Chapitre III. Le Paraïba à Campos, étude hydrologique
p. 213-232
Texte intégral
1Le Paraïba, à Campos, draine un bassin de 55.770 kilomètres carrés, sur lequel la pluviosité annuelle moyenne atteint 1.420 millimètres ; ce bassin se divise en quatre grandes parties de dimensions très inégales : le bassin du cours supérieur, formé par la réunion du Paraïbuna I et du Paraïtinga ne dépasse pas 5.300 kilomètres carrés à Guararema ; le bassin de la première partie du cours moyen, formé par la plaine de Taubaté et ses alentours montagneux n’est pas beaucoup plus grand et ne compte que 6.400 kilomètres carrés de Guararema à Cachoeira ; la deuxième partie du cours moyen draine un bassin de dimensions sensiblement égales. Le cours inférieur, au contraire, de la confluence du Paraïbuna II et du Piabanha jusqu’à Campos, reçoit les eaux de plus de 35.000 kilomètres carrés.
2Il n’est pas étonnant, dans ces conditions, que les caractères du Paraïba, à Campos, s’apparentent d’assez près à ceux des affluents de cette dernière partie : coefficients et déficits annuels sont, en fait, du même ordre. Ils ne résultent pourtant pas exactement du même comportement : le Paraïba, à Campos, a des étiages relativement plus soutenus que ceux des grands affluents de son cours inférieur et des crues relativement moins fortes. Par suite de la forme du bassin et du profil longitudinal du fleuve, l’apport des cours supérieur et moyen joue un rôle de régulateur vis-à-vis de l’apport du cours inférieur : il diminue les débits spécifiques des crues et augmente ceux des étiages ; il accentue le décalage entre le mois du maximum hydrologique et celui du maximum pluviométrique.
I. Crues et étiages
3Le Paraïba apparaît comme un fleuve réellement calme : son débit spécifique n’a jamais dépassé 90 l/sec/km2 ; il n’est jamais descendu au-dessous de 4,3 l/sec. Bien plus, ces valeurs, si peu contrastées soient-elles, restent exceptionnelles : le maximum annuel moyen se situe à 66 l/sec/km2 et le minimum à 6 l/sec/km2.
4Les riverains, ont, à vrai dire, une autre idée du fleuve : par suite de la faible hauteur des berges dans la dernière partie de son cours inférieur, le Paraïba, en effet, est capable de provoquer de grandes inondations, malgré la modération relative de ses crues. Depuis quelques années, d’autre part, il lui arrive d’être presque à sec en hiver par suite du barrage qui, en aval de la plaine de Resende, permet de déverser une partie de ses eaux dans la plaine littorale où se trouve l’usine hydro-électrique de Lages. Nous avons naturellement arrêté nos calculs à l’année précédant la mise en eau de ce barrage.
A. Faiblesse des crues
5Entre 1930 et 1952, un seul débit journalier a atteint 5.000 m3/sec soit 90 l/sec/km2. La deuxième crue de la période n’a pas dépassé 83 l/sec/km2. L’étude des divers affluents pouvait laisser prévoir des maxima relativement plus élevés, malgré l’influence générale des sols, qui, de toutes façons, rend les crues du bassin du Paraïba infiniment moins violentes que celles du Taquari et même du Jacui.
6Deux facteurs principaux expliquent cette modération des crues du Paraïba : la forme du bassin et le morcellement spatial des chutes de pluies.
7La plupart du temps, en effet, par suite des causes mêmes de la pluviosité, les averses sont très localisées et ne tombent pas en même temps sur tout le bassin : l’apport violent de certains affluents est compensé par la médiocrité de celui des autres : le débit spécifique reste modeste à Campos.
8De toutes façons, lorsqu’une forte chute de pluie affecte l’ensemble de la région, les apports des différentes parties du bassin ne s’additionnent pas pour donner un maximum élevé à Campos, car l’onde de crue qui vient du haut-Paraïba arrive bien après celle des affluents du cours inférieur.
9Enfin, même lorsque les chutes de pluies se répartissent de telle façon qu’il y ait correspondance entre ces divers apports, le maximum reste relativement faible à Campos, car l’onde de crue qui vient du haut-Paraïba s’étale dans les plaines de Taubaté et Resende et ne fournit au bas-Paraïba que des débits de pointe très adoucis.
10Pour étudier les crues du Paraïba, il faut, en fait, diviser le fleuve en quatre secteurs qui réagissent différemment à l’apport qu’ils reçoivent de leurs affluents.
1° Aplatissement des crues du cours supérieur dans la plaine de Taubaté
11A Guararema, le Paraïba supérieur connaît encore des montées rapides : en janvier 1940, le débit est passé de 260 à 470 m3/sec en un jour ; ces brusques crues, pourtant, ne représentent déjà que des débits spécifiques modestes, car la violence du Paraïbuna est compensée par la faiblesse du Paraïtinga : lors de cette crue de janvier 1940, l’une des plus fortes du Paraïba supérieur, le débit maximum n’a pas dépassé 91 l/sec/km2 ; la veille de ce maximum, le débit du Paraïbuna I avait atteint 200 l/sec/km2, à Natividade, mais celui du Paraïtinga, à Sào Luis, ne dépassait pas 40 l/sec/km2 (fig. 55).
12Ces crues du Paraïba supérieur restent donc relativement modestes, par suite de la faiblesse des averses dans la zone des collines qui constitue presque la moitié de son bassin. Elles ont lieu le plus souvent en février, dont le maximum moyen atteint 49 l/sec/km2 ; les mois de juillet à novembre en sont exempts : le débit journalier n’a jamais excédé 35 l/sec/km2 pendant ces mois.
13De toutes façons, ces crues ne profitent guère, en tant que telles, au Paraïba inférieur, car elles s’étalent, « se noient » dans la plaine de Taubaté. Dans cette partie de son cours, en effet, le Paraïba coule avec une pente très faible, au niveau d’une vaste plaine : les brusques montées de Guararema s’étalent en larges inondations qui aplatissent très vite la courbe des débits journaliers et abaissent d’autant les débits de pointe.
14Suivons l’onde de crue de janvier 1940, en aval de Guararema (fig. 56). A ce poste, le maximum, accentué, a eu lieu le 11 janvier, après une forte période de pluie qui a duré du 7 au 11. Le débit a atteint 470 m3/sec. Les affluents de la première moitié du cours moyen, qui descendent de la serra da Mantiqueira ont été, le même jour, affectés d’une montée plus modeste, en rapport avec des chutes de pluies moins fortes. Cet apport a provoqué, entre le 10 et le 12 janvier, une faible montée du niveau du Paraïba, à tous les postes échelonnés le long de la plaine de Taubaté. Le débit s’est élevé à 275 m3/sec à Cachoeira, poste situé à l’extrémité aval de la plaine. Il est resté à cette valeur jusqu’au 17, puis s’est élevé régulièrement du 17 au 24 janvier, où il a atteint 425 m3/sec pour redescendre aussi lentement du 24 au 30 janvier où il était encore de 300 m3/sec. Ce clocher très adouci de Cachoeira entre le 17 et le 30 janvier provient de l’onde de crue violente arrivée à Guararema le 11 janvier : les courbes des postes échelonnés le long de la plaine de Taubaté nous montrent, en effet, la progression lente et de plus en plus adoucie de ce clocher aigu provenant du Paraïba supérieur. Finalement la période de pluie qui avait affecté essentiellement le cours supérieur n’a pas réussi à donner un débit maximum de plus de 36 l/sec/km2 à Cachoeira, à l’extrémité de cette plaine intérieure où le Paraïba étale ses méandres avec une pente moyenne très faible. Le coefficient A qui ne dépasse pas 6,4 à Guararema n’est plus que de 3,9 à Cachoeira.
15Même lorsque les chutes de pluies marquent une intensité maximum au niveau de la serra da Mantiqueira, la faible pente du Paraïba, et les débordements de la plaine suffisent pour adoucir considérablement le clocher, au niveau de Cachoeira. En février 1940, par exemple, deux périodes successives de très fortes pluies du 11 au 21 février, centrées sur la serra da Mantiqueira, ont donné un débit maximum de 125 l/sec/km2 dans le rio Peixe II ; ce flot venant de la serra a coïncidé, au milieu de la plaine, à Pindamonhangaba, avec l’arrivée de celui qui, dans le Paraïba supérieur, correspondait à la première période de pluie ; le débit a atteint 64 l/sec/km2 à ce poste ; quatre jours après, le niveau du Paraïba atteignait son maximum à Cachoeira : le débit relatif n’y dépassa pas 58 l/sec/km2, maximum absolu observé à ce poste entre 1930 et 1955 (fig. 57). D’une façon générale la courbe des maxima mensuels moyens et absolus est exceptionnellement aplatie (fig. 58).
16De ce fait, les crues du Paraïba, en amont de l’étroit de Resende même si elles coïncident avec celles de la partie aval du fleuve, ne peuvent pas provoquer sur le cours moyen et inférieur des débits spécifiques élevés, puisqu’elles apportent au maximum 58 l/sec/km2 et en général moins de 40. Par suite de la forme du bassin et des irrégularités du profil longitudinal, les 11.700 kilomètres carrés qui sont en amont de Cachoeira sont pratiquement sans influence sur les crues à Campos, quelles que soient les pluies qu’ils reçoivent. Même celles qui tombent sur la deuxième partie du cours moyen, entre Cachoeira et la confluence des premiers grands affluents n’ont qu’une influence atténuée par la deuxième plaine intérieure, pourtant bien plus modeste.
2° Les crues de la deuxième partie du cours moyen
17Dans le goulet qui sépare les plaines de Taubaté et de Resende le Paraïba traverse avec une forte pente affectée de rapides, une zone de relief très vigoureux, drainée par une série de petits torrents. Ces conditions topographiques provoquent des montées rapides à Resende, en aval de cette section accidentée. En février 1935, le débit en ce point est passé de 530 à 1.180 m3/sec en deux jours. La courbe des débits à Cachoeira, à la même époque, montre que cette brusque crue ne doit rien à la partie amont du fleuve, car celle-ci ne marque aucun clocher (fig. 59). En déduisant l’apport de Cachoeira, le débit de cette zone montagneuse, rapporté à sa superficie a atteint 340 l/sec/km2. Mais, en aval de Resende, cette onde de crue arrive dans la deuxième plaine intérieure, où la pente du fleuve s’adoucit de nouveau : le clocher de la crue s’aplatit ; en déduisant toujours l’apport de Cachoeira, le débit maximum à Barra do Piraï, en aval de cette plaine, rapporté à la superficie du bassin en aval de Cachoeira, n’a pas dépassé 160 l/sec/km2.
18L’aplatissement n’y est pas aussi spectaculaire que dans la large plaine de Taubaté ; les crues de Resende peuvent encore apporter un flot non négligeable au niveau de la confluence des premiers grands affluents ; mais victime d’un premier adoucissement dans la plaine de Resende, ces crues qui ne peuvent compter, en tout état de cause, sur un apport considérable de l’amont, ne donnent que des débits relatifs très modestes si nous les rapportons à l’ensemble de la superficie du bassin : le maximum absolu, à Barra do Piraï, n’a pas dépassé 95 l/sec/km2, en mars 1947, malgré une crue exceptionnelle dans la zone de Resende, associée à un apport abondant de la partie amont.
19Les plus grandes crues du Paraïba à Campos sont dues à la rencontre de cet apport du cours moyen avec les flots venus des grands affluents du cours inférieur.
3° Les crues à Campos
20Le débit journalier n’a atteint qu’une seule fois 5.000 m3/sec en janvier 1943, mais plusieurs fois il a dépassé 4.500 m3/sec, dans la période 1930-1952.
21En décembre 1937, par exemple, il a atteint 4.590 m3/sec, en un clocher relativement aigu (fig. 60), ce qui donne un coefficient A de 19,5. De fortes pluies ont affecté toute la région pendant ce mois, donnant du 4 au 20 décembre un total de 265 millimètres pour l’ensemble du bassin. Une première période de pluie a provoqué, le 6 décembre, un premier maximum, modeste, dans la courbe des débits de la plupart des affluents, aussi bien que dans celle du Paraïba à Resende. Deux jours après, le débit atteint 2.400 m3/sec à Campos pour redescendre à 1.720 m3/sec le 16 décembre ; la décrue a été ralentie par un apport du rio Muriaé qui a été affecté d’une crue particulière du 13 au 16 décembre. Tous les affluents restent, d’ailleurs, à un moindre degré en hautes eaux : le 16 décembre, ils ont encore des débits relatifs compris entre 27 et 43 l/sec/km2, alors que commence la seconde période de pluie, marquée par de fortes averses, les 16 et 17 décembre sur le bassin moyen et les 17-18 et 19 décembre sur le bassin inférieur. Ce décalage permet aux flots des divers affluents de se rencontrer, car le maximum en amont a lieu un ou deux jours avant celui des affluents du cours inférieur : le 17 décembre, on note 65 l/sec/km2 à Resende ; le 18 décembre 168 l/sec/km2 pour le Piabanha et 198 l/sec/km2 pour le Dois Rios (maximum absolu de la période 1930-1955) ; le 19 décembre, 65 l/sec/km2 pour le rio Pomba. Du 17 au 20 décembre, le Paraïba monte régulièrement à Campos et atteint 4.590 m3/sec, soit 83 l/sec/km2, le 20 décembre. La décrue est de nouveau ralentie par l’arrivée d’une autre crue, particulière aux rios Muriaé et Pomba, les 22 et 23 décembre.
22Cette crue de décembre 1937 a donc été provoquée par la rencontre d’une crue ordinaire du Paraïba moyen et des affluents de la rive gauche du Paraïba inférieur, avec une crue exceptionnelle des affluents de la rive droite. La distribution dans l’espace et dans le temps des pluies a permis cette fusion des différents apports, car, en fait, la pluie de chacune des zones a eu ses causes particulières. Il ne s’agit pas d’une même chute de pluie sur tout le bassin : elle ne provoquerait que des arrivées successives des divers apports, à Campos ; il y a eu, en fait, des averses plus ou moins violentes selon les parties du bassin, à des dates qui ont permis la rencontre des différents apports dans le Paraïba inférieur, à l’exception de celui du haut-Paraïba, en amont de Cachoeira, qui reste sans influence sur le clocher de la crue à Campos. Cette perte, ajoutée aux différences d’intensité de la crue dans les divers affluents du cours inférieur, explique la faiblesse relative du débit spécifique à Campos. Dans ces conditions, le coefficient d’écoulement général de la crue à Campos, perd de sa valeur, puisque celle-ci ne profite pas, en réalité, de toutes les pluies du bassin. Il ne dépasse pas 36 % en ne déduisant pas la quantité d’eau qui de toutes façons, aurait été fournie par la nappe ; il tombe à 28 % en faisant cette soustraction.
23Le coefficient de la crue de janvier 1943 (fig. 61), est plus fort et atteint 49 % ou 36 % selon les modes de calcul que nous venons d’indiquer. Les fortes pluies de ce mois sont en effet, tombées sur des rivières déjà très hautes : le Paraïba à Campos débitait 3.200 m3/sec lorsque la première période de pluie est survenue, sur le bassin inférieur
24L’apport venu de Resende a été négligeable et les apports des grands affluents n’ont pas exactement coïncidé : le clocher, à Campos, a été très aplati, tout en atteignant des valeurs élevées : il est resté pendant trois jours à 4.000 m3/sec. Après une période de décrue où le débit tombe à 3.060 m3/sec, survient la seconde chute de pluie qui affecte tout le bassin, avec un maximum sur la rive gauche du cours inférieur dont les rivières atteignent leur maximum absolu de la période 1930-1955. Cet apport violent des rios Paraïbuna II, Pomba et Muriaé, joint à celui, plus modeste, de Resende et des affluents de la rive droite, permet au Paraïba d’atteindre, à Campos, son débit maximum de 5.006 m3/sec, le 23 janvier, soit un coefficient A voisin de 21.
25Enfin, en mars 1947, c’est la rencontre du maximum absolu de Resende, avec des crues moyennes des affluents du cours inférieur qui a provoqué la troisième grande crue du Paraïba à Campos, avec un débit maximum de 4.530 m3/sec (fig. 62).
26Ces trois crues sont les seules dans toute la période a avoir dépassé 80 l/sec/km2 ; en février, il se trouve que le débit maximum n’a pas excédé 75 l/sec. On note encore des débits de 50 à 55 l/sec/km2, pour les mois de novembre et d’avril et de 32 l/sec/km2 pour le mois de mai. De juin à octobre, les débits n’ont jamais dépasé 25 l/sec/km2(fig. 63). Les courbes des maxima mensuels, presque horizontales de décembre à mars, montrent que l’apport de Resende n’est pas négligeable : les courbes y culminent en effet, en mars, alors qu’elles culminent en décembre pour les affluents du cours inférieur : la courbe horizontale de Campos est bien le résultat de l’association de ces deux parties du bassin.
27Pourtant, entre 1930 et 1952, le Paraïba n’a jamais bénéficié de conditions pluviométriques idéales pour une grande crue : le morcellement de la pluie en averses localisées a empêché que tout le bassin reçoive à une même période une chute de pluie exceptionnelle, telle que celle qui a provoqué la terrible crue de 1941 dans le Guaïba.
28Encore faudrait-il, ici, qu’elle se distribue dans le temps de telle façon que l’arrivée des divers apports se fasse en même temps à Campos. Même ainsi, le débit relatif serait diminué par la perte irrémédiable de l’apport du haut-Paraïba en amont de Cachoeira. Cette perte, qui joue sur le débit maximum de la crue, et dans une certaine mesure sur le volume d’eau total apporté par cette crue, n’est pas, en elle-même une perte absolue de l’eau qui tombe sur cette partie amont du bassin : bien au contraire, elle est rendue lentement au Paraïba inférieur et contribue à renforcer les étiages qui restent toujours soutenus à Campos.
B. Les étiages
29Avec un minimum annuel absolu de 4,3 l/sec/km2 et un minimum annuel moyen de 6 l/sec, le Paraïba à Campos a des étiages infiniment supérieurs à ceux de nos rivières du Brésil subtropical, malgré la distribution saisonnière beaucoup plus contrastée des pluies.
30Outre l’influence générale des sols, qui, nous l’avons vu, maintient dans tous les affluents du Paraïba des étiages soutenus, quelle que soit la rigueur de la saison sèche, le Paraïba, à Campos, bénéficie de deux facteurs secondaires qui maintiennent ses débits d’étiages à des valeurs élevées, ceux mêmes qui réduisent les maxima des crues.
31Les modalités des chutes de pluies empêchent, d’une part, qu’il y ait une stricte coïncidence entre les étiages les plus creusés des diverses parties du bassin : les averses de l’hiver, si inefficaces soient-elles, soutiennent malgré tout, les débits. Elles tombent tantôt sur un affluent, tantôt sur l’autre et font que le Paraïba à Campos tend à bénéficier souvent de l’une d’elles.
32Le haut-Paraïba, à Cachoeira, apporte, de toutes façons, un débit très soutenu, aussi bien grâce au réservoir de la plaine de Taubaté que par suite de la moindre rigueur de la saison sèche : le minimum absolu à Cachoeira atteint, en effet, 5,1 l/sec/km2 et le minimum moyen 6,5 l/sec.
33C’est en octobre-novembre 1939 que le débit du Paraïba à Campos a atteint sa valeur minimum, la saison sèche s’étant prolongée, cette année-là, jusqu’au 10 novembre. Dès le 24 octobre, le débit du Paraïba est tombé à 290 m3/sec, soit 5,1 l/sec/km2. En effet, dès le 22 octobre, on note un premier minimum à Resende, avec 5,7 l/sec/km2 et dans la plupart des affluents du cours inférieur : ce même jour le rio Pomba ne débitait que 5,6 l/sec/km2, le Dois Rios 4,6, le Piabanha 6,3, le rio Muriaé 3,3. Une petite chute de pluie, survenue les 24 et 25 octobre, ne suffit pas pour redresser la situation ; la température déjà forte, en ce début de novembre, creuse les étiages ; le 6 novembre, le rio Muriaé ne débite plus que 2,6 l/sec/km2, le Dois Rios 3,8 : bien que le rio Pomba garde un débit de 5,4 l/sec/km2 et le Piabanha un débit de 5,6, bien que Resende continue à apporter 5,7 l/sec/km2, la perte s’accentue dans le cours inférieur où les faibles altitudes élèvent la température : le 10 novembre le débit tombe à 4,3 l/sec/km2 à Campos, minimum absolu observé entre 1930 et 1952, seul jour où le débit est tombé à moins de 5 l/sec/km2 (fig. 64).
34Cette coïncidence, même partielle, entre les étiages des différentes parties du bassin, est d’autant moins fréquente que la saison des pluies est plus avancée ; aussi le minimum moyen qui, de mai à octobre, diminue comme le minimum absolu, en conservant sur celui-ci une supériorité de 2 à 4 l/sec/kin2, se sépare-t-il beaucoup plus nettement de ce dernier, à partir de novembre. En janvier, le débit est encore tombé, une fois, à 5,1 l/sec/km2, mais le minimum moyen de ce mois atteint déjà 18,5 l/sec. Il culmine à 22,5 l/sec en février (cf. fig. 63).
35L’écart entre les minima moyens mensuels extrêmes est plus fort que pour la plupart des affluents ; il ne faut pas en inférer une moindre capacité de la nappe ; ce contraste résulte simplement du fait que les étiages des diverses parties du bassin coïncident beaucoup plus rarement en été qu’en hiver et que le Paraïba, à Campos, bénéficie donc, en été, d’une alimentation directe relativement plus abondante que pour chaque affluent pris séparément.
36Par suite de la forme du bassin et de la fragmentation spatiale des averses qui s’ajoutent à l’influence générale des sols, les contrastes entre crues et étiages sont encore plus faibles pour le Paraïba que pour chacun de ces affluents : le rapport entre le maximum et le minimum annuels absolus n’excède pas 21. A Campos, il est pourtant encore plus élevé qu’à Cachoeira où il ne dépasse pas 11. C’est à l’extrémité aval de la plaine de Taubaté que le Paraïba est le plus calme, malgré les montagnes qui entourent cette plaine. Le profil plus tendu du fleuve, en aval, ne réussit pas à atténuer aussi fortement les contrastes, nés de la zone des rapides entre Caclioeira et Resende ou apportés par les affluents du cours inférieur. A Campos, l’écart entre les maxima et minima moyens mensuels est relativement fort en été : pour les mois de décembre et janvier, il atteint 37 et 35 litres ; il diminue en fin de période des pluies et ne dépasse plus 23 en mars et 14 en avril. Il est très faible en hiver : les courbes des maxima et minima moyens mensuels restent grossièrement parallèles de juin à septembre avec un écart de moins de 4 litres (fig. 65).
37Les courbes du Paraïba à Cachoeira sont à peu près semblables en hiver ; en été, elles sont séparées par des écarts bien plus modestes : 16 à 17 litres pour les mois de décembre à mars, 11 pour le mois d’avril (fig. 66). Les maxima et minima moyens mensuels à Campos, correspondent donc, en hiver, à un comportement général du fleuve dans toutes les parties de son bassin ; au début de la saison des pluies, en décembre et janvier, ils sont fortement influencés par l’apport de la zone à maximum pluviométrique de décembre : les écarts grandissent ; à la fin de la saison des pluies, l’influence du haut-Paraïba est proportionnellement plus forte : les écarts diminuent à Campos et ressemblent à ceux de Cachoeira. Cette même combinaison d’influences se retrouve dans le régime du fleuve.
II. Variations saisonnières et abondance moyenne
38Les pluies, groupées essentiellement de novembre à mars, marquent, pour l’ensemble du bassin, un maximum très net en décembre, puisque la zone à maximum de décembre est beaucoup plus étendue que celle à maximum de janvier, avec une intensité plus grande de ce maximum. Λ cette répartition saisonnière des pluies correspond un maximum hydrologique de février, très atténué, au sein d’une période de hautes eaux de décembre à avril (fig. 67 et 68). La courbe des coefficients mensuels de débit est moins aplatie que celle de Cachoeira et moins vigoureuse que celle du rio Muriaé ; elle ressemble beaucoup à celle du rio Pomba, non seulement parce que l’apport des rios Paraïbuna II et Pomba représente un pourcentage important de l’apport total, mais parce que les bassins de ces rivières qui associent plateau non disséqué et collines offrent des conditions assez voisines de celles du Paraïba à Campos où cet apport se combine avec celui de Cachoeira et celui des affluents des collines, comme le rio Muriaé et le Dois Rios.
39L’importance de l’alimentation par la nappe en hiver se retrouve sans modifications à Campos, puisqu’elle est générale dans tout le bassin ; le rapport entre les moyennes mensuelles extrêmes ne dépasse pas 3,9 pour un rapport de 15 entre les pluies du mois le plus arrosé et celles du mois le plus sec. Le coefficient d’écoulement apparent de la période de juin-août atteint 114 %. Il se rapproche beaucoup plus du coefficient des affluents du cours inférieur que de celui de Caehoeira qui n’excède pas 71 %, par suite de la plus grande extension spatiale de la zone à saison sèche accentuée.
40Ce même facteur explique que l’abondance moyenne du Paraïba à Campos ne soit que légèrement inférieure à celle des rivières de la zone à maximum de décembre : elle atteint en effet 18,1 l/sec/km2 pour une pluviosité annuelle de 1.420 millimètres, ce qui donne au Paraïba un coefficient général d’écoulement de 40 % et un déficit annuel de 850 millimètres ; pour une pluviosité et une température semblables, les valeurs générales d’après MM. Wundt et Pardé, donneraient un déficit de près de 1.000 millimètres.
41Malgré l’infériorité de l’apport pluvial, malgré sa concentration au milieu de la saison chaude, malgré la valeur plus élevée de la température moyenne, malgré les plus grands contrastes du relief, le Paraïba est donc plus abondant que le Jacui et le Taquari. L’épais manteau d’altération qui recouvre presque tout son bassin en est le premier responsable. Le climat tropical atlantique, cause au moins partielle de l’épaisseur de ces sols, renverse par là les conséquences de sa température moyenne annuelle, légèrement supérieure, malgré l’altitude, à celle du Brésil subtropical II explique aussi les différences que nous avons pu noter entre les transports solides du Jacui et ceux du Paraïba.
42Les véritables galets semblent partout absents du lit du Paraïba, en dépit des fragments de roche que le fleuve arrache, à chaque crue, aux barres rocheuses, qui traversent son lit. Nous avons pu suivre la destinée de ces cailloux au niveau de Guararema : une barre de gneiss, très diaclasée, affleure dans le lit du Paraïba, à quelques centaines de mètres en aval de cette ville ; il s’en détache sans cesse des fragments anguleux durs que le fleuve emporte quand il est en hautes eaux ; 2 kilomètres en aval de ce point, nous n’avons plus trouvé aucune trace de ces cailloux : le lit du fleuve est entièrement sableux. A moins d’un kilomètre en aval de la barre, nous avons pu récolter quelques-uns des fragments arrachés à celle-ci : ils se réduisaient en poussière à la simple pression de la main.
43De ce fait, le Paraïba apporte, à Campos, une quantité considérable de sable, mais aucun véritable galet. Il transporte aussi beaucoup d’argile, car ses eaux sont troubles même en période d’étiage. Ce transport continu de débris fins qui s’oppose aux énormes masses de cailloux et de sable que le Jacui ou le Taquari apportent par saccades à chacune de leurs crues, achève de différencier les rivières du Brésil tropical atlantique de celles du Brésil subtropical. Il est possible maintenant de comparer les facteurs qui donnent ainsi une personnalité propre aux phénomènes hydrologiques dans chacune des deux zones climatiques.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Meurtre au palais épiscopal
Histoire et mémoire d'un crime d'ecclésiastique dans le Nordeste brésilien (de 1957 au début du XXIe siècle)
Richard Marin
2010
Les collégiens des favelas
Vie de quartier et quotidien scolaire à Rio de Janeiro
Christophe Brochier
2009
Centres de villes durables en Amérique latine : exorciser les précarités ?
Mexico - Mérida (Yucatàn) - São Paulo - Recife - Buenos Aires
Hélène Rivière d’Arc (dir.) Claudie Duport (trad.)
2009
Un géographe français en Amérique latine
Quarante ans de souvenirs et de réflexions
Claude Bataillon
2008
Alena-Mercosur : enjeux et limites de l'intégration américaine
Alain Musset et Victor M. Soria (dir.)
2001
Eaux et réseaux
Les défis de la mondialisation
Graciela Schneier-Madanes et Bernard de Gouvello (dir.)
2003
Les territoires de l’État-nation en Amérique latine
Marie-France Prévôt Schapira et Hélène Rivière d’Arc (dir.)
2001
Brésil : un système agro-alimentaire en transition
Roseli Rocha Dos Santos et Raúl H. Green (dir.)
1993
Innovations technologiques et mutations industrielles en Amérique latine
Argentine, Brésil, Mexique, Venezuela
Hubert Drouvot, Marc Humbert, Julio Cesar Neffa et al. (dir.)
1992