Chapitre I. L’héritage de la cour permanente
p. 47-54
Texte intégral
1La Cour internationale de Justice a hérité de la Cour permanente de Justice internationale une riche jurisprudence développée sur près de 18 ans (de 1922 à 1940) dans laquelle apparaît à plusieurs reprises le problème de la qualité pour agir. Bien qu’aucune requête contentieuse portée devant la Cour permanente puisse être assimilée pleinement à une actio popularis, l’attitude de la Cour se caractérise par une conception large de la qualité pour agir. Deux affaires traitées par la Cour permanente sont particulièrement intéressantes à ce sujet : la première est l’affaire du Vapeur Wimbledon ; la seconde concerne le statut du territoire de Memel.
Section I - Où l’on perçoit déjà une conception large de la qualité pour agir
1er - L’affaire du vapeur Wimbledon
2Affrété par une société française, mais battant pavillon britannique, le vapeur Wimbledon s’était vu refuser par les autorités allemandes le libre passage à travers le canal de Kiel, alors qu’il était en route vers le port de Dantzig avec une cargaison de matériel de guerre destinée à la Pologne. L’Ambassadeur de France à Berlin demanda au Gouvernement allemand de lever cette interdiction en invoquant l’article 380 du Traité de Versailles, qui instaurait un régime de libre passage en faveur de tous les Etats en paix avec l’Allemagne4. Mais l’Allemagne fit valoir que cette disposition ne l’empêchait pas d’interdire, par le biais d’ordonnances de neutralité, le transit de matériel militaire à destination d’un pays en guerre. La France, la Grande-Bretagne, l’Italie et le Japon portèrent le litige devant la Cour permanente de Justice internationale en se fondant sur une clause juridictionnelle contenue dans le Traité de Versailles5.
3Les quatre Etats agissaient en tant que Puissances Alliées victorieuses de la Première Guerre mondiale et avaient déposé une seule requête signée conjointement. La nature de leurs intérêts affectés n’était cependant pas identique. Alors que la Grande-Bretagne, Etat du pavillon, et la France, Etat national de la société qui avait affrété le navire, pouvaient prétendre être directement concernés par l’interdiction de passage signifiée au navire Wimbledon, tel n’était en revanche pas le cas de l’Italie et du Japon. L’Allemagne souleva devant la Cour la question de la qualité pour agir des Etats requérants mais sans faire de ce point un axe central de son argumentation ; elle déclara expressément s’en remettre à l’appréciation de la Cour et ses conclusions écrites ne portèrent que sur le fond du litige. En réponse cependant à cette objection allemande, les quatre Etats requérants affirmèrent expressément leur intérêt à agir. Ils déclarèrent qu’ils étaient « intéressés au respect du principe du libre passage dans le canal de Kiel et à l’exacte exécution des clauses du traité de Versailles6. » Cette argumentation revenait donc à affirmer que tout Etat partie à un traité possède un intérêt légitime au respect de l’intégrité du traité, qu’il soit ou non directement affecté. On notera que cette argumentation en droit correspondait à un axiome central de la politique étrangère menée par la France et certains de ses alliés au lendemain de la Première Guerre mondiale : veiller à une stricte exécution par l’Allemagne du Traité de Versailles.
4Dans son arrêt, la Cour permanente estima qu’avant d’aborder le fond du litige, elle devait vérifier la qualité pour agir des Etats requérants. Elle affirma cependant n’avoir « aucun doute » dans le cas d’espèce quant à son existence et motiva brièvement son point de vue de la manière suivante :
[...] il suffit d’observer en l’espèce que chacune des Puissances demanderesses a un intérêt évident à l’exécution des stipulations qui concernent le canal de Kiel, puisqu’elles ont toutes des flottes et des navires marchands battant leur pavillon ; elles rentrent donc, sans qu’il soit besoin pour elles de justifier d’un intérêt pécuniaire lésé, dans les prévisions de l’article 3867.
5La Cour permanente met en avant le fait que les quatre Etats requérants avaient tous des flottes marchandes susceptibles d’emprunter le canal de Kiel, de sorte qu’on peut considérer qu’elle ne s’écarte pas de l’exigence usuelle selon laquelle le demandeur doit justifier d’un intérêt direct ou personnel8. Cela étant, la Cour relativise considérablement la portée de cette règle. D’une part, elle affirmait expressément que la qualité pour agir de l’Etat demandeur ne dépend pas de l’invocation d’un préjudice matériel donnant droit à réparation pécuniaire. D’autre part et surtout, elle considère comme suffisant un simple intérêt futur ou potentiel du demandeur. Sur cette base, la Cour permanente affirme clairement que n’importe quel Etat partie peut exiger le respect des dispositions d’un traité, et cela même dans le cas où la victime serait un autre Etat partie. Ce n’est pas encore l’affirmation d’un intérêt général au respect de la légalité conventionnelle, mais on est très proche d’une telle notion, surtout si l’on tient compte du fait que le Japon, pour des raisons d’éloignement géographique, n’avait guère d’intérêt réel à utiliser le canal de Kiel.
6On notera que la nature de la norme en cause n’est peut-être pas étrangère au libéralisme dont a fait preuve la Cour permanente dans l’appréciation de l’existence de la qualité pour agir. En interprétant plus loin dans son arrêt le texte de l’article 380 du traité de Versailles, la Cour déclare en effet que le canal de Kiel est « devenu une voie internationale destinée à rendre plus facile, sous la garantie d’un traité, l’accès de la Baltique, dans l’intérêt de toutes les nations du monde9. » Ce passage de l’arrêt de la Cour constitue une forme de reconnaissance avant l’heure de la notion d’obligations erga omnes, même s’il s’agit d’une reconnaissance embryonnaire, puisque le texte de l’arrêt ne précise pas si l’engagement pris par l’Allemagne consiste en une obligation unique dont la violation affecte simultanément tous les autres Etats, ou s’il s’agit d’une série d’obligations parallèles mais distinctes existant à l’égard de tous10. Il est vraisemblable en tout cas que cette caractéristique prêtée par la Cour au régime du canal de Kiel l’a conduite à admettre plus facilement l’intérêt à agir des Etats requérants11.
§ 2 - L’affaire de l’interprétation du statut du territoire de Memel
7Une seconde affaire portée devant la Cour permanente de Justice internationale, celle de l’Interprétation du statut du territoire de Memel, confirme l’impression d’une attitude libérale de la Cour quant à la qualité pour agir. L’objet du différend était en l’occurrence le régime international applicable au territoire de Memel, autrefois allemand, qui avait été placé sous souveraineté de la Lituanie par la convention de Paris conclue le 8 mai 1924 entre ce pays, d’une part, et la Grande-Bretagne, la France, l’Italie et le Japon, d’autre part. Bien que le territoire ait été cédé à la Lituanie, il avait été convenu qu’il jouirait d’un régime d’autonomie dont les termes généraux étaient fixés dans un Statut annexé à la Convention de Paris. Celui-ci prévoyait notamment que les affaires qui n’étaient pas placées spécifiquement sous la juridiction des autorités du Territoire relevaient de la compétence des autorités centrales lituaniennes12. Un gouverneur était nommé par le président de la Lituanie, mais le pouvoir exécutif sur le Territoire était exercé par un Directoire de cinq membres, qui avait à sa tête un président13.
8En février 1932, suite à un voyage en Allemagne entrepris à l’insu des autorités lithuaniennes, le Président du Directoire fut révoqué dans des circonstances douteuses par le gouverneur du Territoire de Memel. L’affaire fut portée par l’Allemagne devant le Conseil de la Société des Nations. Celui-ci adopta un rapport qui recommandait, pour normaliser la situation, qu’un nouveau Directoire soit désigné et présenté à l’approbation de la Chambre de Memel. Le rapport ne discutait pas de la légalité de la révocation du Président du Directoire, mais rappelait aux quatre Principales Puissances qu’elles avaient la possibilité de saisir la Cour de cette affaire, conformément à l’article 17 § 2 de la Convention de Paris14. Le 11 avril 1932, celles-ci portèrent effectivement l’affaire devant la Cour en l’invitant notamment à dire si le Gouverneur du Territoire de Memel avait le droit de révoquer le Président du Directoire, et dans l’affirmative, dans quelles conditions ou circonstances ce droit devait être exercé15.
9La Lituanie ne contesta pas la qualité pour agir des quatre Puissances requérantes, mais souleva une exception préliminaire à l’égard des deux derniers points de la requête en faisant valoir que ceux-ci portaient sur des faits postérieurs à la procédure devant le Conseil. Selon la Lituanie, l’article 17 de la Convention de Paris devait être interprété comme exigeant que tout différend, avant d’être déféré à la Cour, soit soumis aux délibérations du Conseil. Les quatre Puissances demanderesses firent valoir en réponse à cette exception que la procédure devant le Conseil et la procédure devant la Cour remplissaient des fonctions distinctes, la première ayant pour objet l’examen d’une « infraction », alors que la seconde porte sur toute « divergence d’opinions », ce qui peut amener la Cour à prononcer un arrêt déclaratoire. L’agent du Gouvernement britannique ajouta :
En l’espèce, les Etats requérants ne sont pas ici pour défendre leurs intérêts particuliers ou des droits propres, à la suite d’infractions commises à leurs dépens. Leur seul intérêt est de veiller à ce que la Convention à laquelle ils sont parties soit exécutée par la Lituanie conformément à ce qu’ils estiment être la bonne interprétation16 [...].
10Comme dans l’affaire du Vapeur Wimbledon, la requête introduite devant la Cour était ainsi fondée sur une conception large de l’intérêt au respect de la légalité conventionnelle. Les quatre Puissances requérantes agissaient en tant que gardiennes du respect d’un traité.
11La Cour ne se montra nullement indisposée d’avoir été saisie par le biais d’une requête dans laquelle les Etats demandeurs ne faisaient pas valoir de préjudice propre et sollicitaient un arrêt purement déclaratoire. Elle constata simplement que l’article 17 de la Convention de Paris instituait effectivement deux procédures distinctes – l’une devant le Conseil, l’autre devant la Cour – et que la requête introduite en l’espèce entrait dans le cadre des prévisions de la clause juridictionnelle :
La procédure devant le Conseil – affirma-t-elle – a pour objet l’examen d’une « infraction aux dispositions de la convention », ce qui présuppose un fait déjà accompli, tandis que la procédure devant la Cour a pour objet une « divergence d’opinions sur des questions de droit ou de fait ». Cette divergence d’opinions peut se produire sans qu’aucune infraction ne soit relevée17.
12La Cour ne discuta même pas spécifiquement de la qualité pour agir des Etats demandeurs. Certes, la Lituanie n’avait pas contesté directement cet aspect, mais la Cour aurait pu soulever cette question d’office, si elle avait estimé qu’il y avait là motif à refuser de statuer. Apparemment, la teneur claire de la clause juridictionnelle lui a paru suffisante pour justifier la qualité pour agir des demandeurs. On peut déduire de cette décision que – pour la Cour permanente – ce qui importe principalement est le contenu de la clause attributive de compétence. Si la formulation de la clause juridictionnelle le permet, rien ne paraît empêcher une action judiciaire par laquelle un Etat non directement affecté chercherait à déterminer le contenu d’un traité. Dans un passage de son arrêt relatif au fond du litige, la Cour permanente souligna d’ailleurs que les demandeurs avaient simplement pour intention « d’obtenir une interprétation du Statut qui puisse à l’avenir servir de guide18. »
Section II - Appréciation de l’attitude de la Cour permanente
§1er - L’intérêt au respect de l’intégrité du Traité
13Dans les deux affaires examinées, la Cour permanente traite rapidement de la qualité pour agir. La brièveté avec laquelle cette question est traitée dans les considérants des deux arrêts – pour ne pas dire la nature sommaire de l’argumentation – est étonnante. On ne peut manquer d’être frappé par cette apparente facilité avec laquelle la Cour permanente a tranché la question de la qualité pour agir, alors que la même problématique donnera lieu au milieu des années soixante à de vifs affrontements au sein de la Cour internationale de Justice. Manifestement, il n’existait pas de divergences à ce sujet au sein de la Cour permanente. Preuve en est le passage du premier de ces deux arrêts dans lequel la Cour affirme que la qualité pour agir des Etats requérants ne fait « aucun doute » (ce qu’elle n’a pas coutume de dire, par égard pour les juges dissidents, lorsqu’il existe en son sein des opinions opposées) ainsi que le fait qu’aucune des opinions dissidentes n’aborde cette question. L’impression qui prévaut à la lecture des deux arrêts est que la question de savoir si des Etats parties peuvent agir en défense de l’intégrité du traité, même lorsqu’ils ne sont pas directement affectés, n’était pas considérée comme un problème aux débuts de la juridiction internationale permanente. Dans les deux affaires, la Cour permanente paraît admettre cet intérêt au respect de l’intégrité du traité comme allant de soi.
14Estimer que tous les Etats parties à un traité multilatéral peuvent avoir un intérêt à ce que celui-ci soit intégralement respecté n’est pas la même chose qu’affirmer l’existence d’une actio popularis. Cet intérêt au respect de l’intégrité du régime conventionnel se fonde sur le fait que la survenance de violations affaiblit le régime conventionnel, porte atteinte à sa crédibilité et concerne à ce titre l’ensemble des Etats parties. Il peut se justifier aussi par l’intérêt de chacun à connaître le sens des dispositions du traité et à empêcher que des violations répétées aboutissent à une modification de leur interprétation. Pour sa part, l’actio popularis se fonde sur l’idée d’une défense des intérêts communs. On ne peut donc pas dire que la Cour permanente admet l’actio popularis, mais elle fait un pas important dans sa direction.
§ 2 - Les liens entre la qualité d’agir, le titre juridictionnel et l’obligation de fond
15Il est intéressant également de relever le lien établi entre la qualité pour agir, la teneur du titre juridictionnel et la nature de l’obligation violée. Dans les deux affaires, la lecture faite par la Cour du texte de la clause juridictionnelle paraît avoir été à chaque fois déterminante pour apprécier si les Etats requérants étaient autorisés à porter devant elle le litige. A la première lecture, la clause juridictionnelle paraît même le seul élément déterminant. Cependant, il est vraisemblable que la Cour a tenu également compte de la nature des obligations concernées. Le passage de l’arrêt du Vapeur Wimbledon admettant un intérêt potentiel du Japon et de l’Italie doit être lu, selon nous, en conjonction avec cet autre passage du même arrêt dans lequel la Cour affirme que la libre navigation à travers le canal de Kiel a été instituée en faveur de toutes les nations du monde ; le second est l’explication complémentaire du premier. D’autre part, la Cour a probablement tenu compte dans les deux affaires du fait que les traités en cause faisaient partie du règlement institué au lendemain de la Première Guerre mondiale et de l’intérêt politique, autant que juridique, de chaque puissance victorieuse à leur exécution.
16Selon nous, il est probablement hâtif d’affirmer que la Cour permanente reconnaît déjà une forme d’actio popularis. En effet, il ne s’agit pas dans les deux affaires d’un droit d’agir offert à l’ensemble des membres de la communauté internationale, ni même à l’ensemble des Etats parties à un traité. Seul un cercle restreint d’Etats était susceptible d’introduire une action judiciaire : dans le premier cas, ce droit était limité aux puissances alliées victorieuses ; dans le second cas, il était réservé aux principales puissances victorieuses, et pour autant seulement qu’elles siègent en qualité de membre au sein du Conseil de la Société des Nations. On peut arguer que cette spécification constitue une manière d’établir à l’avance quels Etats possèdent un intérêt particulier au respect des dispositions du traité, de sorte que l’exigence d’un intérêt direct et personnel ne serait pas écartée, mais simplement présumée. Il n’empêche que le demandeur n’a pas à justifier dans un tel cas d’un intérêt personnel et direct par rapport au litige. Sa qualité pour agir est clairement affirmée comme indépendante de l’existence d’un préjudice propre19.
Notes de bas de page
4 L’article 380 était ainsi conçu : « Le Canal de Kiel et ses accès seront toujours libres et ouverts sur un pied de parfaite égalité aux navires de guerre et de commerce de toutes les nations en paix avec l’Allemagne. »
5 La clause juridictionnelle invoquée par les quatre puissances était l’article 386 § 1 du traité de Versailles, dont la teneur était la suivante : « En cas de violation d’une des dispositions des articles 380 à 386, ou en cas de désaccord sur l’interprétation de ces articles, toute Puissance intéressée pourra faire appel à la juridiction instituée dans ce but par la Société des Nations. » La « juridiction » dont il est question est la Cour permanente de Justice internationale, qui ne sera créée que postérieurement, en 1922.
6 CPJI Série C, n° 3, vol. supp., p. 65 ; les italiques sont de nous.
7 CPJI Série A, n° 1, p. 20 ; les italiques sont de nous.
8 Nous reviendrons plus tard sur la question de savoir si cette exigence constitue véritablement une règle du droit international général. Voir en particulier la section relative à l’affaire du Sud-Ouest africain (p. 70 ss) ainsi que le chapitre iii infra (p. 91 ss).
9 CPJI Série C, n° 2, p. 22 ; les italiques sont de nous.
10 Pour une analyse approfondie du concept d’obligations erga omnes, voir infra, p. 239 ss.
11 Sur le rapport étroit existant entre la qualité pour agir et le droit invoqué dans la demande en justice, voir les chapitres ci-dessous consacrés aux fondements normatifs de l’actio popularis (p. 229 ss.) et à la qualité pour agir (p. 322 et p. 328 ss).
12 Article 7 du Statut.
13 Article 2 et 17 du Statut.
14 L’article 17 de la Convention de Paris avait la teneur suivante : « 1. Les Hautes Parties contractantes déclarent que tout Membre du Conseil de la Société des Nations aura le droit de signaler à l’attention de ce Conseil toute infraction aux dispositions de la présente Convention. 2. En cas de divergence d’opinions sur des questions de droit ou de fait concernant ces dispositions, entre le Gouvernement lithuanien et l’une quelconque des Principales Puissances alliées, membres du Conseil de la Société des Nations, cette divergence sera considérée comme un différend ayant un caractère international selon les termes de l’article 14 du Pacte de la Société des Nations. Le Gouvernement lithuanien agrée que tout différend de ce genre sera, si l’autre Partie le demande, déféré à la Cour permanente de Justice internationale. La décision de la Cour permanente sera sans appel et aura la force et la valeur d’une décision rendue en vertu de l’article 13 du Pacte. »
15 Cette requête soulevait le problème de la délimitation entre la fonction contentieuse et celle de l’avis consultatif. Le rapporteur du Conseil de la Société des Nations, M. Colban, estimait qu’une demande d’avis consultatif à la Cour permanente ne recueillerait pas l’approbation unanime des membres du Conseil. Or, on doutait à l’époque qu’une demande d’avis consultatif puisse être valablement votée à la majorité simple. En invitant les quatre puissances à agir au titre de la procédure contentieuse, M. Colban cherchait donc à contourner cet obstacle. Bien que la formulation par les demandeurs de six questions était effectivement plus proche d’une demande d’avis consultatif que d’une requête de nature contentieuse, la Cour permanente n’y vit pas pour autant une manière illicite de contourner l’article 34 de son Statut dont la teneur - identique à celle de l’article 34 du Statut actuel - réserve la voie contentieuse aux seuls Etats. Le juge Anzilotti refusa cependant de s’associer à la décision de la Cour sur le fond en invoquant un mauvais usage de la procédure contentieuse.
16 CPJI Série C, n° 59, p. 173.
17 Interprétation du statut du territoire de Memel, CPJI Série A/B, n° 49, p. 248.
18 CPJI Série A/B, n° 49, p. 337. Sur l’admissibilité d’un contrôle judiciaire « abstrait » de la légalité, voir infra, p. 341 ss.
19 Dans son arrêt relatif à la seconde phase de l’affaire du Sud-Ouest africain, la Cour internationale de Justice se refusa à établir un parallèle entre une action judiciaire, qui serait ouverte dans le cadre du système des mandats à tous les membres de la Société des Nations, et un droit d’agir conféré à un cercle restreint d’Etats faisant partie de l’organe de surveillance, à titre permanent ou à titre électif : « En pareil cas [c’est-à-dire dans un système comme celui prévu par le traité relatif au territoire de Memel], le droit conféré était en fait un élément du mécanisme institutionnel ou conventionnel de contrôle et son existence ne pouvait entraîner de difficulté ni prêter à confusion » (Sud-Ouest africain (deuxième phase), CIJ Recueil, 1966, p. 32). Telle n’était pas en revanche l’opinion des juges dissidents Koretsky et Jessup qui ont souligné les similitudes de ces deux régimes (cf. ibid., p. 247 et p. 375-377).
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