L’empowerment des femmes contre la viabilité ? Vers un nouveau paradigme dans les programmes de micro-crédit
p. 73-97
Note de l’auteur
Cette présentation s’appuie sur les résultats d’un projet de recherche pilote financé par le Small Enterprise Development Fund, DfID-UK, et coordonné par Action Aid et un comité d’organisation d’ONG britanniques comprenant ACORD, CAFOD, CARE-International, Christian Aid, Friends of ASSEFA, Oxfam, Oportunity Trust, Save the Children, WOMAN-KIND et World Vision. Il résume un article plus long (Mayoux, 1998).
Texte intégral
1Le financement des programmes de micro-crédit au bénéfice d’un grand nombre de femmes va augmenter dans les années 1990, sous l’impulsion du CGAP1. La littérature préparée à l’occasion du sommet pour le micro-crédit, à Washington en février 1997, ainsi que de nombreuses déclarations de crédit des donateurs et des propositions de crédit émanant des ONG présentent de façon très positive des programmes de micro-crédit. Ces programmes sont de plus en plus nombreux, touchent une population de plus en plus large, et sont souvent financièrement indépendants ; un grand nombre de femmes en sont les bénéficiaires, et ces programmes contribuent grandement à la réduction de la pauvreté et à l’empowerment des femmes. Pourtant, en parallèle, et souvent en marge, de ce courant d’enthousiasme, certains chercheurs ont remis en cause ce constat selon lequel les femmes bénéficient des services de micro-crédit (Everett & Savara, 1991 ; Goetz & Sen Gupta, 1996 ; Mayoux, 1995a). Certains avancent en effet que les modèles actuels du micro-crédit, qui placent au cœur de leur action la viabilité financière, concentrent les fonds aux dépens de stratégies qui seraient plus efficaces pour l’empowerment (Ebdon, 1995) et/ou la réduction de la pauvreté (Rogaly, 1996).
2Les opinions qui s’expriment sur la contribution des programmes de micro-crédit à l’empowerment des femmes se répartissent actuellement en quatre camps principaux (qui ne s’excluent pas nécessairement mutuellement), qui croisent largement trois différents “paradigmes” de la micro-finance, ces paradigmes faisant différentes interprétations à la fois de l’empowerment et de la viabilité, comme il est indiqué dans l’encadré 1. Cet article examine les interrelations complexes qui existent entre les dimensions de ces interprétations divergentes. En dépit des tensions inévitables qui existent entre l’empowerment et de nombreuses politiques qui sont actuellement menées dans le but d’améliorer la viabilité financière à court terme, on trouve de nombreux faits qui prouvent que si l’on ignore les questions d’empowerment dans la conception même des programmes, ou leur éventuel impact négatif sur les femmes, on met en danger la viabilité financière même. Certains arguments consistent à dire qu’on a besoin d’une approche plus stratégique de l’empowerment, approche qui s’accompagnerait d’une approche plus large et plus flexible de la viabilité. Cela passerait en premier lieu par l’établissement des priorités d’intérêts des clients/membres, et par une approche plus participative de la gestion des programmes. En second lieu, cela demanderait que l’on accorde plus d’attention, lorsque l’on envisage des interventions de microfinance, aux relations entre les organisations, et au contexte, au lieu de passer par une approche technique.
L’empowerment des femmes et la micro-finance : éléments d’une stratégie de genre
3On sait que le concept d’empowerment suscite des débats. Il s’agit d’une expression fourre-tout qui a été adoptée dans des discours qui se basaient sur des compréhensions très différentes du développement. Dans la littérature sur la microfinance, on donne à l’empowerment trois significations distinctes dans le cadre des paradigmes (voir l’encadré 1) :
Encadré 1 : Empowerment et viabilité : opinions et paradigmes
Opinions sur la relation entre empowerment et viabilité :
• optimisme quant à la possibilité d’un développement global des programmes de micro-crédit qui donnent du pouvoir aux femmes
• reconnaissance des limites des modèles existants, mais affirmation de la possibilité d’identifier des stratégies viables susceptibles de minimiser les conséquences négatives et d’améliorer la contribution à l’empowerment
• présentation des programmes de micro-finance viables financièrement comme importants parce que stratégie possible pour la réduction de la pauvreté, et de l’empowerment comme une question qui doit être traitée par d’autres moyens
• accent mis sur le fait que les programmes de micro-finance reçoivent trop de fonds, au détriment de stratégies qui seraient plus efficaces pour l’empowerment
Paradigmes sous-jacents :
Paradigme de la viabilité financière
• Origines et inspirations principales : prépondérant actuellement dans la plupart des agences donatrices, sousjacent dans les modèles de micro-finance défendus dans les publications d’USAID et de CGAP, et principale inspiration du Sommet du Micro-crédit à Washington en février 1997. L’explication la plus détaillée de ce paradigme est donnée par Rhyne & Otero (1994).
• Motif du choix des femmes comme groupe cible : considérations d’efficacité grâce au haut taux de remboursement des femmes.
• Principal objectif de cette politique : mise en place des programmes de micro-finance viables, améliorant l’accès aux services de micro-crédit pour un grand nombre de démunis.
• Empowerment : empowerment économique, plus grandes possibilités de choix individuel et plus grande capacité d’indépendance financière
• Viabilité : viabilité financière du programme
Paradigme de la réduction de la pauvreté
• Origines et inspirations principales : programmes intégrés de lutte contre la pauvreté par le développement communautaire
• Motif du choix des femmes comme groupe cible : parce que le taux de pauvreté est plus grand parmi les femmes, et parce que les femmes sont responsables du bien-être du foyer
• Principal objectif de cette politique : la micro-finance comme partie d’un programme intégré de lutte contre la pauvreté et la vulnérabilité et pour l’amélioration du bien-être pour les foyers les plus pauvres
• Empowerment : bien-être accru, développement communautaire et autonomie (financière)
• Viabilité : mise en place d’institutions participatives au niveau local, dans un but d’autonomie communautaire à long terme et d’autodétermination pour les démunis
Paradigme de l’empowerment des femmes
• Origines et inspirations principales : le mouvement international des femmes (Sen & Grown, 1988) est sous-jacent dans les politiques de genre de nombreuses ONG et dans les perspectives de certains consultants et chercheurs dans le domaine de l’impact des programmes de micro-crédit sur les genres (par exemple Johnson, 1997). Ce paradigme n’a pas été imposé par le Nord, mais il est au contraire solidement enraciné dans le développement de certains des premiers programmes de micro-crédit dans le Sud, en particulier SEWA et WWF en Inde.
• Motif du choix des femmes comme groupe cible : égalité entre hommes et femmes, et droits de l’homme
• Principal objectif de cette politique : le micro-crédit comme point de départ pour l’empowerment économique, social et politique des femmes
• Empowerment : transformation des relations de pouvoir dans toute la société
• Viabilité : développement d’organisations participatives et indépendantes de femmes, en relation avec un mouvement plus large des femmes, dans le but d’une transformation des relations entre les genres.
l’empowerment économique individuel : dans le paradigme de l’autonomie financière, on suppose que le fait d’augmenter l’accès des femmes aux programmes de micro-crédit financièrement viables va leur permettre d’augmenter leur revenu par la micro-entreprise, et d’accroître leur contrôle sur le revenu et les ressources. On suppose alors que cet empowerment contribue au bienêtre des femmes et des enfants et donne aux femmes les moyens de stimuler les changements plus vastes qu’elles désirent, dans les domaines social et politique. On trouve en filigrane l’hypothèse que ces changements peuvent se produire sans que l’on apporte de soutien explicite aux femmes au sein du foyer ou pour des changements d’ordres social et politique plus vastes dans les relations de genre et de classe.
l’amélioration du bien-être : dans le paradigme de la réduction de la pauvreté, l’accès plus large des femmes au micro-financement est vu comme un moyen de leur donner un meilleur statut au sein du foyer et de la communauté ; ceci mène à une plus grande confiance, une part plus grande dans les dépenses de consommation et un rôle plus grand dans la prise de décision à l’intérieur du foyer. Par conséquent, on suppose que l’empowerment des femmes et la réduction de la pauvreté se renforcent mutuellement et de façon inévitable.
l’empowerment social et politique et la capacité de changer et de remettre en cause la subordination des femmes : dans le paradigme féministe de l’empowerment, la subordination des femmes est considérée comme un processus complexe, multidimensionnel et partout présent. Il affecte tous les aspects de la vie des femmes, et s’enracine dans de nombreux niveaux différents et qui s’entretiennent mutuellement : la conscience individuelle, le foyer, le travail, la législation, les structures étatiques et les systèmes économique et politique internationaux. L’empowerment des femmes dépasse alors le domaine économique, et il représente plus que l’amélioration du bien-être ; il s’attaque à des “intérêts stratégiques de genre”. Il est vu comme un processus de changement individuel interne (le pouvoir en), d’augmentation des capacités (le pouvoir de) et de la mobilisation collective des femmes, et des hommes quand c’est possible (le pouvoir avec), dans le but de remettre en cause et de changer la subordination liée au genre (le pouvoir sur). On suppose ici que les femmes ont des intérêts de genre communs et qu’elles vont souhaiter les défendre si on leur apporte un soutien suffisant, et que le micro-financement est un point de départ utile pour lancer ce processus.
4Les preuves solides d’un impact sur les questions de genre sont peu nombreuses, et on n’a pas fait de comparaison interculturelle et inter-organisationnelle systématique des impacts relatifs de différents modèles et de différentes stratégies2. Les données les plus facilement disponibles concernent le nombre de prêts accordés aux femmes, le taux de remboursement, les activités auxquelles ces prêts ont été destinés et, dans certains cas, des informations sur l’histoire des femmes et sur l’efficacité. Des recherches académiques indépendantes sur l’impact économique, ou l’empowerment plus généralement, dans les domaines social et politique, sont peu nombreuses, et limitées à certains pays comme l’Inde ou le Bangladesh. La plupart des autres recherches connues, et réunies dans le projet pilote de recherche, sont des évaluations rapides de l’impact sur les genres demandées par les ONG du Nord et les donateurs. Les autres informations utilisées dans cet article sont plus anecdotiques, recueillies dans des études d’impact sur les hommes et les femmes de projets de micro-financement qui n’avaient pas pour cœur les questions de genre dans les présentations préparées par les ONG du Sud pour l’atelier de la recherche pilote, et dans la correspondance qui a suivi cet atelier. Par conséquent, il n’est pas possible, au point où nous en sommes, de dégager des conclusions sur les mérites relatifs des différentes approches, au-delà de l’identification de tensions qui pourraient apparaître et de moyens de progresser.
5Pour autant, en dépit de ces défauts, des preuves laissent penser que tous les liens supposés entre l’accès au micro-crédit et l’empowerment doivent être remis en question et vont certainement être limités par les dimensions diverses, et qui se renforcent mutuellement, de la subordination des femmes telles qu’indiquées dans l’encadré 1. Les programmes de micro-crédit peuvent contribuer à l’empowerment des femmes dans toutes ses dimensions, et l’ont déjà fait dans certains programmes pour les femmes. Dans certains cas, l’empowerment a résulté des stratégies de changement des femmes elles-mêmes. Dans d’autres cas, il a été le résultat de politiques stratégiques pour l’empowerment. Cela indique que les hommes peuvent être aussi bien un soutien important du processus de changement qu’un obstacle significatif.
6Néanmoins, il est clair, d’abord, que les indicateurs financiers de l’accès au micro-crédit – l’adhésion des femmes aux programmes, le nombre et le montant des prêts et les données sur le remboursement – ne peuvent être utilisés comme des indicateurs définitifs de l’accès réel au micro-crédit ou comme des indicateurs indirects de l’empowerment. Le fait que les femmes soient enregistrées comme membres ne signifie pas qu’elles contrôlent l’utilisation du prêt, et dans certains cas, ne prouve même pas qu’elles participent à la décision de candidature au prêt. Il n’existe pas de rapport évident entre le rôle des femmes dans la prise de décision sur l’utilisation des prêts, si elles décident de les utiliser dans leur propre intérêt ou de les donner aux hommes, si elles sont impliquées dans l’activité pour laquelle le prêt a été consenti et si elles contrôlent le revenu qui en résulte. Dans certains cas, les revenus ont beaucoup augmenté, et il existe de nombreuses études de cas de femmes entrepreneurs qui ont réussi. Cependant, même lorsque les taux de remboursement sont bons, les quelques études statistiques dont on dispose sur les emprunteurs féminins (par exemple Everett et Savara, 1987, 1991) ou sur les emprunteurs féminins et masculins (Hulme et Montgomery, 1994 ; Montgomery et al., 1996), révèlent de très faibles augmentations du revenu pour un grand nombre d’emprunteurs. C’est seulement dans un très faible nombre de cas que les augmentations du revenu sont importantes. Il est clair que le choix des femmes de l’activité et leur capacité à faire augmenter le revenu sont sérieusement limités, le plus souvent, par leur faible accès aux autres ressources d’investissement, par leur responsabilité dans la subsistance du foyer, par leur manque de temps, par leur faible mobilité, et par les contraintes liés à la sexualité qui limitent leur accès au marché dans de nombreuses cultures.
7En second lieu, l’augmentation du revenu des foyers n’implique pas nécessairement que les femmes en profitent ou que les inégalités en soient remises en question au sein du foyer. En réaction à la hausse du revenu des femmes, les hommes pourraient tout à fait retirer une partie de leur contribution au profit de leurs dépenses somptuaires personnelles. La répartition des dépenses des femmes pourraient aller dans le sens de l’inégalité entre les sexes au lieu de la contrecarrer, et continuer à désavantager les filles. En l’absence de solution pour que quelqu’un s’occupe des enfants, des personnes âgées et des impotents, et en l’absence de services qui permettent de réduire la charge de travail domestique, de nombreux programmes ont révélé les effets pervers sur les enfants et les personnes âgées du travail des femmes à l’extérieur du foyer (Mayoux et Johnson, 1997). Les femmes elles-mêmes accordent beaucoup d’importance à la possibilité qui leur est offerte d’apporter une plus grande contribution au bien-être du foyer ; elles en retirent une plus grande confiance, et une meilleure estime d’elles-mêmes. Une surcharge de travail pourrait bien être le prix à payer pour un accès un peu meilleur au revenu du foyer. Certaines femmes font face à de grandes difficultés pour pouvoir rembourser les prêts, elles se privent de nourriture et d’autres biens de consommation. Bien que dans de nombreux cas la plus grande contribution des femmes au bien-être du foyer ait considérablement amélioré les relations domestiques, dans d’autres cas elle intensifie les tensions.
8Troisièmement, il n’existe pas de lien obligatoire entre le micro-crédit et l’empowerment social et politique. Des changements positifs sont apparus dans la perception du rôle des femmes, au sein du foyer et de la communauté comme au niveau individuel. On a vu des changements importants même dans les sociétés où le rôle des femmes est très limité. Il est également probable que les changements aux niveaux individuel, du foyer et de la communauté, sont liés, et que des femmes qui individuellement gagnent le respect dans leur foyer deviennent alors des modèles pour d’autres et mènent à un processus de changement dans les perceptions de la communauté et dans la volonté des hommes à accepter le changement (Laksham, 1996). Pourtant, on ne sait pas dans quel contexte ces tendances apparaissent, et on ne connaît pas le nombre de femmes pour qui ces changements se produisent. Dans de nombreux programmes, en particulier en Inde, le micro-crédit a donné une base à l’organisation de lutte contre d’autres problèmes tels que la violence domestique, l’alcoolisme masculin et le système de dot. Néanmoins, dans la plupart des programmes on n’essaie pas vraiment de faire le lien entre le micro-crédit avec des activités plus largement sociales et politiques, et en l’absence de mesures spécifiques pour encourager ces activités, on n’a que peu de preuves quant à une contribution importante du micro-crédit. On peut au contraire trouver des faits qui prouvent que le micro-crédit et le revenu des femmes peuvent les tenir à l’écart d’autres activités sociales et politiques, et que les groupes de micro-crédit soumettent les réseaux existants à de lourdes pressions lorsque le remboursement pose un problème.
9Il existe des différences nettes dans les stratégies des femmes selon les sociétés, par exemple au Vietnam, au Bangladesh et en Ouganda, et selon que les femmes sont pauvres ou plus à l’aise. Dans bien des cas, les contraintes à tous les niveaux, et liées à l’environnement des femmes, ont empêché ces dernières d’accéder aux programmes, d’augmenter ou de contrôler les revenus, ou de contester leur subordination. La contribution du micro-crédit seul sera certainement très limitée pour les femmes les plus pauvres ou les plus désavantagées. Tout porte à penser que celles-ci vont être exclues de façon explicite par les programmes et les groupes de femmes où le remboursement est la principale considération et/ou le plus gros de l’action est dirigé vers les micro-entrepreneurs qui existent déjà. Le micro-crédit peut tout à fait réduire le pouvoir de certaines femmes, les appauvrir, les isoler, et rendre leurs relations avec les réseaux de femmes tendues. Cela pourrait arriver en particulier lorsque des réseaux de soutien n’ont pas explicitement été planifiés et mis en place. Cela ne signifie pas pour autant que les programmes de micro-financement qui prennent en compte les besoins spécifiques de ces femmes ne pourraient pas être des interventions de développement particulièrement utiles. Parmi les programmes et les communautés (même très pauvres), on trouve de grandes différences qui pourraient démentir la possibilité d’une modélisation prédictive basée par exemple sur les structures domestiques ou les bénéfices automatiques de politiques particulières.
10La nature forcément complexe et potentiellement conflictuelle de l’empowerment lui-même implique que le “succès total” n’existera jamais pour toutes les femmes, et toute politique de genre est vouée à être contestée à la fois par les femmes et par les hommes. Comme on l’a vu plus haut, les femmes au niveau individuel profitent d’échanges, il existe des différences et des conflits d’intérêt entre les femmes, de même que des inégalités de ressources et de pouvoir entre les femmes et les hommes à tous les niveaux. Pour autant, en dépit des complexités inévitables, on peut légitimement penser, sur la base de preuves, qu’il existe des éléments critiques d’une politique de genre, qui pourraient faire que le micro-crédit donne plus de pouvoir aux femmes, comme on le dit dans l’encadré 2.
Encadré 2 : Des éléments essentiels d’une politique de genre
Institutionnalisation de lignes directrices tenant compte des questions de genre dans la politique dominante et déterminée par les hommes : pour augmenter l’accès, permettre aux femmes d’exprimer leurs aspirations et leurs besoins, et assurer l’égalité des genres dans la politique des programmes généraux
• examen de toutes les politiques avec une perspective de genre, en particulier des concepts de “foyer”, de “communauté”, et les conceptions sous-jacentes de la différence des genres en termes de droits, de responsabilités et de rôles, ainsi que les différences de possibilités et de contraintes qui existent selon les genres
• engagement en faveur de l’égalité des genres dans le recrutement et la promotion du personnel, ce qui passe nécessairement par des changements dans la “culture institutionnelle” d’assistance au personnel féminin
• des primes concrètes à l’égalité des genres dans la mise en œuvre des programmes, pour le personnel à la fois féminin et masculin, afin de s’assurer que les femmes profitent des programmes
Stratégies s’adressant aux femmes, dans le but de contrer les désavantages particuliers des femmes
• conditions de l’accord du micro-crédit, afin qu’elles soient flexibles et s’adaptent aux aspirations et aux stratégies des femmes
• services complémentaires : pour qu’ils accordent une attention particulière au genre, notamment la formation/l’apprentissage réciproque selon le genre, afin que les femmes améliorent leurs capacités et développent leurs réseaux de façon à remettre en cause les inégalités de genre ; des services qui puissent réduire la charge de travail domestique non payé, défendre les femmes, et faire du lobbying aux niveau local, national et international
• structures de participation : venant des clientes, et dans la prise de décision et la détermination de stratégies, de manière à augmenter la contribution des groupes à l’empowerment
• reconnaissance des divers besoins des femmes, et identification de ces besoins
• mécanismes de représentation des femmes les plus pauvres, femmes ayant des relations difficiles, jeunes femmes, dans la prise de décision, en s’assurant qu’elles ne sont pas exclues du pouvoir
Stratégies s’adressant aux hommes : stratégies dont le but explicite est la redistribution du pouvoir et des ressources
• conscience des questions de genre pour les hommes, dans tous les aspects du programmes, avec des primes à la “bonne pratique”
• primes à l’enregistrement des biens au nom des femmes ou au nom des deux époux
• stratégies visant à développer et à renforcer la responsabilité des hommes dans le bien-être du foyer, bien-être incluant celui des femmes et des filles
• organisation du soutien des hommes au changement dans les relations de genre
Liens entre les organisations : afin d’augmenter l’impact et de réduire le coût des stratégies d’empowerment
• établissement de relations et de soutiens aux réseaux des femmes qui ont pour objectif le changement
• collaboration en faveur d’une cohérence institutionnelle en faveur des genres au sein des organisations liées entre elles
• collaboration entre organisations, dans le but d’augmenter la capacité à remettre en cause la subordination des femmes
Quelques questions-clés
• politiques dominantes déterminées par les hommes : Des relations de genre équitables peuvent-elles être encouragées par des changements dans les “malestream policies” (politiques dominantes et déterminées par les hommes) ? Que cela implique-t-il pour les conceptions communes et ancrées dans toutes les interventions de développement qui existent en matière de droits, responsabilités et rôles au sein des foyers et des communautés ?
• affirmative action : Les femmes ont-elles besoin d’un traitement différent de celui des hommes, ou préférentiel ? Jusqu’à quel point et de quelles façons les politiques peuvent-elles assister les femmes en situation de désavantage ou de vulnérabilité, sans créer de conceptions stéréotypiques négatives ni de “ghettos féminins” ?
• coopération, conflit et changement : Jusqu’à quel point et de quelles façons peut-on éviter des conflits et des souffrances inutiles pour les femmes sans pour autant compromettre le combat pour le changement ? Jusqu’à quel point peut-on attendre des femmes qu’elles endossent la responsabilité et les coûts de la lutte contre les subordination des femmes ?
• différences entre les femmes : Existe-t-il une “norme féminine” pour la politique de genre ?
Jusqu’à quel point et de quelles façons les besoins des femmes, différents et qui peuvent entrer en conflit, peuvent-ils s’adapter ?
• politiques s’adressant aux hommes : Quelles implications pourrait avoir le fait de diriger vers les hommes les politiques spécifiques de redistribution entre les genres, politiques qui ont pour but d’encourager les hommes à soutenir les changements positifs dans l’accès des femmes au pouvoir et aux ressources et/ou de contrer l’opposition des hommes au changement ?
11Premièrement, la politique de genre demande non seulement qu’on établisse des stratégies en faveur des femmes mais également qu’on reconsidère toutes les politiques avec une perspective de genre. Ceci passe par un examen en détail de toutes les affirmations sous-jacentes de différences des genres en matière de droits, de responsabilités et de rôles, que l’on trouve dans les définitions et les politiques dirigées vers le “foyer”, la “communauté”, les “entrepreneurs”, les “agriculteurs”, pour inclure les problèmes des femmes dans les politiques dominantes et déterminées par les hommes (malestream policies). Ces conceptions affectent l’accès des femmes aux programmes, et le profit qu’elles peuvent en tirer. On cite souvent comme exemple le fait que les femmes doivent demander la signature de leurs maris pour accéder aux prêts alors que les hommes n’ont pas besoin de la signature de leurs femmes, même lorsqu’ils utilisent les biens de leurs épouses comme garantie.
12Des lignes directrices tenant compte des questions de genre doivent être établies dans le cadre du recrutement et de la promotion. Un lien évident existe entre la contribution à l’empowerment des femmes, et même l’accès des femmes eu micro-crédit, et le taux de féminisation du personnel3. Cette question est extrêmement complexe, et elle ne se résout pas nécessairement grâce à des programmes qui s’adressent aux femmes seulement.
13Les femmes ne sont pas nécessairement plus conscientes des questions de genre que les hommes, et une formation sera également nécessaire pour les rendre conscientes des perspectives et des problèmes des femmes pauvres. Il ne suffit pas non plus d’établir des quotas numériques de personnel féminin. Bien que le cas existe de personnel masculin très conscient des questions de genre et qui les soutient, cela arrive généralement seulement lorsqu’on a atteint une “masse critique” de femmes dans des positions où elles ont une autorité suffisante au sein de l’organisation pour que les questions de genre soient totalement intégrées et mises en œuvre dans les malestream programmes. Pourtant, le recrutement de femmes pour ces positions est souvent difficile, étant données les contraintes avec lesquelles le personnel féminin et les clientes doivent compter ; et ce recrutement implique des changements dans la culture organisationnelle, les critères et les procédures de recrutement. Une présentation exhaustive de ce que cela implique dépasse la portée de cet article, mais l’institutionnalisation des questions de genre va requérir des ressources et un engagement, et ne peut être considérée comme un processus qui sera facile, peu coûteux ni exempt de conflit4. Des lignes directrices claires et des primes concrètes à la mise en application d’une politique de genre sont également nécessaires. Il ne s’agit pas seulement de donner des stimulations pour que les prêts ou l’épargne soient enregistrés au nom de la femme, mais également de s’assurer que les femmes ont été effectivement consultées et qu’elles étaient conscientes des stratégies à suivre pour être sûres qu’elles soient les bénéficiaires. Ces primes et lignes directrices encourageraient un recueil plus systématique d’information sur l’impact des programmes.
14Les stratégies qui s’adressent aux femmes sont importantes dans toute politique de genre, et ont reçu jusqu’à maintenant le plus d’attention, conformément à l’approche Femmes En Développement. Lorsque l’on pense à des stratégies à l’intention des femmes, pourtant, on omet le plus souvent un certain nombre de questions épineuses. Il s’agit d’abord des questions qui consistent à savoir jusqu’à quel point et de quelles façons les femmes ont besoins de traitement différents ou préférentiels de la part des hommes (en plus de l’égalité des genres dans les malestream programmes), de façon à aborder la question de leurs besoins sans créer des “ghettos féminins” et des stéréotypes sur les besoins et les attitudes supposés. En second lieu, on ne peut pas attendre de la remise en cause de la subordination des femmes qu’elle ne fasse pas naître des conflits, et on doit se poser les questions difficiles suivantes : jusqu’à quel point, et comment, des conflits et des souffrances inutiles peuvent-ils être évités, sans pour autant remettre en cause la lutte pour le changement. Comme on l’a vu précédemment, bien des femmes pourraient choisir des stratégies qu’elles perçoivent comme susceptibles de renforcer la coopération conjugale, et quelques femmes qui choisissent l’indépendance font face à un possible abandon ou à la misère. Troisièmement, si l’on considère les différences et les potentiels conflits d’intérêts qui peuvent naître entre les femmes de différentes classes, de différents groupes ethniques, d’âge et de statuts maritaux différents, on doit se poser des questions pour savoir quelles sont les femmes à qui l’on doit donner la priorité ou que l’on doit considérer comme la “norme féminine” pour la considération des besoins des femmes.
15Il ressort clairement des expériences des programmes qui participent à la recherche pilote que le fait de s’adresser aux femmes ne peut pas être pratiqué par les programmes comme un mécanisme pour surmonter l’irresponsabilité masculine dans l’épargne et le remboursement des crédits, et, simultanément, comme un moyen automatique d’empowerment des femmes. La perception selon laquelle les programmes d’épargne sont exclusivement une “affaire de femmes” pourrait conduire au déclin du sentiment de responsabilité des hommes envers le foyer, et faire augmenter la pression sur les femmes pour qu’elles épargnent tout revenu auquel elles ont accès, laissant les hommes libres d’utiliser leur propre revenu, généralement beaucoup plus important, pour leurs propres dépenses somptuaires. Le cas s’est produit même au Vietnam où les femmes ont plus de contrôle sur les programmes (Pairaudeau, 1996). Là où les prêts sont perçus comme étant plus facilement obtenus par les femmes que par les hommes, les résultats du projet pilote montrent que les hommes utilisent les femmes pour accéder aux prêts, créant ainsi des dettes enregistrées au nom des femmes, ce qui les rend très vulnérables dans les cas de séparation du couple (voir également Goetz et Sengputa, 1996). Les programmes doivent reconnaître les impacts potentiellement négatifs pour les relations de genre que peut avoir le fait de s’adresser exclusivement aux femmes ; ils doivent également se demander comment des programmes de micro-crédit pour les hommes peuvent être des mécanismes de remise en cause des inégalités de genre. On aurait là un moyen important d’augmenter la coopération et de calmer les conflits qui entourent les politiques de genre, notamment lorsque l’on s’appuie sur le propre désir de changement des hommes. Comme il est ressorti de façon évidente dans certains des cas évoqués, certains hommes soutiennent activement leurs femmes. On pourrait également stimuler le soutien des hommes en développant de nouveaux types de rôles, et en développant les réseaux masculins qui souhaitent le changement. Cet équilibre est évidemment difficile à atteindre, si l’on veut éviter de détourner les rares ressources et l’énergie des femmes et des réseaux de femmes. Tout cela doit être fait parallèlement à une reconsidération des “malestream policies”.
16Finalement, le degré de changement induit par quelque programme que ce soit sera vraisemblablement limité si l’on considère les contraintes, nombreuses et qui s’entretiennent mutuellement. Par conséquent, il est crucial que les programmes de micro-crédit établissent des liens stratégiques avec d’autres forces de changement, dont les réseaux de femmes, les mouvements de femmes, ainsi que les organisations de défense et les lobbies de femmes au sein des bailleurs de fonds.
L’empowerment contre la viabilité ? Résolution des tensions
17Pour améliorer la contribution à l’empowerment des femmes, des changements et des fonds sont nécessaires à de nombreux niveaux, et on risque de faire naître des conflits. L’empowerment des femmes va donc certainement être intégré difficilement dans les programmes qui se basent sur le paradigme actuellement dominant de la viabilité financière. Ce paradigme est dominant actuellement pour la plupart des membres contributeurs au CGAP qui fournissent la plupart des fonds affectés aux programmes de micro-crédit. La viabilité est alors strictement financière, et le but est de développer des programmes de crédit viables et indépendants financièrement, qui arrivent à recouvrir les coûts de fonctionnement (dont les réserves de perte de remboursement), et le coût des fonds et de l’inflation, grâce aux charges des clients et aux intérêts. Pour que la viabilité commerciale soit atteinte, les programmes doivent également rapporter un bénéfice aux propriétaires et aux actionnaires. On doit pour ce faire recourir à des mécanismes bancaires, de façon à maximiser le revenu et minimiser les coûts des services financiers, notamment par des taux d’intérêt élevés, une croissance, une mobilisation de l’épargne, une responsabilité collective pour le remboursement, et une proposition de service minimale (voir l’encadré 3).
18Pourtant, des contradictions émergent dans le paradigme même de la viabilité parce que l’on n’accorde pas assez d’attention aux intérêts des clients. Le principe sous-jacent est que les coûts du développement peuvent être imputés aux groupes et aux clients, en partant de l’autre principe que ces clients vont être à la fois capables et désireux d’apporter la contribution nécessaire en temps, en capacités et en ressources pour avoir accès aux services proposés. On s’est souvent adressé aux femmes en partant du principe qu’elles sont plus dociles et soumises à la pressions de leurs pairs et du personnel des programmes, ce qui expliquerait les meilleurs taux de remboursement de la part des femmes, même lorsqu’elles n’utilisent pas elles-mêmes l’argent du prêt. Néanmoins, de plus en plus on peut constater que les femmes ne veulent pas (même si elles le peuvent) payer des taux d’intérêt élevés si elles ont d’autres solutions, et qu’elles ne restent pas passives lorsqu’elles deviennent moins vulnérables. Certains programmes sont en proie à de graves difficultés de développement et enregistrent de forts taux d’abandon parce que les femmes refusent de prendre la charge de la dette dans leurs situation actuelles. L’exemple de la Grameen Bank montre que les membres font de plus en plus défaut au fur et à mesure que leur revenu augmente et que leurs possibilités de crédit se diversifient (Wiig, 1997). Dans le projet FINCA en Ouganda, on a vu que de nombreuses femmes protestaient à leur propre manière contre les taux d’intérêt élevés, et qu’elles formaient leurs propres groupes de participation une fois qu’elles avaient réuni le capital suffisant – ce qui est une preuve de succès et qui en même temps crée de sérieux obstacles à la progression du programme FINCA vers la viabilité et l’indépendance.
19De plus, la viabilité financière ne peut être atteinte qu’à un prix élevé, à la fois à court et à long terme. Dans le paradigme de la viabilité financière, la croissance rapide des programmes de micro-crédit en programmes plus vastes demande une expertise bancaire professionnelle, donc coûteuse, et ce de façon permanente. Elle nécessite également des systèmes de gestion de l’information élaborés, qu’il est coûteux de mettre en place, et du personnel qualifié en permanence. De tels systèmes ne sont utilisés que pour rassembler et traiter des données qui sont elles-mêmes difficilement calculables, et qui doivent être suivies de près être fiables.
20La mise en place de systèmes financièrement viables détourne une quantité considérable des ressources de l’appui institutionnel au personnel et aux organisations de clients. Comme nous l’avons vu, les données réunies ne sont pas forcément des indicateurs fiables de la réduction de la pauvreté et de l’empowerment. On peut se demander si la mise en place de tels programmes est effectivement partout le meilleur moyen d’utiliser les rares ressources des donateurs.
Encadré 3 : Viabilité financière : politiques, tensions et possibles liens avec l’empowerment
Viabilité financière : définition
La viabilité financière est considérée comme atteinte en quatre étapes. Lors de la première étape, les fonds attribués aux prêts servent à couvrir les dépenses de fonctionnement, et un fonds d’emprunt tournant est établi. Pourtant, lorsque les programmes sont lourdement subventionnés et ont de mauvais résultats, la valeur des fonds attribués aux prêts diminue rapidement à cause des détournements et de l’inflation. Dans la deuxième étape, les programmes lèvent des fonds en empruntant à des taux proches, mais inférieurs, à ceux du marché. Les revenus des intérêts couvrent les coûts des fonds et une partie des dépenses de fonctionnement, mais des fonds sont encore nécessaires au financement de certaines opérations. Au troisième stade, la plupart des subventions disparaissent. Au quatrième stade, les programmes sont totalement financés par l’épargne des clients, et les fonds sont recueillis à des taux commerciaux auprès d’institutions financières officielles. Les charges des clients et les taux d’intérêt couvrent les coûts des fonds, la perte de réserves de fonds, les opérations courantes et le coût de l’inflation (Otero et Rhyne, 1994).
Les politiques relevant du paradigme de la viabilité financière : réduction des coûts des programmes
• croissance du programme, de façon à faire des économies d’échelle
• maintien des dépenses de personnel à un faible niveau en réduisant la taille du personnel ou en maintenant les salaires à un bas niveau
• augmentation des contributions “volontaires” des clients et des groupes
• baisse des coûts de transaction en simplifiant les procédures et en décentralisant de façon à rapprocher les services des clients
• réduction des services
augmentation des taux de remboursement
• introduction d’un système de gestion de l’information efficace pour suivre les clients et la performance financière
• coercition négative avec le “bâton” : pénalité de non remboursement, et pression du groupe
• primes positives au remboursement de type “carotte”, par exemple nouveaux prêts plus importants pour les clients qui remboursent bien
augmentation du revenu du programme
• augmentation des taux d’intérêt et des charges attribuées aux services
• mobilisation de l’épargne, en laissant une marge d’intérêt intéressante entre les prêts et l’épargne
• investissement rentable des fonds du programme
• vente de parts aux clients et/ou au secteur privé
Des tensions inévitables dans ce paradigme
maintien des charges du programme à un faible niveau contre :
• le besoin de personnel financier professionnel en compétition avec le secteur privé
• les coûts de personnels nécessaires à l’expansion du programme
• le devoir de fournir aux clients/membres des capacités pour le bon fonctionnement du programme volonté/possibilité des clientes pauvres de se joindre au programme et de rembourser (en d’autres termes une sélection du groupe cible efficace et une expansion du programme) contre :
• des taux d’intérêt élevés
• la nécessité de contributions volontaires
• la réduction des services
Toutes ces tensions sont encore plus vives lorsque l’on veut combiner la viabilité financière avec la lutte contre la pauvreté et l’empowerment.
21L’accès au micro-crédit est le point de départ nécessaire dans la mesure où les autres progrès éventuels et les ressources des donateurs doivent être utilisées de la manière la plus rentable possible. Mais il est évident qu’il est nécessaire de trouver un modèle beaucoup plus élaboré pour analyser les interrelations qui existent entre les différentes dimensions de la viabilité résumées dans l’encadré 4. Un équilibre des intérêts devra certainement être trouvé entre chaque étape de la viabilité, en fonction des perceptions et motivations des clients mais également des encouragements financiers. Peut-être est-ce seulement dans certains modèles participatifs, avec des primes au remboursement à la fois matérielles et sociales, que différents stades de viabilité peuvent être maintenus, comme par exemple dans le modèle de SANASA (Montgomery, 1996). L’influence que peuvent avoir les questions de genre sur ces résultats généraux est encore incertaine.
22Deuxièmement, au niveau des programmes, viabilité financière et viabilité institutionnelle ne peuvent pas être confondues. Comme l’ont écrit des critiques, dans le paradigme de la réduction de la pauvreté (par exemple Johnson et Rogaly, 1997), la viabilité institutionnelle à long terme peut être financièrement coûteuse à court terme. Nous devons chercher des alternatives au modèle des programmes financiers de lutte contre la pauvreté à grande échelle qui est implicite dans la plupart de la littérature du CGAP, notamment le modèle de la Banque mondiale, d’USAID et de DfID. Ces modèles alternatifs s’appuieraient sur une dynamique de la viabilité assez différente, mais dans bien des contextes il apporterait une contribution plus grande à la réduction de la pauvreté et à l’empowerment. Ces modèles alternatifs existent déjà, mais ils ont été marginalisés lors de la ruée vers les chiffres démontrables à laquelle se sont livrés la plupart des bailleurs de fonds à la suite du Sommet sur le micro-crédit ; ils ont également été marginalisés du fait de la domination de très grandes organisations dans ce domaine. Les modèles alternatifs comprennent des programmes qui associent la viabilité à la stimulation et au soutien de nombreux petits groupes de micro-crédit pour qu’ils deviennent indépendants, et par conséquent pour qu’ils cessent de contribuer à la poursuite du programme par le paiement des taux d’intérêt. C’est ce qui se passe avec les ROSCAs de femmes, qui sont viables à la fois institutionnellement et financièrement, sans soutien extérieur. De telles stratégies sont particulièrement fructueuses lorsqu’existe un secteur bancaire formel réceptif, comme en Inde. On peut supposer que même quand le contexte est moins favorable, les programmes qui développent des systèmes d’échange d’informations à la base, de façon à stimuler l’établissement de ROSCAs par les femmes elles-mêmes serait plus opportun que l’établissement par les ONG de programmes séparés. Alors, les efforts des ONG et des bailleurs de fonds se concentreraient, non plus sur le financement mais sur le lobbying en faveur d’une réforme du système bancaire formel et sur la création de services complémentaires. Là encore, ces stratégies font déjà l’objet d’une promotion, et sont soutenues même par des agences de financement, comme DfID-Royaume Uni, qui agissent dans le cadre du paradigme de la viabilité financière. Au niveau des programmes, et dans bien des contextes, il pourrait être moins coûteux à long terme de décentraliser et de simplifier les procédures bancaires, et de développer les capacités financières du personnel affecté à la lutte contre la pauvreté et à l’empowerment des femmes ; ce personnel serait vraisemblablement motivé, sur le long terme, par des primes non financières, ou même par de modestes encouragements financiers. La mise en place de systèmes de suivi des clients, de même que de systèmes d’échange d’informations qui pourraient leur être utiles pourrait également être une stratégie rentable à long terme, combinant l’appui institutionnel et l’empowerment avec un objectif de viabilité.
23Néanmoins, ces modèles doivent également être soumis à un examen critique, en cherchant à évaluer leur contribution à la réduction de la pauvreté et à l’empowerment plutôt qu’en s’arrêtant à ce qu’ils ont de supérieur à une approche bancaire supposée être purement matérialiste. Ces modèles doivent aussi, non plus être marginalisés, mais être complètement intégrés à une stratégie plus vaste visant à combiner viabilités financière et institutionnelle.
Encadré 4 : Empowerment et viabilité financière : quelques solutions pour réduire les incompatibilités
Dimensions liées d’une approche plus large de la viabilité
critères :
• financiers : calculés en termes économiques, cherchant un équilibre entre les coûts et les revenus
• institutionnels : établis en terme de durabilité des organisation mises en place et/ou de la contribution à une amélioration plus générale des capacités du personnel et des clients
niveau organisationnel :
• le programme
• les groupes de prêts et d’épargne
• membres individuels
dynamique :
• maintien du status quo du programme
• mécanisme durable de croissance du programme
• développement, par un programme à la base, d’organisations indépendantes ou par les membres
• établissement de liens avec d’autres institutions pour un accès durable aux ressources et aux services, par exemple donateurs, banques, secteur informel, mouvements de femmes
Contribution éventuelle de l’empowerment à la viabilité
• empowerment économique (revenu augmenté, contrôle du revenu, et accès aux ressources), qui réduit les échecs dans la mesure où les femmes peuvent mieux rembourser
• bien-être accru : les femmes ont plus de qualifications (par exemple l’alphabétisation), plus de temps (par exemple moins de perte de temps à cause du mauvais état de santé des femmes elles-mêmes et des enfants, possibilité d’acheter des appareils permettant de gagner du temps), et plus de ressources pour contribuer au programme et aux groupes
• empowerment social et politique : développe l’empowerment politique et le bien-être, et permet aux femmes de plus s’engager (par exemple grâce aux moindres restrictions de leurs mouvements ou de leurs contacts avec les hommes, à leurs plus grandes capacités organisationnelles, et aux contacts avec des réseaux)
Quelques stratégies de résolution des incompatibilités
conditions de l’obtention d’un micro-crédit
• l’approche dite “de la carotte” pour le remboursement : primes au remboursement, par exemple accord de crédits plus importants, rabais sur les taux d’intérêt, dont des prêts à des conditions préférentielles pour des activités lucratives non traditionnelles
• condition stipulant que tous les actifs issus du prêt doivent être officiellement enregistrés au nom de la femme
• option “à choix multiple” basée sur une consultation participative
• création d’un sentiment de propriété et d’engagement à la viabilité du programme en accordant un fort retour sur l’épargne et/ou un contrôle par les femmes d’au moins certains actifs du programme
• consultation participative et transparence quant à l’utilisation des revenus du programme, d’où une “valeur de l’argent” naissant des taux d’intérêt élevés
des groupes formés pour l’obtention d’un micro-crédit peuvent être développés comme :
• points de départ pour la formation
• un forum d’échange d’informations
• une base pour l’action collective locale
• une réseau informel d’échange d’information/d’action collective, au-delà du niveau local
• des groupes locaux rassemblés en fédérations et mouvements plus larges
réduction des coûts des services complémentaires
• intégration complète des questions de genre et d’empowerment dans toutes les formations des clients/membres et du personnel
• lancement et soutien d’une éducation mutuelle et collective, et autres prestations de services par les clients/membres
• subventions croisées en faisant payer des charges pour certains services aux clients les plus aisés
• paiement de certaines charges par tous les clients une fois qu’ils ont atteint un certain niveau
• collaboration entre les organisations
• demande de fonds permanents séparés auprès des donateurs
24Là où la contribution à l’empowerment et à la réduction de la pauvreté est prouvée, même dans l’approche de la viabilité financière, on doit laisser une place à la négociation en ce qui concerne le délai pour atteindre la viabilité ; quels coûts on doit inclure dans le calcul de la viabilité financière ; quels sont les services qui doivent être considérés comme permanents ou et ceux qui sont exceptionnels et financés séparément. Les bailleurs de fonds, comme DfID-Royaume Uni, qui suivent l’approche de la viabilité ont également soutenu les services complémentaires et ont pris, dans leur politique, des engagements en faveur de l’empowerment. Des programmes de micro-crédit comme la Grameen Bank, considérés comme des types idéaux de modèle de viabilité, ont continuellement recherché des stratégies pour donner du pouvoir aux femmes de diverses façons. Dans certains contextes, même si des services de micro-crédit pourraient contribuer utilement à l’empowerment et à la réduction de la pauvreté, il est difficile d’atteindre la viabilité financière en raison, par exemple, des distances qui séparent les populations, des problèmes qui empêchent le développement des marchés, de l’extrême dénuement ou du manque de capacités. Même si cela ne doit pas justifier que l’on relâche les exigences quant au remboursement et la rigueur financière, on peut se poser des questions sur la moralité de faire porter tous les coûts du développement sur les populations très démunies. L’expérience des programmes, relatée lors des ateliers lors de la phase pilote du projet, propose une variété de stratégies permettant de combiner l’empowerment des femmes et les objectifs de viabilité, comme on le montre dans l’encadré 4, et comme on l’a déjà dit par ailleurs (Mayoux, 1998).
Une nouvelle viabilité pour le paradigme de l’empowerment : la gestion des programmes de participation, la collaboration inter-institutionnelle et les questions qui demeurent
25Au stade où nous en sommes, toute conclusion serait hasardeuse. Pourtant, dans une certaine mesure, les faits viennent étayer chacun des quatre points de vue sur la possibilité de développer des programmes de micro-finance viables et qui donnent du pouvoir aux femmes. En ce qui concerne le premier point de vue, on peut trouver des raisons d’être optimiste. Les services de micro-crédit ont augmenté le revenu des femmes de façon significative, ces femmes dont la position dans la famille et la communauté s’est beaucoup améliorée, même en dehors de toute intervention financière. Certains programmes de lutte contre la pauvreté sont rentables, et sont même sur le marché boursier (par exemple ACCION). Les programmes de micro-crédit ont également été utilisés avec succès comme point de départ d’une mobilisation plus large des femmes, dans les domaines social et politique. Néanmoins, il semble probable que les programmes qui fonctionnent selon le paradigme de la viabilité financière ont une logique qui privilégie inévitablement les moins défavorisés des plus pauvres, et les femmes qui, au départ, sont les moins désavantagées. En pratique, cette dérive est souvent contrée par d’autres programmes de lutte contre la pauvreté ou dont le but est l’empowerment, mais ces derniers ont jusqu’à maintenant été négligés dans le débat dominant sur la viabilité et dans les lignes directrices pour une meilleure action que l’on a établies.
26Dans le deuxième point de vue, la contribution à l’empowerment pourrait être renforcée. Il existe cependant un besoin urgent de recherche appliquée, et il faut trouver un processus à long terme pour que les organisations, en leur propre sein et entre elles, apprennent à identifier et à développer de meilleures stratégies d’action. Comme on l’a dit précédemment, un certain nombre d’éléments essentiels d’une stratégie de genre devrait être adapté aux contextes et aux besoins particuliers des membres. Ceci pourrait mener au développement d’une variété de modèles sur les liens et les tensions éventuels qui pourraient apparaître entre l’empowerment, la lutte contre la pauvreté, et l’empowerment comme processus plus complexe que simplement la défense d’un paradigme en particulier, paradigme qui serait universel et “optimal”. Deux éléments essentiels de ce paradigme “optimal” sont indiqués : en premier lieu une participation plus efficace des clients/membres, et en second lieu une plus grande collaboration avec d’autres institutions, de manière à garantir un accès durable aux ressources et aux services.
27Comme on l’a déjà dit de nombreuses fois dans cet article (et de façon plus détaillée dans Mayoux, 1998), la participation accrue des clients/membres peut contribuer à la fois à la viabilité et à l’empowerment. Trois des paradigmes cités plus haut défendent la participation. Pourtant, le terme participation est utilisé de façons très diverses, comme on le résume dans l’encadré 5. L’établissement d’un équilibre spécial entre les différents aspects de la participation pourrait être un élément décisif pour la viabilité, l’extension de la pauvreté et l’empowerment. C’est seulement en consultant abondamment les femmes, en recherchant quels sont leurs besoins, leurs stratégies et leurs contraintes, et en instaurant un dialogue entre les femmes et les agences de développement que l’on arrivera à la meilleure adaptation aux besoins des femmes, et que l’on trouvera la meilleure combinaison possible entre l’empowerment et les objectifs de viabilité. La gestion des programmes doit alors élargir son cadre de travail. Néanmoins, on n’obtiendra vraisemblablement pas un unique modèle que les toutes femmes auront choisi dans tous les contextes en augmentant la participation des clients dans la conception des programmes. Une approche de type “participation pour l’empowerment” serait différente de l’approche de la viabilité financière en ceci qu’elle s’appuierait sur une vue multidimensionnelle de l’empowerment, et qu’elle donnerait la priorité aux besoins des femmes membres les plus pauvres et des non participantes les plus désavantagées plutôt qu’au personnel des programmes et au donateurs. En même temps, cette approche devrait trouver un équilibre, et négocier, dans la mesure du possible, les attentes des donateurs et des clientes dans la limite des ressources disponibles, et avec l’objectif contraignant d’une viabilité à long terme.
28Il est important de noter que cette approche devrait clarifier les contraintes qui limitent l’empowerment des femmes et les programmes de micro-crédit, et les moyens de les traiter en établissant des liens avec d’autres institutions. Les trois paradigmes défendent également l’établissement de liens avec d’autres institutions. Dans le paradigme féministe de l’empowerment, les liens entre les organisations ont toujours été importants, notamment pour le lobbying en faveur des questions de genre, et pour l’union avec les mouvements de femmes et les syndicats. Le paradigme de la réduction de la pauvreté insiste sur le besoin de services sociaux complémentaires, mais il défend souvent le micro-crédit comme une alternative à une mobilisation éventuellement plus conflictuelle des femmes sur les questions de genre. Les tenants du paradigme de la viabilité et de l’indépendance financières insistent beaucoup sur la pression que les donateurs exercent en faveur de la réforme du secteur bancaire formel, qu’il soit privé ou public, de façon à le rendre plus accessible pour les femmes. Dans cette perspective, ils ont fait des recommandations sur les attentes complémentaires. Ils ont également insisté sur le changement des lois sur la propriété (par exemple RESULTS, 1997). Mais dans la littérature du CGAP, on insiste surtout sur la nécessaire disparition des autres programmes de crédit et micro-crédit subventionnés, et le micro-crédit est souvent mentionné comme étant une solution à la réduction de la pauvreté dans un contexte de réforme économique générale qui réduit l’accès aux services sociaux.
29Avec les troisième et quatrième points de vue, il est évident que le micro-crédit en lui-même n’est pas la panacée, et que d’autres stratégies d’empowerment sont nécessaires. L’étude pilote qui résume les résultats de l’Asie du Sud et de l’Afrique confirme et renforce les conclusions critiques que l’on avait tirées au Bangladesh quant aux impacts potentiellement négatifs que le micro-crédit peut avoir pour certaines femmes (Goetz et Sengupta, 1996). En même temps, cependant, ces résultats montrent que l’on doit remettre en cause l’idée, dominante dans certaines agences donatrices et dans certaines ONG, que le micro-crédit ne doit pas s’occuper de l’empowerment. Tout d’abord, pour beaucoup de femmes, la réduction de la pauvreté, même comprise dans sa définition la plus étroite de l’augmentation du revenu, ne peut avoir lieu sans une relative prise de pouvoir dans les domaines plus larges (sociaux et politiques). Deuxièmement, on peut se poser des questions quant à l’utilisation de fonds pour des programmes qui pourraient éventuellement priver les femmes de pouvoir, dans certains contextes. Troisièmement, il s’avère que le micro-crédit peut contribuer à l’empowerment, et par conséquent il est important de chercher comment cette contribution pourrait encore être améliorée, notamment si cela peut se faire de façon rentable et de manière à renforcer la viabilité des programmes.
30Dans le quatrième point de vue, les programmes de micro-crédit peuvent éventuellement contribuer à l’empowerment des femmes, mais cela dépend – et ne se substitue pas à – des prestations de services sociaux qui sont proposées, et de la mobilisation des femmes. Lorsque de bons services sociaux et de fortes organisations de femmes existent, les femmes vont certainement pouvoir mieux utiliser les programmes de micro-crédit à des fins d’empowerment, et les possibilités de liens entre les programmes et les organisations de femmes sont plus ouvertes, sans que l’on utilise les fonds du programme. Par conséquent, il est très important que les donateurs ne détournent pas leurs fonds des services sociaux et de la mobilisation des femmes en faveur des questions de genre. Ce qui rend la situation actuelle particulièrement préoccupante est l’on vante les mérites du micro-crédit minimaliste, mais financièrement durable, parce qu’il serait la stratégie importante dans la lutte contre la pauvreté et l’empowerment, en réponse à la baisse constante des budgets de l’aide venue du Nord. Et cela se passe dans le contexte des politiques d’ajustement structurel qui défavorisent gravement les femmes et font se raréfier les services sociaux. De plus, même le financement des programmes de micro-crédit paraît hasardeux et incertain (Scully et Wysham, 1997).
Encadré 5 : Une nouvelle viabilité pour le paradigme de l’empowerment : la gestion des programmes de participation, la collaboration inter-institutionnelle et les questions qui demeurent
Un cadre de gestion des programmes de participation
Un système permanent de consultation participative, impliquant les différents actionnaires qui ont une influence dans la prise de décision dans le but de :
• rechercher les buts des femmes, leurs besoins et leurs stratégies et établir les stratégies possibles de renforcer la contribution à l’empowerment, contribution qui n’accentue pas nécessairement la vulnérabilité des femmes
• clarifier les conflits potentiels qui peuvent naître entre l’empowerment et la viabilité, dans la limite des ressources et des compétences disponibles chez les femmes et dans les agences de développement
• un cadre institutionnel pour une prise de décision participative, comprenant :
• des groupements à la base d’épargne et de crédit (SCG) de composition et de structure variables, en fonction des besoins des femmes concernées
• une fédération des groupements à la base, dotés de pouvoirs de décision politique
• des mécanismes de clarification des besoins et contraintes des donateurs/ONG, et de négociation avec les demandes des groupements à la base
La collaboration inter-institutionnelle
• investissement des fonds des programmes dans des actions rentables et éthiques, notamment dans des entreprises qui donnent du pouvoir aux femmes
• concession à des entreprises morales du secteur privé
• stimulation de l’expansion des groupements à la base autofinancés, à travers l’éducation mutuelle
• défense et lobbying en faveur de l’accès pour les femmes pauvres et du changement des règlements, par exemple sur la propriété des biens dans les services financiers formels, publics ou du secteur privé
• établissement de liens avec des prestataires de services complémentaires, en particulier avec des compétences en communication et en défense des questions de genre
• lobbying pour une permanence des fonds des donateurs pour les services complémentaires nécessaires
Les questions qui subsistent pour le nouveau paradigme
• quels sont les échanges qui subsistent entre la viabilité financière et l’empowerment et la réduction de la pauvreté ?
• là où l’empowerment et la réduction de la pauvreté s’opposent à la viabilité financière :
• comment cette opposition peut-elle affecter le délai nécessaire pour atteindre la viabilité financière ?
• quels sont les coûts qui devraient être considérés comme des services sociaux permanents et faire l’objet d’un financement séparé ?
• existe-t-il des contextes ou des groupes cibles où le micro-crédit pourrait utilement contribuer à l’empowerment et à la réduction de la pauvreté mais ne pourrait pas être viable ?
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 Consultative Group to Assist the Poorest est une importante initiative de collaboration internationale, née suite à la conférence de 1993 sur les Actions pour réduire la faim dans le monde, et qui est officiellement née en 1995. Les 9 membres qui la financent sont le Canada, la France, les Pays-Bas, les États-Unis, la Banque Africaine de Développement, la Banque Asiatique de Développement, le Fonds International pour le Développement Agricole, le Programme des Nations Unies pour le Développement/le Fonds des Nations Unies pour le développement du capital et la Banque mondiale, auxquels se sont joints l’Australie, la Finlande, la Norvège, le Royaume-Uni et la Banque inter-américaine de développement. Environ 200 millions de US $ (comprenant les participation au budget) ont été engagé dans des programmes de micro-finance pour les groupes les plus pauvres dans les pays à faible revenu, notamment pour les femmes (Banque mondiale, 1996). En réalité, les sommes dépensées par les membres individuels sont bien plus importantes.
2 Une discussion détaillée de ces preuves, ainsi qu’une bibliographie, sont données dans Mayoux, 1998.
3 Le faible taux de réussite de AKRSP a été attribué au fait qu’on n’a pas employé ni formé de manière adéquate le personnel féminin que l’on a recruté (Harper, 1995). Une réduction du personnel féminin dans le projet ACORD-Soudan semble également avoir contribué à la baisse spectaculaire de la participation des femmes (Stallard, 1996).
4 Pour une présentation de certaines questions, voir Goetz, 1992 ; MacDonald et al., 1997.
Auteur
Independent consultant, Action Aid and The Open University, Milton Keynes, Great Britain.
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