Introduction à la deuxième partie : A quel rôle prétendre ? 1965-1969
Texte intégral
« L’Europe n’est plus l’Europe mais seulement un morceau du monde. Elle ne peut plus se définir par rapport à elle-même pour s’imposer ensuite aux autres. Elle est obligée, pour garder une personnalité, de tenir compte de la réalité mondiale et de déterminer ensuite la place qui peut être la sienne1. »
1L’Europe communautaire entama en 1965 une ère nouvelle. Les années 1965 à 1969, souvent considérées par les historiens de la construction européenne comme une période relativement peu fructueuse (car dénuées d’avancées institutionnelles et politiques majeures) furent celles d’une crise institutionnelle sans précédent pour l’Europe communautaire, secouée par la « crise de la chaise vide ». Dans le même temps, son économie était malmenée par des difficultés monétaires, tandis que ses Etats membres traversaient un fort courant de révolution intellectuelle et sociale. Les changements ne se situaient cependant pas au seul niveau « interne ». Des repositionnements affectaient également la scène internationale. Les interlocuteurs américains et soviétiques de l’Europe se trouvèrent eux aussi confrontés à des difficultés internes et externes qui les détournèrent de leur dialogue avec l’Europe communautaire. Les dialogues entamés au début des années 1960 s’enlisèrent peu à peu. Non seulement Américains et Soviétiques étaient moins disponibles, mais les Européens eux-mêmes, ébranlés par les multiples difficultés surgies en l’espace de quelques mois, semblaient moins désireux de se confronter à l’image que leur renvoyaient les deux grandes puissances. La confiance qui avait soutenu les envolées discursives de Walter Hallstein et de ses pairs sembla s’évanouir et les quelques efforts concédés pour poursuivre le portrait de l’Europe communautaire sur la scène internationale témoignaient d’une posture défensive.
2Bénéficiant de la détente internationale, les relations entre l’Europe communautaire et les pays du bloc de l’Est évoluèrent vers davantage d’ouverture, sans pour autant aboutir à des contacts entre les institutions communautaires et celles du COMECON. L’Europe communautaire voyait toujours son existence propre niée. Elle ne trouva pas le souffle nécessaire pour plaider sa cause (chapitre 4). Alors qu’un dialogue nourri avec les Etats-Unis avait permis aux Européens d’affirmer leur personnalité dans l’espace atlantique, les inflexions que connaissaient la guerre froide, tant dans les relations entre les deux superpuissances, que dans l’escalade de la guerre au Vietnam, détournèrent les USA de l’Europe communautaire. Malgré la volonté de continuité affichée par le président Lyndon B. Johnson, le “partnership” atlantique entra en léthargie, sans qu’aucun autre concept ne vînt le remplacer pour penser l’organisation des relations transatlantiques (chapitre 4).
3Au même moment, l’Europe communautaire affrontait le regard critique des pays du Tiers-Monde. Une multitude de nouveaux Etats étaient en effet nés sur les vestiges de la colonisation. Leur développement économique constituait un défi majeur.
Notes de bas de page
1 Armand, Louis, Drancourt, Michel Le pari européen, Paris : Fayard, 1968, p. 19-20.
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