1945-1946 sur la Sécurité sociale).
41 Sauf au Canada, où le taux a culminé à 17,3 % et 18,8 % en 1932 et 1933.
42 En proportion de l’ensemble de la main-d’œuvre civile aux États-Unis et au Canada, en proportion de la main-d’œuvre assurée ou syndiquée dans les autres pays.
43 Si dans la version simplifiée (ajustement sur le ratio démographique 35-64/15-34 ans), l’ajustement est robuste sur l’ensemble de la période 1940-1975, c’est, en quelque sorte, par construction : l’auteur ne cache pas avoir procédé à des tâtonnements successifs dans le choix des groupes d’âges.
44 Si elle s’inspire de la même idée de base, la logique adoptée par Easterlin au fil de ses différentes publications depuis 1961 est loin d’être constante, reflétant les hésitations de l’auteur devant les modifications de la réalité qu’il étudie.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Gens de Marrakech
Géo-démographie de la ville Rouge
Mohamed Sebti, Patrick Festy, Youssef Courbage et al.
2009
Histoire de familles, histoires familiales
Les résultats de l’enquête Famille de 1999
Cécile Lefèvre et Alexandra Filhon (dir.)
2005
La population canadienne au début du xviiie siècle
Nuptialité - Fécondité - Mortalité infantile
Jacques Henripin
1954
Les travaux du Haut comité consultatif de la population et de la famille
Travaux et documents
Haut comité consultatif de la population et de la famille
1946