Chapitre IV. Les éventuelles exceptions à la table rase
p. 97-139
Texte intégral
1Dans une section 1, on s’interrogera sur le fait de savoir si les accords de dévolutions ainsi que les déclarations générales de continuité constituent malgré leur apparence une succession automatique aux traités de l’Etat prédecesseur, c’est-à-dire une exception à la table rase ? Pour désigner « les déclarations générales de continuité » nous utiliserons également l’expression « déclaration unilatérale » selon la terminologie consacrée par la CDI dans son article 9 du projet définitif et par la Conférence dans l’article 9 de la Convention de Vienne.
2Dans la section 2 concernant les traités territoriaux bien que notre débat sur la question soit abordé d’une manière contradictoire, la ligne générale de notre démonstration consistera a établir que les régimes de frontières (article 11 de la Convention) comme les autres traités territoriaux (article 12) pourraient constituer une véritable exception à la table rase.
1) Les accords de dévolution et les déclarations générales de continuité (article 8 et 9 du projet définitif de la Convention), réflexion sur leur nature et sur leurs effets juridiques
3Ici il s’agit de déterminer la validité des accords de dévolution et des déclarations générales de continuité. Concrètement cela revient à savoir si l’Etat nouvellement indépendant et les Etats tiers sont automatiquement liés par ces instruments de succession. Si ceci est le cas, alors on est en présence d’une exception à la table rase. Dans l’autre hypothèse, si l’on admet que ni les accords de dévolution ni les déclarations unilatérales n’ont aucune force obligatoire pour les successeurs, alors c’est la règle de la table rase qui prévaut.
4La réponse à ces deux questions ne peut être donnée sans l’examen de la signification, de la nature et des effets juridiques des accords de dévolution et des déclarations générales de continuité.
A) Les accords de dévolution
5Dans le Commonwealth et dans les Etats d’expression anglaise, la pratique est de régler la succession de façon explicite, soit envers soi-même, soit envers l’Etat prédécesseur, c’est-à-dire que « suivant une formule bilatérale l’accord de transfert qui consacre l’indépendance de l’Etat nouveau précise quels droits et quelles obligations résultant des traités conclus par l’ancienne métropole pour le compte du territoire dépendant seront désormais assumés par l’Etat successeur »1. Cette technique est adoptée surtout par les anciennes colonies britanniques.
6L’exemple qui peut servir d’accord-type ressort très bien dans la lettre du Royaume-Uni à la Fédération de Malaisie. Le document est rédigé comme suit :
« J’ai l’honneur de me référer au « Federation of Malaya Independance Act » de 1957 en vertu duquel la Malaisie est devenue un Etat indépendant au sein du Commonwealth britannique et de déclarer que le Gouvernement du Royaume-Uni considère que le Gouvernement de la Fédération de Malaisie accepte les dispositions suivantes :
i) Toutes les obligations et responsabilités qui incombent au Gouvernement du Royaume-Uni aux termes de tout instrument international valide sont, à dater du 31 août 1957, assumées par le Gouvernement de la Fédération de Malaisie pour autant que lesdits actes peuvent être considérés comme s’appliquant directement ou indirectement à la Fédération de Malaisie.
ii) A dater du 31 août 1957, le Gouvernement de la Fédération de Malaisie jouira de tous les droits et privilèges dont le Gouvernement du Royaume-Uni a joui jusqu’à cette date du fait de l’application directe ou indirecte à la Fédération de Malaisie de tout instrument international de ce genre. Je saurai gré à Votre Excellence de bien vouloir confirmer que les dispositions qui précèdent rencontrent l’agrément du Gouvernement de la Fédération de Malaisie et que la présente lettre et la réponse de Votre Excellence constitueront un accord entre les deux Gouvernements »2.
7Du point de vue formel, ce système de transmission par voie d’accord des droits et obligations aux successeurs est aussi intervenu au cours du processus de décolonisation qu’ont connu d’autres Etats : Par exemple, entre les Pays-Bas et l’Indonésie en date du 27 décembre 19493, entre l’Italie et la Somalie selon l’échange de lettres en date du 1er juillet 1960 où il est spécifié que : « le Gouvernement somalien sera subrogé au Gouvernement italien dans les droits et obligations découlant d’actes internationaux que l’Italie à conclus en sa qualité de puissance administrative, au nom et pour le compte de la Somalie, jusqu’au 30 juin 1960 »4. La France a aussi exceptionnellement utilisé ce système pour le traité franco-laotien du 22 octobre 19535, pour le traité franco-vietnamien du 4 juin 19546 et pour la convention diplomatique franco-marocaine du 20 mai 19567.
8Mais vus en tant que tels, c’est-à-dire du point de vue formel et matériel, ces accords de dévolution ne nous renseignent pas sur leur nature et sur leurs effets juridiques. Par conséquent, le seul moyen de savoir s’ils sont définitifs ou non et s’ils entraînent par eux mêmes des droits et des obligations automatiques à l’égard des successeurs et des tiers, c’est de procéder d’une part à l’examen du sort qui leur a été réservé par les dépositaires des traités couverts par les accords de dévolution, et, d’autre part, de vérifier la suite qui leur a été donnée par les gouvernements qui ont eu l’occasion de les connaître.
a) Nature et effets juridiques
i) La pratique des dépositaires
9La pratique du Secrétariat Général des Nations Unies8, par exemple, repose depuis 1962 sur l’opinion que nonobstant la conclusion d’un traité de dévolution, l’on ne devait pas compter un nouvel Etat au nombre des parties à un traité multilatéral sans avoir au préalable obtenu confirmation que cela est conforme à son intention. Ainsi, le Secrétariat Général suit la même procédure9 qu’il applique aux autres Etats qui émergent sur la scène internationale sans avoir signé d’accord de ce type ; c’est-à-dire que malgré l’accord de dévolution prévoyant la succession aux droits et obligations de l’Etat prédécesseur, il demande au nouvel Etat de se prononcer explicitement s’il se considère ou non comme lié par les traités du prédécesseur dont le Secrétariat Général est dépositaire.
10Les autres dépositaires10 également ne considèrent pas un accord de dévolution comme suffisant pour qu’il leur permette d’admettre l’Etat successeur, qui est concerné par cet accord, comme devenant partie à un traité mentionné par l’accord de dévolution. Pour eux, seule une notification ou déclaration de succession a pour effet de réaliser la succession.
11Il ressort, en somme, de la pratique de tous les dépositaires de traités multilatéraux précités, qu’ils ne prennent pas en considération les accords de dévolution puisqu’ils exigent la procédure habituelle d’adhésion ou de déclaration de succession.
ii) La pratique des Etats
12Pour connaître la pratique des Etats dans ce domaine, on peut se baser sur les réponses des gouvernements, orales ou écrites, transmises officiellement au Secrétariat Général sur demande de l’Assemblée Générale de l’ONU. On s’aperçoit que cette pratique est analogue à celle des dépositaires que nous venons d’examiner. Ce sont tout spécialement les pays du tiers-monde qui se sont fait les défenseurs de la non validité des accords de dévolution. Par exemple, la délégation kenyanne a estimé que :
« L’accord de dévolution formé entre l’Etat successeur et le prédécesseur ne saurait former la base à une transmission des droits et des obligations conventionnels à l’Etat successeur [et qu’] en accédant à l’indépendance de nombreux Etats, dont le Kenya, ont, à juste tire, rejeté les accords de ce genre qui étaient conclus à l’avantage exclusif de la puissance coloniale »11.
13Quant au Gouvernement indien, dans son observation orale, il est d’avis que l’accord de dévolution ne constitue pas une notification de succession et que :
« l’Etat nouvellement indépendant doit donner expressément son consentement à être lié par un traité ; [et qu’en plus] dans la pratique l’Inde s’est conformée à ce principe, en effet lors de son accession à l’indépendance, elle s’est aperçue qu’alors qu’elle désirait rester partie à certains accords conclus avant 1947 les autres parties à ces accords n’étaient pas disposées à les maintenir en vigueur ; les traités en question ne pouvaient donc être considérés comme restant en vigueur ipso jure. Dans d’autres cas les accords conclus avant 1947 sont restés en vigueur par accord exprès entre les parties »12.
14De même, en parcourant l’ensemble des autres observations des gouvernements, on s’aperçoit que la grande majorité des Etats nouvellement indépendants ayant connu les accords de dévolution se sont prononcés dans le même sens que le Kenya et l’Inde13.
15Les Etats occidentaux ayant la qualité de prédécesseurs, comme par exemple la Grande Bretagne14, les Etats Unis15 et les Pays-Bas ont aussi « refusé d’attribuer des effets automatiques à un traité de dévolution ». Plus tard, en conférence, le délégué des Pays-Bas16 est même allé jusqu’à dire à propos de l’accord de dévolution conclu avec l’Indonésie17 que :
« le Gouvernement néerlandais s’est finalement rendu compte que de tels accords étaient de peu d’utilité et qu’il n’en a pas conclu d’autres à l’occasion de l’indépendance du Surinam ».
iii) Les travaux de la CDI et de la Conférence
16Il n’y a pas de doute que l’ensemble de la pratique que nous venons d’examiner a amené la CDI à adopter l’article 8 dans son projet définitif, article concernant la dévolution successorale, ainsi libellé :
« 1. Les obligations ou les droits d’un Etat prédécesseur découlant d’un traité en vigueur à l’égard d’un territoire à la date d’une succession d’Etats ne deviennent pas les obligations ou les droits de l’Etat successeur vis-à-vis d’autres Etats parties à ces traités du seul fait que l’Etat prédécesseur et l’Etat successeur ont conclu un accord stipulant que lesdites obligations ou lesdits droits sont dévolus à l’Etat successeur.
2. Nonobstant la conclusion d’un tel accord, les effets d’une succession d’Etats sur les traités qui, à la date de cette succession d’Etats, étaient en vigueur à l’égard du territoire en question sont régis par les présents articles ».
17Alors que le paragraphe 1 annonce que les traités de dévolution intéressent avant tout l’Etat prédécesseur et l’Etat successeur et qu’ils sont sans effets par eux-mêmes sur les droits et obligations à l’égard d’Etats tiers, le second paragraphe, quant à lui, « établit la primauté des articles du projet définitif de 1974 [ou ceux de la Convention de Vienne de 1978] sur les accords de dévolution »18 au cas où cette dernière a été ratifiée par eux.
18Pour arriver à déterminer en profondeur la nature juridique des accords de dévolution la CDI a eu un raisonnement très subtil dont voici les grandes lignes :
19Avant tout, elle a estimé qu’il y avait lieu de vérifier dans une première étape, quelle pouvait être leur validité. Il s’est avéré, qu’ayant été fortement contestée19, cette validité a été réglée aujourd’hui en se référant à la Convention de Vienne sur les traité de 196920. De surcroît la pratique des Etats montre qu’en général ces traités de dévolution ont été considérés comme valides. Par conséquent, il ne semblait pas utile d’établir une règle spéciale sur la validité de ces traités dans le contexte de la succession d’Etats.
20Ceci établi, la Commission a estimé que les traités de dévolution pourraient éventuellement assurer la succession aux traités conclus par l’Etat prédécesseur. En plus, aux effets juridiques de tels accords entre les parties s’ajoute la question des effets à l’égard des tiers. Sur ce dernier point la CDI a déduit de l’analyse de ces accords qu’en pratique leurs effets juridiques se limitent aux Etats parties21. Pour revenir aux effets juridiques directs, donc entre les Etats parties à l’accord de dévolution, elle a observé à la date de l’indépendance l’extinction des obligations de l’Etat prédécesseur dans la mesure où elles passent, selon l’accord de dévolution, à l’Etat successeur. S’agissant des droits, l’accord de dévolution ne peut lier les autres parties aux traités de l’Etat prédécesseur (qui sont des Etats tiers par rapport à l’accord de dévolution). En sorte que l’intérêt des accords de dévolution sur ce point réside essentiellement dans le fait qu’ils donnent des indications sur les intentions du nouvel Etat et qu’ils peuvent être l’expression de sa volonté d’assurer la continuité des traités. En résumé, l’accord de dévolution au sens de l’article 8 du projet définitif et de la Convention de Vienne de 1978 n’a que la valeur d’un document portant des indications sur l’intention générale de l’Etat successeur, à savoir qu’il a une certaine présomption de maintien en vigueur de certaines catégories de traités mais ne peut entraîner d’effets automatiques. De même, l’accord de dévolution ne produit d’effet juridique à l’égard de l’Etat tiers22 c’est-à-dire qu’il est considéré comme res inter alios acta à l’égard des tiers.
21Cette façon de voir a été largement partagée par les membres de la CDI originaires du tiers-monde23.
22Tabibi (Afghanistan) s’était notamment exprimé de la manière suivante :
« Les traités de dévolution, qui son souvent la rançon de l’indépendance, ne peuvent pas être considérés comme définitifs. Ils ne sont définitifs ni pour l’Etat successeur, ni pour l’Etat tiers intéressé, puisque cet Etat pourrait ne pas désirer être lié par le traité vis-à-vis de l’Etat successeur... »24.
23Les délégations gouvernementales des Etats nouvellement indépendants se sont aussi accordées à dire, au sein de la 6e Commission de l’Assemblée Générale des Nations Unies, que :
« la CDI avait fort justement conclu que [... l’]accord de dévolution ne pouvait pas servir de base pour la transmission de droits et obligations conventionnels à l’Etat successeur [...surtout qu’] un accord de ce type avait été souvent conclu au profit exclusif de l’ancienne puissance coloniale »25.
24En Conférence deux amendements furent présentés, l’un par la délégation du Royaume-Uni26, l’autre par celle de la Malaisie27. Mais l’expert consultant auprès de la Conférence a semblé mettre en doute leur utilité. C’est ainsi que Vallat intervint longuement à ce sujet. Selon lui :
« L’amendement de la Malaisie, comme celui du Royaume-Uni, a été rédigé en vue de clarifier les intentions de la CDI [et] chacune des questions soulevées par les deux amendements à l’article 8 a été dûment étudiées par la CDI. D’une manière générale, celle-ci a estimé que ces questions étaient implicitement traitées à l’article 8 et qu’une modification de cette disposition soulèverait des difficultés considérables ».
25puis se référant d’abord à l’objet de l’amendement du Royaume-Uni, il montra qu’il était superflu parceque :
« La CDI s’est toujours souciée d’intégrer le projet dans le cadre général de la Convention de Vienne de 1969 »28.
26C’est ce qui s’est reflété dans le paragraphe 22 du commentaire de l’article 8 où il est clairement écrit que « tout au long de son examen, la CDI est partie de l’hypothèse que le projet d’articles devait être interprété et appliqué à la lumière des règles du droit international relatives aux traités et, en particulier, des règles de droit énoncées dans la Convention de Vienne, et que les questions qui n’étaient pas réglées par le projet d’article seraient régies par les règles pertinentes de droit des traités »29.
27Cette idée a aussi été retenue dans le préambule de la Convention de 1978.
28Quant à l’amendement de la Malaisie, Vallat a estimé qu’il posait à peu près le même problème30 que l’amendement du Royaume-Uni. En bref, les raisons des deux amendements n’étaient pas convaincantes. Sentant qu’une modification du projet soulèverait des difficultés considérables, plusieurs délégués du tiers-monde tels que Thakore (Inde) et Sette Câmara (Brésil), Estrada Oyuela (Argentine), Yasseen (Emirats arabes) et Medjad (Algérie)31 soutenèrent fermement l’article 8 tel qu’il avait été présenté par la Commission après sa mise au point définitive en 1974. Ainsi, à sa 14e séance, la Commission plénière de la Conférence rejeta l’amendement de la Malaisie par 43 voix contre 2 et 23 abstentions. A la même séance la commission plénière rejeta l’amendement du Royaume Uni par 28 voix contre 23 et 21 abstentions. De ce fait, la Commission adopta alors, sans vote, le texte proposé par la CDI pour cet article et l’a renvoyé au comité de rédaction32. Il a finalement été adopté33 sans aucune modification, devenant l’article 8 de la Convention de Vienne de 1978.
29On peut penser que cet article a été facilement adopté par les délégués gouvernementaux, spécialement ceux originaires du tiers-monde, car, comme l’a dit Maresca (Italie) : « il fait la part belle au principe de la table rase »34 et est de plus en conformité avec le droit à l’autodétermination.
30Ainsi, les accords de dévolution ne constituent pas, de par leur nature et leurs effets juridiques, une exception à la règle de la « table rase » puisque d’une part, ils sont considérés, selon les termes de l’article 8 de la Convention de Vienne de 1978, comme intéressant « avant tout l’Etat prédécesseur et l’Etat successeur » donc sans effets à l’égard des Etats tiers (voir paragraphe 1) ; et d’autre part, comme le stipule le paragraphe 2 la primauté est donnée aux articles pertinents de la Convention de 1978.
B) Les déclarations générales de continuité ou déclaration unilatérales
31C’est une technique utilisée par les Etats successeurs qui n’ont pas signé d’accord successoral en matière de traités. Cette technique prouve un manque de confiance envers les accords de dévolution. Bardonnet et Mochi Onory ont même estimé que la déclaration unilatérale est basée sur l’inefficacité des accords de dévolution35.
32La pratique internationale est très riche en matière de déclaration unilatérale. Nous l’exposerons selon une classification faite par Bardonnet.
a) La pratique diplomatique en matière de déclarations générales de continuité (ou déclarations unilatérales)
33Dans la pratique internationale cette solution unilatérale a été suivie d’une façon variée par les Etats accédants à l’indépendance36. On peut les classer en deux groupes :
34* Le premier groupe d’Etats « ... continue d’appliquer les traités préexistants pendant un délai fixé à l’avance, mais considère qu’ils seront tous éteints à l’expiration du délai, sauf confirmation expresse contraire ; ce système est connu sous le nom de théorie du « temps de réflexion »37 ou encore de « doctrine Nyerere »38. Cette pratique a été suivie par le Tanganyka, l’Ouganda, le Kenya, le Malawi, le Botswana et le Lesotho39 qui maintenaient les traités en vigueur, pour une période variable d’un ou deux ans et prorogée d’un an pour l’Ouganda et de deux ans pour le Kenya et le Malawi. Ces Etats font une distinction entre les traités bilatéraux et multilatéraux. Pour les premiers on convient qu’ils sont appliqués sur des bases de réciprocité, à moins qu’entre temps les parties n’aient, d’un commun accord, pourvu à leur abrogation ou à leur modification, passé ce temps proposé, s’ils n’ont pas été, d’un commun accord confirmés, modifiés ou terminés, ces traités disparaissent à moins qu’on puisse dire à la lumière du droit international coutumier40 qu’ils demeureront en vigueur. En outre, il est à préciser que l’Etat tiers n’est pas automatiquement lié pas ces traités bilatéraux, à son tour il peut les accepter comme il peut les refuser.
35Pour les seconds, c’est-à-dire les traités multilatéraux, ces Etats proposent de procéder à un examen de chacun de ces traités et de notifier leur propre position au Secrétariat Général de l’ONU ou au dépositaire41.
36* Le deuxième groupe englobe d’une part le Congo-Brazaville, la République centrafricaine, la Côte d’Ivoire et la République Ruandaise. Leur déclaration unilatérale peut se résumer dans la note verbale du 15 octobre 1962 du Ministre des Affaires Etrangères du Congo-Brazaville qui déclare que « conformément aux usages du droit international [...] la République du Congo [...] se considère comme partie aux traités et conventions signés antérieurement à son indépendance par la République française et étendus par cette dernière à ses anciens territoires d’outre-mer, tant que ces traités ou conventions n’ont pas été expressément dénoncés par elle ou abrogés tacitement par un texte les remplaçant »42. D’autre part, faisant également partie du deuxième groupe d’Etats mais ayant une pratique quelque peu différente, la Zambie, la Guyane, les Barbades et Maurice ont « déclaré que les traités conclus par l’Etat prédécesseur sont maintenus, jusqu’au moment où ils dressent d’un commun accord une liste définitive des traités antérieurs qui vont lier l’Etat successeur et qu’un échange de lettre va antériner »43.
37Ainsi, la pratique en matière de déclaration unilatérale n’est pas uniforme ; elle varie d’un groupe d’Etats à l’autre et parfois d’un Etat à l’autre. Il convient dès lors d’examiner le projet de la CDI de 1974.
b) Résultats de la CDI (article 9 du projet définitif)
38Dans son rapport à l’Assemblée Générale, la Commission, après avoir examiné la pratique internationale a observé : « ... qu’à la différence des accords de dévolution, elles [les déclarations unilatérales] sont adressées directement aux Etats intéressés partie aux traités qui s’appliquaient au territoire autrefois dépendant. Dans l’esprit de la Commission, ces déclarations s’entendent comme l’engagement pris par l’Etat qui en est l’auteur de continuer à appliquer à titre provisoire, sur la base de la réciprocité et en attendant qu’une décision définitive soit prise cas par cas, au sujet des traités conclus par l’Etat prédécesseur... »44. Il y aurait donc de la part de l’Etat successeur une situation analogue à l’application provisoire de l’article 25 de la Convention de Vienne sur le droit des traités45.
39La CDI a retenu que l’acte unilatéral46 ne peut dépendre de la seule volonté de celui qui en est l’auteur, car la pratique internationale ne permet pas de considérer qu’un Etat nouvellement indépendant possède en vertu du droit international, le droit d’appliquer provisoirement les traités de l’Etat prédécesseur, après son accession à l’indépendance. En effet, il est admis que les autres parties au traité sont libres d’accepter ou de refuser l’application provisoire qui leur est proposée par la déclaration47.
40Ensuite, partant d’un argument très convaincant, qui consiste à faire remarquer que « ... les traités eux-mêmes n’envisagent généralement ni la possibilité qu’il y ait des parties à titre provisoire ni celle d’une application à titre provisoire », elle conclut que ces déclarations avaient pour seul effet juridique de fournir la base d’un accord collatéral en forme simplifiée entre l’Etat successeur et chacune des parties aux traités conclus par l’Etat prédécesseur48.
41Voyons maintenant comment la Conférence a acceuilli cette proposition concernant les déclarations unilatérales.
c) La Conférence de Vienne
42Malgré un amendement du Royaume-Uni49 et quelques points de vue de délégués contraires à la proposition de la Commission, le texte a finalement été maintenu tel qu’il avait été présenté par le projet définitif de 1974, devenant l’article 9 de la Convention de Vienne de 1978.
43En conclusion, il ressort de l’étude des déclarations générales de continuité, (prévoyant ou non la succession aux traités), qu’elles n’ont pas la valeur d’un accord international. D’ailleurs, elles ne sont pas envoyées au Secrétariat Général des Nations Unies aux fins d’enregistrement, et ne se trouvent pas de ce fait dans les Recueils des traités des Nations Unies50. Donc ces déclarations unilatérales ne créent pas d’obligation légale, elles ne fournissent qu’une base pour un accord collatéral simplifié entre les parties concernées. Ainsi, une fois de plus, le principe de la table rase prévu par la Convention de 1978 est sauf. Néanmoins, il convient de signaler que la déclaration unilatérale peut être obligatoire si l’autre partie l’accepte.
2) La succession aux traités territoriaux en tant qu’exception à la table rase (articles 11 et 12 du projet définitif et de la Convention de 1978)
44Après avoir vu que dans les cas des Etats nouvellement indépendants, la Convention de Vienne de 1978 n’a pas retenu le principe de la continuité automatique des traités, même lorsqu’il y a eu accord de dévolution ou déclaration générale de continuité, il nous faut aborder dans la section présente une catégorie de traités que la CDI et la conférence de Vienne de 1977 et 1978 ont jugé utile de maintenir ipso jure malgré la tendance marquée qui régnait au sein de la commission et de la Conférence d’offrir à l’Etat successeur une liberté de choix la plus large possible. Cette catégorie concerne les traités territoriaux, c’est-à-dire les traités de frontières internationales, de droit de passage sur les voies d’eau internationales ou sur le territoire d’un Etat, de démilitarisation ou de neutralisation de tel ou tel lieu, etc.. Nous présenterons cette question en deux phases : premièrement nous aborderons la succession aux traités de frontières (article 11 de la Convention) puis nous poursuivrons avec la succession aux autres régimes territoriaux (article 12 de la Convention).
A) Les régimes de frontières (articles 11 de la Convention)
45Si la frontière est généralement définie comme étant « la ligne délimitant l’espace du territoire terrestre soumis à la souveraineté territoriale d’un Etat du territoire d’un autre Etat »51, la plupart des auteurs qui ont étudié la question n’ont pas hésité à mettre l’accent, d’une part, sur l’importance mythique et sacrée qu’elle occupe dans la conscience des peuples52, et, d’autre part, sur son caractère éminemment politique en tant que création de l’autorité53. C’est ce qui a finalement poussé Yakemtchouk54 a poser le problème de la « limite séparative » dans les termes suivants :
« En tant que ligne séparative des compétence étatiques territoriales, la frontière peut être considérée à plusieurs points de vue : géographique, linguistique, économique, juridique et culturel. Bien que tous ces aspects soient complémentaires, il ne fait pas de doute que l’approche politique du problème prime : il en est ainsi en Europe, il en est ainsi en Afrique ».
46Cependant il s’est empressé de nuancer son jugement en ajoutant plus loin que « ... politique par sa formation, la frontière n’est juridique que dans son aboutissement en tant que fixation par le droit d’une situation de fait ». Pour notre part, c’est ce dernier point qui nous intéresse et que nous intéresse et que nous proposons de développer, mais dans le cadre de la succession d’Etats aux frontières tracées par l’Etat prédécesseur pour le compte de l’Etat successeur. Ainsi la question à laquelle nous tenterons de répondre est de savoir que si dans une première étape de la frontière est admise en tant que « fixation par le droit d’une situation de fait », le demeurera-t-elle au cas où il se produirait, dans une seconde étape, une quelconque mutation territoriale ?
47A cette fin, nous examinerons la doctrine, la pratique internationale, les travaux de la CDI et finalement ceux de la Conférence de Vienne.
a) La doctrine
48La doctrine est unanime pour considérer que les traités établissant les frontières internationales ne sont pas affectés par la succession d’Etats. Pour Udina et Castren55 par exemple, :
« Les traités concernant les frontières ayant été mis en exécution en établissant une situation juridique déterminée, celle-ci doit être respectée par le nouveau souverain du territoire au même titre que tout pouvoir territorial étranger ».
49Quant à O’Connel, il s’est prononcé de la manière suivante :
« Since a state can acquire from another only so much territory as that other possessed, the latter’s treaties with neighbouring states delimit the extent of the territory absorbed »56.
50Guggenheim a également soutenu ce point de vue en déclarant :
« Les traités de frontières gardent leur validité malgré la substitution d’une compétence à une autre »57.
51Dans son ouvrage sur la succession d’Etats aux traités, Pereira Gonçalves a adhéré à ce principe en observant que :
« la stabilité des frontières est une condition nécessaire à la vie de la communauté internationale et une conséquence directe du principe de l’intégrité territoriale58 ».
52Cependant, l’on peut observer que Marcoff59 a manifesté des doutes quant à la valeur de la règle de la succession automatique des Etats nouvellement indépendants aux traités de frontières. Il est d’avis que la transmissibilité ou la continuité des traités de frontières est subordonnée au principe de l’égalité des Etats et de l’autodétermination60, et que le principe de l’intangibilité des frontières « peut devenir une source dangereuse de mésententes et de conflits ».
53Quant à Rousseau, il est d’avis qu’en ce qui concerne les frontières, la succession d’Etats ne se produit qu’avec l’accord de l’Etat limitrophe61. Cette prudence est aussi partagée, d’une autre manière, par l’International Law Association, qui a adopté en 1968 ses résolutions sur la succession d’Etats62. Elle a évité de faire une distinction entre les traités de caractère territorial et les autres catégories de traités et par conséquent elle n’a pas approuvé la doctrine générale selon laquelle ces traités de frontières lient ipso jure un Etat successeur.
54Toutefois, comme l’a affirmé Waldock et comme nous l’avons vu plus haut, la grande majorité de la doctrine paraît être nettement en faveur de la thèse selon laquelle le simple fait de la survenance d’une succession n’affecte en rien les frontières établies par des traités63.
55La succession d’un Etat à un autre dans la responsabilité des relations internationales concerne aussi les autres traités territoriaux. De ce fait, la doctrine parle pour désigner les droits et obligations liés à un territoire déterminé soit de « servitudes internationales », expression empruntée aux servitudes en droit romain régissant la propriété foncière64, ou de droits « réels » pour les opposer aux droits « personnels » ; de « traités dispositifs » comme l’ont fait O’Connel65 et Mc Nair66 ou encore de « traités localisés » chez Shearer67 Guggenheim68 et Perdra69. Voyons ce que les auteurs entendaient par cette différente terminologie.
56L’expression « servitude internationale » signifie chez Basdevant « une restriction quelconque à la souveraineté de l’Etat... »70. Reid et Oppenheim vont dans le même sens tout en précisant que le territoire d’un Etat sur lequel pèse une servitude, est assujetti en permanence à un droit d’usage en faveur d’un autre ou d’autres, à des fins spécifiques71. Plus exactement il a été écrit que:
« State servitudes are those exceptionnal restrictions on the territorial supremacy of a state by which a part of the whole of its territory is in a limited way made to perpetually serve a certain purpose or interest of another state »72.
57Les auteurs qui ont accepté la théorie de la servitude internationale considèrent que la validité de celle-ci ne peut qu’être indépendante du traité qui lui a donné naissance dans le passé. Par conséquent, la dite servitude survit lorsqu’une guerre éclate par exemple, et persiste même lorsqu’un changement de circonstances survient subitement73. D’après cette conception les servitudes internationales passent automatiquement au successeur. De même, ce dernier ne se trouve pas lié en vertu de la dévolution d’un quelconque traité qui établirait la servitude, mais du fait de l’opposabilité erga omnes du droit réel. Cependant ce concept de servitude internationale a été des plus obscure et des plus controversé en droit international. On l’a principalement accusé d’être « un vestige anachronique du droit médiéval, patrimonial, féodal et — en fin de compte — du droit romain » ou d’être « le produit hybride d’une adaptation servile de concepts du droit privé, dépeint comme étant une construction vaine et artificielle [...] »74.
58C’est pourquoi la doctrine actuelle préfère désigner ces traités de nature territoriale par les termes de « dispositif » ou « localisé ». O’Connel par exemple parle de traités « dispositifs » et les subdivise en trois catégories :
« First those fixing territorial boundaries; secondly, those creating international servitudes; and, thirdly, capitulations according consular and judicial rights »
59Globalement il les définit de la manière suivante :
« Treaties which create real rights are described as ‘dispositive’. Their légal effect is to impress on a territory a status which is intended to be permanent, and which is independant of the personality of the state exercising sovereignty. The most important of such treaties are those which provide for the neutralisation or demilitarization of a region, or in which rights of way over territory or rights of navigation on national waterways are accorded to a neighbouring state »75.
60Il conclut que les traités « dispostifs » on été affirmés par le Gouvernement suisse dans son contre-mémoire relatif au cas des « Zones franches de Haute Savoie et du Pays de Gex » qui dit :
« [...] transfer or create real right. And real rights in international law are those which are attached to a territory, and which essentially valent erga omens »76.
61Mc Nair va dans le même sens que O’Connel lorsqu’il parle de « dispositive » or « real » treaties. Celui-ci les définit ainsi:
« These treaties have their distinctive characteristic that they recognize or grant or transfer « real » rights, that is rights in rem; for instance, a treaty of cession, a boundary treaty, or a treaty of peace like that of 1783 between Great Britain and the new United States. [...] The treaties belon-ging to this category create, or transfer, of recognize the existence of cer-tain permanent rights, which thereupon acquire or retain and existence and validity independant of the treaties which created or transferred them »77.
62Schearer, par contre, préfère parler de traités « localisés » tout en signalant qu’ils correspondent à la catégorie des traités réels. Cette catégorie de traités localisés dit-il comprend « les traités concernant et affectant le territoire qui ressemblent aux servitudes du droit privé ; ce sont les traités qui dans le passé ont presque toujours été considérés comme survivant aux mutations territoriales »78.
63Gonçalves Pereira a précisé qu’il employait « l’expression traités localisés, dans une acception très large n’impliquant aucun préjugé favorable ou défavorable quant à leur dévolution successorale »79.
64Quant à Guggenheim il a conclu que :
« Les conventions qui se rapportent à un territoire déterminé, c’est-à-dire qui ont un caractère local ou régional, sont considérées comme étant de nature réelle. Elles autorisent et obligent donc l’Etat successeur »80.
65En somme, il ressort de cette analyse que ce débat remonte loin dans le temps. Néanmoins le dénominateur commun des traités de cette nature revient au fait qu’ils sont conclus dans l’intérêt particulier du territoire cédé ou affecté par la mutation territoriale et qu’ils survivent habituellement à ladite mutation81.
66Si la doctrine reconnaît qu’il y a obligation pour l’Etat successeur de respecter les traités territoriaux qui existaient avant lui, la pratique internationale va aussi dans le même sens.
b) La pratique internationale
i) La Cour Internationale de Justice
67Dans le cadre de la CIJ, c’est l’affaire du temple de Preah Vihear82, opposant le Cambodge à la Thaïlande, qui présente un certain intérêt en ce qui concerne les traités de frontières. Sans vouloir rentrer dans les détails de cette affaire qui a été magistralement analysée par une quantité d’auteurs83, nous relevons seulement dans le contexte de notre sujet, qu’en ce qui concerne les délimitations qui avaient été établies en 1904 et 1907, en vertu de traités conclus par la France avec la Thaïlande pour le compte du Cambodge, la Cour a « manifesté un souci particulièrement marqué pour la stabilité des frontières établies pendant la colonisation »84. En effet, pour montrer que cette « stabilité » demeurait sa préoccupation essentielle elle s’est expliquée en ces termes :
« D’une manière générale, lorsque deux pays définissent entre eux une frontière, un de leurs principaux objectifs est d’arrêter une solution stable et définitive. Cela est impossible si le tracé ainsi établi peut être remis en question à tout moment, sur la base d’une procédure constamment ouverte, et si la rectification peut en être demandée chaque fois que l’on découvre une inexactitude par rapport à une disposition du traité de base »85.
68Pour mieux comprendre cette affirmation de la Cour, nous devons avoir à l’esprit qu’à cette date (1962) plusieurs pays africains venaient de s’engager dans le processus de décolonisation et que de nombreux Etats successeurs avaient contestés86 les frontières établies, par les puissances coloniales, il est vrai, au mépris de considérations techniques, linguistiques ou autres87. C’est en s’inquiétant de ces sourdes aspirations que la Cour a voulu « éviter le chaos qu’engendrerait un bouleversement des règlements territoriaux passés » avait fait remarquer J.P. Cot88 dans son commentaire sur l’affaire du temple de Preah Vihear, en prenant soin d’ajouter : « quelle que soit leur nature, quelle que fût leur iniquité, les traités frontaliers doivent survivre, préserver la paix sans laquelle tout n’est qu’illusion »89.
69Ce souci de mettre les délimitations territoriales à l’abri de toute contestation ou du moins de tout changement de quelque nature qu’il soit, a été partagé par une très grande majorité d’Etats, constituant la communauté internationale. Examinons tour à tour la pratique ancienne et la pratique moderne des Etats.
ii) La pratique ancienne des Etats
70En effet, les précédents historiques nous montrent que le maintien des frontières conventionnelles peut se réclamer d’une pratique séculaire. On se rappelle90 qu’après la guerre d’indépendance contre l’Angleterre, les Etats Unis avaient adopté le principe de la table rase des traités conclus par leur prédécesseur. Cependant la seule exception qu’ils avaient admise était précisément en faveur des traités ayant engendré des droits et obligations de nature territoriale ou locale91. C’est ainsi qu’en juillet 1856, Marcy, Secrétaire d’Etat, a déclaré que :
« The United States regard it as an established principle of public law and of international right that when a European Colony in America becomes indépendant it succeeds to the territorial limits of the Colony as it stood in the hands of the parent country »92.
71En Europe, la pratique des Etats est également favorable au maintien des frontières délimitées par l’Etat prédécesseur. Par exemple le Royaume-Uni l’a fait savoir à plusieurs reprises, citons en deux :
72Lors de la cession de l’Alaska par la Russie aux Etats Unis, en 1867 le Queen’s advocate émit l’opinion que les Etats Unis étaient liés par le traité conclu en 1825 entre la Russie et la Grande-Bretagne, particulièrement par les dispositions concernant la fixation des frontières entre l’Alaska et le Canada. Travers Twiss, l’avocat de la reine, s’était exprimé en ces termes :
« The United States are bound by the récitals from the Convention of 1825 which are incorporated into the treaty of cession, as far as the geographical limits of the ceded territory are concerned »93.
73Plus récemment, le Gouvernement britannique a reconnu que les droits et obligations découlant de frontières ne devaient pas être affectés par une succession d’Etats. Ainsi, par convention94 signée à Washington le 2 janvier 1930 entre les Gouvernements des Etats Unis et de la Grande-Bretagne, les deux Gouvernements ont procédé à la délimitation de la frontière entre l’archipel des Philippines et le Bornéo septentrional95. Après juillet 1946, lorsque les Philippines devinrent indépendantes, succédant ainsi aux Etats Unis, elles ne tardèrent pas à exprimer leur désire de prendre en main l’administration des îles Turtle et Mangsee et ceci contrairement à l’accord de frontière de 1930. Cette attitude a provoqué une réaction du Gouvernement britannique qui a adressé une note diplomatique au Secrétariat des Affaires Etrangères philippin lui rappelant que « le Gouvernement de la République philippine avait succédé aux droits et obligations souscrits par les Etats Unis dans les notes de 1930 »96.
74Cette pratique avait aussi cours dans plusieurs pays européens, par exemple, lorsque la Belgique se sépara de la Hollande en 1830, les anciennes frontières franco-néerlandaises devinrent franco-belges, ce qui signifie que le traité de délimitation franco-belge a tout simplement repris le traité de Courtray de 1820 entre la France et la Hollande. Il en fut de même pour le Luxembourg97.
75Dans une note diplomatique citée par Kiss98, la France a eu l’occasion de se prononcer sur la succession aux traités de frontières de la manière suivante :
« Cette règle [de la table rase des traités personnels] souffre une exception importante dans le cas de Conventions qui n’ont aucun caractère politique, c’est à dire qui n’ont pas été conclues en considération de la personne même de l’Etat, mais qui sont l’application territoriale et locale, qui sont fondées sur une situation géographique : l’Etat successeur, quelle que soit la cause pour laquelle il succède, est tenu de remplir les charges qui découlent de traités de cet ordre ».
76En général, le Gouvernement suisse a aussi adopté la même attitude99 Mais c’est surtout les républiques latino-américaines qui ont fourni une éclatante illustration du principe de l’intangibilité des frontières héritées du colonialisme. Pour ce faire, ces républiques ont mis en pratique le principe de l’« uti possidetis »100.
77L’expression « uti possidetis », empruntée au droit romain101 signifie : « comme tu possèdes, tu continueras à posséder »102. Elle « s’emploie dans un traité, un acte international ou diplomatique, pour exprimer que chaque puissance conservera ce dont elle était antérieurement ou actuellement en possession... »103.
78Géographiquement, c’est donc en Amérique latine que l’« uti possidetis » a eu particulièrement libre cours. En effet, c’est au nom de ce principe qu’au lendemain de leur indépendance, les anciennes colonies espagnoles ou portugaises avaient adopté comme frontière de leurs territoires respectifs les limites tracées par l’administration coloniale. « ... ces limites étaient les unes internationales, comme la limite séparant le Brésil portuguais des colonies espagnoles, les autres administratives séparant les vice royautés, les capitaineries »104.
79Ce principe d’« uti possidetis » de 1810105, fort connu en droit public américain était naturellement proclamé dans les constitutions (ou lois fondamentales) de nombreux Etats. Ce fut notamment le cas de la loi fondamentale, article 1er et 2e, de la République de Colombie issue d’un congrès tenu à San Thomas de Augostura le 17 décembre 1819106 et de la loi fondamentale de l’Union des Peuples de Colombie du 12 juillet 1921107. Le principe figure aussi dans le nombreux traités conclus entre les Etats latino-américains108. C’est le cas du pacte de Lima du 8 février 1848109 entre la Nouvelle Grenade, l’Equateur, le Pérou, la Bolivie et le Chili qui eut pour souci de prévenir les conflits qui « naîtraient entre confédérés, particulièrement au sujet des limites territoriales » et qui proposait dans son article 1er, qu’à « défaut de stipulation spéciale, leurs frontières seraient celles qui existaient à l’époque où commença le mouvement d’émancipation ». L’article 7 ajoutait que :
« les Républiques confédérées déclarent avoir droit absolu à conserver les limites de leur territoire, telles qu’elles existent au moment de l’indépendance, celles des vices royautés, capitaineries générales [...] que comprenaient l’Amérique espagnole »110.
80Pour terminer disons que si dans l’ensemble l’« uti possidetis » a été adopté par les Etats latino-américains, des difficultés se sont présentées quant à l’interprétation théorique de ce principe. Par exemple, la Colombie et la Bolivie soutiennent l’« uti possidetis » de droit111 alors que le Brésil et le Paraguay défendent l’« uti possidetis » de fait112.
81année-là que la lutte contre la péninsule prit forme dans toute l’Amérique, cessant d’apparaître comme une révolte isolée ou une insurrection sporadique, pour se convertir en soulèvement général, en guerre, créant une source de droits et obligations qui, plus tard, ont leur développement juridique international ».
82En plus de cette controverse qui s’est engagée quant à son interprétation théorique, on a reproché à se principe, à tort, son caractère purement régional (Amérique du Sud) et son absence de valeur juridique positive113 Plus sérieux est le reproche qu’on lui a fait de ne pas avoir été suivi dans certains cas pratiques comme par exemple lors du problème des limites entre le Pérou et la Bolivie où « son application posant l’interprétation de textes non seulement anciens, mais inéxacts ou incomplets, a créé et prolongé des difficultés... »114.
83Malgré ses imperfections qui ont donné lieu aux critiques mentionnées ci-dessus, on peut conclure que le principe américain de l’« uti possidetis » demeure défendable, surtout « en raison de ses conséquences juridictionnelles pratiques ». C’est ainsi que de Lapradelle lui a fait la part belle, en observant que :
« faisant des litiges de frontières des débats d’interprétation de textes, il leur a donné une allure pacifique de joute contentieuse, et sauf exception rare, il a conduit forcément à l’arbitrage. Du point de vue des relations entre Etats, un long procès vaut mieux qu’une courte guerre »115.
84N’est-ce pas là une grande réussite ?
85Il convient d’examiner si ce principe du respect des frontières internationales héritées des puissances coloniales a été appliqué dans les continents afro-asiatiques.
iii) La pratique récente
86Voyons comment s’est posé le problème de frontières dans les Etats nouvellement indépendants d’Afrique. L’Afrique précoloniale a ignoré la notion rigide de frontière qui divise les peuples, plus exactement elle a méconnu la notion de « frontière limite » au profit de celle de « frontière zone »116. Cela est dû au fait que l’Afrique, continent de grandes terres et sous peuplé, n’a pas fait l’objet de luttes pour la possession des sols entre les peuples africains117. Les peuples et les groupes ethniques africains ne sont pas parvenus à la formation de frontières rigides parce que :
« contrairement à l’Europe, l’Afrique précoloniale, comme l’Afrique de nos jours, ne vivait sous aucune contrainte démographique : la rareté relative de ses populations trouvait sa contrepartie dans une grande abondance de terre [et que] les rivalités pour la possession du sol n’ont jamais atteint en Afrique précoloniale la même intensité que dans les pays européens économiquement développés, pour lesquels la possession territoriales était l’apanage de la richesse et de la puissance »118
87Si l’Afrique précoloniale n’a pas connu de frontières rigides entre les peuples, il n’en a pas été de même durant la période coloniale. En effet, la notion de frontière au sens du droit positif119 a été introduite en Afrique par le colonialisme. L’Europe, comme l’a observé Lord Hadley, « s’est projetée en Afrique, d’abord sur l’espace de ce continent, en imposant des cadres et des frontières qui ont suivi les explorations et les intérêts mercantiles ou missionnaires »120. Les délimitations faites initialement par le colonialisme sur le continent africain sont politiques et s’identifient avec l’établissement des sphères d’influence121 afin d’éviter les rivalités entre les puissances et pour ménager les possibilités de nouvelles annexions. La fixation de ces frontières se faisait donc sur des cartes122 et non sur le terrain et suivait généralement « des lignes artificielles dérivant de données astronomiques ou géométriques »123, ce qui fait que l’élément humain n’intervenait jamais ou très rarement. C’est pour cette raison que la majorité « [...] des frontières africaines sont sans aucun rapport avec les limites traditionnelles et éthniques. Cette politique du partage du continent africain a d’une part, démembré des ethnies jadis homogènes et les a réparties entre différentes entités étatiques et a, d’autre part, rassemblé des ethnies hostiles »124.
88En somme, comme l’a fait remarquer R. Pétrovic, la délimitation des possessions coloniales en Afrique « ressemblait [...] beaucoup plus à la solution d’un devoir de géométrie [...] qu’à l’examen des éléments géographiques, historiques ou ethniques importants pour les aspects territoriaux de la naissance et du développement des Etats »125.
89Ces tracés de frontières artificiels n’étaient pas pour plaire aux dirigents nationalistes africains qui luttaient pour leur indépendance. Lors de la Conférence des peuples africains tenue à Accra126 en décembre 1958, le programme frontalier semblait pencher en faveur de la table rase des frontières tracées par le colonialisme. En effet, ils ont déclaré dans la résolution relative aux frontières que :
« les barrières et frontières artificielles tracées par les impérialistes pour diviser les peuples africains au détriment des Africains doivent donc être abolies ou ajustées... »127.
90Mais une fois l’indépendance politique acquise, ce fut le désenchantement. Les dirigeants africains comprirent qu’il fallait maintenir à tout prix les frontières héritées du colonialisme car leur révision systématique aurait entraîné « d’innombrables conflits externes » ; comme l’a écrit ajuste titre Boutros-Ghali les postulats anticolonialistes s’avérèrent inapplicables128. Ainsi on s’est trouvé en présence d’un changement d’orientation, c’est-à-dire que pour la grande majorité des Etats africains issus de la décolonisation, le leitmotiv est devenu « intégrité et intangibilité des frontières » au lieu de « abolition des frontières », prôné lors de la Conférence d’Accra de 1958. Ainsi, malgré les efforts de N’Krumah en faveur de l’unionisme qui aurait permis l’abolition des frontières, on est retombé sur leur maintien, étant donné que cette thèse n’a pas été acceptée. « Il est apparu [comme l’a observé M’Baye], que ce qui était considéré comme artificiel et éphémère est devenu tout à coup intouchable, parceque correspondant à un sentiment national profond ! »129. En effet, à la Conférence de l’OUA de 1963130, les jeux se sont faits : plusieurs chefs d’Etats africains131 se sont prononcés pour l’intangibilité des frontières héritées du colonialisme. La confirmation de cette thèse est contenue dans la résolution AHG/1 de la Conférence de Chefs d’Etats africains tenue au Caire du 17 au 24 juillet 1964132. Cette résolution déclare dans un de ses paragraphes que :
« tous les Etats membres s’engagent à respecter les frontières existantes au moment de l’accession à l’indépendance ».
91La même position a été adoptée à la 2e Conférence des pays non alignés du 5 au 10 octobre 1964 tenue également au Caire. Il a été déclaré que :
« les pays participants à la présente Conférence [...] s’engagent à respecter les frontières telles qu’elles existaient lorsque les Etats ont accédé à l’indépendance »133.
92Quant à la pratique des Etats du tiers-monde allant également dans le sens de la continuité des traités de frontières lorsque survient une succession d’Etats, elle ressort de la « Chronique des faits internationaux » de Rousseau dans la Revue générale de droit international public (RGDIP). En effet, la plupart des négociations sur les questions de frontières y sont mentionnées. Par exemple, il est rapporté que la Chine et la Birmanie ont reconnu par traité le statu quo sur la ligne de Mac Mahon. La Chine a notamment déclaré admettre le prolongement entrême oriental de la ligne de Mac Mahon comme « ligne coutumière traditionnelle »134.
93La Chine adopta la même position en ce qui concerne le traité du 5 octobre 1961 portant démarcation de la frontière entre elle et le Népal135.
94L’article 1er de l’accord frontalier sino-pakistanais signé le 2 mars 1963 dispose qu’« étant donné que la frontière existant entre le Sin Kiang chinois et les territoires voisins dont la défense effective incombe au Pakistan, n’a jamais été délimitée, les deux parties conviennent de la délimiter à partir de la frontière traditionnelle et coutumière »136.
95L’Ethiopie et le Soudan aussi, après une négociation de 7 jours, ont signé le 4 janvier 1967 un communiqué commun dans lequel « ils ont réaffirmé leur désir de reconnaître leur frontière commune et d’en respecter le statu quo »137.
96Après un long différend entre la Tunisie et l’Algérie à propos du tracé de frontière entre Bir Romane et Fort Saint Juste, au dessus de la borne 233138, un accord relatif à la démarcation de la frontière entre les deux Etats dans cette région a été finalement signé le 16 avril 1968139. Le tracé retenu par la commission algéro-tunisienne situe la borne 233 en dehors du territoire tunisien. Rousseau a constaté à ce propos, qu’« il n’est pas indifférent d’observer que l’accord du 16 avril 1968 est conforme à la thèse algérienne et à la résolution adoptée le 21 juillet 1964 à la Conférence du Caire par l’OUA, stipulant l’intangibilité des frontières héritées du système colonial »140.
97De même après l’intervention discrète de l’OUA, l’on observe que finalement un traité de délimitation de frontières a été définitivement signé le 9 juin 1970 entre le Président Kenyata et l’Empereur Haïlé Sélassié141.
98Le différend frontalier entre la Haute-Volta et le Mali, qui a donné lieu à des accrochages en décembre 1974 et juin 1975, a finalement été réglé « sur la base de recommandation de la commission de médiation [de l’OUA] qui consacre l’intangibilité des frontières coloniales »142.
99La même évolution a été constatée à propos du conflit de frontières algéro-marocain143. Une Convention relative au tracé de la frontière d’Etat établie entre le Royaume du Maroc et la République Algérienne Populaire et Démocratique a été signée le 15 juin 1972144. L’article 1er de cet instrument « confirme la définition de la frontière sur la base de l’intangibilité et en fournit les coordonnées géographiques précises ».
100D’autres Etats africains, comme la Haute-Volta et le Niger, le Mali et la Mauritanie, ont aussi adopté le statu quo territorial145.
101Au vu de cette pratique, on peut conclure que le principe de l’intangibilité des frontières héritées du colonialisme a triomphé lors des négociations interétatiques. On est enclin de constater avec Luchaire, que d’une manière générale, les frontières africaines héritées du colonialisme sont actuellement « relativement solides »146. Nous employons volontairement l’adverbe « relativement », car nous sommes conscients du fait que tout problème de frontière touche à une fibre sensible de tout pays et qu’il faut beaucoup de sens politique à certains dirigeants pour le surmonter. Il suffit d’observer l’actualité politique internationale pour se rendre compte de ce que des conflits frontaliers sont latents et même parfois aboutissent à des conflits armés.
102Il convient maintenant d’examiner les travaux de la CDI.
c) La CDI et les régimes de frontière (article 11 du projet définitif et de la Convention de 1978)
103Si l’on se penche sur les rapports de Waldock et de Vallat147 on constate qu’ils n’ont pas hésité à adopter la thèse selon laquelle le simple fait de la survenance d’une succession d’Etats n’affecte en rien les frontières établies par des traités148. En effet, l’article définitif auquel ils sont parvenus est libellé ainsi :
104« Article 11- Régimes de frontières
105Une sucession d’Etat n’affecte pas en tant que telle
une frontière établie par un traité, ni
les obligations et droits établis par un traité et se rapportant au régime d’une frontière »
106De l’analyse des commentaires149 de cet article, il ressort que trois considérations ont amené les rapporteurs à adopter la règle de l’intangibilité des frontières150 lorsque survient une succession d’Etats. Etudions à présent ces trois considérations.
i) Traités « running with the land »
107La première considération a trait au fait que la doctrine151, la pratique152 et la jurisprudence153 corroborent la thèse selon laquelle il existe des droits et obligations qui peuvent être considérés comme « running with the land ». De même, le libellé de l’article 11 semble indiquer qu’il ne s’agit pas d’une succession à l’égard du traité proprement dit mais à l’égard du régime de frontière établi par le dit traité154. Ce qui signifie que les rapporteurs, comme la doctrine155, dissocient entre l’acte créateur et la situation créée ; en d’autres termes ils considèrent que le traité est « consommé » par l’exécution, tandis que la situation juridique, la frontière, est définitivement établie. Par conséquent, en cas de changement de souveraineté, il serait très difficile à l’Etat successeur, comme à tout Etat voisin, de remettre en cause cette situation préétablie. Le but avoué156 de ce choix est de faire triompher le principe fondamental de la stabilité des frontières et par conséquent de lui épargner d’être considéré comme régi par la règle de la table rase prônée par la Convention de Vienne de 1978 (article 16 et suivants).
108Mais quelle a été l’attitude des membres de la CDI ?
109De manière générale, qu’ils aient été originaires du tiers-monde, des pays occidentaux ou des pays socialistes, ils ont adhéré à l’opinion indiquée ci-dessus157. Par exemple, Hambro (Norvège) est d’avis que :
« les questions des frontières devraient être considérées sous l’angle de la situation juridique établie par le traité plutôt que sous l’angle de traité lui-même [et qu’] il va de soi qu’aucun cas de succession, qu’il résulte de la création d’un nouvel Etat ou de la séparation d’une partie du territoire d’un Etat, ne saurait avoir d’incidence sur les frontières »158.
110Sette Câmara (Brésil) a adhéré à cette idée, comme la majorité des membres, et il a posé le problème de la manière suivante :
« La différence entre les traités ‘réels’ et les traités ‘personnels’ est que seuls les premiers sont considérés comme transmissibles [...] en droit international, les droits ‘réels’ ont été définis comme des droits attachés au territoire et qui sont par définition opposables à tous »159.
111Plus tard, dans les débats qui suivirent en 1974160, il précisa encore mieux son idée en déclarant que « ...ce ne sont pas les traités [de frontière] qui constituent une catégorie spéciale, mais les situations découlant de leur application ».
112Quand à Yasseen (Irak), tout en approuvant ses collègues, il a nuancé son point de vue en observant qu’« en droit international les frontières sont établies de plusieurs manières, notamment par traité. C’est l’exécution du traité de frontière qui détermine le tracé de la frontière. Il y a là une situation de fait conforme à une règle objective. Le traité a produit ses effets, mais il garde toute son importance en tant que titre et en tant que preuve de l’établissement de la frontière »161.
113Cette opinion est proche de celle de Winiarski qui estime aussi que l’Etat successeur peut se référer au « titre que représente le traité pour défendre ses frontières au cas où elles seraient contestées par d’autres Etats »162.
114Si la majorité des membres de la CDI s’est ralliée à cette première considération en faveur de la succession automatique au régime de frontières seul Tabibi163 (Afghanistan) a déclaré qu’il était d’emblée opposé au principe de succession aux traités de frontières comme au régime de frontières créées par traités164 ; de plus, il a ajouté que « ces traités coloniaux de délimitation sont illégaux165 et portent atteinte au principe essentiel qu’est le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ». Néanmoins Tabibi a reconnu la particularité des frontières africaines en déclarant que : « modifier les frontières africaines bouleverserait toute la structure des Etats Africains »166.
115Finalement, c’est ce souci de préserver le monde de conflits inutiles qui est à la base de la deuxième considération que nous allons traiter, qui a amené les rapporteurs spéciaux à adopter le principe de l’intangibilité des frontières héritées du colonialisme.
ii) Stabilité des frontières et maintien de la paix et de la sécurité internationale
116Il ressort, en effet, des rapports précités que les considérations ayant trait à la nécessité de maintenir la paix et la stabilité dans les relations internationales sont aussi à la base de l’adoption de l’article 11 consacrant l’intangibilité des frontières. En effet, Waldock avait déjà signalé en 1968 qu’il travaillerait dans ce sens. Il a expliqué son choix dans les termes suivants :
« les frontières existantes résultent souvent de dispositions de traités du passé, et si ces dispositions relatives aux frontières pouvaient toujours être contestées au moment de la décolonisation ou dans des cas de succession, cela ne pourrait avoir pour effet que d’accroître les risques auxquels est exposée la paix internationale »167
117Ce raisonnement qui évoque la notion jadis courante d’intérêt général168 se retrouve chez Vallat dans son rapport de 1974169 où il a pertinemment observé que :
« la perturbation des relations internationales qui pourrait résulter [...] d’un droit de dénonciation unilatérale des frontières n’est pas de celles que l’on peut envisager avec insouciance. Il se peut que, dans certains cas, la doctrine de la continuité des régimes de frontières et des régimes territoriaux soit une source de tensions politiques [...] mais il est peu probable qu’il en soit ainsi dans la grande majorité des cas. En fait, c’est plutôt la perturbation que le maintien des frontières qui risque d’engendrer le chaos »170.
118Cette thèse qui considère la frontière comme étant un élément de stabilité de la vie politique a été très favorablement acceuillie, spécialement par les membres171 de la CDI originaires du tiers-monde.
119C’est Sette Câmara (Brésil) qui a le plus défendu cette idée. En effet, après avoir dissipé toute confusion au sujet des traités territoriaux il a conclu magistralement que :
« si tout Etat nouvellement indépendant répudiait unilatéralement les frontières qui constituent le fondement de son existence, le monde se trouverait plongé dans le chaos »172.
120Martinez Moreno (El Salvador), Bedjaoui (Algérie) et Yasseen (Irak) étaient aussi d’avis « que la stabilité inhérente à la notion de frontière devait être préservée dans l’intérêt de la communauté internationale »173.
121Cependant, si tous les juristes originaires du tiers-monde ont souligné que la stabilité des frontières était étroitement liée au maintien de la paix et de la sécurité internationale et par conséquent ont soutenu sans réserve le projet des rapporteurs spéciaux, il n’en a pas été de même pour Tabibi (Afghanistan) qui a nettement déclaré que :
« l’argument invoqué à l’appui de ces articles [11 et 12], c’est-à-dire le maintien de la paix, n’est pas convaincant. [11 a ajouté que] ce n’est pas en maintenant une frontière, illégalement établie par un traité colonial ou inégal, que l’on instaure la paix »174.
122Il est à signaler qu’au cours des débats qui suivirent au sein de la CDI cette opinion n’a reçu l’appui d’aucun de ses membres175.
123Examinons pour finir la troisième considération sur laquelle se fonde l’article 11 de la Convention de Vienne de 1978.
iii) Recours à l’article 62, paragraphe 2, alinéa a de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités
124Le principe de l’intangibilité des frontières176 adopté par les rapporteurs britanniques se veut une suite logique de l’exception prévue au paragraphe 2, alinéa a de l’article 62 de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités qui dispose qu’ :
« un changement fondamental de circonstances ne peut être invoqué comme motif pour mettre fin à un traité ou pour s’en retirer s’il s’agit d’un traité établissant une frontière »177.
125On se rappelle qu’à la CDI178, comme à la Conférence sur le droit des traités qui s’en suivit, cette exception en faveur des traités de frontières avait été accueillie favorablement par une grande majorité des membres et délégués originaires du tiers-monde179. Dans le cadre de la succession d’Etats aux traités aussi, on n’a pas été surpris de voir ces mêmes membres et délégués soutenir Waldock et Vallat pour leur référence expresse à l’article 62 (§ 2, alinéa a) de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités. Ainsi, par exemple Ramangosoavina (Madagascar) a dit que cette exception à la règle de la table rase s’inscrit de par sa nature même : « ... dans la suite logique du paragraphe 2 de l’article 62 de la Convention de Vienne sur le droit des traités qui a déjà prévu qu’un changement fondamental des circonstances ne peut-être invoqué comme motif pour mettre fin à un traité, s’il s’agit d’un traité établissant une frontière »180.
126Cependant, ces arguments n’ont pas plus convaincu Tabibi (Afghanistan) pour qui, d’une part, l’article 11 comme l’article 62 (§ 2) de la Convention de Vienne de 1969 « ne font que refléter la pratique que le Royaume-Uni a suivie au xviiie siècle et au xixe siècle, quand il décidait des frontières » et, d’autre part, l’exception faite au changement fondamental des circonstances « ne peut servir à légaliser les traités inégaux surtout qu’à cet égard, l’expert consultant à la Conférence de Vienne 1969 avait donné l’assurance que l’établissement de frontières par un traité laissait intacts tous les motifs qui pouvaient être invoqués en droit pour contester cette frontière, comme le principe de l’autodétermination ou de l’invalidité des traités. C’est sous réserve de ces assurances que l’exception énoncée au paragraphe 2 de l’article 62 a été adoptée »181.
127La position de Tabibi n’a pas été suivie et le recours à l’article 62 (§ 2, alinéa a) semble avoir convenu à la grande majorité des membres de la CDI.
128Passons maintenant à l’étude des observations des Gouvernements et des interventions des délégués gouvernementaux auprès de la Conférence au sujet de l’article 11.
d) La Conférence de Vienne de 1977-1978 et les régimes de frontières (article 11 du projet définitif et de la Convention de 1978)
129Les observations écrites ou orales de gouvernements182 et les interventions des délégués faites en conférence183 ont été similaires dans leurs argumentations, c’est pour cette raison que nous nous proposons ici de les traiter simultanément. Il est à signaler d’ores et déjà que l’argumentation développée par les gouvernements et leurs représentants à la conférence ressemble aussi à celle qui a été développée au sein de la CDI. Néanmoins, l’article 11 à cette fois donné lieu à de très nombreuses interventions de délégués gouvernementaux représentant les diverses conceptions du droit. Malgré l’approche différente qu’ils ont eue sur l’ensemble du problème, ils ont néanmoins abouti à la même conclusion. Ainsi, l’on a constaté que les délégués occidentaux184, socialistes185 et du tiers-monde186 ont dans la grande majorité fait corps, d’abord au sein de la sixième commission de l’Assemblée Générale pour se déclarer favorables au maintien de l’article 11 qui prévoit essentiellement qu’une succession d’Etats n’affecte pas, en tant que telle, les frontières établies par un traité et que le fait de soustraire cette matière du principe de la table rase contribue à garantir la stabilité des relations internationales.
130Leur position n’a pas changé lors de la conférence, cependant on peut noter que les délégués des pays occidentaux187 et socialistes188 se sont faits discrets, laissant, il faut le reconnaître, le soin aux représentants du tiers-monde de réitérer leur point de vue. Manifestement ces derniers se sont scindés en deux groupes, l’un majoritaire, favorable à l’article 11, l’autre minoritaire, opposé à tout maintien de frontières héritées du colonialisme.
131De la tendance majoritaire, on peut relever les interventions qui nous semblent significatives. Par exemple Sattar (Pakistan) a fait une déclaration qui situe le problème de la manière suivante :
« Le principe de maintien en vigueur à la suite d’une succession d’Etats, des frontières établies par traité est solidement étayé par la pratique, notamment celle des Etats nouvellement indépendants. Ce principe a été consacré par [...] l’OUA et par [...] la Conférence des chefs d’Etats et de Gouvernements des pays non-alignés189. Dans leurs observations écrites, telles qu’elles sont consignées dans les compilations analytiques des observations des gouvernements (A/CONF.80/5 et corr.l), les Etats ont déclaré que l’article 11 est juste, raisonnable, équilibré et réaliste, incontestable, bien établi et universellement reconnu, ou encore en parfaite harmonie avec la pratique des Etats et les principes généraux de droit international. La délégation pakistanaise estime de plus que le respect de la règle énoncée à l’article 11 est une condition essentielle de la paix et des relations amicales entre les Etats voisins. La présence de cette disposition dans la future Convention est d’une importance vitale si l’on veut que cet instrument soit équilibré, viable et acceptable »190.
132Tout en restant dans la même logique que Sattar, Bedjaoui (Algérie) a fait observer qu’ :
« ... étant donné leur importance considérable les traités territoriaux dont il est question dans l’article 11 ont toujours fait l’objet d’un régime à part, dans la mesure où l’on considère qu’ils ne sont pas affectés par une succession.... 11 ne peut pas, en fait, en être autrement car il est facile d’imaginer le danger universel qu’entraînerait l’acceptation de la non-continuité des traités territoriaux. C’est pourquoi la délégation algérienne apporte son appui sans réserve à l’article 11 tel qu’il a été rédigé par la CDI »191.
133Quant à la délégation koweïtienne, après avoir donné à peu près les mêmes arguments, elle a conclu très nettement qu’ :
« ... elle appuie sans réserve l’article 11 tel qu’il a été rédigé par la CDI et s’opposera à tout amendement à cet article et à toute version du projet de convention dans laquelle il ne figurait pas »192.
134Les autres interventions des délégués des pays du tiers-monde étant fort proches de celles que nous venons de citer, nous nous contenterons de mentionner brièvement à quelles notions ils se sont référés pour réitérer leur soutien à l’article 11 proposé par la CDI. Généralement, ils ont fait référence à « la doctrine, la pratique et la jurisprudence », aux notions de « maintien de la paix » et « maintien de la sécurité internationale » et à « l’exception prévue à l’alinéa a, paragraphe 2 de l’article 62 de la Convention de Vienne sur le droit des traités »193.
135A cette thèse, les adversaires, assez minoritaires,194 de l’article 11 répondirent de la même manière que dans les observations orales et écrites faites par leur gouvernement195, à savoir qu’il ne fallait pas accepter une exception artificielle au principe de la table rase196 dans le domaine des traités de frontières. Ils pensaient aussi que la succession aux traités de frontières ne peut être reconnue et respectée que si l’accord en question répond aux trois critères suivants :
136Primo : Il faut au moins que l’accord tacite du pays voisin soit donné197
137Secondo : Il faut que l’accord soit licite.
138Tertio : Il faut que son maintien en vigueur ne constitue pas une source de tensions et d’instabilité198.
139Enfin les délégations de la Somalie199, du Maroc200 et de l’Afghanistan reprochaient aux tenants de l’article 11 et surtout à la CDI de reposer leur raisonnements essentiellement sur les déclarations et pratiques d’anciennes puissances coloniales201 et de considérer la frontière comme une simple ligne géométrique, alors qu’elle est en réalité une zone habitée par une population dont il faut respecter les sentiments et le droit de disposer d’elle-même202.
140A notre avis, on peut comprendre cette position qui va dans le cadre du rejet total de tout ce qui provenait du colonialisme et qui a été d’ailleurs partagée par les Chefs de partis africains lors de la Conférence des peuples africains tenue à Accra en décembre 1958203. Cependant, finalement elle a paru beaucoup trop dangereuse aux délégations gouvernementales auprès de la Conférence de Vienne de 1977-1978 qui l’ont combattue pour aboutir à une solution raisonnable concrétisé par l’adoption de l’article 11 prônant l’intangibilité des frontières héritées de la période coloniale.
141Voyons maintenant quelle solution a été adoptée pour les autres traités territoriaux.
B) Les autres traités territoriaux (article 12 du projet définitif et de la Convention de Vienne de 1978)
142Si l’article 11 précédent stipule que l’Etat successeur doit respecter les traités de frontières conclus par l’Etat prédécesseur et préserve ainsi le principe de coéxistence pacifique entre les Etats, l’article 12, lui, s’occupe des droits et des obligations concernant l’utilisation d’un territoire. 11 couvre, ainsi, d’autres situations territoriales qui touchent plutôt au principe de coopération active entre les Etats. Ce qui est considéré à l’article 12 peut affecter les intérêts vitaux des pays, particulièrement des pays voisins dans le domaine de l’utilisation des voies fluviales, du transit pour des Etats qui n’ont pas d’accès direct à la mer, le trafic de frontières et le mouvement de personnes. Mais en réalité l’article 12 comme l’article 11 ne s’occupent pas de la relation entre l’Etat successeur et l’Etat prédécesseur, mais des relations entre l’Etat successeur et les autres parties au traité qui peuvent être soit un Etat, soit un groupe d’Etats ou même tous les Etats de la communauté internationale.
143Il est à signaler que la Convention de Vienne sur le droit des traités (1969) ne consacre aucune disposition quant à la catégorie de traités qualifiés « d’objectifs » ou « territoriaux »204. En considérant le droit général des traités, désormais formulé dans cette Convention de 1969, on peut déduire qu’il n’attribue à ces traités aucun effet particulier à l’égard des Etats tiers du simple fait de leur caractère territorial.
144Cependant dans le cadre de la succession d’Etats, le problème s’est posé d’une manière différente dans la mesure où l’on n’a pas considéré l’Etat successeur au même titre qu’un Etat tiers, à l’égard d’un traité territorial conclu par son prédécesseur. Ainsi, pour les traité territoriaux, on a estimé qu’un certain lien juridique avait été créé entre le territoire de l’Etat successeur et les traités en question et que de ce fait ils devaient rester en vigueur malgré la survenance d’un changement de souveraineté.
145Cette règle de la continuité des traités territoriaux s’inspire de la doctrine205 et trouve un appui dans la pratique internationale.
146Nous ne nous attarderons pas sur la doctrine, parce qu’elle s’est essentiellement basée sur la pratique internationale pour arriver à cette conclusion. Pour notre part, avant de voir comment la CDI puis la Conférence ont abordé ce problème, nous examinerons, d’une manière synthétique, les cas principaux de pratique internationale, pour mettre en évidence les solutions apportées lors de succession d’Etats.
a) La pratique internationale
i) Bref aperçu de la jurisprudence
147Comme l’a écrit Rousseau, il existe « des traités établissant des obligations de ne pas faire (de ne pas fortifier une région ou une ville, de ne pas établir de cordon douanier). Fréquemment [a-t-il souligné] ces obligations ont une durée plus longue que celle des simples obligations conventionnelles et se transmettent à l’Etat annexant ou à l’Etat nouveau »206.
148Cette réflexion vise, à notre avis, les cas typiques de la démilitarisation des Iles d’Aland207 et l’affaire des zones franches du Pays de Gex et de Haute-Savoie208.
149Dans l’affaire des Iles d’Aland, la Russie s’était engagée par le Traité de Paris de 1856 vis-à-vis de l’Angleterre et de la France à ne pas fortifier les Iles d’Aland. Cet engagement était surtout assumé dans l’intérêt de la Suède, étant donné la position stratégique de cet archipel qui pouvait menacer directement Stockholm. Or, lorsque la Finlande se détacha de la Russie en 1917 et que les Iles se trouvèrent comprises dans son territoire, la Suède, qui n’était pas signataire du traité de Paris de 1856, allégua fortement que tout Etat possédant les Iles en question devait se conformer aux obligations qui découlaient pour lui du système de démilitarisation prévu par le dit traité. La commission de juristes, désignée par la SDN et dont faisait partie Max Huber, donna raison à la Suède, estimant qu’étant donné le caractère territorial de l’obligation, celle-ci avait été transmise au successeur. Ajoutons qu’à ce sujet, après avoir profondément étudié l’affaire des Iles d’Aland dans le cadre de « l’effet des traités à l’égard des Etats tiers », Cahier a été d’avis que « l’obligation de la Finlande n’est que le résultat d’une application des règles relatives à la succession d’Etats et que la commission de juristes a entrevu le problème lorsqu’elle dit que dans tout acte de reconnaissance il faut en effet sous entendre la réserve que l’Etat reconnu respectera les obligations qui résultent pour lui, soit du droit international, soit de règlements internationaux relatifs à son territoire ». Et Cahier de conclure, « c’est un fait que lorsqu’un Etat se crée sur le territoire d’un autre Etat, ou lorsqu’une partie du territoire d’un Etat passe à un autre Etat, l’Etat sucesseur prend le territoire comme il le trouve. Les obligations qui pèsent sur le territoire lui sont applicables »209.
150Quant à l’affaire des zones franches du Pays de Gex et de la Haute-Savoie ont peut la résumer comme suit : Par le traité de Turin de 1816, les zones franches avaient été établies entre le Royaume de Sardaigne et la Suisse. La France ayant succédé à la Sardaigne, elle a tout d’abord maintenu ces zônes franches un certain temps. Ensuite, elle décida unilatéralement de les supprimer ( 1923). La Suisse étant en désaccord avec cette nouvelle situation, le problème fut porté devant la Cour Permanente de Justice Internationale. Cette dernière trancha le litige en faveur de la Suisse, considérant que la France avait succédé à la Surdaigne quant aux obligations découlant du traité de Turin du fait du caractère strictement localisé de celles-ci210.
151L’affaire des lies d’Aland et celle des zones franches sont généralement reconnues comme constituant des précédents en faveur du principe selon lequel certains traités de caractère territorial sont ipso jure obligatoires pour un Etat successeur.
ii) La pratique des Etats
152Dans la pratique britannique, il y a exception au principe de la table rase lorsqu’il s’agit d’une succession aux traités territoriaux. Ainsi, quand la République finlandaise fut créée en 1917 par succession à la Russie, le Royaume-Uni a effectivement adopté la position suivante dans une note diplomatique adressée à la Finlande :
« J’ai été avisé que, lorsqu’une partie d’un Etat se constitue en nouvel Etat, ce dernier ne se trouve pas lié par les traités conclus par l’Etat dont il faisait antérieurement partie. Toutefois les obligations ayant trait à des questions telles que la navigation fluviale, qui ont le caractère de servitude sont normalement reprises par le nouvel Etat... »211.
153Dans un cas que nous avons déjà cité212, le Gouvernement français a pris une position analogue dans une note adressée au Gouvernement allemand de 1935. Il avait estimé qu’il existait une exception à la règle de la table rase lorsqu’il s’agissait de traités « d’application territoriale et locale qui sont fondés sur une situation géographique ».
154Pour la pratique des Etats nouvellement indépendants on peut citer le cas du fleuve Mékong213. En 1926, par traités franco-siamois, des droits de navigation sur le Mékong avaient été accordés à la Thaïlande214. A l’occasion des arrangements215 conclus en vue de l’accession à l’indépendance du Cambodge, du Laos et du Vietnam, ces pays ainsi que la France ont reconnu que les droits de navigation de la Thaïlande restaient en vigueur.
155En ce qui concerne les fleuves africains, on peut citer le Congo216 et le Niger217. Le régime de ces deux fleuves a tout d’abord été fixé à la Conférence de Berlin de 1885 et par l’Acte Général de Bruxelles du 2 juillet 1890218. Les principes de liberté de navigation et d’égalité de traitement, au profit de toutes les nations leur ont été appliqués. Par la suite, la Convention de St Germain-en-Laye du 10 septembre 1919219 est venue abroger les actes précités tout en maintenant les principes libéraux qu’ils contiennent depuis 1885.
156Après avoir acquis leur indépendance, les Etats successeurs220, riverains du fleuve Niger, ont pris l’initiative de réviser les actes antérieurs de 1885, 1890 et 1919. Ils ont ainsi conclu un nouveau traité, signé à Niamey le 26 octobre 1963 et un « Acte relatif à la navigation et à la coopération économique entre les Etats du Niger »221. Le nouveau régime du fleuve Niger s’est inspiré des principes du droit fluvial classique : c’est-à-dire qu’il a repris les principes de la liberté de la navigation et de l’égalité de traitement au profit de toutes les nations (article 3 de la Convention de 1963). Il est frappant de constater que le nouvel instrument s’inspire largement, jusque dans la rédaction (quelquefois plus synthétique) de l’Acte de Berlin. En réalité, si les Etats concernés ont voulu élaborer de nouveaux accords, c’est qu’ils refusent de se conformer à un acte antérieur issu « d’une conférence africaine sans Africains »222.
157En conclusion, on peut dire qu’on est ici en présence d’un cas de continuité des traités territoriaux après survenance d’une succession d’Etats, car même si l’Acte Général de Berlin et la Convention de St Germain-en-Laye ont été abrogés, les Chefs de délégation à la Conférence de Niamey ont repris les principes fondamentaux du régime international du fleuve Niger qu’ils contenaient.
158Actuellement, on n’a pas d’information concernant la succession d’Etats au fleuve Congo ; mais d’après Nguya-Ndila : « [Si] les Etats riverains du fleuve Congo n’ont pas encore pris une position officielle [...] il ne fait pas de doute que l’attitude des Etats du bassin du Niger leur servira d’exemple »223.
159Comme autre cas de fleuve international, on peut citer le Nil. Un accord sur les eaux du Nil de 1929 entre le RoyaumeUni et l’Egypte prévoit que :
« Sauf acceptation préalable du Gouvernement égyptien, il ne pourra être pris aucune disposition, ni construit aucun ouvrage concernant l’irrigation ou l’énergie hydraulique sur le Nil et ses affluents ni sur les lacs où il s’écoule, dans la mesure où ces cours d’eau ou lacs sont situés dans le Soudan ou dans les pays placés sous administration britannique, si ces dispositions ou travaux sont de nature à léser les intérêts de l’Egypte, soit en réduisant l’apport d’eau qui arrive en Egypte, soit en modifiant la date d’arrivée des eaux, soit encore en baissant le niveau d’eau »224
160Après leur accession à l’indépendance, le Soudan et la Tanzanie refusèrent d’être liés par ce traité de 1929. La Tanzanie a considéré que les obligations de ce traité étaient incompatibles avec son statut d’Etat souverain indépendant. Cependant, elle s’est déclarée disposée à entrer en pourparler avec l’Egypte et les autres gouvernements intéressés (c’est-à-dire le Kenya, l’Ouganda et le Soudan) en vue d’une réglementation et d’un partage équitable de l’utilisation des eaux du Nil. Il fut décidé qu’en attendant un nouvel accord, celui de 1929 sur les eaux du Nil restera valide et applicable225. D’ailleurs, il est à signaler qu’un accord est déjà intervenu entre l’Egypte et le Soudan le 8 novembre 1959 qui réglemente la répartition des eaux du Nil entre ces deux pays et le préambule de cet accord laisse entendre que le régime de 1929 est maintenu226.
161Dans la pratique internationale, on rencontre encore d’autre cas de succession à des traités territoriaux autres que ceux régissant des frontières. L’on peut citer, par exemple, le traité de Belbase de 1921 et 1951, concernant, d’une part la Tanzanie, et d’autre part, le Zaïre, le Rwanda et le Burundi, Après la première Guerre Mondiale, les mandats confiés au Royaume-Uni et à la Belgique, respectivement, eurent pour conséquence de couper les territoires administrés par la Belgique de leur débouché maritime naturel, Dar-El-Salam. C’est ainsi que fut passé l’accord de Belbase entre la Belgique et le Royaume-Uni, concédant à la première un bail à perpétuité portant sur des terrains situés à Dar-El-Salam et Kigoma. Ce traité prévoyait des franchises douanières et des facilités de transit vers les territoires sous domination belge.
162Après son indépendance, la Tanzanie n’a pas reconnu la « cession à bail » en faveur du Zaïre, du Burundi et du Rwanda. Elle a estimé que cette cession pour une durée illimitée était incompatible avec la souveraineté nationale et que le Royaume-Uni n’avait pas le pouvoir de lier ce territoire pour une durée illimitée alors que sa compétence de puissance administrante même avait un caractère limité (mandat, tutelle). Lorsque la Tanzanie (à l’époque le Tanganyka) notifia en 1962 sa demande d’évacuation des lieux, les trois pays d’Afrique centrale ripostèrent, en soutenant qu’ils avaient succédé aux droits consentis à la Belgique en vertu des accords de Belbase. La question est restée en suspens parce que la Tanzanie a finalement proposé de renégocier le dit accord (ce qui n’est toujours pas fait) tout en leur permettant d’utiliser de facto ces ports. Cette attitude a fait dire aux rapporteurs spéciaux et à la CDI227 que la « Tanzanie n’a pas fondé sa revendication tendant à être libérée des accords de Belbase en application du principe de la table rase mais qu’elle a simplement contesté au Royaume-Uni, en sa qualité d’autorité administrante d’un territoire sous tutelle, le pouvoir d’accorder un bail à perpétuité. C’est effectivement ce qui ressort de certaines observations du Gouvernement tanzanien dans lesquels il dit que si l’on considère un traité comme nul, « cela ne signifie pas que les services visés dans les traités [de Belbase] sont interrompus ; ces services peuvent être maintenus bien qu’un traité prenne fin »228.
163L’examen de plusieurs cas de pratique a montré que, s’il n’y a pas eu continuité dans la forme — souvent les accords ont été contestés —, il y a eu pourtant continuité dans le fond — les grands principes contenus dans les accords territoriaux ayant été volontairement maintenus. Il reste alors à voir comment cette question a été abordée par la CDI et par la Conférence de Vienne.
b) La CDI, la Conférence et l’article 12 concernant les autres régimes territoriaux
164Au sein de la CDI, les membres originaires du tiers-monde229 ont été d’accord pour considérer que certains traités de caractère territorial, en l’occurence les « arrangements de caractère pratique relatifs à des situations géographiques »230, constituent une exception à la règle de la table rase. C’est l’article 12 du projet définitif de 1974231 qui couvre cette situation.
165Pour Yasseen, par exemple, « la continuité des traités localisés répond à un besoin fondé sur les grands principes du droit international, comme la liberté de navigation sur un fleuve, soit sur des considérations humaines : le libre accès à des territoires frontaliers à des fins de pâturage par exemple... » et que pour ces raisons il est nécessaire « d’ennoncer une règle générale visant à sauvegarder des situations laborieusement créées... »232
166Quant à Elias, dans une intervention faite en 1974, il a reconnu que les articles 11 et 12 « ... rappellent la règle coutumière selon laquelle les traités territoriaux constituent une exception à la table rase »233.
167Cependant, lorsqu’on examine les observations de certains gouvernements du tiers-monde234 au sujet du projet de l’article 12 concernant ces traités territoriaux, on constate qu’ils ne partagent pas le même avis que les membres de la CDI originaires du tiers-monde. Aux yeux de ces gouvernements la situation prévue à l’article 12 concernant la continuité des traités territoriaux pourrait comprendre les traités établissant des bases militaires étrangères et pourrait porter atteinte à la souveraineté du nouvel Etat sur ses ressources et richesses naturelles.
168Voyons maintenant si cette divergence d’opinion s’est également manifestée losque la Conférence à abordé officiellement le problème et, si tel est le cas comment la Conférence est arrivée finalement à un consensus ?
169Au sein de la Conférence, les positions des délégués gouvernementaux furent encore plus nettes qu’au cours des travaux préparatoires. On constate d’une part que les délégations des gouvernements occidentaux se sont prononcées pour la continuité « des autres régimes territoriaux »235, et d’autre part, que les délégations des gouvernements du tiers-monde se sont scindé en deux courants d’opinion. Les uns rejoignaient la position occidentale, estimant pour leur part que l’article 12 est orienté sur l’économie des eaux, la navigation, le transit et que par là même il est fait pour promouvoir l’économie internationale et qu’en le supprimant on risquait de « compromettre la situation économique des Etats intéressés, voire même d’étrangler littéralement certains Etats »236.
170Par contre le deuxième groupe des pays du tiers-monde237, tout en soutenant les amendements du Mexique238 de l’Argentine239 et de Cuba240, ont aussi déclaré qu’ils s’opposaient à la solution de continuité des traités territoriaux dans la mesure où ces derniers privent les successeurs du droit d’excercer pleinement leur souveraineté. Pour eux, cette restriction de la souveraineté, répétonsle, vise surtout l’établissement de bases militaires étrangères et l’exploitation des richesses et ressources naturelles situées sur leur territoire.
171Ces craintes ne furent dissipées que par l’introduction d’un paragraphe 3 supplémentaire à l’article 12241 visant à exclure de cet article les bases militaires et par l’adjonction d’un article 13 supplémentaire242 traitant des richesses et ressources naturelles. Lorsque ces dispositions furent ajoutées, les amendements précités tombèrent d’eux-mêmes et l’article 12 fut facilement accepté ; d’ailleurs la Conférence l’a adopté sans vote à la deuxième session (1978). Ceci prouve que les délégations du tiers-monde qui se sont opposées à l’article 12 étaient en fait d’accord avec le principe de continuité qu’il contient et se méfiaient seulement de la possible interprétation de cet article qui risquait de porter atteinte à leur souveraineté et à leur économie nationale.
172Signalons que le groupe des Etats socialistes n’a pas émis d’opinion spéciale à propos de cet article et, comme on peut le voir d’après les résultats, il ne s’est nullement opposé à son adoption.
Conclusion de la section 2 (traités territoriaux)
173De l’étude des articles 11 et 12 de la Convention de Vienne de 1978 il ressort que les traités de frontières et les autres régimes territoriaux constituent une catégorie particulière. En effet, de ces traités pourraient dépendre la paix et la stabilité internationale ainsi qu’une coopération fructueuse entre les Etats, facteurs indispensables pour un développement harmonieux des Etats dans le cadre de la communauté internationale.
174Vu l’importance de cette catégorie de traités les éminents juristes de la CDI et les délégués gouvernementaux à la Conférence ont admis qu’il était vital de prévoir, ici, une exception au principe de la table rase prévu à l’article 16 de la Convention. Leur décision découle d’un examen approfondi de la doctrine et de la pratique internationale. D’ailleurs d’après les résultats de cet examen plusieurs membres de la CDI243 et plusieurs délégués à la Conférence de 1977/1978244 n’ont pas hésité à déclarer que les article 11 et 12 concernant les traités territoriaux « reflètent le droit international coutumier »245. Dans certaines observations de gouvernements figurant dans les compilations préparées à l’intention de la Conférence, des déclarations similaires ont été avancées. On peut citer à ce propos les observations du Gouvernement grec qui considère qu’à l’égard des traités territoriaux « ...la CDI, a, ajuste titre, donné la préférence à la continuité des relations conventionnelles ce qui est en conformité avec les règles coutumières et la pratique habituelle »246.
Notes de bas de page
1 cf. Bardonnet. D., La succession d’Etats à Madagascar (succession au droit conventionnel et aux droits patrimoniaux, éd. R. Pichon et R. Durand-Auzias, Paris, 1970, p. 429. Voir aussi la définition de Waldock, in ACDI, 1972, vol. I, p. 55, § 49.
2 cf. Nations Unies, Recueil des traités, vol. 279, p. 289. Voir aussi le traité anglo-birman (ibid, 1950 vol. 70, p. 187) ; l’échange de lettres anglo-ghanéen (ibid, 1958, vol. 287, p. 235 et celui entre la Grande-Bretagne et Trinité-Tobago (ibid, 1963, vol. 457, pp. 125-126.
3 cf. projet d’accord sur les mesures transitoires inclus dans l’accord de la Conférence de la Table Ronde entre le Gouvernement des Pays-Bas et le Gouvernement de la République d’Indonésie (voir ibid, 1950, vol. 69, p. 267.)
4 cf. ACDI, 1962, vol. ii, p. 148, § 11.
5 Le traité d’amitié et d’association entre le Royaume du Laos et la République française, fait à Paris le 22 octobre 1953, dispose dans son article 1 que : « La République française reconnaît et déclare que le Royaume du Laos est un Etat pleinement indépendant et souverain. En conséquence, il est substitué à la République française dans tous les droits et obligations résultant de tous traités internationaux, ou conventions particulières, contractés par celle-ci au nom du Royaume du Laos ou de l’Indochine française, antérieurement à la présente Convention ». Voir Documentation concernant la succession d’Etats (doc. ST/LEG/SER.B/14), p. 72.
6 cf. Nguyen Hulj Tru. Quelques problèmes de succession d’Etats concernant le Vietnam, E. Bruylant, Bruxelles, 1970, p. 156 et s.
7 cf. la convention diplomatique franco-marocaine de 1956 AFDI, 1956, vol. ii, pp. 133-149.
8 cf. mémorandum du SG, ACDI, 1962, vol. ii, p. 142.
9 cf. la description détaillée de cette procédure supra p. 100 et suivantes.
10 cf. la pratique du Conseil Fédéral suisse, (ACDI, 1968, vol. ii, pp 15-24, § 35-85 et pp. 39-52, § 158-224) ; la pratique des Etats Unis (Documentation concernant la succession d’Etats doc ST/LEG/SER. B/14, pp. 224-228 et ACDI, 1969, vol. ii, p. 60, § 20.
11 cf. Documents officiels de l’Assemblée Générale, 27e session, 6e commission, New York, 1972 p. 80, § 7 et l’observation orale du Gouvernement kenyan (dans Conférence des Nations Unies, compilations analytiques... (doc. A/CONF.80/5), p. 132.
12 cf. Conférence des Nations Unies..., compilations analytiques, (doc, A/CONF.80/5), p. 130.
13 cf. l’observation du Gouvernement indonésien (ibid, p. 130) ; du Gouvernement jamaïcain (ibid, p. 131) et du Gouvernement nigérian (ibid, p. 133). Pour l’opinion du Gouvernement de la Côte d’Ivoire, cf. Whiteman, M., Digest of international law, Government printing office, Washington, 1963, vol. ii, p. 183. Quant à l’opinion du Gouvernement ghanéen, voir Documentation concernant la succession d’Etats, doc. ST/LEG/SER.B/14), pp. 211-213.
14 Voir, par exemple, l’indication donnée par la Grande-Bretagne à la Birmanie au sujet de la Convention de Varsovie de 1929 sur le transport aérien in Documentation concernant la succession d’Etats, (doc. ST/LEG/SER.B/14), pp. 180-181 et celle donnée au Laos au sujet de la Convention anglo-française de 1922 concernant la procédure en matière civile et commerciale (ibid, pp. 188-189). Pour ces deux cas voir aussi ACDI, 1969, vol. ii, p. 60, § 21-22.
15 cf. ACDI, 1969, vol. ii, p. 61, § 23.
16 cf. Conférence..., Comptes-rendus analytiques..., (doc. A.CONF. 80/16), vol. i, p. 85, § 13.
17 cf. supra, p. 98, note 3.
18 c. Sette Camâra, ACDI, 1974, vol. i, p. 84, § 11.
19 cf. Bartos, ACDI, 1963, vol. ii, p. 308.
20 cf. les articles 42 à 52 de la « Convention de Vienne sur les traités de 1969 » contenus dans la partie V, intitulée : nullité, extinction et suspension de l’application des traités. Pour Yasseen, ces dispositions ne seront pas toujours suffisantes car elles couvrent les cas de contrainte et de recours à la force, alors que les traités de dévolution peuvent être entachés d’une contrainte d’ordre politique ou économique » (ACDI, 1972, vol. I, p. 58, § 10). cf. également Colin, J., « Le rôle des Etats nouveaux dans la transformation du droit international », Annales africaines, faculté de droit de Dakar, 1973, p. 14.
21 Dans l’affaire du temple de Preah Vihear, au cours de la procédure sur les exceptions préliminaires de la Thailande, celle-ci a soutenu officiellement devant la CIJ, qu’à l’égard des « Etats tiers », les accords de dévolution sont res inter alios acta et ne les lient en aucune façon (cf. CIJ, Mémoires, plaidoieries et documents, (Affaire du temple de Preah Vihear, Cambodge c. Thaïlande), 1962, vol. ii, p. 33).
22 cf. Cahier, Ph., « Le problème des effets des traités à l’égard des Etats tiers », RCADI, 1974, vol. 143, tome III, p. 656.
23 cf. par exemple Bedjaoui (Algérie), (ACDI, 1972, vol. i, p. 57, § 6 et Tabibi (Afghanistan) (ibid, p. 61, § 47) ; voir aussi Sette Câmara (Brésil), (ACDI, 1974, vol. i, p. 84, § 10 ; Yasseen (Irak), (ibid, p. 84, § 15) ; Tabibi (Afghanistan), (ibid, p. 85, § 20) ; Elias (Nigéria), (ibid, p. 85, § 24) et Martinez Moreno (El Salvador), (ibid, p. 87, § 51). Signalons que les membres de la CDI originaires des pays occidentaux ou socialistes étaient aussi d’accord avec leurs collègues du tiers-monde, cf. par exemple Ustor (Hongrie), (ACDI, 1972, vol. i, p. 57, § 6) ; Ago (Italie), (ibid, p. 60, § 39) ; Tammes (Pays-Bas), (ACDI, 1974, vol. I p. 85, § 28) et Tsuruoka (Japon), (ibid, p. 87, §49).
24 cf. ACDI, 1972, vol. i, p. 61, § 47.
25 cf. Documents officiels de l’A.G., annexes, Rapport de la 6e commission, 27e session, New York, 1972, (doc. A/8892), p. 13, § 74. Pour les interventions des délégations de Cuba cf. ibid, 1322e séance, p. 61, § 5 ; du Nigériea, 1324e séance, p. 79, § 2 ; du Kenya, 1324e séance, p. 80, § 7 ; de la Zambie, 1326e séance, p. 94, § 7 et de Chypre, 1327e séance, p. 107, § 50.
26 L’objet de l’amendement du Royaume-Uni (A/CONF.80/C.l/L.II) était le suivant : à la fin du paragraphe 2 du projet, ajouter « ... sans préjudice toutefois des règles pertinentes de droit international qui régissent les droits et obligations découlant, pour un Etat tiers, d’un traité », cf. Conférence..., documents officiels..., (doc. A/CONF.80/16/Add. 2), vol. iii, p. 117, § 39.
27 L’objet de l’amendement de la Malaisie (A/CONF.80/C.1/L.15) était le suivant : ajouter les mets suivants à la fin du paragraphe 1 : « ... à moins que les autres parties à un traité donné ne consentent à accepter les obligations et les droits de l’Etat prédécesseur comme étant les obligations ou les droits de l’Etat successeur », cf. Conférence..., documents officiels..., (doc. A/CONF.80/16/Add. 2), p. 118, § 39.
28 cf. Conférence..., comptes rendus analytiques..., (doc. A/CONF.80/16), vol. i, p. 85, § 20-21.
29 ACDI, 1974, vol. ii, lère partie, p. 192, § 22.
30 cf. Conférence..., comptes rendus analytiques..., (doc. A/CONF.80/16), vol. I, pp. 85-86, § 22.
31 Voir leurs interventions : Conférence..., comptes rendus analytiques... (doc. A/CONF.80/16), vol. 1 pp. 84-89.
32 cf. ibid, p. 93, § 28.
33 cf. ibid, p. 208, § 8 et 9.
34 cf. l’intervention de M. Maresca : ibid, p. 85, § 17.
35 cf. Bardonnet, D., op. cit., p. 434 et Mochi Onory, A.G., La succession d’Etats aux traités et notes sur ta succession entre organisations internationales, A. Giùffre, Milan, 1968, p. 75 et s.
36 Pour une description détaillée des déclarations les plus récentes cf. ACDI, 1974, vol. ii, 1ère partie, pp. 193-197, § 3 et s.
37 cf. M. Bartos, ACDI, 1963, vol. ii, p. 307,
38 cf. Bardonnet, D., op. cit., p. 435.
39 Pour des détails sur les correspondances diplomatiques de ces pays africains, voir l’étude de Mutiti, M.A.B., State succession to treaties in respect of newly independant african States, East African Literature Bureau, Kampala, 1976, pp. 5-32.
40 On vise par là les traités territoriaux ou de frontières.
41 La déclaration typique qui a inauguré cette voie se trouve dans Documentation concernant la succession d’Etats, (doc. ST/LEG/SER.B/14), pp. 177-178.
42 cf. ACDI, 1962, vol. ii, p. 134, § 67.
43 cf. Bardonnet, D., op. cit. p. 438.
44 cf. Daudet, Y., « Travaux de la Commission de Droit International des Nations Unies. La succession d’Etats en matière de traités », AFDI, 1974, p. 558. Voir aussi ACDI, 1974, vol. ii, 1ère partie, p. 197, § 14.
45 Les termes de l’article 25 de la Convention de Vienne de 1969 sont les suivants : « Article 25 : Application à titre provisoire :
1. Un traité ou une partie d’un traité s’applique à titre provisoire en attendant son entrée en vigueur : a) si le traité lui-même en dispose ainsi ; ou b) si les Etats ayant participé à la négociation en étaient ainsi convenu d’une autre manière.
2. A moins que le traité n’en dispose autrement ou que les Etats ayant participé à la négociation n’en soient convenus autrement, l’application à titre provisoire d’un traité ou d’une partie d’un traité à l’égard d’un Etat prend fin si cet Etat notifie aux autres Etats entre lesquels le traité est appliqué provisoirement son intention de ne pas devenir partie au traité ».
46 La CDI a considéré que les déclarations unilatérales sont des « actes unilatéraux », cf.. ACDI, 1974, vol. ii, lère partie, p. 198, § 16,
47 cf. ACDI, 1974, vol. ii, 1ère partie, p. 198, § 16.
48 ibid, p. 198, § 16 et Waldock, 2e rapport ACDI, 1969, vol. ii, pp. 63-69.
49 Cet amendement tendait à introduire un nouvel article 9 bis qui se lirait comme suit : « Article 9 bis, Conséquence d’une succession d’Etats à l’égard de l’Etat prédécesseur : Un traité qui est en vigueur à la date d’une succession d’Etats à l’égard du territoire auquel se rapporte cette succession ne donne pas lieu, après cette date, à des droits ou des obligations pour l’Etat prédécesseur en ce qui concerne les événements ou situations se produisant ultérieurement à moins que ce traité n’en dispose autrement ». La Commission plénière a repoussé cet amendement à sa 17e séance par 32 voix contre 13 et 32 abstentions (Conférence..., documents officiels, (A/CONF.80/16/add.2), vol. iii, p. 119, § 52-54.
50 Cependant, souvent de telles déclarations ont tout de même été envoyées au SG mais « pour des raisons d’ordre plus général, parcequ’il est l’organe international auquel l’ONU a expressément confié des fonctions concernant la publication des actes relatifs aux traités — ou même simplement parce qu’il représente la voie diplomatique qui convient pour faire parvenir notification de ces actes à tous les Etats membres de l’ONU ou membres des institutions spécialisées » (ACDI, 1974, vol. ii, 1ère partie, p. 197, § 13).
51 cf. Bastid, S., Cours de droit international public, édition Les cours de droit, Paris, 1963, p. 174. En effet, à l’époque moderne, la frontière internationale est généralement conçue comme une ligne continue, fixe, séparant deux territoires étatiques adjacents, cf. Reuter, P. Droit international public, P.U.F., Paris, 1976, p. 167 ; Rousseau. Ch., Droit international public, tome III, p. 232. Dans son cours à l’Académie de droit international Rousseau (« Principes de droit international », RCADI, tome 93, vol. 1, 1958, p. 427) a observé que : « certains juristes ont parfois différencié au point de vue terminologique la limite, notion linéaire, de la frontière notion spatiale correspondant à la zone qui s’étend de chaque côté de cette ligne. Il est préférable de s’en tenir à l’interprétation traditionnelle qui identifie les deux concepts et qui voit dans la frontière la ligne délimitant l’espace réservé à la compétence étatique, c’est-à-dire essentiellement une limite séparative ».
52 Par exemple Delaisi (Les contradictions du monde moderne, Payot, Paris, 1932, p. 205) n’a pas hésité à écrire que « le poteau-frontière est le meilleur levier avec lequel on peut faire jouer le mythe national ». Voir aussi La Pradelle, P. de., La frontière, les éd. internationales, Paris, 1928, p. 12 ; Ancel, J., Géographie des frontières, Gallimard, 8E éd., Paris, 1938, p. vil La résonance affective des frontières ne peut être mieux rendue que par l’inscription du monument aux morts de Cavour (Piémont) : « Pour revendiquer les limites sacrées que la nature a placées comme frontière de la patrie, ils ont affrontés, impavides, une mort glorieuse. Par décision unanime de la municipalité et de la population, que leurs noms soient immortalisés », inscription citée par Guichonnet P. et Raffestin C. (Géographie des frontières, P.U.F., Paris 1974, p. 5, note 1). Voir encore Prescott, J.R.V. Boundaries and frontiers, Groom Helm Ltd., London, 1978, pp. 13 et s. (chapitre intitulé « Concepts and terminologie »).
53 cf. La Pradelle, P. de, op. cit., pp. 11-12.
54 cf. Yakemtchouk, R. « Les frontières africaines », RGDIP, 1970, p. 28 (ci-après : Yakemtchouk, « Les frontières africaines »), et du même auteur L ‘Afrique en droit international, L.G.D.J. Paris, 1971, p. 63 (ci-après : Yakemtchouk, R., L ‘Afrique en droit international).
55 cf. Udina, M., « La succession des Etats quant aux obligations internationales autres que les dettes publiques », RCADI, 1933, vol. ii, pp. 748-750 et Castren, E.J.S., « Aspects récents de la succession d’Etats », RCADI, 1951, vol. 1, tome 78, p. 437.
56 cf. O’Connel, D.P., State succession in municipal law and international law, Cambridge University Press, Cambridge, 1967, vol. ii, p. 273.
57 cf. Guggenheim, P., Traité de droit international public, vol. i, Georg, Genève, 1953, p. 465.
58 cf. Pereira. G.A., La succession d’Etats en matière de traités, publication de la RGDIP, no, 13, Ed. Pedone, Paris, 1969, p. 111 voir aussi M. Bedjaoui, ACDI, 1968, vol. ii, p. 115.
59 cf. Marcoff, M. G., Accession à l’indépendance et succession d’Etats aux traités, Ed. Universitaires, Fribourg (Suisse), 1979, p. 205-206 et 213-217, voir aussi Mochi Onory, A., La succession d’Etats aux traités et note sur la succession entre organisations internationales, éd. A. Giuffre, Milano, 1968, pp. 128-131.
60 Parceque les frontières que les Etats nouvellement indépendants ont hérité du passé ne correspondent pas généralement aux divisions éthniques, linguistiques, culturelles et historiques. Signalons que c’est un argument auquel Tabibi tenait spécialement, cf. infra, p. 124, 127 et 130.
61 cf. Rousseau. Ch., « Chronique des faits internationaux récents », RGDIP, 1960, no. 3, p. 616.
62 cf. ILA, Report of the 53th Conference held in Buenos Aires, August 25th to 31st 1968, pp. 603-604 ou ACDI, 1968, vol. ii, p. 115.
63 cf. outre Udina, Castrén, Guggenheim, Pereira et Bedjaoui déjà cités, Ross, A. A text book of international law, Longmans, Green and Co, London, 1947, p. 127. Me NAIR The law of treaties, Clarendon press, Oxford, 1961, p. 656 ; Nguya-Ndila, C. Indépendance de la République démocratique du Congo et les engagements antérieurs, Université de Kinshasa 1971, pp. 145-146 ; Boutros-Ghali, Les conflits de frontières en Afrique, éd. techniques et économiques, Paris, 1972, p. 11 et s. ; Bernstein, I., Délimitation of international boundaries (thèse IUHEI), Impr. des presses de l’université, Tel Aviv, 1972, p. 171 et Boughetaia. B., Les frontières méridionales de l’Algérie, Thèse Paris I, 1979, p. 249.
64 cf. Lauterpacht, H. Private law sources and analogies of international law.
65 cf. O’Connel, D.P., The law of state succession, Cambridge University press, Cambridge, 1956, p. 49 (ci-après: O’Connel, D.P., The law of state succession).
66 cf. Mc Nair, A.D., op. cit., p. 256.
67 cf. Shearer, I., « La succession d’Etats et les traités non-localisés », RGDIP, 1964, no. 1, p. 7.
68 cf. Guggenheim, P., op. cit., p. 465 voir aussi Lester, A.P., « State succession and localized treaties », Harvard international law club journal, 1963, pp. 145-175.
69 cf. Goncalves Pereira, A., op. cit., p. 109.
70 cf. Basdevant. J., Dictionnaire de la terminologie du droit international, Sirey, Paris, 1960, pp. 561-562.
71 cf. Reid H.D., International servitudes in law and practice, The University of Chicago press, Chicago, 1932, p. 25 et Oppenheim, L. International law, vol. i, Longmans, London, 1905, sec. 203, p. 257.
72 cf. Oppenheim, L., ibid, p. 257.
73 Pour les défenseurs de la théorie des servitudes voir Crusen, G., « les servitudes internationales », RCADI, 1928, II, p. 22.
74 cf. Vali, F.A., Servitudes of international law, Stevens, New-York, 2e éd., 1958, p. 42, traduit par Gonçalves Pereira, A., op. cit., p. 115.
75 cf. O’Connel, D.P., The law of state succession, pp. 49-50.
76 cf. CPIJ, Série C, No. 17-1 vol. iii, p. 1654 et O’connel, D.P., op. cit., p. 49.
77 cf. Mc Nair, A., The law of treaties, op. cit., p. 256.
78 cf. Shearer, I.A., « La succession d’Etats et les traités non-localisés », RGDIP, no. 1, 1964, p. 7.
79 cf. Gonçalvez Pereira, A., op. cit., p. 109.
80 cf. Guggenheim, P. op. cit., p. 465 (Souligné par nous).
81 cf. Rousseau, Ch. op. cit., p. 491.
82 cf. Cij. Recueil des arrêts, avis consultatifs et ordonnances, 1962, pp. 6-146.
83 Voir principalement COT, J.P., « Jurisprudence et juridiction internationale (Affaire du temple de Preah Vihear) », AFDI, 1962, vol. viii, pp. 217-247 etBASTiD, S., « Les conflits territoriaux à travers la jurisprudence de la CU », vol. III, tome 107, 1962, pp. 469-488.
84 cf. Nguyen-Huu—Tru. op. cit., p. 197.
85 cf. CIJ, Recueil des arrêts, avis consultatifs et ordonnances, 1962, p. 34.
86 cf. infra, pp. 118-119, et p. 130, note 192.
87 cf. Bedjaoui, M., ACDI, 1974, vol. i, p. 219, § 34.
88 cf. COT, J.P., op. cit., p. 224.
89 ibid, p. 224.
90 cf. supra, p. 40, surtout note 11.
91 cf. Shearer, [.op. cit., pp. 33-34 et Marcoff, M.G. op. cit., p. 99.
92 cf. Moore, J.B., A digest of international law, Government printing office, Washington, 1906, vol. 1, p. 303. Voir aussi Hyde, C. C, International law chiefly as interpreted and applied by the United States, Little Brown Company, Boston, second revised ed 1947, vol. i, p. 508; Bernstein, I., op. cit., p. 171 et Boughetaia, B., op. cit., pp. 137-138.
93 L’opinion du 26 décembre 1867 est reproduite par O’Connel, D.P., in The law of state succession, pp. 324-325 voir aussi Gonçalvez Pereira. A., op. cit., p. 112, et Bernstein, 1, op. cit., p. 171 et 179.
94 cf. SDN, Treaty series, vol. cxxxvii, 1933, p. 297 et s.
95 Pour des détails de la délimitation voir Documentation concernant la succession d’Etats, série législative des Nations Unies, New York, 1967, (doc. ST/LEG/SER.B/14), p. 190 (ci-après : Documentation concernant la succession d’Etats, doc. ST/LEG/SER.B/14).
96 cf. Documentation concernant la succession d’Etats, doc. ST/LEG/SER.B/14, p. 190, voir aussi ACDI, 1972, vol. ii, p. 58, § 24.
97 cf. Basdevant, J. Traités et conventions en vigueur entre la France et les puissances étrangères, Imprimerie Nationale, Paris, 1918, vol. i, p. 274; O’Connel, D.P., State succession in municipal law and international law, Cambridge University Press, Cambridge, 1967, vol. ii, p. 274 ; du même auteur, The law of state succession, p. 57 ; Mc NAIR, A., op. cit., p. 603 ; Bernstein, I, op. cit., p. 172 et Tran Van Minh, « Remarque sur le principe de l’intangibilité des frontières », in Peuples et Etats du tiers-monde face à l’ordre international, P.U.F., Paris, 1978, pp. 51-108.
98 Kiss, A., Ch., « La fusion entre Etats et la pratique française du droit international », AFDI, 1958, vol. IV, p. 687, souligné par nous.
99 cf. Répertoire suisse de droit international public. Documentation concernant la pratique de la Confédération en matière de droit international public, (1914-1939), tome III, Helbing et Lichtenhahn éd., Bâles, 1975, pp. 1358-1392, voir surtout pp. 1373, 1375, 1380, 1381, 1384 et 1390 où l’on apprend que l’Autriche s’est ralliée au point de vue suisse.
100 cf. les livres écrits à ce sujet : Valdes, J., L’uti possidetis et l’occupation territoriale, éd. le livre libre, Paris, 1932, p. 47 et Pinho Campinos, J. de, « l’actualité de l’uti possidetis », in Colloque de Poitiers : la frontière, A. Pedone, Paris, 1980, pp. 95-111. Duran-Bachler, S., The latin american doctrine of uti possidetis, Diplôme No 132, IUHEI, Genève, 1972, 177 p.
101 cf. Girard, P.F., Manuel de droit romain, 8e éd. Paris, 1929, pp. 229 et s. et p. 118.
102 cf. Pinho Campinos, J. de, op. cit., p. 95.
103 cf. Calvo, C, Dictionnaire du droit international publie et privé, Putkammer & Mühlbrecht, Berlin, 1885, vol. ii, p. 291.
104 cf. La Pradelle, P. de, op. cit., P. 76.
105 D’après Guani, A., (« La solidarité internationale dans l’Amérique latine », RCADI, tome VIII, 1925, vol. iii, p. 298) : « L’année 1810 fut choisie parce que ce fut au cours de cette année-là que la lutte contre la péninsule prit forme dans toute l'Amérique, cessant d’apparaître comme une révolte isolée ou une insurrection sporadique, pour se convertir en soulèvement général, en guerre, créant une source de droits et obligations qui, plus tard, ont leur développement juridique international ».
106 cf. Diaz-Van-Dunem j. Les frontières africaines, thèse de la Faculté de droit de l’Université Aix-Marseille, 1967, p. 262.
107 cf. Uribe, A. J., Anales consulares y diplomaticos de Colombia tome 1, 1900, p. 80, cité par La Pradelle, P. de, op. cit., p. 77, note 2.
108 cf. Tran-Van-Minh, op. cit., p. 61 ; voir aussi p. 56, notes 23 à 25 ; cf. également La Pradelle, P. de, op. cit., pp. 77-78 et 82.
109 cf. Alvarez, A., Droit international américain, A Pedone, Paris, 1910, pp. 52-53.
110 cf. Tran-Van-Minh, op. cit., p. 61.
111 Cela signifie que la succession aux frontières est fondée sur des titres légitimes. En d’autres termes, les délimitations du nouvel Etat résultent de titres juridiques, tels qu’ordonnances, ordres royaux, décrets, etc., qu’il hérite de l’Etat prédécesseur. L’utipossidetis juris était d’ailleurs justifié par la sentence arbitrale rendue par le Conseil fédéral suisse au sujet de la délimitation du Venezuela et de la Colombie (cf. Recueil des Sentances Arbitrales, vol. 1, sentence arbitrale du 21 mars 1922 p. 228 et surtout 278). Voir aussi Tran-Van-Minh, op. cit., p. 69.
112 Ce qui signifie qu’en l’absence de documents juridiques précis, c’est le cas de certaines limites anciennes espagnoles « tracées sur des cartes rudimentaires » (cf. La Pradelle, P. de, op. cit., p. 79, note 1) la succession aux frontières devait être déterminée par la possession effective (de fait) du territoire, ce qui est d’ailleurs conforme au droit international, (cf. Visscher, Ch. de, Les effectivités du droit international public, éd. A. Pedone, Paris, 1967, p. 11). Dans l’affaire de Grisbadarna la Cour Permanente d’Arbitrage a reconnu que : « Dans le droit des gens, c’est un principe bien établi qu’il faut s’abstenir autant que possible de modifier l’état des choses existant en fait et depuis longtemps » (Recueil des Arrêts, 1916, pp. 121-133). Plus tard dans l’affaire des Minquiers et Echréous la Cour Internationale de Justice a fait triompher l’effectivité sur les titres juridiques, en donnant raison au Royaume Uni, malgré l’existence des titres juridiques invoqués par la France (cf. CIJ, Recueil des arrêts, avis consultatifs et ordonnance, 1953, arrêt du 17 novembre 1953, p. 47). cf. aussi Accioly, H., « Le Brésil et la théorie de l’uti possidetis », Revue de Droit International, tome XV, No 1, 1935, pp. 36-45.
113 cf. Sarin Chhak, Le tracé de la frontière cambodgienne avec le Laos et le Sud Vietnam, Thèse, Paris, 1964, p. 12. Pour une opinion contraire, voir Boughetaia, B. op. cit., qui a observé que « l’obligation de respecter les frontières internationales préexistantes en cas de succession d’Etats découle d’une règle générale de droit international que l’on exprime ou non par la formule de l’« uti possidetis » ; voir aussi pp. 247-249.
114 L’arbitrage par référence obligatoire à l’« uti possidetis » de 1810 était confié au Président argentin Alcotra, voir Lapradelle, P. de, op. cit., pp. 85-86.
115 cf. Lapradelle P. de, op. cit., p. 87.
116 cf. Yakemtchouk, R. (L’Afrique en droit international, L.G.D.J., Paris, 1971, pp. 67-68 ; ci-après : Yakemtchouk. R. L’Afrique en droit international), cet auteur a observé qu’en Afrique précoloniale, essentiellement moléculaire, clanique et tribale, vivant à l’état de nature, les limites territoriales séparant les clans et les tribus étaient des frontières zones mouvantes : elles délimitaient les parcours de chasse, de pêche. Voir aussi Diaz-Van-Dunem, J. op. cit., p. 144 où il dit que la frontière pour les peuples nomades était synonyme de « marches » ou parcours que les tributs suivaient selon les saisons de l’année. La ligne rigide qu’est la limite ne pouvait que les embarasser car, par essence, les nomades sont des peuples en mouvement. Ces mouvements vers les terrains de pâturage ou les points d’eau, ne se faisaient pas au hasard. Leur conception de la souveraineté était non pas attachée au sol mais aux personnes, c’était une souveraineté d’ordre personnelle qui les suivait partout où ils se trouvaient. Cette pratique d’allégeance définie comme étant que obligation de fidélité et d’obéissance à une autorité était courante en Afrique. Voir encore, Jos. L.C.D., « Frontières trop souvent établies au gré du colonialisme », in : Le Monde diplomatique, février 1965, p. 9 et 11.
117 cf. Yakemtchouk, R., L ‘Afrique en droit international, p. 67.
118 cf. ibid, p. 67 et Jos, L.C.D., op. cit., p. 9 et 11.
119 cf. Yakemtchouk, R. L’Afrique en droit international p. 69. On vise par là la frontière-limite car le droit positif méconnaît la frontière-zône ; voir Reuter, P., op. cit., p. 169 et Rousseau, Ch., « Principe du droit international », RCADI, tome 93, vol. I, 1958, p. 428.
120 cf. Hadley, Lord, cité par R.S., « L’échiquier africain », Revue de défense nationale, juin 1962, p. 34 ; Yakemtchouk, R., L ‘Afrique en droit international, p. 69.
121 La délimitation des sphères d’influence est fondée sur l’Acte de Berlin de 1885 (cf. de Martens, CF., Nouveau Recueil Général des Traités, tome X, 2E série, Dietrich Gottingen, pp. 200-427) ; voir également Diaz-Van-Dunem, J. op. cit., p. 19 et s. et Mahiou, A., L’avénement du parti unique en Afrique (expérience des Etats d’expression française), L.G.D.J., Paris, 1969, p. 161.
122 M. Salisbury, par exemple, a décrit la situation de la manière suivante : « Nous avons entrepris de tracer des lignes sur des cartes de régions où l’homme blanc n’avait jamais mis les pieds. Nous nous sommes distribués des montagnes, des rivières et des lacs, à peine gênés par cette petite difficulté que nous ne savions jamais où se trouvaient ces montagnes, ces rivières ou ces lacs » (cf. Revue française d’études politiques africaines, janvier 1975, pp. 7 et s.).
123 L’africaniste A. Gromyko a estimé que « 44 % des frontières africaines suivent des méri-diens ou des parallèles, 30 % sont basées sur des procédés géométriques et seulement 26 % sont des frontières naturelles constituées par des points d’eau, des lacs » (« Colonialism and territorial conflicts in Africa, some coments on african boundary problems », cité par Boutros-Ghali, op. cit., p. 10 ; cf. Yakemtchouk, R. L’Afrique en droit international, p. 70. Concrètement, on peut voir un exemple de limite astronomique entre l’Egypte et le Soudan qui suit le 22e parallèle de latitude nord, alors que le 22e parallèle de latitude sud constitue une frontière entre le Sud Ouest africain (Namibie) et le Botswana, cf. Boughetaia, B., op. cit., p. 22.
124 cf. Yakemtchouk, R., L ‘Afrique en droit international, p. 71 et s. Pour d’autres détails voir Balandier. G. « La difficile synthèse des nécessités du présent et des forces héritées du passé », Le Monde diplomatique, 1965, février, p. 9 et Tran Van Minh, op. cit., p. 87. Concernant la délimitation arbitraire des frontières au Moyen Orient (surtout Syrie, Liban, Transjordanie, Irak) voir Rondot, P. « Tendances particularistes et tendances unitaires en Syrie », Revue Orient, No 5, 1er trimestre, 1958, pp. 140-141 et du même auteur in « Quelques réflexions sur les structures du Liban », Revue Orient, No 6, 2e trimestre, 1958, p. 26.
125 cf. Petrovic, R., « Frontières africaines », Revue de Politique internationale, 20 décembre 1973, p. 13.
126 Pour une analyse de cette conférence, cf. Decraene, Ph. Le panafricanisme, P.U.F., Paris, 1959, pp. 58-63, voir aussi Fall, 1., Le principe de ta liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes en Afrique, thèse, Paris, 1972, p. 349 et s.
127 cf. Touval, S., The boundary politics of indépendant Africa, Haward University Press, Cambridge, (Ma), 1972, p 55 et s.
128 cf. Boutros-Chali, op. cit., p. 10 et Yakemtchouk, R. L’Afrique en droit international, p. 81.
129 M’Baye, K., « droit et développement en Afrique francophone de l’Ouest », Revue sénégalaise de droit, août 1967, p. 46 et s.
130 La Charte de l’OUA énonce comme principe le « respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de chaque Etat et de son droit inaliénable à l’existence indépendante... » (cf. Nations Unies, Recueil des traités vol. 479. p. 75 (article 3, § 3).
131 Le Chef d’Etat du Mali, par exemple, s’est exprimé en ces termes : « ... nous devons prendre l’Afrique telle quelle, et nous devons renoncer à toute proclamation territoriale si nous ne voulons pas introduire ce que nous pourrions appeler l’impérialisme noir en Afrique [...] l’unité africaine demande de chacun de nous le respect intégral du patrimoine que nous avons hérité du système colonial, c’est-à-dire le maintien des frontières actuelles de nos Etats respectifs ». Quant au Président malgache, Tsiranana, il a déclaré qu’ : « il n’est plus possible, ni souhaitable, de modifier les frontières des Nations au nom de critères raciaux, religieux [...] car, en effet, si nous prenions pour critère de nos frontières la race, la tribu ou la religion, il y aurait en Afrique des Etats qui seraient effacé de la carte... » cf. Conférence au sommet des pays indépendants africains, Addis-Abéba, mai 1963, Présence africaine, Paris, 1964, p. 144. Pour d’autres interventions de chefs d’Etats africains sur cette question, cf. ibid, p. 159, 178, 179 et autres. Voir aussi la position de Bouteflika, ministre algérien des Affaires Etrangères, in : Revue algérienne des sciences juridiques, politiques et économiques, No. 1, mars 1967, p. 116 et celle de Kaïd Ahmed, ministre algérien, in : Le Monde, 15 avril 1966, p. 9.
132 Texte complêt de cette résolution voir Boutros-Ghali, op. cit., p. 137 et AFDI, 1964, p. 625.
133 cf. IIe Conférence des Chefs d’Etats ou des Gouvernements des pays non alignés, textes et résolutions, Le Caire, 1964, p. 443.
134 cf. Rousseau, Ch., « Chronique des faits internationaux », RGDIP, 1960, no. 2, pp. 371-374 et 786 ; voir aussi Panet, M., Le Monde Diplomatique, mars 1960, p. 16.
135 cf. RGDIP, 1962, no. 1, pp. 149-151 et voir surtout le communiqué sino-népalais in Journal de Genève du 16 octobre 1961.
136 Souligné par nous. Voir l’accord in : RGDIP, 1963, no. 3, pp. 723-726.
137 cf. Rousseau, Ch., RGDIP, 1967, no. 3, p. 776.
138 Sur l’évaluation du différend et les cartes le concernant voir Rousseau, Ch., RGDIP, 1962, no. 1, pp. 172-176 ; ibid, 1966, no. 4, pp. 998-1000 et ibid, 1967, no. 3, pp. 724-726.
139 Voir l’accord définitif in RGDIP, 1970, no. 4, p. 1017.
140 cf. Roiusseau, Ch., RGDIP, 1969, no. 1, p. 149.
141 cf, Rousseau, Ch., « Chronique des faits internationaux », RGDIP, no 2, 1971, p. 526 et Dutheil de la Rochere, J., « Les procédures de règlement de différends frontaliers », in Colloque de Poitiers : La Frontière, Pedone, Paris, 1980, p. 133.
142 cf. Dutheil de la Rochere, J., op. cit., p. 134.
143 Pour des détails sur ce conflit frontalier et pour connaître les thèses algériennes et marocaines cf. Diaz-Van-Dunem, J. op. cit., pp. 170-201 et Marchat, H., « Le conflit frontalier algéro-marocain », Revue juridique et politique, 1964, pp. 65-82. Voir aussi Bipounwoum, J.M., Le droit international africain (problèmes généraux - règlement des conflits), L.G.D.J., Paris, 1970, pp. 226-268.
144 cf. Bedjaoui, M., « Le règlement pacifique des différends africains », AFDI, 1972, p. 96.
145 cf. Queneudec. J.P., « Remarque sur le règlement des conflits frontaliers en Afrique », RGDIP, 1970, no. 1, p. 77.
146 cf. Luchaire, F., Droit d’outre mer et de la coopération, P.U.F., Paris, 2e éd, 1966, p. 325.
147 cf. ACDI, 968, vol. ii, pp. 93-95, § 1-3 ; ACDI, 1972, vol. ii, pp. 48-64, § 1-46 ; ACDI, 1974, vol. ii, 1e partie, pp-74-89, § 417-462. ACDI, ibid, pp. 202-214, § 1-49.
148 cf. ACDI, 1968, vol. ii, p. 94, § 2.
149 Voir supra note 145.
150 Les autres régimes territoriaux (article 12) sont aussi visés dans les commentaires des rapporteurs.
151 Voir la mention de la doctrine, supra, pp. 108 et s. ; voir aussi ACDI, 1968, vol. ii, p. 94, note 2 ; ACDI, 1972, vol. ii, p. 49, § 2, 4, 5 et 6, surtout les notes 344 et 345. cf. aussi ACDI, 1974, vol. ii, lère partie, p. 202, § 1 et 2.
152 cf. surtout ACDI, 1974, vol. ii, 1ère partie, pp. 206-207, § 11-17. Cependant, nous signalons que les rapporteurs ne se sont pas attardés sur la pratique des Etats qui ont accepté la règle de l’intangibilité des frontières, mais sur quelques cas controversés qui forment, en réalité, une exception au principe général de continuité. C’est pour cette raison que dans notre examen de la pratique internationale (voir supra, pp. 117 et s.) nous avons jugé utile de présenter un certain nombres d’exemples récents illustrant l’application du principe de l’intangibilité des frontières héritées du colonialisme.
153 cf. ACDI, 1974, vol. ii, 1ere partie, pp. 202-204 : Affaire des zones franches de la Haute Savoie et du Pays de Gex (§ 3) ; Affaire des îles d’Aland (§ 5) ; Affaire du temple de Préah Vihear (§ 6) et Affaire du droit de passage sur territoire indien (§ 8).
154 cf. intervention de Waldock, ACDI, 1968, vol. i, p. 151, § 21 ; voir aussi celle M.K. Yasseen, ACDI, 1974, vol. I, p. 223, § 6.
155 cf. par exemple, Annuaire de l’Institut de Droit International, 1931, vol. i, Rapport de Cavaglieri sur la succession d’Etats, p. 225 et surtout, dans le même annuaire, (ibid, pp. 238-239) le commentaire de Winiarski dans lequel il estime que : « le traité qui avait opéré les modifications territoriales et fixé les frontières existantes, ce traité lui-même n’existe plus au moment de l’annexion ; ses dispositions avaient été exécutées et par-là même consommées ; depuis, la frontière existe non pas en vertu d’un traité à effet continu, mais simplement parceque le territoire ainsi délimité fait partie de l’Etat en question, que cet Etat y exerce sa souveraineté de facto et de jure et que cette situation juridique est opposable à tous. Le traité qui avait fixé la frontière n’a désormais qu’une valeur historique. En cas de doute sur le tracé exact de cette frontière, il peut être invoqué comme document ; s’agit-il de savoir si la portion contestée du territoire appartient en droit à un Etat, alors il constitue une preuve ; mais c’est tout ». cf. aussi Castrén, E.J.S., op. cit., p. 436.
156 cf. l’intervention de Waldock (ACDI, 1972, vol. i, p. 270, § 83 ; voir aussi ACDI, 1968, vol. i, p. 151, § 22.
157 Pour les débats de la CDI voir ACDI, 1972, vol. i, p. 267 et s., § 71-85 ; p. 271, § 6-45 et pp. 279-283, § 53-90. A signaler qu’à cette date les débats ont tourné principalement autour du choix à faire entre la succession au traité lui-même ou la succession à la situation que le traité a créée. Voir à ce sujet les alternatives A et B données par Waldock in ACDI, 1972, vol. ii, pp. 48-49.
158 cf. ACDI, 1972, vol. i, p. 271, § 11. Voir aussi dans le même sens l’intervention de Ustor (Hongrie) ACDI ibid, p. 274, & 33 et celles de Ago (Italie) ; Bartos (Yougoslavie) et Ouchakov (URSS) (in ACDI, ibid, pp. 272-274, § 13, 36, 32).
159 cf. ACDI, ibid, p. 271, § 8 et 9.
160 cf. ACDI, 1974, vol. i, p. 210, § 6.
161 cf. ACDI, 1972, vol. i, p. 272, § 15.
162 cf. supra p. 123, note 153.
163 En réalité Bartos était aussi opposé à la proposition de Waldock (voir ACDI, 1968, vol. i, p. 143, § 60-61). Cependant, nous nous sommes abstenus de le citer parmi les opposants au projet pour la bonne raison que dans les discussions ultérieures ils nous a semblé adopter la position inverse (voir ACDI, 1972, p. 274, § 35-38 et p, 287, § 33.
164 cf. ACDI, 1972, vol. i, p. 268, § 75, voir aussi les arguments qu’il développe aux paragraphes 76 - 82.
165 cf. ACDI, ibid et ACDI, 1968, vol. i, p. 136.
166 A son avis « il est inadmissible d’extrapoler du cas de l’Afrique au reste du monde ». Il vise par là, plus particulièrement, le continent asiatique et à notre avis le traité de Kaboul de 1921 qu’a conclu son pays avec le Royaume-Uni (cf. SDN, Recueil des traités, vol. xiv, 1922-1923, p. 74).
167 cf. ACDI, 1968, vol. 1 p. 151, § 22-23.
168 « L’intérêt général », à l’époque intérêt de l’Europe, est une notion qui a été notamment invoquée par le comité de juristes constitué par le conseil de la SDN, à propos de l’obligation de la Finlande de maintenir la démilitarisation des îles d’Aland, alors qu’elle venait de se détacher de la Russie. Pour ce comité il s’agissait dans cette affaire « d’un règlement positif d’intérêts européens et non de simples obligations politiques individuelles et objectives » (cf. Affaire des îles d’Aland, SDN, Journal officiel, supplément spécial no 3, 1920, p. 16). Pour une étude de l’affaire dans le cadre des traités établissant un statut objectif, cf. Cahier, Ph., « Effets des traités à l’égard des tiers », RCADI, tome 143, vol. ii, 1974, pp. 665-667.
169 cf. ACDI, 1974, vol. ii, 1ère partie, p. 85.
170 cf. ACDI, ibid, p. 85, § 435 (Souligné par nous). Au § 432, il s’est exprimé d’une manière similaire : « ... admettre qu’une succession d’Etats soit en soi un motif de rejet unilatéral de frontières établies [...] mènerait à l’incertitude et à l’instabilité et, d’une façon générale, ne serait pas dans l’intérêt du maintien de la paix et de la sécurité internationale ».
171 cf. par exemple les interventions de Bedjaoui (Algérie) (ACDI, 1968, vol. i, p. 147, § 28) ; Sette Câmara (Brésil) (ACDI, 1972, vol. 1, p. 271, § 9) ; Elias (Nigeria) (ACDI, ibid, p. 273) ; El-Erian (Egypte) (ACDI, ibid, p. 274, § 39) ; Sette Câmara (Brésil), (ACDI, 1974, vol. i, p. 210, § 7) ; Martinez Moreno (El Salvador) (ACDI, ibid, P. 214, § 4) ; Bedjaoui (Algérie) (ACDI, ibid, p. 218, § 34) et Yasseen (Irak) (ACDI, ibid, p. 223, § 7).
172 cf. ACDI, 1974, vol. I, p. 210, § 7 voir aussi ACDI, 1972, vol. I, p. 271.
173 cf. l’intervention de Yasseen (Irak) in ACDI, 1974, vol. i, p. 223, § 7 pour les deux autres voir notre note 169 ci-dessus.
174 cf. ACDI, 1974, vol. i, p. 212, § 21 ; voir aussi ACDI, 1972, vol. i, p. 268, § 75 et ACDI, 1968, vol. i, p. 137, § 70.
175 cf. ACDI, 1974, vol. i, pp. 213-228.
176 cf. les commentaires sur l’intangibilité des frontières in ACDI, 1968, vol. ii, pp. 93-94, § 1 ; ACDI, 1972, vol. Il, p. 54, § 12 et ACDI, 1974, vol. 11, 1ère partie, p. 204, § 10.
177 cf. Conférence des Nations Unies sur le droit des traités, première et deuxième sessions, Vienne, 26 mars-24 mai 1968 et 9 avril-22 mai 1969, documents officiels New York, 1971 (doc. A/CONF.39/11/Add. 2), p. 319. Pour des commentaires sur ce sujet voir ACDI, 1966, vol. ii, 2e partie, p. 279 et s., surtout pp. 282-283, § 11.
178 Pour les débats au sein de la CDI voir ACDI, 1966, vol. i, 1ere partie, p. 78 et s. (Par exemple l’intervention de Ruda (Argentine) p. 81, § 8 et Pessou (Sénégal) p. 84, § 41.
179 cf. El Khadiri A.K., La position des Etats du tiers-monde à la Conférence de Vienne sur le droit des traités, thèse, Nice, 1978, p. 391.
180 cf. l’intervention de Ramangosoavina in ACDI, 1972, vol. I, p. 272, § 18.
181 cf. l’intervention de Tabibi in ACDI, 1974, vol. i, pp. 211-212, § 13 et 18.
182 cf. Conférence des Nations Unies sur la succession d’Etats en matière de traités (Vienne, 4 avril - 6 mai 1977), Compilation analytique des observations de gouvernements sur le projet d’articles définitif sur la succession d’Etats en matière de traités, New York, 1977 (doc. A/CONF.80/5), pp. 138-174. (ci après : Conférence..., compilation analytique des observations des gouvernements... (doc. A/CONF.80/5).
183 cf. Conférence des Nations Unies sur la succession d’Etats en matière de traités, comptes rendus analytiques des séances plénières, première session Vienne, 4 avril au 6 mai 1977, New York, 1978, vol. i (doc. A/CONF.80/16). pp. 107-129, (ci-après : Conférence..., comptes rendus analytiques..., (doc. A/CONF.80/16), vol. i).
184 cf. Nations, Unies, Documents officiels de l’Assemblée Générale, 27e session, 6e commission, point 85 de l’ordre du jour, New York, 1972, pour l’intervention de Besson (France) voir p. 41, § 13 ; pour Brenman (Australie), voir p. 46, § 7 ; Castrén (Finlande), p. 47, § 3 et Zotiadis (Grèce), p. 48, § 9. Pour les observations, cf. Conférence..., compilation analytique des observations des gouvernements, (doc. A/CONF.80/5), Belgique, p. 144 ; Etats-Unis, p. 148 et Grèce, p. 150.
185 cf. nations unies, Documents officiels de l’Assemblée Générale, 27e session, 6e commission, point 85 de l’ordre du jour, New York, 1972, intervention de Bojilov (Bulgarie), voir p. 99, § 45. Pour les observations cf. Conférence..., compilations analytique des observations (doc. A/CONF.80/5), Bulgarie, p. 146 ; Pologne, p. 165 ; RDA, p. 166 et République socialiste d’Ukraine, p. 167.
186 cf. Nations Unies, Documents officiels de l’Assemblée Générale, 27e session, 6e commission, point 85 de l’ordre du jour, New York, 1972, intervention de Manrya (Inde), p. 59, § 46 ; Njenga (Kenya), p. 80, § 8-9 et Ahmad (Pakistan), p. 87, § 22. Pour les observations, cf. Conférence... compilation analytique des observations de gouvernement (doc. A/CONF. 80/5), Ethiopie, p. 148 ; Kenya, p. 155 et surtout 156 et Mali, pp. 158-159.
187 qui « restent convaincus que le maintien de l’article 11 est nécessaire », cf. Conférence..., comptes rendus analytiques... (doc. A/CONF.80/16), vol. 1, Maresca (Italie), p. 116, § 45-46 ; Gilchrist (Australie), p. 120, § 76 ; Eustathiades (Grèce), p. 120 § 79-80 ; Museux (France), p. 122, § 1-2 et Hellners (Suède), p. 122, § 8.
188 cf. ibid, Paszkowski (Pologne) et Poeggel (RDA) (p. 111, § 38-44), ils ont réitéré la position déjà faite par leur gouvernement en faveur de « l’article 11 sous la forme et à la place choisie par la CDI ».
189 cf. supra pp. 119-120.
190 cf. Conférence..., comptes rendus analytiques... (doc. A/CONF.80/16), vol. i, p. 112, § 49.
191 cf. ibid, p. 115, § 30-32.
192 cf. ibid, p. 116, § 42.
193 cf. Conférence..., comptes-rendus analytiques... (doc. A/CONF.80/16), vol. i, p. 109, § 23 et s. ; Ethiopie, p. 110, § 28 et s. ; Pakistan, p. 111, § 45 et s. ; Egypte, p. 113, § 13, Kenya, p. 115, § 27 ; Mexique, p. 118, § 54 et s. et Guyane, p. 118, § 57 et s.
194 Ce groupe se compose principalement de trois délégations gouvernementales, dont les pays sont impliqués dans des conflits de frontière : l’Afghanistan, la Somalie et le Maroc. Subsidiairement, on peut citer la Zambie et la Jamaïque.
195 cf. Conférence..., compilation analytique des observations de gouvernements, (doc. A/CONF.80/5), observations orales, (pp. 138-139) et observations écrites, (pp. 139-142) de l’Afghanistan. Pour celles du Maroc, cf. ibid p. 160 (orales) et pp. 161-162 et celles de la Somalie cf. ibid, pp. 170-171 (orales seulement).
196 cf. Conférence..., comptes rendus analytiques..., (doc. A/CONF.80/16), vol. i, intervention de M. Osman (Somalie), p. 109, § 23.
197 Ce critère est similaire à l’observation faite par Rousseau, cf. supra notre p. 109 et la noie 61.
198 cf. Conférence..., comptes rendus analytiques..., (doc. A/CONF.80/16). vol. i, l’intervention de Tabibi (Afghanistan), p. 107, § 10 et s. Voir aussi le mémoire présenté par Tabibi à la CDI in ACDI, 1963, vol. ii, p. 295-296.
199 cf. ibid, intervention de Osman, p. 109, § 24 et p. 127, § 54.
200 cf. ibid, intervention de Benbouchta, p. 113. § 15.
201 cf. ibid, intervention de Osman, p. 109, § 24.
202 cf. ibid, intervention de Tabibi, p. 108, § 15.
203 cf. supra, p. 119 et notre note 124.
204 cf. ACDI, 1966. vol. ii, pp. 251-252, § 4 du commentaire et ACDI, 1972, vol. ii, pp. 53-54, § 10-11. Voir aussi Cahier, Ph., « Le problème des effets des traités à l’égard des tiers », RCADI, 1974, III, p. 662.
205 cf. Mc Nair, A., op. cit., p. 655 ; O’Connel, D.P., State succession un municipal law and international law Cambridge University Press, Cambridge, 1967, vol. 11, pp. 14-15 ; Zemanek, K., « State succession after decolonization », RCADI, 1965, tome III, p. 239 et 243 ; Ross A., op. cit., p. 127 et Guggenheim, P., Traité de droit public international, 2e éd., Géorg, Genève, 1967, p. 226. Pour un avis contraire, cf. Marcoff. M.G., op. cit., pp. 205-206.
206 cf. Rousseau. Ch. Droit international public, tome III, p. 492.
207 Pour l’affaire des iles l’Aland, cf. SDN, Journal Officiel, octobre 1920, supplément no. 3, pp. 3-19.
208 Pour l’affaire des zônes franches du Pays de Gex et de la Haute-Savoie, cf. CPJI, Arrêts, ordonnances et avis consultatifs, série A/B, fascicule no. 46 arrêt du 7 juin 1932, pp. 96-238 ; voir aussi, CPJI, série A, arrêt du 7 juin 1932, pp. 96-238 ; voir aussi, CPJI, série A, no. 24 (arrêt, 2e phase), pp. 1-43.
209 cf. Cahier, Ph. op. cit., pp. 666-667, voir aussi SDN, Journal officiel, octobre 1920, p. 18.
210 cf. ACDI, 1974, vol. ii, l’re partie, p. 203, § 3 ; CPJI, op. cit., série A, no. 24, p. 17 et série A/B, no. 46, p. 145.
211 cf. ACDI, vol. ii, p. 133, S 109.
212 cf. supra, p. 115 et note 98.
213 cf. NGUYEN-QUOC-DINH, « L’internationalisation du Mékong », AFDI, 1962, pp. 91 et s. et Nguyen-Huu-Tru, op. cit., pp. 201-210.
214 Voir le décret français du 22 septembre 1927 in Nguyen-Huu-Tru, op. cit., p. 202, note 32.
215 Pour cet arrangement, voir Documentation Française, (NED, Etudes et Documents), no. 1425, 24 janvier 1951, p. 9 ; voir aussi Nguyen-Huu-Tru, op. cit., pp. 203-204 ; avec l’indépendance complête, il y eut une nouvelle convention : cf. Convention relative au régime de la navigation maritime et fluviale sur le Mékong et de la navigation fluviale d’accès au port de Saigon in Documentation Française (NED, Etudes et Documents), 25 janvier 1955, no. 1973, p. 32. A signaler que la France était partie au premier arrangement mais pas à la nouvelle convention.
216 cf. Bukasa, Le régime juridique du fleuve Congo, thèse de doctorat, faculté de droit de Paris, 1970 (dactylographiée), 163, p.
217 cf. Bangura. M., Le régime juridique du Niger, fleuve international, thèse de doctorat, faculté de droit d’Aix-en-Provence, 1967, 250 p.
218 Pour la Conférence de 1885 cf. Martens, G.F., Nouveau Recueil Général (NGR), tome X, 2e série, pp. 414-427 et pour l’Acte de Bruxelles de 1890 cf. Martens. G.F., NGR, tome XVI, 2e série, pp. 3-27.
219 cf. Martens. G.F., NGR, vol. 14, 3e série, pp. 12-19.
220 Les Etats successeurs sont la République du Cameroun, de la Côte d’Ivoire, du Bénin (ex Dahomey), de la Haute-Volta, du Mali, de la Guinée, du Niger, du Nigeria et du Tchad.
221 cf. AFDI, 1963, pp. 883 et s. pour la Convention et AFDI, 1963, pp. 887 et s. pour l’Acte ; cf. aussi Recueil des traités des Nations Unies, vol. 587, 1967, p. 10 et s. et 20 et s.
222 cf. Schreiber, M., « Vers un nouveau régime international du fleuve Niger », AFDI, 1963, p. 871.
223 cf. Nguya-Ndila, C. op. cit., p. 190. Ajoutons que Rousseau (« Controverse sur la nature juridique du fleuve Congo », RGDIP, 1971, no. 2, p. 501) estime, pour sa part, que le fleuve Congo demeure régi par les grands principes de liberté de navigation de 1885, tant qu’aucun nouvel accord n’est conclu.
224 cf. la note diplomatique égyptienne in RGDIP, 1960, no. 1, p. 86, § 4 (II), cf. aussi SDN, Recueil des traités, vol. xciii, no. 93, 1929-1930, pp. 45 et s.
225 cf. ACDI, 1974, vol. II, 1ère partie, p. 210, § 27.
226 Pour l’accord égypto-soudanais du 8 novembre 1959 cf. RGDIP. 1960, no. 4, p. 878 et s. et pour un commentaire le concernant et une bibliographie sur les utilisations des eaux du Nil, cf. Rousseau, Ch. « Conclusion de l’accord du 8 novembre 1959 concernant la répartition des eaux du Nil », RGDIP, 1969, no. 1, p. 83-97.
227 cf. Waldock, in ACDI, 1972, vol. ii, p. 61, § 34 et Vallat, in ACDI, 1974, vol. ii, Impartie, p. 84, § 427 et cf. Rapport de la CDI in ACDI, 1974, vol. ii, 1ère partie, p. 209, § 24.
228 cf. Conférence..., compilation analytique..., (doc. A/CONF.80/5), pp. 167-168.
229 cf. ACDI, 1972, vol. i, intervention de el Erian p. 283, § 5 et intervention de Yasseen, p. 286, S 22. cf. également ACDI, 1974, vol. i, intervention de Bedjaoui, p. 218, S 31 et s., Elias, p. 219, § 38 et s. et Calle y Calle, p. 223, § 9.
230 cf. ACDI, 1972, vol. i, intervention de El Erian p. 283, 5.
231 L’article 12 du projet définitif se lit comme suit : Article 12, autres régimes territoriaux
1. Une succession d’Etats n’affecte pas en tant que telle :
a) les obligations se rapportant à l’usage d’aucun territoire, ou aux restrictions à son usage, établies par un traité au bénéfice de tout territoire d’un Etat étranger et considérées comme attachées aux territoires en question ;
b) les droits établis par un traité au bénéfice d’aucun territoire et se rapportant à l’usage, ou aux restrictions à l’usage, de tout territoire d’un Etat étranger et considérés comme attachés aux territoires en question.
2. Une succession d’Etats n’affecte pas en tant que telle :
a) les obligations se rapportent à l’usage d’aucun territoire, ou aux restrictions à son usage, établies par un traité au bénéfice d’un groupe d’Etats ou de tous les Etats et considérées comme attachées à ce territoire ;
b) les droits établis par un traité au bénéfice d’un groupe d’Etats ou de tous les Etats et se rapportant à l’usage d’aucun territoire, ou aux restrictions à son usage, et considérés comme attachés à ce territoire.
232 cf. intervention de Yasseen, ACDI, 1972, vol. i, p. 286, § 22.
233 cf. intervention Elias, ACDI, 1974, vol. i, p. 220, § 45.
234 cf. Nations Unies. Documents officiels de l’Assemblée Générale, 27e session, 6e commission, point 85 de l’ordre du jour, New York, 1972, voir la position de Cuba, p. 61, § 4 ; de la Zambie, p. 94, § 11 ; du Maroc, p. 96, § 19 et du Venezuela, p. 104, § 22-23. cf. aussi Conférence..., compilations analytiques des observations de gouvernements..., (doc. A/CONF.80/5), observation du Gouvernement du Ghana, p. 149 et de celui du Mexique, p. 162.
235 cf. Conférence..., comptes rendus analytiques..., vol. i, (doc. A/CONF.80/16), intervention de la délégation autrichienne, p. 125, § 34 ; américaine, p. 129, § 6 ; britannique, p. 130, § 15 ; italienne, p. 134, § 14 et allemande de l’Ouest, p. 136, § 31.
236 cf. ibid, intervention éthiopienne, p. 126, § 40 ; zaïroise, p. 134, § 10 ; algérienne, p. 136, § 35 et irakienne, p. 137, § 44.
237 cf. ibid, intervention de l’Argentine, p. 123 ; de la Tanzanie, p. 124, de la Côte d’Ivoire, p. 126 ; du Kenya, p. 128 et du Nigeria p. 128.
238 Dans son amendement la délégation du Mexique demande que soit exclu de l’article 12 les traités relatifs aux bases militaires, navales ou aériennes cf. Conférence... documents officiels..., (doc. A/CONF.80/16/Add. 2) vol. iii, p. 139, § 211.
239 L’amendement de l’Argentine reprend celui du Mexique tout en faisant exclure de l’article 12 « un traité qui entrave le plein exercice de la souveraineté de l’Etat successeur sur les richesses et les ressources naturelles de son propre territoire », cf. ibid, p. 139, § 211.
240 Dans son amendement la délégation de Cuba veut exclure de l’article 12 « les traités considérés comme illégaux du fait qu’ils violent les principes de la Chartes des Nations Unies », cf. ibid, p. 139, § 211.
241 Le paragraphe 3 de l’article 12 de la Convention de Vienne de 1978 se lit comme suit :
« 3. Les dispositions du présent article ne s’applique pas aux obligations conventionnelles de l’Etat prédécesseur prévoyant l’établissement de bases militaires étrangères sur le territoire auquel se rapporte la succession d’Etats ».
242 L’article 13 de la Convention de Vienne de 1978 se lit comme suit : « La présente convention et la souveraineté permanente sur les richesses et les ressources naturelles.
Rien dans la présente convention n’affecte les principes du droit international affirmant la souveraineté permanente de chaque peuple et de chaque Etat sur ses richesses et ses ressources naturelles. »
243 cf. par exemple, les interventions de Elias in ACDI, 1974, vol. I, p. 219, § 39 et Hambro, in ibid, p. 218, § 27.
244 cf., par exemple, les interventions de Nakagawa (Japon) (in Conférence..., comptes-rendus analytiques..., (doc. A/CONF. 80/16), vol. i, p. 132, § 32) ; Treviranus (RFA) (ibid, p. 136, § 31) et Pszkowki (Pologne) (ibid, p. 111, § 39 et s.).
245 cf. Treviranus (RFA), ibid, p. 136, § 31.
246 cf. Conférence..., compilations analytiques des observations..., (doc. A/CONF.80/5), p. 150. Voir dans ce sens les observations des USA (ibid, p. 148) ; de l’Italie (ibid, p. 152) ; du Mali (ibid, pp. 158-159 ; de la Pologne (ibid, p. 165) et de l’URSS (ibid, p. 173).
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