Chapitre 2. L’introduction de la notion de patrimoine commun de l’humanité dans l’accord sur la lune de 1979
p. 127-147
Texte intégral
1Après de nombreuses années de négociations, l’Accord sur la Lune a été adopté par l’Assemblée générale. On examinera dans le présent chapitre les travaux préparatoires de cet Accord, et principalement de son article 11 qui consacre la notion de patrimoine commun de l’humanité (section II). Avant de présenter l’historique de ces négociations au sein du Sous-Comité juridique du CUPEEA (jusqu’à et non comprise la conclusion de l’Accord), on en dégagera les caractéristiques générales en introduction (section I). Dans un dernier point, on décrira la conclusion de l’Accord de 1979 en mettant en lumière certaines ambiguïtés qui sont liées à la recherche d’un consensus (section III).
Section I : Introduction
2Le développement des applications pratiques de la conquête spatiale en général et l’intérêt récent des Etats pour les ressources planétaires en particulier sont à l’origine des propositions d’étude du statut juridique de ces richesses. Ces propositions ont été avancées au sein du Sous-Comité juridique du CUPEEA, en 1969, par l’Argentine à laquelle se sont jointes ultérieurement la Pologne et la France1. C’est également l’Argentine qui, en 1970, a présenté un projet d’accord relatif à l’utilisation des ressources naturelles de la Lune et des autres corps célestes. Ce projet innove en introduisant la notion de patrimoine commun de l’humanité dans le droit de l’espace2. L’exploitation des ressources naturelles est la principale question abordée par l’Accord sur la Lune et l’on peut ainsi considérer l’initiative argentine de 1969 comme étant à l’origine de l’Accord de 1979.
3Cet intérêt nouveau pour les ressources planétaires est le résultat combiné des progrès de la conquête spatiale -qui semble rendre accessibles de nouvelles richesses3 et de la prise de conscience de leurs intérêts propres par les pays en développement, dépourvus de capacités spatiales. Face à ces progrès, les Etats ont été amenés à reconnaître les insuffisances du Traité sur l’espace de 1967. En effet, ce dernier s’est contenté de poser des principes généraux établis à une époque où les préoccupations économiques n’étaient guère présentes4. La généralité des principes fondamentaux du droit de l’espace et la multiplication et la diversification subséquente des activités spatiales ont rendu indispensable l’approfondissement de ce droit. L’Accord sur la Lune a lui-même été précédé par différents accords qui ont été conclus entre 1967 et 1979 et qui précisent les principes posés par le Traité de 19675. L’Accord de 1979 s’inscrit ainsi dans un cadre général de développement du droit de l’espace quoique, à la différence des accords précédents, il innove en introduisant un nouveau principe, celui du patrimoine de l’humanité. Néanmoins, malgré les progrès de la conquête spatiale, nombre d’activités, dont l’exploitation des ressources planétaires, sont encore loin de la phase même expérimentale. C’est là une source de difficultés qui contribue probablement à expliquer le caractère inachevé et l’ambiguïté de l’Accord sur la Lune6. Ce dernier ne constitue ainsi qu’une étape dans la négociation du régime juridique des ressources planétaires.
4L’Accord sur la Lune anticipe sur des activités d’exploitation à venir7 tout en s’inspirant d’une évolution déjà annoncée en droit de la mer : l’exploitation des richesses des fonds marins internationaux dans l’intérêt de l’humanité tout entière et spécialement de sa partie la plus pauvre paraît être l’exemple à suivre dans l’espace aux yeux des pays du Tiers-Monde. Cette source d’inspiration, comme on l’a vu, n’a été que partiellement acceptée. Quoique croissante, l’influence de ces pays sur l’élaboration du droit de l’espace est diminuée par leur manque d’atouts dans la négociation. Plus qu’en droit de la mer sans doute8, ils apparaissent en position de demandeurs. Quant aux pays développés, en particulier les puissances spatiales9, leur intérêt est de se voir reconnaître la plus grande liberté d’exploitation des ressources -sur une base nationale- et d’assurer un développement ordonné de cette exploitation. Les pays à économie de marché sont de surcroît favorable à une réglementation qui incite, de façon générale, les entreprises privées à investir dans les activités spatiales et à se substituer finalement à l’initiative étatique10.
5Si finalement l’idée nouvelle de patrimoine commun de l’humanité a été à son tour consacrée par l’Accord sur la Lune, elle y est exprimée de manière beaucoup plus souple qu’en droit de la mer et nécessite d’être précisée par des négociations futures. L’introduction de cette idée est la seule innovation véritable de l’Accord. Sur les autres points, ce dernier ne constitue par ailleurs et pour l’essentiel qu’une réitération (avec un contenu parfois précisé) de principes posés par le Traité sur l’espace de 1967. L’accord sur ces principes n’a pas créé de difficultés importantes, à la différence des dispositions relatives au patrimoine commun de l’humanité11. Au terme de longues années de négociations et d’insuccès, les Etats sont parvenus à un compromis qui a été entériné par l’Assemblée générale le 5 décembre 1979. Les négociations ayant abouti à ce compromis et, en particulier, à l’article 11 de l’Accord sur la Lune (qui introduit la notion litigieuse de patrimoine commun), méritent ainsi une attention particulière.
Section II : La négociation de l’accord de 1979
6L’Accord sur la Lune constitue un compromis obtenu grâce aux efforts d’un certain nombre d’Etats, dont l’Autriche. Ces Etats ont réussi à élaborer un texte acceptable par tous qui réconcilie les points de vues des Etats-Unis, de l’URSS et du Tiers-Monde. Un grand nombre de textes ont été présentés au cours des négociations. Ces dernières se sont principalement basées sur des projets d’accord et sur diverses propositions de l’URSS, de l’Argentine, des Etats-Unis, de la Bulgarie et de l’Autriche12. Les questions qui ont fait l’objet des discussions les plus difficiles concernent le régime des ressources des corps célestes et le champ d’application de l’Accord sur la Lune. Le Sous-Comité juridique a établi et utilisé de façon intermittente un Groupe de travail qui a examiné diverses propositions portant notamment sur ces questions.
a) Les projets de l’Argentine et de l’URSS (1970-1971)
7Le premier document de travail, soumis le 23 juin 1970 au Sous-Comité juridique par l’Argentine, était intitulé « Projet de Convention sur les principes devant régir les activités en matière d’utilisation des ressources naturelles de la Lune et des autres corps célestes »13. Son article 1 disposait que les ressources naturelles de ces derniers « seront [shall be] le patrimoine de l’humanité »14. En vertu de l’article 4, les bénéfices tirés de leur utilisation seraient distribués entre tous les peuples sans aucune discrimination. Cette distribution devrait tenir compte :
« des intérêts et des besoins des pays en développement et des droits de ceux qui exercent ces activités »15.
8L’Argentine s’inspirait alors des progrès accomplis dans le domaine du droit de la mer16. Cependant, à l’époque, les propositions argentines n’ont pu être examinées par le CUPEEA.
9Le projet argentin a conduit l’Union soviétique à réagir en 1971 par le dépôt d’un projet de Traité concernant la Lune accompagnant une demande d’inscription de cette question à l’ordre du jour de l’Assemblée générale17. A première vue, l’initiative soviétique a eu pour mérite d’accélérer l’examen du problème de l’élaboration d’un Traité international concernant la Lune. En effet, suite à cette initiative, dans sa Résolution 2779 (XXVI) du 29 novembre 1971, l’Assemblée a demandé au CUPEEA d’étudier ce problème en priorité. Par son contenu, le projet soviétique prend indirectement le contrepied du projet de l’Argentine18. Il ignore en effet la question du régime juridique des ressources naturelles et ne s’applique qu’à la Lune, à l’exclusion des autres corps célestes. Il met ainsi en évidence les deux problèmes principaux auxquels va se heurter le Sous-Comité juridique.
10Le projet soviétique présenté en 1971 se fonde sur le concept de res communis, à l’instar du Traité de 196719, et sur le rejet de tout droit de propriété privée sur la surface ou le sous-sol lunaires, quel qu’en soit le titulaire -individu (personne physique ou morale), Etat ou organisation internationale- (article VIII). Ce rejet s’accompagne de l’interdiction pratiquement de tout acte d’administration ou de disposition -à titre gracieux ou onéreux- portant sur des parties de la surface ou du sous-sol (interdiction de toute concession, échange, transfert, vente ou achat, etc.). Certains ont relevé, sans doute à juste titre, une opposition avec le projet de l’Argentine20. Si l’on interprète le patrimoine commun de l’humanité comme impliquant une propriété collective sur les ressources, il y a là un conflit potentiel avec l’article VIII avancé par les Soviétiques21. Mais, même sans retenir cette interprétation, cet article semble également difficile à concilier avec l’établissement d’un régime international et avec, en particulier, le fonctionnement d’une organisation internationale qui délivrerait éventuellement des concessions d’exploitation22. Par ailleurs, le projet soviétique comporte de nombreux articles qui, dans l’ensemble, sont très proches du Traité de 1967. Cette filiation étroite a pu faire douter de l’opportunité d’un nouveau traité basé sur un tel projet23. Ce dernier a été particulièrement critiqué du fait qu’il omet toute référence au régime juridique des ressources naturelles et à la notion de patrimoine commun de l’humanité24. Ainsi, quoique la Résolution 2779 (XXV) ait pris acte du projet soviétique, c’est en faisant mention également :
« [des] règles spéciales [qui] devront régir les activités relatives à l’utilisation de toutes les ressources... de la Lune et des autres corps célestes »25.
b) Les propositions avancées en 1972.
11Le projet de l’URSS a été une des bases des négociations au sein du Comité spatial de 1972 à 1979. Au cours des discussions, de nouvelles propositions ont été avancées26. Les Etats-Unis ont soumis au Groupe de travail un document le 13 avril 197227. Ce document reprend les propositions argentines selon lesquelles les ressources de la Lune et des autres corps célestes seront le patrimoine commun de l’humanité. Par ailleurs, il ajoute que les Etats conservent le droit d’utiliser des ressources naturelles en quantités appropriées dans le cadre de missions scientifiques28,droit qui sera consacré par l’article 6 de l’Accord sur la Lune. Il semble que les Américains, en reprenant à leur compte l’idée de patrimoine commun, aient eu alors à l’esprit la transposition de la formule proposée dans le cadre du droit de la mer29.
12Le champ d’application de la notion de patrimoine commun a été davantage développé par l’Egypte et l’Inde. Ces pays, tout en s’inspirant largement des propositions argentines, ont suggéré que cette notion pourrait être appliquée non seulement aux ressources de la Lune (et éventuellement d’autres corps célestes), mais aussi à la Lune (et aux autres corps célestes).30 Les propositions de ces Etats se distinguent également par leur référence exclusive aux intérêts et besoins des pays en développement au niveau de la répartition des bénéfices, les intérêts des Etats exploitants n’étant plus évoqués.
13Le 17 avril 1972, les Etats-Unis ont précisé leur position en soulignant la nécessité, à la fois, de promouvoir le progrès économique et d’encourager les investissements et la mise en valeur des ressources planétaires. Ils ont suggéré enfin la conclusion d’arrangements -dans le cadre d’une conférence internationale réunie à l’initiative d’un tiers des Etats Parties-en vue du partage des bénéfices d’utilisation de ces ressources lorsque cette utilisation aura débuté ou sera sur le point de débuter31. C’est une variante de cette formule en deux temps qui sera finalement consacrée par les articles 11, chiffre 5, et 18 de l’Accord sur la Lune. Selon les explications de Christol, les Etats-Unis ont accepté, à l’époque, l’établissement d’un régime international d’exploitation des ressources sous réserve que la date de son entrée en vigueur soit décidée ultérieurement32.
14On remarquera le parallélisme des attitudes adoptées par les Etats en droit de l’espace et en droit de la mer. Les positions des principaux Etats par rapport à la Résolution 2749 (XXV) (sur les principes applicables aux fonds marins internationaux) se retrouvent alors largement à propos de la Lune et de ses ressources. L’exposé des positions soviétiques, lors du vote de cette Résolution en 1970, permet de mieux comprendre le rejet par ce pays de la notion de patrimoine commun et de ses implications. La délégation soviétique au sein de la Première Commission a dénoncé le manque de clarté et de précision du concept et a rejeté toute idée de propriété collective ou de partage de propriété33. S’agissant de la question d’un partage équitable, elle a précisé qu’il y avait là :
« [une confusion] avec la question de la responsabilité pour le retard économique des pays en... développement, responsabilité qui incombe aux anciennes puissances coloniales et aux monopoles capitalistes »34.
15Ses intérêts de puissance spatiale et des raisons d’ordre politique et idéologique ont poussé l’Union soviétique à rejeter l’idée de patrimoine commun. L’URSS n’a pas expliqué aussi clairement son opinion lors des débats au sein du CUPEEA, mais l’on peut penser que ces raisons de principe ont également pesé sur ses choix. Comme on le verra cependant, les critiques adressées à un régime de patrimoine commun ont pris une apparence plus technique et moins politique au sein du Comité spatial35.
16S’agissant du bilan des négociations jusqu’en 1972, on doit noter -du côté passif- qu’aucune des propositions alors présentées n’a fait clairement mention de l’établissement d’une organisation internationale. Celui-ci n’apparaît pas dans le premier projet argentin présenté en 1970. Cependant, il a été alors implicitement envisagé et il a été en tous cas explicité par les déclarations de l’Argentine selon lesquelles :
« l’utilisation et la mise en valeur des ressources naturelles... seront soumises à une autorité internationale qui au nom de l’humanité devra appliquer des normes et une juridiction appropriées pour résoudre les conflits éventuels »36.
17L’opposition soviétique à la création d’une organisation internationale a déjà été mentionnée ; quant aux Etats-Unis, on a vu qu’ils préconisaient simplement la conclusion d’« arrangements » en vue du partage des bénéfices tirés des ressources planétaires37. La création d’une organisation internationale a cependant été évoquée par d’autres pays38.
18Les négociations en 1972 ont néanmoins permis de dégager, dans leurs grandes lignes, les positions des trois protagonistes principaux, celles des Etats-Unis, de l’Union soviétique et de l’Argentine, soutenue par les pays en développement. Le Groupe de travail, puis le Sous-Comité juridique ont finalement approuvé un texte de travail39. Si ce texte prend en compte la notion de patrimoine commun et la nécessité future d’accords en vue du partage des bénéfices tirés de l’utilisation des ressources, les dispositions qui s’y rapportent demeurent entre crochets (faute d’un accord)40.
c) L’évolution des négociations en 1973.
19Ultérieurement, en 1973, l’Argentine a évoqué la nécessité à la fois d’établir un régime pour régir l’exploitation des ressources et de prévoir « des mécanismes internationaux appropriés » en vue d’en distribuer les bénéfices41. Cette référence à des « mécanismes » visait probablement la création d’une organisation internationale42. Cependant, l’Accord de 1979 a préféré utiliser la formule plus neutre de « procédures appropriées »43. Ce langage prudent est sans doute lié à l’hostilité marquée des Soviétiques à la création d’une organisation internationale.
20Parmi les autres suggestions de pays du Tiers-Monde figurent celles de l’Inde qui a proposé de déclarer que les corps célestes « sont » le patrimoine de l’humanité44. L’utilisation de l’indicatif présent (au lieu du futur) a été consacrée par l’Accord sur la Lune qui s’inspire, là encore, de la Résolution 2749 (XXV) relative à l’exploitation des fonds marins internationaux. L’Inde a également introduit, dans le même document de travail, un alinéa qui interdit l’exploitation des ressources en dehors du régime international à établir45. Cette proposition de moratoire a longtemps opposé pays en développement et industrialisés.
21C’est néanmoins l’Union soviétique qui s’est la plus distinguée par son hostilité de principe aux propositions du Tiers-Monde. L’hostilité soviétique -qui s’est maintenue pratiquement jusqu’à la conclusion de l’Accord de 1979- s’est concentrée sur la notion de patrimoine commun de l’humanité. Selon l’URSS, cette notion d« ’heritage » (équivalent anglais du terme « patrimoine »), inconnue du droit soviétique, constituerait une transposition indirecte des catégories du droit civil et du droit de propriété dans les relations entre Etats. Or, en vertu du Traité sur l’espace de 1967, la Lune ne pourrait faire l’objet de droits de propriété -et notamment pas d’une propriété collective- ni de transactions patrimoniales d’aucune sorte, d’où l’inanité de la formule du patrimoine commun. Elle ne saurait être l’objet que de droits égaux d’utilisation au profit des Etats46. Par ailleurs, l’Union soviétique a affirmé qu’elle n’accepterait pas d’analogies non fondées et, en particulier, une analogie avec le droit de la mer. Enfin, elle a soutenu qu’un examen de la question du régime des ressources naturelles en droit de l’espace serait de toute façon prématuré en l’état du développement des activités planétaires47.
22Face aux critiques de principe de l’Union soviétique, l’Argentine a expliqué que l’humanité ne bénéficiait pas du « domaine éminent » (propriété), mais du « domaine utile » (fruits et profits tirés de l’utilisation de la Lune et de ses ressources)48. Cette distinction est loin d’être évidente dans les propositions argentines et dans l’Accord de 1979.
23L’Union soviétique et ses propositions ont été soutenues par les pays de l’Est dès l’origine. Le bloc socialiste s’est opposé jusqu’au dernier moment à l’extension de l’Accord aux corps célestes autres que la Lune. La Bulgarie a, à un moment, proposé l’établissement d’un régime international lorsque l’exploitation des ressources serait devenue une réalité ; lors de négociations futures, on tiendrait compte de l’idée de partage des bénéfices entre tous les Etats ainsi que du « souhait » de déclarer ces ressources patrimoine commun de l’humanité49. Certains pays occidentaux ont également douté de la pertinence de la formule du patrimoine commun et, plus encore, de l’opportunité d’élaborer des dispositions relatives aux ressources naturelles des corps célestes50.
24Dans leur ensemble et dès 1972, les pays occidentaux se sont montrés favorables à l’idée d’un régime international d’exploitation des ressources planétaires -qui serait établi ultérieurement- ainsi qu’à la notion de patrimoine commun51. Les Américains ont même proposé une formulation selon laquelle les ressources « sont » patrimoine commun de l’humanité. De même, les Occidentaux et surtout les Etats-Unis ont généralement insisté sur l’extension du futur traité aux corps célestes à l’intérieur du système solaire52.
25Cependant, la question d’un éventuel moratoire a divisé pays occidentaux et pays en développement et a compromis encore davantage les efforts en vue de réaliser un consensus. Cette question a été soulevée dès lors qu’il est apparu que l’on s’orientait finalement vers l’établissement d’un régime international en deux phases, le contenu concret de ce régime devant être arrêté par une conférence internationale lorsque l’exploitation des ressources serait sur le point de devenir possible53.
26Les Etats-Unis se sont opposés à tout moratoire et ont soumis un nouveau document de travail54. L’article X, chiffre 2, de ce document reformule l’article VIII du projet soviétique de 1971 qui excluait tout droit de propriété, tout acte d’administration ou de disposition en particulier sur les ressources. Cependant, la version américaine limite cette exclusion aux ressources « in place » (qui se trouvent encore incorporées au sol ou au sous-sol planétaires). Par ailleurs, cette disposition précise encore que l’interdiction d’acquérir des droits patrimoniaux ne porte atteinte ni au régime international à établir ni à l’exploitation avant l’établissement de ce régime. Les Américains ont expliqué que cet article :
« exclut l’idée d’un moratoire préalable à l’établissement d’un régime... [et que] l’interdiction des revendications des droits de propriété ne s’applique pas aux ressources naturelles une fois qu’elles ont fait, par l’exploitation, l’objet d’une possession, soit pendant la période précédant l’établissement d’un régime, soit sous réserve des règles et procédures qui y seraient prévus, après l’établissement du régime »55.
27L’Accord de 1979 s’est finalement inspiré de la formule américaine ainsi que d’une proposition autrichienne. Cette dernière mentionne l’obligation de respecter les buts du régime international (définis par l’Accord) même dans la phase précédant son établissement. Par ailleurs, à la différence de l’amendement américain, elle ne comporte qu’une exception expresse à la prohibition des droits de propriété en faveur du futur régime international56 L’Accord de 1979 suit sur ces deux points la version autrichienne. Ainsi, en ce qui concerne l’exploitation par les Etats dans la période précédent l’établissement du régime international, l’exception à la prohibition des droits de propriété n’est plus affirmée de façon explicite, d’où un certain manque de clarté dans l’Accord.
28L’interprétation américaine semblait favoriser sans restriction les activités d’exploitation avant l’établissement d’un régime international. D’autres Etats suggéraient simplement d’autoriser ces activités dans des limites à définir. C’est ce qu’a proposé l’Italie, en soulignant le caractère provisoire de l’exploitation en question57. De son côté, l’Argentine a suggéré que ne soit permise que l’exploitation expérimentale strictement nécessaire pour déterminer la possibilité d’exploiter les ressources58. Dans cette dernière version, une fois cette possibilité déterminée, il ne devrait plus exister d’exploitation en dehors du régime international à négocier.
29En raison des divergences exacerbées par le problème de l’exploitation des ressources avant l’établissement d’un régime international, les Etats ne sont parvenus à se mettre d’accord ni sur le régime de ces ressources ni sur le champ d’application du traité59.
d) L’enlisement des négociations et le compromis final (1974-1979).
30A partir de 1974, le Groupe de travail s’est concentré sur la question considérée comme prioritaire du régime des ressources60. Les positions des Etats n’ont pas évolué de façon significative et, pratiquement jusqu’au dernier moment, un compromis a semblé hors de portée.
31En 1974, l’opposition des pays de l’Est à l’idée de patrimoine commun de l’humanité s’est maintenue, sinon renforcée61. De plus, l’Inde et le Nigéria ont introduit une disposition qui visait indirectement à limiter à un stade expérimental les activités relatives aux ressources. En outre, selon ces Etats, l’accès aux informations relatives à ces activités devait être ouvert à tous et les échantillons de substances recueillies sur les planètes devaient appartenir aux NU62.
32En 1975, le Groupe de travail a reformulé le régime des ressources naturelles dans deux articles (X et X bis) qui ont servi de bases de discussion.63 Ces articles s’inspirent du projet soviétique de 1971 à propos de la prohibition des droits de propriété. Par ailleurs, ils retiennent le principe du patrimoine commun de l’humanité et l’extension du traité aux corps célestes autres que la Lune. Les intérêts des puissances qui ont contribué à la découverte et l’exploration des ressources, ou qui exploitent ces dernières, sont pris en compte au même titre que ceux des pays en développement pour déterminer un partage équitable des bénéfices (un des buts essentiels du régime international). Cependant, en attendant l’établissement d’un régime international, il est prévu que les activités relatives aux ressources se conformeront aux buts du futur régime64. Enfin, à la demande d’un tiers des Etats Parties, une conférence internationale doit être convoquée en vue d’établir le régime en cause. Ces questions de procédure et de calendrier ont occupé une place grandissante dans les débats ultérieurs.
33Les Etats ne sont pas parvenus à se mettre d’accord sur la question de savoir jusqu’à quel point le traité devait prévoir de manière détaillée le régime d’exploitation. Dès lors qu’on s’est orienté vers un établissement de ce régime en deux phases, les questions les plus importantes ont concerné alors :
l’établissement de ce régime dans un délai raisonnable, compte tenu des possibilités d’exploitation des ressources ;
le régime des ressources dans la période précédant cet établissement.
34Les pays en développement, n’étant pas vraiment satisfaits par le texte élaboré par le Groupe de travail, ont insisté sur l’établissement rapide d’un régime international fondé sur le principe du patrimoine commun65. Certains ont demandé que la participation à la future conférence sur le régime des ressources soit obligatoire et qu’un délai soit fixé pour sa convocation. D’autres ont cherché à prévenir d’éventuels désaccords sur l’opportunité d’établir le régime d’exploitation66. En outre, ces pays se sont inquiétés d’éventuelles activités d’exploitation des puissances spatiales dans la période intérimaire. En vue de préserver leurs intérêts, ils ont suggéré l’introduction soit d’un moratoire sur ces activités, soit de dispositions suffisamment précises relatives à l’exploitation des ressources67.
35En 1976, un certain nombre de pays en développement ont suggéré la convocation d’une conférence tous les dix ans afin de déterminer si un régime international devait être établi. Par contre, ils ont retenu le droit égal des Etats à exploiter les ressources naturelles. Ils n’ont pas envisagé un moratoire mais ont exigé que les Etats se comportent de manière compatible à la fois avec les objectifs du futur régime et avec le principe du patrimoine commun de l’humanité68. Cependant, d’autres pays en développement ont affirmé que le concept de patrimoine commun impliquerait, à l’instar du droit de la mer, l’interdiction de toute exploitation commerciale en dehors du régime international69.
36Parmi les pays développés, ceux du bloc socialiste ont longtemps défendu des positions difficilement conciliables avec les thèses du Tiers-Monde. Les pays socialistes ont maintenu leurs réserves -quoique avec des nuances- vis-à-vis de la notion de patrimoine commun de l’humanité70. Bien que son contenu ne soit pas clair à leurs yeux, ils se sont peu à peu laissés convaincre d’accepter cette notion, à condition que soit exclue toute analogie avec le droit de la mer71. Cependant, ils se sont opposés à ce que le traité prévoie un régime d’exploitation détaillé72. Ils semblent même avoir hésité à garantir leur participation à une future conférence internationale chargée d’établir ce régime73. Enfin, ils ont rejeté l’idée d’un moratoire sur l’exploitation des ressources74.
37Les pays occidentaux, dont les Etats-Unis, étaient déjà acquis depuis 1973, voire 1972, à l’idée du patrimoine commun et à la nécessité de négocier de bonne foi un régime international d’exploitation des ressources. Ils souhaitaient seulement différer l’établissement de ce régime jusqu’à ce que l’exploitation devienne possible et rejetaient, dans l’intérim, tout moratoire sur l’exploitation75.
38Malgré les efforts déployés notamment par l’Autriche76, le Groupe de travail, en 1979, n’était même pas parvenu à un accord sur la question principale du régime des ressources77. Les positions des Etats paraissaient trop opposées pour aboutir à un compromis du fait surtout de l’incompatibilité des positions de l’URSS et des pays en développement et de la difficulté de parvenir à une solution équilibrée du problème de l’exploitation des ressources avant l’établissement du régime international.
Section III : La conclusion de l’accord de 1979 et la portée du consensus final
39En raison de la persistance de divergences importantes, l’adoption par consensus de l’Accord sur la Lune, lors d’une réunion plénière du CUPPEA la même année, en 1979, était plutôt inattendue, voire difficilement explicable78. Le CUPEEA a constitué un Groupe de travail officieux qui, du 26 juin au 3 juillet, a examiné la possibilité de parvenir à un accord79. Ce Groupe de travail était saisi du dernier projet autrichien et du texte résultant des délibérations du Groupe de travail du Sous-Comité juridique.80 Lors des discussions, différents amendements ont été adoptés et ont apparemment permis de résoudre les problèmes en suspens.
40Certains amendements ont été intégrés au texte même de l’Accord de 1979. Tel est le cas d’un amendement brésilien qui dispose que :
« La Lune et ses ressources naturelles constituent le patrimoine commun de l’humanité, [qui] trouve son expression dans les dispositions pertinentes du présent Accord... »81.
41Cet amendement réintroduit l’usage de l’indicatif présent et confirme l’exclusion des analogies éventuelles avec d’autres domaines y compris le droit de la mer82. De même, on a retenu la formule d’un « Accord » et non le terme « Traité », dont l’emploi avait été envisagé antérieurement83.
42D’autres amendements, bien qu’acceptés par le CUPEEA, ne font pas partie de l’Accord de 1979 ; ils sont simplement mentionnés en tant qu’« understandings » du Comité dans son Rapport. Néanmoins, ils concernent des questions d’importance fondamentale : le champ d’application de l’Accord, celui du principe de patrimoine commun (étendu à tout corps céleste du système solaire exceptée la Terre) et la nécessité d’éviter de perturber le milieu lunaire (nécessité qui n’implique pas une interdiction d’en exploiter les ressources naturelles)84.
43Les différents amendements retenus ont contribué à réaliser des solutions généralement satisfaisantes pour l’ensemble des Etats. Les propositions inacceptables pour l’un ou l’autre des groupes d’Etats en présence -le Tiers-Monde, le bloc socialiste, les Etats-Unis et (en principe) les autres Etats occidentaux- paraissent avoir été exclues au cours des négociations. Parmi les propositions rejetées, on notera les suggestions suivantes : un accord ne contenant pas de dispositions relatives aux ressources naturelles, l’absence de référence à la notion de patrimoine commun, l’élaboration immédiate d’un régime détaillé d’exploitation et, enfin, l’introduction d’un moratoire avant l’établissement d’un futur régime international d’exploitation. L’Accord sur la Lune, a contrario, applique la notion de patrimoine commun à la Lune et à ses ressources, envisage l’établissement d’un futur régime international et reste silencieux -pour le moins-sur la question de l’exploitation des ressources avant cet établissement.
44Cependant, la difficulté de parvenir à ce consensus a engendré des artifices de procédure. Ces derniers ne sont pas sans influence sur l’interprétation des dispositions de l’Accord de 1979 et font ressortir l’ambiguïté même du consensus auquel est parvenu le Comité spatial. Cet aspect des négociations mérite d’être examiné pour comprendre ce qui a fait véritablement l’objet d’un accord (l’autre éventualité étant que les divergences entre Etats aient été artificiellement mises entre parenthèses et risquent ainsi de réapparaître au niveau de l’interprétation de l’Accord). Les méthodes de travail du Sous-Comité juridique peuvent faire planer certains doutes quant à la portée du consensus final par rapport au texte finalement adopté et aux « understandings » qui y ont été joints.
45En premier lieu, le Sous-Comité juridique, pour examiner les premières propositions présentées en 1970-1971, puis de façon intermittente, a établi un Groupe de travail. Le CUPEEA a fait de même en 1979. Les travaux de ces organes n’ont pas été publiés et la pratique de consultations informelles a joué un rôle décisif dans la solution des différentes questions posées par la conclusion de l’Accord sur la Lune. En raison de ces phases « occultes », l’interprétation des solutions retenues sur la base des travaux préparatoires n’est pas totalement satisfaisante. L’étude de ces travaux -même incomplets- demeure cependant indispensable en raison de l’ambiguïté de certaines dispositions de l’Accord et de la nécessité de rechercher alors l’intention de ses rédacteurs85.
46Parallèlement, un autre problème, et non le moindre, tient à l’adjonction au texte de l’Accord sur la Lune d’un certain nombre d’« accords » ou « understandings » qui apportent des précisions importantes à cet instrument sans pourtant y être intégrés. A quel titre devrait-on les prendre en compte, alors qu’à l’évidence, on n’a pas voulu les incorporer à ce dernier ? De plus, ils apparaissent comme des actes imputables au Comité : ce ne sont pas les délégués des Etats qui se sont exprimés, mais « le Comité [qui] est convenu... », selon la formule consacrée par son Rapport86. Ainsi, ces « accords » n’ont pas valeur de convention87. Dans le même ordre d’idées, on peut douter que l’on soit en présence d« ’accords » se rapportant à l’Accord sur la Lune et « intervenus entre toutes les Parties » au moment de la conclusion de celui-ci88. En d’autres termes et en vertu de l’article 31 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, ces « accords » ne sauraient être considérés, aux fins de l’interprétation de l’Accord de 1979, en même temps et avec le même poids que le texte de ce dernier.
47Quoique l’on puisse prima facie reprocher à nos conclusions un excès de formalisme89, elles nous semblent être renforcées par certaines constatations. L’Assemblée générale, dans le Préambule de la Résolution 34/68 qui approuve l’Accord sur la Lune, déclare certes « avoir examiné » le Rapport du Comité et se réfère aux paragraphes qui contiennent les « understandings » pertinents. Cependant, l’existence de ces derniers n’est mentionnée directement ni par la Résolution ni par l’Accord qui y est joint. Ainsi se trouve-t-on dans une situation d’autant plus étrange que ces « understandings » ne sont pas distribués avec l’Accord sur la Lune, à l’élaboration duquel de nombreux Etats n’ont pas participé90. En conséquence, on comprendrait mal que les premiers puissent être invoqués au même titre que le second pour déterminer les droits et obligations des Etats Parties. Finalement, il nous semble que ces « accords », dont la nature juridique n’est pas clairement établie, font partie des travaux préparatoires ; ils ne pourraient ainsi être utilisés qu’en tant que moyens complémentaires d’interprétation, moyens qui ne jouent qu’un rôle supplétif91.
48Les conclusions précédentes sous-estiment peut-être en partie le poids des « understandings » (du fait précisément qu’ils émanent du Comité et non d’Etats). En tant qu’interprétations quasi-authentiques de l’Accord sur la Lune (si l’on réserve le terme « authentique » à l’interprétation par les Parties elles-mêmes), ces « accords » ont sans doute davantage de valeur que des déclarations unilatérales d’Etats. Indépendamment des controverses doctrinales sur la place des travaux préparatoires, on doit noter qu’au moins certains motifs généralement invoqués pour ne les prendre en compte qu’en dernier ressort ne sont guère valables ici : il ne s’agit pas de prises de positions d’Etats sujettes à changement au cours des négociations, mais bien d’une interprétation quasi-authentique de l’Accord sur la Lune92. Quoi qu’il en soit, dans la mesure où les « accords » en question contredisent les dispositions de l’Accord de 1979, ils se verraient privés d’effet. Par contre, lorsque le sens de l’Accord n’apparaît pas clairement, on semblerait autorisé à faire appel à ces « accords » en leur reconnaissant l’autorité d’interprétations quasi-authentiques de celui-ci93.
49L’intention des Etats ayant participé à la négociation, quant à la place à faire à ces accords, semble impossible à établir, à supposer qu’il existe une intention commune. Finalement, si les Etats sont parvenus à un consensus, la portée de ce dernier apparaît amoindrie en raison de l’ambiguïté des procédures suivies. Certaines dispositions fondamentales, contre toute attente, n’ont pas été incorporées à l’Accord et ont fait l’objet d’accords" dont les effets juridiques demeurent mal définis. On en est ainsi réduit à minimiser la place de ces derniers dans l’interprétation de l’Accord de 1979.
Conclusions
50Les négociations de l’Accord sur la Lune paraissent avoir accaparé longtemps le CUPEEA en raison des difficultés à rapprocher les points de vues des Etats. Au cours de ces négociations, le Tiers-Monde a réussi à faire consacrer l’idée que les corps célestes et leurs ressources sont le patrimoine commun de l’humanité et doivent être exploités dans le cadre d’un régime international. Cet Accord a été rendu possible par l’abandon de l’opposition soviétique à cette idée. Cependant, les pays en développement, face à l’opposition des Etats-Unis et sans doute de l’Union soviétique, ont dû renoncer à certaines de leurs exigences, dont l’établissement d’un moratoire sur l’exploitation des ressources94. Enfin, le consensus semble avoir été obtenu par des moyens qui jettent un doute sur la réalité de ce dernier. Les travaux préparatoires n’éclairent pas de façon entièrement satisfaisante le contenu de l’Accord que l’on doit analyser. C’est à titre subsidiaire seulement que l’on se référera à ces travaux préparatoires dans l’interprétation de ce dernier.
Notes de bas de page
1 Cf. le doc. A/AC.105/C.2/L. 54, 13 juin 1969, présenté par l’Argentine ; et la proposition conjointe de ces trois Etats (étendue à la question de l’immatriculation des engins spatiaux), doc. A/AC.105/C.2/L. 69, 1er juillet 1969. La Pologne avait aussi soumis une proposition le 13 juin -doc. A/AC.105/C.2/L. 53-, mais elle visait plus généralement la question des règles applicables aux activités planétaires.
2 Le premier instrument relatif à la Lune -doc. A/AC.105/C2/L. 12, 11 juillet 1966- est un projet de traité présenté par les Etats-Unis. Toutefois, il ne réglemente pas l’exploitation des ressources naturelles et il fait partie des travaux préparatoires du Traité sur l’espace de 1967.
3 C’est le 20 juillet 1969 que des hommes ont réussi à se poser sur la Lune pour la première fois ; lors de cette mission, des échantillons de roches lunaires ont été prélevés. On a pu penser, à l’époque, que les planètes et surtout la Lune recelaient des ressources exploitables dans un proche avenir. Cf. Carl Q. Christol, The Modem International Law of Outer Space, New York, Pergamon Press, 1982, p. 247.
4 Karl-H. Boeckstiegel, “Legal Implications of Commercial Space Activities”, Proceedings of the 24th COLOS, 1981, p. 6. Comme on l’a vu (ci-dessus, titre I, chapitre III, section II, point a, numéro 2.2), le Traité de 1967 ne comprend pas de dispositions spécifiques relatives aux ressources naturelles et à leur exploitation.
5 Ces accords concernent le sauvetage des astronautes et la récupération des engins spatiaux (1968), la responsabilité internationale pour les dommages causés par des objets spatiaux (1972) et l’enregistrement des engins lancés dans l’espace (1972). Sur ces accords, voir Christol, op. cit., pp. 59 et ss.
6 Voir en ce sens Daniel Goedhuis, “Conflicts in the Interpretation of the Leading Principles of the Moon Treaty of 5 December 1979”, Netherlands International Law Review, vol. 28, 1981, p. 15.
7 On dispose aujourd’hui d’évaluations prospectives en termes de rentabilité économique qui, à l’évidence, doivent être considérées avec prudence. Ainsi, on a chiffré le coût d’extraction de matériaux lunaires ramenés sur Terre entre 12 et 37 $ la tonne. Parmi les matériaux abondants, ont été notamment répertoriés : le silicium, le minerai d’aluminium, le calcium, le fer, le magnésium et le titane. Plus que la Lune, il semble cependant que les astéroïdes soient très intéressants économiquement. Sur ces points, voir “Bilan et perspectives des techniques spatiales”, UNISPACE 82, doc. A/CONE.101/BP/2, pp. 55-57 (28 avril 1981). On peut aussi ajouter que l’utilisation la plus proche et peut-être même la plus développée (car plus compétitive que l’utilisation de matériaux terrestres) sera certainement une utilisation in situ pour les besoins des activités menées dans l’espace.
8 Où la question de l’exploitation des fonds marins internationaux faisait partie d’un “package” englobant d’autres problèmes et permettait d’envisager des concessions mutuelles entre groupes d’Etats. Voir sur ce point Carl A. Fleischer, “The International Concern for the Environment : The Concept of Common Heritage”, Tendances actuelles de la politique et du droit de l’environnement, Gland (Suisse), Union internationale pour la conservation de la nature et des ressources naturelles, 1980, p. 323.
9 Voir les positions soviétiques et américaines ci-dessous, section II.
10 Voir notamment les propositions américaines et nos commentaires ci-dessous, section II L’Accord sur la Lune a d’ailleurs été critiqué aux Etats-Unis et rejeté par ces derniers au motif notamment qu’il défavoriserait l’exploitation des ressources des corps célestes par des entreprises privées. Cf., entre autres, les remarques de Stephen R. Bond, American Society of International Law, Proceedings of the 74th Meeting, p. 155.
11 Voir en ce sens Brigitte Léger, “La Lune : patrimoine commun de l’humanité”, Annuaire canadien de droit international, vol. 17, 1979, pp. 285 et ss.
12 Nous nous basons ici sur les déclarations du Président du Sous-Comité juridique du CUPEEA devant le Comité politique spécial de l’Assemblée générale, doc. A/SPC/SR. 15, para. 20, p. 8 (1979).
13 Doc. A/AC.105/C.2/L. 71 et Corr. 1, 23 et 25 juin 1970.
14 Selon notre traduction. En effet, de nombreux textes ont été assez mal traduits, le présent de l’indicatif (“sont”) -qui implique la reconnaissance d’un état de fait ou de droit déjà existant- ayant été souvent utilisé pour exprimer indifféremment les termes anglais shall be (“seront”) et are (“sont”).
15 Voir l’article 5 de ce projet et les déclarations de l’Argentine, doc. A/AC. 105/C.2/SR. 190, p. 49 (1972). La formule utilisée semble par ailleurs impliquer que ce sont les Etats (voire leurs nationaux) qui exploiteraient le patrimoine commun.
16 Cf. les déclarations de son représentant, doc. A/AC.105/C.2/SR. 115, p. 49 (1969) ; et doc. A/AC.105/C.2/SR. 168, p. 145 (1971).
17 Doc. A/8391 (comprenant en annexe ce projet de Traité), 4 juin 1971.
18 Selon Bin Cheng, en recourant à l’Assemblée, l’URSS aurait apparemment essayé de court-circuiter les propositions argentines en faisant examiner, comme base de travail du CUPEEA, leurs propres propositions. Voir de cet auteur “The Moon Treaty, Agreement Governing the Activities of States on the Moon and Other Celestial Bodies within the Solar System Other than the Earth”, Current Legal Problems, vol. 33, 1980, pp. 214-215.
19 C’est-à-dire le droit de tous les Etats sans aucune distinction d’utiliser la Lune. Par ailleurs, les Soviétiques ont invoqué le Traité de 1967 à l’encontre de l’introduction de l’idée de patrimoine commun de l’humanité. Voir leur document de travail, WP n° 7, 28 mars 1973, doc. A/ AC.105/101, Annexe I, p. 24; et C. Q. Christol, “The Common Heritage of Mankind Provision in the 1979 Agreement Governing the Activities of States on the Moon and Other Celestial Bodies”, IL, vol. 14, 1980, p. 456.
20 Voir en particulier les déclarations de Madagascar devant la Première Commission, doc. A/C.l/SR. 1825, para. 9, p. 2; et A. E. Gotlieb, ’The Impact of Technology on the Development of Contemporary International Law“, RCADI, vol. 170, 1981-I, p. 246.
21 Sur l’approche soviétique et cette opposition, voir la Note du Secrétariat du 15 mai 1978, « Importance du Traité sur les principes régissant les activités des Etats en matière d’exploration et d’utilisation de l’espace extra-atmosphérique, y compris la Lune et les autres corps célestes », doc. A/AC.105/219, p. 42 : Tous les Etats ont... la jouissance commune et indivise des corps célestes et de leurs ressources qui ne peuvent toutefois faire l’objet d’appropriation collective”.
22 Voir les déclarations de Madagascar mentionnées à la n. 20. De plus, des auteurs ont relevé l’hostilité soviétique à l’émergence d’une organisation internationale disposant de pouvoirs étendus. Cf. Sylvia M. Williams, “The Common Heritage of Mankind and the Moon Agreement, Economic Implications and Institutional Arrangements”, Proceedings of the 24th COLOS, 1981, p. 87; et Reginald V. Dekanozov, “Legal Nature of Outer Space Including the Moon and Other Celestial Bodies”, Proceedings of the 17th COLOS, 1974, p. 201.
23 Voir ainsi les remarques (à titre personnel) de M. Shepard, représentant des Etats-Unis à la Première Commission, doc. A/C.l/SR. 1823, para. 22-23, pp. 3-4 (1971) ; et du Japon, doc. A/ AC.105/C.2/SR. 187, pp. 6-7 (1972).
24 Voir ainsi, en 1971, les critiques du Brésil, doc. A/C.l/SR. 1821, para. 40, p. 5 ; et doc. A/ C.l/SR. 1826, para. 116 et ss, pp. 11-12 ; de la France, doc. A/C.l/SR. 1823, para. 59-60, p. 7 ; du Chili, doc. A/C.l/SR. 1824, para. 33, p. 4 ; et de l’Iran, doc. A/C.l/SR. 1825, para. 34, p. 4.
25 Voir le dernier point du Préambule de ce texte.
26 Cf. WP 1 à 26, doc. A/AC.105/C.2/WG (XI).
27 WP n° 12, 13 avril 1972, doc. A/AC105/C2/WG (XI), A/AC.105/101, Annexe I, p. 14.
28 Ces préoccupations sont largement partagées notamment par d’autres pays développés. Voir ainsi les propositions communes de la Suède et du Royaume-Uni, WP n 10 et Rev. 1, 12 et 13 avril 1972, ibid., p. 14 ; ou celles de la Bulgarie, WP n 25, 27 avril 1972, ibid., p. 21. L’article 6 de l’Accord de 1979 emprunte à ces différents textes.
29 Cela ressort des déclarations du représentant américain au sein du Sous-Comité juridique le 3 mai 1972, doc. A/AC. 105/C.2/SR. 188, p. 35. Voir les positions identiques du Canada, doc. A/AC.105/C.2/SR. 187, p. 12 (1972). Dans l’esprit des négociateurs américains, cette transposition ne devait pas porter atteinte au droit des Etats d’exploiter la Lune. Cf. Roberts B. Owen (conseiller juridique auprès du Département d’Etat), “The Moon Treaty”, DSB, vol. 80, 1980, p. 67.
30 Voir leur WP du 14 avril 1972, doc. A/AC.105/C.2/WG (XI), A/AC.105/101, Annexe I, p. 19. La mention des autres corps célestes (qui pose le problème du champ d’application de l’accord en projet) ligure entre crochets, l’Egypte et l’Inde n’ayant pas alors voulu trancher cette question controversée. Ces crochets ont été supprimés par l’Inde dans un WP qu’elle a présenté le 27 mars 1973, doc. A/AC.105/115, Annexe I, p. 23.
31 Voir leur WP n 12/Rev. 1, 17 avril 1972, doc. A/AC.105/C.2/WG (XI), A/AC.105/101, Annexe I, p. 15 ; et leurs déclarations mentionnées à la n. 29, p. 35.
32 “International Space Law”, United States House of Representatives Committee on Science and Technology, Subcommittee on Space Sciences and Applications, Hearings, 94th Congress, 2nd session, June 28th and 29th, 1976, Washington, D. C, Government Printing Office, 1976, p. 15.
33 Au motif que l’Union soviétique ne saurait accepter une exploitation “selon des principes foncièrement étrangers au socialisme, c’est-à-dire selon les principes régissant l’économie capitaliste” : doc. A/C.I/SR. 1798, para. 58 et ss, p. 6 (1970).
34 Ibid., para. 62, p. 6.
35 C’est là, selon nous, un aspect de la collusion américano-soviétique dans la défense de leurs intérêts de puissances spatiales et dans la définition du droit de l’espace.
36 Doc. A/AC.105/C2/SR. 190, pp. 49-50 (1972). Pour un commentaire du projet argentin de 1970, voir Aldo A. Cocca, “Legal Status of the Natural Resources of the Moon and Other Celestial Bodies”, Proceedings of the 13th COLOS, 1970, p. 150.
37 Cf. ci-dessus, respectivement les n. 21 et 22 et la n. 31.
38 Voir ainsi les déclarations de Madagascar mentionnées à la n. 20 ; et celles du Canada, doc. A/AC.105/C.2/SR. 187, p. 11 (1972). Ce dernier mentionnait la nécessité d’établir “un régime international comportant des arrangements institutionnels universellement acceptables... pour régir l’exploitation de ces ressources” (nous nous basons ici sur notre traduction du compte rendu en anglais de cette séance du Sous-Comité ; en effet, la traduction française trahit les propos canadiens et ne parle que d’“un régime international” !, ibid., pp. 10-11).
39 Doc. A/AC.105/101, p. 7 (5 mai 1972).
40 Ibid., article X.
41 Article X ter, chiffre 3, WP du 30 mars 1973, doc. A/AC.105/115, Annexe I, p. 26. La traduction anglaise -“appropriate international machinery”- est peut-être plus explicite sur ce point.
42 Le WP présenté le 17 avril 1973 par l’Argentine fait mention de mécanismes “ou d’une autorité internationale”. Ibid., p. 28.
43 Suivant en cela les formules employées par les pays industrialisés. Voir ainsi le WP américain du 17 avril 1973 (qui retient l’idée d’un régime international avec des procédures appropriées), ibid., p. 31 ; ou l’article X bis, chiffre 2, du projet de la Bulgarie, doc. A/AC.105/C.2/L. 93, 8 mai 1974.
44 Cf. le WP indien du 27 mars 1973, doc. A/AC.105/115, Annexe I, p. 23 ; imité en cela par l’Iran dans leur WP du 28 mars, ibid., p. 24 ; par l’Italie dans leur WP du 3 avril, ibid., p. 33 ; et par les Etats-Unis dans leur WP du 17 avril mentionné à la n. 43 (article X, chiffre 6).
45 La Suède a, quant à elle, proposé d’interdire les activités se rapportant aux ressources naturelles qui iraient à l’encontre des buts du régime international à établir. Cf. son WP du 18 avril 1973, doc. A/AC.105/115, Annexe I, p. 34. Cet amendement de compromis a été repris par l’article X, chiffre 7, d’un texte du 20 avril 1973 résultant de consultations informelles et examiné par le Groupe de travail, ibid., p. 34. Cependant, cette formulation -selon certains Etats- pouvait également être interprétée “comme prévoyant une sorte de moratoire”. Voir notamment les déclarations du Japon, doc. A/AC.105/C.2/SR. 204, p. 89 (1973).
46 Cf. leur WP du 28 mars 1973, doc. A/AC.105/115, Annexe I, p. 24.
47 Voir ses déclarations, doc. A/AC.105/C.2/SR. 204, pp. 92-93 (1973) ; et, à propos de l’analogie avec le droit de la mer, doc. A/AC.105/C.2/SR. 206, p. 127 (1973).
48 WP n° 11, 17 avril 1973, doc. A/AC.105/115, Annexe I, p. 28.
49 Voir l’article X, chiffre 3, du WP de la Bulgarie du 27 mars 1973, doc. A/AC.105/115, Annexe I, p. 13 ; et les déclarations de cet Etat, doc. A/AC.105/C.2/SR. 206, p. 122 (1973). Parmi les pays de l’Est, la Bulgarie semble avoir été relativement plus ouverte à un compromis. Elle a ainsi admis l’applicabilité de l’Accord à d’autres corps célestes du système solaire jusqu’au moment de l’entrée en vigueur d’accords spécifiques pour chaque corps céleste. Cependant l’article I, chiffre 2, de son WP du 27 mars 1973 prévoyait que l’Accord sur la Lune cesserait de s’appliquer à l’égard d’une autre planète, sans considérer le problème posé par le fait que certains Etats pourraient être Parties à l’Accord initial sur la Lune, mais non à celui postérieur propre au corps céleste considéré. Sur ce problème, voir l’article 30, chiffre 4, de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités, NU, doc. A/CONF.39/27.
Quant aux autres pays socialistes, voir les positions de la Hongrie, doc. A/AC. 105/C.2/SR. 187, p. 17 (1972) ; de la Pologne, ibid., p. 18 ; et de la Tchécoslovaquie, doc. A/AC.105/C.2/SR. 188, p. 34 (1972).
50 Cf. surtout les déclarations du Japon, doc. A/AC.105/C.2/SR. 187, p. 4 (1972) ; et doc. A/ AC.105/C.2/SR. 204, p. 89 (1973) ; et celles de la Belgique (qui considérait alors la question des ressources comme un problème “purement philosophique”), doc. A/AC.105/C.2/SR. 204, p. 95 (1973).
51 Voir ainsi les positions du Canada, doc. A/AC.105/C.2/SR. 187, p. 14 (1972) ; du Royaume-Uni, doc. A/AC.105/C.2/SR. 188, p. 27 (1972) ; et de la France, doc. A/AC.105/C.2/SR. 202, p. 77 (1973).
52 Voir en particulier les déclarations des Etats-Unis, doc. A/AC.105/C.2/SR. 205, pp. 115-116 (1973). Cependant, à l’encontre de cette extension, cf. les prises de positions du Japon, doc. A/ AC.105/C.2/SR. 204, p. 92 (1973).
53 A l’origine de ce critère, qui conditionne le début de la phase de négociation du régime international, se trouve un document italien. Cf. le WP du 3 avril 1973, doc. A/AC.105/115, Annexe I, p. 33.
54 Voir leur WP du 17 avril 1973 mentionné à la n. 43. Les pays de l’Est, plus radicaux dans la mesure où ils s’opposaient à l’idée même de patrimoine commun et à la perspective d’une réglementation des ressources naturelles, n’ont pas eu alors à se prononcer sur cette question de moratoire. Voir néanmoins l’opposition déclarée de la Bulgarie à une telle restriction, doc. A/AC. 105/C.2/ SR. 206, p. 122 (1973).
55 Doc. A/AC.105/C.2/SR. 205, pp. 117-118 (1973).
56 Cf. la proposition autrichienne du 5 juillet 1973, doc. A/AC.105/L. 74, articles X, chiffres 2 et 7.
57 Ce pays a également souligné que, sur la base du droit existant (le Traité sur l’espace de 1967), les Etats avaient le droit d’exploiter et de s’approprier les ressources des corps célestes. Voir ses déclarations, doc. A/AC.105/C.2/SR. 202, pp. 78-79 (1973).
58 Ibid., p. 82.
59 Un troisième problème également important (sur lequel on reviendra dans le chapitre III ci-dessous, n. 7-9 et texte) concernait les informations à communiquer lors de missions entreprises sur la Lune. Par ailleurs, le Groupe de travail a approuvé six articles en 1973, mais ceux-ci concernaient des points secondaires et non le régime des ressources naturelles. Cf. doc. A/AC.105/115, p. 5, 20 avril 1973.
60 Voir les déclarations et les Rapports présentés par son Président : doc. A/AC. 105/C.2/ SR. 222, p. 110 (1974); doc. A/AC.105/133, Annexe I, p. 1 (1974); doc. A/AC.105/147, Annexe I, p. 1 (1975); doc. A/AC. 105/171, Annexe I, p. 1 (1976); doc. A/AC.105/196, Annexe I, p. 1 (1977) ; doc. A/AC.105/218, Annexe I, p. 1 (1978) ; et doc. A/AC. 105/240, Annexe III, p. 1 (1979). Ainsi qu’il ressort du dernier Rapport, le Groupe de travail n’est pas parvenu à résoudre les questions en suspens.
61 La Bulgarie ne mentionne même plus le caractère “désirable” de consacrer ultérieurement cette idée. Voir ses propositions du 8 mai 1974 (article X bis) et celles du 27 mars 1973 (article X, chiffre 3) mentionnées respectivement aux n. 43 et 45. L’article X bis du texte de 1974, s’il envisage bien un partage équitable en tenant compte en particulier des pays en développement, réaffirme la liberté des Etats d’utiliser la Lune qualifiée d’objet de “commun use”.
62 WP du 13 mai 1974, doc. A/AC.105/C.2/L. 97. Voir aussi les commentaires de Christol, op. rit. n. 3, p. 285.
63 Doc. A/AC.105/147, Annexe I, Appendice I, p. 2, 11 mars 1975.
64 Avec cette nuance que deux alternatives sont prévues entre crochets (article X bis, chiffre 6). La seconde alternative n’est apparemment que la formulation négative de la première, c’est-à-dire une interdiction des activités incompatibles avec ces buts. Cependant, cette formulation -dont la paternité appartient à la Suède- a pu être interprétée comme un moratoire par certains. Cf. ci-dessus, n. 45.
65 Cf. les prises de positions du Brésil, doc. A/AC.105/C.2/SR. 232, p. 44 (1975) ; du Chili (qui aurait préféré que les termes de ce régime soient fixés sans attendre), doc. A/AC.105/C.2/SR. 232, p. 51 (1975) ; et doc. A/AC.105/C.2/SR. 249, para. 32, p. 9 (1976) ; et celles du Pakistan, doc. A/ AC.105/C.2/SR. 232, p. 57 (1975).
66 Voir la proposition de compromis de l’Egypte (en particulier le délai de dix ans repris par l’article 18 de l’Accord sur la Lune), doc. A/AC.105/C2/SR. 231, pp. 40-41 (1975) ; et les déclarations du Mexique (suggérant que la future conférence décide des possibilités d’exploitation des ressources et de rétablissement du régime international par un vote à la majorité), doc. A/ AC.105/C.2/SR. 249, para. 30, p. 8.
67 Voir les déclarations de l’Inde, doc. A/AC.105/C.2/SR. 229, p. 23 (1975) ; du Brésil, doc. A/AC.105/C.2/SR. 231, p. 44 (1975) ; et ci-dessous, n. 69 et texte. Les dispositions envisagées (en réalité assez peu contraignantes) concernent le respect des objectifs fondamentaux du futur régime international et la communication des informations sur les ressources éventuellement découvertes et sur toute activité en général. Cf. en ce sens les déclarations du Chili, doc. A/AC.105/C.2/SR. 249, para. 32, p. 9 (1976).
68 Voir les propositions conjointes de l’Argentine, du Brésil, du Chili, de l’Indonésie, du Mexique, du Nigéria, de la Roumanie, du Sierra Leone et du Venezuela, doc. A/AC. 105/147, Annexe I, Appendice, p. 3 (1976).
69 Cf. l’interprétation de l’Inde, doc. A/AC.105/C.2/SR. 270, para. 29, p. 8 (1977) ; et de l’Indonésie, doc. A/AC.105/C.2/SR. 288, para. 25, p. 8 (1978). Les promoteurs d’un moratoire en droit de l’espace semblent s’être directement inspirés de la Résolution 2574 (XXIV) D de l’Assemblée générale, adoptée en 1969 par 62 voix pour, 28 contre et 28 abstentions (les pays industrialisés ont voté contre) et prévoyant un moratoire sur l’exploitation des grands fonds marins. Quant à la référence -constante- des pays en développement au droit de la mer, voir la déclaration de l’Inde déjà mentionnée et celles plus générales de l’Egypte, doc. A/AC.105/C.2/SR. 290, para. 37, p. 11 (1978) ; et du Kenya, doc. A/AC.105/C.2/SR. 291, para. 2, p. 2 (1978).
70 En 1975 encore, la Pologne a proposé d’en revenir au projet soviétique de 1971 et d’exclure toute disposition relative au régime juridique des ressources naturelles ; en 1978, la Mongolie a demandé que cette question soit exclue du traité et fasse l’objet d’un protocole facultatif. Cf. leurs déclarations respectives, doc. A/AC.105/C.2/SR. 230, p. 29 (1975) ; et doc. A/AC.105/C.2/SR. 290, para. 38, p. 11 (1978).
71 Voir ainsi les critiques de la Pologne, doc. A/AC.105/C.2/SR. 248, para. 5, p. 3 (1976) ; et de la Tchécoslovaquie, doc. A/AC.105/C.2/SR. 272, para. 3, p. 2 (1977). A partir de 1976, il semble que l’URSS ait présenté, à titre officieux, des propositions dont on ne trouve trace que dans les discussions des délégations ; ce texte apparemment retient l’idée de patrimoine commun. A ce propos, voir les commentaires de la Bulgarie, doc. A/AC.105/C.2/SR. 250, para. 17, pp. 5-6 (1976).
72 Voir ainsi les déclarations radicales de la Mongolie (qui proposait que l’on se borne à inclure une disposition prévoyant que les ressources sont patrimoine commun), doc. A/AC.105/C.2/ SR. 232, p. 53 (1975).
73 Telle est notre interprétation en particulier des déclarations soviétiques en 1976 ; doc. A/ AC.105/C.2/SR. 246, para. 19, pp. 4-5. Pour la solution retenue par l’Accord de 1979, cf. ci-dessous, chapitre III, n. 11 et texte.
74 Voir ainsi les déclarations de la République démocratique allemande, doc. A/AC.105/C.2/ SR. 246, para. 25, p. 7 (1976) ; et celles de l’URSS, doc. A/AC.105/C.2/SR. 226, pp. 7-8 (1975). Cette dernière a expliqué qu’elle préférait que le régime des ressources naturelles soit élaboré ultérieurement, sur la base de l’expérience pratique acquise en matière d’utilisation de ces ressources.
75 Cf les déclarations des Etats-Unis, doc. A/AC.105/C.2/SR. 288, para. 14 et ss, p. 4 (1978) ; et celles du Japon, doc. A/AC.105/C.2/SR. 250, para. 22, p. 8 (1976).
76 Voir les propositions autrichiennes, doc. A/AC.105/WG. I (1978)/WP. 2 du 3 avril 1978, A/AC.105/218, Annexe I, p. 2. L’article XI, chiffre 3, de ce texte reprend l’amendement américain qui avait été introduit à l’encontre de l’idée d’un moratoire et de l’interdiction de s’approprier les ressources une fois extraites du sol ou du sous-sol lunaires. Sur cet amendement, cf. n. 43, 54 et 55 et texte.
77 Au contraire, puisque certains ont à nouveau remis en cause la présence même de dispositions relatives aux ressources naturelles. Ce Groupe est parvenu à un document de travail résultant de l’examen du WG. I (1978)/WP. 2, c’est-à-dire des propositions autrichiennes. Cf. le Rapport du Président du Groupe de travail, doc. A/AC.105/240, Annexe III, pp. 1 et ss (1979). Deux différences sont à noter entre les propositions autrichiennes et la version du Groupe de travail. Cette dernière : 1) réintroduit l’indicatif présent et reconnaît que la Lune et ses ressources “sont” (et non “seront”) patrimoine commun ; et 2) élargit le champ des intérêts à prendre en compte, lors du partage équitable, à ceux des Etats qui ont contribué même “indirectement” à l’exploration de la Lune.
78 La doctrine n’a pas manqué de trouver des explications. Certains comme Christol (op. rit. n. 3, pp. 356-357) y ont vu le fruit de l’art du compromis ; d’autres, plus cyniques comme léger (op. rit. n. 11, pp. 284-285), ont affirmé que l’Union soviétique s’y est résignée en raison de son isolement ou encore que le CUPEEA -dont le travail ces dernières années n’apparaissait pas très productif- devait enfin produire un texte !.
79 Voir le Rapport du CUPEEA à l’Assemblée générale sur les travaux de sa 24e session, doc. A/34/20, p. 12 (14 août 1979).
80 Ibid., p. 12. Les documents en question sont mentionnés ci-dessus, n. 76 et 77.
81 A ce propos, voir le Rapport du CUPEEA mentionné à la n. 79, p. 12; et les explications de Hosenball, United States Senate Committee on Commerce, Science and Transportation, Subcommittee on Science, Technology and Space, “Agreement Governing the Activities of States on the Moon and Other Celestial Bodies”, Hearings, 96th Congress, 2nd session, July 29th and 31st, 1980, Washington, D. C, Government Printing Office, 1980, pp. 6-7. Le renvoi au texte de l’Accord et le rejet des analogies n’exclut cependant pas le recours aux travaux préparatoires.
82 Cf. ci-dessus, chapitre I, n. 16 et texte notamment.
83 Voir le Rapport du CUPEEA. mentionné à la n. 79, p. 12. Il faut sans doute rattacher ce titre à la possibilité qu’ont les organisations internationales dont la majorité des membres sont Parties à l’Accord de 1979, par la voie d’une déclaration d’acceptation, de jouir des droits et obligations prévus par ce dernier : en vertu de la Convention de Vienne sur le droit des traités (article 2, chiffre 1, lettre a), l’expression “traité” concerne seulement les accords entre Etats. La possibilité d’une déclaration de ce type n’existe pas dans le Traité de 1967. N.B. : nous avons utilisé le terme de “traité” dans ce chapitre dans la mesure où un tel instrument était auparavant envisagé.
84 Ibid., p. 13.
85 En ce sens l’article 32 de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités relatif aux moyens complémentaires d’interprétation des traités.
86 Mentionné à la n. 79, p. 13. Certes, ce Rapport a fait l’objet d’un consensus, mais cela ne change rien au fait que les Etats n’ont pas voulu faire apparaître les “understandings” exclus de l’Accord sur la Lune comme des accords qui leur seraient attribuables.
87 Comme le remarque la Convention de Vienne sur le droit des traités (article 2, chiffre 1, lettre a), un traité peut être consigné en plusieurs instruments (dont certains peuvent graviter autour d’un instrument principal) ; mais ce n’est pas le cas de l’Accord sur la Lune et des “accords” mentionnés.
88 Article 31, chiffre 2, lettre a, de la Convention de Vienne sur le droit des traités (les italiques sont ajoutées par nous). Voir parallèlement les accords intervenus entre les Parties après la conclusion d’un traité et relatifs à son interprétation (article 31, chiffre 3, lettre a), dans la mesure où l’on peut considérer l’Accord de 1979 comme conclu une fois que son texte a été accepté et n’a plus fait l’objet de modifications par le CUPEEA (donc avant même son adoption par l’Assemblée générale).
89 L’élaboration de traités dans le cadre d’une organisation internationale entraîne souvent un certain degré de confusion des rôles entre l’organisation et ses membres lors de la négociation et jusqu’à la conclusion de ces traités. Cf. Paul Reuter, Introduction au droit des traités, Paris, Armand Colin, 1972, pp. 42-43. Avec la nuance que dans le cas de l’Accord sur la Lune, la confusion semble volontaire.
90 Cf. Elaine Galloway, “Issues in Implementing the Agreement Governing the Activities of States on the Moon and Other Celestial Bodies”, Proceedings of the 23rd COLOS, 1980, p. 20. Le Brésil avait suggéré -en vain- à propos du champ d’application de la notion de patrimoine commun, que l’interprétation du Comité figure en toutes lettres dans un paragraphe du projet de résolution soumis à l’Assemblée générale. Voir la déclaration de cet Etat, doc. A/AC.105/PV. 203, p. 32 (1979).
91 Cf. l’article 32 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. Il demeure même difficile de déterminer dans quelle mesure ces “accords” sont matériellement de véritables amendements (ajoutant ou modifiant l’Accord de 1979) ou de simples interprétations (ce que le Comité a prétendu faire).
92 Sur la place des travaux préparatoires, voir Serge Sur, L’interprétation en droit international public, Paris, L.G.DJ.,1974, pp. 254 et ss.
93 Contra : la déclaration de Yuri Kolosov, Proceedings of the 23rd COLOS, 1980, p. 228. Cet auteur donne à ces “understandings” un rôle plus important puisque, selon lui, ils constitueraient une interprétation officielle de l’Assemblée générale et devraient être considérés comme ayant la même valeur que l’Accord lui-même.
94 En ce sens Goedhuis, op. cit. n. 6, p. 28.

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