Le rêve d’un développement sans conflit
p. 101-118
Texte intégral
Introduction
1Le discours autoritaire des années 1980 sur l’ajustement structurel a vécu une métamorphose sémantique majeure au cours des années 1990. Cette métamorphose, toujours en cours, cherche à imposer un discours le plus consensuel possible, débarrassé de toute référence à la notion de conflit. On assiste ainsi depuis quelques années à une floraison de nouveaux concepts dans le discours des organisations internationales tels que « appropriation », « participation », « renforcement des capacités », « inclusion », « capital social » ou encore « cohésion sociale ». Ceux-ci sont présentés comme des éléments clés du nouveau paradigme du développement. Les déclarations récentes de Wolfensohn sont en cela très représentatives : « Le développement n’est pas une question de charité. C’est une question d’inclusion et de renforcement des capacités… Les populations victimes de la pauvreté veulent prendre la parole » ou encore « La participation donne des résultats exceptionnels au niveau des projets et programmes. Et elle peut créer le consensus social qui est le fondement du changement social et des réformes »1.
2Cette évolution du discours dominant traduit paradoxalement la reconnaissance des résistances et des barrières aux changements qui font obstacle aux initiatives de réformes soutenues par les organisations internationales. Les populations sont, pour cette raison, invitées à participer à la « nouvelle stratégie de développement », mais sur un terrain préalablement soigneusement balisé par les représentants de l’ordre mondial. Cet article montrera que l’on assiste en fait à un retour masqué de la problématique du conflit dans la pensée dominante sur le développement. L’idée du caractère conflictuel du développement avait presque complètement disparu à la fin des années 1980 marquées par l’affirmation d’un discours néo-évangéliste sur la fin de l’histoire2. La chute du mur de Berlin symbolisait l’échec des voies alternatives au développement capitaliste et la supériorité d’un système de marché en termes à la fois de viabilité, d’efficacité économique, d’innovation technologique et d’amélioration du bien-être. A partir du constat de l’impasse historique des systèmes socialistes, le nouveau discours hégémonique offre alors à tous les pays la possibilité d’une croissance durable et du développement humain à la condition de s’adapter aux normes de l’économie mondialisée en termes de compétitivité et de flexibilité (ce qui implique notamment l’application du triptyque libéralisation, dérégulation et privatisation).
3La négation de la pluralité des possibles paralyse le débat sur la question de la rationalité d’ensemble de la mondialisation néo-libérale en cours. L’idée de convergence inévitable et désirable dans le cadre d’un processus d’intégration signifie aussi qu’il n’y a plus de facteurs « raisonnables » de conflits – soit entre régions ou entre groupes sociaux – sur la nature du projet de développement à mettre en œuvre. Celui-ci s’impose de lui-même à travers le processus de mondialisation et il profite à tous les participants de l’économie mondialisée. Telle est l’utopie globalitaire du discours néo-libéral sur la mondialisation qui s’impose au début des années 19903. Dès lors, refuser l’intégration ne peut être qu’une démonstration de barbarie, d’archaïsme ou encore de conservatisme socialement et économiquement néfastes4.
4Cette soumission progressive du politique aux contraintes du capitalisme mondial constitue une perte de maîtrise de leur destin par les collectivités citoyennes et provoque un profond malaise social dont le cœur est le sentiment de dépossession, et de vulnérabilité des individus face à des logiques globales sur lesquelles l’ordre mondial ne leur accorde aucun pouvoir5. Mais l’aptitude à s’indigner reste intacte même si on assiste à une perte d’efficacité des institutions qui véhiculaient traditionnellement la critique (syndicats et partis de gauche et sociaux-démocrates) dans leur capacité à obliger le système capitaliste à répondre, au moins partiellement, aux exigences de justice sociale6. Or cette indignation est source de résistance diffuse qui mine l’apparition d’une régulation commune autour d’un projet de développement. Elle conduit à des comportements de défection et à l’extension des pratiques irrégulières propres à une situation d’anomie.
5L’article montrera la façon dont le discours dominant évolue, toujours à la recherche d’éléments de justification d’un ordre mondial en proie à une crise grave de légitimité et à une contestation croissante. Le but de cette offensive idéologique est d’empêcher une déstabilisation du modèle néo-libéral de mondialisation proposé par les élites dirigeantes qui remettrait en cause les politiques d’adaptation conformes aux normes de la mondialisation mises en œuvre en son nom. Nous analyserons, en particulier, la manière très problématique dont le nouvel ordre mondial tente, d’une part, de justifier la participation des populations aux transformations socio-économiques induites par le projet politique dont il est porteur et, d’autre part, de défendre sa gestion des transformations face aux accusations d’injustice.
Vers un nouveau paradigme du développement
6Si au début des années 1980, la dimension sociale avait quasiment disparu de la formulation des politiques de développement au profit de la dimension économique, elle allait toutefois refaire surface progressivement à la suite du constat des coûts sociaux dramatiques des programmes d’ajustement structurel7. La publication par l’UNICEF en 1987 du livre intitulé « L’ajustement à visage humain »8, puis la propagation de préoccupations humaines dans les autres institutions internationales de développement ont marqué l’avènement du nouveau consensus sur la lutte contre la pauvreté et le développement humain autour duquel allait s’articuler le discours dominant dans les années 19909. Dans le cadre de cette évolution, la présentation faite par Joseph Stiglitz en 1998, lors du cycle de conférences Raúl Prebisch organisé par la CNUCED, mérite une attention toute particulière10. A travers la déconstruction de ce texte, nous montrerons qu’il constitue un élément fondateur de la rhétorique réformée de la Banque mondiale mais aussi une illustration de toutes ses contradictions.
7Stiglitz, alors économiste en chef de la Banque mondiale, redécouvre dans son texte que le développement est avant tout un processus de transformation de la société dans son ensemble. Quelle organisation était mieux placée que la Banque mondiale pour constater que, le plus souvent, les efforts de développement contribuent à créer des sociétés duales, avec des enclaves isolées qui se mobilisent pour les réformes et en récoltent les fruits sans que ce processus ne s’étende à l’ensemble de la société et n’en améliore le bienêtre ? Cette absence d’effet catalyseur indique pour Stiglitz l’échec du processus de développement. Toute stratégie de développement doit, par conséquent, faciliter ce processus de transformation, et en identifier les obstacles et les stimulants potentiels. Elle doit aussi reposer sur une vision prospective de ces transformations et sur une série d’objectifs permettant de juger la trajectoire vers le futur souhaité.
8Au nom de la Banque, Stiglitz effectue un véritable mea culpa pour le type de conditionnalité imposé dans les années 1980. S’appuyant sur les rapports d’évaluation internes des projets et programmes soutenus par la Banque, il reconnaît que toute tentative d’imposer le changement de l’extérieur court de grands risques d’engendrer des résistances à l’intérieur et de créer des barrières au changement au lieu de le faciliter11. Dès lors, la mise en place de mécanismes participatifs lors du processus de formulation de la stratégie de développement permettra de construire un consensus autour de la stratégie élaborée et, ainsi, de stimuler un processus d’appropriation des réformes par les populations afin d’accroître leurs chances de succès et réduire les risques d’instabilité sociale et politique12.
9On peut bien sûr imposer aux acteurs certaines actions, mais on ne peut leur imposer la manière dont ils doivent penser. Et c’est cette éventuelle résistance passive ou active aux tentatives de transformations qui affecte leur succès. L’absence de réponse à l’initiative de changement proposée ou les problèmes de gestion des conflits que celle-ci suscite font partie des principaux obstacles au développement. Pour surmonter ces obstacles, il convient de faire l’effort de construire un consensus sur les objectifs et les modalités de cette initiative. Les processus participatifs permettent que les préoccupations concernant les bouleversements liés au changement soient non seulement entendues mais aussi prises en compte. De cette manière, le changement est rendu acceptable et les résistances à celui-ci perdent de leur intensité. Donner la parole aux individus dans la formulation des politiques et dans leur évaluation est le meilleur moyen de leur faire accepter le changement et de les mobiliser pour son succès.
La question du conflit dans le processus de développement
10Ce retour forcé du conflit et de la subjectivité dans le discours dominant rappelle que le processus de développement est loin d’être un processus harmonieux et graduel. C’est au contraire un processus perturbant, marqué par les incertitudes et les ruptures. Il remet en question les hiérarchies et les régulations existantes. Toute initiative réussie de développement lance un mouvement et bouscule l’ordre établi. Elle a besoin, pour être couronnée de succès et transformer la société en profondeur, de convaincre les individus d’y participer, de surmonter leur hostilité ou leur indifférence. A cette fin, la contrainte n’est pas suffisante. Le processus de développement a besoin de la mobilisation des énergies créatrices, de la volonté des acteurs d’investir du temps et des ressources, d’être innovants, de résoudre des problèmes, de faire des sacrifices. Mais cette mobilisation se fait ex ante, bien avant la validation du processus, c’est-à-dire bien avant que la certitude du résultat soit acquise. Les participants font donc un pari sur l’avenir et choisissent malgré leurs objectifs divergents et parfois conflictuels de coopérer, c’est-à-dire qu’ils font confiance à un projet qu’ils considèrent comme juste et qu’ils ont un intérêt mutuel à voir réussir13.
11Une des grandes leçons de l’effondrement des dictatures bureaucratiques à l’Est, c’est que ce qui fait échouer les réformateurs autoritaires, ce n’est ni leur prétention de faire une réforme globale, ni leur caractère autoritaire, mais que leurs initiatives ne suscitent pas ni n’appellent une réponse à l’intérieur de la société. Finalement, ce que nous dit à mots couverts Stiglitz dans ce texte, c’est que ce problème n’affecte pas seulement les planificateurs socialistes mais aussi les experts des organisations internationales armés de la conditionnalité. Les organisations internationales, gardiennes de l’ordre mondial et des bonnes conditions de l’accumulation dans un cadre mondialisé, se trouvent confrontées au pouvoir politique grandissant du refus, c’est-à-dire à ces stratégies de défection que traduit « le pouvoir de se soustraire aux rapports de domination et de subvertir, par cette dérobade, la puissance qui règne sur nos têtes »14.
12Stiglitz est bien conscient que ces processus d’appropriation et de participation ne seront possibles que si le processus de développement repose sur des principes de justice sociale. Dans l’approche de la relation entre équité et croissance qui est sous-jacente ici, la philosophie politique pénètre l’économie en mettant au cœur de la réflexion les questions d’équité et de lien social. En effet, les problèmes de développement, tout comme ceux de compétitivité ou de transition systémique, impliquent chaque fois de réveiller une forme de créativité sociale. Or celle-ci ne peut naître dans un contexte de fragmentation et d’exclusion sociale car la mobilisation des différents acteurs du développement dépend largement du degré d’équité avec lequel ces acteurs s’attendent à être traités. Tout un courant de pensée hétérodoxe en économie et en théorie de la justice sociale a montré l’existence d’une zone de convergence entre efficacité et équité, marquée par une surprenante imbrication entre les deux logiques15. Ainsi, l’équité démultiplie l’efficacité, qui elle-même concrétisera l’équité. L’approfondissement de la réflexion de Stiglitz nécessitait donc le dépassement d’une approche standard16 de la problématique des inégalités où celles-ci ne sont considérées – tout comme les institutions d’ailleurs – que de manière fonctionnelle par rapport à l’objectif de croissance et l’adoption d’une approche non standard visant à reconstruire la problématique équité-efficacité en termes de développement. Dans ce cadre, rien ne peut plus alors justifier l’absence de justice sociale.
13Le développement d’une telle approche non standard signifiait aussi la remise en question de la primauté, dans le discours dominant, de la lutte contre la pauvreté par rapport à la lutte contre les inégalités. Un des effets pervers de ce discours où l’amélioration des conditions de vie des populations dépend de la croissance durable est qu’il ne permet aucune concession au sujet du programme des réformes nécessaires à la bonne intégration dans l’économie mondialisée17. Dans un tel cadre, le conflit entre pauvres et riches n’a pas de sens car, comme le déclare The Economist en réponse à un article de Robert Wade sur les gagnants et les perdants de la mondialisation, « sortir les pauvres de leur condition de dénuement est une bien plus noble cause que d’attaquer les riches »18. The Economist va même plus loin lors d’un numéro dont la couverture porte le titre provocateur « Est-ce que les inégalités ont de l’importance ? »19. Dans son éditorial, on retrouve une attaque frontale à propos de toutes tentations redistributives ou régulatrices face à la montée des inégalités car de telles tentatives pourraient affecter la vitalité de l’économie mondiale. Le contrôle des flux de capitaux, la régulation du marché du travail, les systèmes de protection sociale étendus ou encore une fiscalité lourde sur les plus riches sont autant d’éléments qui sapent les bases de la croissance et qui condamnent les pauvres à leur sort. La solution ne serait donc pas de prendre aux riches mais que les pauvres deviennent plus riches. C’est donc aux riches et à l’État d’agir pour que la population ne considère pas cet accroissement des inégalités comme un problème. Les solutions proposées rejoignent celles de la Banque mondiale, concernant le renforcement de la capacité des pauvres à s’échapper de leur situation à travers notamment l’éducation, mais aussi à travers un retour aux pratiques philanthropiques et caritatives20 – ce qui pourrait prêter à sourire s’il n’y avait pas derrière toute la réalité de l’exploitation qui marque dans leur chair la multitude des pauvres.
14Le conflit est une fois encore évacué au nom du bien commun et les forces porteuses de justice sociale sont présentées comme mettant en péril l’objectif de réduction de la pauvreté. L’attaque contre les opposants au caractère inégalitaire de la mondialisation néo-libérale se fait à travers l’opposition entre l’intérêt des pauvres et les revendications de ces mouvements « anti-mondialistes » qui se traduiraient par un nouveau type d’opposition Nord-Sud. Les contestataires (principalement localisés au Nord), à travers les obstacles qu’ils dressent contre les forces capitalistes transnationales, œuvreraient donc contre les intérêts de la « masse » des pauvres (principalement localisée au Sud).
15Cette position, affirmée de manière moins brutale par le FMI, la Banque mondiale ou l’OMC, cherche à discréditer les revendications des nouveaux mouvements sociaux en les faisant passer comme irresponsables et porteurs d’effets pervers dont les pauvres seraient les premières victimes. Or, les conditions de la croissance durable postulée dans le paradigme dominant sont justement dépendantes des questions relatives au lien social et à l’équité. En effet, la montée des inégalités et la fragmentation sociale sapent les bases du consensus social construit autour des politiques proposées. Le développement d’une vision conflictuelle du monde entre gagnants et perdants des politiques d’adaptation aux normes de la mondialisation augmente le risque de rupture du lien social et de refus de coopération aux réformes proposées. Cette situation fragilise les conditions de l’accumulation, remet en question l’objectif de croissance durable et assombrit, par conséquent, les perspectives de réduction de la pauvreté. Dès lors, toute politique de lutte contre la pauvreté ne peut faire l’économie d’une politique de redistribution – selon différents modèles de justice – de la richesse créée. Cette dissociation entre lutte contre la pauvreté et réduction des inégalités montre une totale cécité des garants de l’ordre mondial quant à l’ampleur et la nature de la crise de légitimité que le projet de mondialisation néo-libérale doit affronter. Il faut rappeler que face à « la gangrène du paupérisme » qui effrayait tant la bourgeoisie au xixe siècle, la réponse ne s’est pas limitée à la lutte contre la pauvreté ; elle a été accompagnée de concessions majeures du capital au travail à travers le droit de vote et d’association, le développement de la législation du travail puis, plus tard, les congés payés (qui permettaient une certaine ré-appropriation de leur temps par les ouvriers) et le développement des États-providence.
16Dans sa tentative réformiste, Stiglitz s’est alors heurté à un mur infranchissable car il ne pouvait aller plus loin sans remettre en question le socle doctrinal de la Banque mondiale. C’est donc sans surprise qu’il fut poussé vers la porte de sortie dans une réaction d’autodéfense de l’institution.
Les deux piliers du discours dominant
17Le remplaçant de Stiglitz au poste d’économiste en chef de la Banque mondiale, Nicholas Stern, prit en main la nouvelle stratégie de développement en tentant de résoudre les contradictions internes produites par l’introduction de la dimension participative dans la doctrine de la Banque. Cette situation n’est pas sans rappeler ce qui s’était passé dans les années 1970 lorsque, sous l’impulsion de McNamara, la Banque avait cherché à développer une approche en termes de besoins essentiels. Celle-ci avait constitué une greffe très problématique dans la doctrine de la Banque et avait été maintenue artificiellement sans jamais prendre profondément racine. Elle fut promptement expulsée au début des années 1980 avec la contre-révolution néo-libérale.
18La solution proposée se fonde sur une conception à deux piliers de la stratégie de développement. D’une part, la construction d’un environnement économique favorable à l’investissement et à la croissance et, d’autre part, le renforcement des capacités des pauvres à participer à cette croissance et à en récolter les fruits21. C’est ce que la Banque mondiale a appelé la stratégie pour une croissance favorable aux pauvres. Le second pilier met l’accent sur les investissements dans l’éducation et la formation, les services de santé, et des politiques de cohésion sociale (visant notamment un niveau acceptable de protection sociale et la réduction des discriminations dont certains groupes sont victimes).
19Le rapport de la Banque mondiale 2000, intitulé Combattre la pauvreté, adopte explicitement l’idée d’« insertion » pour les pauvres – empowerment – à la fois comme dimension inhérente du développement et comme moyen de lutter contre la pauvreté22. C’est une démarche essentiellement politique que propose la Banque mondiale, qui implique une étroite collaboration entre les pauvres, les classes moyennes et d’autres composantes de la société afin d’éliminer les obstacles sociaux et institutionnels à l’insertion de certains individus et groupes sociaux. Il faut à ce sujet noter la difficulté de traduire de manière précise cette notion d’empowerment dont la référence en anglais à l’idée de donner du pouvoir disparaît explicitement dans la version française. S’appuyant sur les travaux de Sen et, en particulier, sur son ouvrage Development as Freedom23, la Banque mondiale a développé un nouveau cadre analytique dans lequel le développement et la lutte contre la pauvreté sont liés au renforcement des aptitudes des individus à diriger leur propre vie et non plus seulement à l’accroissement de la richesse matérielle globale. Avec ce changement paradigmatique, la Banque reconnaît, après bien des débats, que si la réduction de la pauvreté est probable avec la croissance, cette dernière ne profite pas nécessairement aux pauvres ou alors à des degrés très différents selon les modèles de croissance ; et les plus pauvres en sont le plus souvent exclus. D’où l’importance de la mise en place d’une stratégie de développement « pro-pauvres ».
20Ce rapport a été lancé en mettant en avant la volonté déclarée de la Banque de donner la parole aux pauvres et de les mettre au cœur de la nouvelle stratégie de développement. Ainsi, la Banque avait commandité plusieurs études qui devaient appuyer la préparation du rapport annuel24. Ces études, qui ont mobilisé un bataillon d’anthropologues et d’enquêteurs, consistaient en une vaste consultation de plus de 60’000 pauvres dans près de 60 pays. Faute de grande révélation, le fait de donner la parole aux pauvres a eu au moins le mérite de rappeler ce que la pauvreté signifie pour ceux qui la subissent tous les jours : les pauvres sont « sans voix », sans ressources, et doivent faire face sur les cinq continents à l’humiliation et à l’insécurité aussi bien économique que sociale.
21Ce n’est pas la qualité de ce travail qui est en cause mais son intérêt et l’usage qui en a été fait par la Banque. Lorsque l’on analyse le rapport 2000- 2001, on se rend très vite compte de l’usage purement cosmétique du matériel fourni. Toutes les citations des pauvres disséminées dans le cours du texte flottent seulement à sa surface sans jamais l’imprégner. La Banque n’a fait qu’internaliser un pan de la critique qui lui reprochait de mépriser la dimension participative lors de l’élaboration de ses programmes. Ce qui est en jeu ici, c’est un nouveau type de conditionnalité résultant de l’échec des programmes d’ajustement structurel imposés tout au long des années 1980 et 1990 par les experts des organisations internationales. La participation et l’inclusion sociale constituent désormais des éléments centraux du « cadre intégré de développement (CID) »25 et des stratégies de réduction de la pauvreté, prônés par la Banque mondiale et le FMI en ce début du xxie siècle26.
22Dorénavant, les pays qui désirent avoir accès aux ressources disponibles dans le cadre de l’initiative pour les pays pauvres surendettés doivent s’engager à préparer et à mettre en œuvre un document stratégique de lutte contre la pauvreté fondé sur les principes du CID. Ce document constitue la pièce maîtresse du dialogue politique entre les pays recevant les facilités de financement et le FMI et la Banque mondiale. Or il est soigneusement codifié par les cadres de la Banque mondiale qui ont largement fixé les limites de l’exercice en diffusant toute une série de notes d’orientation27.
L’illusion de la participation
23Lorsque l’on observe la nouvelle structure de la doctrine de la Banque, on ne peut être que frappé par l’image d’un deuxième pilier, fondé sur l’objectif de libération des pauvres de la servitude des privations économiques et sociales, qui ne serait finalement qu’un trompe-l’œil, nouvelle ruse de la raison impérialiste pour légitimer le versant prescriptif du projet néo-libéral de mondialisation. En effet, tout repose sur le premier pilier, fondé sur l’objectif d’intégration économique, qui est indispensable au dynamisme de l’économie mondialisée. Ce pilier ne peut donc être remis en question quelles que soient les pressions de la population car, comme le disait Camdessus lorsqu’il était encore à la tête du FMI : « Deuxième leçon […] dans une économie globalisée aucun relâchement de la qualité de gestion n’est admis » et « troisième leçon […] stratégies et institutions doivent se situer face à cet horizon mondial »28. C’est là qu’apparaît la nature principalement rhétorique du nouveau discours sur la participation et le renforcement des capacités des pauvres. Finalement, nous sommes face à un nouveau type de conditionnalité selon lequel le pays est obligé de « s’approprier » un cadre analytique et opérationnel de lutte contre la pauvreté défini à Washington mais que la population est censée valider à travers des parodies de mécanismes participatifs. Il n’est donc pas étonnant de constater l’utilisation abusive des termes « participation » et « participatifs » alors que, le plus souvent, il n’est question que de consultation. La responsabilité des porteurs du projet de la mondialisation néo-libérale est alors d’expliquer les sacrifices demandés, surtout aux moins bien lotis. L’effort de communication impressionnant de la Banque mondiale – notamment à travers Internet – depuis quelques années doit être compris dans ce sens.
24Il n’y a donc plus de place dans ce discours pour un débat démocratique sur la question du projet de société puisque celui-ci s’impose de lui-même à travers les contraintes de l’économie mondialisée. C’est pourquoi, à la fin de la lecture du Rapport de la Banque mondiale 2000, on reste perplexe sur la façon dont la Banque répondra à cette « jeune femme de la Jamaïque » pour qui « la pauvreté c’est comme vivre en prison, être ligoté et attendre d’être libre », à « cette femme pauvre de Moldavie » disant que « la pauvreté est douleur, cela ressemble à une maladie. Elle affecte une personne non seulement matériellement mais aussi moralement. Elle est une atteinte à la dignité humaine et conduit au désespoir » ou encore à ce « pauvre homme du Kenya » qui déclarait : « La pauvreté ? Ne me demandez pas ce que c’est : vous l’avez rencontrée devant ma porte. Regardez les trous. Regardez mes affaires et les vêtements que je porte. Regardez tout ce qu’il y a ici et écrivez ce que vous voyez. C’est ça la pauvreté. »29
25Si la forme a bien changé, le cœur du versant prescriptif de la Banque est donc toujours le même : d’une part, encourager les investissements privés rentables à travers la libéralisation, la dérégulation et la privatisation, et la redéfinition du rôle de l’État afin qu’il complète les investissements privés et assure la compétitivité du territoire face aux normes de l’économie mondialisée, et, d’autre part, favoriser l’expansion sur les marchés mondiaux en s’engageant dans un processus d’ouverture permettant d’accéder aux « possibilités prodigieuses de croissance, de l’emploi et des revenus »30. La seule nouveauté, c’est la reconnaissance que parallèlement à la stimulation de la croissance en général il faut prendre des mesures complémentaires visant à « rendre le fonctionnement des marchés favorable aux pauvres et à développer leurs actifs »31.
26Le nouveau paradigme du développement reste surtout déterminé par le présupposé que l’intégration dans l’économie mondialisée et l’adaptation à ses normes sont des éléments incontournables de tout développement. L’allocution de Michel Hansenne, directeur général du Bureau international du travail, lors du Sommet mondial sur le développement social en 1995 illustre parfaitement ce discours sur le caractère positif in fine de la mondialisation qui, au prix de quelques transformations à la marge, devrait bénéficier à tous : « Il ne s’agit nullement d’arrêter ou de freiner la tendance vers une économie globalisée qui ouvre au contraire des perspectives nouvelles pour une relance économique et pour la création d’emplois, mais plutôt d’adapter nos politiques et nos institutions à cette nouvelle réalité. »32
27Mais alors à quoi bon donner la parole aux pauvres ? Quel est le but de l’inflation d’enquêtes participatives commandées par la Banque mondiale pour savoir comment les individus des différents groupes évaluent leur situation et les stratégies existantes de lutte contre la pauvreté, quels sont leurs besoins et priorités et quelles sont les politiques qu’ils sont prêts à soutenir ? Jusqu’à quel point les élites dirigeantes sont-elles prêtes à écouter la « voix » des populations et à l’intégrer dans le processus d’identification des besoins, et de formulation, mise en œuvre et évaluation des politiques ? Une telle stratégie va à l’encontre de la stratégie de l’ordre mondial de contrôle social et policier sur les mouvements de personnes et les projets « alternatifs ». Elle ignore aussi les questions liées aux rapports de force, aux enjeux de pouvoir et aux conflits entre projets concurrents qui s’affronteront nécessairement si l’on démocratise le processus de prise de décision.
28Si ce changement de discours n’influence pas la nature des objectifs fondamentaux de la Banque, il n’en est pas moins important, car il signifie que des forces agissent en faveur d’une réforme de l’ordre mondial et obligent les organisations internationales à modifier leur discours. L’utopie globalitaire que diffuse le discours dominant est perçue de plus en plus sceptiquement par les populations angoissées par les risques d’exclusion. La réalité de la fragmentation sociale fragilise la base sociale du consensus autour de l’objectif d’intégration dans l’économie mondialisée, qui est pourtant nécessaire à la mise en œuvre des politiques dominantes. La volonté déclarée de la Banque mondiale de promouvoir une stratégie de lutte contre la pauvreté traduit son besoin de justification face à la montée de la protestation à l’encontre du bien-fondé de son action33. La critique exerce des effets réels, car pour résister à l’épreuve, la Banque doit s’appuyer sur de nouveaux dispositifs participatifs qui lui permettent de se défendre face aux critiques et de légitimer son rôle dans la nouvelle architecture de l’ordre mondial. Le CID et l’introduction de la dimension participative dans la nouvelle stratégie de développement constituent autant de preuves tangibles pour faire reconnaître le caractère correct et juste de son action34. Mais tout le paradoxe de la nouvelle approche de la Banque mondiale tient dans le fait qu’elle prétend donner la parole aux pauvres alors que, dans le même temps, elle redoute que leurs revendications et leurs initiatives ne s’écartent de la voie du dialogue qu’elle a soigneusement balisée. En d’autres mots, les pauvres et les marginaux peuvent participer tant qu’ils ne cherchent pas à modifier les règles du jeu et n’exigent pas une redistribution des ressources et du pouvoir de façon plus ou moins radicale35.
Montée de la contestation et retour de la pluralité des possibles
29Face au gouffre grandissant entre le discours dominant fondé sur l’idée de croissance et de prospérité et la réalité des phénomènes d’exclusion et de marginalisation à l’échelle mondiale, on assiste progressivement à une prise de conscience collective des menaces liées à la montée de la précarité qui pèsent sur une frange de plus en plus grande de la population36. Si cette peur est utilisée comme un puissant moyen de contrôle social pour empêcher que ne se forme un front uni des victimes de la mondialisation néo-libérale (inclus/exclus, travailleurs/chômeurs, population des pays riches/des pays pauvres), elle provoque aussi de vastes mouvements de sympathie envers les mouvements de lutte – on a parlé, à propos des grandes grèves de 1995 en France, de « grèves par procuration » – visant des objectifs aussi divers que la qualité du service public, la sécurité sociale, une alimentation saine, la protection vis-à-vis des licenciements abusifs, l’annulation de la dette des pays pauvres.
30Les gouvernements et les organisations internationales mais aussi les firmes multinationales sont perturbés par le scepticisme grandissant de l’opinion publique envers leurs politiques. La voix des manifestants résonne en eux et affecte leurs comportements et politiques. Face aux protestations, des concessions sont faites ou font l’objet de débats internes intenses. Un des derniers exemples est la promotion par les firmes multinationales du concept de responsabilité sociale des entreprises37. Derrière ce discours se cache la volonté du capital de désamorcer les nouvelles critiques des citoyens et des consommateurs, mais aussi des pouvoirs publics chargés du contrôle social de sociétés toujours plus fragmentées. Nous sommes bien en présence d’un investissement stratégique – principalement en communication – au cœur de la stratégie commerciale des entreprises afin de préserver le processus d’une accumulation des conflits qui pourrait le perturber. La supercherie de ce discours en termes de responsabilité sociale des entreprises est de postuler que « les entreprises décident de leur propre initiative de contribuer à améliorer la société et rendre plus propre l’environnement »38. En réalité, ce discours est purement défensif et la responsabilité sociale de l’entreprise n’a de sens dans la logique du capital que pour autant qu’elle soit considérée comme un investissement et non comme un coût.
31Dans un éditorial de The Economist intitulé « The Case for Globalisation »39, on retrouve cette préoccupation grandissante des forces de la mondialisation néo-libérale face aux conséquences de la contestation sur la souveraineté mondiale. On craint que les gouvernements ne cèdent à la pression de la rue et ne ralentissent les transformations économiques en cours depuis le début des années 1980 : « Les gouvernements s’excusent pour la globalisation et promettent de la civiliser. Pourtant, s’ils avaient le moindre souci des pauvres, ils devraient l’accélérer, la célébrer – et si c’est trop difficile à accepter pour le public, ils devraient au moins tenter de l’expliquer. »40 Alain Minc partageait cette crainte à la une du Monde en regrettant que les « anti-mondialistes » aient pris médiatiquement le dessus. Le risque serait celui d’une capitulation générale devant la contestation « exubérante et irrationnelle » de la rue et le scepticisme de la population41. Le nouveau visage de la menace visant le bon fonctionnement de l’économie mondialisée est celui d’organisations telle ATTAC qui parviennent à gagner des batailles politiques en imposant le débat sur la mondialisation aux grandes formations politiques.
32De Seattle à Gênes en passant par Prague, les manifestants anti-mondialisation font resurgir l’idée que la phase actuelle de la mondialisation n’est pas un processus irréversible comme la pensée dominante avait tenté de le faire croire à l’aide de toute la violence symbolique des moyens de communication modernes. Il apparaît soudain que les gouvernements, que l’on croyait affaiblis et soumis aux contraintes de la mondialisation, sont loin d’être sans pouvoir et qu’ils ont – et à travers eux leur population – la capacité de faire évoluer l’ordre mondial. Ce dernier est en effet composé des organisations internationales, des firmes multinationales, des banques et des grandes puissances. Or celles-ci siègent au sein des organisations internationales, ratifient le droit international et jouent un rôle central dans la conduite du processus d’intégration. L’Union européenne (l’organisation et ses membres pris individuellement) représente à ce titre un maillon faible – ou, plus exactement, le maillon potentiellement le plus réceptif – de l’ordre mondial existant du fait de ses valeurs constituantes que sont la démocratie et la cohésion sociale.
33Pour la contestation, elle constitue un cheval de Troie qui peut faire évoluer l’ordre mondial dont elle est partie intégrante.
Déplacement du domaine de la lutte
34C’est une erreur de regrouper l’ensemble des nouveaux mouvements d’opposition au développement actuel du capitalisme sous la dénomination d’« anti-mondialisation ». De par leur nature, leurs revendications et leurs tactiques, ces mouvements hybrides se situent sur le terrain même de la mondialisation. Ce qu’ils contestent, ce n’est pas la mondialisation per se mais le caractère fondamentalement inégalitaire et aliénant du projet politique de libération des conditions de l’accumulation capitaliste à travers la destruction des mécanismes de régulation sociale qui pesaient sur elles. Hardt et Negri, dans leur manifeste contre le nouveau dispositif du capitalisme mondial qu’ils appellent « l’Empire », insistent sur la nécessité de reconnaître « un scénario d’actes rationnels différents – un horizon d’activités, de résistance, de volontés et de désirs qui refusent l’ordre hégémonique, proposent des lignes de fuite et forgent des parcours de rechange constitutifs »42. Même s’il n’existe pas encore de cadre cohérent ni de manifeste unifiant la multitude de ces nouveaux mouvements de résistance, leur opposition primaire « d’être-contre » commence à peser sur le système et le pousse à développer d e nouveaux éléments de justification.
35L’enjeu des luttes actuelles, c’est la démocratisation de la souveraineté mondiale afin de réorienter les processus de mondialisation multiformes au bénéfice des populations. Si les revendications des opposants sont encore mal définies, nous sommes toutefois bien face à un contre-projet politique pour le futur, et non à un projet de réformes du présent système visant à lui donner « un visage humain », terrain sur lequel les organisations internationales tentent d’entraîner les organisations représentatives de la société civile43. La tentation des élites dirigeantes d’utiliser les fonctions de police à leur disposition et de pratiquer ainsi la violence d’État contre ces opposants illustre le sérieux de ce contre-projet naissant dont la menace remonte au cœur même de l’ordre mondial et en affaiblit les bases.
36Les forces capitalistes transnationales pensaient s’être affranchies de toute menace majeure à la suite de l’effondrement du bloc socialiste et espéraient imposer un nouvel ordre mondial dans lequel ne subsisteraient que des menaces mineures (conflits circonscrits et de faible intensité), que la force de police mondiale pourrait gérer au nom du nouveau droit international d’intervention (Irak, Bosnie, Kosovo, etc.). Mais elles se trouvent maintenant face à une nouvelle menace « déterritorialisée » et multiforme capable d’atteindre le centre virtuel du nouvel ordre mondial comme, par exemple, les hackers qui paralysent régulièrement tout le système cybernétique et causent des milliards de dollars de dommages au système, les mouvements de contestation itinérants qui mobilisent les populations et interpellent les puissants de ce monde ou encore le discours du sous-commandant Marcos dont la dimension poétique, peut-être plus encore que politique, alimente la culture contestataire tout autour du monde via Internet.
37Reconnaître que le conflit est au cœur de la problématique du développement implique de remettre l’accent sur la nécessité de médiations sociales permettant des arbitrages entre des régulations concurrentes et donnant lieu à des compromis institutionnalisés. Ces derniers constituent autant « d’armistices » politiques et sociaux dans le domaine des luttes qui permettent temporairement de mener des stratégies globales coopératives. Dans cette perspective, le besoin d’une menace poussant le système capitaliste à prendre en considération la revendication de justice sociale et l’obligeant à se transformer est une nécessité. Mais c’est sur la nature de cette menace qu’il faut réfléchir. La violence constitue un moyen contre-productif qui sera immédiatement instrumentalisé par les franges sécuritaires du nouvel ordre mondial. Une telle stratégie est vouée à l’échec car les actions de la minorité violente (qu’elle soit infiltrée ou non d’ailleurs) seront utilisées pour discréditer les mouvements citoyens et faire croître la peur du chaos. La vraie menace à la fois destructrice et créatrice des opposants est celle qui sape la légitimité des porteurs du projet néo-libéral à gérer sans partage les processus de mondialisation (prétendument au nom du bien commun) et réaffirme le droit des citoyens mondiaux à être maîtres de leur destin. Voilà la seule définition acceptable de la notion d’empowerment.
Notes de bas de page
1 J. Wolfensohn, « Building an Equitable World », Address to the Boards of Governors, Prague, Czech Republic, September 26, 2000.
2 Cette vision de l’histoire remporta un grand succès médiatique au début des années 1990. Voir F. Fukuyama, The End of History and the Last Man, Free Press, Illinois, 1992.
3 Voir à ce sujet l’excellente analyse de J.-P. Peemans, « L’utopie globalitaire », in C. Comeliau (éd.), L’économie à la recherche du développement. Crise d’une théorie, violence d’une pratique, Nouveaux Cahiers de l’IUED, n° 5, coll. Enjeux, PUF, Paris ; IUED, Genève, 1996, pp. 53-76.
4 P. Bourdieu, « Je suis ici pour dire notre soutien… », Libération, 14 décembre 1995.
5 S Latouche, « La mondialisation et la fin du politique : diagnostic et perspectives », Revue MAUSS, n° 9, 1997, pp. 137-150, citation p. 144.
6 Voir A.O. Hirschman, Exit, Voice, and Loyalty, Harvard University Press, Cambridge, 1970.
7 R. Jolly, « Adjustment with a Human Face », Development : Seeds of Change, vol. 40, n° 1, 1997, pp. 97-105.
8 G. Cornia, R. Jolly et F. Stewart, Adjustment with a Human Face, Oxford University Press, Oxford, 1987.
9 UNDP, Human Development Report, UNDP, New York, 1990; World Bank, World Development Report, The World Bank, Washington, D.C., 1990.
10 J. Stiglitz, Towards a New Paradigm for Development, 9th Raúl Prebisch Lecture, UNCTAD, Geneva, 1998.
11 Voir par exemple : World Bank, Assessing Aid : What Works, What Doesn’t, and Why, World Bank Policy Research Report, Oxford University Press, Oxford, 1998; J. Isham, D. Narayan et L. Pritchett, « Does Participation Improve Performance? Establishing Causality with Subjective Data », World Bank Economic Review, vol. 9, n° 2, 1995.
12 J. Stiglitz, op. cit., p. 14.
13 J.-D. Reynaud, Les règles du jeu, Armand Colin, Paris, 1997, p. 141.
14 M. Hardt et T. Negri, L’Empire, Exils Editeur, Paris, 2000, p. 255.
15 Parmi les nombreux travaux sur cette relation, voir J. Rawls, A Theory of Justice, Columbia University Press, New York, 1971 ; O. Favereau, « Conventions et régulation », in R. Boyer et Y. Saillard (éd.), Théories de la régulation : l’état des savoirs, La Découverte, Paris, 1995 ; R. Boyer, « Justice sociale et performances économiques : de la synergie au conflit ? », in J. Affichard et J.-B. Foucauld, Justice sociale et inégalités, Esprit, Paris, 1992, pp. 33-72.
16 Voir la distinction faite par Olivier Favereau (« Marchés internes, marchés externes », La Revue économique, 1989, pp. 273-328) au sujet de la théorie standard et la théorie non standard. La première se réfère au modèle néo-classique fondé sur la rationalité des comportements individuels, réduite à l’optimisation, et sur la coordination des comportements individuels, réduite au marché. Par contre, les approches non standard relèvent d’une philosophie commune de l’économie que l’on peut appeler institutionnaliste, dans laquelle, d’une part, les institutions sont essentielles pour comprendre les différences spatiales ou historiques entre les trajectoires économiques et, d’autre part, une épistémologie « réaliste » et une méthodologie de la « compréhension » sont nécessaires pour rendre compte de la logique des institutions.
17 Voir à ce sujet : D. Dollar et A. Kray, Growth is Good for the Poor, The World Bank, Washington, D.C., 2000; M. Roemer et M. Kay Gugerty, Does Economic Growth Reduce Poverty?, CAER II Discussion Paper n° 5, Harvard Institute for International Development, Cambridge, 1997.
18 « Of Rich and Poor », The Economist, April 28th, 2001, p. 92. L’article de Robert Wade, dans le même numéro, porte pour titre « Global Inequality : Winners and Losers ».
19 « Does Inequality Matter? », The Economist, June 16th, 2001, p. 11.
20 Ibidem, p. 12.
21 N. Stern, A Strategy for Development, ABCDE Keynote Address, Washington, D.C., May 2001, p. 1.
22 Banque mondiale, Rapport sur le développement dans le monde 2000-2001. Combattre la pauvreté, PUF, Paris, 2000.
23 A. Sen, Development as Freedom, Oxford University Press, Oxford, 1999.
24 D. Narayan, R. Chambers, M. Shah et P. Petesch, Crying Out for Change : Voices of the Poor, Oxford University Press, Oxford, 2000; D. Narayan, R. Patel, K. Schafft, A. Rademacher et S. Koch-Schulte, Voices of the Poor : Can Anyone Hear Us?, Oxford University Press, Oxford, 2000.
25 En anglais : Comprehensive development framework.
26 World Bank, Poverty Reduction Strategy Papers : Internal Guidance Note, The World Bank, Washington, D.C., 2000.
27 World Bank, PRSP Tool Kits, The World Bank, Washington, D.C., 2001.
28 M. Camdessus, « Les leçons économiques de 1995 », Le Monde, 18 janvier 1996.
29 Citations tirées du Rapport sur le développement dans le monde 2000-2001. Combattre la pauvreté de la Banque mondiale, op. cit., p. 3.
30 Ibidem, p. 9.
31 Ibidem, p. 8.
32 M. Hansenne, « Allocution de M. Hansenne au Sommet mondial sur le développement social, Copenhague, 9 mars », Service de presse du BIT, BIT, Genève, 1995.
33 J. Habermas, Après Marx, Seuil, Paris, 1997.
34 S. Tikare, D. Youssef, P. Donnelly-Roark et P. Shah, « Organizing Participatory Processes in the PRSP », in World Bank, PRSP Tool Kits, op. cit., p. 4.
35 E. Balibar, « Inégalités, fractionnement social et exclusion », in J. Affichard et J.-B. de Foucauld, op. cit., pp. 149-162, citation p. 157.
36 A. Bhalla et F. Lapeyre, Poverty and Exclusion in a Global World, Macmillan, London, 1999.
37 United Nations, Global Compact, United Nations, New York, 2000.
38 Commission des Communautés européennes, Livre vert. Promouvoir un cadre européen pour la responsabilité sociale des entreprises, COM(2001) 366 final, Commission des Communautés européennes, p. 4.
39 « The Case for Globalisation », The Economist, September 23rd, 2000, p. 19.
40 Ibidem.
41 A. Minc, « Mondialisation heureuse : je persiste et signe », Le Monde, 17 août 2001.
42 M. Hardt et T. Negri, op. cit., p. 78.
43 PNUD, Rapport sur le développement humain 1999, PUF, Paris, 1999.
Auteur
Chargé de cours en économie à l’Institut universitaire d’études du développement (IUED), Genève.
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