Propos
p. 11-12
Texte intégral
1Réuni à Heidelberg la veille de l’ouverture de la Conférence de Rio de 1992, des éminents savants l’ont déclaré urbi et orbi : seule la science et la technique peuvent satisfaire les exigences contradictoires de l’environnement et du développement. C’est par des innovations opérationnelles que les hommes seront donc capables de concilier les lois de la biosphère avec les principes qui régissent la vie collective.
2“La technostructure – disait Marx – est déterminante en dernière instance”, dans ce sens qu’elle influence de plus en plus notre manière de penser et d’imaginer les rapports humains. Elle apparaît aux yeux de ceux qui détiennent le pouvoir de décision comme source ultime d’efficacité mais aussi comme ultime instrument de communication.
3Il semble bien que nous soyons, dès lors, tous appelés à participer à ce “vaste programme” qu’est l’universalisation d’un seul et unique langage, à la mondialisation d’un seul et unique mode de désignation des choses, d’une seule et unique manière de lire l’histoire. Cette entreprise de “globalisation des esprits” fonde sa légitimité sur un impératif difficilement contestable : “Il faut à tout prix protéger l’environnement.” Voilà une expression très utilisée de nos jours, banale, consensuelle, qui, loin de remettre en question la vision technocratique de notre monde, souligne implicitement la nécessité de l’instauration d’un ordre écologique, au double sens de contrainte et d’idéal, de la gestion de la planète.
4Et si cette perspective à la fois autoritaire et gestionnaire négligeait en grande partie les héritages culturels, entraînant le mépris pour les nombreuses institutions sociales et politiques que les humains ont créées au cours des siècles ?
5Le titre de cet ouvrage, Ecologie contre nature, prétend traduire la problématique mais aussi les contradictions qui caractérisent cette dérive environnementaliste.
6Pour interroger ce nouvel ordre écologique, nous avons choisi de faire appel, encore une fois, au concept d’ingérence. En effet, après deux ouvrages consacrés respectivement à l’étude des phénomènes d’ingérence humanitaire et économique, il fallait clore la série avec un livre qui fasse le point sur les différents éclairages de l’ingérence écologique.
7Certains auteurs ont abordé cette problématique à partir de questions issues de leurs disciplines respectives. D’autres ont privilégié une approche plus empirique et proposé d’analyser le rôle joué par certains événements, comme la Conférence de Rio de 1992, dans la mise en place de l’ordre de l’ingérence.
8Le lecteur pourra ainsi observer ou découvrir le phénomène de l’ingérence écologique en liaison avec “l’éthique globalitaire” et “la culture du mépris” ; il le retrouvera derrière le “nouveau partenariat” proposé aux communautés autochtones ; il le découvrira sous la forme d’une rupture, opérée par notre civilisation, entre “le vécu naturel” d’une part et le savoir accumulé au sujet de notre rapport à tout ce qui est “naturel” d’autre part. Mais l’ingérence écologique apparaît aussi dans toute son ambiguïté et son indétermination lorsqu’on examine son rôle au sein des institutions juridiques et dans le domaine des politiques démographiques. Le thème est également traité dans sa dimension politique, notamment sous l’angle des relations conflictuelles entre le Nord et le Sud en ce qui concerne la question des déchets et des enjeux politiques et culturels liés au processus de globalisation.
9Les nombreuses questions soulevées dans la rubrique “Lignes” sont reprises, commentées, critiquées, illustrées à l’aide de témoignages et de références bibliographiques supplémentaires dans les sections “Controverses”, “Paroles” et “Points d’appui”.
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