Des éclairages nécessaires en études de genre et de développement
p. 7-9
Texte intégral
1Dans les études de développement, le genre occupe un espace grandissant, foisonnant, dans lequel il peut être difficile de se retrouver. Le champ des études féministes qui s’est construit depuis plus d’un siècle s’est considérablement enrichi ces dernières décennies. Un champ de connaissances en genre et développement a été construit par des chercheures, des organisations féministes, des mouvements de femmes. Des organisations de recherche, de coopération internationale ou bilatérale, des fondations, ont soutenu le recueil de données, d’informations, les évaluations ou la réalisation de programmes de recherches. Le concept de genre a permis de revisiter les études et pratiques du développement en s’appuyant sur un grand nombre de recherches, d’études de cas, de données, des théorisations, des analyses.
2Cependant, malgré son étendue et ses apports aux études de développement, ce champ des études genre et développement n’est pas toujours assez connu, voire reconnu. L’utilité du genre comme catégorie d’analyse est parfois encore réfutée, pour diverses raisons.
3Les résistances antiféministes ne sont pas un phénomène nouveau (Bard 1999). Nous sommes parfois confronté-es à des prises de positions enflammées autour des questions de genre.
4Il n’est pas rare que ces débats omettent complètement de faire référence à la riche littérature qui existe dans ce domaine. Les controverses sur ladite « théorie du genre » ont ainsi habilement joué de la confusion avec le « trouble dans le genre » (Butler 2005) et pu brouiller les pistes en détournant le genre de son sens, avec une mauvaise foi criante. Dans les études féministes, les théories, cet « ensemble relativement organisé d’idées, de concepts se rapportant à un domaine déterminé » (selon la définition du Larousse) sont certes multiples mais fondées. Elles sont traversées de courants, d’approches diverses, de voix dissidentes, et apportent ainsi de riches contributions aux discussions théoriques, pratiques et politiques. Mais elles restent souvent dévalorisées, entre autres en raison de leur engagement pour plus de justice sociale, de leur intérêt à reconnaître les savoirs de l’« autre », parce qu’elles veulent faire entendre la voix des groupes marginalisés, contester les rapports hiérarchiques dans la production de connaissances, du fait aussi des liens qu’elles établissent entre théories et pratiques, entre recherche et action, entre privé et public, enfin parce qu’elles accordent une place centrale aux rapports de pouvoir et au politique. Les théories féministes dans les différentes disciplines (l’anthropologie féministe, l’économie féministe), se veulent inclusives, collaboratives, transformatives, et, de ce fait, n’obtiennent souvent pas de grande reconnaissance scientifique.
5Il est ainsi toujours nécessaire de continuer à mieux faire comprendre, notamment dans les études de développement où il foisonne, ce concept de genre qui s’appuie sur une longue histoire et a été forgé par des théories féministes, et à apporter des arguments, des informations, des analyses pour vaincre les résistances, démontrer sa valeur heuristique et renouveler la pensée sur le développement (Verschuur, Guérin et Guétat-Bernard 2015).
6Cette collection Éclairages, publiée à l’initiative du Pôle genre et développement de l’Institut de hautes études internationales et du développement de Genève, a pour objectif de renforcer le travail de diffusion des connaissances dans le champ genre et développement, commencé en l’an 2000 avec la collection Cahiers genre et développement (Bisilliat et Verschuur 2000).
7De manière brève, chacun des livres de la collection Éclairages, écrit par des spécialistes de la thématique, approfondira une question spécifique en apportant des informations, des analyses, des arguments, en fournissant des précisions pour éclairer les débats et les rendre moins troubles, plus intelligibles. Cette collection contribuera à mieux faire connaître le genre comme outil nécessaire d’analyse pour le changement social.
Bibliographie
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Bard, C. (Dir.). 1999. Un siècle d’anti-féminisme. Paris : Fayard. Bisilliat, J. et C. Verschuur (Dir.). 2000. Le Genre. Un outil nécessaire. Cahiers genre et développement. N° 1. Paris : L’Harmattan.
Butler, J. 2005. Trouble dans le genre. Paris : La Découverte.
Verschuur, C., I. Guérin et H. Guétat-Bernard (Dir.). 2015. Sous le développement, le genre. Paris : Éditions de l’IRD. Collection Objectifs Sud.
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Le genre : un outil nécessaire
Introduction à une problématique
Jeanne Bisilliat et Christine Verschuur (dir.)
2000
Genre, nouvelle division internationale du travail et migrations
Christine Verschuur et Fenneke Reysoo (dir.)
2005
Genre, migrations et globalisation de la reproduction sociale
Christine Verschuur et Christine Catarino (dir.)
2013
Genre et religion : des rapports épineux
Illustration à partir des débats sur l’avortement
Ana Amuchástegui, Edith Flores, Evelyn Aldaz et al.
2015
Genre et économie solidaire, des croisements nécessaires
Christine Verschuur, Isabelle Guérin et Isabelle Hillenkamp (dir.)
2017
Savoirs féministes au Sud
Expertes en genre et tournant décolonial
Christine Verschuur (dir.)
2019