L’association des travailleuses indépendantes (SEWA) et les travailleuses à domicile
p. 311-312
Note de l’éditeur
Référence : Verschuur, Christine, “L’association des travailleuses indépendantes (SEWA) et les travailleuses à domicile”, in Jeanne Bisilliat et Christine Verschuur. Genre et économie : un premier éclairage. Genève : Graduate Institute Publications, 2001, pp. 311-312, DOI : 10.4000/books.iheid.5466. Acheter le .pdf chapitre éditeur.
Texte intégral
1C’est dans les régions sujettes à la sécheresse du district de Banaskantha au Gujarat que l’Association des travailleuses indépendantes (SEWA) a débuté son activité de soutien au développement économique des femmes. La SEWA est un syndicat fondé en 1972, dont le but est d’organiser les travailleuses indépendantes car elles ont un accès limité aux services sociaux, et parce que leur emploi est précaire. Les membres de la SEWA, au nombre de 220 000 en 1995, sont des petites commerçantes et des colporteuses, des travailleuses à domicile et des prestataires de services.
2Reconnaissant le problème du travail à domicile comme un thème hautement prioritaire, la SEWAa mené des études participatives en 1985, qui ont apporté des informations sur des questions spécifiques, et en même temps organisé les travailleuses à domicile. De 1986 à 1991, la SEWAet le BIT ont lancé en collaboration un programme d’action. Dans le Gujarat, le Madhya Pradesh et l’Uttar Pradesh, les rouleuses de beedi (tabac), les brodeuses de chikan et de zari, les couturières assembleuses de vêtements, les rouleuses d’agarbatti (encens), les productrices de papar et les ouvrières du tabac se sont réunies pour la première fois dans des ateliers pour parler de leurs problèmes et des actions à mener, échanger des vues et élaborer des visions communes. Des officiels du gouvernement et des commissaires au travail furent invités dans certains ateliers pour discuter de questions telles que les salaires, les arrangements contractuels, les congés payés et de maternité, les procédures de rejet des produits finis, un fonds de prévoyance pour la vieillesse, et l’émission de cartes d’identité pour les travailleuses à domicile – un mécanisme de reconnaissance de ces travailleuses comme salariées. Ces ateliers furent suivis de cours d’alphabétisation et d’éducation populaire. Les dirigeantes reçurent une initiation législative intensive, et elles finirent par devenir des ressources indispensables d’information sur les droits des ouvrières pour les travailleuses à domicile. À la suite de ces initiatives, des travailleuses à domicile venant d’Ahmedabad (Gujarat), Indore (Madhya Pradesh) et Lucknow (Uttar Pradesh) organisèrent des syndicats. Les dirigeantes et les organisatrices purent écrire des lettres officielles, représenter leurs membres au tribunal et négocier avec les employeurs. Les négociations avec les autorités gouvernementales et les employeurs abordèrent les questions des niveaux de tarifs à la pièce, les normes de rejet et la sécurité de l’emploi.
3Cette stratégie eut des résultats impressionnants. En 1990, les ouvrières du textile étaient incluses dans le Plan de salaire minimum au Gujarat ; les tarifs à la pièce pour les ouvrières de beedi, de papad et d’agarbatti avaient augmenté à Ahmedabad ; le commissaire du Fonds social central avait émis 6 000 cartes d’identité pour les membres de SEWA dans le Gujarat, confirmant ainsi le statut “d’ouvrières” des femmes ; plus de 1 000 enfants des travailleuses à domicile avaient reçu des bourses du fonds social des ouvrières de beedi ; des primes avaient été distribuées par les donneurs d’ordre dans certains commerces ; et dans certains cas, le principe du salaire égal à travail égal était appliqué ; en outre, 1 200 ouvrières de beedi avaient bénéficié des prestations d’un fonds de prévoyance.
4Au niveau politique, la SEWA a fait pression pour qu’on élargisse le cadre de la protection légale afin qu’il inclue autant de commerçantes et de travailleuses à domicile que possible. Le problème-clé était de modifier l’interprétation légale de la relation employeur-employé en posant comme un fait qu’une ouvrière est l’employée d’un employeur, quel que soit le lieu où elle travaille, comme la justice l’avait décidé dans le cas des ouvrières de beedi d’Ahmedabad quelque temps plus tôt.
5Outre le programme pour les travailleuses à domicile, la SEWAa organisé, au profit de tous ses membres (travailleuses à domicile et travailleuses indépendantes) ses propres mesures de protection sociale : un centre de santé coopératif proposant des soins de santé primaire, une éducation à la santé et l’accès à des médicaments génériques ; une garderie coopérative ; une aide au logement avec la Banque SEWA ; et une assurance gérée par la Banque SEWA en collaboration avec deux compagnies d’assurance.
Traduit de l’anglais. Adaptation du texte : Organisation internationale du travail (OIT). Reader’s Kit on Gender, Poverty and Employment Genève, 2000, module 7, p. 9
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