Chapitre I. Variations sur la propriété foncière dans l’espace et dans le temps
p. 259-273
Texte intégral
1Dans une approche historico-sociologique le terme de propriété ne laisse percevoir la réalité vivante qu’il exprime qu’assorti d’un qualificatif : la propriété est personnelle ou individuelle, communautaire ou communiste ... Et si le concept demeure, en principe, le même, l’aménagement des rapports humains, économiques, sociaux ou juridiques qu’il crée change selon les qualificatifs. Le jeu de ces qualificatifs renvoie à des débats de fond dont deux méritent d’être mentionnés : d’abord celui du conflit de l’antériorité historique entre la propriété collective et la propriété individuelle, ensuite celui du conflit de valeur entre ces deux formes de propriété.
2Selon la conception romaine, reprise par la plupart des systèmes juridiques européens, la propriété est un droit inhérent à la personne humaine. On comprend dès lors que la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 en assure la protection au titre des droits naturels et imprescriptibles de tout être humain. Selon son article 17 « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité ». Provenant en droite ligne de cette conception, le code civil français, précurseur et inspirateur de la plupart des codes européens, définit en son article 544 le droit de propriété comme « Le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou les règlements ».
3Un siècle et demi plus tard, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948, œuvre de compromis entre des idéologies en conflit, se ressent de cette conception. Elle proclame en son article 17 que « Toute personne, aussi bien seule qu’en collectivité, a droit à la propriété. Nul ne peut être arbitrairement privé de la propriété », consacrant ainsi la légitimité de la propriété individuelle comme de la propriété collective.
4Mais la légitimité reconnue à ces deux formes de propriété ne peut faire oublier le débat sans fin qui s’interroge d’une part sur leur ordre d’apparition dans le temps historique, et d’autre part, sur leur valeur en tant que mode de réalisation de la justice sociale et d’accomplissement du destin de l’homme.
5Ce double débat conditionne, dans une certaine mesure, l’option que les schémas uniformisateurs du monde capitaliste ou socialiste proposent au Tiers Monde notamment à l’Afrique.
La propriété et les lois de l’évolution
6Dans une perspective évolutionniste, la propriété collective a été présentée comme antérieure à la propriété individuelle. C’est la thèse bien connue de E. de Laveleye1. Selon cet auteur, chez tous les peuples la propriété foncière aurait été au début collective et ne serait devenue individuelle que plus tard et dans la mesure où la culture devenait plus intensive. La communauté agraire, au départ communiste, aurait tendu vers l’individualisme à mesure qu’elle se rétrécissait. La première communauté aurait été celle du clan telle que la marke germanique2.
7Au deuxième stade, elle se serait transformée en communauté de village marquée par des répartitions périodiques entre les familles comme dans la mir russe, allmend germanique, suisse ou Scandinave et comme dans les communautés javanaises ou indiennes3. Le troisième stade aurait été celui de la communauté de la famille indivise telle que la zadrugg des Slaves du Sud4. L’éclatement de la famille indivise aurait laissé apparaître la famille nucléaire avec la propriété individuelle. Cette thèse de la transformation linéaire de la propriété se situe dans le contexte général de l’évolutionnisme de l’époque. C’était le temps de Lewis Morgan, auteur de System of consanguinity and affinity of the human family publié à Washington en 1871 et de l’Ancient Society paru a New York en 18775. Lewis Morgan fut pour les sciences sociales et notamment l’anthropologie ce que fut Darwin pour les sciences biologiques. Sa thèse se fondait sur des présupposés qui peuvent se résumer ainsi : les sociétés humaines passent par une série de phases comparables et leur évolution se fait selon un schéma unilinéaire. L’évolution de l’humanité étant univoque, la démarche comparative permet de comprendre que les stades atteints par les sociétés humaines retardées ont été parcourus par des sociétés humaines plus avancées. Chaque société humaine passerait par l’état sauvage, l’état de barbarie, pour arriver à l’état civilisé ; les deux premiers comportant chacun trois stades (inférieur, moyen et supérieur)6. L’histoire de l’humanité serait une quant à la source, une quant à l’expérience, une quant au progrès. Cette classification était aussi pour l’auteur une hiérarchisation des cultures. S’agissant de la propriété, Morgan établit une corrélation entre son évolution et celle de la techinique et de la famille à travers les règles de la d’évolution successorale. Dans le chapitre, de la quatrième partie de l’ouvrage consacré au développement de l’idée de propriété, il déclare que « Les premières idées de propriété étaient intimement liées au besoin fondamental de l’acquisition des subsistances. Les différentes espèces d’objets susceptibles d’être détenus par des particuliers se sont naturellement multipliés au cours des périodes ethniques successives par suite de la diversification des techniques relatives à la production des moyens de subsistance. La propriété s’est donc développée parallèlement aux progrès des inventions et découvertes. La diversification des formes de propriété a été accompagnée par le développement de certaines régulations sociales relatives à l’appropriation et à l’héritage. Les coutumes dont dépendaient ces règles relatives à l’appropriation et à l’héritage étaient déterminées par les conditions et le progrès de l’organisation sociale »7. L’évolution de la forme de propriété est donc liée à celle de la famille. La plus ancienne forme de jouissance de la terre aurait été la propriété tribale collective. La famille monogamique aurait fait sa première apparition au stade supérieur de la barbarie comme prolongement d’une forme antérieure de famille, la forme syndiasmienne. Le passage de l’une à l’autre forme serait en rapport étroit avec le développement de la propriété et avec les usages relatifs à l’héritage. La filiation d’abord matrilinéaire serait devenue patrilinéaire8. L’époque de L. Morgan était aussi celle de Bachofen qui dans son ouvrage Das Mutterrccht tenta de démontrer dans l’optique évolutionniste la grande mutation sociale que représentait le passage de la filiation matrilinéaire à la filiation patrilinéaire9. C’était aussi celle où Sumner Maine jetait les bases de l’ethnologie juridique en même temps qu’il introduisait le darwinisme dans le domaine du droit10.
8On sait l’influence considérable que l’ouvrage de Morgan (Ancient Society) a exercé sur les premiers théoriciens du marxisme, notamment sur F. Engels qui en a repris les conclusions essentielles dans L’origine de la famille, de la propriété privée et de l’Etat. « Sur les origines de la société, écrivait-il en 1884, à Kautsky, il existe un livre décisif aussi décisif que Darwin l’est pour la biologie, et naturellement il a été découvert une fois encore par Marx ; c’est Morgan : Ancient Society, 1877. Morgan a redécouvert spontanément, dans les limites que lui traçait son sujet, la conception matérialiste de l’histoire de Marx et ses conclusion concernant la société actuelle sont des postulats absolument communistes »11.
9Mais existe-t-il une ligne obligée de l’évolution des institutions humaines qui, marquée par des étapes progressives, les conduirait du communisme primitif à la société capitaliste, de la propriété collective à la propriété privée individuelle ?12. Si comme Marx l’a écrit : « A chaque époque historique la propriété s’est développée différemment et dans une série de rapports sociaux différents »13, il n’est point établi que dans toutes les sociétés humaines la propriété collective ait précédé la propriété individuelle ni que celle-ci soit en rapport avec une formation sociale supérieure.
10Déjà à l’époque de L. Morgan, la théorie du communisme primitif et de l’évolution unilinéaire de la propriété allant de la propriété collective à la propriété individuelle a été contestée par plusieurs auteurs. Les travaux de L. Bauchet ont montré que les almennings suédois ne répondaient pas aux caractéristiques spécifiques du communisme primitif14. A. Tschuprov, sur la foi de documents russes, a remis en cause l’existence d’une loi uniforme allant de la propriété collective à la propriété individuelle à propos de la mir russe15. Plus près de nous, les travaux de E. Sicard n’ont pas mis en évidence un lien quelconque, dans une succession progressive, entre la propriété collective du clan et la propriété collective de la famille étendue du type de la zadruga chez les Slaves du Sud. La conception médiévale de la propriété ne procède pas en droite ligne de la conception romaine qui l’a pourtant précédée. Son univers politique, social et juridique étant différent. En rupture avec la conception romaine, la propriété médiévale n’était pas l’objet d’un droit exclusif mais de plusieurs droits. La terre, à l’exception des alleux qui étaient des terres libres, était concédée par le suzerain soit à un noble par un contrat de fief, soit à un roturier par le contrat de censive. Dans l’un et l’autre cas, le suzerain avait le domaine éminent pendant que le concessionnaire avait le domaine utile qui comportait pour lui le droit de cultiver la terre et d’en recueillir les fruits. S’agissant du fief, le Liber Feudorum le définissait comme « un don gracieux fait à quelqu’un de telle sorte que la propriété de la chose immobilière concédée en bénéfice restant au donateur, l’usufruit passe au donataire pour qu’il le conserve à perpétuité, lui et ses héritiers, à charge de fidèle service envers son seigneur ». Ainsi, les rapports réels, nés de la concession de la terre se doublaient d’obligations de fidélité, d’allégeance et de service militaire à la charge du vassal concessionnaire et au profit du seigneur concédant. Ceux qui avaient l’exploitation directe de la terre la voulaient franche et libre de toutes redevances et servitudes. Et l’abolition du système féodal leur donna raison qui eut pour effet de consolider les tenures foncières entre les mains des vassaux et des censitaires qui avaient la maîtrise directe du sol. A la veille de la Révolution française et à la faveur de l’individualisme juridique qui reparut au xive siècle et s’imposa au xviie siècle dans la théorie du droit naturel, la propriété fut considérée comme un droit absolu et imprescriptible. Elle s’individualisa et avec elle les rapports entre l’homme et la terre. C’est donc en rupture avec la conception médiévale de la propriété qui l’a pourtant précédée que s’est imposée la conception du code civil français qui a inspiré la plupart des systèmes juridiques du type libéral et qui faisant de la propriété un droit individuel, exclusif et absolu, consacra l’idée romaine, quiritaire de la propriété16.
L’expérience historique de l’Afrique Noire
11S’agissant de l’Afrique Noire, on a pu comparer les structures agraires qui y prédominent à celles qui ont marqué la féodalité européenne : « Le chef africain, écrit H. Labouret, comme le seigneur d’Europe, exploite et fait exploiter pour lui un certain nombre de domaines ruraux ; il reçoit en outre des cadeaux de ses obligés »17. Certains auteurs ont posé des hypothèses pour l’étude des féodalités africaines18. Et pour J. Suret-Canale « En réalité nous voyons apparaître en Afrique Noire, sur la base de la décomposition de la communauté primitive, qui sous beaucoup de ses aspects demeure extrêmement vivace, à la fois des rapports esclavagistes et des rapports de suzerain à tributaire ou à vassal qu’il faut bien qualifier de « féodaux »19.
12Ce rapprochement est-il possible ? Certes, ceux qui emploient l’expression « féodalité » pour caractériser la société négro-africaine précisent qu’ils lui donnent une signification essentiellement politique. Cette précision ne nous paraît pas de nature à prévenir les confusions. En effet, s’agissant tout spécialement de la féodalité, les rapports politiques qu’elle impliquait ne se concevaient pas sans les rapports de production qui les sous-tendaient puisque l’un des traits essentiels de la féodalité résidait justement dans la confusion qui s’y réalisait entre la souveraineté politique et la propriété foncière. Les rapports politiques de sujétion se formaient à partir des rapports économiques et juridiques de dépendance20.
13Des recherches antérieures nous avaient amené à établir qu’en Afrique Noire il n’en était pas tout à fait ainsi. Dans le système féodal européen le seigneur concédait une terre à son vassal à charge de services ou au roturier à charge de redevances. Contrats de fief ou de censive ; rapports contractuels qui se créaient notamment dans le cas du vassal par la cérémonie de l’hommage et se consolidaient par la prestation de serment de fidélité. L’élément personnel ne disparaissait cependant pas puisque aux premiers temps surtout, c’était un contrat viager qui ne liait que les parties en présence et qui mettait à la charge de l’une et de l’autre des obligations réciproques : le vassal s’engageait à être fidèle (féal) à son seigneur et à ne rien faire contre lui et à lui fournir Pauxilium et le consilium. Le seigneur s’obligeait à l’égard du vassal et lui fournissait un fief et la protection. Cette concession de fief finira par supplanter les autres objets de l’obligation du seigneur et par changer tout le fondement du système. On en était venu à préciser que le vassal était juridiquement engagé à l’égard du seigneur parce qu’il avait reçu de lui une terre. Et les rapports féodaux se définissaient alors comme des rapports réels créés par la concession du fief.
14Il en va tout autrement en Afrique Noire. Les rapports de dépendance ne se forment pas « propter rem » et les liens de dépendance sont surtout personnels. On est politiquement et socialement soumis à telle autorité politique, non pas parce que l’on a reçu d’elle un bien, une terre, mais parce l’on appartient à une famille, elle-même soumise à cette autorité. Et la terre n’appartient pas aux chefs ou seigneurs et ne relève pas de leur propriété éminente. Souveraineté et propriété foncière ne se confondent pas, comme c’était le cas dans la féodalité européenne. Et cette distinction est encore plus nette là où le maître de la terre et le chef politique sont deux personnalités distinctes21.
15D’autre part, toujours en Afrique Noire, la forme collective et le caractère inaliénable de la propriété foncière ne s’opposent pas à l’existence et à l’exercice de droits individuels. Mais ce serait, à notre sens, une erreur que de voir en cela, selon le schéma des systèmes fonciers européens, un démembrement de la propriété en vertu duquel la collectivité conserverait la nue-propriété, comparable au domaine éminent seigneurial de l’époque féodale, pendant que chaque membre exercerait le droit d’usage ou d’usufruit comparable au domaine utile22. Le schéma nous paraît plus complexe et irréductible aux catégo-juridiques occidentales. En réalité, puisque l’appartenance à la collectivité est la condition nécessaire de l’attribution des droits individuels, les droits que chaque membre exerce sur une parcelle de la terre ne sont pas différents de ceux que la collectivité toute entière y détient. En d’autres termes, chaque individu exerce sur la terre les droits de sa collectivité.
16S’il n’y a pas une ligne préétablie pour l’évolution de la propriété et qui détermine la succession progressive des formes qu’elle peut prendre dans le temps et dans l’espace, il n’y a pas non plus une catégorie préétablie des biens susceptibles d’appropriation ni des droits qui peuvent s’exercer sur ces biens.
17D’abord, si l’appropriation et la valeur économique définie d’après les besoins transforment les choses en biens, touts les choses ne sont pas des biens et tous les biens ne sont pas des choses23. Les choses deviennent donc des biens par décision du législateur et en fonction des indications de l’ordre social ou des exigences de la politique suivie. Doit-on jeter la pierre à Aristote, auteur du Politique, d’avoir trouvé des arguments pour assimiler les esclaves aux animaux, faisant partie les uns et les autres du patrimoine de leur maître ? « L’utilité des animaux privés, écrit-il dans le Politique, et celle des esclaves sont à peu près les mêmes : les uns comme les autres nous aident par le secours de leur force corporelle à satisfaire les besoins de l’existence. L’esclavage est donc un mode d’acquisition naturel, faisant partie de l’économie domestique ». Faut-il remonter si loin dans l’histoire ? Les textes qui réglementaient la traite des nègres ne conféraient-ils pas à ceux-ci un statut juridique de meubles !
18La détermination des biens qui peuvent faire l’objet d’appropriation24 peut changer suivant les pays et les époques et en fonction des tendances dominantes tout comme les rapports entre l’intérêt individuel et l’intérêt général, à travers les rapports de la propriété privée et de la propriété collective peuvent se modifier. On comprend dès lors que le destin de la propriété soit lié à celui des idéologies.
La propriété et le destin des idéologies
19Pour Mirabeau en pleine extase révolutionnaire, « Il est de l’essence de la propriété d’appartenir à un seul »25. La nuit de 4 août 1789 réalisant selon le mot de Taine une translation de propriété affranchissait par là même la terre de toutes les servitudes et privilèges féodaux qui la grevaient. La propriété, s’imposant comme un droit imprescriptible de la personne humaine, ne pouvait se concevoir que comme un attribut de l’être humain. Si elle est imprescriptible, ce caractère s’étend aussi à la revendication qui la protège contre autrui. Le code civil de 1804 en son article 544 la définit comme le « droit de jouir et de disposer de choses de la manière la plus absolue ». Le pléonasme traduit le culte qui lui est voué et le respect dû à son caractère sacré. C’est un droit absolu qui confère à son titulaire toutes les prérogatives sur sa chose ; et si son intérêt doit céder devant l’intérêt général qu’implique la notion d’utilité publique, cela ne peut se réaliser qu’à la condition d’une juste et préalable indemnité (art. 545). C’est un droit exclusif qui ne souffre pas la concurrence et n’a de limites que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance des mêmes droits. C’est un droit perpétuel qui dure aussi longtemps que dure la chose qui en est l’objet ; il peut changer de titulaire mains ne s’éteint pas par le non-usage. On a pu trouver à cette conception de la propriété des vertus autres que l’incontestable service qu’elle a rendu aux possédants. Les apologies ne manquent point. Simple rappel, on peut se contenter de sauver de l’oubli celle de Thiers qui dans une brochure publiée en 1848 sous le titre De la propriété écrit : « C’est par la propriété que Dieu a civilisé le monde et mené l’homme du désert à la cité, de la cruauté à la douceur, de l’ignorance au savoir, de la barbarie à la civilisation ».
20Mais les biens peuvent aussi avoir une fonction sociale qui dépasse les prérogatives qui naissent de leur appropriation par les individus. A cet égard, l’année 1848 peut être considérée comme une année charnière. C’était l’année de publication du Manifeste du parti communiste. Marx et Engels précisent leur position vis-à-vis de la propriété. Après avoir constaté que la Révolution française avait aboli la propriété féodale au profit de la propriété bourgeoise, ils écrivent : « Ce qui caractérise le communisme ce n’est pas l’abolition de toute espèce de propriété, mais l’abolition de la propriété bourgeoise »26. Ce n’est plus de l’origine ni des fondements de la propriété qu’il s’agit mais plutôt de sa fonction dans la lutte des classes. Car la propriété bourgeoise moderne, la propriété privée, n’est que l’expression ultime et parfaite du mode de production capitaliste et d’appropriation fondé sur des antagonismes de classes et sur l’exploitation des uns par les autres. Il s’agit donc de la condamnation de l’appropriation privée des moyens de production. Une telle conception détermine forcément un statut juridique de la propriété différent de celui que retient la conception individualiste du code civil et des systèmes juridiques du type libéral. Elle impose une distinction : d’un côté la propriété d’Etat et la propriété des organisations coopératives, qui représentent la propriété socialiste, de l’autre, la propriété de chaque membre de la société sur les revenus de son travail, ses épargnes ainsi que sur les biens de consommation qui représente la propriété individuelle et personnelle27.
21De leur côté, les partisans des doctrines dites libérales ne pouvaient rester insensibles ni aux excès auxquels conduit la conception individualiste et absolutiste de la propriété qui fait du propriétaire un véritable souverain de son bien dans le cadre du capitalisme moderne, ni aux influences des idées socialistes sur l’ordre social en mutation rapide.
22A l’égard de ces conflits d’idées et d’idéologies qui placent la notion même de propriété sous le signe de l’ambiguïté, la position des doctrines chrétiennes mérite d’être signalée dans la mesure où elles ont exercé une certaine influence sur les nouvelles orientations du droit au sujet de la propriété28. S’agissant tout spécialement de l’Eglise catholique, s’il y a une continuité dans sa position à l’égard de la propriété, position fondée essentiellement sur la charité et la condamnation de Pégoïsme des possédants, la ligne d’évolution de sa doctrine va du conservatisme à la justice sociale largement conçue29. L’encyclique « Qui Pluribus » de Pie IX (1846) était une condamnation de la doctrine dite du communisme, jugée contraire au droit naturel et l’encyclique « Syllabus » (1864) assimilait le socialisme et le communisme aux grand maux dont l’humanité pouvait être affligée. Cependant l’encyclique « Rerum Novarum » du pape Léon XIII (1891) marquera un tournant décisif dans la position de l’Eglise à l’égard de la question sociale et de la propriété30 Elle constituait une doctrine sociale dans la ligne de laquelle se situent les encycliques ultérieures telles que l’encyclique « Mater et Magister » du pape Jean XXIII qui prend nettement position sur le problème de la propriété privée dont le principe est approuvé comme condition d’une liberté personnelle effective. Mais le droit de propriété pour naturel qu’il soit n’en est pas moins subordonné à une exigence de justice sociale ; il doit conduire à une responsabilité sociale des individus. Dans cette perspective, si l’encyclique « Mater et Magister » reconnaît que le droit de propriété doit avoir pour objet les biens de production, comme les biens de consommation. Elle reconnaît à l’Etat et aux collectivités publiques le droit d’avoir les biens de production lorsque l’intérêt général l’exige. A propos de la propriété publique, cette encyclique déclare ». Ce qui vient d’être exposé n’exclut évidemment pas que l’Etat et les établissements publics détiennent, eux aussi, en propriété légitime, des biens de production et spécialement lorsque ceux-ci en viennent à conférer une puissance économique telle qu’elle ne peut, sans danger pour le bien public, être laissée entre les mains de personnes privées ». Nette affirmation de la fonction sociale du droit de propriété. A cet égard, après un rappel d’un passage significatif de l’encyclique « Rerum Novarum », l’encyclique « Mater et Magister » déclare que « la fonction sociale a sa racine dans la nature même du droit de propriété ».
23Cette prise de position de la doctrine catholique à l’égard du droit de propriété s’inscrit dans un courant de pensée31 critique à l’égard des excès de la propriété privée dans ses incidences sur les rapports sociaux, auquel les juristes ne sont pas restés insensibles.
24Parmi les doctrines proposées32 celle qui assigne à la propriété une fonction sociale a le plus retenu l’attention des juristes et exercera une influence décisive sur l’évolution du statut juridique de la propriété. Elle est formulée par L. Duguit selon qui « La propriété n’est pas un droit : elle est une fonction sociale. Le propriétaire, c’est-à-dire le détenteur d’une richesse a, du fait qu’il détient cette richesse, une fonction sociale à remplir ; tant qu’il remplit cette mission, ses actes de propriétaire sont protégés. S’il ne la remplit pas ou la remplit mal, si par exemple il ne cultive pas sa terre, laisse sa maison tomber en ruine, l’intervention des gouvernants est légitime pour le contraindre à remplir ses fonctions sociales »33. On peut facilement se faire une idée des réactions que de telles idées ont provoquées à leur époque (1905) ; car si le libéralisme consentait à corriger ses propres excès pour prévenir le pire, il n’entendait cependant pas remettre en cause les prérogatives qui naissaient pour le propriétaire de la souveraineté qu’il avait sur sa chose. Et les adversaires de la doctrine de la fonction sociale de la propriété n’ont certainement pas manqué de relever une certaine contradiction dans la pensée de Duguit qui écrit par ailleurs : « Si (...) souveraineté et propriété entrent en conflit c’est celle-ci qui doit avoir le dessus ; elle est aussi une souveraineté et, si l’on peut dire, plus souveraine que la puissance publique »34. Et pourtant cette doctrine fera son chemin. Elle trouvera d’abord d’ardents défenseurs chez les juristes partisans du christianisme social et son influence se fait de plus sentir dans le régime juridique des biens et notamment dans celui de la terre.
25La propriété-souveraineté, pour contenir sa propre décadence35 qui la réduirait à une simple concession précaire et révocable, est à la recherche d’un compromis avec la propriété-fonction sociale. La propriété aurait, dit-on, un double aspect résultant de sa double mission. Elle serait à la fois une prérogative individuelle permettant l’épanouissement de la personne humaine et dans le même temps une fonction sociale au service de l’ensemble des hommes pour la satisfaction de leurs besoins36. Ce compromis s’oriente dès lors dans deux directions : d’une part vers les restrictions de plus en plus nombreuses apportées aux prérogatives du propriétaire au profit de l’utilisateur37, d’autre part vers le renouveau de la propriété collective soit par voie de nationalisation, soit par le recours à la notion d’utilité publique. Quel nœud gordien ! Comme pour le trancher et pour rassurer les propriétaires menacés, Galbraith nous apprend que ce qui compte aujourd’hui, c’est moins la propriété de l’entreprise que le pouvoir dans l’entreprise. Selon lui, le pouvoir économique était jadis attaché à la propriété du sol ; il est passé ensuite aux détenteurs du capital, et à notre époque, à ce mélange de savoir et de compétences techniques qu’implique la technostructure38.
26Dans ce foisonnement de concepts, d’idées et d’idéologies, nourri de l’angoisse de plus en plus grande des possédants menacés d’extinction et de l’espoir non moins progressif des démunis d’aujourd’hui mais possédants collectifs de demain en cours d’avènement, l’Afrique Noire est appelée à un choix.
Notes de bas de page
1 Laveleye, E., De la propriété et de ses formes primitives, 4e édition, Paris, Alcan, 1891.
2 Laveleye, E. de, De la propriété..., op. cit., p. 83.
3 Laveleye, E. de, De la propriété..., op. cit., pp. 9, 43, 119 et ss.
4 Laveleye, E. de, De la propriété..., op. cit., p. 463 ; sur le rôle de la zadruga dans l’organisation d’une économie du type socialiste et autogestionnaire cf Sicard, E. Zadruga sud-slave dans l’évolution du groupe domestique, Paris, Orphys, 1943 ; id : Etudes de sociologie et de droit slaves, Paris, Orphys, 1953 ; id : « De la communauté domestique dite de « Zadruga » à la coopérative kolkhozienne » in Revue d’économie politique, Janv. fév. 1953, p. 84 à 103.
5 Ce dernier ouvrage fut traduit en français et publié aux éditions Anthropos en 1971 ! sous le titre La société archaïque.
6 Morgan L., La société archaïque, Paris, 1971, p. 8 et ss.
7 Morgan L., La société archaïque, op. cit., p. 609.
8 Morgan L., La société archaïque, op. cit., p. 630.
9 Bachofen J.J., Das Mutterrccht, Stuttgart 1861 ; dans un sens critique, à propos de l’Afriqeu Noire, cf. notre ouvrage Quelle est ma loi ? Tradition et modernité dans le droit privé de la famille en Afrique Noire francophone, Paris, Pedone 1974 p. 203 et ss.
10 A cet effet ses développements sur l’évolution du droit des contrats sont significatifs cf. Ancient Law, Londres, 1861, traduction française, Courcelle-Senoul, 1874.
11 Engels F., L’origine de la famille, de la propriété privée et de l’Etat, Paris, Editions sociales, 1974, in note de l’éditeur p. 11.
12 A ce sujet Marx écrit : « a grands traits, les modes de production asiatique, féodal et bourgeois moderne peuvent être qualifiés d’époques progressives de la formation sociale économique. Les rapports de production bourgeois sont la dernière forme contradictoire de production sociale ». Marx K. Contribution à la critique de l’économie politique, Paris, Editions sociales, 1972, p. 4.
13 Marx K., Misère de la philosophie (la propriété ou la rente) in Œuvres, Economie I, Paris, Ed. Gallimard, Pléiade, 1965, p. 118.
14 Beauchet L., Histoire de la propriété foncière en Suède, Paris, Larose, 1904 ; dans le même sens K. Haff, Die dänischen Gemeinderecht, Leipzig, 1909.
15 Tschuprov A., Die Feldgemeinschaft, Strasbourg, 1902.
16 Ourliac P. et Malafosse T., de Droit romain et ancien droit, Tome II, Les biens, Paris, PUF (coll. Thémisj 1961, p. 144 et ss. ; Bloch M., Les caractères originaux de l’histoire rurale française. Paris, A. Colin, 1952 ; Leclerc J.. « Propriété et féodalité : qu’est-ce qu’un propriétaire sous l’ancien régime ? », in Etudes, tome 219, 1934, p. 433 et suivantes ; Gonnard R., La propriété dans la doctrine et dans l’histoire, Paris, Pichon. 1943 ; Ellul T., Histoire des institutions, Paris, PUF, 19’56, tome II.
17 Paysans d’Afrique occidentale, Paris, Gallimard, 1941, p. 19.
18 Maquet J., « Une hypothèse pour l’étude des féodalités africaines », in Cahiers d’études africaines, n.6, 1961. Voir égalements ; Lombard J., « La vie politique dans une ancienne société de type féodal: les Bariba du Nord Dahomey » in Cahiers d’études africaines, 1960, p. 545 et suivantes ; id., Structures de type féodal en Afrique Noire – Etude des dynamismes internes et des relations sociales chez les Bariba du Dahomey, Paris, Mouton, 1965.
19 Afrique Noire, Paris, Editions sociales, 1961, p. 101. L’auteur fait lui-même des réserves en ce qui concerne le terme « féodaux ». Il reprend la même idée dans un débat général sur le mode de production asiatique, cf. « Sur le mode de production asiatique, Centre d’études et de recherches marxistes, Paris, Editions sociales, 1974, p. 101 à 133.
20 Kouassigan G.A., L’homme et la terre, Paris, Berger-Levrault, 1966, p. 161 et ss.
21 Kouassigan G.A., L’homme et la terre, op. cit., p. 167 et ss. et surtout p. 121 et ss. ; également Verdier R., « Chef de la terre et terre du lignage ; Contribution à l’étude des systèmes de droit foncier négro-africains », in Etudes de droit africain et de droit malgache, Paris, Cujas, 1965, p. 333 et suivantes notamment p. 337, distinction du chef de terre et du chef politique ; Sawadogo E., « Le chef de terre au Yatinga », in Revue juridique et politique, Indépendance et coopération, N. 4, 1970, p. 1153 à 1162. Cf. également, Etudes sur le droit de la terre en Afrique Noire (collectif), Paris, Laboratoire d’anthropologie juridique Université de Paris I.
22 Kouassigan G.A., L’homme et la terre, op. cit., p. 135 et ss. ; pour Madagascar, cf. Blanc Jouvan X., « Les droits fonciers collectifs dans les coutumes malgaches » in Revue internationale de droit comparé, 1964, p. 333 à 368.
23 Carbonnier J., Droit civil, Les biens, PUF (Thémis), 1975, p. 57 et ss.
24 La propriété s’étend chaque jour davantage aux biens incorporels et la « propriété intellectuelle » reçoit une protection internationale (Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle) cf. Josserand L., « Configuration du droit de propriété dans l’ordre juridique nouveau », in Mélanges Sugiyama, p. 95 et ss. ; Ripert G., Les forces créatrices du droit, Paris, L.G.D.J. 1955, p. 198 et ss. ; Rouast A., « L’évolution du droit de la propriété » in Travaux de l’Association Henri Capitant Tome I, 1945, p. 45 et ss. ; Cátala P., « La transformation du patrimoine dans le droit moderne », in Revue trimestrielle de droit civil, 1966, p. 185 et ss.
25 Cité par Malafosse J., de Histoire des institutions et des régimes politiques, de la Révolution à la IVe République, Paris, Editions Monchrestien, 1975, p. 21.
26 Marx K., Œuvres, Economie I, Paris, Gallimard (Pléiade), 1965, p. 175. Dans le Capital, Marx écrit : « A l’origine, le droit de propriété nous paraissait comme fondé sur le travail personnel. Du moins, il nous fallait admettre cette hypothèse. En effet, les propriétaires qui se faisaient face avaient tous les mêmes droits ; l’un ne pouvait acquérir les marchandises de l’autre qu’en cédant les siennes et celles-ci ne pouvaient provenir que du travail... Actuellement la propriété nous paraît chez le capitaliste comme le droit de s’approprier sans payement le travail d’autrui ou le produit de ce travail ; chez l’ouvrier, comme l’impossibilité de s’approprier son propre produit. La séparation entre la propriété et le travail devient la conséquence nécessaire d’une loi qui semblait partir de leur identité ».
27 Cf. Ionasco A., « Les types et les formes de la propriété en droi socialiste »„ in Revue internationale de droit comparé, 1969, p. 499 et ss. ; pour une étude plus systématique des droits socialistes cf Davis R., Les grands systèmes de droit contemporains, Paris, Dalloz, 1966, 2e partie : Les droits socialistes, p. 155 à 314. Le principes du marxime-léninisme, Moscou, Editions du Progrès, 1961 (Collectif) ; Hazard J.N. et Shapiro I., The Soviet Legal System, New York, 1962 ; Colloque de Bruxelles sur le droit de propriété dans les pays de l’Est, Université libre de Bruxelles, 1963.
28 On connaît la corrélation que certains travaux tels que ceux de M. Weber et de J. Schumpeter ont établie entre le christianisme et l’avènement du capitalisme moderne, cf Weber M., L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, Paris, Pion, 1964, traduction J. Chavy.
29 Cf Trois encycliques sociales, Texte annoté par R. De Montvalon, Paris, Seuil, 1967.
30 Certains auteurs pensent que l’Eglise ne s’est jamais désintéressée de la politique encore moins des questions sociales ; elle serait même héritière d’une « tradition civilisatrice et humanisante, d’une contribution à la constitution de la morale concrète de vastes sociétés, d’un rôle dans le progrès moral au cours de l’histoire », Eglise et société économique, Paris, Ed. Aubier, 1969, p. 47 par J. Y. Calvez et Y. Perrin. Une telle affirmation pourrait donner lieu à des débats. Disons pour notre sujet que l’encyclique « Rerum Novarum » représente à tout le moins une innovation dans la continuité.
31 Cf Jansse L., La propriété. Le régime des biens dans les civilisations occidentale. Paris, 1953. « La propriété en question ? Evolution des structures de propriété dans les sociétés modernes » in Revue Economie et humanisme No 121, 1959 ; pour une appréciation critique de ce courant de pensée, cf. Ripert G., Les forces créatrices du droit, Paris, L.G.DJ. 1955, notamment p. 163 et sa position à l’égard de la doctrine due christianisme social p. 228 et ss. ; id., Les aspects juridiques du capitalisme moderne, Paris, LGDJ, 2e édition, 1951, notamment le ch. V sur le libéralisme et le dirigisme ; Ferretjans J.P., Essai sur la propriété sociale. De la propriété sociale à la propriété collective : l’expérience yougoslave de socialisation de l’agriculture, Paris, LGDJ, 1963.
32 Entre autres celle d’Emmanuel Mounier qui donne de la propriété une interprétation personnaliste selon laquelle la propriété serait une projection de la personne humaine, à la fois expression e un des moyens de défense de la liberté. Voir à ce sujet son ouvrage De la propriété capitaliste à la propriété humaine, Paris, 1936, in Oeuvres de Mounier, Tome 1, p. 421 et ss., Paris, Seuil, 1961.
33 Les transformations générales du droit privé depuis le code Napoléon, Paris, Alcan, 1e édition 1905, 2e édition 1912 ; id., l’Etat, Paris, Alcan, 1912, p. 4 et ss.
34 Traité de droit constitutionnel, tome III, p. 463. On est tenté de voir une certaine parenté entre la doctrine de Duguit et celle d’A. Comte selon laquelle chaque citoyen devrait être un fonctionnaire public et que « ce principe doit s’étendre jusqu’à la propriété, où le positivisme voit surtout une indispensable fonction sociale ». Système de politique positive, tome I, p. 154.
35 Cf. Carbonnier J., Flexible droit, textes pour une sociologie du droit sans rigueur, 3e édition, Paris, LGDJ, p. 189 à 216 ; Terre F., Esquisse d’une sociologie du droit de propriété, Annales Faculté de droit de Lille, 1966, p. 417 et ss.
36 Cf. Rouast A., L’évolution du droit de propriété, op. cit., p. 45.
37 Cf. Thery R., « De l’utilisation à la propriété des choses », in Le droit privé-français au milieu du xxe siècle, Paris, LGDJ, 1950, Tome II, p. 17 et ss. ; Morin G., « Le sens de l’évolution contemporaine du droit de propriété », ibid, p. 3 à 16 ; Savatier R., Les métamorphoses du droit privé, Paris, Dalloz, 1964, p. 273 et ss. ; Ourliac P. et Juglart M. de, « Le nouveau statut du fermage » in Semaine juridique, 1975, I, 1732. La croissance des villes et son influence sur le régime juridique de la propriété immobilière, Travaux de l’Association Henri Capitant. 1966.
38 Le nouvel Etat industriel, Paris, Gallimard, 1967, p. 148, chapitre XII : Les motivations dans la perspective de l’histoire.
Auteur
Institut universitaire d’études du développement, Genève.
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