La gouvernance avec une perspective de genre : implications pour la Division Gouvernance de la coopération Suisse
p. 65-74
Note de l’éditeur
Référence : Lévy, Caren, “La gouvernance avec une perspective de genre : implications pour la Division Gouvernance de la coopération Suisse”, in Christine Verschuur et Fenneke Reysoo, Genre, pouvoirs et justice sociale, Cahiers Genre et Développement, n°4, Genève, Paris : EFI/AFED, L'Harmattan, 2003, pp. 65-74, DOI : 10.4000/books.iheid.5640. Acheter le .pdf chapitre éditeur.
Texte intégral
1Dans le contexte des débats actuels sur la gouvernance, il semble utile de rappeler la définition que donne le PNUD (Programme des Nations unies pour le développement) de ce terme, qui a fait l’objet de nombreuses interprétations : « [La gouvernance est] l’exercice de l’autorité économique, politique et administrative dans le but de gérer les affaires d’un pays à tous les niveaux. Elle comprend les mécanismes, les processus et les institutions par lesquels les citoyens et les groupes expriment leurs intérêts, exercent leurs droits légaux, remplissent leurs obligations et trouvent des compromis » (PNUD, 1997, in Baden, 2000).
2Contrairement à des définitions plus anciennes, qui se concentraient avant tout sur le gouvernement, cette définition induit que la gouvernance traite des relations entre les acteurs au sein de l’Etat, du marché et de la société civile.
3Cette définition plus large de la gouvernance permet de considérer les questions de genre de deux façons essentiellement : dans les processus de la gouvernance, et dans ses résultats. Il est utile de commencer par parler de ces derniers, car ils indiquent quels devraient être les objectifs des structures et des processus de la gouvernance.
Les questions de genre dans les résultats de la gouvernance
4En démocratie, la rhétorique veut que les résultats de la gouvernance reflètent les besoins, les responsabilités et les intérêts des citoyens. A la base, on trouve souvent un certain nombre de droits humains ratifiés par le gouvernement, et la capacité des femmes et des hommes dans leur diversité 1 à répondre à leurs besoins traduit leur capacité à exercer leurs droits. Ainsi les résultats de la gouvernance devraient être le reflet des besoins pratiques et stratégiques ressentis par les femmes et les hommes en matière de relations de genre dans le cadre de diverses relations sociales, en fonction du moment et du lieu.
5En termes de politique et de planification, le suivi et l’évaluation des résultats de la gouvernance doivent donc être différenciés selon le sexe et selon d’autre dimensions socio-économiques (par exemple l’ethnicité, l’âge, selon le cas). Les indicateurs ainsi détaillés apportent des informations déterminantes sur les relations sociales dans une société particulière, les inégalités qu’elle recèle et l’impact sur ses citoyens des activités relevant de la gouvernance. Pour la coopération au développement, ces données détaillées fournissent non seulement des informations contextuelles utiles pour les politiques et programmes, mais permettent également un retour utile sur l’impact des interventions soutenues par les donateurs. A l’échelle nationale, l’Indicateur sexospécifique de développement humain (ISDH) et l’Indice de participation des femmes (IPF) calculés par le PNUD (PNUD, 1995) montrent que l’on peut développer ces mesures et les utiliser pour des comparaisons diachroniques et entre les pays. Il est frappant de constater que, malgré de très fortes variations, ces indicateurs montrent que, presque nulle part dans le monde, les femmes ne partagent les résultats de la gouvernance à égalité avec les hommes.
Les questions de genre dans les processus de la gouvernance
6Comment les processus de la gouvernance peuvent-ils faire en sorte que tous les citoyens exercent leurs droits, satisfassent leurs besoins et remplissent leurs responsabilités ? Il faut d’abord reconnaître que, dans la plupart des sociétés, les femmes et les hommes, les filles et les garçons, dans leur diversité, ne participent pas au processus avec les mêmes ressources et les mêmes chances. Dans la plupart des contextes, les relations sociales, dont celles de genre, reflètent les inégalités. L’accès et le contrôle, et donc la possibilité de satisfaire ses besoins, sont très inégaux entre les divers groupes d’hommes et de femmes.
7Les institutions et leurs pratiques, ainsi que la façon dont elles traitent les femmes et les hommes, sont au cœur de ces inégalités et différences. Les institutions se définissent ici comme « des règles qui structurent les interactions entre les acteurs » (Knight 1992 : 3). Les institutions n’ont pas seulement une forme légale mettant en jeu l’Etat et les organisations privées dans le cadre des institutions d’Etat. Elles prennent également la forme de règles appliquées de façon informelle aux niveaux interpersonnel, du ménage et de la communauté dans différentes arènes, où elles correspondent aux normes et valeurs relatives aux relations entre femmes et hommes. Dans de nombreuses sociétés, des normes et règles puissantes en matière de relations de genre entraînent un traitement injuste et inégal des femmes, lequel se justifie par une idéologie religieuse, culturelle ou économique. Les inégalités apparaissent souvent dans l’interaction de ces différents types et niveaux institutionnels.
8Aussi, par exemple, l’interprétation de lois socialement justes par les individus et organisations utilisant des règles et des postulats informels entraîne-t-elle souvent des contradictions entre l’intention et la pratique. Les lieux de cette discrimination sont divers : au sein du ménage, de la communauté, au travail ou dans les interactions avec la bureaucratie (d’Etat ou non), ou encore dans les arènes politiques. Voici quelques exemples du gouffre qui existe entre les lois et leur application, dans différents contextes :
L’accueil des femmes victimes de violences domestiques par la police, quand les violences causant des dommages corporels ou physiques peuvent conduire, mais ne conduisent pas forcément, à des poursuites légales contre l’époux ou le partenaire masculin.
La contradiction, dans nombre de sociétés, entre les lois stipulant qu’à travail égal, salaire égal et les inégalités de salaire entre les femmes et les hommes pour un même travail.
Dans les administrations d’Etat, l’accueil, différent selon le sexe, des personnes qui viennent demander des documents officiels (par exemple un passeport) ou faire valoir leurs droits sociaux.
Les normes différentes appliquées aux femmes et aux hommes dans la vie publique.
9En outre, dans la sphère légale, il arrive que les règles constitutionnelles conformes aux droits humains ratifiés partout dans le monde ne soient pas cohérentes avec les lois et règlements déterminant l’accès et le contrôle des hommes et des femmes sur les ressources, et leur capacité à exercer leurs droits. Par exemple, dans certaines sociétés, bien que la constitution établisse l’égalité des chances pour les hommes et les femmes, il est difficile pour les femmes d’accéder à la terre ou au capital.
10De plus, le nombre croissant d’acteurs engagés dans les activités de gouvernance complique l’entrée dans le processus. Comme on l’a vu, les conceptions actuelles de la gouvernance intègrent des acteurs de l’Etat, du marché, de la société civile, c’est-à-dire les secteurs public, privé et communautaire. Les contraintes et les possibilités de participer varient, pour les hommes et les femmes, selon le secteur.
11La nécessité de faire un suivi des processus de la gouvernance pour garantir l’égalité entre les sexes est de plus en plus reconnue. Ce suivi est plus facile si, dès le départ, l’égalité entre les sexes est reconnue comme étant une partie importante du résultat attendu. Dans le cas contraire, il faut lancer et faire le suivi d’interventions pour l’intégration transversale des questions de genre, avec la participation égalitaire des femmes et des hommes, afin que le résultat comme le processus contribuent à l’égalité des chances entre les femmes et les hommes.
Quelques implications pour la Division Gouvernance de la DDC (coopération suisse)
12A partir de cette distinction entre les résultats et le processus, on peut relever les questions de genre suivantes dans les thématiques de l’action de la Division Gouvernance.
Macroéconomie et gouvernance mondiale
13Ces dix dernières années, une grande partie de la recherche s’est concentrée sur les résultats en termes de genre de la macroéconomie et de la gouvernance mondiale. Les recherches du Commonwealth Secretariat (1989), de Cornia et al. (1987), d’Elson (1995), de Bakker (1994), entre autres, ont montré l’impact différentiel des politiques macroéconomiques d’ajustement structurel sur les femmes et sur les hommes. La Banque mondiale elle-même reconnaît désormais que le traitement des questions d’inégalité entre les sexes est important pour le règlement des problèmes économiques et de gouvernance : « L’égalité entre les sexes renforce la capacité des pays de se développer, de faire reculer la pauvreté, et de gouverner efficacement. La promotion de l’égalité entre les sexes est une partie importante de la stratégie de développement qui veut permettre à tous – les femmes comme les hommes – de sortir de la pauvreté et d’avoir un meilleur niveau de vie » (Banque mondiale, 2001 : 2).
14L’impact négatif et différentiel de la politique macroéconomique sur les femmes et les hommes, les filles et les garçons peut être imputé à de nombreux facteurs. L’un de ces facteurs est induit par les postulats des macroéconomistes et des décideurs politiques sur les femmes et les hommes au sein du ménage, sur leurs rôles et leurs relations économiques (voir par exemple Elson, 1995, Moser, 1993). En découlent des politiques qui, soit ignorent la participation économique des femmes, soit ne reconnaissent pas l’équilibre à trouver entre leurs activités économiques et les activités liées à leurs responsabilités domestiques, ainsi qu’avec leur engagement politique. Un autre facteur est lié au manque de représentation des femmes dans le processus de décision sur les priorités et les mécanismes d’application de la politique macroéconomique.
15Au niveau international, la nécessité de données détaillées selon le sexe permettant d’évaluer à la fois les résultats et les processus de la gouvernance macroéconomique et mondiale est mieux acceptée, comme on l’a vu plus haut avec l’initiative du PNUD. Mais de nombreux gouvernements et donateurs ne détaillent toujours pas les indicateurs pour mesurer les résultats et les processus qui sous-tendent la politique macroéconomique.
Droits humains et Etat de droit
16Dans ce domaine, l’importance donnée aux « droits humains », considérés comme traitant des droits des femmes et des hommes, a souvent entraîné une certaine résistance à l’adoption d’une perspective de genre. Ce terme cache des relations de pouvoir inégales au sein et entre différents groupes, relations qui ont des effets sur la capacité de chaque groupe à exercer ses droits. On parle ici entre autres de relations de pouvoir au sein de groupes de femmes et de groupes d’hommes, mais aussi entre les femmes et les hommes, comme il ressort nettement des effets de la réalisation des droits politiques et socio-économiques. Par exemple, presque partout les femmes sont sous-représentées à presque tous les niveaux de l’organisation politique, même si leur participation est parfois plus forte dans les structures locales que nationales. Mais même à ce niveau, les femmes pauvres restent largement exclues. De même, les inégalités d’accès à un logement sûr et stable sont parfois autant liées au sexe qu’à la classe.
17Dans des situations d’oppression politique et d’absence d’Etat de droit, le sexe à lui seul peut être la base d’abus, comme dans le cas des viols systématiques des femmes en Bosnie et au Rwanda. Dans des situations moins extrêmes, des contraintes légales formelles, mais surtout des contraintes comportementales informelles, sont des obstacles à un exercice égal pour les femmes et les hommes de leurs droits politiques et socio-économiques, et à leur utilisation des possibilités qu’offre l’Etat de droit. Par exemple, dans de nombreux pays, la différence des taux d’alphabétisation selon le sexe désavantage les femmes qui peuvent moins facilement que les hommes connaître et exercer leurs droits et l’Etat de droit. C’est ainsi que les femmes ne peuvent pas participer aux processus politiques de façon informée et indépendante et peuvent se retrouver à la merci de bureaucrates ou d’individus sans scrupule détenteurs de pouvoir (et la corruption ne se limite pas à la corruption financière, mais recouvre aussi les faveurs sexuelles). Leur accès à l’information est aussi plus difficile, sur des questions qui vont de la santé aux dernières connaissances sur les cultures vivrières.
18Le suivi et l’évaluation des résultats et des processus, dont il a été question dans la section Macroéconomie et gouvernance mondiales, sont également nécessaires en matière de droits humains et d’Etat de droit.
Rôle de l’Etat, décentralisation, développement local et société civile
19Les débats sur la gouvernance comportent en général un volet sur la décentralisation vers les niveaux locaux, en reconnaissant que c’est à ce niveau que les femmes et les hommes peuvent le plus directement « exprimer leurs intérêts, exercer leurs droits, remplir leurs obligations et trouver des compromis » (PNUD, ibid.). Les effets de la décentralisation varient selon le sexe, à deux niveaux : les processus de décentralisation sont internes au secteur gouvernemental, du central vers le local (qui prend en charge des compétences gouvernementales), et aussi du gouvernement local vers la société civile (qui accède au contrôle des décisions au sein des communautés). Les femmes continuent donc à rencontrer des obstacles qui les empêchent de participer de manière égalitaire au travail des gouvernements locaux, aux décisions de politique locale, et de profiter autant que les hommes des bénéfices du développement local.
20Ces inégalités sont imputables à un certain nombre d’éléments des processus de décentralisation et de développement local. L’un de ces éléments résulte des a priori des hommes politiques aux niveaux central et local, mais aussi des femmes et des hommes de la société civile, sur les rôles et relations des femmes et des hommes au sein du ménage et des communautés (voir par exemple Moser, 1993). En conséquence, les femmes sont soit exclues des activités locales, soit reconnues, mais seulement dans leurs rôles de femmes et de mères, dans lesquels elles sont souvent sous-estimées. Cet état de fait, qui influe aussi sur l’élaboration des budgets et l’organisation des services, porte préjudice aux femmes individuellement au sein des ménages. Elles en sont aussi affectées dans la société civile, lorsqu’elles lancent des initiatives importantes au bénéfice de la communauté (par exemple pour améliorer la distribution d’eau) ; initiatives qui par conséquent ne sont ni reconnues ni soutenues par les gouvernements et parfois même ne le sont pas non plus par les membres de leurs communautés.
21Un second facteur, lié au premier, est l’exclusion des femmes, et souvent, des hommes pauvres, des décisions décentralisées en matière de développement local. On retrouve cette exclusion dans le nouvel « accent » mis sur les partenariats, qui figurent si souvent dans les débats sur la gouvernance et la décentralisation. Pour le développement local, les partenariats peuvent inclure diverses combinaisons de relations entre les secteurs public, privé et communautaire pour la prestation et la maintenance des biens et services. Mais les nouvelles structures institutionnelles et organisationnelles construites pour les partenariats ne reconnaissent pas souvent les femmes comme utilisatrices, prestataires et actrices du maintien des biens et services au même degré que les hommes. Les résultats en sont donc inégaux ou mauvais, notamment parce que les revenus des femmes (pour le remboursement), ou leur travail (pour la prestation ou la maintenance) sont souvent des composantes cruciales mais non reconnues de la stratégie de partenariat.
22Le suivi et l’évaluation des résultats et des processus, dont il a été question dans la section Macroéconomie et gouvernance mondiales, sont également nécessaires en matière de décentralisation et de développement local, de rôle de l’Etat et de la société civile.
La gouvernance selon une perspective de genre
Georgina Ashworth
La gouvernance est censée être neutre en matière de genre. En réalité, le discours, les procédures, les structures et les fonctions de la gouvernance demeurent lourdement orientés en faveur des hommes en général, et de certains groupes d’hommes en particulier. Ce partage inégal du pouvoir entraîne un partage inégal des ressources – temps, revenu, biens – entre les hommes et les femmes. Les conséquences de ce déséquilibre dans la distribution se traduisent de façon évidente par le nombre disproportionné de femmes illettrées et qui vivent dans une pauvreté extrême. Pour corriger ces inégalités, une analyse des processus et structures de la gouvernance selon la perspective du genre est nécessaire. Cette analyse suggère que la famille (ou le ménage) et la communauté sont des lieux de gouvernance en ceci qu’ils sont des espaces d’interaction entre les personnes, espaces où s’exerce le pouvoir. En outre, ces lieux évoluent en interdépendance avec les trois niveaux de gouvernement – local, national et international – comme le prouve indéniablement la façon dont les relations de genre interviennent dans et sont influencées par des règlements touchant tant le domaine privé que le domaine public. En effet, si on analyse la gouvernance selon une perspective de genre, on gomme les distinctions conventionnelles entre les sphères privée et publique, en les considérant comme des espaces mutuellement dépendants dans lesquels s’exercent des normes, des valeurs et des traditions influencées par le genre.
En gommant ces distinctions conventionnelles, on peut mieux analyser les inégalités de pouvoir. La violence que vivent les femmes et les filles au sein des familles est désormais considérée comme une violation des droits humains, en d’autres termes comme une question d’ordre public et non plus seulement d’ordre privé. De la même façon, les effets de l’échec des mouvements de libération nationaux, un peu partout dans le monde, à émanciper les femmes du pouvoir arbitraire de leurs maris à la maison vont au-delà de la sphère domestique. Les attitudes et comportements des hommes dans la sphère privée permettent de déterminer les relations, et le déséquilibre de pouvoir, qui existent entre hommes et femmes dans la communauté, au travail et dans l’espace politique. On peut souvent constater, par exemple, que plus une organisation de la société civile devient formelle, moins il est probable de trouver des femmes aux postes rétribués ou de direction. En effet, les femmes en tant que groupe social subissent des discriminations dans la gouvernance de la société civile. Le travail également demeure un lieu d’inégalité de pouvoir entre hommes et femmes, qui se caractérise par une ségrégation selon le poste de travail et des différences de salaire qui vont à l’encontre de la promotion des femmes vers des postes de décision.
Le rôle des grandes entreprises et des sociétés multinationales dans la gouvernance nationale et internationale est tel que les effets des inégalités au travail dépassent le secteur privé.
Une analyse de la gouvernance, aux niveaux des gouvernements locaux et nationaux, intégrant les relations de genre, met en avant la question de la représentation. On entend parfois que la décentralisation des fonctions du gouvernement vers les niveaux locaux contribue à la réduction des inégalités entre les sexes, car la décentralisation améliore la représentation de la base (et donc des femmes). Pourtant tous les centres locaux de pouvoir ne permettent pas ou n’encouragent pas les groupes marginalisés à participer à leurs décisions, ou n’ont pas les moyens d’assurer leur représentation. En effet, les femmes et leurs intérêts, leurs besoins, leurs perspectives et leurs attentes n’ont pas été considérés comme dignes d’une représentation spécifique. Au nom d’une communauté d’intérêt entre les hommes et les femmes, les décisions et actions en matière de gouvernance se font au nom des femmes, mais sans qu’elles soient consultées. Mais si on leur demande leur avis, la plupart des femmes ont des priorités différentes de celles de la plupart des hommes. La légitimité des structures et processus de gouvernance en vigueur doit être mise en doute lorsque les intérêts et les voix de plus de la moitié de la population ne se reflètent pas dans les décisions prises. Cette crise de légitimité apparaît de façon évidente dans la nature sexuée du conflit : les femmes ne décident ou ne s’engagent que rarement dans les guerres, mais elles souffrent toujours de leurs conséquences en tant que réfugiées ou victimes de la violence aveugle et intentionnelle. Même lorsque les révolutions ont été menées au nom de la justice sociale, les femmes ont rarement bénéficié de la reconstruction de l’après-guerre.
Les femmes font évoluer les inégalités de la gouvernance. La mobilisation de la base et l’organisation politique des femmes dans des pays aussi divers que l’Afrique du Sud ou l’Inde ont entraîné des améliorations importantes de la représentation politique. Pour amener un changement réel, une masse critique de femmes est nécessaire au sein d’une institution ou d’une structure donnée, mais il est important de comprendre que le mot « critique » désigne non seulement une présence des femmes en nombre suffisant, mais aussi leur participation active aux décisions parce qu’elles ont une influence légitime ou sont numériquement majoritaires. Pour créer cette masse critique, on peut par exemple instaurer un parrainage des jeunes collègues féminines par des femmes cadres expérimentées. Cette méthode a permis de faire évoluer la perception politique des femmes.
Une analyse de la gouvernance prenant en compte les questions de genre montre la réalité et la gravité de la subordination des femmes. De ce fait, elle est un défi aux structures de pouvoir et rencontre des résistances. Mais elle peut aussi susciter un programme pour le changement reconnaissant que ce dernier est possible et qu’il doit puiser dans les bonnes pratiques, par exemple en identifiant les systèmes électoraux qui soutiennent la participation des femmes, et en procédant à des réformes des services publics en faveur de l’égalité des chances et de la discrimination positive. Une formation aux questions de genre pour tous les décideurs, hommes ou femmes, est vitale et doit passer par une mise en évidence de l’importance du langage et de la terminologie masculine dans l’invisibilité des femmes ou leur statut de subordonnées. Des conventions internationales ont été adoptées un peu partout dans le monde, lesquelles donnent le cadre conceptuel et législatif pour la réduction des inégalités hommes-femmes dans la gouvernance. Il est urgent de mettre ces conventions en application.
« Gendered Governance : An Agenda for Change », in PNUD, Gender Monograph Series n° 3, 1996, New York1
Traduit de l’anglais par Emmanuelle Chauvet
Traduit de l’anglais. Texte original : « Governance from a Gender Perspective, implications for SDC Governance Division », Document d’appui pour la Division Gouvernance de la DDC, inédit, Berne, 2002
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Baden, S., (2000) « Gender, governance and the Feminisation of Poverty » in Women’s Political Participation and Good Governance : 21st Century challenges, UNDP, New York.
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Genre, pouvoirs et justice sociale
Ce livre est cité par
- Marius, Kamala. (2018) Je travaille, donc je suis. DOI: 10.3917/dec.maru.2018.01.0228
- Beaulieu, Elsa. Rousseau, Stéphanie. (2011) Évolution historique de la pensée féministe sur le développement de 1970 à 2011. Recherches féministes, 24. DOI: 10.7202/1007749ar
Genre, pouvoirs et justice sociale
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