Préface
p. 1-2
Texte intégral
1L’apparition d’un grand nombre de nouveaux Etats sur la scène internationale a rendu nécessaire la codification des règles relatives à la succession d’Etats. D’où les deux conventions récentes, celle de Vienne de 1978 sur la succession d’Etats en matière de traités et celle de Vienne de 1983 sur la succession d’Etats en matière de biens, archives et dettes d’Etat.
2C’est sur la première que porte la thèse de M. Meriboute. Son contenu est beaucoup plus riche que ne le laisse entendre son titre, car l’auteur ne s’est pas contenté d’examiner les travaux préparatoires de cette convention : travaux de la Commission du droit international, discussions au sein de la Conférence de Vienne, mais il a analysé aussi de manière approfondie la pratique ancienne et moderne, en s’appuyant sur les études doctrinales.
3Si ce n’est qu’à une époque relativement récente que la doctrine a commencé à étudier systématiquement le sujet, les cas de succession d’Etats sont anciens et, toute proportion gardée, la plupart se sont situés dans un cadre de décolonisation : révolte des colonies anglaises d’Amérique du nord, indépendance des colonies espagnoles en Amérique latine. C’est le mérite de M. Meriboute d’avoir montré que le phénomène actuel, loin d’être nouveau, avait ses racines dans le passé.
4La Convention de Vienne contient, dans une première partie, les règles applicables à la succession des Etats nouvellement indépendants, c’est-à-dire des Etats issus de la décolonisation, puis, dans une deuxième partie, celles applicables à l’unification et à séparation d’Etats, y compris la sécession d’Etats. L’auteur n’a pas suivi ce plan, et à juste titre, puisque la sécession, en ayant pour effet de créer un nouvel Etat, ne diffère en rien de la situation découlant de la décolonisation.
5En conséquence, la première partie de cet ouvrage est consacrée à l’apparition d’un nouvel Etat et, principalement, aux règles applicables aux Etats nouvellement indépendants. Il ne pouvait pas en être autrement puisque la plupart des articles de la Convention de Vienne se réfèrent à cette dernière situation.
6Le principe applicable en la matière est celui dit de la table rase, à savoir que les traités conclus par l’ancienne metropole ne lient pas l’Etat successeur. On ne s’étonnera pas que l’auteur, originaire du tiers monde, voit le fondement de ce principe dans le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. On peut sans doute hésiter à le suivre dans cette voie, mais il n’en reste pas moins vrai que l’analyse est solide et pleine de nuances.
7Ce qui est certain, et l’ouvrage le montre, contrairement à ceux qui ont pu voir dans le principe de la table rase quelque chose de nouveau, c’est que cette règle est coutumière, car elle correspond à une pratique ancienne.
8L’auteur examine le droit d’option des nouveaux Etats ainsi que les exceptions au principe de la table rase, à savoir les traités relatifs aux frontières ; et autres traités territoriaux. La nécessité de la stabilité des frontières et le besoin du maintien de la paix et de la sécurité internationale ont eu pour conséquence que les Etats africains, comme jadis les Etats sud-américains, ont adopté dans ce domaine le principe de l’uti possidetis juris.
9Bien que, à notre avis, la sécession d’un Etat corresponde à la situation d’un Etat issu de la décolonisation, tel n’a pas été l’avis de la Conférence de Vienne qui a adopté la règle contraire : le nouvel Etat est lié par les traités conclus par l’Etat prédécesseur. Cette disposition de la Convention est surprenante, elle ne correspond aucunement à la pratique et, de ce fait, risque de n’être jamais appliquée. C’est ce que nous montre M. Meriboute avec une logique rigoureuse en se basant sur des cas de sécession récents : Pakistan, Singapour, Bengladesh. Il nous en donne l’explication en analysant l’histoire récente, le cas du Katanga et du Biaffra ainsi que les discussions au sein de la Conférence : le tiers monde craint tout ce qui pourrait encourager la sécession.
10La deuxième partie de l’ouvrage, consacrée aux transferts de territoires, à l’union et à la dissolution d’Etats, est classique comme le sont les règles contenues dans la Convention. On relevera de belles pages sur l’illégalité de certaines annexions, comme celle de Irian occidental par l’Indonesie, et une analyse fouillée de l’unification de l’Egypte et de la Syrie ainsi que de celle du Tanganyka et de Zanzibar.
11L’ouvrage de M. Meriboute frappe par la richesse de sa documentation, par l’absence de tout dogmatisme et par son souci constant de replacer la notion juridique dans son contexte historique. Ce sont des thèses comme celle-ci qui permettent à l’enseignant d’être optimiste, la nouvelle génération de juristes saura être à la hauteur de sa tâche.
Auteur
Professeur à l’Institut de Hautes Etudes Internationales de Genève
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