L’avenir au présent : le développement comme routine
p. 49-64
Note de l’auteur
Paru originellement sous le titre “When Tomorrow is Today: Development as the Idiom of Routine” in: Ethnos, the Ethnographical Museum of Sweden, Stockholm, Vol. 49:III-IV, 1984, pp- 250-265.
Texte intégral
1Comprendre ce qui nous entoure, rendre le monde compréhensible, constitue incontestablement l’une des préoccupations majeures du genre humain. Pour ce faire, nous interprétons des phénomènes ou inférons des liens de causalité entre eux, créons des schèmes de catégorisation et nous dotons de langages qui non seulement reflètent notre compréhension des choses mais aussi la modèlent. Dans notre monde, les questions précèdent les réponses, les problèmes les solutions, l’indécision les décisions, les rôles sont pré-attribués, les organismes de développement aident au développement et, pour paraphraser Harris (1969), les réparateurs de télés réparent des télés.
2Les systèmes de causalité ainsi créés sont générateurs de logique, d’ordre et de sens : ils rendent le monde compréhensible. Nous vivons tous, comme cela a été dit, dans un monde “naïf”. Les faits nouveaux de la vie quotidienne sont digérés et assimilés à des notions préconçues (que parfois même ils modifient), et cela se produit généralement à travers la discussion et la communication entre personnes qui partagent la même conception du monde, des collègues de travail ou les Indiens d’une réserve par exemple.
3C’est là, bien sûr, la raison fondamentale pour laquelle tout sociologue effectuant des recherches sur sa propre société est désavantagé au départ. Les anthropologues sont depuis longtemps conscients de l’avantage qu’il y a à aborder une société de l’extérieur. Ainsi, nous prétendons qu’il est possible de s’interroger sur des phénomènes qui, aux yeux des membres de la société dans laquelle ils se produisent, coulent de source. Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que maints aspects de nos propres sociétés soient peu connus. Pour en venir au propos du présent article, il est intéressant de remarquer que la logique du fonctionnement des administrations n’a fait que tardivement l’objet d’analyses autres que simplificatrices. Il a en effet fallu attendre la fin des années 70 pour que soit véritablement mise en cause la “naïveté” de l’approche fonctionnaliste dans les recherches concernant les institutions administratives. En tant qu’objets d’étude, elles n’étaient enfin plus considérées, selon la tradition webérienne, comme des entités purement fonctionnelles, destinées à l’exécution de tâches déterminées, mais peut-être, selon March et Olsen (1976), comme : un ensemble de procédures vouées à l’argumentation et à l’interprétation tout autant qu’à la recherche de solutions et à la prise de décisions. Tout choix suppose la conjonction de problèmes et de sentiments en quête de décisions permettant de les exprimer, de solutions en quête de difficultés à résoudre, de participants en quête de problèmes ou de plaisir.
4L’abandon de la conception “naïve” de la démarche administrative semble être la condition préalable à toute analyse de la relation entre les organismes de développement et ceux qui sont censés bénéficier du développement. Cette question a été en partie traitée à la faveur d’une analyse des échecs de certains projets de développement, réalisée dans une réserve indienne du Canada (Lithman, 1983). La thèse centrale de cette analyse était que chacun des acteurs des projets de développement - les membres de la communauté indienne, les dirigeants politiques indiens, les agents de l’administration, les consultants extérieurs, etc. - avait des intérêts distincts. Les projets de développement devinrent des champs d’activité où s’exprimèrent des intérêts qui étaient dans une large mesure étrangers à leur réussite. Toutefois, ces intérêts ne devaient pas être compris d’une manière purement instrumentale, mais plutôt comme des attitudes fondamentalement culturelles. Au départ, les concepts d’habitus et de pratiques ont été empruntés à Bourdieu (1972, 1980). Cette analyse a permis de démontrer par exemple que, pour les dirigeants politiques de la communauté indienne, l’autonomie de cette communauté constituait un objectif beaucoup plus important que les éventuels avantages économiques découlant de la réussite de tel ou tel projet de développement. De même, les actions des employés de la Direction fédérale des Affaires indiennes ont pu être analysées en fonction des impératifs de l’institution elle-même, par exemple sa propre survie dans le long terme, plutôt qu’en fonction de leur vocation à garantir la réussite des projets.
5Mais alors, si les protagonistes ont des intérêts différents à faire valoir et si le résultat des projets est dans une large mesure marginal par rapport à leurs intérêts et à leurs activités, quel lien les unit ? Et comment font-ils pour obtenir toujours et encore les ressources, principalement des crédits alloués par le parlement, qui leur permettent de financer de nouveaux projets ? Normalement, une succession d’échecs devrait entraîner une réduction des ressources, mais tel n’a jamais été le cas en ce qui concerne le développement économique des communautés indiennes. Enfin, et cela est à certains égards la question la plus intéressante, comment les divers acteurs des projets de développement parviennent-ils à surmonter leurs profondes différences d’ordre ethnique et autre, de manière à coopérer suffisamment pour que chacun tire au moins quelque avantage de chaque projet ? L’intérêt des réponses à ces questions réside dans leur dimension à la fois théorique et pratique. L’analyse qui suit se fonde, certes, sur des données provenant du contexte canado-indien, mais elle est évidemment applicable bien au-delà de ce cas précis.
Le contexte canado-indien : contradictions et conflit ordonné
6Le chercheur qui se penche sur la situation canado-indienne est de prime abord frappé par un certain nombre de contradictions, ou plutôt de contrastes aveuglants. Ainsi, la pauvreté des Indiens s’oppose à la richesse des “Blancs” euro-canadiens. Ou encore le rythme insignifiant du changement au sein des communautés indiennes s’oppose à l’existence d’une vaste structure administrative, le Département des Affaires indiennes et inuits, qui a la haute main sur d’imposantes ressources humaines et financières et qui a pour raison d’être le “développement” des communautés indiennes. Le troisième aspect frappant est bien entendu le phénomène ethnique, omniprésent. La division entre Indiens et Blancs, avec tout ce qu’elle suppose de sectarisme, de préjugés, de disparités sociales et de stéréotypes ethniques, caractérise à maints égards la vie sociale (Lithman, 1978).
7Il va sans dire que ces contrastes ne sont pas les simples résultats de l’observation scientifique. Ils alimentent les conversations quotidiennes des Indiens, des Blancs du voisinage et du personnel des organismes de développement. Et ils sont fréquemment évoqués, surtout parmi les Indiens, avec une émotion et une colère intenses.
8Dans un tel contexte, on est surpris d’entendre parler d’un système social Indien-Blanc, au sens où il y a interaction et où des ressources circulent entre les deux pôles et même parfois entre des personnes. Mais le plus surprenant est peut-être, étant donné l’opinion que chacun a de l’autre, le fait que les autorités administratives des communautés indiennes et le Département des Affaires indiennes et inuits parviennent encore à entretenir une relation. Bien entendu, il y a de nombreuses ruptures dues au fait que l’une des parties cherche à imposer telle ou telle ligne de conduite à l’autre. Bien entendu aussi, c’est à de rares exceptions près le Département des Affaires indiennes et inuits qui est à l’origine de l’épreuve de force. Dans l’ensemble, néanmoins, la relation subsiste puisque la chaîne de l’interaction n’est pas interrompue. Chaque partie est parfaitement en mesure de savoir à l’avance comment ses actions seront reçues par l’autre, étant entendu qu’aucune ne souhaite une rupture irréversible. Toutes deux peuvent donc agir dans la quasi-certitude que l’évolution des choses est prévisible et que, dans certaines limites, leur relation se fonde sur le principe du donnant - donnant (les caractéristiques de l’interaction des Indiens et des Blancs sont décrites dans Lithman, 1978, 1983).
9Pour comprendre comment les parties parviennent à maintenir entre elles une relation qui permet de traiter les affaires courantes en dépit des oppositions de fond, il convient de s’intéresser au langage du développement. Comme on le verra, le langage, d’une part remplit une indispensable fonction de médiation entre les différents acteurs, et d’autre part joue un rôle important pour permettre aux organismes de développement de légitimer leur action et d’accéder au financement. Pour bien saisir comment les choses se passent, nous commencerons par nous interroger sur ce que chacun des acteurs entend par “développement” et nous analyserons ensuite les propriétés du langage du développement.
Le développement pour retrouver l’“indianité”
10Dans la communauté indienne où ont été puisées certaines des données sur lesquelles se fonde le présent article1, l’un des rares points sur lequel tout le monde s’accorde est que “nous avons besoin d’un peu de développement ici”. Mais il n’a pas été facile de saisir ce que cela voulait dire concrètement. Avec le temps, j’ai fini par comprendre que le développement représente moins un objectif précis que le désir de venir à bout de certaines circonstances du présent : la pauvreté et la dépendance qu’elle engendre, le système d’enseignement inadapté et peut-être surtout, la pénurie d’emplois. Toute amélioration de la situation dans ces domaines permettrait, pense-t-on, de laver les stigmates de l’interaction entre Indiens et Blancs. Grâce à la prospérité engendrée par la création d’emplois, la nécessité de dénigrer l’interaction ethnique diminuerait. Il en irait de même pour un meilleur niveau d’instruction.
11D’une certaine manière, le désir de changer le présent a permis non seulement de préciser davantage les aspects dont on voulait se débarrasser mais aussi, bien que dans une moindre mesure, de définir les grandes lignes de ce qui constituerait un résultat souhaitable du “développement”. Ce résultat pourrait être présenté sous la forme d’une liste contenant des éléments tels que de bons et nombreux emplois dans un contexte exclusivement ou presque exclusivement indien, un système d’enseignement indien permettant aux enfants de parvenir à un niveau d’instruction au moins égal à celui des enfants blancs (non pour entrer en concurrence avec eux mais pour construire une communauté indienne qui inspire une légitime fierté à ses membres). Il serait toutefois plus juste de retenir l’aspiration à la création d’une communauté indienne à part entière permettant à tous de mener une existence riche et satisfaisante, une communauté dont les réalisations seraient au moins égales à celles des communautés blanches et au sein de laquelle les Indiens n’auraient à souffrir ni du sectarisme racial ni d’une infériorité matérielle, sociale ou culturelle.
12Cependant, pour ce qui est de la manière de parvenir au développement et d’améliorer la situation présente, deux approches quelque peu différentes s’affrontent. Si tout le monde admet que les membres de la communauté doivent assumer l’entière responsabilité des changements, certains sont plus que d’autres de l’avis qu’une assistance des non-Indiens est nécessaire. Cette deuxième opinion n’a toutefois rien à voir avec l’état d’esprit antérieur de certains membres de la communauté, qui estimaient que les Indiens n’étaient pas capables de se débrouiller seuls (Lithman 1978). La question qui se pose aujourd’hui est plutôt de savoir s’il se trouve des Blancs qui aient suffisamment de bon sens pour accepter que l’initiative vienne des Indiens. En effet, la plupart des Blancs sont considérés comme étant intolérants et les rares autres comme incapables d’adapter leurs connaissances techniques aux particularités d’une réserve indienne et de suivre les directives des dirigeants politiques de celle-ci.
13L’idée que, pour les Indiens, le développement équivaut au rejet de certains aspects du présent mais ne s’appuie pas sur un modèle de société futuriste est confirmée par le fait qu’il est associé à la redécouverte de l“ ‘indianité”. Alors que, jusqu’à la fin des années 60 et au début des années 70, les rapports entre Indiens et Blancs constituaient l’un des principaux sujets de discussion dans les réserves, il est significatif que le débat se soit par la suite résolument orienté vers ce que l’on peut appeler la définition de l’“indianité”. Celle-ci est perçue comme une qualité que possédaient les anciennes communautés indiennes, qualité qui a été pervertie ou en partie perdue en raison de l’assujettissement des Indiens aux Blancs et qu’il faut maintenant redécouvrir ou réhabiliter. En même temps que cette construction d’une identité culturelle “positive”, le “développement” doit donc permettre la création d’un environnement spécifiquement indien au sein duquel cette identité pourra s’exprimer.
14Ainsi, la conception indienne du développement se caractérise essentiellement par la volonté d’en faire une question exclusivement indienne. Le but, la réalisation et la justification du développement, y compris les références historiques, sont clairement situés dans un univers défini comme indien à part entière.
Une administration “blanche” réformée
15Le Département des Affaires indiennes et inuits (DAII) est une grande administration responsable de toutes les questions concernant les Indiens et les Inuits qui relèvent du gouvernement fédéral. Il a un budget de 1,7 milliard de dollars et emploie environ 5’800 personnes (1982). Toutefois, une très importante partie de ces ressources est allouée aux écoles et autres établissements d’enseignement des communautés indiennes et inuits. De fait, le programme d’enseignement absorbe 27 % de l’ensemble du budget annuel. Le DAII, qui fait partie du Ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada, a son siège à Ottawa et des bureaux régionaux dans chaque province et territoire ; il a également des agences dans plusieurs villes. En ce qui concerne l’action sur le terrain, les “intendants des Indiens” étaient, dans l’ancien système, chargés de la surveillance au jour le jour des communautés indiennes des réserves. Rebaptisés “conseillers des administrations locales”, ils se consacrent désormais davantage à la réalisation d’activités aux échelons régional et local. Cette évolution s’est traduite par une augmentation des ressources mises à la disposition des dirigeants des communautés indiennes. De cette façon, les réserves ont la possibilité d’administrer elles-mêmes certains programmes - d’assistance sociale, de logements sociaux, etc. -, qui étaient auparavant entre les mains du seul DAII. Récemment, certaines communautés ont également été autorisées à assumer une plus grande responsabilité dans les programmes d’enseignement.
16Les raisons de ces changements, qui ont débuté il y a maintenant plus de 15 ans, sont multiples et variées. La tempête de protestations soulevée dans les années 60 par le sort réservé aux Indiens a mis en cause l’ancêtre du DAII, la Direction des Affaires indiennes, et a déclenché le mouvement de réformes. Si l’attitude autoritaire et paternaliste qui a fait la réputation de l’ancienne Direction avait pu perdurer, c’était à cause de l’absence de pouvoir des Indiens et de l’indifférence de la population en général. Ainsi, cette institution fossilisée fut totalement incapable de résister à la pression populaire visant à accorder aux Indiens le droit de dire leur mot dans la gestion de leurs propres affaires (Hawthorne 1966, 1967). L’émergence, dans différentes régions du Canada, de dirigeants indiens prêts à faire entendre leur voix a également contribué à faire passer l’idée d’un transfert de responsabilités aux Indiens. Autre facteur, et non des moindres, la multiplication des programmes, due à l’extension de l’État-providence dans les années 60 et 70, a rendu absolument ingérable l’ancien système dans lequel un seul intendant assumait la responsabilité d’une communauté tout entière, voire de plusieurs. En d’autres termes, la structure existante se trouva submergée par la tâche à accomplir et il fallut inventer de nouvelles méthodes de travail. A cela s’ajoute le fait que le personnel concerné ne vit pas dans cette évolution une menace contre l’emploi. Ce fut d’ailleurs le contraire qui se produisit. En effet, l’augmentation des budgets et de la charge de travail entraîna à la fois un accroissement notable des effectifs du DAII et une augmentation des fonds transférés aux communautés indiennes.
17Aujourd’hui, la quasi-totalité des activités du DAII sont classées parmi les “efforts de développement”. Les différents volets du programme sont intitulés “développement économique”, “développement social”, “développement participatif”, etc. Diverses publications mettent l’accent sur la composante développement du mandat du DAII et en énumèrent les objectifs principaux et secondaires. Mais l’impression que le développement n’est pas quantifiable provient peut-être surtout du fait que toute action, toute orientation est décrite dans le langage codé du développement. Il se pourrait que, pour le DAII, le fait de produire, comme il le fait depuis la fin des années 60, une documentation pléthorique sur le développement marque une volonté de rupture avec une approche plus paternaliste et plus autoritaire, mais aussi plus transparente, de la question indienne. Certes, l’attitude du DAII a profondément changé. Les militaires à la retraite qui, en leur qualité d’intendants, dirigeaient leurs communautés à la baguette, distribuant les subventions sociales selon leur bon vouloir et considérant qu’ils avaient pour mission de faire régner l’ordre ou, dans le meilleur des cas, d’éduquer les Indiens, sont partis. Aujourd’hui, même aux échelons supérieurs du DAII, on souhaite sincèrement que le “problème indien” disparaisse et on estime que, pour cela, une assistance est nécessaire. Ce changement de climat s’est également traduit par le recrutement d’un grand nombre de personnes connues pour leurs convictions “radicales” en matière de travail social et pour leur militantisme pro-indien.
18Cependant, ce serait induire le lecteur en erreur que de clore la présentation du DAII sur cette image relativement positive2. Les mécanismes qui entravent la réalisation du développement (économique) dans les communautés indiennes et le rôle non négligeable du DAII à cet égard ont été exposés ailleurs (Lithman 1978). Dans le présent texte, nous nous contenterons de démontrer comment le développement est utilisé en tant que langage.
Les consultants externes doivent maîtriser le langage du développement
19Bien entendu, les consultants et hommes d’affaires ne représentent pas une catégorie d’acteurs homogène, étant donné qu’ils jouent des rôles différents. Néanmoins, un certain nombre d’observations générales s’appliquent parfaitement aux uns et aux autres.
20Il n’est pas rare d’entendre dire que tel consultant est bien placé sur le “marché indien”. C’est entre autres le DAII qui a favorisé l’apparition de ce marché en faisant fréquemment appel à des consultants pour explorer les ramifications des projets de développement à l’étude. En procédant de cette façon, il peut justifier sur la base d’un avis extérieur sa décision d’appuyer ou non la réalisation de projets. Une telle méthode est, certes, en partie motivée par le manque de personnel qualifié, mais sa fonction de légitimation vis-à-vis de la hiérarchie administrative, de la sphère politique et du grand public est sans aucun doute la plus importante.
21En outre, des hommes d’affaires sont souvent associés aux opérations de développement menées dans les réserves indiennes. Leur participation va de la simple gestion d’entreprises à un véritable partenariat. Elle s’accompagne toujours de subventions substantielles ou d’une forme quelconque de rétribution. Pour eux, les risques financiers sont généralement nuls, étant donné que le DAII assume seul ou avec d’autres institutions fédérales ou régionales la totalité de ces risques. En réalité, ce qui pourrait apparaître comme un engagement des hommes d’affaires en faveur des communautés indiennes équivaut bien souvent à une “bonne affaire”. Il s’agit plutôt d’un service de consultation rétribué ou d’un moyen d’obtenir des avantages à bon compte. Tel est le cas lorsqu’un homme d’affaires s’engage à acheter la production d’une entreprise sur une période donnée en contrepartie de la mainmise sur la gestion de cette entreprise située dans la réserve.
22Tant pour les consultants que pour les hommes d’affaires, qui sont des opérateurs de poids sur le marché des biens et des compétences, travailler avec le DAII et les réserves représente un débouché économique non négligeable. Même s’ils s’intéressent au sort des Indiens, ils sont fondamentalement motivés par le profit.
23Dans le contexte du présent article, il est intéressant d’observer que certains consultants et hommes d’affaires réussissent beaucoup mieux que d’autres à accaparer le “marché indien”. L’interprétation “naïve” de cette observation consisterait à déduire que certaines sociétés de consultants ou certains chefs d’entreprise sont plus doués que d’autres pour ce genre de travail et parviennent donc à de meilleurs résultats.
24Deux observations complémentaires démentent toutefois cette explication. Premièrement, il ne semble pas y avoir de corrélation entre la réussite ou l’échec d’un projet et le maintien en place de telle entreprise ou personne. Par exemple, une société de consultants a conservé pendant une bonne partie des années 70 une large part du “marché indien” alors que ses prestations étaient loin d’être brillantes. Deuxièmement, l’étude du comportement des consultants et hommes d’affaires “qui réussissent” démontre que leurs qualités exceptionnelles résident d’une part dans leur aptitude à établir des relations fonctionnelles avec diverses communautés indiennes et avec le DAII, et d’autre part à se poser comme médiateurs.
25Cette qualité de médiateur leur est conférée par leur statut d’intervenant “extérieur” (Frankenberg 1957) et par leur aptitude à trouver un langage acceptable à la fois par les Indiens et par le DAII. En outre, ce statut les amène parfois à servir de tampons entre les Indiens et les représentants du DAII. En effet, plutôt que de laisser leurs relations se tendre davantage, les Indiens et le DAII préfèrent utiliser le consultant comme un “bouc émissaire”.
26Le langage utilisé par les “bons” consultants consiste à inscrire toutes les propositions précises de caractère économique dans un discours qui renvoie au développement. Ce mélange de rhétorique du développement et de propositions précises offre donc une multitude de critères de faisabilité. Les avantages à long terme sur le plan du développement sont entremêlés avec des hypothèses précises, de telle sorte qu’il est rétrospectivement impossible de déterminer si un projet donné a été approuvé en raison des perspectives économiques particulières qu’il offrait ou en raison de ses éventuels effets sur le développement, tels que la formation des travailleurs.
27Il est également significatif que chaque projet de développement mette l’accent sur la participation des Indiens, sur l’autodétermination, etc., alors qu’il comporte un dispositif de supervision tripartite comprenant la société de consultants, le DAII et les Indiens. Pour résumer, le succès des chefs d’entreprise, consultants et hommes d’affaires extérieurs qui opèrent sur le “marché indien” est moins lié aux compétences propres de ceux-ci qu’à leur capacité d’utiliser leur statut d’intervenants extérieurs et de manier le langage du développement. Ils parviennent ainsi à détourner au moins partiellement l’attention des résultats concrets immédiats d’un projet et des relations des acteurs, pour la concentrer sur le “développement”.
La société de contribuables : un enjeu
28Outre les principaux acteurs des projets de développement décrits ci-dessus, un autre “participant” doit être pris en considération : il s’agit de la société au sens large. Celle-ci exerce en effet à plusieurs égards une influence sur le DAII, sur les communautés indiennes et sur d’autres acteurs. La société nous intéresse ici parce qu’elle renferme les notions de récompense et de sanction et qu’elle constitue la toile de fond idéologique. Les notions de récompense et de sanction sont concrétisées par les hommes politiques et la presse certes, mais aussi à travers le concept général de “contribuable”, qui impose un certain niveau de prestations et de résultats. En tant que toile de fond idéologique, la société impose des critères ou des objectifs qui gouvernent l’utilisation des fonds publics et régissent les comportements des acteurs économiques. Parallèlement, elle détermine les problèmes qui relèvent de l’intervention du secteur public et ceux qui doivent être résolus par des individus ou des groupes d’individus.
29Compte tenu de ce scénario global, la question indienne met à jour une contradiction de la pensée canadienne. A de nombreux égards, le sort des communautés indiennes constitue un type de problème qui ne relève pas de l’intervention du secteur public. Bien sûr, les Canadiens reconnaissent dans l’ensemble que le gouvernement doit fournir une infrastructure, des routes par exemple, et des services, comme les hôpitaux, et que ces équipements ont peut-être été attribués inéquitablement entre les zones rurales et les zones urbaines notamment. Mais ils n’estiment pas que le gouvernement est tenu de garantir des emplois aux gens. Ils sont au contraire convaincus que chercher à mener une existence satisfaisante est l’affaire de chacun. Qu’il faille pour cela s’installer ailleurs est considéré comme une chose normale et comme faisant partie des aléas de l’existence. En outre, comme le fait observer Stymeist (1975), de nombreux Blancs considèrent que la situation des Indiens constitue une injustice pour les Blancs, non pour les Indiens. Ce sentiment est inspiré par le fait que des sommes jugées considérables sont consacrées aux communautés indiennes, ce qui, entre autres avantages, offre aux Indiens la possibilité de ne pas se déplacer, alors que les Blancs n’ont pas ce choix. Ces derniers estiment donc que les transferts d’argent destinés aux communautés indiennes alourdissent indûment les charges des contribuables et devraient donc cesser.
30Or, le gouvernement et la classe politique dans son ensemble ne voient pas les choses sous cet angle. Premièrement, ils sont en général plus conscients de ce que la situation des Indiens résulte de la conjonction de facteurs historiques et sociaux et qu’il ne suffit pas pour la modifier d’exiger que les Indiens s’installent dans les villes (les expériences de ce type de “solution” ne sont d’ailleurs guère encourageantes - Lithman, 1978). Deuxièmement, entrent également en jeu la mauvaise conscience vis-à-vis des premiers habitants du pays et la “mystification” de l’“indianité”. Le concept de mystification est utilisé ici au sens où l’entend Cohen (1968). L“ ‘indianité” ne peut se définir par un discours entièrement rationnel. Seul peut en saisir le sens profond celui qui, de par sa naissance (filiation) par exemple, a hérité des facultés qui permettent de la ressentir véritablement. Il est donc, au sein de la société, des personnes – des politiques ou des cadres administratifs - pour lesquelles la spécificité de l’“indianité” rend les communautés indiennes dignes d’une attention spéciale, et qui sont prêtes à défendre cette position.
Un discours décontextualisé permet d’éviter la rupture
31Compte tenu de la complexité de la situation canado-indienne, due au nombre et à la diversité des acteurs en présence, il n’est pas surprenant que de subtils processus d’harmonisation se soient mis en place. Au-delà de la divergence des intérêts, certaines “tâches” doivent être exécutées. Pour les Indiens, il s’agit de veiller à ce que les gens ne meurent pas de faim et de froid à ce qu’ils soient vêtus, qu’ils aient du travail, que les enfants aillent à l’école, qu’il y ait de l’eau potable, que les ordures soient enlevées, etc. Il est également vital d’accroître l’autonomie de la communauté. Pour le DAII, il s’agit d’obtenir les crédits nécessaires du parlement, d’établir la liaison avec les communautés indiennes, de prouver que le travail accompli est sérieux et que le Département lui-même fonctionne correctement. Les consultants et les hommes d’affaires doivent fournir des rapports, proposer des “idées de développement” et, d’une manière générale, faire valoir leurs “compétences”. Tout cela présuppose des transferts de fonds, un système d’administration des communautés indiennes qui soit en mesure de gérer ces fonds et les tâches à effectuer, l’inscription de crédits au budget fédéral, des mécanismes de coordination au sein du DAII, etc. Cet ensemble de logistique, de transferts et de négociations constitue ce que l’on pourrait appeler la routine.
32Comme nous l’avons suggéré plus haut, l’harmonisation passe par le langage du développement. Quelle est la spécificité de ce langage ? De l’analyse des projets, il ressort que les traits saillants du discours du développement sont la “détemporalisation”, le transitoire, le flou et la “décontextualisation”.
33“Détemporalisation”, au sens où toute activité enveloppée dans la rhétorique perd sa référence temporelle. De ce fait, il est impossible de fixer une date précise à laquelle évaluer le résultat du projet. En revanche, on peut toujours arguer que, dans la perspective du développement, tout projet est bénéfique : acquisition de compétences, de méthodes de travail, d’expérience, etc. Dans cette perspective, le fait que le projet ait abouti à une catastrophe au regard du résultat escompté, la création d’une entreprise viable par exemple, n’entre absolument pas en ligne de compte.
34Le qualificatif de transitoire renvoie également à la notion de temps. Son utilisation dans le discours est censée garantir que, par définition, les projets cessent dès lors que leur but - le développement est atteint. Cette référence temporelle permet de combler l’écart entre ce que la “société” est disposée à accepter et l’action menée par les organismes de développement. Elle s’applique tant au financement et aux effectifs du DAII qu’aux très nombreux programmes réalisés dans des domaines où la participation du gouvernement apparaît comme idéologiquement suspecte ou comme tenant de la concurrence déloyale.
35Les porte-parole du gouvernement font également valoir ce caractère transitoire pour contrer les accusations de Blancs selon lesquelles “on donne trop aux Indiens” (voir plus haut la description du sentiment d’injustice que la situation des Indiens suscite chez les Blancs). En pareil cas, le langage du développement permet d’objecter que l’aide est accordée aux Indiens temporairement, pendant une phase de transition.
36Le flou se manifeste très bien, par exemple, dans l’impuissance à définir des critères précis pour évaluer l’échec ou la réussite d’un projet, décider de sa continuation ou de sa clôture. Des données économiques les plus pointues à l’analyse des modifications de comportement et des phénomènes psychologiques, une multitude de paramètres sont utilisables pour déterminer en quoi tel projet est porteur de développement ou constitue un pas dans cette direction. Cette déclaration d’un directeur général du DAII illustre bien la difficulté d’apprécier la réussite dans ce contexte : “Dans le domaine du développement, il est important de laisser les gens commettre des erreurs”. Ainsi, même les erreurs sont une bonne chose dans le processus du développement.
37Le flou ressort également de la difficulté à préciser à l’avance, rétrospectivement et pendant la durée du projet les droits et les obligations des différents acteurs. Cela est, dans une certaine mesure, la conséquence logique de la multiplicité des paramètres susmentionnés. Mais le flou est aussi inhérent aux activités de développement elles-mêmes. Étant donné que les protagonistes des projets ont souvent des intérêts différents et inconciliables, une trop grande précision dans la définition des tâches et l’attribution des responsabilités restreindrait la marge de manœuvre dont chacun a besoin pour réaliser ses propres ambitions.
38La “décontextualisation” permet de surmonter certaines des divergences entre les parties, dont la plus évidente est, comme nous l’avons montré plus haut, celle qui sépare les Indiens des Blancs. Elle se manifeste aussi au travers de l’opinion souvent exprimée par les dirigeants politiques des communautés indiennes, que les représentants du gouvernement, les consultants et les hommes d’affaires sont intolérants et condescendants. Quant aux représentants du gouvernement, ils estiment en général que les Indiens leur sont “culturellement” inférieurs et ne savent pas s’organiser.
39En outre, la “décontextualisation” engendre un accord tacite en vertu duquel les défauts que chacune des parties reproche à l’autre, en ce qui concerne des aspects aussi concrets que l’absence de sens des responsabilités en matière financière chez les Indiens et l’excès de bureaucratie au sein du DAII, ne sont pas une cause de rupture.
40L’opinion qu’ils ont les uns des autres pourrait être à ce point perturbatrice si elle était formulée clairement, que la relation se romprait d’une manière ou d’une autre. Dans ces conditions, évoquer cette relation dans le langage du développement équivaut à éluder la réalité.
41Grâce à la “décontextualisation” induite par la rhétorique du développement, ces dangereuses questions revêtent une importance secondaire dans les rapports entre les acteurs, étant entendu que le véritable enjeu consiste à trouver le moyen de parvenir au “développement”. Chacun présume de son côté qu’une fois ce but atteint, les problèmes relationnels entre Indiens et Blancs auront disparu.
Le développement : moyen de perpétuer la routine
42Dans tous les contacts qu’ils ont avec des représentants du gouvernement, l’une des principales préoccupations des Indiens est de créer les conditions d’une plus grande autonomie. Pour cela, ils doivent compter, entre autres, sur un apport d’argent régulier et croissant. Un tel apport risque, certes, d’accroître leur dépendance vis-à-vis de l’extérieur, mais il est nécessaire pour permettre à la communauté de continuer à se procurer un minimum de biens matériels. Étant donné que la participation à différents programmes de développement est la condition préalable à l’obtention de ces fonds ou à leur augmentation, les Indiens jouent le jeu.
43Le DAII est une institution créée par des Blancs et en tant que telle, elle fonctionne à la manière de la société dont elle est issue. Il est rare que son personnel établisse des relations durables avec les communautés indiennes. Le système de promotions et de transferts géographiques est organisé selon l’idée qu’une administration ne doit pas dépendre d’un titulaire de poste. Le mérite est évalué en fonction des tâches relatives au fonctionnement interne de l’institution et non en fonction, par exemple, du résultat d’un projet de développement. Au sein du DAII comme dans la plupart des administrations, tout ce qui contribue à la survie du système est hautement valorisé ; et en l’occurrence, cela est justifié par le rôle essentiel que joue le DAII en faveur du développement des communautés indiennes.
44Enfin, l’intérêt que portent les sociétés de consultants et les hommes d’affaires aux communautés indiennes n’est pas difficile à dévoiler. Pour la majorité d’entre eux, cet intérêt est motivé par le profit. Il arrive, certes, qu’ils se situent dans une perspective à plus ou moins long terme et réduisent leurs prétentions dans l’immédiat. Mais en tout état de cause, la question indienne représente pour eux un moyen comme un autre de faire des affaires, parfois très lucratives (Lithman 1983).
45Bien que chaque catégorie d’acteurs ait des attentes très différentes en ce qui concerne le profit à tirer des projets de développement et que le résultat intrinsèque de ces projets soit marginal par rapport aux objectifs de chacune, le voile du développement leur offre la possibilité d’agir ensemble tout en poursuivant des intérêts personnels. A travers la “détemporalisation”, le transitoire, la prolixité et la “décontextualisation” du langage du développement, une union est possible autour de l’idée que l’argent doit continuer à rentrer. Dans ce contexte, le développement n’a rien à voir avec le changement. Personne n’a vraiment intérêt à placer la réussite des programmes et des projets de développement au-dessus des choix idéologiques et des liens sociaux préétablis. Bien au contraire, le “développement” est devenu un moyen de financer ce qui existe déjà et en ce sens, on peut dire qu’il reproduit la routine.
46Dans ces conditions, se pose la question de savoir par quels artifices la rhétorique du développement peut demeurer un mécanisme efficace pour le financement du statu quo. La réponse réside dans l’observation suivante : ce discours assortit toujours le terme de développement d’un qualificatif. Force est ainsi de constater que le principe directeur des travaux du DAII n’est pas le développement pur et simple mais un développement d’un certain type, qui en remplace toujours un autre. Pendant quelques années, c’était le “développement communautaire” qui était en vogue. Cette expression ne signifiait pas simplement que les communautés devaient se développer ; en effet, peu après son invention, elle a été présentée comme une technique très compliquée exigeant le déploiement de toute la panoplie bureaucratique : longue formation d’“agents de développement communautaire” et mise en place de “structures d’appui institutionnel” très perfectionnées. Si, au départ, le développement communautaire comportait bien quelques bribes d’un certain idéalisme, on ne saurait le prétendre des créations qui suivirent. Le “développement économique”, le “développement coopératif”, le “développement intégré”, le “développement à la base” ont chacun à leur tour été considérés comme le remède par excellence du “problème indien”. Évidemment, ce jeu de collages sous-tend l’idée que les programmes de développement antérieurs ont échoué parce qu’ils ne visaient pas le bon type de développement.
47Toutefois, pour les communautés indiennes et le DAII, l’invention permanente de nouvelles étiquettes prend tout son sens dans la mesure où elle leur permet, directement ou par le biais d’accords financiers, de protéger des intérêts et des arrangements préétablis. Par conséquent, le développement n’est pas un moyen de parvenir au changement mais un moyen de perpétuer la routine, sans jamais déranger les intérêts des acteurs.
Le langage “métacontextuel” pour unir ce que tout distingue
48Conformément à l’analyse qui précède, la rhétorique du développement s’inscrit dans la catégorie des langages que l’on pourrait qualifier de “métacontextuels”. Ce type de langage se caractérise par le fait qu’il apparaît là où le langage ordinaire est trop restrictif, trop abrupt, trop intimidant, où il risque de perturber une relation unissant des acteurs qui souhaitent la conserver. Tel est généralement le cas lorsque les protagonistes d’une relation ne peuvent se permettre de laisser transparaître la pleine connaissance qu’ils ont les uns des autres.
49Bien que ce type de langage3 ait été peu étudié par les anthropologues sociaux et autres spécialistes des sciences sociales, il est probablement beaucoup plus courant qu’il ne semble. Dans notre monde “naïf”, où tout va de soi, où l’apparence fait foi, l’existence de langages “métacontextuels” peut facilement être éludée4. Ceux-ci présentent toutefois un signe distinctif il y a souvent un écart non négligeable entre ce que les acteurs prétendent accomplir et la réalité. Cela étant, il n’y a rien d’incompréhensible à ce que d’imposants programmes de développement ne produisent pas de développement. C’est exactement ce que notre “naïveté” nous pousse à attendre. Les acteurs des programmes de développement, dont il est question dans le présent article, estiment avoir des considérations plus importantes à faire valoir. Et pour ce qui est des Indiens, un observateur extérieur pourrait bien admettre avec eux que renforcer la communauté indienne est une condition sine qua non du “développement”.
Notes de bas de page
1 Le travail de terrain qui a inspiré le présent article comporte 27 mois dans une réserve du Manitoba ainsi que sept mois d’étude de plusieurs communautés du Yukon (Lithman 1979).
2 On trouvera une présentation plus complète du rôle joué par le DAII dans la perpétuation de la situation actuelle des communautés indiennes dans Lithman 1978.
3 Dans Lithman 1979b, la consommation d’alcool est considérée comme servant de langage “métacontextuel”.
4 Cela est vrai au moins pour les formes laïques de ce langage ; si l’on devait y inclure les rites et la mythologie, cette affirmation devrait être modifiée.
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