L’exportation organisée des travailleuses migrantes et le trafic de femmes : d’importants circuits financiers
p. 237-246
Note de l’éditeur
Référence : Sassen, Saskia. “L’exportation organisée des travailleuses migrantes et le trafic de femmes : d’importants circuits financiers”, in Christine Verschuur et Fenneke Reysoo, Genre, nouvelle division internationale du travail et migrations, Cahiers Genre et Développement, n°5, Genève, Paris : EFI/AFED, L'Harmattan, 2005, pp. 237-246, DOI : 10.4000/books.iheid.5746. Acheter le .pdf chapitre éditeur.
Texte intégral
Le trafic des femmes
1Le trafic implique le transport et/ou l’embauche sous contrainte de personnes, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, pour un travail ou des services, avec l’utilisation par les trafiquants de moyens de coercition.
2Le trafic des personnes viole les droits humains, civils et politiques. Il est surtout lié à l’industrie du sexe, au travail forcé, à l’immigration illégale. Beaucoup de lois, chartes, traités internationaux et résolutions de l’ONU ont été rédigés et différents organismes et commissions1 traitant cette question ont été créés pour lutter contre ce trafic. Les ONG jouent aussi un rôle de plus en plus important2.
3Le trafic des femmes pour l’industrie du sexe rapporte de plus en plus de bénéfices à ceux qui le dirigent. L’ONU estime que 4 millions de personnes ont fait l’objet de trafic en 1998, qui a produit un bénéfice de 7 milliards de dollars pour ces organisations criminelles3. Cette somme comprend les remises de fonds envoyées par les prostituées à leurs pays d’origine, et l’argent payé aux organisateurs et aux collaborateurs de ce trafic.
4Au Japon, les bénéfices obtenus ces dernières années grâce à l’industrie du sexe atteignent environ 4,2 milliards de yens par an. En Pologne, la police estime que le trafiquant reçoit environ sept cents dollars pour chaque Polonaise introduite dans le pays de destination. La police fédérale australienne calcule que le flux d’argent pour environ 200 prostituées est de 900’000 dollars par semaine (rapport de STV-GAATW). Les Ukrainiennes et les Russes sont très prisées sur le marché du sexe et rapportent d’énormes bénéfices : entre cinq cents et mille dollars par femme introduite dans le pays. Chacune de ces femmes peut avoir environ quinze clients par jour et rapportera près de 215’000 dollars par mois au groupe criminel qui l’exploite (OIM, 1996).
Traite des femmes Le miroir aux alouettes : de la pauvreté à l’esclavage sexuel
Malgré les difficultés persistantes pour collecter des données statistiques dans ce domaine, la plupart des acteurs impliqués dans la lutte contre la traite des êtres humains sont d’avis qu’il s’agit d’un phénomène croissant. Au niveau mondial, on estime à 700’000 le nombre de femmes et d’enfants auxquels les réseaux de traite font franchir chaque année des frontières internationales. Certaines organisations non gouvernementales estiment que ce chiffre est sensiblement plus élevé, compte tenu notamment de la traite à des fins d’exploitation du travail.
Le flux traditionnel entre certains pays en voie de développement (Afrique du Nord et Afrique centrale, Amérique latine, Asie) et les pays occidentaux de destination existe toujours. Toutefois, l’élément le plus frappant, qui est très préoccupant, c’est l’augmentation du nombre de femmes et d’enfants introduits clandestinement dans l’Union européenne à partir de pays d’Europe centrale et orientale. La dégradation de la situation économique dans ces pays a eu un effet direct sur le flux de la traite des femmes. Selon certaines estimations, jusqu’à 120’000 femmes et enfants sont introduits clandestinement en Europe occidentale chaque année.
Commission Européenne
<http://europa.eu.int/comm/employment_social/equ_opp/news/traffick_fr.htm>, Traffinfosheet
5On estime que ces dernières années le trafic a touché des millions de femmes et de jeunes filles à l’intérieur et à l’extérieur de l’Asie et de l’ex-Union soviétique, deux des principales régions du trafic de femmes. L’augmentation du trafic de ces deux régions est due au fait que ces femmes sont en paupérisation ou vendues à des intermédiaires à cause de la pauvreté de leurs foyers ou de leurs parents. Le taux élevé de chômage des ex-républiques soviétiques a été un facteur déterminant dans l’augmentation du nombre de groupes criminels et dans celle du trafic de femmes. Les taux de chômage féminin en Arménie, en Russie, en Bulgarie et en Croatie ont atteint 70 %, et environ 80 % en Ukraine à cause de l’implantation des politiques libérales. Des recherches démontrent que la nécessité économique est déterminante dans le fait que les femmes décident d’exercer la prostitution4.
6Le trafic de migrants est aussi un commerce rentable. D’après un rapport de l’ONU, les organisations criminelles des années 1990 ont réalisé un bénéfice d’environ 3,5 milliards de dollars par an grâce au trafic de migrants (pas uniquement des femmes) (OIM, 1996). La criminalité organisée est arrivée depuis peu dans ce domaine ; auparavant, c’étaient surtout des petits criminels qui se livraient à ce genre de trafic. Il existe aussi des rapports qui assurent que les groupes de crime organisé sont en train d’établir des alliances stratégiques internationales dans divers pays au moyen de réseaux ethniques ; ceci facilite le transport, les contacts locaux et la distribution, et l’obtention de faux documents d’identité. Global Survival Network a étudié cette pratique en détail après deux ans de recherche au cours desquelles une usine factice a été utilisée afin de s’introduire dans le monde du commerce illégal (1997). Ces réseaux facilitent aussi la circulation organisée de femmes d’autres pays – ils ne se limitent donc pas aux pays d’origine et de destination. Les trafiquants envoient en Thaïlande des femmes de Birmanie, du Laos, du Vietnam et de Chine, alors que des Thaïlandaises sont envoyées au Japon et aux Etats-Unis5.
7Certaines caractéristiques de la politique d’immigration et de son application rendent parfois les femmes victimes de trafic encore plus vulnérables et limitent leur protection par la loi. Si, comme il arrive le plus fréquemment, elles ont immigré de façon illégale, elles ne seront pas traitées comme les victimes d’un abus mais comme des contrevenantes aux lois sur les étrangers, en particulier en ce qui concerne l’entrée dans le pays, le séjour et le travail6. En essayant de résoudre le problème de l’immigration et du trafic illégal par des contrôles plus sévères aux frontières, on risque d’augmenter la probabilité que les femmes s’adressent à des trafiquants pour traverser les frontières, avec le risque que ceux-ci soient des membres d’organisations criminelles associées à l’industrie du sexe.
8En outre, dans de nombreux pays, la prostitution est interdite aux femmes étrangères, ce qui renforce le rôle de ces organisations criminelles dans le domaine de la prostitution. Cette restriction réduit aussi les choix de survie des femmes étrangères qui ont en général peu d’accès aux emplois. D’autres pays tolèrent que les étrangères exercent la prostitution, mais leur accès au marché normal du travail est beaucoup plus restreint – c’est le cas pour les Pays-Bas et la Suisse. D’après le rapport de l’OIM, la plupart des femmes qui exercent la prostitution dans les pays de l’Union européenne sont des étrangères : 75 % en Allemagne, 80 % à Milan (Italie), etc.
9Certaines femmes savent, dès qu’elles sont enlevées par les groupes organisés, qu’elles seront forcées de se prostituer, mais elles ne se rendent compte de la gravité des abus qu’elles auront à subir et des conditions de leur captivité que lorsqu’elles arrivent dans le pays de destination. La réclusion dont elles souffrent est souvent extrême, semblable à de l’esclavage, ainsi que le sont les abus qui vont souvent jusqu’au viol et à d’autres formes de violence sexuelle, et aux punitions corporelles. Elles sont très mal payées, et ceux qui les ont enlevées retiennent souvent leur salaire. On les empêche d’utiliser les méthodes de protection contre le sida et elles n’ont normalement aucun droit à l’aide médicale. Elles peuvent être détenues en tant qu’immigrantes illégales si elles font appel à la police, et les charges retenues contre elles seront des charges criminelles si elles sont en possession de faux papiers7.
10Le tourisme s’étant considérablement développé, jusqu’à devenir la principale stratégie de développement pour certaines villes, régions et même certains pays, l’industrie du divertissement a aussi connu une évolution parallèle et est considérée comme une stratégie clé de développement (Judd et Fainstein, 1999). L’industrie du sexe fait souvent partie du secteur du divertissement et a prospéré de façon parallèle8. Il devient donc évident qu’elle peut se transformer en stratégie de développement pour des régions très pauvres, au taux de chômage élevé, et dont les gouvernements essayent désespérément d’obtenir davantage de revenus et de réserves de devises. Lorsque l’industrie et l’agriculture locales ne sont plus sources d’emplois, de bénéfices économiques et de revenus fiscaux, ce qui était auparavant un moyen marginal de dégager des gains et des profits se transforme alors en un recours principal. L’importance croissante de ce secteur produit des effets secondaires. Par exemple, lorsque le FMI et la Banque mondiale conçoivent le tourisme comme l’unique solution pour sortir de la stagnation dont souffrent beaucoup de pays pauvres et octroient des prêts pour favoriser l’expansion de ce secteur, il se peut qu’ils soient aussi en train de contribuer à créer un cadre institutionnel plus vaste pour l’expansion du secteur du divertissement qui, lui, aide de façon indirecte à promouvoir le commerce sexuel. Cet effet secondaire des stratégies de développement laisse penser que le trafic des femmes peut encore se développer de façon importante.
11Le fait que la criminalité organisée se soit introduite dans le commerce du sexe, la création de réseaux ethniques transfrontaliers et la croissante transnationalisation de nombreux aspects du tourisme donnent à penser que l’industrie du sexe continue de croître à l’échelle mondiale. On suppose donc que des efforts importants sont faits pour entrer sur de nouveaux marchés et pour développer partout cette industrie du sexe. C’est une possibilité inquiétante, surtout si l’on considère le nombre croissant de femmes qui n’ont que très peu ou aucune possibilité d’accéder à l’emploi. Il faut s’attendre à ce que ces chiffres augmentent étant donné les taux élevés de chômage et de pauvreté, la diminution des chances d’emploi des secteurs les plus traditionnels de ces économies, et une dette extérieure de plus en plus lourde, autant de facteurs qui font que les gouvernements de ces pays seront incapables de fournir les services sociaux et de prendre les pauvres en charge.
12Les femmes qui travaillent dans l’industrie du sexe se transforment (dans certaines économies) en facteur essentiel d’expansion de l’industrie du divertissement, et donc du tourisme. Il s’agit d’une stratégie de développement et donc d’une importante source de revenus pour les gouvernements. Ces liens sont structurels, il ne s’agit pas d’une question de conspiration. Leur poids dans ces économies augmentera en fonction de l’absence ou des limitations d’autres sources de revenus pour assurer des moyens de subsistance, des bénéfices et des revenus pour les travailleurs, les entrepreneurs et les gouvernements.
Les envois de fonds
13Les femmes et les migrants en général participent aux stratégies de développement par un autre canal, l’envoi des fonds, qui représentent, pour les gouvernements de nombreux pays, une source importante de revenus en devises étrangères. Si le flux des envois de fonds peut sembler dérisoire comparé aux mouvements massifs de capitaux par jour sur les marchés financiers, il est souvent très important pour les économies en développement ou en difficulté.
14En 1998, la valeur totale des fonds envoyés par des migrants dans leur pays d’origine a atteint près de 70 milliards de dollars9. Afin de comprendre l’importance de ces sommes il faudrait les comparer avec le PIB et les réserves de devises étrangères des pays spécifiquement impliqués, plutôt qu’avec le flux global de capitaux. Prenons comme exemple les Philippines […] dont les envois ont représenté la troisième source de devises étrangères ces dernières années. Au Bangladesh, un autre pays dont beaucoup de travailleurs et travailleuses vivent au Moyen-Orient, au Japon et dans plusieurs pays européens, les mandats ont représenté près d’un tiers des devises étrangères.
15L’exportation de travailleurs et travailleuses et les mandats sont des instruments à la disposition des gouvernements pour amortir les effets du chômage et de la dette extérieure. Les gouvernements se sont assurés d’importants bénéfices de deux façons. L’une est hautement formalisée, l’autre est simplement un sous-produit du processus même de migration. La Corée du Sud et les Philippines sont parmi les meilleurs exemples des programmes officiels d’exportation de main-d’œuvre10. Au cours des années 1970, la Corée du Sud a développé de vastes programmes pour promouvoir l’exportation de travailleurs, initialement vers les pays de l’OPEP, du Moyen-Orient, et ensuite vers le reste du monde, programmes faisant partie intégrante du développement de son industrie de la construction outre-mer. L’explosion économique de la Corée du Sud a fait que l’exportation de travailleurs est devenue moins nécessaire et moins attrayante. Le gouvernement des Philippines, en revanche, a étendu et diversifié le concept « d’exportation » de ses citoyens comme un moyen de résoudre le problème du chômage et d’assurer des réserves de devises étrangères.
16Le gouvernement philippin a joué un rôle important dans l’émigration des femmes philippines aux Etats-Unis, au Moyen-Orient et au Japon, au moyen de l’Administration de l’emploi des Philippines à l’étranger. Etablie en 1982, elle a organisé et supervisé l’exportation d’infirmières et de domestiques vers des régions du monde à forte demande. La combinaison d’une dette extérieure élevée et d’un chômage important a justifié cette politique. Les travailleurs et travailleuses des Philippines à l’étranger ont envoyé à leurs foyers près d’un milliard de dollars en moyenne par an, au cours des cinq dernières années. Par ailleurs, plusieurs pays importateurs de main-d’œuvre ont vu les avantages de cette politique. Les pays de l’OPEP du Moyen-Orient ont observé la forte croissance de la demande de domestiques après le boom du pétrole en 1973. Face à une pénurie importante d’infirmières, une profession qui demande des années de formation mais qui offre des salaires plutôt bas et peu de prestige et de reconnaissance, les Etats-Unis ont approuvé des lois spécifiques en 1989 (Immigration Nursing Relief Act) qui ont permis l’importation d’infirmières11. Et le Japon a approuvé des lois qui ont permis l’arrivée de « travailleurs du divertissement » dans une économie en forte expansion au cours des années 1980, marquées par l’augmentation de hauts revenus disponibles et une importante pénurie de main-d’œuvre12.
Les avantages du travail à l’étranger : les contributions économiques
[…] Les travailleuses émigrées sont les principales contributrices à l’économie de leur pays d’origine avec les fonds qu’elles y envoient. Au Sri Lanka, elles représentaient plus de 62 % de tous les fonds privés envoyés en 1999, soit plus de 50 % de la balance commerciale. Aux Philippines, le montant total de leurs versements s’élevait à 6,2 milliards de dollars en 2001. A un autre niveau, les Marocaines travaillant en Italie ont établi des liens commerciaux informels effectifs entre leur pays d’origine et leur pays d’immigration. […]
Source : Organisation internationale pour les migrations, World Migration 2003 : Managing Migration Challenges and Responses for People on the Move, Volume 2 : IOM Migration Report Series, Genève, p. 7, in International Labour Organization, 2003, An Information Guide. Preventing Discrimination, Exploitation and Abuse of Women Migrant Workers, Genève, livret 4, p. 10
Copyright © 2003 International Labour Organization
Traduit de l’anglais par Emmanuelle Chauvet
17Le gouvernement des Philippines a aussi approuvé des réglementations qui ont permis aux agences de mariages par correspondance de recruter des jeunes Philippines pour épouser des étrangers, comme pour un accord contractuel. La rapide croissance de ce commerce est due principalement à l’effort organisé du gouvernement. Les Etats-Unis et le Japon ont été parmi les principaux clients. Les communautés agricoles japonaises ont été un lieu de destination clé pour ces mariées, compte tenu de l’énorme déficit de population, et en particulier de jeunes femmes, dans les régions rurales, alors que l’économie connaissait un essor très important et que la demande de main-d’œuvre dans les grands centres urbains était très élevée. C’était la politique des gouvernements municipaux d’accepter les mariées philippines.
18La plupart des Philippines qui se trouvent dans ces filières travaillent à l’étranger en tant que domestiques, surtout dans les pays asiatiques13. Le deuxième groupe en importance et qui croît rapidement, est celui des employées du spectacle qui ont émigré, surtout au Japon14. La rapide augmentation du nombre de migrants artistes est due en grande partie aux plus de cinq cents « agents d’artistes » qui opèrent aux Philippines en dehors de la couverture de l’Etat – bien que l’Etat tire évidemment profit des mandats de ces travailleuses. Ces agents s’emploient à fournir des femmes à l’industrie du sexe au Japon, laquelle est soutenue et contrôlée essentiellement par des groupes du crime organisé, plutôt que de passer par des programmes gouvernementaux pour l’entrée de travailleuses. Ces femmes sont recrutées pour chanter et pour distraire, mais souvent, la plupart du temps peut-être, elles sont aussi forcées d’exercer la prostitution15.
19On a de plus en plus de preuves de l’énorme violence exercée contre les épouses par correspondance dans divers pays, sans distinction de leur nationalité d’origine. Aux Etats-Unis, le Service de l’immigration a récemment déclaré que la violence domestique envers les épouses achetées par correspondance devient de plus en plus grave16. Une fois de plus, la loi opère contre ces femmes lorsqu’elles cherchent de l’aide puisqu’elles risquent d’être emprisonnées si elles rompent cette « relation contractuelle » avant une durée de deux ans. Au Japon, l’épouse par correspondance n’a pas le même statut d’égalité au regard de la loi et il existe de nombreuses preuves que beaucoup de ces femmes sont l’objet non seulement des abus de leurs maris, mais aussi d’autres membres de la famille.17 Le gouvernement philippin a légalisé la plupart des organisations « d’épouses par correspondance » jusqu’en 1989. Mais les abus commis par des époux étrangers ont finalement mené à leur interdiction sous le gouvernement de Corazón Aquino. Il est néanmoins presque impossible d’éliminer ces organisations qui continuent de fonctionner en violation des lois.
20Bien que les Philippines soient peut-être le pays au programme d’exportation le plus développé, il n’est pas le seul à avoir exploré ces stratégies. La Thaïlande a lancé une campagne en 1998, après la crise financière de 1997-1998, pour promouvoir la migration de travailleurs et l’embauche de travailleurs et travailleuses thaïlandais par des entreprises étrangères. Le gouvernement a essayé d’exporter des travailleurs au Moyen-Orient, aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Australie et en Grèce. Le gouvernement du Sri Lanka a essayé d’exporter 200’000 travailleurs et travailleuses qui s’ajoutaient au million de personnes qui sont déjà à l’étranger. Les Sri Lankaises ont envoyé des fonds d’une valeur de 880 millions de dollars en 1998, la majorité provenant d’emplois domestiques au Moyen-Orient et en Extrême-Orient18. Le Bangladesh a aussi organisé de vastes programmes d’exportation de travailleurs vers les pays de l’OPEP du Moyen-Orient au cours des années 1970. Ceci s’est poursuivi, tout comme les migrations individuelles, notamment aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, ce qui constitue aujourd’hui une importante source de devises. Ces travailleurs ont envoyé 1,4 milliard de dollars par an au cours des cinq dernières années19.
Source : Traduit de l’espagnol. Texte original in : Saskia Sassen, Contrageografías de la globalización. Género y ciudadanía en los circuitos transfronterizos, éd. Traficantes de sueños, Madrid, 2003
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10.2307/2547324 :Notes de bas de page
1 Voir Chuang, 1998. Le trafic est un sujet tellement reconnu qu’il a été traité lors de la rencontre du G8 à Birmingham en mai 1998 (OIM, 1998). Les présidents des huit pays les plus industrialisés ont insisté sur l’importance de leur collaboration dans la lutte contre la criminalité organisée internationale et le trafic des personnes. Le président des Etats-Unis a donné un ensemble de directives à son gouvernement, lesquelles prétendaient augmenter et renforcer la lutte contre le trafic des femmes et des jeunes filles. Ceci a donné comme résultat l’initiative du sénateur Paul Wellstone qui a été présentée au Sénat en 1999 (voir Dayan, 1999, pour une analyse critique).
2 La Coalition contre le trafic des femmes possède des sièges et des représentants en Australie, au Bangladesh, en Europe, en Amérique latine, en Amérique du Nord, en Afrique et en Asie. Le Women’s Rights Advocacy Program (Programme de défense légale des droits des femmes) a établi un programme de mesures contre le trafic des personnes dans le monde. Nous faisons aussi référence à d’autres organisations ailleurs dans cet article.
3 Voir Fondation contre le trafic des femmes (STV) et Alliance mondiale contre le trafic des femmes (GAATW). Pour d’autres sources de renseignements plus récentes : <www.hrlawgroup.org/site/programas/traffic.html>. Aussi Altink, 1995 ; Shannon, 1999 ; Lin et Marjan, 1997 ; Lim, 1998.
4 Il existe aussi un marché croissant de garçons et de filles pour l’industrie du sexe, ce qui est le cas depuis longtemps en Thaïlande, mais qui s’est étendu à d’autres pays d’Asie, d’Europe de l’Est et d’Amérique latine.
5 Il existe différents rapports concernant les mouvements transfrontaliers motivés par le trafic des personnes. Les intermédiaires de Malaisie vendent des Malaisiennes à des réseaux de prostitution en Australie. Des femmes de l’est de l’Europe, d’Albanie et du Kosovo ont été vendues en tant que prostituées par des bandes criminelles à Londres (Hamzic et Sheehan, 1999). Des adolescentes européennes de Paris et d’autres villes ont été vendues à des clients arabes et africains (Shannon, 1999). Aux Etats-Unis la police a démantelé une organisation qui importait des femmes de Chine, de Thaïlande, de Corée, de Malaisie et du Vietnam (Booth, 1999). Les femmes étaient obligées de payer entre 30’000 et 40’000 dollars qu’elles devaient obtenir par leur travail dans l’industrie du sexe ou de la couture. Les femmes qui exerçaient la prostitution ont été réparties sur tout le territoire des Etats-Unis pour fournir une variété constante aux clients.
6 Voir Castles et Miller, 1998 ; Mahler, 1995 ; Castro, 1999.
7 Un dossier de la Coalition pour l’abolition de l’esclavage et du trafic rapporte qu’une étude concernant les travailleurs du sexe asiatiques a constaté qu’avant d’être vendues aux réseaux de prostitution les femmes étaient fréquemment violées et que 33 % de ces personnes exerçaient la prostitution après avoir été leurrées.
8 Voir Bishop et Robinson, 1998 ; Booth, 1999.
9 Voir en général Castles et Miller, 1998 ; Castro, 1999.
10 Sassen, 1998.
11 Près de 80 % des infirmières qui arrivèrent selon les conditions établies par cette loi étaient originaires des Philippines.
12 Le Japon a approuvé une nouvelle loi d’immigration – plus exactement un amendement à une loi ancienne – qui reformule de façon radicale les conditions d’entrée de travailleurs et travailleuses. Elle a permis l’entrée d’une série de professionnels associés à la nouvelle économie de services – des spécialistes en finances, comptabilité et lois occidentales –, mais elle a condamné l’entrée illégale de ceux qu’elle a désignés comme « simples travailleurs ». Ceci a créé une rapide augmentation des entrées de personnes sans papiers à la recherche d’emplois à faibles salaires. Cette interdiction souligne le fait que la nouvelle loi a prévu des provisions spéciales permettant l’entrée « d’artistes » (Sassen, 1998 : chapitre 6).
13 Yeoh et al., 1999 ; Chin, 1997 ; Heyzer, 1994.
14 Sassen, 2000 : chapitre 9.
15 Ces femmes sont recrutées et introduites aussi bien au moyen des filières légales que des filières illégales. De toute façon, elles ont peu de pouvoir pour résister aux mafias. Même si elles sont payées moins que le salaire minimum, elles rapportent d’importants bénéfices aux intermédiaires et aux employés impliqués. Le dénommé commerce du divertissement a augmenté de façon considérable au Japon.
16 PIB, 1999.
17 Takahashi, 1996.
18 David, 1999.
Auteurs
Professeure de sociologie à l’Université de Chicago et professeure invitée à la London School of Economics.
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