Partie 1 | La région autonome du Xinjiang : un déterminant essentiel de la politique de Pékin à l’égard des républiques centre-asiatiques
p. 5-55
Texte intégral
1Avant d’entrer dans l’examen proprement dit de la politique étrangère de la République populaire de Chine à l’égard des républiques centre-asiatiques, il faut nous arrêter un moment sur la situation de la région autonome ouïgoure du Xinjiang (Xinjiang Weiwuer zizhiqu). Cette région est en effet très particulière et la situation qui y prévaut détermine pour une grande part, comme nous le verrons, les choix de Pékin à l’égard de ces voisins d’Asie centrale. C’est pour cette raison qu’un rappel approfondi consacré à cet espace géographique s’impose ici en guise de préambule. Il nous aidera ensuite à mieux comprendre les inquiétudes mais aussi les choix des autorités chinoises.
1. Description géographique de la région7
2Le « Xinjiang » -dont le nom chinois signifie la « nouvelle frontière » ou la « nouvelle marche »- appelé de préférence « Turkestan oriental » par les Ouïgours de la diaspora, est situé au nord-ouest du territoire actuel de la République populaire de Chine. S’étendant sur près de 2 000 km d’est en ouest et sur 1 650 km du nord au sud, cette immense région est bordée par la Mongolie au nord-est, la Fédération de Russie au nord, le Kazakhstan au nord-ouest, la République kirghize et le Tadjikistan à l’ouest, et enfin par l’Afghanistan (région du corridor du Wakhan), le Pakistan, le Cachemire -disputé entre l’Inde et le Pakistan- et l’Inde au sud-ouest. Le Xinjiang compte environ 5 300 km de frontières soit un quart du total des frontières terrestres de la Chine (22 147 km). La longueur de ses frontières ainsi que le nombre important d’États frontaliers de son territoire font de cette région la province la plus extravertie de la République populaire de Chine.
3Cette immense région « autonome » est aussi la plus grande unité administrative de Chine. Elle couvre près de 1 646 800 km2 soit une superficie égale à trois fois la France et représente à elle seule un sixième du territoire chinois. D’un point de vue de géographie physique, le Xinjiang se constitue schématiquement de deux bassins principaux entourés de trois chaînes montagneuses : le bassin de la Dzoungarie au nord dominé par la chaîne de l’Altaï, la chaîne montagneuse des Tian Shan -les « Monts Célestes »- située au centre et qui divisent la région en deux, et enfin, le bassin du Tarim au sud, lui-même bordé au sud par la chaîne des Kunlun qui comprend le plateau du Pamir, le Karakorum et les Monts Altun.
4Le bassin de la Dzoungarie proprement dit s’étend sur environ 380 000 km2. Il est encadré au nord/ nord-est par les Monts Altaï « les Alpes de l’Asie » qui s’étendent sur près de 2000 km et marquent la frontière avec la Mongolie extérieure, le Kazakhstan et la Fédération de Russie et au sud par le système montagneux des Tian Shan -un des plus vastes de la planète, couvrant 2 500 km de l’ouest à l’est sur une largeur de 200 à 300 km- qui le sépare du bassin du Tarim. La partie centre-orientale de la Dzoungarie est désertique. Le désert du Gurbantunggut (Guerbanlonggute Shamo) ou « Gobi Dzoungare » couvre plus de 48 000 km2. C’est le second plus important désert de Chine après le Taklamakan situé au sud du Xinjiang9. Autour de ce désert sont situées des zones de steppes et de semi-steppes, territoires par excellence des populations nomades.
5Malgré la présence de chaînes montagneuses massives, le bassin de Dzoungarie est ouvert à la fois à l’ouest sur l’Asie centrale et à l’est sur le cœur du territoire de la Chine. Les vallées de l’Emin et de l’Irtych et la passe des « Portes de Dzoungarie » (col d’Alatoti) permettent de relier aisément cette partie du territoire chinois aux steppes du Kazakhstan voisin. Dans l’histoire de longue durée, cette voie a été empruntée à maintes reprises dans les deux sens par les populations nomades. C’est une voie historique de passage et de pénétration pour les envahisseurs nomades en direction du cœur du territoire chinois. Après avoir franchi la Dzoungarie, ces derniers empruntaient le fameux « corridor » du Gansu pour atteindre le cœur de la Chine impériale. Les villes principales du bassin de la Dzoungarie sont aujourd’hui Urumqi, Karamay, Altaï, Jinghe, Shihezi, Kuitun, Changji, Botala, Tacheng et Yining/Ghulca (pour les Ouïgours). Certaines d’entre elles -comme Kuitun par exemple- n’étaient que des villages avant 1949, alors que d’autres -comme Karamay ou Shihezi qui comptent respectivement 261 000 et 620 000 habitants- sont des villes nouvelles qui se sont développées à partir de la fin des années 50 sous l’impulsion du pouvoir chinois et de son relais local, le Corps de construction et de production du Xinjiang (Bingtuan) dont nous reparlerons. Quant à la ville d’Urumqi/Urümchi (en turc ouïgour) la capitale provinciale située à quelque 3 000 km de Pékin, bien que plus ancienne, elle a également pris son essor après 1949. Cette ville, considérée comme la plus enclavée du monde puisque depuis son centre il faut parcourir environ 2 250 km pour atteindre une côte, comptait en l’an 2000 un peu plus de deux millions d’habitants.
6Outre le bassin de la Dzoungarie, le Xinjiang comprend au sud cette fois, le bassin du Tarim. Ce dernier s’étend sur 530 000 km2 dont 324 000 km2 sont couverts par le célèbre et terrible désert du Taklamakan, le plus grand désert de Chine et de l’Asie de l’Est. Ce dernier est très inhospitalier. Son climat est chaud en été (la moyenne annuelle maximale atteint 39°) et froid en hiver (il peut atteindre moins 20°). Les précipitations y sont très peu nombreuses, ce qui a rendu possible des découvertes archéologiques exceptionnelles (cfr. les célèbres « momies » du Tarim10). Le bassin du Tarim est également bordé de hautes chaînes montagneuses. Au nord, les Tian Shan le sépare du bassin de la Dzoungarie. A l’ouest, cette même chaîne marque la frontière entre le territoire chinois et celui de la République kirghize. Au sud-ouest, le plateau des Pamirs sépare le Xinjiang du Tadjikistan alors que le corridor du Wakhan, prolongement de l’Hindou Kouch, marque la frontière avec l’Afghanistan. Au sud, le bassin du Tarim est séparé du territoire du Pakistan et de la région disputée du Cachemire par la chaîne des Kunlun qui s’étend d’ouest en est entre les Pamirs au Tadjikistan et les contreforts du Tibet, et par la chaîne du Karakorum. L’altitude moyenne de la chaîne des Kunlun atteint 5000 mètres au-dessus du niveau de la mer et son point culminant est situé à 7282 mètres. Dans son prolongement, le massif du Karakorum, abrite le célèbre Qogir, le K2, qui culmine à 8611 mètres. C’est là également qu’a été construite la fameuse « Karakorum Highway » qui permet de relier le sud Xinjiang (en l’occurrence la ville de Kachgar) au Pakistan (la ville de Gilgit puis Islamabad) via la Passe de Khunjerab (4655 m). Les chaînes montagneuses enserrent donc le bassin du Tarim dans trois directions. Ce dernier n’est ouvert que sur l’est, en direction du territoire chinois proprement dit, à travers le bassin de Turfân et la région de Hami par où le voyageur gagne ensuite le corridor du Gansu.
7Pourtant, ces hautes chaînes montagneuses n’isolent pas véritablement cette région. En effet, il existe de nombreuses passes, empruntées depuis des temps immémoriaux pour gagner les territoires adjacents de l’Asie centrale occidentale et du Sous-Continent indien. Par contre, les montagnes ont une influence décisive sur le climat du bassin du Tarim. En bloquant les courants humides venus de l’océan, elles contribuent à en faire une zone aride. Les précipitations annuelles y sont en moyenne comprises entre 20 et 150 mm. Cependant, ce bassin est arrosé par de nombreux cours d’eaux descendus des montagnes environnantes, dont le plus important est le fleuve Tarim qui est alimenté par les fontes de neiges et les glaciers, surtout en été, des monts Kunlun et aussi des Tian Shan. Ce fleuve, le quatrième en importance de Chine, borde par l’ouest et le nord le désert du Taklamakan sur près de 2046 km avant de prendre la direction du bassin désertique du Lob Nor situé à l’est du Xinjiang, où l’on trouvait naguère un vaste lac de près de 2000 km2, le deuxième plus grand lac endoréique du pays, aujourd’hui tari.
8Une série d’oasis, qui sont autant de villes-étapes des antiques routes de la Soie, est disposée autour du désert du Taklamakan. Les plus importantes de ces villes situées au nord du bassin du Tarim sont Korla, Kûcha, Âqsû et Kachgar. Au sud, il faut signaler Yârkand, Kho-tan et enfin Keriya, l’Ultima Thulé de Kachgarie selon l’expression de Clarmont Percival Skrine11. Par ailleurs, à l’est du Xinjiang se trouve également l’antique ville de Turfân, célèbre en Chine pour l’excellence de ses raisins. Cette dernière est située au cœur de l’oasis de Turfân qui constitue la deuxième plus profonde dépression de la planète après la mer Morte avec une altitude atteignant 154 m au-dessous du niveau de la mer. C’est là qu’a été relevé un record de température en Chine avec 76°6 le 25 juillet 1962 ! Plus à l’est encore, en direction de la province du Gansu, est enfin située la ville-oasis de Hami/Qumûl (en ouïgour), célèbre dans toute la Chine pour la douceur de ses melons (plus de 37 variétés).
9D’un point de vue climatique, étant donné l’éloignement de l’ensemble de la région du Xinjiang par rapport aux océans, et vu le fait qu’il est entouré de hautes montagnes, le climat de ce bassin est aride, venteux avec un ensoleillement important et de faibles précipitations sauf dans les zones montagneuses. Malgré la faiblesse des précipitations, les ressources en eau sont cependant abondantes grâce aux chaînes de montagnes qui entourent la région. La moyenne d’eau de surface disponible par habitant au Xinjiang est ainsi deux fois plus élevée que la moyenne nationale chinoise12. Par ailleurs, les habitants des oasis ont appris à capter l’eau des nappes souterraines et à la transporter sur une grande distance grâce à un système de puits et de canaux souterrains sophistiqué, les karetz. On en compterait près de 5 000 km dans la région. Sur le plan hydrographique, on ne dénombre par ailleurs pas moins de 570 cours d’eau de toutes tailles au Xinjiang -la plupart cependant de petites taille et de faible volume-. La région compte néanmoins des fleuves importants. Le Tarim est le principal fleuve du sud Xinjiang. L’extrême nord de la Dzoungarie est pour sa part arrosé par le fleuve Kara Irtych qui prend sa source dans les Monts Altaï en Mongolie et s’étend sur 633 km en territoire chinois avant de passer au Kazakhstan et de rejoindre le fleuve Ob en Fédération de Russie. Il termine sa course dans l’océan Arctique. Au sud de la Dzoungarie est situé un autre fleuve important, l’Ili. Né dans les Tian Shan au Xinjiang de la confluence des fleuves Tekes et Kunghes, le fleuve Ili s’étend sur 1439 km (dont 624 en territoire chinois) avant d’aller se jeter au Kazakhstan, dans le lac Balkhach, dont il est l’un des trois plus importants affluents. Il arrose ainsi le territoire du Kazakhstan sur environ 815 km. En Chine, ce fleuve arrose la large vallée de l’Ili qui est l’une des régions agricoles les plus riches du Xinjiang. On y trouve des pâturages propices au développement du pastoralisme nomade.
2. Remarques générales sur la population du Xinjiang/Turkestan oriental
10Cette région immense, à la géographie physique complexe, abrite également un ensemble de populations formant un paysage ethnique non moins bigarré. Du point de vue de la population, plusieurs caractéristiques doivent être relevées. Tout d’abord, en raison de sa géographie physique, cette immense région de la Chine est aussi une des moins densément peuplées du pays avec les provinces avoisinantes du Tibet, du Qinghai et du Ningxia. Lors du Ve recensement de population organisé par Pékin en 2000, la région comptait officiellement 19,25 millions de personnes « enregistrées » (incluant les personnes entrées mais pas la population sortante)13. Couvrant un sixième du territoire chinois, la région autonome du Xinjiang regroupe donc en 2000 moins de 2 % de la population totale de la Chine. Sur le plan démographique, à l’échelle chinoise, elle doit donc être considérée comme une province de petite taille.
11Toutefois, replacé dans le contexte de l’Asie centrale, le Xinjiang/Turkestan oriental possède une population de taille substantielle, comparable en fait à celle d’un grand pays centre-asiatique. En effet, il arrive en deuxième position en termes de population, derrière l’Ouzbékistan (27,3 millions d’habitants environ en 2006), mais devant le Kazakhstan (15,23 millions d’habitants en 2006), le Tadjikistan (7,32 millions d’habitants en 2006), le Turkménistan (5,04 millions d’habitants en 2006) et la République kirghize (5,21 millions d’habitants en 2006)15.
12Du point de vue de sa composition ethnique, en 1990, à la veille de l’indépendance des Républiques centre-asiatique, plus de 58 % de la population de la région était d’origine ethnolinguistique non-Han (c’est-à-dire non ethniquement chinoise selon la catégorie établie par le pouvoir chinois16). Cette proportion s’élève à plus de 62 % si on ajoute les Hui ou musulmans chinois présents dans la région17. Cette dernière population est une minorité religieuse plutôt qu’une minorité ethnique. Les Hui, aussi appelés « Dounganes » en Asie centrale, sont en effet des Han islamisés à qui le gouvernement de la République populaire a octroyé un statut de minorité ethnique qu’ils ont si bien intégré qu’ils s’en réclament aujourd’hui18. Au moment où la région autonome ouïgour du Xinjiang a été créée par les autorités chinoises le 1er octobre 1955, elle comptait officiellement 13 nationalités différentes19. En 1990, les autorités chinoises y recensaient officiellement 47 nationalités sur les 55 que compte officiellement le pays20. En termes de diversité ethnique, la région occupe ainsi la deuxième place parmi les provinces chinoises, juste derrière la province du Yunnan située au sud de la Chine. Cette diversification ethnique croissante du Xinjiang serait le résultat de migrations21. La diversité ethnique de cette région, souvent mise en avant par les autorités chinoises pour des raisons politiques, est cependant artificiellement gonflée. En effet, de nombreux groupes ethniques présents dans la région du Xinjiang/Turkestan oriental sont quantitativement très faibles. Comme nous le montre le tableau ci-dessous, certains de ces groupes ethniques comptent à peine quelques dizaines de milliers voire quelques milliers de personnes. Le caractère « multiethnique » de cette région doit donc être nuancé.
13Sur le plan ethnique, une caractéristique doit cependant retenir l’attention : la présence massive dans cet espace géographique de populations turcophones, très différentes des Han en termes de langue, de religion, de culture, de tradition et de coutumes mais qui entretiennent des liens de proximité historiques, ethniques, linguistiques, culturels et religieux avec les populations vivant en Asie centrale.
14Si on observe la carte ethnique de la région, cinq groupes de population se détachent par leur importance numérique. Il s’agit dans l’ordre des « Ouïgours » (47 % de la population en 1990), des Han -c’est-à-dire les populations ethniquement chinoises- (37,6 % de la population en 1990), des Kazakhs (6,8 % de la population en 1990) et enfin dans une moindre mesure, des Hui (3,8 % de la population en 1990) et des Kirghizes (1 % de la population en 1990). Parmi ces cinq groupes, trois sont turcophones (Ouïgours, Kazakhs et Kirghizes23) et deux sont transfrontaliers (le cas des Ouïgours est particulier). Des Tadjiks24 et des Ouzbeks25 vivent également au Xinjiang, quelques dizaines de milliers au plus.
15Les Kirghizes sont concentrés dans la préfecture autonome kirghize de Kizilsu, une unité administrative créée par les autorités chinoises en 1954 dans le sud-ouest du Xinjiang, et frontalière de l’actuelle République kirghize et du Tadjikistan. De petites communautés kirghizes sont également installées dans le nord du Xinjiang. Par ailleurs, on trouve quelques groupes de Kirghizes -numériquement très faibles- en dehors de Xinjiang, principalement dans la province chinoise du Heilongjiang. Ces derniers sont cependant bouddhistes contrairement aux Kirghizes du Xinjiang qui sont musulmans sunnites de rite hanafite (comme la grande majorité des populations musulmanes d’Asie centrale qui appartiennent également à l’école juridique et théologique sunnite du hanafisme)26. Nous ne possèdons guère d’informations sur d’éventuels liens que les Kirghizes du Heilongjiang entretiendraient avec les Kirghizes vivant en République kirghize. Avec environ 1 % de la population, la minorité kirghize du Xinjiang est numériquement faible à l’échelle de la région autonome mais aussi de la République kirghize voisine. En 1989, les Kirghizes vivant en RSS du Kirghizstan étaient en effet 2,23 millions27. Malgré sa faible importance numérique, la présence kirghize au Xinjiang constitue néanmoins un facteur qui n’est pas sans conséquences sur les relations sino-kirghizes.
16Plus importante est la présence kazakhe. Les Kazakhs, qui comme les Kirghizes, les Hui28 et les Ouïgours29 sont musulmans sunnites de rite hanafite, étaient selon le recencement de 1990 plus de 1,11 millions. Ils sont principalement installés dans la préfecture autonome kazakhe d’Ili - elle-même divisée en trois districts : Ili, Tacheng et Altaï- située à la frontière avec le Kazakhstan. Outre cette préfecture, des Kazakhs vivent également dans le district autonome kazakh de Barkol situé dans la région de Hami/ Qumûl dans l’est du Xinjiang à proximité de la Mongolie extérieure, et dans le district autonome kazakh de Mori au nord d’Urumqi/Urümchi dans la région de Changji30. Selon le recensement de 1990, les Kazakhs représentaient 6,8 % de la population totale de la région autonome. Cette proportion n’est pas négligeable mais elle devient encore plus significative lorsque l’on tient compte de la concentration géographique des Kazakhs dans la région d’Ili, frontalière du Kazakhstan. En 2002, la préfecture autonome kazakhe d’Ili comptait à elle seule 1 021 497 sur les 1 333 455 Kazakhs recensés au Xinjiang soit 76,6 % de l’ensemble de la population kazakhe de la région autonome. Dans cette préfecture, les Kazakhs représentent environ un quart de la population31. Sur le plan numérique, à l’échelle du Kazakhstan voisin, la minorité kazakhe du Xinjiang n’est pas négligeable. En 1989, cette république -encore soviétique- comptait en effet seulement 6,35 millions de Kazakhs32. Autrement dit, la population kazakhe du Xinjiang était équivalente à environ 17 % de l’ensemble de la population kazakhe de la RSS du Kazakhstan. Les Kazakhs du Xinjiang forment ainsi la plus importante minorité kazakhe vivant en dehors du Kazakhstan33. Étant donné l’importance numérique et la concentration géographique de cette minorité kazakhe aux frontières de la Chine avec la République socialiste soviétique du Kazakhstan, la perspective de création d’un État éponyme pour les Kazakhs au moment de la disparition de l’URSS n’était pas sans conséquences pour les autorités chinoises.
17Outre ces deux groupes ethniques transfrontaliers, il faut également s’arrêter un moment sur le cas particulier des populations « ouïgoures » en commençant par une remarque sur l’emploi de cet ethnonyme. Bien que ce nom renvoie à un peuple ancien connu dans les sources chinoises de l’époque de la dynastie Tang (618-906), l’emploi de l’ethnonyme « Ouïgour » pour désigner les habitants turcophones des villes-oasis du Xinjiang/Turkestan oriental est récent. Le xixe siècle l’ignore. Robert Shaw qui participe en 1869 à la mission diplomatique britannique menée par D. Forsyth auprès de Ya’ qûb Bey, l’émir de Kachgar, parle à cette époque de « musulmans » pour qualifier les habitants de la région34. Le colonel russe Aleksei Nikolaevich Kuropatkin, qui ne l’ignore pourtant pas, ne l’utilise pas non plus dans le récit de son ambassade de 1876 en Kachgarie publié en 188235. Pour désigner les habitants de la région, il parle des « Kachgariens » et constate que bien qu’ils appartiennent à la même « race », pour s’identifier, ces derniers utilisent le nom des oasis d’où ils sont originaires36. Cette dernière caractéristique sera observée par d’autres voyageurs étrangers. Selon le rapport établi par F. Grenard à la suite de la mission ethnographique qu’il mène dans cette région avec J. L. Dutreuil de Rhins entre 1890 et 1895, le groupe ethnique le plus nombreux -c’est-à-dire le groupe des cultivateurs sédentaires vivant dans les oasis du Tarim-, « malgré son homogénéïté évidente (...) n’a aucun nom ethnique. Les écrivains persans ont appelé le pays Turkestan, le peuple Turk, la langue turki ; mais les indigènes ne se donnent jamais à eux-même le nom de Turk. Ils emploient quelquefois les termes Turkestan et turki, mais ces termes sont essentiellement persans dans leur forme, importés de la littérature persane. L’expression la plus ordinairement usitée pour désigner le bassin du Tarim est celle très vague de mouçoulman yourti, la terre des musulmans, dont les habitants sont les musulmans, mouçoulman khalk, qui parlent la langue musulmane, mouçoulman tili. Ceux qui veulent être plus précis le sont trop, ils se disent gens de Kachgar, de Khotan, de Tourfan, etc. (Kachgarlyk, Khotanlyk, etc.) (...) Les Chinois appellent leurs sujets du Turkestan Chan t’eou, les ’enturbannés’, Hoei hoei (Hui Hui) ou Hoei tzeu (Hui zu), les musulmans. (...) Les Mongols de Dzoungarie connaissent leurs voisins sédentaires d’Ili, d’Ouroumtchi, de Kourla, de Tourfan, etc. sous le nom de Khoton, c’est-à-dire citadins ou villageois. C’est justement le sens du mot Sart, qui dans le Turkestan russe sert à désigner la population sédentaire, mais cette expression n’a point droit de cité dans le Turkestan chinois »37. Dans ce rapport, Grenard qualifie les habitants de la région de ’Turcs’. Il n’ignore pas non plus l’ethnonyme « Ouïgour », mais il déclare lui-même qu’il est complètement oublié dans la région qui vit pourtant briller la puissance de ce peuple entre le Ville et le xiiie siècle. Il relève ainsi « (a)ussi convient-il de ne pas attacher une trop grande importance à ce nom de Ouigour, dont le souvenir même est aujourd’hui entièrement aboli dans des régions où il a été universellement connu et employé durant des siècles »38.
18En fait, l’ethnonyme « Ouïgour » ne réapparaît qu’au début du xxe siècle, sous l’influence des Soviétiques. Selon Joseph Fletcher, il est utilisé pour la première fois lors d’une réunion tenue à Tachkent en 1921 pour servir de désignation commune aux habitants turcs sédentaires du Xinjiang39. Le chercheur américain Nathan Light qualifie cette réactivation du nom de « Ouïgour » d’« événement fondateur » pour l’identité ouïgoure moderne40. Ce nom va en effet servir d’assise à une prise de conscience communautaire parmi les populations du bassin du Tarim où le nationalisme était en gestation depuis la toute fin du xixe siècle41. S’il est réactivé dans les années 20, l’usage de cet ethnonyme ne se popularise cependant pas immédiatement comme le montre les récits de voyageurs de l’époque.
19Ainsi, Clarmont P. Skrine, le consul britannique en poste à Kachgar entre 1922 et 1924, n’en fait pas usage dans son livre de souvenirs consacré à l’ « Asie centrale chinoise » publié en 192642. Il ne l’ignore pourtant pas43, mais pour lui, suivant l’usage local, les habitants de la région sont simplement des « Turkis » ou des « Eastern Turkis ». Lorsqu’il entend préciser, il parle de « Yârkandi », « Kachgari », « Khotani », « Kerialik », etc. reprenant le mode d’identification traditionnel des habitants de la région par rapport à la ville-oasis d’où ils sont originaires, une habitude déjà constatée par Kuropatkin quarante ans plus tôt. Dans un article présentant le « Turkestan chinois » publié en 1933, un autre très grand connaisseur de la région, l’américain Owen Lattimore, utilise également le terme « Turki » pour qualifier la population des villes-oasis du bassin du Tarim44. A peu près à la même période, deux voyageurs occidentaux traversent le Xinjiang alors très troublé politiquement. Il s’agit du journaliste britannique Peter Fleming et de l’écrivain-voyageur suisse Ella Maillart. Le premier utilise l’expression « turkmène » pour qualifier la majorité des habitants de cette région45 alors que sa compagne de voyage qui, comme Skrine, n’ignore pas l’ethnonyme « Ouïgour »46, reprend le mot « turkis » pour qualifier les habitants des oasis du Tarim47.
20A la fin des années 30 cependant, sous l’influence des autorités locales -c’est-à-dire celle du seigneur de la guerre Sheng Shicai très proche des Soviétiques entre 1934 et 1941-, l’utilisation de l’ethnonyme commence réellement à se répandre. Selon F. Aubin, il est diffusé à Urumqi en 1934 par une association pour la promotion de la culture ouïgoure48. Il apparaît en tout cas dans le livre d’Aitchen Wu, Turkistan Tumult publié en 1940. Ce dernier relève en effet que les « Moslems are the, original inhabitants of Sinkiang (...) sometimes they are referred to as Turkis or Uighurs, this last name (...) the Sinkiang Government has enacted that in official documents they shall be called not Chan-t’ou but Wei-wu-erh, which is a Chinese translation of Uighur »49. Toutefois, dans son célèbre Pivot of Asia publié en 1950 ainsi que dans la seconde édition de Inner Asian frontiers of China datant de 1951, Owen Lattimore, l’ignore encore50.
21En pénétrant au Xinjiang, les autorités communistes chinoises vont reprendre l’usage de l’administration précédente. Mao Zedong l’utilise par exemple dans un cable du 26 septembre 1949 à Peng De-huai. Il note que le « point crucial du problème de la libération du Xinjiang réside dans la coopération rapide et intense entre notre parti et les Ouïgours (Wei zu) »51. Elles décident de créer le 1er octobre 1955 la Xinjiang Weiwuer zizhiqu (la région autonome « ouïgoure » du Xinjiang). Officiellement, selon une déclaration de Zhou Enlai datant d’avril 1953, les autorités n’ont pas choisi de baptiser la région le « Weiwuersitan » (Ouighouristan), parce que cette dernière comptait, en plus des Ouïgours, « douze autres nationalités ». Zhou Enlai ajoute que l’on ne pouvait, pas appeler cette région le « Shisansitan » (le « pays des Treize minorités »). On a donc selon lui décidé d’appeler cette région le Xinjiang Weiwuer zizhiqu52 (la région autonome ouïgoure du Xinjiang) « parce que les Ouïgours représentaient cependant plus de 70 % de la population de la zone »53. Malgré la rhétorique de Zhou Enlai, on peut penser que la direction chinoise était très consciente du risque que l’utilisation d’une telle expression lui aurait fait courir. Elle risquait en effet de créer un sentiment d’unité au sein des populations turcophones des différentes oasis du bassin du Tarim, voire d’alimenter un sentiment national pan-ouïgour en fournissant à ces populations un cadre de référence qui épousait un territoire déterminé. Pékin s’est donc empressé d’instrumentaliser la présence d’autres groupes ethniques pour entretenir les divisions dans la région en y installant dès avant la création officielle de la région autonome ouïgoure diverses unités administratives autonomes. Elle crée ainsi dès 1954 la Préfecture autonome kazakhe de Ili ainsi que le district autonome kazakh de Mori (Mulei), le district autonome kazakh de Barkol, la Préfecture autonome kirghize de Kizilsu et le district autonome tadjik de Tashkurghan. S’y ajoutent les préfectures autonomes mongoles de Bayangol et Bortala ainsi que la préfecture autonome Hui de Changji, le district autonome xibe de Qapqal, le district autonome mongol de Hoboksar et le district autonome Hui de Qarâshah.
22L’utilisation de l’ethnonyme « ouïgour » s’est néanmoins diffusée à partir de ce moment pour qualifier les habitants turcophones des villes-oasis. Il est aujourd’hui entré dans le vocabulaire courant. On se souviendra toutefois qu’on l’utilise également pour désigner des unités ethniques -comme les Lopliks (habitants de la région du Lob Nor), les Taghlïq, les Abdâls ou les Dolans- autrefois différenciées par rapport aux habitants turcophones des villes-oasis du Xinjiang/Turkestan oriental mais qui se sont semble-t-il assimilées progressivement depuis le début du xxe siècle54. Il existe donc une diversité chez les « Ouïgours » qu’il ne faudrait pas négliger. En outre, l’utilisation de l’ethnonyme « Ouïgour » a longtemps masqué la persistance du localisme55 -que J. Rudelson a baptisé les « identités d’Oasis »- produit de l’isolement géographique des différentes villes-oasis et des influences culturelles diverses qui se sont exercées au Xinjiang/Turkestan oriental à travers l’histoire56. Selon l’enquête de terrain effectuée par ce chercheur à la fin des années 80, ce phénomène que les observateurs occidentaux avaient enregistré au xixe siècle paraît s’être maintenu dans la région jusqu’à la veille de l’indépendance des républiques d’Asie centrale. Mais cette situation n’est pas figée. Des intellectuels ouïgours nationalistes interrogés par T. Kostrzewa en 1995 ont ainsi rejeté la thèse de l’existence du localisme telle qu’avancée par Rudelson57. G. Bovingdon a montré que le développement de l’éducation au Xinjiang a contribué à réduire ce phénomène au profit du développement d’une identité pan-ouïgoure58. Par ailleurs, les travaux de l’ethnologue britannique, Joanne Smith, basés sur une étude de terrain réalisée au milieu des années 9059, ont également montré que la fragmentation de l’identité ouïgoure, liée aux « identités d’Oasis » décrites par Rudelson, avait tendance à s’estomper au profit du renforcement d’un sentiment d’appartenance national commun aux Ouïgours en opposition aux Han. Selon J. Smith, la frontière ethnique existant entre Han et Ouïgours s’est renforcée au cours des années 90, contribuant ainsi au développement d’un sentiment d’appartenance national commun à l’ensemble des Ouïgours, quel que soit l’oasis dont ils sont originaires. Deux enquêtes réalisées en août 2000 puis entre mai et juin 2001 dans cinq villes du Xinjiang par Herbert S. Yee relèvent que les Ouïgours manifestent une identité ethnique forte et sont particulièrement attachés au Xinjiang/Turkestan oriental60. On doit toutefois considérer la création d’un sentiment national au sein des populations ouïgoures de la région comme un processus évolutif encore inachevé. Certains des informateurs interrogés par Joanne Smith dans son étude de terrain pensent que les Ouïgours traversent aujourd’hui encore une période de transition. Les Ouïgours dans la région demeurent divisés entre eux suivant notamment un clivage générationnel. Joanne Smith a montré que les jeunes générations étaient davantage travaillées par le sentiment national que leurs aînés, ce qui laisse à penser que dans l’avenir, l’idée nationale pourrait continuer à se renforcer.
23Les « Ouïgours » sont proches de leurs voisins centre-asiatiques par l’histoire et la culture. Ils font en effet partie de la même zone culturelle turco-persane qui s’étend des Balkans à la muraille de Chine et au nord de l’Inde61. Ils le sont également par la religion car comme la grande majorité de leurs voisins centre-asiatiques, ils sont musulmans sunnites de rite hanafite. Ils le sont enfin par la langue. Le « ouïgour » appartient au groupe oriental de la branche sud-orientale des langues turkes. Ce groupe comprend le Ouïgour moderne, le Taranchi (ouïgour de l’Ili) et différents dialectes orientaux du Ouïgour : Kachgar, Yârkand, Khotan, Kerya, Cherchen, Âqsû, Kûcha, Turfân, Hami, Guma, Kälpin, Lopnor, Eynu (Abdal), etc. Il est parlé au Xinjiang/Turkestan oriental et dans les régions avoisinantes (Kazakhstan, Kirghizstan, Ouzbékistan) par plus de 10 millions de locuteurs. Il utilise l’écriture arabo-persane. Le ouïgour moderne est proche de l’ouzbek62. Enfin, le vocabulaire ouïgour comporte de nombreux mots empruntés au russe et au chinois, mais surtout au persan. Selon Nadereh Badii, jusque 50 % des mots ouïgours seraient d’origine persane63. Cette grande proximité ne signifie cependant pas qu’il existe une solidarité automatique entre les Ouïgours et les autres groupes ethniques turcophones d’Asie centrale ou du Xinjiang64.
24En termes numériques, les Ouïgours constituent la seconde plus importante « minorité nationale » musulmane de Chine derrière les Hui. C’est également la « minorité ethnique » la plus nombreuse de la région du Xinjiang avec 47 % de la population en 1990 et 46 % selon le recensement de 2000. Les populations ouïgoures sont surtout concentrées dans le sud du Xinjiang (bassin du Tarim et région de Turfân) et aussi dans la région de Yming/Guldja dans le bassin de Dzoungarie comme le montre le tableau ci-dessous.
25Outre les Ouïgours vivant au Xinjiang/Turkestan oriental, il existe des communautés établies hors des frontières chinoises. Parmi les composantes de ce que l’on peut appeler la « diaspora ouïgoure »66, les communautés les plus importantes numériquement hors de Chine sont installées depuis le xixe siècle en Asie centrale67. On en trouve sur le territoire actuel du Kazakhstan, de la République Kirghize, de l’Ouzbékistan, et dans une moindre mesure au Turkménistan. Dès les années 30, des Ouïgours se sont également implantés en Arabie Saoudite. On trouve aujourd’hui des Ouïgours dans les villes de la Mecque, Médine, Taëf et Djeddah. Cette communauté compte plusieurs dizaines de milliers de personnes, peut-être jusqu’à 100 000 individus selon des estimations avancées par B. Baici68. Elle jouerait un rôle important pour la diaspora en finançant notamment les activités des organisations ouïgoures implantées hors de Chine69.
26Au moment de la prise de pouvoir par le Parti Communiste chinois en 1949, des Ouïgours se sont également réfugiés dans les zones géographiques frontalières du Xinjiang/Turkestan oriental, principalement au Pakistan, au Tibet, en Mongolie, au Cachemire, en Inde et en Afghanistan. Certains y ont fait souche mais pour nombre d’entre eux, ces destinations n’ont été que des zones de transit vers d’autres pays d’accueil comme l’Arabie Saoudite, l’Égypte et surtout la Turquie. Ce dernier pays compte aujourd’hui une importante communauté ouïgoure estimée à plusieurs dizaines de milliers de personnes -jusqu’à 40 à 50 000 selon des chiffres cités par Y. Shichor70-. Elle était à l’origine principalement installée à Istanbul et dans la ville de Kayseri en Cappadoce. Depuis les années 50, les Ouïgours de Turquie -dont une partie, surtout les jeunes générations, tend désormais à s’assimiler- ont été -et restent- très actifs dans la défense de l’idée d’un Turkestan indépendant notamment à travers de nombreuses organisations communautaires, des journaux et des publications71.
27La Russie, l’Allemagne -essentiellement Munich- où des Ouïgours ont suivi l’émigration turque dès les années 60 et sont devenus politiquement très actifs à travers des associations comme le Centre d’information du Turkestan oriental (ETIC), l’Union Est-Turkestanaise en Europe (ETUE) et désormais le Congrès Mondial Ouïgour72, les pays Scandinaves (Norvège et Suède), l’Angleterre, les Pays-Bas, la Belgique, mais aussi l’Australie, le Canada et les États-Unis accueillent également de petites communautés ouïgoures installées plus récemment. Dans les années 1990, la diaspora ouïgoure s’est structurée et politisée de manière croissante73. Grâce à internet74, les organisations de la diaspora jouent désormais un rôle essentiel en tant qu’éveilleur pour leurs communautés mais aussi comme informateur et relais de la situation des Ouïgours du Xinjiang auprès de la communauté internationale.
28Sur le plan numérique, les plus importantes communautés ouïgoures hors de Chine sont établies en Asie centrale. Le nombre réel de Ouïgours vivant dans cette partie du monde est difficile à estimer. Un recensement soviétique de 1989 l’évaluait à 262 643 personnes : 181 500 au Kazakhstan, 36 779 au Kirghizstan, 35 762 en Ouzbékistan et 1400 au Turkménistan75. Mais certains représentants d’organisations ouïgoures rencontrés en 2001 à Bruxelles donnent des chiffres beaucoup plus élevés. Selon certains d’entre eux, la population ouïgoure présente en Asie centrale pourrait atteindre 800 000 à 1 000 000 d’individus voire davantage76.
29Officiellement, la communauté ouïgoure la plus importante d’Asie centrale réside au Kazakhstan. Dans ce pays, grâce à la politique culturelle favorable développée à leur égard à l’époque soviétique77 et aux mariages endogamiques, les Ouïgours ont maintenu une forte identité en conservant leur langue et leurs traditions. Cette communauté se répartit en deux groupes -les « Yärlik » (« les locaux ») et les « Khitailiq » (« ceux de Chine »)-, en fonction du moment de leur arrivée sur le territoire actuel de cette république centre-asiatique78. Le premier groupe est composé de descendants de Turkestanais orientaux émigrés de longue date (xixe siècle) alors que le second regroupe les Ouïgours arrivés dans les années 50 et 60, notamment à l’occasion des événements de 1962 au Xinjiang. Bien qu’elles n’aient pas totalement disparu, les différences culturelles et psychologiques existantes entre ces deux groupes se sont estompées, surtout parmi les jeunes générations. On retiendra que les « Khitailiq » ont conservé davantage de liens et de relations avec le Xinjiang que les « Yàrlik » qui ne disposaient plus de relations familiales en Chine. Toutefois, la réouverture des frontières du Xinjiang dans les années 1980 a permis le rétablissement puis l’essor des contacts entre l’ensemble des populations ouïgoures vivant des deux côtés de la frontière79. Ces interactions importantes et fréquentes entre Ouïgours du Kazakhstan et du Xinjiang ont contribué à la création et au renforcement d’une identité ouïgoure commune80. Elles ont par ailleurs renforcé le sentiment national ouïgour chez les Ouïgours du Kazakhstan81.
30Sur le plan de leur localisation géographique, les communautés ouïgoures kazakhstanaises sont installées essentiellement autour et dans la ville d’Almaty où elles représentent environ 3 % de la population de l’ancienne capitale kazakhe et dans la région (oblast) d’Almaty. Dans cette zone, les plus importants groupes ouïgours résident dans les districts (raion) de Ouïgour, Chilik, Panfilov et Enbekshi-Kazakh, proches de la frontière chinoise. En ce qui concerne l’importance numérique des Ouïgours du Kazakhstan, les estimations oscillent selon les sources entre 185 000 et 500 000 individus. Selon un recensement de population effectué en 1999, 210 300 Ouïgours vivaient sur le territoire kazakhe à cette date82. Les Ouïgours forme le septième groupe ethnique en importance au Kazakhstan derrière les Kazakhs, les Russes, les Ukrainiens, les Ouzbeks, les Allemands et les Tatars. Ils représentaient à ce moment 1,4 % de la population totale de cette république.
31En République kirghize, la population ouïgoure se répartit essentiellement dans deux zones : au nord du pays, elle est localisée principalement autour de la capitale, Bichkek (districts de Tokildash, Lebedev et Alamidin) et dans les régions (oblasts) de Chu, Talas, Naryn et Issyk-Koul. Au sud du pays, elle est installée dans la vallée de Ferghana, dans les régions (oblasts) de Jalalabad, de Och et dans une moindre mesure de Batken83. En ce qui concerne son importance numérique, selon un recensement de population effectué en 1999, la population ouïgoure s’élèvait à 46 733 individus : 32 300 au nord du pays et 14 433 dans la partie kirghize de la vallée du Ferghana84. Les Ouïgours étaient ainsi officiellement à ce moment le sixième groupe ethnique en importance du pays derrière les Kirghizes, les Ouzbeks, les Russes, les Dounganes85 et les Ukrainiens. Ils représentaient environ 1 % de la population totale.
32Pour cette république également, certaines organisations de la diaspora ouïgoure avancent des chiffres plus élevés. Selon elles, 100 000 voire 250 000 Ouïgours vivraient en fait sur le territoire kirghiz. Ces dernières font en effet remarquer-sans qu’il nous soit cependant possible de confirmer cet argument ni de fixer un ordre de grandeur de cette population éventuelle-, que de nombreux Ouïgours de la région de Och et de Jalalabad dans la vallée du Ferghana ont opté pour la nationalité ouzbèque à l’époque soviétique et sont donc classés parmi les Ouzbeks86. Bien qu’il soit délicat de se prononcer définitivement sur cette question, on retiendra que les Ouïgours pourraient donc être plus nombreux dans la vallée du Ferghana que les sources officielles ne le laissent penser.
33Le cas de la population ouïgoure vivant en Ouzbékistan est particulier. De nombreux Ouïgours ont été « ouzbèquisés » au cours du xxe siècle en raison de leur proximité culturelle et linguistique avec les Ouzbeks mais aussi sous la pression du gouvernement soviétique puis ouzbèque indépendant87. Ils se déclarent donc « Ouzbeks » plutôt que « Ouïgours ». Leur nombre exact est inconnu. Selon le recensement soviétique de 1989, la population ouïgoure d’Ouzbékistan s’élevait à 35 762 individus88. On ne dispose pas de chiffres officiels postérieurs à cette date pour ce pays. Les organisations ouïgoures citent pour leur part des estimations beaucoup plus importantes. Certains intellectuels ouïgours d’Ouzbékistan parlent de 200 000 voire 500 000 Ouïgours vivant en fait dans cette république, sans qu’il soit possible de vérifier ces chiffres89. On se souviendra en tout cas que l’on trouve des Ouïgours dans la vallée de Ferghana tant du côté kirghize comme nous l’avons vu, que du côté ouzbèque notamment dans le district de Pakhtabad dans la région -vilayet- d’Andijan et dans la ville d’Andijan. La vallée de Ferghana a en effet servi de refuge lors de troubles politiques au Turkestan oriental. Historiquement, les contacts entre les Ouïgours -particulièrement ceux de Kachgar, d’Aksu et de Yarkand- et la vallée du Ferghana ont éte nombreux au xixe et xxe siècles, ce qui explique la présence de communautés se déclarant « ouïgoures » dans cette zone. Ailleurs en Ouzbékistan, on trouve également des quartiers Ouïgours (mahalla) à Tachkent et dans sa région.
34Enfin, au Turkménistan réside depuis 1890 une petite communauté ouïgoure. Elle vit principalement à Bairam-Ali dans l’oasis de Mourghab. Concernant son importance numérique, les estimations varient entre 5 000 et 20 000 personnes selon les sources90. Mais selon A. Kamalov, en 1996, la communauté ouïgoure du Turkménistan comptait seulement 1400 individus91. Très isolée, elle semble avoir perdu le contact avec les autres groupes ouïgours d’Asie centrale et serait en voie d’assimilation complète. Vu depuis Pékin, la présence de cette population ouïgoure au Xinjiang/Turkestan oriental avec d’importantes ramifications en Asie centrale voisine constitue une importante source d’inquiétude.
3. Remarques sur la population han du Xinjiang/Turkestan oriental
35Outre les groupes ethniques turcophones passés en revue, le Xinjiang/Turkestan oriental abrite aussi des Han, c’est-à-dire des « Chinois ethniques » selon la classification officielle établie par Pékin. Lors du recensement de 1990, ces derniers formaient le second groupe en importance de la région autonome avec officiellement 38 % de la population. Dix ans plus tard, lors du recensement de 2000, ils représenteront 40,57 % des 18,46 millions d’individus que comptera officiellement la région autonome. On se souviendra que les militaires ne sont pas repris dans les recensements au niveau provincial, ce qui signifie que les Han étaient en fait plus nombreux dès 1990. En outre, entre cette date et l’an 2000, est également venue s’ajouter une population « flottante », essentiellement Han, sans permis de résidence permanente au Xinjiang et donc également invisible dans les statistiques92.
36Sur le plan de sa localisation géographique, le peuplement han se concentre plus particulièrement au nord et au centre-est de la région autonome du Xinjiang mais avec désormais des poches de population non négligeables situées au sud, dans le bassin du Tarim traditionnellement ouïgour. Les Han se répartissent le long d’un axe est-ouest courant entre Hami et la capitale provinciale d’Urumqi, puis se prolongeant vers Karamay via les villes de Shihezi et de Kuitun, avec des branches pénétrant au sud, vers les villes d’Aqsû et de Korla et plus récemment de Kachgar et même de Khotan à l’extrême sud-ouest du bassin du Tarim93. En 2000, à l’exception du district d’Ili et de l’Altaï où les Han ne représentent respectivement que 39,91 % et 40,93 % de la population totale, le nord Xinjiang est désormais majoritairement peuplé de Han. Dans les villes d’Urumqi, de Karamay et de Shirezi, ils représentent respectivement 75,29 %, 78 % et 94,52 % de la population totale. Dans la préfecture autonome de Changji et la préfecture autonome mongole de Bortala, ils comptent respectivement pour 75,13 % et 67,19 % de l’ensemble de la population. Enfin, dans le district de Tacheng, ils représentent 58,58 % de la population totale.
37Par contre, à l’exception de la préfecture de Hami et de la préfecture autonome mongole de Bayangol qui comptent respectivement 68,94 % et 57,50 % de Han, sur le plan du peuplement, le sud du Xinjiang demeure au moment du recensement de 2000 -et pour combien de temps encore ?- essentiellement ouïgour. La préfecture de Turfân ne compte ainsi que 23,29 % de Han, celle d’Aqsû 26,62 %, la préfecture autonome kirghize de Kizilsu, 6,41 %, la préfecture de Kachgar 9,15 % et enfin celle de Khotan 3,32 %94. Numériquement, les Han restent donc minoritaires dans le sud du Xinjiang. Ils se concentrent dans les villes et les campagnes demeurent essentiellement ouïgoures95.
38Cette distribution géographique particulière de la population Han au Xinjiang est le produit d’un processus historique récent qui a débuté après la fondation de la République populaire de Chine en 1949. L’installation de population han au nord et au centre du Xinjiang a été promue par le pouvoir chinois dès les années 50 afin de renforcer sa mainmise sur cette périphérie, de protéger sa frontière avec l’URSS et de mettre en valeur les ressources agricoles, minérales et énergétiques96 de la région. Comme l’ont constaté de nombreux chercheurs, la distribution géographique de la population han suit les voies de communications -essentiellement les lignes de chemin de fer- mises en place et développées au Xinjiang par Pékin depuis cette période97. Une caractéristique qui n’a pas disparu dans les années 1990. Ainsi, la mise en service de la voie ferrée du sud-Xinjiang (Nanjiang railways) entre Korla, Âqsû et Kachgar en décembre 199998 a accéléré la pénétration de population han dans cette partie de la région autonome.
39Historiquement, avant 1949, la population d’origine ethnique chinoise était très minoritaire au Xinjiang/Turkestan oriental. J. Millward a raison de rappeler qu’après la conquête mandchoue de 1759, du fait de la politique menée par le pouvoir impérial, la proportion de la population ethniquement chinoise au Xinjiang a progressivement augmenté et était loin d’être négligeable au début du xixe siècle99. Mais les troubles politiques du xixe et du début du xxe siècles, l’avaient très fortement réduite, au point qu’en 1949, au moment de la fondation de la République populaire, elle ne représentait guère plus que 6 % de la population totale de cette région. La population de la province comprenait à ce moment 90 % de non-Han, les Ouïgours représentant à eux seuls 75 % de la population totale.
40L’accroissement de la présence Han au Xinjiang après 1949 résulte de la conjonction de deux facteurs : une immigration -soit volontaire, soit planifiée par les autorités centrales chinoises-, et l’accroissement naturel de ces nouveaux migrants. Entre 1949 et 1993, la région aurait ainsi accueilli 3 710 100 migrants Han (soit 23,13 % de l’accroissement total de la population pendant cette période)102.
41Dans une étude datant de 1990, Yuan Qing-Li a dégagé cinq phases différentes dans l’évolution de la population Han au Xinjiang. Entre 1949 et 1953, outre des troupes démobilisées du Guomindang qui ont été installées au Xinjiang, le pouvoir central y a envoyé des cadres, des ingénieurs, des docteurs, des étudiants et des travailleurs qualifiés. Cette première vague de migrants sert à consolider le contrôle du PCC sur les zones habitées par les Han déjà présents au Xinjiang au moment de la « libération » de la région103. La pénétration des Han pendant cette période est relativement faible d’un point de vue quantitatif surtout si on la compare à la phase suivante qui couvre la période entre 1954 et la fin de 1961. Au cours de cette seconde période, elle s’accélère en effet dramatiquement. Le nombre total de migrants pénètrant dans la région atteint selon les statistiques officielles 1 523 200 individus104. Outre l’envoi au Xinjiang des « droitiers » punis à la suite de la campagne des Cent fleurs (1957), la création en 1954 du Corps de production et de construction du Xinjiang (le Xinjiang shengchan jianche bingtuan en chinois, ou plus simplement le CPCX ou XPCC selon son acronyme anglais), aussi connu sous l’appellation de Bing Tuan (la Brigade militaire) joue un rôle essentiel dans ce nouvel afflux de Han dans la région.
42Il faut ici ouvrir une parenthèse et s’arrêter un moment sur cette structure qui joue aujourd’hui encore un rôle de premier plan dans la région autonome du Xinjiang. Mis en place le 7 octobre 1954 par les autorités communistes chinoises, le Corps de production et de construction du Xinjiang (CPCX) est une structure à la fois civile et paramilitaire. Il a été formé à partir de troupes de l’Armée populaire de libération et des garnisons militaires du Guomindang qui se trouvaient au Xinjiang au moment de la « Libération pacifique » (Heping Jiefang selon la terminologie officielle) de la région en 1949. Ces dernières ont été démobilisées, puis affectées à des projets de développement agricole tout en se voyant confier la mission de surveiller la frontière. En 1954, la population du CPCX se composait officiellement de 105 000 officiers et soldats installés au Xinjiang. Mais très vite, le CPCX est utilisé par les autorités chinoises comme vecteur pour favoriser l’immigration et faciliter l’implantation de populations han dans cette région. L’objectif est de modifier la composition ethnique régionale pour renforcer la présence physique des Han jugés plus fidèles et plus sûrs par le pouvoir central. La population du CPCX augmente rapidement. En 2007, elle compte officiellement 2,54 millions d’individus dont 90 % de Han.
43Le CPCX est à l’origine de la fondation de « villes nouvelles » comme Shihezi, Alaer, Wujiaqu mais aussi du développement d’agglomérations plus anciennes comme Tumshuq ou Kuitun, toutes situées au nord de la région du Xinjiang et administrées directement par lui. On lui doit également la mise en exploitation de nouvelles terres agricoles, la construction d’infrastructures de communication notamment de nombreuses routes et des voies ferrées, ainsi que le développement d’importants systèmes d’irrigation. Il dispose de ses propres organes de sécurité (divisés en corps armés de police et en milices, soit en tout environ 100 000 membres), de divisions de réserves, de ses propres organes judiciaires, de ses propres hôpitaux, de son réseau d’enseignement, y compris des universités (l’Université de Shihezi, la seconde en importance du Xinjiang et l’université du Tarim situé à Alaer), de son journal –Bingtuan Ribao- et de plusieurs chaînes de télévision.
44Si à la suite de la Révolution culturelle, le Corps a été dissout le 25 mars 1975, Deng Xiaoping, qui a effectué une visite d’étude au Xinjiang en août 1981 propose de le réactiver-la décision est prise en décembre 1981 et ce sera chose faite officiellement en juin 1982- sans doute en raison de la conjonction du contexte international marqué par l’invasion soviétique en Afghanistan et du contexte interne de la région autonome confrontée notamment à une agitation « séparatiste » en 1980/1981105. Le CPCX est la seule structure de cette nature à être aujourd’hui encore en place en Chine. Il existait auparavant des structures similaires au Heilongjiang, au Tibet, sur l’île de Hainan et en Mongolie intérieure mais elles ont toutes été dissoutes et n’ont pas été réinstallées contrairement au CPCX.
45Officiellement, le Corps est placé sous la double autorité du gouvernement central de Pékin et du gouvernement de la région autonome du Xinjiang. Mais en fait, depuis 1990, il dépend et obéit directement au Conseil des affaires de l’État. La fonction du CPCX est à la fois politico/militaire et économique. Sur le plan politico/militaire, les missions du CPCX sont les suivantes :
défense de la frontière. Il est ainsi responsable de la surveillance de 2000 km de frontière au Xinjiang. Cinq huitième des terrains agricoles et pastoraux du Corps sont situés le long de la frontière nord-ouest de la République populaire formant ainsi ce que la presse chinoise a appelé un « marqueur frontalier vivant » ;
participation à des opérations militaires en cas de besoin. Il a par exemple pris part aux opérations militaires menées contre l’Inde lors de la guerre de 1962 ;
mission de maintien de l’ordre interne et de la stabilité dans la région du Xinjiang. Le CPCX a ainsi participé à la répression déclenchée à la suite des événements de Baren en 1990106 ou encore selon les déclarations de son vice-commissaire politique, Wang Guizhen, à des opérations anti-émeutes contre des « séparatistes » au sud Xinjiang en 1997.
46En matière économique, son rôle, d’abord agricole (le CPCX contrôlerait en 2007 1,05 millions d’hectares au Xinjiang) et minier, s’est ensuite étendu à d’autres secteurs d’activité. Il a été autorisé et encouragé par le pouvoir central à embrasser la politique d’ouverture et de réforme économique initiée par Deng Xiaoping et à se lancer dans les affaires et le commerce international dès 1984. En 1988, lors d’une visite au Xinjiang, le professeur Doak Barnett avait déjà pu constater à quel point son rôle économique était devenu essentiel dans la région autonome. Il avait ainsi qualifié le Xinjiang tout entier de « company region », en référence au poids du CPCX dans l’économie locale et évoquait une véritable « économie dans l’économie régionale » à son propos.
47A partir des années 90, les autorités chinoises ont d’ailleurs choisi de parler du Xinjiang Construction and Production Group, ce qui leur a permis de mettre davantage l’accent sur l’orientation économique de cette structure plutôt que sur sa fonction de gardien de l’ordre politique et social han au Xinjiang107. D’un point de vue économique, le poids du CPCX est aujourd’hui très substantiel dans la région autonome du Xinjiang. Selon les sources officielles chinoises, il contrôlait en 2003, 4391 entreprises industrielles, commerciales, de transport et de construction108. En 2007, son site internet donne le chiffre de 5000 entreprises109. Il entretient des relations économiques avec 75 États et entités regionales. Ces principaux partenaires sont cependant situés en Asie centrale (Kazakhstan, République Kirghize, Ouzbékistan). En 2005, les échanges du CPCX se sont élevés à 3, 105 milliards de dollars (1,892 milliards de dollars d’exportations et 1,213 milliards de dollars d’importations). Il a représenté cette année à lui seul 37,54 % du total des exportations de la région autonome du Xinjiang. Son principal partenaire commercial, tant pour les exportations que pour les importations est le Kazakhstan avec 70,88 % de ses exportations et 77,16 % de ses importations. En 2005, les échanges du CPCX a ainsi représenté 39 % du total du commerce extérieur de la région autonome du Xinjiang110. Il joue donc un rôle majeur dans l’économie locale.
48Pour en revenir à la question du peuplement han au Xinjiang/Turkestan oriental, après les deux premières vagues de migrations entre 1949 et 1961, la fin de l’année 1961 et l’année 1962 voient l’arrivée de migrants dans le sillage du « Grand Bond en Avant », la situation étant moins catastrophique semble-t-il d’après certains auteurs chinois dans la région autonome du Xinjiang qu’ailleurs en Chine111. Certains de ces migrants de fraîche date regagneront cependant leur foyer une fois la crise aigue passée. A partir de 1963 s’ouvre une nouvelle phase de migration qui s’étend jusqu’au début de l’année 1977. De nouveaux « volontaires » arrivent au Xinjiang (avec la Révolution culturelle, de nouvelles arrivées seront également enregistrées) alors que les années 1964, 1965 et 1968 voient une explosion de la natalité qui renforce la présence des Han. Enfin, selon Yuan Qing-li, à partir de 1977, l’immigration se ralentit et la population han tend à avoir un taux d’accroissement naturel plus lent en raison de la politique de planning familial mise en place par les autorités112. De nombreuses personnes envoyées à la campagne dans le cadre de la Révolution culturelle regagnent également leur foyer d’origine, situé ailleurs en Chine après la mort de Mao Zedong en 1976.
49Depuis la publication de l’étude de Yuan Qing-li, d’autres phases migratoires ont pu être observées. Après avoir enregistré des départs de populations han dans les années 80 en raison de la politique d’ouverture économique qui privilégie les régions côtières de l’est de la Chine et amène les han à y chercher des emplois mieux rémunérés, au cours des années 1990, on a assisté à un mouvement inverse et à une reprise de l’immigration han depuis l’intérieur de la Chine vers la région du Xinjiang. Cette arrivée de nouveaux migrants -dont beaucoup seraient originaires du Zhejiang et du Jiangsu- est selon Ren Qiang et Yuan Xin, le produit d’une immigration « spontanée » liée à l’accélération du développement économique de la région dans le cadre de la politique d’ouverture économique décidée par les autorités à partir de 1992113. La recherche d’opportunité d’emploi serait ainsi la principale motivation de ces nouveaux migrants Han.
50Cependant, le caractère « spontané » d’une partie de cette immigration au moins peut-être mis en doute. Des projets d’envoi planifié de populations han au Xinjiang, soutenus par des personnalités importantes comme Yuan Mu, Li Xiannian, Wang Zhen, Yao Yilin et peut-être Li Peng, ont circulé à partir de l’année 1991. Le chiffre de cinq millions de personnes avant la fin du xxe siècle a même été avancé114. Un article de Zhongguo Tongxun relève que les autorités du Xinjiang ont indiqué en décembre 1992 être prêtes à accueillir dans la région de Kachgar 100 000 migrants originaires de la région où devait être construit le barrage des Trois Gorges115. N. Becquelin signale pour sa part des projets confidentiels -donc difficilement vérifiables- de réinstallation dans les régions de Kachgar et d’Ili de personnes déplacées également dans le cadre de la construction du barrage des Trois Gorges. A la suite de tensions liées à l’arrivée des premiers migrants, le secrétaire du PCC : de la région autonome aurait apparement protesté auprès de Pékin116. Ren Qiang et Yuan Xin signalent cependant qu’entre 1991 et 1993, des groupes de travailleurs venant d’autres provinces ont été organisés pour émigrer ensemble dans le cadre du Corps de production et de construction du Xinjiang. Dans ce dernier cas, on ne peut donc pas parler de caractère « spontané » de cette immigration puisqu’elle a été organisée une nouvelle fois dans le cadre de cette structure qui est, on s’en souvient, le principal vecteur utilisé par les autorités pour promouvoir la pénétration des Han au Xinjiang117.
51Quoiqu’il en soit, si on compare les chiffres de la population du Xinjiang en 2000 soit 19 250 000 d’habitants (auxquels les statistiques officielles chinoises retranchent 790 000 personnes dont la résidence permanente n’a pu être déterminée, ce qui fait une population estimée à 18 462 100), avec les résultats du recensement du 1er juillet 1990, on ne peut que constater une progression très rapide (plus 4 090 000 d’habitants) de la population du Xinjiang équivalent à une croissance de 26,98 % en 10 ans. Ce taux de croissance est exceptionnel en Chine où la croissance moyenne de la population entre 1990 et 2000 a atteint officiellement pour l’ensemble du territoire 11,66 %. La population du Xinjiang a donc cru deux fois plus vite ces dix dernières années que la population des autres parties de la Chine en général. Or cette croissance est surtout spectaculaire chez les Han. Selon les chiffres officiels, ils sont passés dans la région autonome de 5 695 626 individus en 1990 à 7 497 700 en 2000 soit une augmentation de 1 802 074 individus ou 31,63 % comparé aux chiffres de 1990. Au-delà de l’accroissement naturel -pour l’ensemble de la Chine, la croissance de la population han a été de 11,22 %118-, cette forte augmentation de la population han dans la région autonome est le produit de ces nouvelles migrations en partie volontaires que nous venons d’évoquer.
52La politique des autorités, qui ont favorisé depuis 1949 l’arrivée de migrants chinois d’abord directement à travers le CPCX puis à partir de la fin des années 1980 indirectement en choisissant d’ouvrir économiquement la région autonome ou plus directement en réactivant peut-être le canal CPC.X au cours des années 90, a donc eu pour résultat d’accroître la présence des Han. Cette dernière a réduit aux yeux de Pékin la vulnérabilité du Xinjiang puisque la balance ethnique s’est modifiée à l’avantage des Han-tout en créant cependant de nouvelles difficultés puisque ces arrivées ont tendu les relations inter-ethniques dans la région-. Malgré cette consolidation de la présence des Han, qui se fait désormais sentir également au sud de la région, dans le bassin du Tarim, Pékin n’ignore pas que le Xinjiang/Turkestan oriental conserve de nombreuses attaches avec l’Asie centrale en raison de son histoire.
4. Une région à l’histoire politique complexe
53Contrairement à la version officielle présentée par la République populaire119, la région du Xinjiang/Turkestan oriental a longtemps échappé au contrôle politique du pouvoir chinois. Si malgré sa rhétorique, ce dernier est conscient de ce fait, les observateurs étrangers sont au contraire moins informés de la singularité de cette région ainsi que de la complexité et des ambivalences de ses rapports avec la Chine. L’histoire politique de cette région reste d’ailleurs dans une large mesure à écrire. A l’exception du livre de Jack Chen publié en 1977120, il n’existait jusque récemment aucun ouvrage qui ait tenté d’en rendre compte dans la longue durée historique121. Aussi, l’histoire politique de cette région, marge ou zone frontière de l’empire chinois, reste-t-elle encore largement ignorée du public occidental.
54De son côté, l’histoire officielle véhiculée par la République populaire s’attache à travestir la réalité historique pour masquer la ténuité des liens de cette région avec la Chine avant le xviiie siècle. Si l’espace géographique qui constitue aujourd’hui la « région autonome ouïgoure du Xinjiang » est certes entré très tôt en contact avec le monde chinois, au regard de la longue durée historique, ses rapports avec lui sont cependant complexes et ambivalents. Le discours officiel de la République populaire de Chine qui le présente schématiquement comme une partie intégrante du territoire chinois depuis au moins l’époque de la dynastie des Han (entre 206 avant notre ère et 220 de notre ère)122 jusqu’à aujourd’hui, contredit grossièrement une réalité historique beaucoup plus complexe.
55Contrairement à une opinion commune qui considère trop facilement la Chine comme un pays aux frontières stables et depuis longtemps établies, cette dernière, dans sa composante spatiale, a beaucoup fluctué au cours de son histoire. Les frontières actuelles de la République populaire de Chine sont le produit d’une histoire longue, complexe et en rien inévitable. Comme l’écrivait P. Gentelle il y a quelques années, l’histoire montre que les « frontières actuelles de ce pays ont été établies par un processus, encore inachevé, de violence, de conquête et d’assujettissement d’autres peuples, dans le cadre d’un État qui fut, pendant plus de deux millénaires et demi, colonisateur et impérialiste »123. La formation du territoire chinois a connu au cours de l’histoire des phases d’avancée suivies de reculs parfois sévères. Des régions naguère « chinoises » forment aujourd’hui des États indépendants. Les frontières de la Chine ont parfois reculé. Il n’y a pas de fatalité d’une Chine en expansion, toujours victorieuse et civilisatrice. L’image d’une Chine immémoriale qui existerait dans les frontières que nous lui connaissons actuellement ne correspond ainsi pas à la réalité historique. De vastes espaces du territoire de la République populaire de Chine n’ont été intégrés qu’à une époque relativement récente au regard de la longue durée historique. C’est notamment le cas du « Xinjiang ».
56On se souviendra que les conquêtes réalisées par la dynastie mandchoue des Qing (1644-1911) au Tibet, en Mongolie et au Turkestan oriental ont doublé la superficie territoriale de la Chine de l’époque124. Dans sa composante spatiale, la République populaire de Chine est l’héritière de cet impérialisme de la dynastie mandchoue. Un livre récent soulève la question du Tibet. Le Tibet est-il chinois ? s’interrogent ses auteurs125. On peut formuler une interrogation équivalente à l’égard de l’espace géographique aujourd’hui appelé « Xinjiang ». Si dans l’histoire officielle chinoise telle qu’elle est exposée dans de nombreuses publications destinées à un large public, cette question reçoit sans critique une réponse positive, les faits nous invitent pourtant à davantage de circonspection. Le discours historique officiel en Chine masque la complexité de l’histoire de cet espace et de ses rapports avec son environnement régional. Les nécessités politiques et idéologiques contemporaines de l’État chinois influencent l’écriture de l’histoire et tendent à minimiser, voire à éliminer, les faits qui entrent trop directement en contradiction avec le dogme du caractère immémorial de l’appartenance de cet espace géographique à la Chine.
57Dans la présentation chinoise officielle de l’histoire de cette zone, l’accent est généralement mis sur les périodes où la domination d’un pouvoir politique basé en Chine proprement dite est la mieux assurée comme pendant une partie du règne de la dynastie Han ou de la dynastie Tang. L’examen sans parti pris des sources nous enseigne pourtant que ses relations avec la Chine furent moins profondes et moins suivies qu’avec d’autres régions adjacentes situées à l’ouest, au nord et au sud (c’est-à-dire l’Asie centrale occidentale, l’Afghanistan, le Tibet ou l’Inde). Malgré les affirmations officielles, la région qui porte aujourd’hui le nom de Xinjiang n’a jamais fait partie intégrante de la Chine avant l’époque des Qing. Comme l’écrit Morris Rossabi, « even the most powerful dynasties in pre-modern times, the Han and the Tang (A.D. 618-907), could not permanently govern Mongolia, Mandchuria, or Central Asia »126. Pour l’historien Immanuel C. Hsu également, « (...) The Western Region (Xiyu), was never an integral part of China proper, but a frontier area. During the Ch ’ing period Sinkiang was in essence a military colony of the Mandchus. But after the (1881) Treaty of St Petersburg the Ch ’ing government took the unprecedented step of raising its status to that of a regular province. Thus, for the first time in history, Sinkiang was on a par with the rest of the empire. It was indeed a landmark in Chinese frontier history »127.
58Entre l’époque de la dynastie Han et la conquête mandchoue de 1759128, la « Chine » n’a contrôlé cette zone géographique qu’au cours de périodes d’expansion relativement brèves. Le spécialiste américain du Xinjiang/Turkestan oriental, Owen Lattimore a calculé, il y a déjà plus d’un demi-siècle, qu’elle n’y a en tout exercé son autorité qu’environ 425 ans, non continus, sur près de 2000 ans d’histoire129. C’est en 1759 que l’empire mandchou entreprend la conquête militaire de cet espace géographique où comme l’a très justement écrit Françoise Aubin « aucune unité, n’a jamais existé (...), non plus qu’aucun nom ethnique ou géographique global »130 avant la création en 1884 de la « province du Xinjiang » par la dynastie des Qing. Pour le désigner, l’empereur Qianlong créera en 1768, c’est-à-dire neuf ans après la conquête militaire de la région, le mot « Xinjiang » qui signifie la « nouvelle frontière » ou la « nouvelle marche » comme l’a écrit René Grousset.
59Toutefois, ce toponyme n’entre pas en usage immédiatement puisque ce nouveau territoire est désigné par le terme Huijiang « Territoire Musulman » entre de 1759 à 1884131. La Pax Manjurica, pour reprendre une expression de J. Millward, s’étend sur une période d’environ 60 ans après la conquête132. La seule révolte de grande envergure enregistrée entre 1760 et 1815 est celle d’Ush Turfân en 1765. Après cette première période de stabilité, le pouvoir mandchou est confronté dans cette région à une série de révoltes et d’incidents plus ou moins importants -notamment en 1815, 1820 à 1828, 1845, 1846/1847, 1852, 1854/1855, 1857, 1861, 1862133-impliquant les descendants des Khwâja Afaqis134 soutenus à certaines occasions par le khanat de Khoqand. Le pouvoir Qing réussit à maintenir sa mainmise sur la zone pendant cette période mais la situation devient plus délicate à partir des années 1850. La menace la plus grave à laquelle il doit faire face viendra cependant dans un premier temps des Hui plutôt que des populations Est-turkestanaises elle-mêmes. Le soulèvement des musulmans chinois (aussi appelés Dounganes d’où le nom de rébellion doungane pour caractériser cette révolte) de 1862, dans les provinces voisines du Gansu, Qinghai et Shaanxi, interrompt en effet les communications entre le Huijiang et le reste de l’empire135. Dans ce contexte, la position du pouvoir mandchou devient très délicate. Face à une série de révoltes -touchant à la fois les garnisons et la population Doungane présentes au Huijiang mais aussi, rapidement dans leur sillage, les habitants Est-turkestanais-, qui éclatent un peu partout dans la région à partir de juin 1864, les troupes Qing perdent rapidement pieds. Le pouvoir impérial s’évanouit littéralement alors que la majorité des populations mandchoues et chinoises originaires des provinces intérieures de l’empire qui y résidaient sont massacrées.
60Entre janvier 1865 et 1877, Ya’qûb Bey, qui n’est pas ouïgour mais est originaire de Kokand (auj. en Ouzbékistan), impose son autorité et fonde l’Émirat de Kachgar. A la tête de cet État, il règne des « Petits Pamirs » (région des Sarikol à la frontière du Tadjikistan actuel) à Turfân qu’il capture en novembre 1870. Il contrôle ainsi les villes de Kachgar, Yârkand, Khotan, Âqsû, Ûsh Turfân et Turfân. Il entretient des relations politiques complexes avec l’Angleterre, la Russie tsariste et même la Porte ottomane -cette dernière lui attribuera le titre d’Athalik Gazi (Gardiens des Guerriers de l’Islam)136 -. Confronté à la rivalité anglo-russe, il tente de se faire reconnaître officiellement par ces deux puissances tout en jouant l’une contre l’autre afin de maintenir un équilibre et de tirer le maximum de profit de leur compétition. Peut-être a-t-il caressé l’ambition de faire avaliser par Londres et Saint-Pétersbourg la transformation de ses possessions en État-tampon entre les deux empires sur le modèle afghan. Il n’aura cependant pas le temps de réaliser ses desseins. A la grande surprise des observateurs occidentaux qui le jugeaient incapable d’entreprendre une telle opération militaire, l’empire mandchou décide en avril 1875 de reconquérir l’ensemble de la région par la force137.
61Face à l’orage qui menace, Ya’qûb Bey dépêche un émissaire à Londres pour amener l’Angleterre à tenter une médiation auprès de Pékin. Il se déclare près à accepter le statut d’« État tributaire », sur le modèle de la Birmanie138. Mais ce projet, que la Grande-Bretagne commence à mettre en œuvre en juin 1877, n’aura pas le temps de se concrétiser. Ya’qûb Bey disparaît en mai 1877, peut-être empoisonné139. Sur le terrain militaire, au moment de sa disparition, Ya’qûb Bey était loin d’être vaincu. Aucune bataille majeure n’avait encore été livrée en Kachgarie. Sa mort soudaine ouvre cependant une crise de succession qui dégénère rapidement en guerre civile, facilitant les opérations militaires des Qing et hâtant la disparition de l’Émirat de Kachgar au profit de l’empire mandchou. Les Mandchous rétablissent donc sans grands efforts militaires leur autorité sur la zone à l’exception de la région d’Ili occupée par les troupes russes depuis 1871140. Le destin de la région bascule à ce moment.
62Pour assurer la « paix et l’ordre », Zuo Zongtang, le général qui a dirigé les opérations militaires des Qing dans la région, propose dès 1878 de transformer le Huijiang en une province à part entière de l’Empire. La Cour accepte cette suggestion en 1884, après que la région de l’Ili a été recouvrée à la suite d’une véritable crise diplomatique qui oppose Pékin à Saint-Pétersbourg141. Le Huijiang devient alors le Xinjiang. En raison de l’acquisition de son nouveau statut de province, le Xinjiang passe en 1884 sous l’autorité d’un gouverneur chinois et non plus d’un général Mandchou comme s’était le cas auparavant. La nouvelle province est toutefois dotée d’une organisation territoriale hybride. Certaines petites principautés indigènes142 y subsistent. Elles sont dirigées par des princes locaux sur le modèle des ’native states’ de l’Inde britannique et conservent un statut de semi-autonomie. L’élévation du Xinjiang au rang de province constitue cependant une véritable rupture dans l’histoire de cet espace géographique. Ce qui n’était jusqu’alors qu’une « périphérie », une « marge » ou une « zone-frontière » intègre pour la première fois pleinement le corps du territoire proprement dit de l’empire mandchou.
63Le Xinjiangest ainsi devenu progressivement aux yeux des Chinois, une « partie inaliénable et inséparable de la Chine » pour reprendre une expression de Chu Wendjang143. Après la disparition de la dynastie Qing, aussi bien les nationalistes du Guomindang (GMD) que le parti communiste chinois (PCC) reprennent à leur compte l’héritage territorial de l’empire mandchou et présentent le Xinjiang comme une partie intégrante du « territoire national » malgré le peu d’emprise chinoise sur cette région au cours de l’histoire aussi bien ancienne que plus récente. En effet, les difficultés liées aux transports et aux communications pour atteindre le Xinjiang/Turkestan oriental, le fait que dès la fin du xixe siècle et jusqu’aux années 40 du xxe siècle, les régions du Gansu, du Ningxia et du Qinghai qui permettent d’atteindre cette zone depuis la Chine sont administrées de façon autonome par la famille doungane des Ma144, l’effondrement de l’empire mandchou en 1911 puis la présence de « seigneurs de la guerre » autonomes couplée au dynamisme soviétique constituent autant de facteurs qui rendent extrêmement lâches les liens entre cet espace géographique et la Chine proprement dite145.
64Après l’effondrement de la dynastie Qing, pendant la période républicaine, de larges parties du territoire chinois passent sous le contrôle de « seigneurs de la guerre » qui dirigent leurs « fiefs » de manière autonome. Le Xinjiang/Turkestan oriental ne fait pas exception. Il est dirigé par des « gouverneurs » locaux successifs -Yang Zengxin (1912-1928), Jin Shuren (1928-1933), Sheng Shicai (1933-1944) - qui ne prêtent guère attention aux éventuelles injonctions du « centre » et l’administrent de manière indépendante selon leurs intérêts propres. Sur le plan politique, pendant le gouvernement de Yang Zengxin, la région est relativement épargnée par les troubles. Ce n’est plus le cas ensuite. Les années 30 sont marquées à la fois par la montée en puissance de l’influence soviétique à partir de la période 1931-1934, symbolisée par la signature de l’accord de commerce provisoire entre l’URSS et la province du Xinjiang le 1er octobre 1931, et par l’éclatement de révoltes implicant des forces politiques issues de différents groupes ethniques de la région (Ouïgours, Kazakhs, Kirghizes) mais aussi d’autres acteurs comme les Dounganes, les Russes Blancs et enfin les forces nationalistes du Guomindang (GMD) qui pénétreront dans cette zone à partir de la fin de l’année 1942, à l’occasion d’un changement de politique du « seigneur de la guerre » local de l’époque, le célèbre Sheng Shicai.
65Apparus en 1931, les troubles politiques gagnent en intensité avec l’intervention des forces dounganes venues du Gansu. Ils vont se propager à Turfân puis au sud Xinjiang (Kachgar, Yârkand, Khotan) avant d’embraser l’ensemble de la région146. C’est pendant cette période qu’est constituée la première république du Turkestan oriental (TIRET de son acronyme anglais) basée à Kachgar (novembre 1933). Cette expérience indigène éphémère –qui constitue cependant un symbole et une référence pour les nationalistes ouïgours contemporains- prend fin avec l’intervention militaire des Dounganes en février 1934147. Parallèlement, l’Union soviétique choisit de rétablir l’ordre au Xinjiang à partir de janvier 1934. Moscou soutient Sheng Shicai et sa politique pro-soviétique148. A partir de ce moment et jusqu’au début de l’année 1942, ce dernier s’aligne sur l’URSS.
66A compter de 1937, la région devient un véritable satellite de l’Union soviétique sur le modèle de la Mongolie extérieure149. Pendant cette période, les Soviétiques interviennent une nouvelle fois militairement en mai 1937. Ils obtiennent parallèlement des avantages économiques en matière d’exploitation des minéraux et du pétrole de la région. Moscou signe un accord de concessions très favorable avec Sheng Shicai le 26 novembre 1940150. A partir de juin 1941, alors qu’elle a sécurisé ses relations avec le Japon grâce à la conclusion d’un pacte de non-agression (13 avril 1941), l’URSS est confrontée au déferlement des troupes de l’Allemagne nazie sur sa frontière occidentale. Face aux défaites militaires soviétiques, Sheng Shicai pense que le vent a tourné. Il adopte une politique anti-communiste et se rapproche du parti nationaliste de Tchang Kai-shek (Jiang jieshi), le Guomindang (GMD). Une entente secrète est conclue entre les deux hommes à l’été 1942. Sheng Shicai prête allégance au pouvoir nationaliste qui lui garantit en retour sa position au Xinjiang.
67A compter de la fin de l’année 1942, le personnel technique et militaire soviétique se retire de la région à la demande de Sheng Shicai. L’influence des nationalistes chinois, épaulés par les États-Unis, croît dès lors an Xinjiang à la plus grande satisfaction de Tchang Kai-shek. Des troupes nationalistes s’installent pour la première fois à Hami à l’est du Xinjiang à la fin de l’année 42/début 43. Mais les forces nationalistes sont cependant insuffisantes151 pour permettre au pouvoir basé à Chongqing d’imposer son autorité. Tchang Kai-shek doit composer jusqu’à un certain point avec les élites locales. Ayant essayé une nouvelle fois de changer de politique pour se rapprocher de son ancien allié soviétique, Sheng Shicai est écarté de ses fonctions par les autorités du Guomindang en septembre 1944 et remplacé par un officiel proche de Tchang Kai-shek. Pour la première fois depuis 1911, le Xinjiang repasse véritablement sous le contrôle du pouvoir chinois. Entre 1944 et 1949, le Guomindang designera quatre présidents du Xinjiang.
68Toutefois, la politique menée par les nationalistes à l’égard des populations turcophones ainsi que leur gestion économique suscitent le mécontentement. Leur politique de confiscation des terres au profit de colons Han dont ils favorisent la pénétration dans la région provoque des tensions avec les nomades Kazakhs de Dzoungarie152. En octobre 1944 éclate la « révolte des Trois Districts » (Ili, Altaï et Tarbaghatai), qui donne naissance à la seconde République du Turkestan oriental (ETR selon son acronyme anglais, elle aussi considérée comme une référence pour les nationalistes ouïgours contemporains), soutenue par l’URSS sur les plans militaire et financier153. L’objectif de Moscou est, semble-t-il, de rétablir son influence an Xinjiang et peut-être de renverser le gouvernement provincial dirigé par le Guomindang pour installer à sa place un gouvernement indigène pro-soviétique. Les troupes de la République du Turkestan oriental s’emparent d’une partie de la Dzoungarie et menacent Urumqi en septembre 1945. Sous la pression de l’URSS, qui a obtenu de Tchang Kai-shek des concessions importantes154, une trêve est cependant conclue.
69Malgré la formation d’un gouvernement de coalition en 1946, les deux forces campent sur leurs positions. Entre 1944 et 1949, il y aura donc deux régimes politiques séparés au Xinjiang155. La République du Turkestan oriental soutenue par l’URSS contrôle les « Trois districts » et essaye d’étendre son influence politique vers le sud alors que les forces nationalistes du Guomindang, épaulées par Washington, contrôle les 7 autres districts du Xinjiang. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le retour du Xinjiang dans le giron chinois reste cependant très incertain. Le grand historien français des relations internationales, Pierre Renouvin, écrivait ainsi en 1946, « (l)a question du Turkestan chinois (Sin-Kiang) n’a été évoquée, semble-t-il, ni a Yalta, ni à Moscou. Mais faut-il oublier que l’URSS y a possédé une influence importante entre 1932 et 1942 et que les villes de cette région sont à quelques centaines de kilomètres des marchés du Turkestan russe, tandis qu’elles sont à deux milles kilomètres des grands centres chinois ? Le Sin-Kiang est-il appelé à devenir un ‘État tampon ’ entre la Chine et l’URSS ? ou sera-t-il absorbé par l’Union soviétique ? La perspective d’une extension de l’influence russe est inquiétante surtout pour la Grande-Bretagne, puisque le Sin-Kiang est limitrophe du Tibet. Mais l’importance stratégique du territoire est telle que les États-Unis ne pourraient pas sans doute être indifférents à l’éventualité d’une emprise russe »156.
70Un fait frappe dans cet extrait datant de 1946. La possibilité que la Chine nationaliste puisse conserver une influence quelconque sur la région n’est pas évoquée. Les liens entre le Xinjiang et la Chine semblaient donc si ténus en 1946 que la possibilité de voir ce territoire replacé sous le contrôle de Pékin a échappé à ce grand observateur des relations internationales qu’était Pierre Renouvin. C’est pourtant ce qui se produit en 1949. Moscou maintient son soutien à la République du Turkestan oriental jusqu’à la victoire du Parti communiste chinois (PCC) de Mao Tsé-toung (Mao Zedong). Dans le contexte du Xinjiang des années 1946 à 1949, ni le Guomindang ni l’URSS ne souhaitent la création d’un État indépendant pour les turcophones. Si le Guomindang utilise des personnalités nationalistes et panturques157 -tout en les surveillant étroitement-pour les opposer à l’URSS, il n’a bien entendu aucune intention de perdre une partie de ce qu’il considère être son « territoire national ». Quant à l’URSS qui a également instrumentalisé des personnalités ouïgoures nationalistes au sein de la République du Turkestan oriental, elle ne désirait pas non plus voir se mettre en place à ses frontières un État indépendant pour les turcophones. Un État de cette nature aurait en effet constitué un danger pour ses propres possessions en Asie centrale. Non seulement, il risquait d’attiser le nationalisme des turcophones vivant en Asie centrale soviétique mais en outre, il n’était pas exclu que les « impérialistes » occidentaux y développent une influence et n’amènent cet État à mettre en œuvre une politique anti-soviétique. Pour Moscou, le maintien du Xinjiang dans l’ensemble territorial chinois était donc préférable à condition que le pouvoir en Chine ne soit pas anti-soviétique et qu’en outre Moscou puisse continuer à tirer profit des relations économiques privilégiées qu’elle entretenait avec la région158.
71En 1949, la victoire du PCC étant acquise sur le plan militaire ailleurs en Chine, l’URSS va encourager et faciliter la passation de pouvoir entre le Guomindang et le PCC au Xinjiang. Moscou accepte également l’intégration du territoire contrôlé par la République du Turkestan oriental à la République populaire de Chine159 puis la dissolution de la République du Turkestan oriental160 par Pékin en janvier 1950. En échange, elle obtient des concessions économiques importantes. Trois accords de coopération sont en effet signés entre la RPC et l’URSS au début de l’année 1950. Deux touchent à la création de compagnies mixtes pour l’exploitation des ressources du Xinjiang (pétrole et métaux non-ferreux)161. Mao dira en 1964 qu’il considérait ces accords comme « une forme de l’interférence russe dans la vie économique de la Chine ». A partir de 1949, le PCC va travailler à la réduction de l’influence soviétique. Il lui faudra attendre la mort de Staline pour finalement imposer son autorité. Depuis, la République populaire s’est attachée à la renforcer jusqu’à nos jours162.
72L’histoire complexe et mouvementée de l’espace géographique appelé aujourd’hui « Xinjiang » et son intégration tardive à l’espace chinois sont autant de raisons qui poussent les autorités centrales chinoises à rester particulièrement attentives aux développements internes de cette zone et aux transformations en cours dans son environnement régional proche, particulièrement en Asie centrale voisine. On ne peut comprendre les inquiètudes du pouvoir chinois à l’égard de cette région -appréhensions qui déterminent en grande partie l’attitude et les choix des autorités chinoises à l’égard des républiques d’Asie centrale- si on ignore ces faits.
5. Les intérêts de la République populaire de Chine au Xinjiang
1. Un territoire riche en ressources naturelles
73Le Xinjiang renferme d’exceptionnelles richesses naturelles. Sur le plan des ressources minérales, sur les 171 types de minerais recensés en Chine, on en dénombre 138 dans cette région. 76 sources importantes de minerais y sont localisées, représentant 54 % des réserves prouvées du pays163. Selon le bureau de géologie et des ressources minérales du Xinjiang, il existe 43 types de minéraux métalliques ainsi que 84 types de minéraux non métalliques prospectés dans la province et répartis sur plus de 1400 sites. Les réserves d’argile à céramique, de vermiculite (employée dans les matériaux de construction), de muscovite (utilisée comme isolant dans l’industrie électrique et dans la fabrication de papiers-peints), et de serpentinite (utilisée entre autres pour capturer le Co2 émis par les cheminées de centrales thermiques) sont les plus importantes de Chine. Les réserves prouvées de bentonite (ou terre à foulon), d’amiante, d’andalousite (utilisée dans l’industrie des céramiques et des réfractaires), de feldspath (fabrication de carrelages et de verres pour l’emballage) et de magnésite, sont également classées parmi les premières du pays164. Les ressources en béryllium (un métal blanc très léger et toxique, employé comme élément d’alliage ainsi que comme modérateur dans les piles atomiques et les fenêtres de rayons X), en mica, en natron (carbonate de sodium), en sels (sylvite du Lob Nor et salpêtre), en benzonite et en mirabilite sont par ailleurs également considérables. Le Xinjiang est riche en minéraux salins comme la sylvite, la mirabilite, le sel gemme, la nitratine, le trona (soude naturelle), le nitrate de potassium (salpêtre)/nitre, le sel de magnésium, le boron, le lithium... Outre le fer et le chrome, on y trouve de nombreux minerais métalliques non ferreux et minerais de métaux précieux : cuivre -le gisement d’Ashele situé dans la zone de l’Altaï au nord Xinjiang est le deuxième plus important dépôt de cuivre de Chine-, nickel, plomb, zinc, étain, antimoine, manganèse, molybdène, tungstène, cobalt, argent, platine,... et or. Le Xinjiang est une des provinces aurifères importantes du pays. Environ 540 sites aurifères ont ainsi été identifiés dans la région. Les régions de l’Altaï et des Tianshan autour du bassin de Dzoungarie renferment ainsi un peu moins de 5 % des réserves d’or du pays165. La région de l’Altaï est également riche en métaux rares. Les réserves de béryllium, lithium, niobium, tantalum, cesium et rubidium de cette zone comptent parmi les plus importantes de Chine. Le Xinjiang abrite également des réserves de pierres précieuses -comme les fameux jades de Khotan- et des gemmes mais aussi de nombreuses variétés de marbres et de granits, de la pierre à chaux, etc.. L’inventaire des ressources minérales est en outre loin d’être complet. De larges parties du territoire du Xinjiang, notamment le sud de la région, n’ont encore fait l’objet que de campagnes d’explorations géologiques partielles166.
74Dans le domaine énergétique, la région renferme des ressources d’un intérêt stratégique majeur pour la Chine comme l’uranium, le charbon, le pétrole et le gaz. Dans le domaine de l’uranium, si les principaux gisements chinois sont situés dans les provinces du Guangdong, du Jiangxi et du Hunan, d’autres ont cependant été répérés dès les années 40 au Xinjiang, dans la région de Bortala et dans les montagnes de l’Altaï à Koktogai. Plus tard, à partir des années 50, les prospecteurs chinois ont découvert des gisements supplémentaires d’uranium dans l’ouest du Xinjiang, à Daladi, Menqikuer et Kachgar puis dans le bassin de l’Ili167. Récemment, le plus grand gisement d’uranium de Chine -avec des réserves estimées à 10 000 tonnes- a été mis au jour dans la région du fleuve Ili au nord-ouest du Xinjiang. Ce gisement a été qualifié de « réserve stratégique » de minerai d’uranium pour la Chine par l’agence de presse Xinhua. Sur les 26 mines d’uranium exploitées dans le pays, cinq (Daladi, Kashi/Kachgar, Menqikuer, bassin de l’Ili et Yining) sont situées dans cette région.
75Le Xinjiang est également très riche en charbon. Les réserves prouvées, principalement localisées dans les régions de la Dzoungarie, de Turfân/Hami et de l’Ili, s’élèveraient à 95,88 milliards de tonnes. Les mines sont princiaplement situées dans les régions d’Urumqi et de Hami. Selon certaines estimations, les ressources totales de la région en charbon pourraient atteindre 2, 19 billions (1012) de tonnes soit environ 40,6 % de l’ensemble des ressources en charbon de la Chine168. Or, le charbon joue un rôle de premier plan dans l’approvisionnement énergétique de la République populaire. Une grande partie de la production d’électricité chinoise -soit 78 % en 2005 selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE)-, est assurée par des centrales thermiques alimentées au charbon. Ce dernier domine le « mix énergétique » du pays, c’est-à-dire la combinaison des différentes formes d’énergie qu’il utilise. Selon l’AIE, il représentait ainsi environ 69 % de l’énergie primaire consommée en 2000. Étant donné son importance, le charbon va continuer à l’avenir à dominer la consommation énergétique chinoise. Sa part pourrait se maintenir à 60 % de l’énergie primaire consommée en Chine en 2030169. Dans ce contexte, l’importance du Xinjiang comme source d’approvisionnement en charbon du pays est appelée à se renforcer.
76Outre le charbon, la région est aussi riche en hydrocarbures. Dans ce domaine, les estimations sur le volume des réserves sont variées et parfois contradictoires. Le Wall Street Journal qualifiait en 1993 cette région de « plus riche en matières premières que l’Arabie Saoudite », ce qui est très excessif170. Alors que l’Arabie Saoudite dispose de réserves prouvées de 36,3 milliards de tonnes de pétrole et 7,07 billions (1012) de m3 de gaz naturel, les autorités chinoises estiment en 2005 les ressources du Xinjiang à 20,92 milliards de tonnes de pétrole171 etl0,85 billions (1012) de m3 de gaz naturel172. Trois bassins sédimentaires majeurs ont été identifiés. Le bassin de Dzoungarie (130 900 km2) exploré dès les années 50 contiendrait 8,95 milliards de tonnes de pétrole et 3,7 billions ( 1012) de m3 de gaz naturel ; le bassin du Tarim (560 000 km2), exploré à partir de 1989, 8 milliards de tonnes de pétrole et selon PetroChina jusqu’à 10 billions (1012) de m3 de gaz naturel et enfin le bassin de Turfân/Hami (53 500 km2) exploré au début de la décennie 90, 1,58 milliards de tonnes de pétrole et 365 milliards de m3 de gaz naturel173. Les réserves de pétrole et de gaz du Xinjiang représenteraient respectivement plus de 30 % et 40 % du total des ressources du pays174. Selon certaines estimations, la région du Tarim abriterait d’importantes réserves recouvrables de gaz encore à découvrir175.
77En matière pétrolière, l’ensemble du Xinjiang a produit entre 15 et 20 millions de tonnes (Mt) de pétrole par an au cours du IXe plan quinquennal (période 1996-2000). En 2007, la production pétrolière de la région a atteint 26,4 Mt de pétrole sur un total de 187,6 Mt pour l’ensemble du pays, ce qui fait du Xinjiang la troisième province pétrolière de Chine derrière le Heilongjiang avec le champ de Daqing et le Shandong avec celui de Shengli176. Pour l’avenir, les autorités chinoises ont estimé que la production pétrolière de la région pourrait atteindre 50 Mt par an en 2010, ce qui serait équivalent voire supérieur à la production actuelle du champ pétrolifère géant de Daqing, le plus important de Chine. Cette prévision semble cependant un peu trop optimiste.
78Au cours de la décennie 90, le Xinjiang est néanmoins devenu une des régions stratégiques les plus importantes pour l’industrie pétrolière chinoise. Entre 1990 et 2001, 15 milliards de dollars y auraient ainsi été investis dans les infrastructures et le développement de ce secteur177. 67 champs pétroliers et gaziers auraient été découverts pendant cette période. Parallèlement, d’importantes capacités de raffinages ainsi que des projets pétrochimiques ont été mis en place dans la région. On y trouve désormais d’importantes raffineries (Dushanzi, Urumqi, Karamay et Zepu), ainsi que des usines pétrochimiques (comme l’usine de production d’éthylène de Dushanzi). Les capacités de raffinages de pétrole brut de la région atteignaient en 2006 20,3 millions de tonnes178. Elles devraient croître à l’avenir selon les médias chinois. Dans le secteur de la pétrochimie, le Xinjiang est désormais capable de produire plus de 200 types de produits. Le poids acquis par le secteur pétrolier et pétrochimique dans l’économie régionale est ainsi devenu extrêmement important au tournant du nouveau siècle.
79Dans le domaine du gaz, énergie du xxie siècle selon de nombreux experts, le Xinjiang est un des quatre grands bassins gaziers de la Chine avec le Qaidam, le sud-ouest du bassin du Sichuan et le centre du bassin Shaanxi-Gansu-Ningxia. La capacité de production annuelle de gaz naturel au Xinjiang a rapidement cru au cours des dernières années, atteignant en 2007, 21,2 milliards de m3 de gaz sur un total chinois de 66,61 milliards de m3179. En 2007, si on additionne les productions de pétrole et de gaz, le Xinjiang est devenu la première province productrice d’hydrocarbures de Chine juste devant le Heilongjiang. Enfin, dans le domaine des énergies renouvelables, les richesses hydrauliques, éoliennes180 et solaires181 du Xinjiang sont très substantielles.
80Le Xinjiang est également une zone très importante d’agriculture, d’élevage et de sylviculture. Officiellement, à la fin de l’année 2003, les terrains disponibles pour l’agriculture, la sylviculture et l’élevage couvraient 68 millions d’ha –soit 41,19 % de la superficie totale de la région- dont 9,33 millions d’ha de terres défrichables et 4,08 millions d’ha de terres cultivées182. Dans le domaine agricole, la région est un grand producteur de grains, d’oléagineux, de betteraves sucrières (c’est le quatrième producteur de sucre du pays) et de fruits (plus de 1000 variétés). Elle renferme aussi la plus grande plantation d’amandiers de Chine (plus de 53 000 ha). La production de tomates du Xinjiang représente 80 % de celle du pays. La région produit également 80 % de la fleur du carthame et 70 % du houblon du pays. C’est également la première province productrice de coton de la République populaire. Elle assure à elle seule 40 % de la production de coton à usage commercial de Chine. Le coton est, avec le pétrole, le secteur industriel privilégié par les autorités chinoises au Xinjiang.
81La région autonome compte également 56 millions d’hectares de pâturages naturels dont 48 millions sont exploitables, ce qui représente environ 22 % du total du pays183. C’est la troisième plus grande aire de pâturage de Chine aussi l’élevage y est-il particulièrement développé, de même que l’industrie des produits dérivés de cette activité (production de lait, de viande, de cachemire etc.). Le Xinjiang est par exemple une des principales base de production de laine fine de Chine. De plus, les terres destinées à la sylviculture s’étendent sur 4,84 millions d’ha dont une région forestière de 1,53 million d’ha, avec des réserves de bois de 250 millions de m3.
82Enfin, la région est également riche sur le plan des ressources biologiques. Elle renferme plus de 3 000 espèces de plantes -notamment de nombreuses plantes médicinales- représentant environ 10 % du total du pays et 700 espèces animales. Cet ensemble de ressources naturelles est donc loin d’être négligeable pour la République populaire qui s’est lancée dans la modernisation de son économie à partir de 1979. En raison de l’accélération de la croissance économique, certaines d’entre elles, notamment les ressources énergétiques et minérales, ont acquis une importance stratégique pour Pékin. L’intérêt de la région autonome du Xinjiang ne réside cependant pas seulement dans les richesses de son sol et de son sous-sol.
2. Une terre d’expérimentation : le complexe nucléaire chinois
83Aux ressources naturelles, il faut ajouter la vocation ancienne de cette région en tant que terre d’exil184, une caractéristique que le régime communiste chinois a repris à son compte en y installant des camps de prisonniers185, et son utilité comme terrain de manœuvres pour les forces de l’Armée populaire de libération (APL). Plus fondamentalement, dans le domaine militaire, le Xinjiang joue un rôle important dans le domaine de la surveillance électronique (facilités pour l’interception des communications), de l’expérimentation de missiles balistiques, et surtout en matière d’expérimentation nucléaire186. C’est en effet, dans la région du Lob Nor située au sud-est du Xinjiang qu’est installé le site d’essais d’armes nucléaires de la République populaire. Pékin y a conduit entre 1964 et 1996 quarante-cinq expérimentations. Etabli à partir d’octobre 1959 après une série de prospections menées dans différentes zones avec l’aide des Soviétiques, le périmètre de test du Lob Nor est le plus important centre d’essai atomique du monde. Il couvre une superficie d’environ 100 000 km2 (soit une surface un peu supérieure à celle de la Hongrie) dont 20 000 km2 ont été utilisés pour effectuer les tests nucléaires. A titre de comparaison, on se souviendra que le site de Semipalatinsk situé au Kazakhstan et qui a servi de lieu d’expérimentation à 456 tests nucléaires soviétiques ne couvre que 18 000 km2.
84Le périmètre du Lob Nor comporte quatre zones d’essais nucléaires, trois pour les essais nucléaires souterrains et un pour les essais nucléaires atmosphériques. Il s’agit respectivement de la région de Qinggir où ont été réalisés treize des vingt-deux tests souterrains chinois ; des régions de Nanshan (nord-ouest de Qinggir) et Beishan (sud-ouest de Qinggir) utilisées pour les essais nucléaires en tunnel et enfin d’une zone d’essais atmosphériques, inactive depuis le dernier essai nucléaire atmosphérique chinois du 16 octobre 1980. Ces quatre zones sont situées dans les districts central et sud-est du périmètre d’expérimentation du Lob Nor. Dans le district nord-ouest est installé le quartier général de ce périmètre d’expérimentation. Il s’agit de la ville scientifique de Malan. Cette dernière, construite à partir de 1963 est située à environ 125 km au nord-ouest de Qinggir. Elle sert de résidence aux scientifiques, aux techniciens et aux ingénieurs travaillant au programme nucléaire de la République populaire. A quelques dizaines de kilomètres de Malan est également installé un institut de recherche nucléaire, le « Red Mountain Institute » créé en 1963. Il s’agit d’un centre de recherche moderne consacré aux tests et aux recherches sur les armements nucléaires. Ces activités de recherches couvrent le domaine de la physique, de l’optique, des radiations, de la chimie etc. Outre les aires d’essais et les infrastructures de recherches, le périmètre d’expérimentation du Lob Nor pourrait aussi abriter des stocks d’armes nucléaires de la République populaire ainsi que des dépôts de déchets nucléaires.
85En plus du nucléaire, si on suit l’ancien expert soviétique d’origine kazakhe Ken Alibek (Kanatjan Alibekov) aujourd’hui réfugié aux États-Unis, la République populaire aurait utilisé la région de Malan pour effectuer des tests d’armes bactériologiques à partir du début des années 80187. Enfin, si depuis le 29 juillet 1996, la Chine n’a plus procédé à de nouveaux essais nucléaires, la région autonome du Xinjiang a conservé toute son importance dans le domaine de l’expérimentation balistique puisque Pékin y teste des missiles à moyenne et à longue portées. On trouve dans cette région plusieurs sites d’impacts nécessaires à l’expérimentation de ce type d’engins. C’est au Xinjiang, dans la région du Lob Nor, que Pékin a testé en 1999 le dernier né de son arsenal balistique, le missile Dong Feng-31 (DF-31) d’une portée de 8000 km188. Sur le plan militaire, la région autonome du Xinjiang joue donc un rôle essentiel pour l’APL.
3. Une position géostratégique particulière
86Le Xinjiang/Turkestan oriental est la province la plus extravertie de Chine. Elle partage une frontière commune avec un grand nombre d’États et de régions (la Mongolie, la Fédération de Russie, le Kazakhstan, la République kirghize, le Tadjikistan, l’Afghanistan, le Pakistan, le Cachemire et l’Inde) et à l’intérieur du territoire chinois actuel, elle touche également à la zone sensible du Tibet. Cette région est donc ouverte sur un espace géographique qui s’étend de la Mongolie à l’Himalaya et au Sous-continent indien, en passant par la Sibérie, les steppes du Kazakhstan et l’Asie centrale. Sur le plan géostratégique, cette localisation géographique particulière met la République populaire en communication avec l’ensemble de ces espaces, ce qui, en fonction de l’environnement régional et de la situation politique en Chine, peut être une source de force ou de faiblesse. Traditionnellement, le Xinjiang a plutôt été considéré en Chine comme une zone tampon, une ligne de défense avancée ou une « première ligne de défense » pour reprendre une expression de I. Hsü, protégeant le nord du pays et Pékin des invasions des peuples nomades venus de la steppe.
87A la fin du xixe siècle, cet argument a encore été utilisé par Zuo Zongtang pour convaincre la Cour des Qing de soutenir une campagne militaire coûteuse contre l’émir de Kachgar. Au moment du conflit sino-soviétique, face à l’URSS, puissance continentale par excellence et héritière dans sa composante spatiale des empires cavaliers, cette fonction a perduré. Ainsi, pendant cette période, les infrastructures de transports et de communications du Xinjiang ont été développées de telle sorte que cette zone soit mieux reliée aux provinces intérieures ou aux régions contrôlées par la République populaire de Chine189 alors qu’à l’ouest, elles ont été maintenues à un faible niveau de développement, susceptible de ralentir une éventuelle pénétration militaire soviétique.
88D’un autre côté, outre son rôle de zone tampon, le Xinjiang/Turkestan oriental peut également devenir un véritable « pont » vers les régions adjacentes du Sous-continent indien, d’Asie centrale ou de Sibérie, permettant à la Chine d’entrer en contact, voire de projeter son influence dans ces zones. C’est ce qui s’est passé à plusieurs reprises dans la longue durée historique lorsque des dynasties suffisament puissantes comme les Han, les Tang ou les Qing ont pu s’implanter dans cet espace et étendre à partir de-là leurs relations avec les régions adjacentes. Plus récemment, c’est cette fonction qui a été activée en direction de la partie pakistanaise du Sous-continent indien à partir de 1968 avec le lancement des travaux de la grand route du Karakorum reliant Kachgar à Gilgit au Pakistan. Avec le rapprochement sino-soviétique entamé en 1986, cette fonction du Xinjiang a également été activée en direction de l’URSS et plus particulièrement des RSS d’Asie centrale. L’implosion de l’URSS offre désormais à Pékin l’occasion d’activer et d’utiliser pleinement cette vocation de « pont » du Xinjiang/Turkestan oriental afin d’établir des relations voire de projeter son influence vers le Sous-continent indien, la Sibérie, l’Asie centrale et, au-delà, le Moyen-Orient et l’Europe.
4. Une terre liée à l’imaginaire chinois et au prestige de la Chine
89Immanuel Hsü qui a étudié le grand débat de 1876 entre les tenants d’une défense de la frontière maritime et le parti de Zuo Zongtang qui favorisait la défense de la frontière intérieure terrestre de l’empire Qing, a relevé l’importance d’un facteur négligé : l’imaginaire. Pour les élites de la fin du xixe siècle, le Xinjiang/Turkestan oriental est associé au mystère, à l’aventure et à la gloire militaire. Cette image est toujours présente aujourd’hui dans l’imaginaire chinois. Ainsi, pour prendre un exemple récent, le réalisateur taiwanais Ang Lee, a dans son film Crouching Tiger, Hidden Dragon (Wo hu cang long) tourné en 2000, pleinement tiré parti de ce ressort. Sur le plan de l’imaginaire, on peut dresser un parallèle entre l’image romantique du Xinjiang -ou du Xiyu associé au Xinjiang dont la puissance d’évocation est plus grande encore- pour les Chinois et celle du Caucase pour les Russes190. La puissance de l’imagination n’est pas un facteur sans conséquence comme on peut le constater aujourd’hui encore dans le Caucase.
90Ce lien puissant qui relie le Xinjiang à la Chine est en outre renforcé par le poids particulier de l’histoire et de la tradition sur les élites chinoises. Ce dernier est également mis en avant par I. Hsu dans le cadre du débat de 1876. En effet, au cours des deux derniers millénaires, presque tous les empereurs considérés comme ambitieux dans l’histoire chinoise notamment l’empereur Wudi de la dynastie des Han, Taizong de celle des Tang, Kangxi et Qianlong de celle des Qing, ont mené des expéditions militaires dans cette région. Un pouvoir « chinois » peut-il dès lors et dans ces conditions réellement méconnaître cet héritage historique et renoncer à s’inscrire dans cette glorieuse filiation en négligeant cet espace géographique particulier ? Non seulement l’Histoire telle qu’interprétée par les élites chinoises s’y oppose mais on peut en outre ajouter que le prestige de la Chine pourrait également être atteint en cas de perte de ce territoire désormais considéré comme une partie intégrante du « territoire national ». Enfin, la remise en cause du statut de ce territoire ouvrirait la porte à la contestation du statut d’autres territoires dont les liens avec le « territoire national chinois » sont également distendus. On pense notamment au cas du Tibet, de la Mongolie intérieure et de Taiwan, ce qui est inacceptable pour les autorités de Pékin. Ces facteurs jouent également un rôle dans les choix de Pékin à l’égard du Xinjiang et donc dans sa politique à l’égard des Républiques centre-asiatiques.
Notes de bas de page
7 Cette partie s’appuie essentiellement sur l’article « Uygur Autonomous Region of Sinkiang » de l’ Encyclopaedia Britannica ; TROLLIET, P., « Xinjiang », Encyclopeadia Universalis, Corpus 23, Paris, Encyclopeadia Universalis, 1990, p. 903 et Xinjiang, A General Survey, Editors Liu Yusheng, Zhang Bin, Liu Xiaqing, Beijing, New Star Publishers, 2005, 225p.
8 CIA, The World Factbook 2007, dans https://www.cia.gov/cia/publications/factbook/geos/ch.html
9 Le centre du bassin de la Dzoungarie reçoit en moyenne 80 à 100 mm de pluie par an. A sa périphérie, les précipitations peuvent atteindre annuellement 100 à 250 mm.
10 MALLORY, J. P., MAIR, Victor H., The Tarim Mummies, Ancient China and the Mystery of the Earliest Peoples from the West, London, Thames & Hudson, 2000, 352p.
11 SKRINE, C. P., Chinese mitral Asia: an account of travels in Northern Kashmir and Chinese Turkestan, with an introduction by Alistair Lamb, Hong Kong, New York, Oxford University Press, (1926) 1986, p. 117.
12 « Xinjiang » dans www.unescap.org/pop/database/chinfidMa/xinjiang.htm
13 « Xinjiang’s Population Statistics Reveals Increase in Number of Hans », Xinjiang Ribao dans FBIS-CHI-2001-0517, April 3, 2001.
14 « Communique on major figures of the 2000 population census n° 2 », National Bureau of Statistics People’s Republic of China, April 2, 2001 (www.cpirc.org.cn/e5cen-data2.htm). Il faut ajouter à ces chiffres 2,5 millions de militaires. Pékin ajoute également à ses statistiques la population de Taiwan soit 22,28 millions de personnes.
15 Dans le CIA Factbook 2007 (https://www.cia.gov/cia/publications/factbook/index.html)
16 Selon le recensement de novembre 2000, les Han représentent officiellement 91,59 % de la population chinoise. L’idée de « race » Han n’a été mise en forme qu’à la fin du xixe siècle. Elle masque la diversité existant parmi les populations qualifiée officiellement de Han. Voir GERNET, J., Le monde chinois, Paris, Armand Colin, 1990, p. 20.
17 Les « Hui » sont la seconde plus importante minorité nationale de Chine. En 2000, ils étaient 9,81 millions.
18 AUBIN, F., « Chine : Islam et christianisme au crépuscule du communisme », dans Les politiques de Dieu, sous la direction de Gilles Kepel, Paris, Le Seuil, 1993, pp. 146-147. Les Hui, malgré leur appartenance à l’islam, sont perçus par les populations musulmanes turcophones du Xinjiang comme proches des Han. Voir NEWBY, L., « The Pure True Religion in China », The Third World Quarterly, vol. 10, n° 2, April 1988, pp. 933-934.
19 A l’époque républicaine, la région comptait officiellement 14 « nationalités » (Ouïgours, Taranchis, Kazakhs, Kirghizes, Ouzbeks, Tatar, Tadjik, Mandchou, Xibo, Solon, Han, Hui, Mongols et Russes). Voir SVANBERG, I., « Ethnic Categorizations and Cultural Diversity in Xinjiang: The Dolans along Yarkand River », Central Asiatic Journal, 40/2, 1996, p. 261.
20 REN, Qiang, YUAN, Xin, « Impacts of Migration to Xinjiang since the 1950s » dans China’s minorities on the move. Selected case studies, edited by Robyn Iredale, Naran Bilik and Fei Guo, M.E. Sharpe, London, Atmonk, New York, 2003, p. 97. Lorsqu’en 1949 le gouvernement de la RPC a invité les groupes ethniques du pays à se faire enregistrer pour obtenir le statut officiel de minorité nationale, plus de 400 groupes se sont présentés. Le travail ethnologique a débuté dès les années 1950. Dans le recensement de 1953, seuls 41 nationalités ont été reprises. En 1979, le gouvernement chinois a fixé une liste officielle de 55 groupes ethniques vivant en Chine.
21 Idem, p. 97.
22 « Eastern Turkestan FAQ » dans (http://www.taklamakan.org/uighur-l/et_faq_pl.html#a5)
23 Pour être complet, il faut ajouter les Ouzbeks, les Tatars et les Salars, également turcophones.
24 Les Tadjiks sont concentrés dans le district autonome tadjik de Tachkurgan fondé en 1954, près de la frontière du Tadjikistan et de l’Afghanistan. On trouve également des Tadjiks dans le sud du Xinjiang à Yarkand, Zepu, Kargilik (Yecheng) et Pishan.
25 II n’existe pas de district autonome ouzbek. Les Ouzbeks vivent en communautés compactes notamment dans les villes de Yining, Tacheng, Kachgar, Urumqi, Yarkand et Kargilik (Yecheng). De nombreux Ouzbeks du Xinjiang parlent ouïgour et sont quasiment assimilés aux Ouïgours.
26 La Chine compte dix nationalités musulmanes : les Hui, les Ouïgours, les Kazakhs, les Dongxiang, les Tatars, les Ouzbeks, les Kirghizes, les Salars, les Tadjiks et les Bollan (Baoan). Hormis les Hui présents un peu partout en Chine, les autres nationalités musulmanes sont concentrées au Xinjiang. Les musulmans de Chine sont généralement sunnites de rite hanafite -la plus modérée parmi les quatre branches juridiques de l’islam- à l’exception des Tadjiks qui sont shi’îtes septimaniens (les Ismaéliens) sauf la communauté de Yarkand qui professe le shi’îsme duodécimain. Le soufisme est par ailleurs très présent au Xinjiang.
27 Chiffre cité dans HUSKEY, E., « Kyrgyzstan: the politics of demographic and economic frustration » dans New states, new politics: building the post-Soviet nations, edited by Ilan Bremmer and Ray Taras, Cambridge, New York, Cambridge University Press, 1997, p. 659.
28 Les Hui souscrivent à un large spectre de croyances islamiques. A côté de l’islam traditionnel sunnite de rite hanafite majoritaire, le soufisme est également répandu.
29 Les Ouïgours sont sunnites de rite hanafite mais historiquement, le soufisme a joué un rôle très important au Turkestan oriental.
30 Voir détails dans BENSON, L., SVANBERC, I., China’s Last Nomads. The History and Culture of China’s Kazaks, New York, Armonk, London, M.E. Sharpe, 1998, pp. 126-170.
31 En 2002, les Kazakhs représentaient 25,5 % des 4,2 millions de personnes vivant dans cette préfecture. Les Han comptaient pour 45,2 %, les Ouïgours, 15,9 %, les Hui 8,3 % et les Mongols 1,69 %. Chiffres tirés de « Yili Hasake zizhizhou jiben qingkuang », October 2005, http://www.xjyl.gov.cn/1$001/1$001$002/4.jsp
32 Chiffre cité dans BRII.I. OLCOTT, M., « Kazakhstan: pushing for Eurasia » dans New states, new politics: building the post-Soviet nations, op. cit., p. 549
33 Outre le Xinjiang et le Kazakhstan, en 1989, dans l’espace soviétique, on trouvait des Kazakhs également au Turkménistan, dans le nord du Kirghizstan, en Ouzbékistan et au Karakalpakistan. Il y a également des Kazakhs en Mongolie, en Iran, en Turquie, ainsi que dans quelques pays d’Europe occidentale (Allemagne, France, Suède) et aux Etats-Unis.
34 Voir SHAW, R., Visits to high Tartary, Yârkand, and Kâshgar (formerly Chinese Tartary), and return journey over the Karakoram pass. London, J. Murray, 1871, xv-486p.
35 II l’utilise ainsi dans le chapitre historique de son livre.
36 KUROPATKIN, A. N., Kashgaria, eastern or Chinese Turkistan; historical and geographical sketch of the country, its military strength, industries, and trade, Translated from the Russian by Walter E. Gowan, Calcutta, Thacker, Spink and Co., 1882, p. 33.
37 GRENARD, F., Le Turkestan et le Tibet. Étude ethnographique et sociologique, deuxième partie de DUTREUIL de RHINS, Mission scientifique dans la Haute Asie, 1890-1895, Paris, Ernest Leroux, 1898, pp. 9-11.
38 Idem, p. 46.
39 FLETCHER, J. F, « China and Central Asia, 1368-1884 », dans The Chinese World Order, Traditional China’s Foreign Relations, edited by John King Fairbank, Cambridge (Massachusetts), Harvard University Press, 1968, p. 364. Cette suggestion a été faite par le linguiste russe Sergej Efimovich Malov qui a employé l’ethnonyme ouïgour pour désigner la langue du Sud-Xinjiang en 1912 et 1914. Voir AUBIN, F., « L’arrière-plan historique du nationalisme ouïgour. Le Turkestan oriental des origines au xxème siècle », Cahiers d’études sur la Méditerranée orientale et le monde turco-iranien (ci-après Ce-moti), n° 25, janvier-juin 1998, pp. 27-28.
40 Dans LIGHT, N., Slippery Paths: The Performance and Canonization of Turkic Literature and Uyghur Muqam Song in Islam And Modernity, PhD Dissertation, Folklore Department, Indiana University, May 1998, 515p.
41 F. Aubin situe le début de la gestation du nationalisme est-turkestanais en 1911. On peut faire remonter le nationalisme est-turkestanais à l’influence de l’enseignement djadid qui se propage au Turkestan oriental dans la dernière décennie du xixe siècle grâce au patronage des frères Musa Bay (Musa Bayof), célèbres marchands et industriels de la ville d’Artux. Voir MILLWARD, J., TURSUN, N., « Political History and strategies of Control, 1884-1978 » dans China’s Muslim Borderland, Edited by S. Frederick Starr, London, M.E. Sharpe, New York, Armonk, 2004, pp. 72-73. Un auteur japonais souligne également le rôle des organisations patronnées par le gouvernement Jeunes Turcs d’Istanbul dans le développement d’un mouvement nationaliste dans cette région. Voir HAMADA, M., « La transmission du mouvement nationaliste au Turkestan oriental (Xinjiang) », Central Asian Survey, vol. 9, n° l, 1990, pp. 29-48.
42 Voir SKRINE, C. P., Chinese central Asia: an account of travels in Northern Kashmir and Chinese Turkestan, op. cit.
43 Idem, p. 179 et p. 184.
44 Voir LATTIMORE, O., « Chinese Turkistan » repris dans LATTIMORE, O., Studies in Frontier History, Collected papers 1928-1958, London, Oxford University Press, 1962, p. 187.
45 Voir FLEMING, P., Courtier de Tartarie, Paris, Editions Payot, 1992, p. 266.
46 MAILLART, E„ Oasis interdites : de Pékin au Cachemire, une femme à travers l’Asie centrale en 1935, Paris, Payot, 1991, p. 218.
47 idem, p. 218.
48 AUBIN, F., « L’arrière-plan historique du nationalisme ouïgour. Le Turkestan oriental des origines au xxème siècle », op. cit., p. 28.
49 WU, Aitchen K., Turkistan Tumult, Hong/Kong, Oxford University Press, 1984, p. 215.
50 LATTIMORE, O., Pivot of Asia; Sinkiang and the inner Asian frontiers of China and Russia, with the assistance of Chang Chih-yi [and others], 1st ed. Boston, Little, Brown, 1959, xii-288p. et LATTIMORE, O., Inner Asian Frontiers of China, With an introduction by Alastair Lamb, Second impression, Hong Kong, Oxford, New York, Oxford University Press, (1940) 1992,585p.
51 Mao Zedong zhi Peng Dehuai dianhao, 26 septembre 1949 cité dans ZHU, Peimin, « Mao Zedongyu Xinjiang » dans ZHU, Peimin, 20 Shiji Xinjiang shi yanjiu, Wulumuqi, Xinjiang renmin chubanshe, 2000, pp. 41-42.
52 Si on croit le témoignage de Saifudin, le président Mao avait proposé la dénomination « Région autonome du Xinjiang » sans la référence aux Ouïgours. Voir « Article reviews 40 years of Xinjiang autonomy », Renmin Ribao dans FBIS-CHI-95-221, November 16, 1995.
53 ZHU, Peimin, « Zhou Enlai yu Xinjiang » dans ZHU, Peimin, 20 Shiji Xinjiang shi yanjiu, op. cit. p. 209.
54 SVANBERG, I., « Ethnic Categorizations and Cultural Diversity in Xinjiang: The Dolans along Yarkand River », op. cit., pp. 260-282. Les spécialistes du folklore ouïgour comptent sept divisions au sein de ce groupe : les Dolans, Lopliks, Abdâls, Keriyaliks, Kashgarliks, les Ouïgours de l’Est (Turfân et Hami), les Kuldjaliks ou Taranchis (Ili). Voir RUDELSON, J. J., Oasis Identities. Uyghur Nationalism Along China’s Silk Road, New York, Columbia University Press, 1997, p. 24. Cette information nous a été en partie confirmée par les propos d’un interlocuteur ouïgour originaire de Kachgar à l’hiver 2004/2005.
55 Ce localisme s’est manifesté dans les années 80 chez les intellectuels ouïgours nationalistes par la promotion de figures de héros, différenciées selon les oasis. Voir RUDELSON, J.J., « Uighur Historiography and Uighur Ethnic Nationalism », dans Ethnicity, Minorities and Cultural Encounters, edited by Ingvar Svanberg, Centre for Multiethnic Research, Uppsala University, Uppsala, 1991, pp. 63-82 et RUDELSON, J.J., Oasis Identities. Uyghur Nationalism Along China’s Silk Road, op. cit., pp. 143-165.
56 Selon Rudelson, la région du Xinjiang peut être divisée en quatre zones géographiques distinctes influencées par une aire culturelle particulière. Il relie ainsi la région de Kachgar à la civilisation islamique de l’Asie centrale occidentale ; la région de Turfân à la Chine car cette région a reçu selon lui une influence chinoise importante ; la région de Khotan à l’Inde et enfin la région d’Ili au monde de la steppe puis à la Russie. Idem, pp. 39 et ss.
57 KOSTRZEWA, T.K., Separatist Nationalism in Xinjiang, Ph.D. dissertation, University of Notre-Dame, Indiana, 1996, p. 197 note 305.
58 BOVINGDON, G, « From Qumulluq to Uyghur: The Role of Education in the Development of a Pan-Uyghur Identity », Journal of Central Asian Studies, vol. 3, n° 1, automne/hiver, 1998, pp. 19-29.
59 SMITH, J., Changing Uyghur Identities in Xinjiang in the 1990s, PhD Dissertation, Department of East Asian Studies, The University of Leeds, March 1999, 288p.
60 YEE, H.S., « Ethnic Relations in Xinjiang: a survey of Uygur-Han relations in Urumqi », Journal of Contemporary China, 12 (36), August 2003, pp. 431-452 et YEE, H.S., « Ethnic consciousness and Identity: A Research Report on Uygur-Han Relations in Xinjiang », Asian Ethnicity, vol. 6, n° l, February 2005, pp. 35-50.
61 CANFIELD, R. L., « Introduction: the Turko-Persian tradition » dans Turko-Persia in historical perspective, edited by Robert L. Canfield, Cambridge, New York, Cambridge University Press, 1991, pp. 1-34.
62 JOHANSON, Lars, Discoveries on the Turkic Linguistic Map, Svenska Forskningsins-titutet i Istanbul, Publications 5, Stockholm 2001, pp. 19-22.
63 Cité dans DAFTARI, Maryam, « The Main Commonalities in the Islamic Culture of the Muslims of Iran and the Hui Nationality of China », China Report, vol. 35, n° 4, 1999, p. 466.
64 JAN, M., « Les structures politiques dans le Xinjiang », Nouveaux Mondes, n° 5, été 1994, pp. 159-177.
65 CHAUDHURI, D., « A survey of the Economic Situation in Xinjiang an dits Role in the Twenty-first Century », China Report, vol. 41, n° l, 2005, p. 6 et TOOPS, S, « The demography of Xinjiang » dans Xinjiang: China’s Muslim Borderland, Edited by S. Frederick Starr, London, M.E. Sharpe, New York, Armonk, 2004, p. 257.
66 Selon Michel Bruneau, trois caractéristiques définissent une ‘diaspora’ : ‘la conscience et le fait de revendiquer’ une identité ethnique ou nationale’, ‘l’existence d’une organisation politique, religieuse ou culturelle du groupe dispersé (vie associative)’ et enfin ’l’existence de contacts sous diverses formes, réelles ou imaginaire, avec le territoire ou le pays d’origine’. Voir BRUNEAU, M., Diasporas et espaces transnationaux, Paris, Anthropos-Economica, Collection Villes-géographie, 2004, 249p.
67 Voir ISKHAKOV, H., AKHMEDOVA, K., « Les migrations des Ouïgours vers l’Asie centrale soviétique », Cemoti, n° 25, janvier-juin 1998, pp. 151-159 et KAMALOV, A., CLARK, W., « Uighur migration across Central Asian Frontiers », Central Asian Survey, vol. 23, n° 2, 2004, pp. 167-182.
68 D’après BALCI, B., The role of the Turkestani (Uzbek and Uighur) communities settled in Saudi Arabia in the Development of Wahhabism in Central Asia, Conference Paper, Prospects for Democracy in Central Asia, Istanbul, 1-3 June 2003.
69 Voir KELLNER, T., « Chine : La situation des Ouïgours de l’indépendance des républiques centrasiatiques à l’après-11 septembre », WriteNet paper, n° 1/2002, mai 2002, 26p.
70 Voir SHICHOR, Yitzhak, « Virtual Transnationalism: Uygur Communities in Europe and the Quest for Eastern Turkestan Independence », dans Muslim Networks and Transnational Communities in and Across Europe Jørgen S. Nielsen and Stefano Allievi (Eds.), Leiden, Brill, 2003, p. 286.
71 Détails dans Idem, pp. 288 et ss..
72 Le World Uyghur Congress est né en avril 2004 de la fusion du East Turkestan National Congress (lui-même créé en 1999) et du World Uyghur Youth Congress (existant depuis 1996). Il a été dirigé par Erkin Alptekin, le fils de Yusuf Isa Alptekin, jusqu’à l’élection à sa tête en novembre 2006 de Rabiye Kadeer. Il fédère une bonne partie des organisations de la diaspora ouïgoure basées en Occident (Europe et continent nord-américain), en Turquie et en Asie centrale (Kazakhstan et République kirghize). Avec la Uyghur American Association, c’est l’organisation ouïgoure la plus active. Voir http://www.Wighurcongress.org/En/home.asp
73 Voir BESSON, F.-J., « Les Ouïgours hors du Turkestan oriental : de l’exil à la formation d’une diaspora », Cemoti, n° 25, janvier-juin 1998, pp. 161-192 et CASTETS, Rémi, « Opposition politique, nationalisme et islam chez les Ouïghours du Xinjiang », Les Etudes du CERI, n° l 10, octobre 2004, 45p.
74 CIADNEY, Dru C, « Cyber-Separatism and Uyghur ethnic nationalism in China », Center for Strategic and International Studies, J u n e 5, 2003 et SHICHOR, Yitzhak,« Virtual Transnationalism: Uygur Communities in Europe and the Quest for Eastern Turkestan Independence », op. cit., pp. 300 et ss.
75 KAMALOV, A., « Uighur community in 1990s Central Asia. A decade of change » dans Central Asia and the Caucasus: transnationalism and diaspora, ed. Touraj Atabaki & Sanjyot Mehendale, London, Routledge, 2005, p. 154.
76 Entretien avec des représentants de la diaspora ouïgoure à Bruxelles, octobre 2001
77 Voir KAMALOV, A., « Uighur community in 1990s Central Asia. A decade of change », op. cit., pp. 151 et ss.
78 Dans KAMALOV, A., CLARK, W., « Uighur migration across Central Asian Frontiers », op. cit., p. 181.
79 Sur les liens entre Ouïgours du Kazakhstan et du Xinjiang: ROBERTS, Sean R., « Negotiating Locality, Islam, and National Culture in a Changing Borderlands: The Revival of the Mashrap Ritual among Uighur Men in the Ili Valley », Central Asian Survey, vol. 17, n° 4, 1998, pp. 673-699 et ROBERTS, Sean R., « A ’Land of Borderlands’. Implications of Xinjiang’s Trans-border Interactions » dans Xinjiang: China’s Muslim Borderland, op. cit., pp. 216-237.
80 KAMALOV, A., CLARK, W., « Uighur migration across Central Asian Frontiers », op. cit., p. 181.
81 Voir ROBERTS, Sean R., Uyghur neighborhoods and nationalisms in the former Sino-So-viet borderland: An historical ethnography of a stateless nation on the margins of modernity, PhD., University of Southern California, 2003, 446p.
82 OKA, Natsuko, « Transnationalism as a Threat to state Security? Case studies on Uighurs and Uzbeks in Kazakhstan » dans Empire, Islam, and Politics in Central Eurasia, edited by Uvama Tomohiko, Slavic Eurasian Studies, n° 14, Slavic Research Center, Sapporo, 2007, p. 355.
83 Bishkek Human Rights Organization, Brief Report on the Situation with Human Rights of Uighurs in Kyrgyzstan, Munich, 16 février 2002 et KAMALOV, A., « Uighur community in 1990s Central Asia. A decade of change », op. cit., p. 154.
84 Dans Idem, p. 155.
85 Il existe en Asie centrale, des communautés de « Hui », arrivés en deux vagues au XIXe (1877-1878 et 1881-1884) et dans une moindre mesure au xxe siècle (1961). Ils sont appelés « Dounganes » en Asie centrale.
86 Dans ETIC et Bishkek Human Rights Organization, Brief Report on the Situation with Human Rights of Uighurs in Kyrgysstan, op. cit.
87 KAMALOV, A., « Uighur community in 1990s Central Asia. A decade of change », op. cit., p. 156.
88 Idem, p. 154.
89 ETIC, Report on Situation with Human Rights of Uygurs in Uzbekistan, Munich, 2 avril 2002 et TARIMI, N.T., « China-Uzbek pact bad news for Uighurs », Asia Times, July 29, 2004.
90 BESSON, F.-J., « Les Ouïghours en Asie Centrale », Lettre de l’Asie Centrale, n° 5, 1996, pp. 5-6
91 Dans KAMALOV, A., « Uighur community in 1990s Central Asia. A decade of change », op. cit., p. 157.
92 TOOPS, Stanley, « Demographics and Development in Xinjiang after 1949 », East-West Center, Working Papers, n° 1, May 2004, pp. 21 et ss.
93 MA, Rong, « Population distribution and relations among ethnic groups in Kashgar Region, Xinjiang Autonomous Region », dans China’s minorities on the move. Selected case studies, op. cit., pp. 106-122.
94 Calcul de l’auteur d’après les chiffres de TOOPS, Stanley, « Demographics and Development in Xinjiang after 1949 », op. cit., p. 20. Voir CASTETS, Rémi, « Entre colonisation et développement du Grand Ouest : impact des stratégies de contrôle démographique et économique au Xinjiang », Outre-Terre, n° 16, 2006, pp. 264 et ss.
95 En 1998, les villes de Hami, Korla et Aqsû étaient ainsi à 50 % Han.
96 La ville de Karamay qui compte plus de 350 000 habitants a été fondée à la suite de la découverte d’un important champ pétrolifère dans cette zone en 1955.
97 TOOPS, S, « The Population Landscape of Xinjiang/East Turkestan », Inner Asia, vol. 2, n° 2, 2000, pp. 155-170. Dans les années 50, Hami était la seule ville reliée au réseau ferroviaire chinois. En 1960, Urumqi le sera également. Il faut attendre 1990 pour que le chemin de fer atteigne la frontière kazakhe. La pénétration du chemin de fer au sud du Xinjiang n’a débuté que dans les années 80 avec la mise en place de la ligne Turfân-Korla complétée vers Kachgar en 1999.
98 Cette ligne complète le tronçon de 476 km reliant Turfân à Korla, entré en service en 1984. Voir JIANG, Shijie, « Nanjiang Railway: Road of Unity and Benefit (I) », People’s Daily, December 7, 1999.
99 MILLWARD, J.A., « Historical Perspectives on Contemporary Xinjiang », Inner Asia, vol. 2, n° 2, 2000, pp. 122-123.
100 Chiffres tirés de GLADNEY, Dru C, « Prospects for the Uighur People in the Chinese Nation State History, Cultural Survival, and the Future », WriteNet Paper, n° 15/1999, October 1999, p. 7; GLADNEY, Dru C, « China’s minorities: the Case of Xinjiang and the Uyghur People », Commission on Human Rights, Sub-Commission on Promotion and Protection of Human Rights Working Group on Minorities Ninth session, 12-16 May 2003, May 2003 et TOOPS, Stanley, « Demographics and Development in Xinjiang after 1949 », op. cit., pp. 20-21.
101 Chiffres cités dans SVANBERG, I., « Ethnic Categorizations and Cultural Diversity in Xinjiang: The Dolans along Yarkand River », op. cit., p. 262.
102 Voir REN, Qiang, YUAN, Xin, « Impacts of Migration to Xinjiang since the 1950s », op. cit., p. 95.
103 YUAN, Qing-Li, « Population Changes in the Xinjiang Uighur Autonomous Region (1949-1984) », Central Asian Survey, vol. 9, n° l, 1990, pp. 51-52.
104 Idem, p. 62.
105 ZHU, Peimin, « Deng Xiaoping yu Xinjiang » dans ZHU, Peimin, 20 Shiji Xinjiang shiyanjiu, op. cit., pp. 333-334 et pour le rétablissement du CPCX dans Mem pp. 339 et ss. et « Deng Xiaoping in Xinjiang 1981 », Renmin Ribao dans FBIS-CHI-98-064, March 5, 1998.
106 Voir infra sur cet incident.
107 Les informations de ce paragraphe sont tirées de diverses sources : BARNETT, A. Doak, China’s Far West. Four Decades of Change, Boulder-London, Westview Press, 1993, pp. 398 et 401 ; SEYMOUR, J.D., « Xinjiang’s Production and Construction Corps, and the Sinification of Eastern Turkestan », Inner Asia, vol. 2, n° 2, 2000, pp. 171-193 ; BECQUELIN, N., « Chinese Hold on Xinjiang : Strenghts and limits », Les cahiers d’Asie, n° l, 2002, pp. 62-66 ; « Xinjiang Production and Construction Corp’s Foreign Economic Relations and Trade in 2001 » dans Yearbook of China’s foreign economic relations and trade 2001, Beijing, China Foreign Economic Relations and Trade Publishing House, 2002, pp. 369-372 ; « La fondation, le développement et le rôle du Corps d’armée de production et de construction du Xinjiang », dans Office d’information du Conseil des Affaires d’État de la République populaire de Chine, L’histoire et te développement du Xinjiang, Beijing, mai 2003, pp. 51-57 et « Xinjiang Shengchan jianshe bingtuan qing-kuangjieshao », Bingtuancom.gov.cn, February 6, 2007.
108 « La fondation, le développement et le rôle du Corps d’armée de production et de construction du Xinjiang », op. cit., p. 51.
109 « Xinjiang Shengchan jianshe bingtuan qingkuang jieshao », op. cit.
110 Calculs de l’auteur et Yearbook of China ’s foreign economic relations and trade 2005, Beijing, China Foreign Economic Relations and Trade Publishing House, 2006, pp. 649 et ss.
111 « Xinjiang ‘Da Zujin’ vanju » dans ZHU, Peimin, 20 Shiji Xinjiang shi yanjiu, op. cit., pp. 279-291.
112 Voir YUAN, Qing-Li, « Population Changes in the Xinjiang Uighur Autonomous Region (1949-1984) », op. cit., pp. 52-53 et 62-63.
113 REN, Qiang, YUAN, Xin, « Impacts of Migration to Xinjiang since the 1950s », op. cit., p. 96.
114 YUE, S., « Projet d’envoi de cinq millions de personnes au Xinjiang », Bulletin de sinologie, n° 84, octobre 1991, pp. 12-13.
115 « Xinjiang offers to resettle 3 Gorges Migrants », Zhongguo Tongxun dans FBIS-CHI-92-235, December 7, 1992.
116 BECQUELIN, N., « Pékin et l’Asie centrale après la fin de l’URSS », Perspectives chinoises, n° 44, novembre-décembre 1997, p. 18.
117 REN, Qiang, YUAN, Xin, « Impacts of Migration to Xinjiang since the 1950s », op. cit., p. 101.
118 « Major Figures of the 2000 Population Census n° l », National Bureau of Statistics People’s Republic of China, March 28, 2001 (www.cpirc.org.cn/e5cendatal.htm)
119 Voir Office d’information du Conseil des Affaires d’État de la République populaire de Chine, L’histoire et le développement du Xinjiang, Beijing, mai 2003, 67p.
120 CHEN,J., The Sinkiang story, New York, Macmillan, 1977. xxvii-386p.
121 AUBIN, F, « L’arrière-plan historique du nationalisme ouïgour. Le Turkestan oriental des origines au xxème siècle », Cemoti, n° 25, janvier-juin 1998, pp. 15-46 et MILLWARD, J. A., PERDUE, I’. (’,., « Political and cultural history of the Xinjiang region through the Late Nineteenth Century » dans Xinjiang: China’s Muslim Borderland, op. cit., pp. 27-62 offrent une excellente introduction à l’histoire du Xinjiang/Turkestan oriental. Pour l’histoire récente, on consultera les ouvrages de DILLON, M., Xinjiang, China’s Muslim Jar northwest, London. New York, RoutledgeCurzon, 2004, xiv-201p. et TYLER, C, Wild West China: the taming of Xinjiang, New Brunswick, N.J., Rutgers University Press, 2004, xvii-314p.. Enfin, pour la longue durée historique, nous disposons désormais de M1LLWARD, j. A., Eurasian Crossroads ? A History of Xinjiang, Columbia university Press, 2007, 352p.
122 Voir par exemple ZHU, Peimin, 20 Shiji Xinjiang shi yanjiu, op. cit., p. 1.
123 GENTELLE, P., L’État de la Chine, sous la dir. de P. Gentelle, Paris, La Découverte, 1989, p. 22.
124 SPENCE, J., The Search for Modem China, Second Ed., New York, London, Norton & Company, 1999, p. 97.
125 BLONDEAU, A.-M., BUFFETRILLE, K., Le Tibet est-il chinois ?, Paris, Albin Michel, 2002, 463p.
126 ROSSABI, M., China and Inner Asia: from 1368 to the present day, London, Thames and Hudson, 1975, p. 19.
127 HSU, I., The Hi crisis; a study of Sino-Russian diplomacy, 1871-1881, Oxford, Clarendon Press, 1965, p. 193.
128 Voir la conquête mandchoue dans PERDUE, Peter G, China marches west: the Qing conquest of Central Eurasia, Cambridge, Mass., Belknap Press of Harvard University Press, 2005, xx-725p.
129 LATTIMORE, O., Inner Asian Frontiers of China, op. cit., p. 171.
130 AUBIN, F., « L’arrière-plan historique du nationalisme ouïgour. Le Turkestan oriental des origines au xxème siècle », op. cit., p. 26.
131 Voir LIN, Chang-Kuan, « Sinkiang », The Encyclopaedia of Islam, New Edition, Edited by C.E. Bosworth, E. van Donzel, W.P. Heinrichs and G. Lecomte, vol. IX, Leiden, E.J. Brill, 1998, p. 648.
132 MILLWARD, J.A., Beyond the pass: economy, ethnicity, and empire in Qing Central Asia, 1759-1864, Stanford, Stanford University Press, 1998, p. 34.
133 KIM, Ho-dong, The Muslim rebellion and the Kashghar emirate in Chinese Central Asia, 1864-1877, PhD Dissertation, Inner Asian and Altaic Studies, Harvard University 1986, p. 30.
134 Sur ces maîtres soufis qui ont régné dans le bassin du Tarim à partir de la fin du xviie siècle voir PAPAS, Alexandre, Soufisme et politique entre Chine, Tibet et Turkestan : étude sur les Khxuajas Naqshbandis du Turkestan oriental, Paris, Librarie d’Amérique et d’Orient, Jean Maisonneuve successeur, 2005, iii-291p.
135 Voir CHU, Wen-chang, The Moslem rebellion in northwest China, 1862-1878; a study of government minority policy, The Hague, Mouton, 1966, xiii-232p.
136 Détails dans KIM, Ho-dong, Holy war in China: the Muslim rebellion and state in Chinese Central Asia, 1864-1877, Stanford, Stanford University Press, 2004, xviii-295p., HENZE, P., « The Great Game in Kashgaria. British and Russian Missions to Yakub Beg », Central Asian Survey, vol. 8, n° 2, 1989, pp. 61-95 et KARPAT, K. H., « Yakub Bey’s Relations with Ottoman Sultans: a Reinterpretation », Cahiers du monde russe et soviétique, vol. xxxii, n° l, janvier-mars 1991, pp. 17-32.
137 HSU, I. C.Y., « The Great Policy Debate in China, 1874: Maritime Defense vs. Frontier Defense », Harvard Journal of Asiatic Studies, vol. 25, 1964-1965, pp. 218 et ss.
138 HSU, I.C.Y., « British mediation of China’s war with Yakub Beg, 1877 », Central Asiatic Journal, vol. 9, n° 2, June 1964, pp. 142-149.
139 Voir les différentes hypothèses sur la cause de sa mort dans KIM, Ho-dong, The Muslim rebellion and the Kashghar emirate in Chinese Central Asia, 1864-1877, op. cit., p. 254 et ss.
140 HSU, I.C.Y., The Ili Crisis. A Study of Sino-Russian Diplomacy 1871-1881, Oxford, Clarendon Press, 1965, xiii-231 p..
141 Idem et JELAVICH, C. et В., Russia in the East 1876-1880. The Russo-Turkish war and the Kuldja Crisis as seen through the letters of A.G. Jomini to N.K. Giers, Leiden, E.J. Brill, 1959, pp. 91 et ss.
142 Outre Qûmul/Hami, il existait des « États princiers » à Lukchun, Âqsû et Kûcha dans FORBES, A.D.W., Warlords and Muslims in Chinese Central Asia. A political History of Republican Sinkiang 1911-1949, Cambridge, Cambridge University Press, 1986, p. 275 note 49.
143 CHU, Wen-djang, The Moslem rebellion in northwest China, 1862-1878; a study of government minority policy, op. cit., p. 204. Sur le rôle de la littérature dans la constitution de la représentation du Xinjiang comme une partie intégrante du territoire chinois voir NEWBY, L., « The Chinese Literary conquest of Xinjiang », Modern China, vol. 25, n° 4, October 1999, pp. 451-474.
144 Voir LIPMAN, Jonathan N., Familiar strangers: a history of Muslims in Northwest China, Seattle, University of Washington Press, 1997, xxxvi-266p. (chapitres 4 et 5)
145 L’historiographie du Xinjiang au xxe siècle voir WANG, D., « Xinjiang of the 20th century in historiography », Central Asian Survey, vol. 14, n° 2, 1995, pp. 265-283.
146 Voir FORBES, A.D.W., Warlords and Muslims in Chinese Central Asia., passim.
147 MILLWARD, J., TURSUN, N., « Political History and strategies of Control, 1884-1978 », op. cit., pp. 77-79.
148 Voir BARMIN, V, « Xinjiang in the History of Soviet-Chinese Relations from 1931 to 1934 », Far Eastern Affairs, n° 6, 1999, pp. 51-52.
149 NYMAN, L.E., « Sinkiang 1934-1943. Dark decade for a pivotal puppet », Cahiers du Monde russe et soviétique, vol. xxxii, n° l, janvier-mars 1991, passim.
150 Texte dans HASIOTIS, A.C., Soviet Political, Economic, and Military Involvement in Sinkiang from 1928 to 1949, New York, London, Garland Publishing Inc., 1987, pp. 199-204.
151 WANG, D., Under the Soviet Shadow. The Yining Incident: Ethnic Conflicts and International Rivalry in Xinjiang, 1944-1949, Hong Kong, The Chinese University Press, 1999, pp. 282 et ss.
152 BENSON, L„ The Ili rebellion The Moslem challenge to Chinese authority in Xinjiang 1944-1949, New York, Armonk, London, M.E. Sharpe, 1990, pp. 34 et ss.
153 On comparera Idem et WANG, D., Under the Soviet Shadow. The Yining Incident : Ethnic Conflicts and International Rivalry in Xinjiang, 1944-1949, op. cit. qui présentent la République du Turkestan oriental de façon très différente : Etat islamique indépendant pour Benson et état-fantoche au service de l’URSS pour Wang.
154 WANG, D., « The Xinjiang Question of the 1940s: The Story Behind the Sino-Soviet Treaty of August 1945 », Asian Studies Review, vol. 21, n° l, July 1997, pp. 83-105.
155 WANG, D., Under the Soviet Shadow. The Yining Incident: Ethnic Conflicts and International Rivalry in Xinjiang, 1944-1949, op. cit., p. 262.
156 RENOUVIN, P., La question d’Extrême-Orient, 1840-1940, Paris, Librairie Hachette, 1946, p. 433.
157 Des dirigeants ouïgours nationalistes et panturcs comme Isu Yusuf Alptekin (1901-1995) et Mehmet Imin Bugra (1901-1965) réussiront en 1949 à quitter le Xinjiang avec 2000 partisans pour gagner l’Inde -via le Ladakh et le Cachemire- avant de s’installer en Turquie à Istanbul. Ils sont devenus les pères spirituels des organisations nationalistes de la diaspora ouïgoure.
158 Voir les intérêts de l’URSS (minerais, uranium, etc.) dans FORBES, A.D.W., Warlords and Muslims in Chinese Central Asia, op. cit., pp. 331 et ss.
159 Après la prise de contrôle du Xinjiang par le PCC, l’influence soviétique demeure toutefois extrêmement présente dans la région. Voir idem, pp. 226-227.
160 Un « accident » d’avion fort opportun décapite par ailleurs la direction politique de la République du Turkestan oriental à la fin du mois d’août 1949.
161 FEJTÖ, F., La fin d’une hégémonie ; les origines du grand schisme communiste, 1950-1957, Paris, Plon, 1964, pp. 217 et ss.
162 Sur la consolidation du pouvoir du PCC au Xinjiang après 1949, voir Mc MILLEN, D.H., Chinese Communist Power and Policy in Xinjiang, 1949-1977, Boulder Colorado, Westview Press, Folkstone, Dawson, 1979, xix-373p.
163 « Article views Xinjiang’s economic progress », Liaowang dans FBIS-CHI-95-229, November 29, 1995.
164 « Xinjiang becomes China’s key non metallic mineral production base », http://www.chinamining.org, December 26, 2007.
165 Details dans ZHOU, Taihe, GOLDFARB, Richard J., PHILLIPS, Neil G., « Tectonics and distribution of gold deposits in China - an overview », Mineralium Deposita, vol. 37, n° 3/4, 2002, pp. 249-282.
166 http://old.cgs.gov.cn/Ev/gs/Minerals.htm
167 « Uranium Mining » dans China Profile (http://www.nti.org/db/china/umines.htm).
168 Xinjiang, A General Survey, op. cit., p. 8.
169 International Energy Agency, World Energy outlook 2002, Paris, OECD/IEA, 2002, p. 249
170 KHAMRAEV, H., « La géopolitique du pétrole », Cemoti, n° 25, janvier-juin 1998, p. 139.
171 Chiffres tirés de Xinjiang, A (General Survey, op. cit., p. 45. Les estimations données par la Chine sont beaucoup plus élevées que les chiffres publiés par la revue statistique de BP. Selon cette dernière, les réserves prouvées de pétrole s’élèvent en Chine en 2006 à 2,2 milliards de tonnes soit 1,3 % des réserves prouvées mondiales. Le ratio production/consommation est de 12, 1 ans. Dans BP statistical review of world energy 2007, p. 6.
172 BP estime les réserves prouvées de gaz en Chine en 2006 à 2,45 billions (1012) de m3 en 2006 soit 1,3 % des réserves prouvées mondiales de gaz et un ratio production/consommation de 41,8 ans. Dans Idem, p. 22.
173 Chiffres tirés de LI, YUE, Current Status of and Trends in Oil development in Xinjiang, Center for Energy and Global Development, Beijing. China, November 9, 2006. p. 2 (http://www.wsichina.org/back4_07.html)
174 Chiffres tirés de Xinjiang, A General Survey, op. cit., p. 45 et ss.
175 Voir LIU, Chenglin, ZHU, Jie, CHE, Changbo, LIU, Guangdi, « Potential recoverable natural gas resources in China », Petroleum science, vol. 5, n° l, February 2008, pp. 83-86.
176 « Xinjiang leads China in oil, gas production for 1st time in 2007 », Xinhua, January 4, 2008.
177 Cites dans « Xinjiang Oil Industry Development », China Security, Automn 2006, http://www.zusichina.org
178 LI, YUE, Current Status of and Trends in Oil development in Xinjiang, op. cit., p. 4.
179 CHEN, Aizhu, « China’s 2007 oil and gas output by field », Reuters, February 4, 2008.
180 En 2005, le Xinjiang est la province de Chine possédant le plus grand nombre d’éoliennes.
181 La région jouit de 2 600 à 3 400 heures d’ensoleillement annuel. C’est le plus long de Chine.
182 « Xinjiang : l’appel de l’Ouest », http://www.china.org.cn/french/fra-xj/5.htm
183 Xinjiang, A General Survey, op. cit., p. 39.
184 Voir WALEY-COHEN, J., Exile in Mid-Qing China: banishment to Xinjiang, 1758-1820, New Haven, Yale University Press, 1991, xv-267p.
185 La Laogai Foundation a comptabilisé 27 camps de travail au Xinjiang. Voir http://www.laogai.org/hdbook/xinjiang.htm
186 Les informations de ce paragraphe sont tirées de Center for non-proliferation studies, « Lob Nor Nuclear Weapons Test Base », Nuclear Threat Initiative (NTI), 1998, (www.nti.org/db/china/lopnur.htm)
187 Ken Alibek cité clans http://www.fas.org/nuhe/guide/china/facility/ynalan.htm.
188 Dans « DF-3] » (http://www.fas.wg/nvMe/guiaU/china/icbm/df-31.htm).
189 C’est ainsi que les autorités chinoises ont mis en place une route entre Lan/hou (Gansu) et le bassin du Tarim et que dès 1954-1955, construit une route stratégique reliant le Xinjiang au Tibet à travers l’Aksai Chin. Voir Mc MILLEN, D. H., « The Urumqi Military Region », Asian Survey, vol. xxii, n° 8, August 1982, p. 707.
190 Le cas du Caucase dans LAYTON, S., Russian literature and Empire: conquest of the Caucasus from Pushkin to Tolstoy, Cambridge, Cambridge University Press, 1994, xi-354p. A notre connaissance, l’étude de la référence au Xiyu dans la littérature chinoise n’a fait l’objet d’aucune recherche en langue occidentale.
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