1 Dans cet article, j’utilise le mot « action » entre parenthèses afin de pouvoir utiliser les termes de RAP et de RP. Comme je l’explique plus loin, ces termes sont ici considérés comme des synonymes.
2 La Fondation Dag Hammerskjöld d’Uppsala, en Suède, publia un rapport détaillé sur cette expérience extraordinaire, écrit par un groupe de scientifiques sociaux engagés : G.V.S. de Silva et Ponna Wignaraja (du Sri Lanka), Niranjan Mehta (d’Inde) et Md. Anisur Rahman (du Bangladesh). Le rapport signale que « des activistes et des cadres [d’inspiration socialiste] ont collaboré avec nous pour réaliser cette recherche […] pour que nous puissions créer de la connaissance en commun ». Ils ont baptisé cette méthode « recherche participative », allant ainsi plus loin que dans l’approche dialogique (De Silva, Wignaraja, Mehta, Rahman 1979).
3 Voir aussi le Colloque de Carthagène de 1979 et les éditions postérieures du Libro por la Praxis (Fals Borda 1979). La Fondation Filet incluait, en plus de l'auteur de ces lignes, les collègues Augusto Libreros, Jorge Ucrós, Víctor Bonilla, Gonzalo Castillo, Carlos Duplat, ainsi que beaucoup d’autres qui travaillaient dans divers domaines. Nous avons été guidés par le marxisme humaniste et nous avons revu les apports de penseurs comme Gramsci, Lukacs et Mandel. Nous avons introduit et discuté de concepts qui n’étaient pas très populaires à cette époque, comme la praxis, la dichotomie sujet-objet et le sens commun. Des dogmes comme celui de la « science du prolétariat » ont été écartés par manque de preuves empiriques. Des analyses comparées de la RAP sont présentées dans Fals Borda et Rahman (1991). Voir également d’autres sources, citées plus loin. Sur nos efforts d’indépendance intellectuelle, voir Fals Borda (1970c). Consulter l’édition la plus complète, qui est la troisième édition de 1986.
4 Le premier travail réalisé par Swantz n’a pas été fait dans un cadre universitaire et l’auteur ne suivait aucune théorie politique. Néanmoins, ce travail a donné l’impulsion qui était nécessaire pour réussir à apporter des connaissances aux peuples marginalisés de la région, des connaissances qui pourraient les aider. Swantz initia peu après un autre projet, avec les Massai nomades de Jipemoyo (Tanzanie), en collaboration avec Kemal Mustafa, Odhiambo Anacleti et d’autres collègues du Ministère de la culture de Tanzanie. Ce projet eut une influence sur d’autres travaux postérieurs ainsi que sur diverses approches mettant l’accent sur la « recherche-action » et le développementalisme.
5 Les bulletins de l’IDAC sur la RP, réalisés en trois langues, ont eu d’amples répercussions dont les résultats ont été considérables, notamment au Mexique et en Hollande (Anton de Schutter), au Chili et au Venezuela (Francisco Vío Grossi, Marcela Gajardo), en Inde (Rajesh Tandon, Smitu Kothari), au Nicaragua, en France et en Hollande (Guy Le Boterf, Marc Lammerink), au Pérou et en Hollande (Vera Gianotten, Ton de Wit), etc.
6 L’anthropologue Ricardo Pozas fut un autre pionnier mexicain. Il a présenté des techniques sur la RP durant le 9ème Congrès latino-américain de sociologie qui a eu lieu à Mexico en 1969. Ses contributions ont permis de réfléchir sur des idées plus radicales de changements sociaux et académiques.
7 Stavenhagen a proposé l’« observation active », qui va au-delà de l’observation participante classique, parce que les scientifiques ne peuvent pas « refuser de se décider ». Ils « doivent mettre en lumière les problèmes et créer de nouveaux modèles qui prennent la place de ceux qu’il faut écarter, et si cela est possible, ils doivent agir dès que cela est nécessaire ». Des onze commentateurs de cet article, huit se sont déclarés d’accord avec Stavenhagen. Le fait qu’il soit présent au Congrès mondial de Carthagène de 1977 a constitué un apport majeur de cette réunion. Dans l’ouvrage de Salazar, on retrouve également les contributions essentielles de Lewin, Tax, Kemmis et Park, mentionnés dans cet article (Salazar 1992).
8 La troisième édition de mon livre en 1986 est plus complète et renforce l’attitude d’indépendance intellectuelle que nous recherchons (Fals Borda 1970c [1986]). Il est fait référence, dans ces livres et ces articles, à la « sociologie de la libération » inspirée par la Révolution cubaine et par les écrits, la vie et la pratique du sociologue, guérillero et prêtre Camilo Torres Restrepo.
9 Plus tard, nous avons découvert les études critiques sur les « contre courants » dans les sciences, réalisées en Europe par Helga Nowotny et Hilary Rose ; la critique faite par Karl Polanyi à l’« observateur indépendant » ; l’histoire ouvrière de E.P. Thompson ; la théorie de l’action communicative de Jürgen Habermas ; les théories de l’action et des mouvements sociaux d’Alain Touraine ; les concepts d’« habitus » et d’« observation participante » de Pierre Bourdieu ; les démystifiantes leçons de Foucault, Lyotard et Todorov sur la réalité sociale et la rhétorique académique. Les contributions importantes de ces penseur-es européen-nes, bien que ne s’inscrivant pas dans notre approche, ont renforcé notre conviction que nous étions sur la bonne voie.
10 Selon Heller, l’objectif principal des sciences sociales est de « nous rendre libres », ce qui a une connotation libératrice ou émancipatrice. Denzin et Lincoln ont également réalisé d’importantes contributions dans ce domaine (Denzin, Lincoln 1994).
11 Le vallenato est une musique « traditionnelle » colombienne qui mélange des styles et des héritages européens, africains et indigènes (Ndlt).
12 C’est ce que signifie l’expérience avec les deux colonnes parallèles qu’on retrouve chez Fals Borda (1979–1986). On peut également retrouver une explication dans Fals Borda (1996). Certains autres auteurs ont fait des présentations similaires en anthropologie et en médecine, en anglais et en français.
13 Il y eut 32 présentations lors de ce colloque, réalisées par des délégués de 17 pays. Les publications qui en résultent sont considérées comme des classiques. A part certains articles, les tomes n’ont pas été traduits en anglais mais une partie a été traduite en allemand.
14 Le premier colloque de 1977 a accéléré l’adoption et la diffusion de la R(A)P dans le monde. L’ICAE a créé le réseau international de RP. De plus, l’Association européenne des instituts de recherche et de formation en matière de développement (EADI) a choisi d’aller au-delà du concept de besoins essentiels lorsqu’elle a adopté les conclusions du projet tanzanien de Jipe moyo, en 1978. En 1979, à l’Institut de recherche des Nations unies pour le développement social (UNRISD) de Genève, Suisse, les anthropologues Andrew Pearse et Matthias Stiefel ont commencé à réaliser et à publier un certain nombre d’études sur la participation populaire. L’OIT et l’UNESCO ont fait la même chose avec l’économiste bengali Md. Anisur Rahman et le Programme MOST. Le Comité de recherche sur la pratique et la transformation sociale de l’Association internationale de sociologie a ouvert une section sur la RP, sous la direction de Peter Park et Michal Bodermann. Des centres importants de la R(A)P ont été créés à New Dehli, Colombo, Santiago, Caracas, Amsterdam et dans d’autres villes. Cette discipline a commencé à être enseignée formellement dans les universités du Massachusetts, de Calgary, de Cornell, de Caracas, de Dar-es-Salaam, de Campinas, de Managua, de Pernambuco, de Bath et de Deakin. On compte aujourd’hui d’innombrables universités qui l’enseignent, y compris certaines universités colombiennes. La Société pour le développement international (SID), sous l’initiative de Ponna Wignaraja, a créé en 1980 un Groupe international d’Initiatives de Base (IGGRI) qui inclut Majid Rahnema, Gustavo Esteva, Marja Liisa Swantz, Luis Lopezllera, Ward Morehouse, Rajni Kothari, Smitu Kothari, Paul Ekins, Manfred Max-Neef et l'auteur de ces lignes, parmi d’autres. La Banque mondiale a créé son propre Groupe de réflexion sur le développement participatif, sous la direction des sociologues Michael M. Cernea et Anders Rudqvist. Le Conseil d’éducation des adultes d’Amérique Latine (CEAAL), qui a eu son siège à Santiago du Chili puis à Mexico, a joué un rôle important dans la RP avec la mise en place en 1981 d’un réseau régional spécial coordonné par l’éducateur brésilien Joao Francisco de Souza. Ce réseau inclut quasiment tous les pays latino-américains. Des activistes intellectuel-les important-es travaillent dans les institutions en lien avec l’Amérique centrale, comme Raul Leis, Oscar Jara, Carlos Brenes et Malena de Montis. En Colombie : Gustavo de Roux, María Cristina Salazar, Ernesto Lleras, Elías Sevilla, Marco Raúl Mejía, Raúl Paniagua, Rosita de Paniagua, Lola Cendales, Rosario Saavedra, Alejandro Sanz de Santamaría, Francisco de Roux, et beaucoup d’autres. En Australie, en plus des universités mentionnées, il existe l’association d’Apprentissage-action, recherche-action et gestion de processus (ALARPM), qui a stimulé l’adoption institutionnelle de ces « écoles », sous le leadership d’Ortrun Zuber-Skerritt, Ron Passfield, Colin Henry, Yoland Wadsworth, Iaian Govan, et d’autres.
15 Source : Fals Borda, O. 1999 . Orígenes universales y retos actuales de la IAP (investigación acción participativa. In Análisis Político, n°38, sept/déc., 71–88. Reproduit dans l'hebdomadaire Peripecias (2008) et sur leur site, uniquement à des fins informatives et éducatives. Traduit de l'espagnol par Saskia Velásquez.