Le théâtre brésilien des années 1950 aux années 1970. Un espace symbolique entre culture et politique
p. 181-203
Texte intégral
« Vous vous rappelez comment Platon procède avec les poètes dans son projet d’État. Au nom de l’intérêt collectif, il leur refuse le droit de séjour. Il avait une haute idée du pouvoir de la poésie. Mais il l’estimait nocive, superflue – dans une communauté achevée, s’entend. La question du droit du poète à l’existence n’a pas été souvent posée avec la même insistance ; mais aujourd’hui, elle se pose. Sans doute ne se pose-t-elle que rarement sous cette forme. Mais elle vous est plus ou moins courante à tous comme la question de l’autonomie du poète ; de sa liberté d’écrire ce qu’il veut. Vous n’êtes pas enclins à lui consentir cette autonomie. Vous croyez que la situation sociale présente l’oblige à décider au service de qui il entend mettre son activité. »
[Benjamin, 2003, p. 122]
Les expériences esthétiques et politiques du Teatro de Arena et du Teatro Oficina
1L’histoire brésilienne du second xxe siècle fut marquée par un intense dialogue entre art et politique. Dans le champ de l’art dramatique, la fondation du Teatro Brasileiro de Comédia (TBC) en 1948 constitua le point de départ de la modernité théâtrale au Brésil. Cette initiative fut accompagnée de la création de l’École d’art dramatique, dont l’objectif était de former des professionnels du théâtre et de développer un répertoire esthétique et culturel d’avant-garde, en rupture avec les codes établis. Dans les années qui suivirent sa création, le TBC agrégea un ensemble d’acteurs, de metteurs en scène, de scénographes et de régisseurs brésiliens. Par la suite, il accueillit également des metteurs en scène étrangers, comme les Italiens Adolfo Celi, Ruggero Jacobbi et Gianni Ratto. À son répertoire figurèrent des pièces classiques et des textes étrangers contemporains, ainsi que de nombreux auteurs brésiliens comme Abílio Pereira de Aeida, Edgard da Rocha Miranda, Gonçalves Dias et, dans un deuxième temps, Dias Gomes, Gianfrancesco Guarnieri et Jorge Andrade.
2En 1953, l’ensemble de ces réalisations donna naissance au Teatro de Arena, une troupe formée par de jeunes diplômés de l’École d’art dramatique, dont la principale caractéristique résidait dans l’utilisation d’une arène circulaire. Au point de départ, ce choix ne reposait pas sur des considérations idéologiques, mais répondait à des nécessités d’ordre économiques, la scène circulaire permettant de produire des spectacles à moindre coût. Ces innovations scéniques furent accueillies favorablement par la critique1 et contribuèrent, quelques années seulement après les premières expériences du TBC, à l’émergence d’une dramaturgie moderne au Brésil. Cependant, la question du répertoire demeurait entière en ce début des années 1950. De nombreux professionnels concevaient alors le théâtre comme un acte politique et un outil de conscientisation de la société brésilienne. Selon eux, les pièces montées par les compagnies brésiliennes, qu’il s’agisse du TBC ou du Teatro de Arena, traitaient de sujets trop éloignés des réalités nationales et ne répondaient pas aux défis historiques de la période.
3Au cours des années 1950, trois facteurs contribuèrent à la politisation progressive du Teatro de Arena : le rapprochement avec le Teatro Paulista do Estudante 2; l’arrivée du dramaturge Augusto Boal ; et, surtout, la mise en scène de Eles não usam black-tie (« Ils ne portent pas de cravate »), du dramaturge Gianfrancesco Guarnieri3 [Magaldi, 1984 ; Campos, 1988 ; Boal, 1977 et 2000 ; Patriota, 1999b et 2000 ; Machado et Patriota, 2000]. Outre le succès d’estime, cette pièce emporta l’adhésion du public et démontra que l’émergence d’une nouvelle génération de spectateurs de théâtre – en majorité issue des rangs étudiants – rendait possible la mise en scène d’un autre répertoire, qui répondit aux demandes sociales et culturelles d’un pays en mutation. Ainsi, l’ouvrier montait sur les planches, entraînant dans son sillage combats politiques et luttes syndicales sur les scènes brésiliennes.
4Le retentissement de Eles não usam black-tie offrit, par ailleurs, des possibilités inédites au Teatro de Arena et fut à l’origine des nouvelles orientations professionnelles de la compagnie. Surgirent alors des séminaires de dramaturgie et, avec eux, l’idée de créer un « théâtre national » qui représentât les expériences vécues par les classes subalternes de la société brésilienne4. Les liens établis entre l’art et la politique servirent alors de point de départ à plusieurs réflexions visant à distinguer le Teatro de Arena du TBC. Ainsi, les dramaturges Augusto Boal et Oduvaldo Vianna Filho s’attachèrent à déterminer la place du Teatro de Arena dans l’histoire du théâtre en définissant une série de marqueurs différentiels. Si ces derniers reconnaissaient au TBC le mérite d’avoir professionnalisé le théâtre brésilien et de l’avoir hissé au niveau des scènes internationales en établissant de nouveaux critères d’exigence artistique, ils lui reprochaient de ne pas dialoguer avec « la réalité sociale brésilienne » contrairement au Teatro de Arena. Oduvaldo Vianna Filho estimait ainsi, en 1958, que :
« Depuis 1945, notre théâtre s’est développé un peu en marge de la réalité sociale brésilienne. Un petit laboratoire, de faible portée, important pour l’affirmation de l’art théâtral, mais dont la contribution culturelle pour le peuple brésilien est limitée. Des metteurs en scène étrangers ont fait faire un saut dans la conception du théâtre. L’homme de théâtre a pris conscience que l’élaboration d’un spectacle est un art. Des auteurs, des acteurs ont surgi qui ont contribué à modifier en profondeur la forme du spectacle […]. Mais, le théâtre est aujourd’hui arrivé à un moment capital : il doit se définir. […] Voulons-nous un théâtre commercial ou un théâtre brésilien, ancré dans notre vie et notre culture, seul capable de survivre, de créer et de devenir un véritable théâtre ? La réponse vient des jeunes, car ce sont les jeunes qui font la majorité du théâtre brésilien : un théâtre national5. »
5Ces interprétations, qui mettaient l’accent sur la décadence du TBC et, par opposition, sur l’ascension du Teatro de Arena, trouvèrent un fort écho dans les milieux intellectuels et artistiques brésiliens, comme en témoignent ces quelques lignes rédigées par le critique Décio de Almeida Prado, en 1996 :
« La grande originalité du Teatro de Arena par rapport au TBC, et à tout ce que ce dernier représente, tient à ce qu’il ne privilégie pas la dimension esthétique : il ne l’ignore pas, mais ne la dissocie pas du panorama social dans lequel le théâtre doit s’intégrer. C’est de ce positionnement initial, de cet “engagement”, pour reprendre le mot de Sartre, que découlent tous les traits caractéristiques du groupe : le gauchisme, le nationalisme et le populisme (dans certaines de ses acceptions) à tel point entrelacés que seule l’abstraction pourrait les démêler. » [Prado, 1996b, p. 63]
6À cet égard, les orientations de la compagnie s’inscrivaient dans les perspectives théoriques et politiques de l’Institut supérieur d’études brésiliennes (ISEB)6, avec lequel elle partageait la conviction qu’une révolution démocratique bourgeoise allait bientôt éclater au Brésil.
7Les réflexions menées au sein de l’ISEB marquèrent également les premières années d’activités du Teatro Oficina de São Paulo, fondé en 1958 par un groupe d’étudiants en droit qui réunissait, entre autres, José Celso Martinez Correâ, Renato Borghi, Carlos Queiroz Telles, Amir Haddad, Moracy do Val et Jairo Arco e Flexa. Certes, les premiers spectacles de la compagnie furent montés dans le cadre de résidences et de petites salles, loin des débats qui agitaient alors la scène théâtrale pauliste, et ne comportèrent aucune marque évidente du dialogue entre art et politique. Très vite, cependant, la situation évolua. Dès la saison 1959-1960, le Teatro Oficina proposa une mise en scène de L’engrenage – un scénario de Jean-Paul Sartre adapté par José Celso et Augusto Boal – initiant ainsi une phase de politisation active du groupe. Comme l’expliqua par la suite son directeur José Celso, les écrits de Sartre et des membres de l’ISEB eurent un impact décisif sur la troupe :
« Parmi les choses qui ont eu beaucoup d’influences sur nous, il y a l’ISEB, l’Institut Supérieur d’Études Brésiliennes, un groupe de gens qui pensait que nous devions tous nous occuper des réalités nationales. Avant mon époque, on avait une vision éthérée de l’artiste et de l’intellectuel, comme s’ils vivaient loin du réel, complètement déconnectés. Quand soudain, avec l’ISEB, une force est apparue pour penser et assumer les choses comme elles étaient. Ils nous ont transmis cette force. Cette volonté d’assumer le passage à la professionnalisation7. »
8Autour de la problématique des classes moyennes, le Teatro Oficina donna ainsi Clifford Odetts, Tenesse Williams, Valentin Katáiev et Maxime Gorki. Parallèlement, le groupe développa un style original d’interprétation et de direction sous l’égide d’Eugênio Kusnet, un acteur russe installé au Brésil. Dans ce cadre, la mise en scène des Petits-Bourgeois de Gorki par José Celso en 1963 fut la réalisation qui obtint le plus d’écho auprès du public et de la critique. Cette dernière reconnut alors une identité à la compagnie, fondée sur un ensemble de critères esthétiques et de conceptions scéniques, dont le travail minutieux de composition des personnages, le rythme de la mise en scène, la direction d’acteurs et la qualité de l’interprétation.
9Cet élan fut stoppé net par le coup d’État militaire de 1964, qui provoqua une redéfinition des stratégies esthétiques et thématiques des différentes compagnies théâtrales. Le Teatro de Arena privilégia la lutte pour le retour à la démocratie et l’apologie de la résistance, tandis que le Teatro Oficina choisissait de monter Toda donzela tem um pai que é uma fera (« Chaque demoiselle a un père qui est une tigresse »), une comédie de Gláucio Gill, de réactiver les cours d’interprétation et de traduction et de mettre en scène Andorra, une tragédie sur l’antisémitisme de l’écrivain suisse alémanique Max Frisch.
10Une fois passé le premier temps de perplexité, les artistes engagés répondirent à la déposition du président João Goulart par la création de Opinião (« Opinion »), un spectacle musical en forme de manifeste écrit par Oduvaldo Vianna Filho, Armando Costa et Paulo Pontes. La première eut lieu à Rio de Janeiro en 1964, dans le centre commercial de la rue Siqueira Campos. Réalisation conjointe du groupe Opinião8 de Rio de Janeiro et du Teatro de Arena de São Paulo, la mise en scène était signée par Augusto Boal et la direction musicale par Dorival Caymmi. L’intrigue jouait sur la mise en perspective de trois personnages renvoyant à trois univers sociaux bien distincts : un sambista des mornes de Rio (interprété par Zé Keti), une chanteuse de la zona sul9 (incarnée par Nara Leão, puis par Maria Bethânia) et un compositeur venu du Nordeste (joué par João do Valle, un musicien originaire de l’État de Maranhão). Quant au message de la pièce, il apparaît de manière très synthétique dans les vers de la samba chantée par Zé Keti, appelant à la résistance face au statu quo : « ils peuvent me prendre, ils peuvent me battre, ils peuvent même me priver de nourriture, je ne changerai pas d’opinion… »
11De manière générale, le nouveau contexte politique modifia profondément la teneur des manifestations culturelles brésiliennes qui, rompant avec l’optimisme de la période précédente, multiplièrent les appels à la résistance dans la lignée du spectacle musical Opinião. La majorité de ces réalisations reprenait l’interprétation du coup d’État avancée par le Parti communiste brésilien (PCB). Selon ce dernier, l’intervention des militaires avait été menée contre les travailleurs et contre leurs organisations ; tous les secteurs qui avaient participé au jeu démocratique au cours de la période précédente devaient donc œuvrer pour le retour à un État de droit [Patriota, 1999a, chapitre 3].
12Toute la gauche, cependant, ne partageait pas cette interprétation. Dès avant 1964, la direction du PCB avait été sévèrement critiquée en raison de sa politique d’alliance et de ses analyses de la conjoncture politique brésilienne. En outre, le Parti était combattu depuis longtemps sur son aile gauche par des groupes partisans de solutions plus radicales comme la lutte armée [Ramos, 2002a]. L’arrivée des militaires au pouvoir ne mit pas fin à ces divisions politiques, dont on retrouve l’écho dans plusieurs créations artistiques de l’époque, à l’image des films O desafio (« Le défi ») de Paulo César Sarraceni et Terra em transe (« Terre en transe ») de Glauber Rocha. À travers l’histoire d’amour d’une femme bourgeoise et d’un journaliste de gauche, le premier proposait une métaphore critique de l’alliance des segments de la gauche avec la bourgeoisie nationale et interrogeait, quelques mois seulement après le coup d’État de 1964, les raisons de la défaite des secteurs progressistes de la société brésilienne. Toutefois, en dépit du caractère pionnier du film de Saraceni, ce fut la sortie de Terra em transe en 1967 qui mit le débat politique sur le devant de la scène artistique. Dénonciation sans concession de la faillite du populisme [Ramos, 1996], ce film redimensionna la création artistique au Brésil, où il constitua un marqueur tant pour les partisans que pour les détracteurs de ses interprétations. En ce qui concerne l’art dramatique, il eut un impact décisif sur la trajectoire du Teatro Oficina. Son directeur José Celso Corrêa déclarait ainsi, en 1968 :
« L’efficacité du théâtre politique réside aujourd’hui dans ce que Godard a dit à propos du cinéma : il faut créer une série de Vietnams dans le champ de la culture, mener une guerre contre la culture officielle, la culture de la consommation facile. Avec la consommation, on ne vend pas seulement un produit, mais on achète aussi la conscience du consommateur. […] Un film comme Terra em transe a eu, sur le public qui l’a vu et qui l’a compris, une efficacité politique bien plus grande que des centaines de films politiques médiocres. Terra em transe est positif exactement parce qu’il met le spectateur dans un état de tension et le convainc de la nécessité de la création dans ce pays10. »
13Le dramaturge tentait alors de réévaluer la signification sociale et politique des productions culturelles visant à la transformation historique, ainsi que la portée de leurs interprétations. Or, Terra em transe proposait un nouveau regard sur la culture et sur la politique, rompant avec l’idée de pacte ou de front uni de résistance. Le film de Glauber Rocha établissait donc un précédent avec lequel les divers langages artistiques furent par la suite dans l’obligation de dialoguer [Ramos, 2002b]. Il remettait en question les schémas interprétatifs en vigueur et appelait à une radicalisation de la lutte, entraînant à sa suite nombre d’artistes et d’intellectuels brésiliens. À cet égard, il joua un rôle majeur dans la création de O rei da vela (« Le roi de la chandelle ») par le Teatro Oficina en septembre 1967, d’après la pièce éponyme écrite par Oswald de Andrade en 1933. En rupture avec les spectacles à vocation explicitement politique du Teatro de Arena, cette mise en scène proposait de réévaluer le rôle historique et esthétique de la Semaine d’Art moderne de 1922 et de l’Anthropophagie brésilienne afin de penser sous un nouveau jour les questions du sous-développement, de l’émergence des industries culturelles et de la fragilité des alliances politiques d’avant 1964. O rei da vela comportait donc de nombreux points de convergences avec le film de Glauber Rocha, sorti quelques mois auparavant, en mai 1967. Les deux créations mettaient à nu les lignes de fractures existant au sein de la gauche brésilienne tant sur la question des modalités de résistance à la dictature que sur la place de l’art et de la culture dans le processus historique.
14Sur ce point, la mise en scène du Teatro de Oficina se distinguait très nettement des pièces politiques montées dans les théâtres de Rio de Janeiro et São Paulo à partir de 1964. L’ensemble de ces créations prenait pour cible les gouvernements militaires et appelait à la résistance démocratique, selon trois modalités distinctes. Le recours à des figures historiques de héros rebelles, tout d’abord, comme dans Arena conta Zumbi (Arena raconte Zumbi11) et Arena conta Tiradentes (Arena raconte Tiradentes12) de Augusto Boal et Gianfrancesco Guarnieri. La récupération des procédés comiques du vaudeville et des revues théâtrales, ensuite, comme dans Dura lex sed lex no cabelo só gumex (Dura lex, sed lex : pour les cheveux, seulement gumex13) de Oduvaldo Vianna Filho et dans Se correr o bicho pega, se ficar o bicho come (Si tu cours la bête t’attrape, si tu restes elle te mange) de Oduvaldo Vianna Filho et Ferreira Gullar. La dénonciation de l’arbitraire, enfin, sous toutes ses facettes, comme dans Liberdade, liberdade (Liberté, liberté) de Millôr Fernandes et Flávio Rangel14. Ces spectacles reposaient sur une vision duelle de la société brésilienne, opposant : d’une part, les militaires et leurs alliés dans le rôle des oppresseurs ; de l’autre, la population brésilienne – et, en particulier, les secteurs qualifiés de « progressistes » – dans le rôle des opprimés. Ils clamaient un unique leitmotiv fondé sur deux mots d’ordre : résistance et confrontation.
15En dépit de cette intense mobilisation, les années qui suivirent le coup d’État se caractérisèrent par l’imposition progressive d’un État autoritaire sous l’égide des militaires. Les libertés civiles furent restreintes et la censure augmenta son emprise sur les milieux artistiques brésiliens. En décembre 1968, la politique de répression franchit un palier supplémentaire avec l’adoption de l’Acte Institutionnel no 5 (AI-5), qui suspendit le Congrès, supprima l’habeas corpus et instaura une censure préalable à l’ensemble des moyens de communication15. L’AI-5 ouvrit une période de radicalisation des militaires et des résistants de gauche, dont beaucoup optèrent alors pour la lutte armée. L’acte eut également de lourdes conséquences dans les milieux du théâtre, comme le souligna l’actrice Walderez de Barros16 :
« 1968 fut un crime au Brésil. C’était un moment d’ébullition culturelle. Pour le théâtre, le domaine que je connais le mieux, ce fut une des phases les plus créatives. On avait une dramaturgie décapante. De grands auteurs avaient surgi. C’est tout un processus, qui avait commencé avant la dictature, qui a été avorté en 1968 ; un processus historique en marche, coupé net, dont la reprise a été très difficile ensuite. À l’époque, on avait une conscience beaucoup plus grande de ce que le faire théâtral impliquait une prise de position. Il ne s’agissait pas nécessairement d’un engagement politique, mais d’être conscient du moment historique que nous vivions. Je crois que personne n’y échappait. » [Ramos, Patriota, Nasser, 2000, p. 183]
16La multiplication des entraves à la liberté d’expression n’empêcha pas, toutefois, le processus créatif de continuer après la promulgation de l’AI-5. Dans les années qui suivirent, le Teatro Oficina mit en scène La vie de Galilée et Dans la jungle des villes de Bertolt Brecht, tandis que le Teatro de Arena réalisa la Primeira feira paulista de Opinião (Première foire pauliste d’opinion) qui réunit les dramaturges les plus en vue de l’époque, comme Lauro César Muniz, Bráulio Pedroso, Gianfrancesco Guarnireri, Jorge Andrade, Plínio Marcos et Augusto Boal, et des compositeurs comme Edu Lobo, Caetano Veloso, Sérgio Ricardo et Gilberto Gil autour de la question : « que pense le Brésil aujourd’hui ? » Comme l’observa fort justement Roberto Schwarz en 1969 :
« À la surprise de tous, la présence culturelle de la gauche n’a pas été liquidée en 1968 et n’a cessé de croître depuis cette date. Sa production, d’une qualité remarquable dans certains champs, est dominante. Malgré une dictature de droite, il existe une relative hégémonie culturelle de gauche dans ce pays. On le voit bien dans les librairies de São Paulo et Rio, aux rayonnages couverts d’ouvrages marxistes, dans les premières théâtrales, incroyablement festives et fébriles, bien que souvent menacées d’une intervention policière, dans le mouvement étudiant ou dans les prises de position du clergé avancé. En somme, dans les sanctuaires de la culture bourgeoise, la gauche donne le ton. Cette anomalie – qui aujourd’hui périclite, alors que la dictature a décrété des peines très dures pour sanctionner la propagande du socialisme – est le trait le plus visible du paysage culturel brésilien de 1964 à 1969. Elle signale, au-delà de la lutte, une forme de compromis17. »
Les années 1970 et les stratégies de défense démocratique
17Si les années 1960 furent porteuses d’espoir de bonheur et de transformations sociales, la décennie suivante signa, selon les termes d’Herbert Marcuse, la victoire de la « contre-révolution » [Marcuse, 1973]. Au Brésil, le durcissement de la politique répressive menée par les militaires entraîna le démantèlement de la lutte armée, la victoire du processus de modernisation conservatrice et l’exil de nombreux intellectuels, artistes et hommes politiques. Dans ce contexte, de quelles options esthétiques, politiques et culturelles disposaient ceux qui étaient restés au pays ?
18Les artistes qui ne prirent pas le chemin de l’exil agirent dans les brèches de la légalité, dénonçant dans leurs œuvres l’arbitraire et appelant à la construction d’une résistance démocratique. Au théâtre, on mit en scène des textes d’auteurs brésiliens et internationaux ; des festivals de premier plan furent organisés sous la houlette de Ruth Escobar ; tandis que des petites troupes indépendantes virent le jour dans la périphérie de la ville de São Paulo18. La période fut marquée, en outre, par la création de nouvelles compagnies paulistes, qui prirent leur envol dans les années 1980, comme Pessoal do Victor, Vento forte, Pod Minoga, Mambembe et Ornitorrinco. Dans l’ensemble, cependant, la production dramaturgique suivit un cours similaire. Confrontés à la censure politique et morale, les auteurs privilégièrent une écriture métaphorique et construisirent une image kaléidoscopique du temps présent, dont témoignent, entre autres, les pièces Longa noite de Cristal (La longue nuit de Cristal) et Corpo a Corpo (Corps à corps) de Oduvaldo Vianna Filho en 1969 et 1970, Hoje é dia de Rock (« Aujourd’hui, c’est le jour du rock ») de José Vicente en 1971, Calabar, o elógio da traição (Calabar, l’éloge de la trahison) de Chico Buarque et Ruy Guerra en 1973 et Ópera do malandro (L’opéra du voyou) de Chico Buarque en 197819.
19Um grito parado no ar (Un cri suspendu dans les airs) de Gianfrancesco Guarnieri, dont la première eut lieu au théâtre Guaíra à Curitiba en avril 1973 sous la direction de Fernando Peixoto, fut sans doute une des pièces les plus commentées de l’époque20. À travers les conflits personnels vécus par les acteurs et les actrices au cours d’une répétition, l’intrigue proposait une réflexion sur le sens de l’acte théâtral dans une époque marquée par de fortes tensions politiques et sociales. Sur le plan scénique, le spectacle était conçu comme suit :
« La scène nue du théâtre. Des éléments de décors qui seront utilisés lors des répétitions, entassés en désordre dans les coins. Une grande table avec de longs bancs de part et d’autre. La table servira de praticable et les bancs de marches. Pendant l’action, tous ces éléments pourront être utilisés (rideaux, machinerie, lumières, meubles, accessoires), en donnant toujours une impression d’improvisation. » [Guarnieri, 1973, p. 11]
20L’action débute avec l’entrée en scène de Augusto et Euzébio, qui discutent des difficultés financières de la production et de la présence constante des créanciers à la porte du théâtre. Ce dialogue est interrompu par l’arrivée de Fernando, Amanda et Flora. Commence alors une discussion entre les actrices, à travers laquelle le dramaturge dresse le profil de ces professionnelles :
« Amanda – La technique, tu n’imagines pas… Ça me passe par-dessus la tête, Flora… Je suis une actrice de la place publique, moi ! Qu’est-ce que tu crois. À l’époque, on faisait encore du théâtre sur les places publiques, je jouais et tout le monde entendait, mon ange. Sans aucun petit microphone. Tout était dans la poitrine… Et même le malheureux du fond, sur son cheval, m’entendait… et très bien… Alors ne me parle pas de ça, non. » [Guarnieri, 1973, p. 16]
21Au-delà de l’expérience professionnelle de l’artiste, l’évocation du théâtre de rue renvoie ici aux pratiques théâtrales des années 1960 qui, en dépit de la répression, firent une large place au théâtre d’agitation. L’idée de confrontation est matérialisée dans l’allusion finale : « et même le malheureux du fond sur son cheval m’entendait… et très bien21. »
22Cependant, si les personnages manient avec grandeur les références politiques, ils emploient un ton bien différent en ce qui concerne leurs relations personnelles, où ils exposent leurs petites disputes et synthétisent le dilemme vécu par le groupe. D’une part, les difficultés financières, les obligations quotidiennes et la nécessité de survivre. De l’autre, le choix d’une profession et la perspective d’un devenir intellectuel et social.
23Il revient à Fernando, le personnage du metteur en scène, de rappeler les acteurs à leurs responsabilités pour assurer le succès de l’entreprise. En arrière-plan, la pièce répondait ainsi aux critiques émises par les partisans de nouvelles propositions scéniques en rupture avec le théâtre professionnel depuis les années 196022. En effet, si la rupture était nécessaire pour élaborer un message critique, quel sens donner à la démarche des artistes qui, tout en demeurant ancrés dans le théâtre professionnel, avaient réussi à construire un discours politique et à traiter du réel ?
24Cette interrogation constitue le leitmotiv de Um grito parado no ar, une pièce faite de mises en abîme, qui évoque à la fois les difficultés vécues par le théâtre de résistance – sur les plans financier et politique – et les stratégies mises en œuvre pour rétablir le dialogue entre les classes moyennes et les milieux les plus populaires de la société brésilienne.
25La troupe commence à répéter en écoutant des entretiens de personnes appartenant à des groupes sociaux très divers. Les bruits de la rue, les voitures, les cris et les autres sons qui composent la symphonie des métropoles contemporaines sont utilisés comme des éléments déclencheurs des scènes futures. Après ces écoutes, les acteurs improvisent des fragments épars de la pièce. L’un d’eux met en scène un interrogatoire joué par Euzébio, dans le rôle du persécuteur, et Augusto, dans celui de Justino. À mesure que son personnage subit l’interrogatoire, ce dernier met en scène la peur, la violence institutionnalisée et l’arbitraire. Le travail d’improvisation donne lieu à des discussions animées au cours desquelles les acteurs soutiennent des positions de plus en plus agressives, au point que Fernando, le metteur en scène, est obligé de les interrompre :
« Fernando – Éteins le réflecteur… Tu as ressenti la peur, Augusto ?
Augusto – Dieu que oui… C’est quelque chose de fou, de kafkaïen !
Fernando – Ton personnage ressent cette peur tout le temps. Dès qu’il arrive en ville… C’est une peur inconsciente, mais terrible. Une peur qui le pousse à agir comme il agit… Repose-toi… Et toi, Euzébio ?
Euzébio – J’étais dans mon rôle, non ? Il faut bien s’identifier, donc allons-y pour l’identification… Mais il m’a semblé trop clown… Cela m’a donné la haine.
Nara – Le pire c’est qu’on avait vraiment envie de le taper, en vrai […]
Fernando – Nous sommes capables de tout, n’est-ce pas ? » [Guarnieri, 1973, p. 43]
26L’intervention de Fernando a une fonction dramatique : elle interrompt l’action et provoque l’étonnement des spectateurs au moment même où la tension de l’interrogatoire parvient à son comble. Le metteur en scène interrompt le travail des acteurs pour réfléchir aux conséquences de cette scène et à la manière dont elle éclaire les entretiens écoutés précédemment. Dans cette optique, il commente la situation, établit des ruptures et invite le public à réfléchir, avec les acteurs, sur ce qui se passe sur scène, redoublant ainsi l’effet de distanciation ressenti par les spectateurs.
27Une fois la séquence d’improvisation terminée, les acteurs se reposent tout en discutant des implications sociales, culturelles et politiques de la scène qu’ils viennent de jouer – la violence, le déracinement, l’absence de solidarité. Le travail reprend avec une scène de couple. Le dialogue et le comportement des personnages sont inspirés par l’audition des témoignages et des sons de la ville suivant un processus créatif analogue à la séquence précédente. L’univers urbain participe ici pleinement de la définition des personnages adjuvants et du contexte dans lequel ils s’expriment : il est à l’origine des disputes et des frustrations, conduit les dialogues, les gestes et les situations. Durant le travail d’improvisation, un magnétophone est mis marche et on entend la retransmission d’un match de football. Le son, dans un premier temps, surprend les acteurs qui, par la suite, créent des séquences dramatiques. Augusto et Euzébio se transforment en supporters fanatiques et les actrices se mettent à pleurer, tandis que les bruits du match sont remplacés par des sirènes et des tirs. Débute alors une scène de persécution, dont la narration est une fois encore interrompue par le metteur en scène :
« Fernando interrompt tout. Silence. Les acteurs, épuisés, se regardent les uns les autres, encore abasourdis. Du magnétophone jaillissent des volées de cloches funèbres et des roulements de tambour… Augusto regarde Nara qui est allongée sur le sol, comme morte. Lentement, il la prend dans ses bras. Amanda et Flora recouvrent sa tête d’un châle noir. En un instant, le cortège funèbre se forme. Augusto pose Nara sur la table. Flora avance jusqu’à elle et, affectueusement, lui passe une main dans les cheveux. Amanda pleure tout bas à ses côtés. Euzébio s’approche de Flora et la prend dans ses bras comme pour la consoler. Flora se défait délicatement de son étreinte et rejoint Augusto. » [Guarnieri, 1973, p. 64,65]
28Flora devient alors un personnage allégorique ; le symbole de tous ceux qui ont perdu un être cher, victime de la violence du pouvoir ou de l’arbitraire des relations sociales.
« Flora – Des milliards, j’en ai perdu ainsi. Ils partent vivants, pleins d’espoir, souriants, confiants. Et ils reviennent muets, livides… De façon imprévue, car le sourire ne s’efface pas de toute chose… Des milliards, j’en ai perdu ainsi. C’est pourquoi je ne ferme pas l’œil, je suis toujours en alerte… Ma soupe est toujours chaude dans le four… Quand ils arrivent à revenir, ils rient de moi et de mes attentions. Beaux et audacieux dans leur soif de vie. Je les ai enterrés dans des champs fleuris… Des autres, je n’ai pas même revu les corps… Seuls restent les souvenirs et les pleurs de cette terrible non-conformiste que je suis… Car, mon Dieu, je n’accepte pas, je n’accepterai jamais et je vivrai jusqu’au jour où ils reviendront tous, où ils feront une grande fête, mangeront ma soupe, mes raisins et mes figues, érafleront le sol avec leurs danses et empliront la nuit de leurs amours enivrés de soupirs. Jusqu’au jour où leurs rires commanderont la naissance du jour. Alors, je m’en irai vers le champ fleuri, souriante et en paix. Mais, jusqu’à ce que ce jour vienne, je resterai pour poursuivre de ma haine les sérieux et les faux justiciers. » [Garnieri, 1973, p. 65, 66]
29L’émotion se propage sur le plateau avant que l’improvisation ne soit interrompue par le metteur en scène Fernando et par Augusto qui, un pied sur la table, imite le présentateur de télévision Chacrinha sur des musiques d’émissions grand public. L’instant d’après, Augusto et Amanda interprètent un mariage, puis Fernando et Amanda discutent. L’ambiance se tend, mais Nara et Flora décident leurs collègues à reprendre le travail. Commence alors la scène du vendeur de rues, interrompue cette fois par Nara, qui propose à tous les acteurs d’entonner le thème musical du spectacle. Avant que cette initiative ne se concrétise, un créancier monte sur les planches et emporte le magnétophone pour défaut de paiement. Fernando parvient seulement à en retirer la cassette sur laquelle est enregistrée la bande-son de la pièce. Cet événement, loin de démobiliser la troupe, renforce l’importance du projet. Les répétitions reprennent avec la scène du marché. Augusto, qui endosse à nouveau le personnage de Justino, est le protagoniste d’un lynchage où il est question d’une offense et d’un enfant. Au moment où la situation atteint son apogée, l’acteur sort de son personnage et déclare sa flamme à Nara devant tous ses collègues. Son attitude déteint sur les autres acteurs qui réaffirment leurs choix professionnels et disent leur conviction que le spectacle verra le jour. Mais l’ambiance soudain s’obscurcit : l’électricité a été coupée faute de paiement. Que faire ?
« Fernando – Laissez… laissez… On jouera la première même dans un caniveau s’il le faut.
Augusto – Mais, qu’est-ce que vous pensez ? Je me fais tabasser, lyncher, je prends des barbituriques, j’aime, je cours, je meurs… Et il n’y aura pas de première… NON ! PAS CELA !
Fernando – Bien sûr que la première aura lieu
Augusto – Un cri suspendu dans les airs. » [Guarnieri, 1973, p. 98-99]
30Um grito parado no ar constitue une source précieuse pour analyser le dialogue entre culture et politique dans les années 1970 au Brésil. La structure de la pièce est originale sur le plan esthétique, car la narration superpose deux perspectives. La première, relative au spectacle en tant que tel, conduit le public à établir un dialogue avec le travail réalisé par des artistes qui ont transformé leurs activités en pratique de résistance au gouvernement autoritaire. La seconde, quant à elle, renvoie aux épreuves que traversent les personnages pour rendre possible leur propre travail. Le recours à cette structure narrative permet à Guarnieri d’évoquer les difficultés politiques soulevées par la réalisation concrète d’un spectacle et la situation de précarité économique dans laquelle se trouvaient alors les compagnies théâtrales brésiliennes. À cet égard, les dialogues illustrent bien les stratégies de contournement mises en œuvre par les intellectuels et les artistes brésiliens pour échapper à la censure après l’adoption de l’AI-5, ce qu’on a surnommé linguagem da fresta – littéralement, le langage de la fenêtre étroite [Vasconcellos, 1977].
31Dans son ensemble, Um grito parado no ar est exemplaire de ces pratiques de résistance fondées sur l’écriture métaphorique. La pièce construit un faisceau d’indices renvoyant aux réalités politiques et sociales du pays à partir de sa propre conception scénique : un plateau à moitié vide, un décor réduit à une table et quelques bancs qui mettent à jour le manque de ressources financières, mais réaffirment également la prééminence de la parole dans l’acte théâtral, en réponse à ceux qui avaient décrété la mort du texte au profit de l’image.
32En outre, il convient de souligner que, contrairement à la plupart des pièces politiques des années 1960, Um grito parado no ar ne met pas en scène des travailleurs manuels23. Les personnages appartiennent aux milieux intellectuels, ceux auxquels s’adresse justement le message de résistance démocratique24. En outre, ils sont nuancés et complexes, ce qui permet au spectateur de les différencier les uns des autres. Augusto, par exemple, déclare publiquement sa flamme à Nara, tandis que Amanda et Fernando font preuve, à côté de leur engagement politique, de moments de fragilité dans leur relation conjugale. Flora, quant à elle, évoque la solitude d’une femme vieillissante.
33Le jeu entre les dimensions individuelle et collective est caractéristique de la dramaturgie de la résistance démocratique des années 1970, qui ne s’adressait plus uniquement aux militants et aux révolutionnaires, mais à tous ceux qui partageaient un regard critique sur la situation du Brésil. Avec Um grito parado no ar Guarnieri rompait ainsi avec sa propre production dramatique des années 1960, tout en soutenant que ses pièces précédentes, centrées sur la figure du travailleur, relevaient elles aussi d’un processus de construction esthétique perceptible notamment dans la mise en scène des types sociaux évoqués à travers les entretiens et lors des séquences d’improvisation.
34En ce sens, le dialogue entre l’art et la société s’avère extrêmement utile : il permet de mettre à jour l’historicité du texte et de la scène théâtrale ; de montrer que les codes esthétiques ne peuvent être appréhendés sans tenir compte des conflits de leurs temps, car ils traduisent sur le plan symbolique les projets, les luttes et les rêves élaborés par des hommes en des lieux et des instants spécifiques. L’œuvre d’art rejoint alors le temps historique, ce qui est d’une importance majeure. En effet, la reconnaissance de cette dimension est une condition sine qua non pour que les historiens de la culture apportent une contribution significative au débat sur l’art et montrent comment une œuvre permet de comprendre des expériences historiques en déplaçant notre regard, de les relire à partir de points de vue inédits.
35Ainsi, Um grito parado no ar peut être considéré comme un axe pour penser les années 1970 au Brésil. Il convient alors d’observer comment les marques de l’autoritarisme et de la répression se présentent dans la structure dramatique, dans la construction métaphorique des dialogues, dans les gestes et la composition des personnages. Par ailleurs, il faut comprendre comment les classes populaires, débarquées des processus de discussion et de prises de décision, sont données à entendre sur un mode plus inhabituel : en rupture avec les lieux établis, elles émergent sur le plateau à travers les témoignages et l’impact de ces enregistrements sur les acteurs amenés à les représenter. Suivant une conception épique et dramatique du théâtre, le spectateur assiste ainsi aux conflits émotionnels vécus par les personnages en même temps qu’il réfléchit aux récits qui, au fil des entretiens et des répétitions, composent une mosaïque de contradictions et d’interdits. Ce faisant, les mesures répressives introduites par l’AI-5, la torture et les exactions commises par les membres de l’Operação Bandeirantes et du DOI-CODI25 sont enracinées dans le quotidien, ajoutées aux difficultés économiques, aux mauvaises conditions de travail et à la nécessité de survivre au jour le jour, la marchandisation des relations revêtant ici ses plus cruels atours.
36Citons, pour conclure, Othon Bastos, le producteur de la pièce :
« Gianfrancesco Guarnieri dresse un portrait fidèle de son époque et ses pièces regorgent de sentiments et d’émotions. Dans une trentaine d’années, son œuvre sera toujours aussi importante qu’aujourd’hui. Vous verrez… Nous avons parcouru tout le Brésil avec Um grito parado no ar : nous avons été de Manaus à Porto Alegre avec, partout, un succès incroyable. Le public venait nous saluer, nous complimenter, nous soutenir. Des avocats, des étudiants, des dactylos, des secrétaires, des mécaniciens. Tous s’identifiaient avec ce qu’ils venaient de voir. […] Un soir, à Caruaru, dans l’intérieur de l’État de Pernambouc, 1 700 personnes crièrent à la fin de Um grito parado no ar : “Restez, restez, restez !” Je n’arrivais pas à parler, je n’arrivais pas à remercier, je pleurais comme un bébé. » [Khoury, 1983, p. 103-105]
37Um grito parado no ar fut peut-être la traduction poétique de ces années de plomb pour tous ceux qui s’étaient engagés dans la résistance démocratique et menaient une lutte quotidienne contre la dictature des militaires et, dans le domaine de l’art dramatique, pour tous ceux qui considéraient encore le théâtre comme un espace critique.
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Vasconcellos Gilberto, Música popular: de olho na fresta, Rio de Janeiro, Graal, 1977.
Notes de bas de page
1 Voir, notamment, « Especial Teatro de Arena », Dionysos, Rio de Janeiro, octobre 1978 (24).
2 Né du mouvement étudiant, le Teatro Paulista do Estudante avait pour but de rapprocher les étudiants des débats politiques de la période, par l’intermédiaire de l’art. Parmi ses fondateurs, on compte Oduvaldo Vianna Filho (dit Vianinha) et Gianfrancesco Guarnieri. Des directeurs italiens comme Ruggero Jacobbi et Carla Civelli participèrent également aux activités de la troupe.
3 Eles não usam black-tie est un drame réaliste en trois actes, dont la construction dramatique repose sur une unité de temps, de lieu et d’action. La langue utilisée pour les dialogues vise à traduire scéniquement le parler brésilien (tel que défini par l’auteur). L’intrigue se déroule au sein d’une famille de travailleurs. Un conflit oppose le père, Otávio, ouvrier et leader syndical, à son fils, Tião, ouvrier qui ne possède aucun lien avec le syndicat et ne croit pas aux vertus de l’action collective pour résoudre des problèmes singuliers. Le positionnement de chacun d’entre eux dans les préparatifs d’une grève, l’opposition entre l’individuel et le collectif et le conflit entre l’univers des mornes et celui de la ville constituent les éléments déclencheurs de l’action dramatique. En 1981, la pièce fut adaptée pour le grand écran par Leon Hirszman et obtint le lion d’or de Venise.
4 La nécessité de créer un « théâtre national » avait déjà servi de mot d’ordre à de nombreux mouvements artistiques brésiliens dès le xixe siècle. Dans les années qui suivirent l’Indépendance, Gonçalves Dias défendit l’idée que le théâtre devait contribuer au processus de civilisation du Brésil, notamment dans la tragédie Antonio José ou O Poeta e a Inquisição (1838), où il cherche à définir les piliers de l’identité nationale. La thématique nationale fut tout aussi présente au xxe siècle, non seulement comme vecteur d’une « identité nationale », mais aussi en lien avec les notions de modernisation et de modernité, qui occupèrent une place centrale dans les œuvres d’art et dans le discours critique tout au long de la période. Les pièces Deus lhe Pague de Joracy Camargo (1932), Amor et Sexo de Oduvaldo Vianna (1932 et 1933) témoignent de la vigueur de ce questionnement dès les années 1930. À partir des années 1950 – et notamment après le succès de Eles não usam black-tie – le théâtre engagé dans un dialogue explicite entre art et politique se tourna vers l’univers social et politique des couches subalternes de la société brésilienne. Cette nouvelle manière de percevoir le « national » reçut le nom de « nationalisme critique » [Prado, 1996a et 1996b ; Doria, 1975].
5 Oduvaldo Vianna Filho, « Momento do teatro brasileiro » [repris dans Peixoto, 1983, p. 23-24]. Notons que cette interprétation, très générique, ne rend pas compte de la pluralité thématique et artistique du TBC, qui ne se résume pas à son non-engagement dans le débat politique et social. La distanciation critique repose ici sur un procédé de simplification dont on retrouve les traces tout au long de l’histoire du théâtre brésilien. Ainsi, le TBC s’était défini par opposition aux expériences antérieures, comme la comédie de mœurs ou les revues théâtrales, également disqualifiées au nom de la modernité dramaturgique que la compagnie prétendait alors incarner.
6 L’ISEB fut créé en 1955, sous la présidence de Juscelino Kubitschek, afin de mener des recherches, de diffuser et d’enseigner les sciences sociales au Brésil. Affilié au ministère de l’Éducation et de la Culture, l’ISEB contribua à la formulation des théories du développement et joua un rôle majeur dans le débat public brésilien jusqu’à son extinction en avril 1964, trois jours seulement après le coup d’État militaire. Parmi les multiples personnalités qui participèrent à ses activités figurent Hélio Jaguaribe, Roland Corbisier, Alberto Guerreiro Ramos, Nelson Werneck Sodré, Cândido Mendes, Álvaro Vieira Pinto et Celso Furtado.
7 José Celso Martinez Corrêa, « Romper com a família, quebrar os clichês », extraits des entretiens enregistrés dans le théâtre Eugênio Kusnet de São Paulo en 1980 et au Museu da Imagem e do Som de Curitiba en 1981 [repris dans Staal, 1998, p. 30].
8 Le groupe Opinão fut créé à Rio de Janeiro après le coup d’État de 1964 et la dissolution de l’Union nationale des étudiants (UNE) par des artistes venus du Centre populaire de culture (CPC) de l’UNE. Parmi ces derniers : Oduvaldo Vianna Filho, Paulo Pontes, Armando Costa, Ferreira Gullar, Teresa Aragão, Pichin Plá, João das Neves et Denoy de Oliveira.
9 La zona sul (zone sud) désigne les quartiers situés au sud du centre ville de Rio de Janeiro, à l’entrée de la baie de Guanabara et le long des plages océaniques de Copacabana, Ipanema et Leblon, habités par des classes aisées, par opposition à la zona norte (zone nord) située plus à l’intérieur de la baie, qui réunit les populations les plus pauvres (NDLT).
10 José Celso Martinez Corrêa, « O poder de subversão da forma », entrevue réalisée par Tite de Lemos pour aParte [1], mars-avril 1968 [repris dans Staal, 1998, p. 98].
11 Zumbi dos Palmares est né libre en 1655 dans l’actuel État d’Alagoas. Capturé à l’âge de 7 ans, il fut confié à un prêtre, qui lui donna le nom de Francisco, lui apprit les rudiments de la grammaire portugaise et du dogme catholique. Vers l’âge de 15 ans, il rejoint le quilombo (nom donné aux communautés d’esclaves marrons dans le Brésil colonial, NDLT) de Palmares situé dans la région de Serra de Barriga, où il s’illustra dans le combat contre les colons portugais. Refusant toute forme de négociation, il prit la tête du quilombo en 1680, lequel regroupait alors près de 30 000 habitants. Il ne put toutefois résister à l’assaut mené par les autorités coloniales en 1694. Trahi par un de ses compagnons, il fut capturé et mis à mort sur la place publique. Sa tête fut exposée dans la ville d’Olinda. Le 20 novembre 1695, date de sa mort, est aujourd’hui commémoré dans l’ensemble du territoire brésilien comme le Dia da consciência negra (Jour de la conscience noire).
12 Tiradentes, de son vrai nom Joaquim José da Silva Xavier, naquit en 1746 dans la province de Minas Gerais. Tour à tour dentiste, extracteur de minerais, commerçant et militaire, il fut une des figures majeures de l’inconfidência mineira en 1789, conjuration visant à la création d’une République indépendante sur fond de révolte fiscale. Après que la conspiration fut découverte par les autorités portugaises, il fut emprisonné, jugé et écartelé sur la place publique le 21 avril 1792. Après la proclamation de la première République du Brésil en 1889, Tiradentes fut hissé au rang de héros-martyr de la Nation.
13 Gumex était une marque de gel pour les cheveux, particulièrement en vogue dans le Brésil des années 1960 (NDLT).
14 Ces spectacles furent créés à Rio de Janeiro : Se Correr o Bicho Pega Se Ficar o Bicho Come sous la direction de Gianni Ratto et Liberdade, Liberdade mis en scène par Flávio Rangel en 1965 ; et Dura Lex Sed Lex no Cabelo só Gumex, de nouveau dirigé par Gianni Ratto en 1968.
15 L’AI-5 est traditionnellement considéré comme « un coup d’État dans le coup d’État », marquant la victoire de la « ligne dure » sur les militaires modérés. Dans les faits, il inaugure la phase la plus intense de la répression politique, connue sous le nom de anos de chumbo – les années de plomb.
16 Grande actrice de théâtre, Walderez de Barros a commencé sa carrière au début des années 1960 alors qu’elle suivait les cours de philosophie de l’université de São Paulo. Proche du CPC de l’UNE, elle suivi des cours d’interprétation auprès de l’acteur Eugênio Kusnet du Teatro Oficina. Elle fit sa première apparition sur scène dans la pièce Onde canta o sabiá (Là où chante le merle) au théâtre Cacilda Becker en 1963, sous la direction de Hermilo Borba Filho. Mariée au dramaturge Plínio Marcos, elle joua dans nombre de ses créations (Abajur Lilás, Navalha na Carne, Homens de Papel) et s’illustra également dans le répertoire de Tchekhov et Euripide.
17 Roberto Schwarcz, « Cultura e política 1964-1969 » [repris dans Schwarz, 1992, p. 62]
18 Ruth Escobar organisa les deux premières éditions du Festival International de Théâtre de São Paulo en 1974 et 1976. Parmi les nouveaux groupes de théâtre qui surgirent dans la périphérie de l’agglomération, il convient de citer le Núcleo Independente (Noyau indépendant) mené par les acteurs Celso Frateschi et Denise Del Vecchio.
19 Dans cette même veine, on peut également citer : Rasga coração (Gratte-cœur) de Oduvaldo Vianna Filho ; Gota d’água (Goutte d’eau) de Chico Buarque ; Caminho de volta (Le chemin du retour) de Consuelo de Castro ; Ponto de partida (Point de départ) de Gianfrancesco Guarnieri ; Missa Leiga (Messe profane) de Chico de Assis ; Frei Caneca (Frère Caneca) et Muro de arrimo (Mur des amarres) de Carlos Queiroz Telles.
20 La pièce fut produite par Othon Bastos et compta avec la participation de Mário Masseti, comme metteur en scène assistant, de Joel de Carvalho pour les décors et les costumes et de Toquinho pour la musique. La distribution comprenait : Othon Bastos, Martha Overbeck, Assunta Perez (en alternance avec Liana Duval), Ênio de Carvalho (en alternance avec Lorival Pariz et Fernando Peixoto), Sônia Loureiro et Oswaldo Campozana.
21 Il s’agit ici d’une allusion aux forces armées qui surveillaient alors étroitement toutes les manifestations théâtrales réalisées dans des espaces publics.
22 Ces critiques portaient sur la nécessité de libérer le spectacle de l’emprise du texte et de transformer la relation entre le plateau et le public, afin de construire une scène critique, articulée aux débats politiques de son temps. À cet égard, il faut rappeler que Guarnieri a toujours défendu un théâtre qui ne subordonne pas le texte aux autres formes d’expression scénique. À l’opposé, José Celso Martins Corrêa du Teatro Oficina défendait un théâtre en rupture avec les conceptions traditionnelles de la mise en scène, dans la lignée des écrits d’Antonin Artaud et des expériences menées par le Living Theatre, se dirigeant ainsi vers un te-ato (littéralement « te-acte », jeu de mots sur teatro, théâtre en portugais, NDLT), c’est-à-dire vers la rupture entre la scène et le public dans un effort de rapprochement créatif entre la vie et la pratique artistique.
23 Avant 1964, les œuvres de Oduvaldo Vianna Filho et Gianfrancesco Guarnieri avaient privilégié le monde du travail dans les villes et dans les campagnes, les relations de production et les conflits entre le capital et le travail. Outre Eles não usam black-tie, Carnieri avait composé A semente (La graine) et Gimba dans cette veine. Oduvaldo Vianna Filho, quant à lui, s’était attaché à la question agraire dans des textes comme Quatro quadras de terre (Quatre parcelles de terre), Os Azeredo mais os Benevides (Les Azeredo et les Benevides) et aux conflits entre les travailleurs et la bourgeoisie dans les pièces A Mais-Valia vai Acabar (La plus value va prendre fin), Seu Edgar (Monsieur Edgar) et Brasil, versão brasileira (Brésil, version brésilienne).
24 On retrouve une évolution similaire de la conception des personnages dans les œuvres d’Oduvaldo Vianna Filho [Patriota, 2007].
25 L’opération bandeirante (OBAN) fut lancée par l’armée brésilienne en 1969 afin de combattre les organisations de gauche qui menaient une lutte armée contre le régime militaire. Elle comprenait un centre d’information, de recherches et de tortures. Quant au DOI-CODI, le Departamento de Operações de Informações – Centro de Operações de Defesa Interna (littéralement, le département des opérations d’information – centre d’opérations de défense interne, NDLT), il fonctionna entre 1964 et 1985 et avait pour but de lutter contre les ennemis intérieurs qui menaçaient la sécurité nationale. Son action s’ancrait dans la doctrine de sécurité nationale formulée par le National War College états-unien pendant la guerre froide et approfondie par les militaires brésiliens de l’École supérieure de guerre.
Auteurs
Rosangela Patriota enseigne actuellement en master et en doctorat à l’université presbitérienne Mackenzie. Elle est professeure retraitée d’histoire de l’université fédérale d’Uberlândia. Ses travaux portent sur l’histoire du théâtre brésilien contemporain. Elle a publié de nombreux ouvrages sur le sujet, parmi lesquels : Vianinha. Um dramaturgo no coração do seu tempo (São Paulo, Hucitec, 1999) ; A crítica de um teatro crítico (São Paulo, Perspectiva, 2007), Teatro brasileiro: ideia de uma historia (São Paulo, Perspectiva, 2012, avec J. Ginsburg), História e Teatro. Diálogos Discussões para o Tempo Presente (São Paulo, Verona, 2013) et Antonio Fagundes no palco da história: um ator (São Paulo, Perspectiva, 2018). Membre du comité éditorial de la revue Fênix. Revista de História e Estudos Culturais, elle dirige les collections « A história invade a cena » et « Teatro » des éditions Hucitec (São Paulo) et fait partie du comité scientifique du groupe d’histoire culturelle de l’Association nationale des historiens brésiliens (Anpuh) et du réseau «Pesquisa em História e Pesquisas no Mundo Contemporâneo».
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