Conclusion générale
p. 233-235
Texte intégral
1C’est l’influence des sols qui, au terme de cette analyse, apparaît comme le facteur dominant de variation des rapports entre la pluviosité et l’écoulement dans les deux zones climatiques étudiées : les différences de première grandeur, entre le Taquari, le Jacui et le Paraïba lui sont imputables : grâce à l’épaisseur exceptionnelle du manteau d’altération qui couvre la plus grande partie de son bassin, le Paraïba qui reçoit moins de pluie dans une région plus chaude et plus accidentée a une abondance moyenne et un coefficient d’écoulement supérieurs à ceux du Jacui et du Taquari ; le Jacui dont les sols ont été moins ravinés que dans le bassin du Taquari garde, malgré une pluviosité moindre et une température plus élevée, la même abondance et le même coefficient d’écoulement que le Taquari, soit un déficit d’écoulement plus faible.
2Ces variations dans l’abondance moyenne correspondent à un comportement très différent des rivières vis-à-vis des fortes chutes de pluies qui tombent sur leur bassin : alors qu’elles provoquent dans le Jacui et plus encore dans le Taquari des crues violentes, suivies d’étiages très creusés, elles ne réussissent pas, dans le Paraïba, à contrebalancer très gravement le rôle d’éponge des sols : le rapport entre le maximum et le minimum absolus de la période 1930-1952 ne dépasse pas 21 à Campos. La période plus courte de 1940 à 1955 a suffi pour le faire monter à 4.196 pour le Taquari et 1.330 pour le Jacui. Plusieurs facteurs, il est vrai, viennent accentuer les contrastes entre Paraïba et Jacui-Taquari, dans cet aspect des relations entre la pluviosité et l’écoulement, en particulier la forme du profil longitudinal des fleuves et de leur bassin, ainsi que l’extension spatiale des chutes de pluies.
3L’influence des sols, associée à la distribution saisonnière différente des précipitations explique, enfin, les variations des rapports entre celle-ci et le régime des fleuves : alors que les régimes du Jacui et du Taquari sont plus contrastés que la distribution saisonnière des pluies, le régime du Paraïba est considérablement adouci : les sols soutiennent les débits de la saison sèche d’hiver tandis que l’efficacité directe des pluies est diminuée par leur concentration durant l’été ; dans le Brésil subtropical, au contraire, le pouvoir moindre d’alimentation de la nappe laisse les différences de température accentuer les contrastes pluviométriques, les pluies d’hiver un peu plus abondantes étant beaucoup plus efficaces que celles d’été.
4Cette opposition entre Brésil subtropical et Brésil tropical atlantique n’empêche pas l’existence de variations secondaires des rapports entre la pluviosité et l’écoulement, à l’intérieur de chacune de ces deux zones climatiques.
5Dans le bassin du Paraïba, l’extension générale du manteau d’altération atténue l’influence des différences topographiques : à pluviosité annuelle égale, l’abondance moyenne et les variations saisonnières varient essentiellement en fonction de la distribution saisonnière des pluies qui donne des conditions plus ou moins favorables d’efficacité. La violence des crues varie avec l’intensité des averses, comme dans le Brésil subtropical, d’ailleurs.
6Il s’y ajoute pourtant l’influence du profil plus ou moins tendu de la rivière ; les étiages sont plus sensibles aux variations secondaires de la capacité de rétention des sols, commandées par les différences de cadre topographique : à pluviosité égale, les bassins de plateau ou de pied d’escarpements ont des étiages plus soutenus que les bassins de collines.
7Dans le Brésil subtropical, les différences de cadre topographique qui coïncident avec les différences d’épaisseur des sols, reprennent la première place pour expliquer les variations secondaires des rapports entre la pluviosité et l’écoulement : elles estompent l’influence de la température et donnent au Jacui dont le bassin a une température moyenne plus forte, une abondance relative plus grande que celle du Taquari, en aggravant les crues et les étiages de celui-ci. Elles expliquent les différences entre le régime de ces deux rivières pendant la saison froide ; elles cèdent la place aux variations de la distribution saisonnière des pluies pour rendre compte des différences de régime pendant l’été.
8Ces considérations générales reposent sur la comparaison de moyennes qui représentent une grande abstraction vis-à-vis de la réalité. Pour achever de comprendre les rapports entre la pluviosité et l’écoulement, il nous a fallu rechercher, dans la mesure du possible, les variations qui se cachaient derrière ces moyennes. Dans ce domaine encore, le Paraïba s’oppose au Jacui et au Taquari. Dans le Brésil tropical atlantique, les causes des pluies apparaissent chaque année avec une régularité suffisante pour atténuer considérablement les variations d’une année à l’autre des rapports entre la pluviosité et l’écoulement. Ceux-ci n’en sont pas moins une abstraction à l’échelle du Paraïba, mais une simple abstraction dans l’espace, qui résulte de la variété du bassin ; ils traduisent la façon dont se combinent les apports de chacune de ses parties ; ils s’éclairent par la simple analyse de ce qu’ils sont dans chacune de ces unités spatiales élémentaires.
9Dans le Brésil subtropical, un autre problème s’ajoute à celui-ci. Les rapports moyens entre la pluviosité et l’écoulement ne sont pas seulement le fruit d’une abstraction spatiale, lorsqu’il s’agit d’un grand bassin, mais d’une abstraction temporelle, car, dans chacune des parties du bassin, ces rapports varient considérablement d’une année à l’autre, par suite de la grande instabilité des causes de l’apport pluvial. Pour que les moyennes aient un sens, il faut donc les éclairer par une étude de leurs variations dans le temps.
10Les rapports entre la pluviosité et l’écoulement diffèrent sensiblement dans les deux zones choisies comme exemple. Il ne faut pas en inférer que le Paraïba représente « le type tropical ». Les recherches des ingénieurs sur les rivières de la savanne guinéenne aboutissent à des résultats très différents. Même dans le Brésil les quelques renseignements que nous avons pu glaner sur les rivières de l’État de Bahia semblent indiquer des rapports forts différents entre les pluies et les débits. Disons donc seulement que le Paraïba représente un type de rivière tropicale.
11Comparé aux rivières subtropicales, son comportement se signale par sa modération générale. Comme les pluies tombent le plus souvent en averses, dans les deux zones, et que la température du Brésil subtropical reste assez voisine de celle du Paraïba, c’est aux différences de terrains et de cadre morphologique qu’il faut faire appel, en dernier ressort, pour justifier ces différences. Dans notre rivière tropicale, l’originalité des rapports entre la pluviosité et l’écoulement repose davantage sur l’épaisseur du manteau de roches décomposées et la forme des bassins que sur les caractères propres du climat tropical.
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