V. La condition des subordonnés face à la guerre et le problème de l’obéissance aux ordres des supérieurs
p. 186-203
Texte intégral
1Suivant la démarche grotienne, tournons-nous maintenant vers la justification matérielle de l’action des subordonnés. Leur condition générale a été évoquée :751 à côté de la cause efficiente principale – le belligérant au sens étroit – et de la cause adjuvante – les alliés -, les subordonnés font figure de cause instrumentale ; contrairement aux deux premières catégories de personnes, leur volonté ne se détermine pas librement et ils n’ont qu’une conscience restreinte de la portée des actes qui leur sont ordonnés. Or cette subordination ne laisse pas de rendre paradoxale leur situation juridique au regard de la cause matérielle.
2En effet, nous dit Grotius, seules peuvent être appréciés juridiquement – et cela signifie toujours pour lui : être appréciés au point de vue de la vertu de justice – des actes autonomes, procédant d’une libre volonté de leur auteur. Aussi bien est-ce la volonté, en tant que dirigée par la raison, qui représente le subiectum iuris.752 Pourtant, au lieu de se déterminer par leur propre volonté, les sujets obéissent à la volonté de leurs chefs. Ceux-ci peuvent donc seuls faire l’objet d’une appréciation juridique au point de vue de la materia belli telle qu’elle a été définie jusque-là : celle-ci ne regarde pas directement les subordonnés et ne saurait donc servir à justifier leur action.
3Est-ce à dire que cette action échappe à toute considération juridique ? Conclusion inadmissible, juge Grotius, puisque les subordonnés ne cessent pas d’être humains et qu’à ce titre du moins leurs actes procèdent de leur volonté. Mais puisque cette volonté, au lieu d’être libre comme celle des chefs, est conditionnée par les ordres de ceux-ci, c’est dans ces ordres que Grotius perçoit la vraie justification et partant la cause matérielle de leurs actes. C’est en tant qu’ils répondent à un devoir d’obéissance que les actes de sujets deviennent susceptibles d’un examen juridique : car en rendant au supérieur « ce qui lui est dû », ils satisfont à la iustitia.753
4Mais nous ne sommes pas encore au bout du problème. On demandera en effet si la cause matérielle ainsi définie s’impose au subordonné sans conditions : doit-il suivre aveuglément les ordres qu’il reçoit ? Ceux-ci le justifieront-ils dans toutes les circonstances ? D’où la question toujours éminemment actuelle des limites dans lesquelles doivent être exécutés les ordres et dans lesquelles ils peuvent excuser, le cas échéant, l’acte illicite commis par un subordonné. A ce devoir d’obéir, Grotius statue une claire limite : l’ordre doit être refusé toutes les fois qu’il entre en conflit avec une norme supérieure. Mais comment le subordonné, simple « instrument », pourra-t-il s’en assurer ? Il doit s’en tenir, continue Grotius, à sa ratio probabilis, expression qu’il nous faudra élucider par la suite,754 mais dont il est d’emblée certain qu’elle impose une limite au devoir d’obéir du subordonné. De fait, c’est dans la mesure où existe une telle limite que les actes de ce dernier lui deviennent à proprement parler imputables et pourront donc faire l’objet de considérations éthiques, au point de vue du juste et de l’injuste.755
1. Le fond chrétien et antique de la conception grotienne du subordonné
5La situation juridique des subordonnés face à la guerre se trouve donc clairement différenciée de celle de leurs chefs. L’importance décisive de cette scission pour le système grotien apparaîtra plus loin.756 Pour l’instant, cherchons à en retracer les origines. Elles sont à rechercher dans le passé antique et médiéval. Notre auteur remploie ici, à sa manière assez personnelle, plusieurs motifs aristotéliciens et patristiques, transformés en partie par la scolastique. Il en naît une doctrine qui tient du Stagirite surtout par l’apparence, le fond du raisonnement étant d’inspiration chrétienne ; car, dans ce contexte nouveau et spécifique de l’humanisme chrétien, la pensée du Philosophe se retrouve simplifiée et déformée.
6D’Aristote provient d’abord l’option de restreindre le jugement éthique aux actions libres, à la fois conscientes et volontaires :757 d’où la question posée par le Stagirite de savoir si les actes des subordonnés sont envisageables au point de vue de la vertu de justice et, plus généralement, dans quelle mesure cette catégorie de personnes est capable de vertu. Or nous savons déjà que Grotius ne voit dans le subordonné qu’un instrument mû par la volonté d’autrui, si bien qu’il ne participe à la vertu que sur un mode mineur, dicté par sa fonction. Seul l’homme libre a véritablement part à la vertu et ses actes seuls peuvent donc faire l’objet d’une appréciation éthique.758
7L’autre motif aristotélicien est celui de la justice générale ou légale : à savoir cette acception large de la vertu de justice par laquelle le Stagirite avait embrassé l’ensemble des vertus et qu’il reconnaissait à tout citoyen respectueux des lois.759 L’expression, sinon l’idée, ne date en fait que des scolastiques. Chemin faisant, ils en ont fait une troisième catégorie de justice, en plus de ses deux acceptions particulières, commutative et distributive, en accentuant moins son caractère de généralité, comme Aristote, que celui de légalité et partant d’obéissance à l’égard des lois.760
8C’est en rapprochant ces deux motifs que Grotius parvient à imaginer la condition paradoxale de ses subordonnés, instruments certes, mais capables de vertu, susceptibles en particulier d’être jugés au point de vue de la justice. Mais il est d’emblée évident qu’il fait preuve ici d’une grande liberté à l’égard du modèle invoqué, en appliquant sa thèse de la justice générale, valant pour les citoyens libres d’une cité grecque, à des individus faisant plutôt figure d’esclaves. Sans doute est-ce en vue de ramener la relation de subordination à un principe général, valable dans toutes les catégories de guerres, qu’il simplifie de la sorte Aristote. Celui-ci avait en effet soigneusement dissocié les rapports respectifs des esclaves, des enfants et des épouses avec le maître de la maison ;761 en outre, il s’était bien gardé, en les comparant avec certains régimes politiques, de les identifier avec ceux-ci ;762 enfin, sa comparaison était partie du domaine politique pour éclairer celui de la famille.763 Grotius part au contraire de la maison pour aboutir à la cité ; et des vues nuancées du Stagirite il ne retient en fait que la relation entre le maître et l’esclave, véritable paradigme auquel les autres relations d’inégalité sont assimilées.764 Voilà pourquoi la subordination politique entre le gouvernant et le citoyen devient, elle aussi, purement instrumentale, ce qui est peu conforme à l’idée que s’en faisait Aristote, si ce n’est peut-être en régime tyrannique.
9D’emblée l’apparence aristotélicienne subit plusieurs entorses ; mais il y a d’autres différences plus fondamentales, qui finissent par la réduire à une façade. Les fondements véritables de tout ce développement doivent être recherchés dans la patristique : ils sont spécifiquement chrétiens. Rien de plus symptomatique à cet égard que le renvoi, à propos de la phrase qui résume le mieux la thèse de Grotius et qu’il dit inspirée d’Aristote – « omne autem quod imperat est ei quod paret causa virtutis »765 –, à quatre lettres pauliniennes. Ailleurs il commet un lapsus non moins symptomatique : faisant état de la thèse aristotélicienne de l’esclavage naturel, il la prive aussitôt de sa vraie substance, en réservant le point de vue chrétien suivant lequel les hommes sont égaux : si bien que la condition servile ne tient qu’à des circonstances extérieures et non à une inégalité naturelle. En dépit de la société inégalitaire entourant Grotius, il n’aurait pas admis cette conception antique. Il fallait dès lors trouver un autre fondement à l’autorité et au devoir de lui obtempérer : et c’est en chrétien que Grotius pose en fin de compte le problème du devoir d’obéissance et de ses limites.
10A vrai dire, l’idée de l’égalité foncière des humains avait pris racine déjà chez les stoïciens et s’était propagée par l’hellénisme à travers l’empire romain : on en trouve des reflets évidents chez Cicéron, Sénèque et plusieurs des juristes classiques.766 Les pères chrétiens reprennent le thème, pour ne voir dans l’esclavage et la sujétion qu’une condition externe, laissant intacte l’égalité essentielle devant Dieu.767 Ils vont même plus loin, en plaçant cette idée générale dans une perspective théologique : l’Etat aurait été institué par Dieu afin de contrecarrer le péché. C’est de là – et partant d’un fait contraire à la vraie « nature » de l’homme – et non d’une inégalité « naturelle » au sens des Grecs que dériverait l’allégeance politique : obéissant à leurs chefs, les subordonnés obéiraient indirectement à Dieu.768 Tel est le sens du célèbre passage de l’épître de Paul aux Romains, qui avait peut-être visé initialement à faire échec aux tendances anarchiques de certaines communautés chrétiennes.769 La première épître de Pierre précise la question, en imposant l’obéissance même envers de mauvais maîtres :770 car ceux-là aussi sont voulus par Dieu, afin de faire expier quelque péché, comme le montrera plus en détail saint Augustin.771
11Nous savons cependant que ce courant doctrinal, qui, faisant du gouvernant terrestre un vicaire de Dieu, le met à l’abri de toute atteinte humaine, sera tempéré au moyen âge par une conception opposée qui fait au contraire dépendre la légitimité du pouvoir et la validité de ses ordres tout ensemble de leur conformité à la iustitia.772 Là aussi, du reste, le destinataire ultime de l’allégeance est Dieu : se modifie donc surtout le statut du chaînon intermédiaire, le gouvernant humain dont la légitimité désormais conditionnelle devient en quelque sorte précaire désormais condition
12Une option intermédiaire, qui peut se fonder sur certains passages augustiniens et qui dominera dans la scolastique médiévale,773 consiste à dissocier la légitimité du gouvernement, qui demeure acquise sauf en cas de tyrannie caractérisée, et la validité du commandement particulier, qui peut faire l’objet d’un refus lorsqu’il est illicite. C’est dans ce courant-là qu’il faut situer la discussion grotienne du devoir d’obéissance et de ses limites.
13Ces remarques suffisent pour nous indiquer l’ampleur véritable et la nature très générale du problème. Cependant, comme le cas particulier de l’obéissance du soldat envers ses chefs en représente une illustration privilégiée, c’est sous ce rapport que nombre d’auteurs traiteront la question. Cela est si vrai que l’illustration, voire un de ses aspects, viendra à prédominer au point d’obscurcir les lignes générales du problème. Tel sera notamment le cas dans la scolastique médiévale, avant que le xvie siècle ne restitue à la question sa véritable dimension, celle qu’elle avait eue chez saint Augustin.
2. L’origine augustinienne du problème et son rétrécissement progressif chez les canonistes à la question de la restitution pour fait de guerre
14Nous connaissons déjà l’importance qu’attache l’évêque d’Hippone à la question de l’obéissance ;774 et nous savons aussi que ce sont en particulier des exemples « militaires » qui ont stimulé sa réflexion sur ce point. Rappelons le fameux passage du Contra Faustum relatif aux agissements de Moïse où, par un raisonnement a fortiori, Augustin conclut, du devoir du soldat d’obéir à son commandant, à l’obéissance inconditionnelle due à la majesté divine.775 En effet, poursuit-il dans une période devenue fameuse, « puisque l’homme juste, à supposer même qu’il serve un souverain sacrilège, n’en peut pas moins, sur le commandement de ce dernier, prendre les armes en vue de protéger l’ordre public, – soit que le commandement n’aille à coup sûr pas à l’encontre de Dieu, soit qu’il y ait un doute, auquel cas le roi se rendrait coupable par l’iniquité de son ordre, alors que l’innocence du soldat résulterait de son devoir de servir –, à combien plus forte raison sortira-t-on innocent de la conduite d’une guerre ordonnée par Dieu, duquel tous ses serviteurs savent qu’il ne saurait rien ordonner d’injuste. »776 Le fond paulinien du raisonnement est souligné par la phrase qui précède et qui reproduit en substance Romains 13 : l.777 L’idée reparaît d’ailleurs, jusque dans le détail des formules, dans la Cité de Dieu ;778 son entière signification se dévoile seulement à travers la conception augustinienne de l’ordo.779
15Le problème soulevé par la licéité douteuse du commandement n’y représente qu’un élément somme toute subalterne ; pourtant c’est lui surtout qui nous intéresse ici, tant il est vrai qu’il constitue la pierre de touche de l’obéissance. Augustin estime que dans cette hypothèse le devoir d’obéir reste intact. Faut-il en déduire, comme d’aucuns l’ont voulu, que l’homme augustinien n’est qu’un automate ? Le passage ne semble pas autoriser une conclusion aussi radicale. Derrière les deux hypothèses envisagées, l’évêque paraît en sous-entendre une troisième, celle où l’ordre du souverain serait à coup sûr contraire à un précepte divin.780 S’il n’en fait pas mention, c’est que son raisonnement ne l’exige point. Mais il est difficile d’admettre que, dans cette éventualité, il aurait continué à opter pour l’obéissance.781 N’était-ce pas implicitement renier une partie des martyrs morts pour sa foi ? Sans entrer plus avant dans ce problème, rappelons la distinction évoquée tout à l’heure entre la légitimité de l’autorité en général et la validité d’une injonction particulière, le devoir de refuser celle-ci n’entraînant aucun véritable droit de résister à celle-là.782
16La célèbre période augustinienne qu’on vient de citer a été recueillie par Gratien vers la fin du canon Quid culpatur.783 De ce canon, nous avons déjà examiné la première partie relative à l’auctoritas principis, en constatant par rapport à la pensée d’Augustin un notable rétrécissement, dû, semble-t-il, à un élagage systématique opéré par une seule personne.784 Or, l’examen de la seconde moitié du canon ne fait que confirmer cette impression. Laissons de côté le « civicae pacis ordinem servans », qui se transforme en « si vice pacis ordinem servans » :785 la teneur augustinienne s’en trouve obscurcie, mais cela ne porte guère à conséquence. Plus importante nous paraît l’amputation de la fin du texte : elle répond très exactement aux coupures relevées plus haut dans le même canon. Là aussi, c’est le second membre d’un raisonnement a fortiori qui se trouve éliminé – il s’agit en fait d’un autre versant du même raisonnement – et le but semble être analogue : ramener Augustin sur terre, afin de le faire cadrer avec la rubrique du canon : Quae sunt in bello iure reprehendenda. Au lieu de l’obéissance due aux ordres divins, le canon ne vise plus que la guerre des hommes et la discipline militaire. En même temps, nous assistons à un premier rétrécissement de la problématique générale du devoir d’obéir à l’autorité, qui n’est posé ici plus qu’en termes militaires.
17Déjà restreinte par Gratien, la portée du texte augustinien le sera davantage encore par l’emploi qu’en feront les sommistes. Le principal artisan de cette évolution n’est autre que l’initiateur même de cette jurisprudence de l’âme, Raymond de Penafort. Non seulement il confine le texte au domaine étroit de la guerre, mais il ne l’allègue qu’à propos du devoir de restituer une pièce de butin provenant d’une guerre illicite et vendue par la suite à un tiers : cas de conscience qui peut nous paraître assez spécial, voire secondaire, mais qui était fréquent à une époque où la guerre et ses fruits faisaient pour ainsi dire partie du régime économique ordinaire. Monalde évoquera même l’hypothèse, exagérée mais non absurde, d’un bien ayant changé de mains cent fois.786 Or, cette manière de remployer la réflexion augustinienne fut lourde de conséquences.
18Raymond tranche le cas de conscience du tiers acheteur en lui appliquant par analogie les règles valant pour le soldat vendeur. Aussi commence-t-il par examiner la situation de celui-ci, sur la base du canon Quid culpatur. Aux deux hypothèses qui s’y trouvent formulées – légitimité assurée et douteuse de la guerre – il ajoute celle, laissée dans l’ombre par Augustin, d’une guerre manifestement illicite et que le soldat connaît pour telle. Or, au lieu de se limiter au problème moral de la participation à la guerre, il en tire des conséquences juridiques relatives au problème particulier de la restitution de biens ravis. Le devoir de les restituer apparaît comme un reflet inversé du devoir qu’a le soldat d’obéir au commandement de son supérieur ou de le refuser. Les deux cas extrêmes de certitude se résolvent donc assez facilement. En cas de doute, Raymond présume la conformité de l’ordre humain aux normes divines, le subordonné étant excusé par le bonum obedientiae et dispensé en conséquence du devoir de restitution.787
19Ces conclusions relatives au soldat vendeur sont alors transposées au tiers acheteur, bien que seulement d’une façon approximative, vu la différence entre leurs situations respectives. Le problème de l’obéissance ne se pose pas pour le tiers. Toutefois, s’il n’est pas lui-même pris dans le conflit des allégeances qui fait osciller le soldat entre son chef terrestre et Dieu, il a en revanche l’obligation de se renseigner. L’ignorance ne l’excuse point, et l’erreur seulement dans d’étroites limites, sans même le délier entièrement de son devoir de restitution. Si le comportement du soldat était dicté par l’état de ses connaissances et son devoir d’obéir, le tiers se voit en revanche imposer une obligation positive de s’informer.788
20La manière dont il s’acquitte de ce devoir de diligence détermine son obligation de restituer. Raymond énumère trois cas. La certitude quant à la justice de la guerre met l’acheteur à l’abri de toute restitution. La conviction erronée entraîne un devoir de restituer dès que l’erreur est découverte, le tiers pouvant cependant se retourner contre le vendeur. Cette possibilité semble au contraire exclue en cas d’erreur de droit ou d’ignorance crassa et supina des faits.789 Le cas où l’acheteur connaissait pertinemment la provenance illicite du bien n’est pas mentionné, mais paraît compris a fortiori dans la dernière hypothèse. En conclusion, la situation de l’acheteur ressemble à celle du soldat pour les cas extrêmes de certitude ; quant aux cas intermédiaires, elle en diffère non seulement par le résultat pratique, mais surtout quant au fondement de l’éventuelle excuse : elle réside pour lui dans l’erreur, pour le soldat dans le doute.
21A cette trame, Guillaume de Rennes ajoute deux gloses. Le doute du subordonné, précise-t-il dans l’une, peut porter sur l’une des cinq conditions de la guerre juste.790 Dans l’autre il spécifie la portée du bonum obedientiae qui ne peut servir d’excuse qu’à des subordonnés véritables, parmi lesquels il compte sans doute les vasseaux. Il n’en va pas de même des « soldats, sergents et mercenaires étrangers », qui, dans le doute, doivent s’abstenir de la guerre. Leur situation n’est pas assimilable à celle de l’avocat, excusé par sa bonne foi dès qu’il estime la cause juste : car là, explique Guillaume, un juge va trancher en vertu d’un raisonnement, alors que la guerre se décide par la seule force physique ; grâce à cette garantie déontologique, il se montre plus indulgent envers l’avocat qu’à l’égard du mercenaire.791 La question des mercenaires était déjà loin d’être académique : nouvelle lucarne par laquelle la Raymondine nous fait entrevoir la réalité de la guerre au xiiie siècle.
22La conception qui s’y dévoile fut endossée par la majorité des sommistes et par quelques théologiens. Mais l’architecture initiale, assez compliquée, par laquelle Raymond avait relié la formule augustinienne à la question des restitutions se transformera dès Monalde en une plane casuistique :792 si bien que les conclusions, rapportées par Raymond à des personnes distinctes, seront peu à peu appliquées à l’unique personne du combattant. C’est ce qui se constate chez Gabriel Biel793 et, mieux encore, chez Sylvestre de Prierio.794 Les deux arguments du doute et de l’erreur, distincts chez Raymond, concernent ici le soldat, non sans qu’il en naisse une apparence incongrue. Cela n’empêchera pas Francisco Arias de leur emboîter le pas deux décennies plus tard.795 C’est Vitoria seulement qui, peu après, ramènera la question à une clarté nouvelle : il maintiendra le double argument du doute et de l’erreur, mais saura en faire une synthèse véritable.796
3. Les feudistes et le devoir de suite du vassal
23Avant d’en revenir à cette perspective élargie, examinons encore une autre catégorie de juristes médiévaux, ceux du for externe. Le devoir d’obéissance des sujets ne semble à vrai dire pas avoir préoccupé outre mesure les commentateurs du corpus byzantin ; mais il en allait différemment des feudistes, dont les compilations faisaient état d’une norme topique sur le devoir de suite du vassal.797 Ce dernier y est confronté successivement à trois hypothèses, qui correspondent à celles envisagées par Raymond. La réponse est simple dans les deux premiers cas, guerre juste et licéité douteuse : le devoir de suite y est absolu ; opinion confirmée par le commentaire de Balde.798 Le cas de la guerre injuste suscite en revanche des réponses nuancées et divergentes, qui se reflètent déjà dans le coutumier lui-même. Balde est cependant catégorique : défense absolue, dans ce cas, de suivre le seigneur.799 En pratique le conflit ne devait pas être simple à trancher : il en allait pour le vassal moins de sa conscience et des restitutions censées en apaiser les « morsures », que de son fief ; celui-ci comportait à titre principal le devoir de suite, et toute défection risquait d’être jugée comme félonie, entraînant sa perte. L’opinion tranchée de Balde devait paraître subversive pour un tenant de la féodalité ; mais elle ne surprend guère de la part d’un juriste inféodé au pouvoir impérial.
24Le thème sera amplifié par Jean de Lignano, qui y consacre une section entière de son traité.800 Parmi les personnes « accédant » à la guerre, il distingue celles qui remplissent une obligation et celles qui le font de leur libre volonté : on retrouve la distinction faite par Guillaume de Rennes, si ce n’est qu’elle s’applique ici au for externe et emporte des conséquences différentes. A son habitude, Jean s’adonne à une longue casuistique, dont il est plus difficile de dégager des principes généraux que ce ne fut le cas des brèves remarques de Balde. Son exposé représente en somme une extension du commentaire d’Innocent IV à la décrétale Sicut et infra, qui avait soulevé précisément la question des rapports entre le belligérant engagé dans une guerre injuste et ses auxiliaires, spécialement au point de vue de leurs pertes matérielles.801
25L’exposé de Jean répond à des situations concrètes, sans doute quotidiennes à son époque. Voilà qui explique la grande audience dont il jouira par la suite auprès des juristes des deux fors et même de plusieurs théologiens qui en feront état à côté de la casuistique issue de la Raymondine. Ainsi Ange de Clavase puise-t-il chez lui des arguments à l’appui du devoir de suite en cas de guerre juste, chez Raymond en cas de guerre injuste ou douteuse.802 La casuistique de Jean se retrouve tout entière chez Sylvestre de Prierio, avant qu’il n’en vienne, comme on l’a montré, aux cas de conscience de la Raymondine.803 Chez Antonin de Florence, la casuistique de Jean prend le pas sur celle de Raymond, devenu lieu commun mentionné en passant.804 Gabriel Biel livre des deux points de vue une synthèse nouvelle,805 repensée de l’intérieur mieux que ne le feront peu après les remarques de John Mair.806 Les deux courants se mélangeront encore chez certains juristes du xvie siècle, tels Francisco Arias807 et Pierino Belli.808
4. La discussion de principe des théologiens
26Ainsi, le problème général soulevé par le texte augustinien, celui de l’obéissance due aux injonctions du pouvoir constitué, fut pour ainsi dire canalisé par les juristes médiévaux et n’apparaîtra plus qu’en fonction de quelques points d’une importance pratique aussi élevée qu’ils étaient d’une envergure philosophique restreinte.809 Ce sont les théologiens surtout qui maintinrent au problème son ampleur augustinienne. Tel est le cas d’un Alexandre de Hales, dont nous avons déjà dit qu’il demeure l’un des auteurs les plus authentiquement augustiniens du xiiie siècle, notamment grâce aux notions d’ordo et de potestas ordinata. Sans doute est-il conforme à la pensée de l’évêque d’Hippone de dissocier, au sein de l’ordo potestatis, d’une part l’auctoritas, qui, même tyrannique, demeure toujours « ordonnée », et d’autre part l’executio, qui sera « ordonnée » ou non, suivant que l’on considère l’effectus ou l’affectus, sans que son « inordination » ne porte atteinte à l’auctoritas du pouvoir dont il émane.810 Il est vrai qu’Alexandre ne soulève pas plus qu’Augustin lui-même le cas de l’ordre ouvertement sacrilège et semble même vouloir le réserver.
27Quant à saint Thomas, il traite le problème de l’obéissance sous un biais général, en dehors de la guerre, au titre de vertu rattachée à celle de justice,811 comme le fait du reste Ulrich de Strasbourg,812 sous l’influence sans doute de leur maître commun. Cette place systématique est importante à plusieurs points de vue : elle constitue une sorte de carrefour où se rejoignent la voie aristotélicienne et la voie patristique ; elle déterminera ainsi grandement l’angle sous lequel le xvie siècle, et par la suite Grotius lui-même, aborderont la question. De là cette fusion particulière et cette oscillation constante entre l’obéissance due « naturellement » par l’esclave antique, comme si elle relevait d’une nécessité inéluctable d’ordre physique, et l’obéissance non moins « naturelle » due par le subordonné chrétien au supérieur divinement institué,813 étant entendu que, comme chez Grotius, cette dernière composante est décisive. De là aussi cette position mesurée quant à l’étendue du devoir d’obéir ; contrairement à d’autres, Thomas soulève en termes exprès la question de l’ordre contraire à une norme divine.814 Grotius y glanera les pièces maîtresses de sa solution.
28Le problème plus spécial de la participation dans la guerre injuste ou douteuse se vit cependant, lui aussi, restituer dès la fin du xve siècle une partie de sa dimension augustinienne ; de façon significative, c’est encore chez les théologiens que s’esquissa ce mouvement ; aspect particulier, sans doute, de la faveur croissante qu’ils portaient aux questions que nous comprenons dans la notion de probabilisme.815 C’est ce dont témoigne une importante question quodlibétale du futur pape Adrien vi, « disputée en l’an du salut humain 1491 ».816 Le thème en est l’obéissance à un ordre dont la régularité est douteuse. Des trois arguments qui la composent, le deuxième est ici d’une pertinence immédiate : faut-il obéir à un ordre dont l’exécution entraîne selon toute probabilité un péché mortel ? 817
29On le voit, Adrien confère à la question une tournure générale. La guerre n’y figure qu’à titre d’exemple, et s’il mentionne la formule topique d’Augustin818 c’est pour lui rendre son ampleur primitive, en la faisant échapper à la châsse exiguë des restitutions où l’avaient enserrée les sommistes. C’est dans cette ouverture qu’il faut voir l’importance du texte d’Adrien, ainsi que dans la discussion qu’il soulèvera parmi les théologiens. Voilà son principal mérite, car par ailleurs l’excès de subtilités le rend assez obscur ; et son latin, guère supérieur à celui de Luther, ne contribue en rien à l’éclaircir : le tout est un exemple éloquent du niveau atteint par la scolastique médiévale, après les sommets lumineux du xiiie siècle. Adrien nous avertit du reste d’entrée de cause, en annonçant que la question est si complexe qu’à vouloir trancher l’un de ses nœuds on en fait naître sept autres.819 Pourtant occupé à terrasser le monstre il ne rend pas le problème plus limpide. Du reste pour autant que nous puissions en juger il ne s’écarte pas de la doche reçue d’Augustin et de Gratien, invoquée à plusieurs reprises.
30Ceux des contemporains qui se sont aventurés dans cette selve obscure n’ont d’ailleurs pu s’accorder en tous points sur le sens du cheminement d’Adrien. Vitoria croit y percevoir une critique implicite de la position augustinienne : alors que le canon Quid culpatur permettait au soldat de faire la guerre malgré un doute sur sa cause, Adrien la lui interdirait si un péché mortel menaçait d’en résulter pour son âme.820 Il est vrai qu’un passage du Quodlibet semble aller dans ce sens-là,821 impression renforcée par la possibilité que suggère Adrien de « déposer le doute » d’une manière ou d’une autre. Inspiré peut-être par la Summula de Cajetan822 – qui ne fait pas état du Quodlibet –, Vitoria souligne avec vigueur l’écart entre la situation du subordonné et celle du supérieur.823 Par là il entend rétablir la doctrine augustinienne, en lui conférant une tournure plus ample et plus simple que ne l’avaient fait les sommistes à la suite de Raymond de Peñafort. Malgré l’importance pratique qu’elle devait garder au xvie siècle, la casuistique médiévale relative aux restitutions et au tiers acheteur devient ici accessoire. Au-delà même du canon Quid culpatur et de saint Augustin, Vitoria ouvrira un horizon nouveau, en posant la question du doute non plus seulement au sujet des subordonnés, mais à propos des chefs eux-mêmes : on y reviendra un peu plus loin.824
31Pour l’instant, suivons son raisonnement en tant qu’il concerne les subordonnés : soit plusieurs parties du premier groupe de dubia qu’il soulève, dans la Relectio de iure belli, à propos de la juste cause de guerre.825 Il y pose deux questions principales : celle du devoir de diligence et celle du degré de certitude requis pour légitimer la guerre :826 soit le problème de l’ignorance et de l’erreur, d’une part, celui du doute, de l’autre, tous deux suscités par la Raymondine et progressivement mêlés par la suite. Il répartit les subordonnés en deux catégories majeures, à raison de leur éloignement du centre de délibération et de décision, cette distance étant elle-même fonction de leur condition, de leur estat. D’un côté on trouve ainsi les personnes admises au conseil du prince, de l’autre celles qui en sont exclues.827
32Les premières sont assimilées dans une large mesure au prince lui-même, comme le seront les socii de Grotius : leur devoir de diligence est donc pareil, sans que leur devoir d’obéir ne saurait les excuser : ils pourront invoquer dans une certaine mesure l’argument de l’erreur, mais non celui du doute.828 Quant aux subordonnés mineurs – représentant numériquement la grande majorité – leur devoir de diligence n’emporte aucune obligation positive de s’enquérir : leur participation à la guerre sera légitime toutes les fois qu’elle ne s’accompagne soit d’une ignorance inexcusable, soit de la certitude de l’injustice de la guerre.829 Le simple doute ne les dispense donc pas du devoir d’obéir. A son habitude, Vitoria étaie le raisonnement d’un rosaire d’arguments pragmatiques. Avec un réalisme digne à la fois d’un confesseur et d’un penseur nourri d’aristotélisme thomiste, il fait dépendre l’obligation des sujets de leur condition réelle dans la cité et en particulier des possibilités effectives qu’ils ont de connaître et d’influencer la situation.
33Contre l’avis d’Adrien, véritable ou supposé, Vitoria réaffirme donc la tradition augustinienne. Le soldat ne peut certes pas faire totalement abstraction de la cause de guerre ; il est même tenu de refuser son service lorsqu’elle est manifestement insuffisante ou inexistante. Mais, si le simple doute sur la légitimité de la cause fait obstacle au droit de guerre du supérieur, il n’annule pas le devoir d’obéir du subordonné : de l’incertitude sur la cause de guerre, Adrien a donc tiré des conséquences exagérées quant à la validité de l’allégeance politique en général.830
34Augustin, Thomas, Adrien, Sylvestre, Cajetan et Vitoria : tels sont les principaux noms autour desquels s’articulera la discussion de ce problème parmi les théologiens de la fin du xvie siècle. Presque tous ils prennent position à l’égard du fameux Quodlibet. L’interprétation critique de Vitoria fut suivie par Banez et Suarez, bien qu’en des termes un peu renouvelés. Ils distinguent – selon une terminologie introduite par Cajetan831 – entre le doute spéculatif et le doute pratique, seul ce dernier entraînant de véritables conséquences dans l’ordre de la conduite ; or le cas imaginé par Adrien ne représenterait qu’un doute spéculatif et laisserait donc intact le devoir d’obéir.832 Grégoire de Valence en revanche ne s’accorde pas avec la critique de Vitoria : le Quodlibet, dont il juge certes les acrobaties inutiles, serait au demeurant conforme à la meilleure tradition, puisque Adrien aurait limité son raisonnement à l’hypothèse d’un doute pratique.833 Pour autant que l’obscurité du Quodlibet nous permette d’en juger, nous inclinons dans le sens de Grégoire ; la critique de Vitoria, dont il n’est d’ailleurs pas clair quelle partie elle vise,834 nous semble porter à faux.
35Autre problème agité par les théologiens du xvie siècle : la différence entre le statut des subordonnés véritables et celui des mercenaires face à une cause de guerre incertaine. Peut-être n’est-ce pas fortuit si cette question, soulevée déjà par Guillaume de Rennes,835 a trouvé une actualité renouvelée au début des temps modernes. Plus que tous les autres, Cajetan accentue la différence, en des termes qui auront une longue résonance : d’un côté il range les sujets, ainsi que les étrangers engagés avant la guerre, de l’autre, les étrangers soudoyés à l’occasion du conflit. Pourtant il n’en balaye pas moins d’un coup sa propre distinction et condamne en bloc tous ceux qui, « sujets ou non, se ruent à la guerre au son de l’argent, sans s’inquiéter de sa justice ».836 On trouve un passage analogue dans le commentaire de Vitoria à la Quaestio de bello837 mais qui n’a point passé dans la Relectio. Peut-être est-ce pourquoi Suarez, qui consacre à ce point une discussion nourrie, crut percevoir dans cette absence de distinction la position de Vitoria, qu’il finit par adopter pour des raisons pratiques.838 Tous les autres théologiens espagnols maintiennent en revanche la séparation traditionnelle entre sujets et mercenaires.839
5. Les limites du devoir d’obéissance et le statut de combattant régulier chez Grotius
36A les considérer sur cet arrière-fond scolastique, on s’aperçoit que les thèses grotiennes dont nous avons déjà constaté les origines surtout chrétiennes, s’inscrivent plus précisément dans la tradition fixée par Augustin, Thomas et Vitoria. Le courant collatéral feudiste et légiste n’apparaît qu’en sourdine ; et Grotius écarte, en ce débat de principe, toute considération sur le problème des restitutions. Sa formule conclusive, précédée immédiatement de la phrase topique Ergo vir iustus qu’il cite dans sa forme canonisée,840 représente de celle-ci une version simplifiée : svbditis id bellvm ivstam habet cavsam qvod ivbetvr a svperiore dvm ratio probabilis svbditorvm non repvgnet.841 L’orientation est à vrai dire nouvelle sur un point important, auquel on reviendra tout à l’heure ; mais pour l’essentiel on y reconnaît bien le principe de l’obéissance au pouvoir constitué, avec la limite importante du cas où les ordres sont contraires à une norme supérieure : la casuistique d’Augustin est ramenée à la règle sous-jacente telle que Thomas l’avait mise en lumière.
37Au reste, la nature spécifiquement chrétienne de ce devoir d’obéissance s’éclaire surtout à partir de sa limite, cette ratio probabilis qui figure dans la seconde partie de la formule et y fait office en quelque sorte de garde-fou. Il nous faut maintenant préciser le sens de cette expression déjà signalée, sens qui se dévoile à mesure que l’on retrace le cheminement de Grotius à travers les tâtonnements et les corrections dont abonde cette partie de son manuscrit. D’ailleurs, la genèse de la notion de ratio probabilis est d’autant plus importante à suivre qu’elle paraît liée à l’un des problèmes les plus délicats de la construction du Mémoire et qui nous occupera encore plus bas.842
38A l’origine, brossant les grandes lignes de sa thèse relative à l’action du subordonné, Grotius parle seulement de ratio, sans l’accompagner de l’adjectif probabilis : cette ratio, nous dit-il en cet endroit, ne doit pas être heurtée par la voluntas du supérieur dont émane l’ordre.843 Un peu plus loin il précise le sens général du ratio repugnat : la raison du subordonné est censée « répugner » à un ordre qui viole une norme supérieure.844 Suivant la règle de conflit posée dans les prolégomènes,845 la nonne supérieure devra prévaloir ; et Grotius de reconnaître implicitement qu’il n’a fait que revêtir d’un habit rationaliste le vieux topos chrétien faisant primer l’obéissance à Dieu sur celle due aux hommes.846
39Suivent alors les deux hypothèses de l’ordre manifestement illicite et de l’ordre douteux, résolues toutes deux selon la tradition. Dans la première, la « répugnance » est clairement réalisée et doit entraîner le refus de l’ordre.847 Quant à la seconde, Grotius la tranche dans le sens de Vitoria, contre l’avis supposé d’Adrien : le doute sur la cause matérielle ne saurait faire fléchir le devoir d’obéissance, qui demeure intact toutes les fois que la ratio ne s’y oppose point, à supposer même que l’ordre soit en partie illicite.848 A ce doute, il n’attache donc qu’une portée « spéculative » et non « pratique », pour reprendre la terminologie de Cajetan.
40Aussitôt surgit cependant une idée nouvelle et décisive : elle se rattache à la réflexion vitorienne, toute négative et implicite, sur la distance qui sépare le subordonné du centre de décision. Ce motif, Grotius le reformule de manière positive par le truchement d’une présomption : en cas de doute, affirme-t-il, les ordres doivent être présumés conformes aux lois primant le droit positif.849 Or, c’est là, et là seulement, que survient l’adjectif probabilis. Il est certainement dû à une seconde inspiration, puisqu’il apparaît dans un rajout, au bas du folio 34, écrit en caractères irréguliers mais différents et plus serrés que ceux du corps du texte.850 L’addition paraît en tous cas postérieure à la rédaction du chapitre viii, puisque le probabilis est également rajouté dans cinq des formules qui, jusqu’à ce moment, ponctuent les temps de la démonstration, parmi lesquelles celle-là même que nous examinons en ce moment.851
41L’expression ratio probabilis, qui figure, en un sens un peu différent il est vrai, dans les Offices de Cicéron,852 s’est donc formée en deux temps distincts. Certes, à ne considérer que le résultat de l’opération, l’adjectif paraît seulement rendre plus explicites, au niveau de la conscience du subordonné, les conséquences de la présomption qui vient d’être établie. Mais pour autant que les strates rédactionnelles du manuscrit permettent d’en juger, ce n’est là que l’aboutissement d’un détour plus compliqué : d’une rétroaction partie, semble-t-il, du feuillet rajouté 53’a, dont on verra plus loin qu’il constitue une sorte de centre névralgique dans le système du Mémoire.853 On y retrouve la même écriture qu’au bas du folio 34 : selon toute vraisemblance, les deux rajouts sont contemporains, bien qu’il faille à notre avis accorder une préséance chronologique à celui qui suit dans l’espace.854 Ce dernier figure tout à la fin du chapitre viii, et Grotius y introduit quelques remarques sur les legitimi hostes, à savoir les combattants réguliers, définis comme ceux qui probabilem magistratuum auctoritatem sequuntur.855 Or, ici, l’adjectif probabilis, qui incarne bien l’idée de présomption, n’a pas été rajouté après coup. Il semble en revanche avoir été rajouté aussitôt dans la formule conclusive de la fin du chapitre viii :856 d’où la constitution initiale de l’expression ratio probabilis. C’est de là que semble être partie ensuite la vague de corrections signalée plus haut. Sans qu’on puisse le prouver de manière péremptoire, telle est la genèse vraisemblable de l’expression ratio probabilis.
42Ce thème central s’accompagne de plusieurs motifs voisins, plus discrets mais non moins importants, tirés de la scolastique. L’idée de la présomption en faveur de la licéité des ordres du magistrat se rencontre chez les juristes.857 Parmi les théologiens, Soto utilise le terme dans le contexte même de la guerre.858 A plusieurs reprises Grotius renvoie aussi à l’autorité, présente dans tout le Mémoire, de saint Thomas. D’abord pour caractériser le type de certitude requise en matière morale, à savoir cette certitude relative propre à un témoignage en justice, probabilis certitudo ou coniecturalis probabilitas859 que Thomas oppose à la certitude absolue d’une démonstration rationnelle. Puis Grotius renvoie à la question consacrée par le Docteur angélique au rôle joué par l’ignorance dans l’atténuation d’un péché, en tant qu’elle obnubile l’une de ses conditions, la raison : ce qui nous fait déboucher sur le problème de l’erreur tantôt invincible et partant excusable, tantôt inexcusable parce que « crasse et supine ».860
43Tout cela fait apparaître à l’évidence la continuité par rapport à la tradition patristique et scolastique ; mais aussi le parti assez personnel que Grotius en tire. Nulle part, d’ailleurs, son originalité ne perce mieux que dans sa manière générale de concevoir la justification de l’action des subordonnés, bien que, dans le meilleur esprit scolastique, cette nouveauté s’insinue de façon presque imperceptible, au point que notre auteur paraît se borner à éclairer une zone d’ombre, afin d’exposer en pleine lumière un mécanisme demeuré implicite chez ses prédécesseurs.
44Car ceux-ci n’avaient certes pas manqué de différencier les situations juridiques respectives des chefs et des subordonnés : saint Augustin l’avait exprimé avec force, et les scolastiques en ont tenu compte, comme l’indique la Relectio vitorienne. Toutefois, en dépit de cette différenciation et par delà leurs multiples formulations, ils n’ont cessé de raisonner par rapport à une seule cause matérielle : justifiant à la fois l’action des chefs et l’action des subordonnés, celle-ci valait immédiatement à l’égard de toutes les personnes impliquées dans la guerre. La faveur relative dont bénéficient les subordonnés résulte uniquement de ce que nous avons appelé leur éloignement du centre de délibération et de décision : percevant la réalité politique comme à travers un voile, ils doivent présumer la légitimité de la guerre déclenchée par leurs chefs ; les ordres qu’ils reçoivent de leur part ne sont que les supports de cette présomption : la vraie cause justificatrice de leur action réside bien dans l’injustice adverse.
45Cette relation, Grotius la renverse. L’injustice ennemie n’est plus aux yeux des subordonnés que la cause lointaine et indirecte : leur cause matérielle véritable réside dans les ordres reçus de l’autorité constituée. Sans doute atténue-t-il aussitôt la nouveauté en maintenant à la cause lointaine une importance au moins négative par le jeu de la ratio probabilis, le subordonné n’étant tenu de prendre note, paradoxalement, que de la futilité ou de l’inexistence évidentes de cette cause. Toutefois, même conditionnés de la sorte, les ordres des supérieurs sont davantage, dans son système, qu’un simple relais. Ils y tiennent une place autonome et accèdent à une consistance propre, en devenant la cause matérielle des actions de toute une catégorie d’individus. Il en naît, chose décisive, un véritable statut, qui constitue les sujets en iusti hostes, en combattants réguliers.861 Leur situation ne s’explique et ne se justifie de manière satisfaisante qu’à la condition, remplie précisément par Grotius, que l’on dissocie la cause matérielle de la guerre et celle de leur action individuelle. Bien plus que simple reformulation, ce revirement se révélera d’une importance décisive en ce qu’il permettra de mieux expliquer certains aspects du droit de guerre : Grotius en a conscience et ne manque pas de le relever discrètement.862
46De cette dissociation de la materia circa quam résulte en effet une relative indépendance entre la justification globale de la guerre, qui ne regarde que les chefs, et celle des actes accomplis par les subordonnés. Cela se répercute aussitôt sur les régimes respectifs de la materia in qua, soit le cercle des objectifs licites. Ces objectifs, avons-nous dit, se présentent en principe de semblable manière aux chefs et aux subordonnés et devraient en théorie coïncider.863 Pourtant, à supposer même une coïncidence parfaite, il n’en resterait pas moins qu’un même objectif serait visé à deux titres distincts : en tant qu’auteurs ou fauteurs de l’iniuria par les chefs ; par les sujets, en tant qu’objets d’un commandement. Mais en pratique un écart viendra souvent s’interposer entre ces deux points de vue : dans ce cas, même si l’ordre engage la responsabilité du chef, il n’en est pas moins valable aux yeux du subordonné, pourvu que son illicéité ne soit point flagrante.
47C’est ce qui permet à notre auteur d’expliquer en particulier comment l’action du soldat reste licite même en se dirigeant contre des innocents. Théoriquement, le soldat se voit alors pris dans un dilemme entre deux actes illicites, le dommage infligé à un innocent et la désobéissance envers son supérieur : dans les deux hypothèses, bien qu’à des titres différents, son comportement est tout à la fois juste et injuste. Mais comme c’est dans l’ordre du supérieur que son acte trouve sa justification matérielle, c’est à son devoir d’obéir qu’il doit accorder la préséance. Cela couvre, à son point de vue, l’injustice commise envers la victime innocente : on ne saurait l’accuser d’homicide ou de quelque autre forfait, il jouit d’une sorte d’impunité au moins conditionnelle. Grâce à la dissociation des causes matérielles, Grotius parvient mieux que ses devanciers à expliquer la situation paradoxale du combattant régulier, la limite de son privilège étant toujours l’ordre criminel, auquel sa conscience doit « répugner » : ivstvm est bellvm svbditis in eos qvos svperiores bello peti ivbent ratione probabili svbditorvm non repvgnante.864
Notes de bas de page
751 Cf. supra, pp. 149-150.
752 IPC, fol. 32 (p. 75).
753 IPC, foll. 32’-33 (pp. 75-77).
754 Cf. infra, pp. 199-203.
755 IPC, foll. 33-34 (pp. 77-80).
756 Qu’il suffise ici d’écarter une interprétation possible et tentante pour le lecteur moderne : n’y voit-on pas en effet s’ébaucher la séparation de deux sphères juridiques distinctes, celle du droit international, dont les sujets exclusifs sont les Etats et leurs gouvernants, et celle du droit interne, qui s’adresse aux particuliers ? Sans doute y a-t-il là une correspondance possible. En ce sens, Ayala et Gentili avaient bien fait aussi un clair départ entre le droit de la guerre au sens propre et le droit militaire : les trois livres du traité d’Ayala ont pour objet respectivement le ius belli au sens étroit, la prudence politico-militaire dans le style de Machiavel, et la disciplina militaris ; quant à Gentili, cf. De iure belli, i, 1, en part. p. 3. Pourtant, bien qu’il reconnût la distinction entre le droit « civil » et ce qui le dépasse, Grotius n’a dû y songer que très accessoirement. Que là n’ait pu être sa visée principale dans le présent passage nous est attesté par le simple fait que son raisonnement, une fois de plus, vaut pour la guerre privée autant que pour la guerre publique ; car, lors même qu’il avait raisonné d’abord surtout par rapport à la guerre publique, il n’en rétablit pas moins le parallélisme avec la guerre privée par une phrase rajoutée au bas du folio 34 (p. 80 i. pr.) ; il ne peut cependant s’agir que d’un rappel, puisque ce parallélisme est en fait sous-jacent à tout le chap. vii ; cf. supra, p. 149.
757 Ethique, v, 1135. Cf. Thomas de Aquino, S.T., ii, ii, 58, 1, 3 et 4.
758 Aristote, Politique, i, 1253 b-1255 a et 1259 a-1260 b.
759 Ethique, v, 1129 a-1130 a.
760 Thomas de Aquino, S.T., ii, ii, 58, 5 et 6 ; ii, ii, 61, 1. Cf. en part, les commentaires de Cajetan et de Vitoria relatifs à ces passages.
761 Ethique, v, 1134 a-1134 b ; 1160 b ss. Politique, i, 1254 a ss ; 1259 b ss.
762 Politique, i, 1259 b ; Ethique, v, 1134 a.
763 Politique, i, 1259 b ss.
764 IPC, fol. 33 (p. 76).
765 Ibid.
766 Carlyle, Mediaeval Political Theory, vol. i, pp. 6 ss, 20 ss et 45 ss.
767 Ibid., pp. 111 ss.
768 Ibid., pp. 125 ss.
769 Epitre aux Romains, xiii, 1-7 ; cf. Carlyle, op. cit., pp. 93 ss.
770 I Pierre, ii, 13-17.
771 Carlyle, op. cit., pp. 125 ss.
772 Cf. supra, pp. 139 et 146.
773 Cf. l’usage qu’en fera p. ex. Alexandre de Hales, infra, p. 195.
774 Cf. supra, pp. 86 ss et p. 155.
775 Cf. supra, p. 87.
776 « Cum ergo vir iustus, si forte sub rege homine etiam sacrilego militet, recte possit illo iubente bellare civicae pacis ordinem servans ; cui quod iubetur, vel non esse contra Dei praeceptum certum est, vel utrum sit, certum non est, ita ut fortasse reum regem faciat iniquitas imperandi, innocentem autem militem ostendat ordo serviendi : quanto magis in administratione bellorum innocentissime diversatur, qui Deo iubente belligerat, quem maie aliquid iubere non posse, nemo qui ei servit ignorat. » Contra Faustum, xxii, i, 74, i. f., PL, 42, col. 448.
777 Cf. infra, p. 191, note 783.
778 De civitate Dei, i, xxi.
779 Cf. supra, pp. 16-17.
780 Louis J. Swift, « Augustine on War and Killing : Another View », HTR, 66 (1973), pp. 369-373.
781 Ibid.
782 Cf. supra, p. 189, note 773. Cette relative indépendance entre le devoir général d’allégeance et le devoir d’obéissance dans un cas d’espèce affleure du reste dans la période citée supra, note 776.
783 « Sed si humana cupiditate bellum geritur, non nocet sanctis, in quos non habet quisquam potestatem, nisi desuper datam. Non enim est potestas, nisi a Deo, siue iubente siue sinente. Ergo uir iustus, si forte etiam sub rege, homine sacrilego, militet, recte potest illo iubente bellare, si, uice pacis ordinem seruans, quod sibi iubetur uel non esse contra Dei preceptum, certum est, uel utrum sit, certum non est, ita, ut fortasse reum faciat regem iniquitas inperandi, innocentem autem militem ostendat ordo seruiendi. » Gratianus, Decretum, C. 23, i, 4, § 11.
784 Cf. supra, p. 88, note 169.
785 Cf. supra, notes 776 et 783.
786 Monaldus, Summa perutilis, § De restitutione emptorum & de rapina, i. pr., fol. 219v.
787 Raymundus de Pennafort, Summa de casibus. II, De raptoribus, § 22 (= 23), inc. Sed quid si ille, pp. 193 ss.
788 Ibid., pp. 194 s.
789 Ms. Bâle B ix 35, fol. 166r ; cf. Dig., 22, 6, 6.
790 Guilielmus Redonensis, Apparatus, ad Summa de Casibus, ii, § 22 ( 23), (in tertio), p. 194.
791 Ibid., (excusatur), pp. 194-195.
792 Monaldus, Summa perutilis, § De restitution emptorum & de rapina, foll. 219 ss.
793 G. Biel, Collectorium, iv, xv, art. 2, concl. 4 et 7.
794 Summa sylvestrina, vo Bellum i, n. 10.
795 F. Arias, De bello et eius iustitia, nn. 163 ss.
796 Cf. infra, pp. 196-197.
797 Consuetudines feudorum, ii, 28.
798 Baldus de Ubaldis, Opus aureum super feudis, s. l., 1497, ad Consuetudines feudorum, ii, 28, § Nota ergo.
799 Ibid., § Et est tertius casus. Il va même jusqu’à qualifier de pecora Obertus de Orto et Gerardus Capagistus, pour avoir soutenu que le vassal devait assister son seigneur dans une guerre injuste de défense.
800 De bello, capp. xxxi ss.
801 Innocens IV, Apparatus, ad Decretales, ii, 24, 29. Pour une reconstitution conjecturale des faits à la base de cette décrétale, cf. Panormitanus, Commentaria, ad eumdem loc. ; pour une pénétrante interprétation de ce passage, cf. F. H. Russell, The Just War, pp. 149 ss.
802 Angelus de Clavasio, Summa Angelica de casibus conscientiae, Nuremberg, 1492, vo Bellum, nn. 7-9.
803 Summa sylvestrina, vo Bellum i, nn. 7-10.
804 Antoninus Florentinus, Summa maior, iii, iv, 2, § 2 et ss.
805 G. Biel, Collectorium, iv, xv, iv, 2.
806 I. Maior, In Quartum Sententiarum quaestiones, xv, 20, concl. 4.
807 F. Arias, De bello et eius iustitia, nn. 163 ss.
808 P. Bellus, De re militari et bello, ii, iii, foll. 31 et ss.
809 Relevons cependant, en sens inverse, la glose suivante de Jean le Teutonique au Décret de Gratien : « Hic habes quod (licet) dominus peccet precipiendo tamen subditus non peccat obediendo… Item habes hic quod in dubiis semper est obediendum… Item est hic (argumentum) quod in dubiis humanior & tutior via est eligenda… Jo. » Ad D.G., C. 23, i, 4 ; selon Cod. Pal. lat. 624, fol. 193.
810 A. de Haies, Summa theological, iii, n. 467, pp. 686-687. Cf. également supra, p. 189, note 773.
811 Thomas de Aquino, S.T., ii, ii, 104 et 105.
812 Ulricus Argentinensis, Liber de summo bono, vi, iv, 15 (selon la table des matières de l’éd. Daguillon).
813 Thomas de Aquino, S.T., ii, ii, 104, 1, corp.
814 Ibid., ii, ii, 104, 5, corp.
815 Sur cette notion, voir en particulier les articles de Jacques de Blic et de A. Vermeersch, in: Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 4e éd., Paris, 1928, iv, coll. 301-361, ainsi que la littérature qui s’y trouve indiquée.
816 Hadrianus VI, Questiones quodlibeticae xii, Paris, 1527, foll. 24 ss.
817 Ibid., fol. 24y et fol. 32v.
818 Ibid., foll. 30 ss.
819 Ibid., fol. 24r.
820 De iure belli, nn. 30, i. f., et 31.
821 Op. cit., fol. 33’. Cf. aussi, du même, Quaestiones in sacramentis in quartum Senten-tiarum librum, Rome, 1522, De sacramento penitentie, De restitutione, § Aggredior casus speciales, fol. 49r.
822 Caietanus, Summula, Lyon, 1581, pp. 33-34.
823 De iure belli, n. 31.
824 Cf. infra, pp. 209 ss.
825 De iure belli, nn. 20 ss.
826 Ibid., nn. 22 et 30-31.
827 Ibid., nn. 24 et 25.
828 Ibid., n. 24.
829 Ibid., nh. 25-26.
830 Ibid., n. 31.
831 Jacques de Blic, « Probabilisme », col. 316.
832 D. Banez, De fide, spe, et charitate, xl, 1, Dubitatur sexto ; F. Suarez, Opus de triplici virtute, xiii, vi, i. pr. et n. 9.
833 G. de Valentia, Commentaria theologica, vol. iii, iii, xvi, ii, 5o et 6°, col. 714. Il admet cependant « qu’Adrien semble avoir confondu ces diverses manières de douter, comme Vitoria l’a relevé ». Ibid.
834 II renvoie au premier argument d’Adrien, mais sa critique porte bien plutôt sur le second ; tandis qu’un peu plus bas il paraît s’en prendre au troisième ; De iure belli, nn. 30 i. f. et 31.
835 Cf. supra, p. 193, note 791.
836 Caietanus, Summula, § Bellum, quando dicatur iustum, vel iniustum, licitum vel illicitum, p. 34.
837 F. de Victoria, Commentarios, ad S.T., ii, ii 40, 1, n. 8 i. f.
838 F. Suarez, Opus de triplici virtute, vi, vi, nn. 10-12.
839 D. Bañez, De fide, spe et charitate, xl, 1, Dubitatur sexto, coll. 1363-1366. G. de Valentia, Commentaria theologica, vol. iii, iii, xvi, ii, 5o et 6°. L. Molina, De Iustitia et Iure, ii, cxiii et cxiv.
840 IPC, foll. 34-34’ (p. 80).
841 IPC, fol. 34’ (p. 80).
842 Cf. infra, pp. 358 ss.
843 IPC, fol. 32’ (p. 75).
844 IPC, fol. 33 (p. 77).
845 Il s’agit de la lex xii, IPC, fol. 13’ (p. 29); cf. aussi infra, Annexe i.
846 IPC, fol. 33 (p. 77).
847 Ibid.
848 IPC, fol. 33’ (p. 78).
849 IPC, foll. 33’-34 (pp. 78-79).
850 IPC, fol. 34 i. f. (p. 80 i. pr.)
851 IPC, foll. 34 (p. 80), 35’ (82), 36 (84), 52’ (119), 53’ (122).
852 De officiis, i, (3) 8. Cicéron y applique l’expression aux devoirs « moyens » ; sa phrase contient en un sens toute l’idée du probabilisme.
853 Cf. infra, pp. 377 ss, ainsi que Annexe iii.
854 Sur l’ensemble de la question, cf. infra, pp. 358 ss.
855 IPC, fol. 53’a (p. 121).
856 IPC, fol. 53’ (p. 122). Cf. aussi infra, Annexe iii.
857 Cf. en particulier Panormitanus, Super secundo decretalium, ad Decretales, ii, 24, 29, nn. 12-13.
858 D. de Soto, De iustitia et iure, v, i, vii.
859 Thomas de Aquino, S.T., ii, ii, 70, 2, corp. ; ii, ii, 105, 2, ad 8.
860 Op. cit., i, ii, 76, 1-4.
861 IPC, fol. 36 (pp. 83-84) et fol. 53’a (p. 121).
862 IPC, fol. 36 i. f. (p. 84).
863 Cf. supra, p. 150.
864 IPC, fol. 35’ (p. 82).
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