Chapitre III. Le Mexique central
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Texte intégral
Section I. LE MILIEU NATUREL DU MEXIQUE CENTRAL
1Le cœur du Mexique s’oppose dans son ensemble au reste du pays parce qu’il a une population beaucoup plus dense et aussi parce qu’à certains égards il a connu dans son développement historique une continuité qui manque ailleurs : malgré les traumatismes de la colonisation et de l’indépendance c’est en gros une même population qui lentement a évolué, tandis que la périphérie du Mexique connaît les brusques changements du rythme de l’activité dans les zones pionnières, ou les longues stagnations dont certaines zones indigènes se réveillent à peine. Cette relative continuité se marque surtout dans le haut pays : les terres méridionales tournées vers le Pacifique participent plus aux retards parfois compensés par les brusques mouvements pionniers. Cependant les transitions sont trop complexes et les interpénétrations trop fréquentes pour qu’on ne choisisse pas de sauvegarder l’unité d’un ensemble qu’il est plus malaisé de subdiviser que le reste du Mexique. C’est cette continuité historique même qui fait du Mexique central le domaine d’un métissage dont la nation mexicaine est née. Domaine fortement peuplé dans sa majeure partie, il a été atteint bien sûr plus complètement par la réforme agraire, puisque la masse paysanne avait faim de terre et ceci aussi est un fait national essentiel. Même s’ils se dégradent vers la façade pacifique, ces deux aspects restent significatifs.
2La complexité est de règle dans le centre mexicain, car le milieu naturel crée de multiples contrastes à courte distance ; il en résulte des noyaux de peuplements qui occupent chacun un petit canton : des pays au sens européen du terme se juxtaposent de façon variée ; ces petites unités de peuplement profitent de la terre d’un bassin dans des montagnes vigoureuses, des pluies d’une façade mieux exposée ou d’un cours d’eau qui permet une tache d’irrigation dans un ensemble menacé par l’aridité. Cependant cette variété des milieux naturels n’empêche pas que l’occupation de l’espace soit continue et les échanges multiples car les reliefs restent pénétrables et si de fortes oppositions existent entre quelques bons pays et les espaces médiocres qui les séparent, ceux-ci ne sont pas vides. Contrastes et nuances ont des allures méditerranéennes, en opposition avec la monotonie et l’immensité imposées à l’homme par les milieux naturels des autres régions mexicaines, qui participent au style habituel de la nature américaine.
3La limite septentrionale du Mexique central est formée par le désert : il n’apparaît cependant que progressivement. Quand on atteint l’isohyète de 400 mm de pluie, la culture nécessite l’irrigation, mais celle-ci devient prépondérante dès avant cette limite. A la bordure nord apparaît d’ailleurs un étranglement de l’altiplano : à l’est le réseau encaissé des rios Verde et Santa Maria (têtes du Pánuco) entaille l’altiplano et forme un obstacle à la circulation ; à l’ouest les blocs failles sont sculptés en canons par les affluents du Rio Santiago-Lerma en aval de Guadalajara. Ainsi les voies vers le nord empruntent deux couloirs principaux, par Zacatecas et par San Luis Potosí. La façade orientale et nord-orientale de l’altiplano est nettement délimitée par la Sierra Madre orientale. Plus qu’un obstacle infranchissable, c’est on l’a vu une limite climatique entre deux domaines fortement contrastés, l’un de hautes terres semi-arides, l’autre de pentes exposées à une humidité permanente qui entretient une forêt dense. Enfin vers le sud nous englobons l’ensemble des terres qui s’étendent jusqu’au Pacifique.
4Par opposition aux régions arides du nord et aux terres tropicales généralement très humides, on trouve ici un milieu semi-aride fort nuancé. Selon l’altitude, ce n’est pas la même isohyète qui délimite les régions où les pluies risquent d’être insuffisantes pour assurer une récolte de maïs sans irrigation, puisque l’évaporation est plus intense avec les fortes chaleurs des basses terres : il faut compter pour une culture de temporal 700 mm de pluies sur l’altiplano et au moins 800 mm en terre chaude, au-dessous de 1 000 m. Mais dans les deux cas, même là où les moyennes pluviométriques sont suffisantes, les fortes variations d’une année à l’autre imposent à presque toute la région des récoltes très irrégulières. La notion de culture de temporal, dépendant des pluies saisonnières estivales, implique toujours l’idée d’une agriculture dépourvue de sécurité. On peut noter d’emblée que la semi-aridité n’est pas atteinte seulement quand on se rapproche du nord désertique. On la trouve d’une part dans des terres basses, le long de l’axe du Balsas, de façon à peu près continue : l’écran de la Sierra Madre méridionale empêche la pénétration à basse altitude de l’humidité venue du Pacifique, tout comme les terres de l’altiplano barrent la route à l’humidité du Golfe. Plus surprenante est d’autre part la dorsale semi-aride qui se prolonge très loin vers le sud dans toute la région située sous le vent de la Sierra Madre orientale. Bien que cette chaîne soit d’altitude moyenne, souvent simple rebord escarpé en contrebas de l’altiplano, c’est parfois seulement en quelques kilomètres que l’on passe de la façade du Golfe très humide à une zone très sèche et en tout cas plus sèche que le reste de l’altiplano à la même latitude.
5Bien entendu le dispositif du relief au Mexique central — dont dépendent les nuances climatiques — s’explique principalement par l’accident structural majeur que forme l’axe néovolcanique. Tout se passe comme si une grande faille avait fonctionné là à la fin du tertiaire et encore au quaternaire et avait créé une dénivellation de l’ordre d’un millier de mètres entre l’altiplano au nord et le fossé du Balsas au sud. Cette énorme fracture récente, accompagnée d’un volcanisme varié, commande le façonnement du relief et l’organisation de l’hydrographie aussi bien au nord qu’au sud de l’axe néovolcanique lui-même1.
6L'axe néovolcanique longe approximativement les 19e et 20e degrés de latitude nord. Il affecte un socle formé à la fois de terrains secondaires, de roches intrusives et de matériaux volcaniques anciens. Il est rare que l’on puisse avancer des preuves géologiques de l’existence et de l’âge de cette immense fracture et les géographes restent souvent prudents dans leurs interprétations. Cependant la dénivellation, l’escarpement et ses jalons volcaniques sont des éléments essentiels du relief. Entre le plancher des hautes terres et la dépression méridionale, les dénivellations sont brutales : le bassin de Mexico est à 2 200 m, celui de Toluca à 2 600 m, tandis qu’au pied les plaines du Morelos s’étalent entre 1 600 et 1 000 m. Morelia et le lac de Pátzcuaro sont vers 2 000 m, tandis que le fossé du Balsas vers Huetamo est vers 400 m — ici déjà loin de l’escarpement. Guadalajara et le lac de Chapala enfin sont au-dessus de 1 600 m, les plaines autour d’Apatzingán et au nord de Colima vers 400 m. Ce n’est que dans le secteur oriental du Mexique central que la dénivellation disparaît : le bassin de Puebla est vers 2 200 m, mais Atlixco est à peine plus bas tandis que plus au sud Izúcar de Matamoros et Tehuacán sont encore vers 1 400 m.
7Les grands appareils volcaniques représentent des accumulations de laves prolongées jusqu’à une époque récente. Ils dominent souvent de plus de 2 000 m le plancher de l’altiplano et de 3 000 m les terres du sud. Ils forment ainsi des obstacles importants, qui reçoivent des pluies supérieures à celles des régions voisines et les restituent en eau d’irrigation à certains secteurs ; mais en contrepartie ils provoquent une sécheresse accrue « sous le vent » de la masse montagneuse. Ils fournissent enfin d’énormes quantités de matériaux qui ont été étalés en piémonts, éléments caractéristiques de certains paysages. Ces grands volcans ne se répartissent pas également le long de l’axe néovolcanique : c’est sans doute le long d’accidents structuraux méridiens que les épanchements forment de grands volcans ; on trouve ailleurs seulement de petites pustules dispersées. Ces grands volcans occupent plus de place dans la partie orientale de l’axe. L’Orizaba, point culminant du Mexique à 5 700 m, renforcé au nord par le Cofre de Perote, forme un premier pilier à l’intersection de la Sierra Madre orientale. Un secteur plus calme fait suite, pourvu seulement d’un grand appareil décalé vers le nord, la Malinche (4 460 m). Puis l’axe méridien de la Sierra Nevada (Popocatépetl et Ixtaccíhuatl, 5 400 et 5 300 m) est relié à celui de l’Ajusco (3 900 m) par une chaîne de volcans moindres atteignant 3 000 m au plus. Des volcans plus bas font suite pour rejoindre le Nevado do Toluca (4 500 m). Par contre dans la partie occidentale de l’axe, deux grands ensembles seulement apparaissent : le Tancítaro (3 800 m) et les volcans du Colima (3 900 et 4 300 m).
8Là où l’escarpement est vigoureux et où aucun épanchement volcanique très récent n’est venu le renforcer et le protéger, les affluents du Balsas ont attaqué l’altiplano, sans doute fait reculer vers le nord la ligne de partage des eaux et découpé le bloc surélevé en serres : un dédale de ravinements attaque à la fois les laves plus ou moins anciennes et le socle lui-même. Un premier secteur fort difficile s’étend entre volcan de Colima et Tancítaro sur une cinquantaine de kilomètres ; cette région est attaquée par les têtes du Tepalcatepec et du Rio Tuxpan. L’érosion est aussi spectaculaire dans le vaste secteur des affluents du Balsas situés entre Pátzcuaro et le Nevado de Toluca : sur plus de 150 km, les têtes des rios Cutzamala et Tacámbaro forment le paysage des mille pitons (mil cumbres) qui entravent la circulation moderne entre haut et bas pays.
9Au nord de l’axe volcanique, les conditions du drainage ont bien sûr été désorganisées par l’apparition d’un bourrelet récent, d’autant plus que l’écoulement ancien des eaux a dû se faire souvent vers le sud, comme le pensent les géologues au moins pour deux secteurs, celui du bassin de Mexico et celui du lac de Chapala. Ainsi, selon les conditions climatiques, des cuvettes barrées vers le sud ont donné naissance soit à des zones endoréiques, soit à des lacs dont le déversement n’a pu se faire que vers le nord, donnant naissance à un nouvel axe de drainage, le Rio Lerma-Santiago. Le drainage méridional n’a en somme été conservé que dans le Bassin de Puebla, où le rio Atoyac n’a eu à franchir ni forte dénivellation ni barrage volcanique. L’endoréisme s’est produit à la fois en raison du climat et en raison de la perméabilité de certaines roches. Les matériaux calcaires dans l’est, les laves poreuses un peu partout, ont entravé la réorganisation du drainage autant que l’évaporation. C’est dans l’est que se trouvent les bassins endoréiques importants : le vaste secteur de Oriental, entre Malinche, Orizaba et Perote, se déverse dans une playa salée, pour des raisons climatiques évidentes, sous le vent des deux volcans qui jalonnent la Sierra Madre orientale ; les Llanos de Apam semblent soumis à des conditions analogues, tandis que le bassin de Mexico est surtout le résultat du barrage volcanique qui a créé des lacs d’eau douce (Xochimilco et Chalco principalement) qui se déversaient dans le lac salé de Texcoco.
10L’essentiel du drainage a été réorganisé plus à l’ouest par le Rio Lerma : de courts affluents alimentés parfois par des lacs lui viennent du sud ; ce fleuve naît dans les marais du bassin de Toluca, puis en aval il s’alimente naturellement des eaux du lac de Yuriria, aménagé en réservoir dès l’époque coloniale car la communication naturelle se fait aussi bien vers le lac que vers le fleuve ; il s’alimente directement des eaux du lac de Chapala qu’il traverse. L’endoréisme n’apparaît que localement dans ce secteur occidental : la lagune un peu salée de Cuitzeo se déverse depuis peu artificiellement dans le lac de Yuriria, tandis que le lac de Pátzcuaro, sans émissaire malgré le climat assez humide de son cadre montagneux, doit compenser cette alimentation abondante par des infiltrations dans les roches volcaniques. Enfin l’aridité intervient à nouveau à la lagune de Sayula en terre assez chaude et sous le vent du massif du Colima.
11Des terres situées à distance de l’axe volcanique vers le nord, seule la partie orientale est drainée par le Rio Tula, affluent du Pánuco, vers lequel s’est organisé le drainage artificiel du bassin de Mexico. L’alternance des remblaiements volcaniques et de l’encaissement du réseau rapproche ce secteur des régions situées au sud de l’axe volcanique. Partout ailleurs le Rio Lerma reçoit du nord une série d’affluents nés dans des régions sèches qui fournissent de faibles débits. Le volcanisme récent n’étant guère intervenu dans ces secteurs, les cours d’eau ont façonné le socle et le matériel volcanique ancien en collines dont le modelé est encore adouci par les cuirasses de caliche, tandis que le remblaiement des plaines, parfois facilité par l’abondance des cendres volcaniques, fournit de vastes surfaces de bonnes terres le long des rios qui s’unissent au Lerma de Querétaro à Guadalajara. Ce sont ces plaines anastomosées qui ont reçu précisément le nom de Bajío. Même si c’est une entorse à la tradition, on peut étendre ce terme à l’ensemble des plaines qui accompagnent le Lerma au nord comme au sud. Elles ont en commun leur morcellement entre des collines ou des petits massifs volcaniques plus ou moins récents, leur drainage à fleur de sol qui permet des dérivations faciles pour l’irrigation.
12On peut noter que dans les bassins orientaux comme dans le Bajîo, l’agriculture est favorisée par des sols de cendres volcaniques de bonne qualité. D’autre part si l’aridité menace les cultures de temporal, les possibilités topographiques et hydrologiques favorisent l’irrigation qui se présente selon trois techniques. Les bordos ou cajas de agua sont la formule la plus ancienne, coloniale mais peut-être née depuis plus longtemps : elle a des analogies avec les tanks du Deccan ; grâce à des barrages de terre ou de maçonnerie sur de petits vallons on retient des lacs temporaires de quelques hectares, alimentés pendant la saison des pluies par des bassins versants minuscules ; s’ils sont échelonnés le long d’un talweg, ces bassins sont utilisés l’un après l’autre : les haciendas étaient maîtresses de cette organisation et le système est en décadence depuis la réforme agraire. Les grands barrages modernes sont rares sur l’altiplano : le relief ne s’y prête pas et l’évaporation est à redouter ; quelques ouvrages ont été construits dans le Bajío et les eaux du Rio Tula, grossies des eaux d’égoûts du bassin de Mexico, sont dérivées vers les bassins du Mezquital. Enfin bien adapté aux conditions hydrologiques, le pompage dans les nappes phréatiques est la technique la plus moderne, en général grâce à des investissements que pratiquent les propriétaires privés, au risque d’épuiser des ressources limitées.
13Au sud de l'axe volcanique, des accumulations de piémonts formés de laves, de cendres volcaniques et d’alluvions se sont formées au pied des grands volcans. Selon les conditions de dépôt de ces matériaux, ils s’étalent plus ou moins vers l’aval et couvrent des surfaces variables. Selon l’ancienneté de ces dépôts et la disposition du réseau hydrographique, ils forment des plaines à peu près intactes ou sont au contraire entaillés de ravins profonds et transformés en plateaux. Ces piémonts peuvent s’encastrer dans les masses montagneuses ou au contraire s’étaler plus à l’aval en plaines largement ouvertes. Certes des dispositifs semblables apparaissent ailleurs qu’au pied méridional de l’axe volcanique, comme dans les piémonts du secteur volcanique de la Sierra Madre orientale tournés vers le Golfe, ou dans les bassins intérieurs du Mezquital, sculptés dans l’altiplano par les affluents du Pánuco. Cependant les piémonts les plus nombreux et les plus variés se rencontrent dans le secteur que nous envisageons en ce moment. Les piémonts encastrés dans la montagne, entaillés souvent par des gorges vigoureuses, se situent au plus près de la zone volcanique. On trouve plus rarement de larges plaines d’où émergent à peine des collines témoins du relief antérieur, que parcourent des cours d’eau à fleur du sol : c’est alors vers l’aval, là où l’épandage a pu progresser particulièrement loin de la zone volcanique. Quelle que soit leur morphologie tous ces piémonts ont en commun des sols dérivés soit du basalte, soit du tapis de cendres volcaniques, soit d’alluvions formées de matériaux volcaniques. Ces sols en général chimiquement favorables sont souvent meubles, sauf si des croûtes calcaires y sont déjà apparues. En effet la sécheresse est toujours présente dans ces terres plates en contrebas des masses montagneuses.
14La répartition de ces piémonts dépend évidemment du volcanisme lui-même. Les faibles dénivellations de la région située à l’est de Puebla donnent simplement des plaines tapissées de cendres sans contrastes d’altitude. On a pu cependant retenir à Valsequillo les eaux du Rio Atoyac, tête du Balsas, pour les déverser au nord de Tehuacán vers la plaine dont le drainage naturel, insignifiant, atteint le Santo Domingo, tête du Papaloapan. Les deux principaux secteurs où de vastes piémonts s’étalent au pied de l’axe volcanique correspondent d’une part aux volcans orientaux, du Popocatépetl au Nevado de Toluca et d’autre part au Tancítaro. Plusieurs alignements de collines divisent le premier ensemble en couloirs nord-sud plus ou moins larges, entre lesquels les communications sont faciles. Ces couloirs sont atteints assez aisément depuis l’altiplano par des pentes de laves souvent à peine entaillées par l’érosion. Au flanc sud-est du Popocatepetl une série de plaines entre Atlixco et Izúcar de Matamoros se raccordent presque sans rupture de pente avec le bassin de Puebla. Au flanc sud-ouest de ce volcan le couloir de plaine de Cuautla est relié au bassin de Mexico par un col facile vers 2 500 m. Ces plaines communiquent aisément avec celles qui, plus à l’ouest, occupent la moitié occidentale de l’état de Morelos et les parties proches des états voisins de Mexico et Guerrero. Ce dernier ensemble est bien relié à la fois au bassin de Mexico, par le flanc oriental de l’Ajusco où le col atteint 3 000 m et au bassin de Toluca vers lequel le passage ne s’élève pas à 2 700 m, ici à travers un relief vigoureusement sculpté.
15L’ample piémont du secteur occidental se situe en contrebas du volcan Tancitaro et de la portion de l’axe volcanique qui lui fait suite à l’est. Les épanchements forment un ensemble continu assez simple au nord du Tepalcatepec. Provoquée par une fracture vigoureuse, une forte dénivellation sépare ces plaines de l’altiplano et rend les communications assez malaisées avec celui-ci, soit à l’est du Tancitaro par Uruapan soit à l’ouest par Los Reyes. Le secteur occidental possède cependant d’autres piémonts liés au volcanisme, mais de moindre importance. Tout à l’ouest, quelques bassins sont parcourus par le Rio Purificación, tout comme en amont de la ville de Colima des plaines assez importantes remontent vers l’altiplano. Finalement la région du fossé principal du Balsas est la moins pourvue : de petits bassins de laves souvent entaillés vers l’aval par les affluents du fleuve forment des balcons de bonnes terres en contrebas de l’altiplano ; les bourgades de Ario de Rosales, Tacámbaro, Zitácuaro et Valle de Bravo, situées entre 1 600 et 2 000 m, commandent chacun de ces modestes bassins. Le dédale des ravinements situés à l’aval rend difficiles les communications de ces bassins avec l’axe du fleuve.
16Il n’est guère nécessaire d’expliquer longuement en quoi ces piémonts, grands ou petits, ont une vocation de zones irriguées : sauf les plus proches des hautes montagnes, ces terres sont assez sèches, mais elles reçoivent des cours d’eau bien alimentés ou possèdent des sources importantes, où les eaux ressortent des roches poreuses calcaires ou volcaniques. Dans la plupart des cas de simples dérivations ont permis une agriculture irriguée au moins dès l’époque coloniale où la culture de la canne à sucre a eu une grande importance. L’exploitation est beaucoup plus récente dans les plaines du Tepalcatepec où des barrages permettent à la fois l’irrigation et la production électrique.
17Si par leur intérêt agricole particulier les piémonts irrigables de l’axe volcanique méritent une description détaillée, le reste des régions méridionales peut être présenté à grands traits. Un contraste existe ici encore entre les plateaux du socle à l’est et le fossé du Balsas à l’ouest. Les plateaux forment la plus grande partie de l’état de Oaxaca. Si la portion sud en est relativement humide, entaillée par les têtes du réseau hydrographique tourné vers le Pacifique, le centre et le nord prolongent la dorsale semi-aride du revers de la Sierra Madre orientale : les bassins sont souvent cuirassés de croûtes calcaires épaisses. Dans l’ensemble peu de plaines alluviales, hors mis le bassin de Oaxaca ; ailleurs le réseau hydrographique a sculpté plus ou moins profondément le plateau en un moutonnement de croupes. La végétation et les sols sont profondément dégradés car ces terres en général situées entre 1 600 et 2 000 m sont densément occupées depuis des époques fort reculées. L’ensemble des plateaux a donc des ressources agricoles médiocres et des communications difficiles.
18Le fossé du Balsas n’est guère plus favorable à l’occupation humaine. Le matériel rocheux est le même que sur les plateaux de Oaxaca. Mais la disposition en cuvette détermine une sécheresse plus marquée dans la région la plus chaude du Mexique où l’évaporation est forte. En outre les surfaces planes font défaut tout autant qu’à l’est : le Balsas est encaissé dans la plupart des secteurs. Seule la région de Huetamo de Nunez-Ciudad Altamirano, fort isolée, dispose de bassins alluviaux irrigables. Les brousses xérophiles dominent donc le paysage de la majeure partie du fossé.
19L’ensemble méridional est barré vers le Pacifique par la Sierra Madre méridionale. Le socle semble se relever progressivement vers le sud, puis s’abaisser brusquement vers l’océan le long d’une série de failles. L’altitude du bourrelet montagneux est très variable : il dépasse 3 000 m seulement au droit de Oaxaca et au droit du Balsas moyen ; ailleurs ce sont des croupes tantôt supérieures, tantôt inférieures à 2 000 m. Au pied de la Sierra Madre méridionale, des collines, puis des plaines plus ou moins larges bordent l’océan ; la forêt de pins d’altitude, parfois mêlée de chênes, est remplacée en terre chaude par une forêt tropicale à feuilles caduques.
20L'occupation de l'espace au Mexique central présente certaines particularités qu’il faut souligner. La situation historique oppose à la fois ici le nord au sud et l’est à l’ouest. Les terres du sud diffèrent profondément à l’est et à l’ouest ; les plateaux de Oaxaca ont été occupés très anciennement par une population dense, d’un niveau de culture élevé. A l’exception de quelques secteurs privilégiés, comme les piémonts irrigables, les ressources du sol sont épuisées par des siècles d’exploitation et on ne peut guère envisager d’adaptation satisfaisante à l’économie moderne. Au contraire à l’ouest le fossé du Balsas n’est guère peuplé, sans qu’on puisse décider quelle est la part de l’héritage des civilisations précoloniales rudimentaires et celle des destructions massives de population dues au recrutement de main-d’œuvre pour les mines coloniales. Quoi qu’il en soit, les possibilités d’irrigation qui s’offrent ici en font une région pionnière.
21L’altiplano a connu des densités de population élevées dès avant la colonisation, en raison du haut niveau de culture et d’organisation atteint par ses habitants. Mais ces densités sont bien plus fortes à l’est, ce qui explique la persistance de beaucoup de formes traditionnelles de l’économie rurale : le maïs, le haricot, le maguey de pulque restent prépondérants. Au contraire, à l’ouest de l’altiplano, les indigènes formaient une population moins dense et ceux-ci ont été peut-être décimés plus gravement par la colonisation. L’implantation de petits blancs a donc été possible et il y avait aussi plus de place pour pratiquer des cultures commerciales, favorisées d’ailleurs par le climat.
22A l’est comme à l’ouest, l’altiplano possède une originalité marquée grâce à un milieu naturel très contrasté, formé de petites unités occupées depuis longtemps, noyaux de population aux ressources complémentaires qui échangent leurs produits sur de courtes distances. Ce régime de cantons complémentaires se retrouve dans l’ensemble du haut pays, mais aussi jusqu’à nos jours dans les petits bassins de piémont qui s’y rattachent. A l’époque coloniale encore, les plateaux de Oaxaca participaient du même système, mais les transports et l’économie moderne les ont pratiquement laissés à l’écart. C’est donc surtout l’altiplano qui connaît maintenant un problème économique exceptionnel sur le continent américain : la transformation d’une économie régionale à certains égards comparable par ses distances et ses contrastes à celle du monde méditerranéen, pour la mettre en accord avec les dimensions des marchés modernes, nationaux ou internationaux.
Section II. ASPECTS HUMAINS DE L’OUEST
23La partie occidentale du Mexique central associe donc des zones pionnières de terres chaudes à de vieux pays de haute terre. Mais la population du haut pays subit des attractions très diverses. Pour les migrations définitives à longue distance, la majorité des gens se dirige vers la capitale nationale. Mais ce mouvement est contrebalancé par des déplacements moins nombreux, d’une part vers les terres chaudes proches, d’autre part vers les villes de la région : certes les sources d’emploi rencontrées à faible distance sont très insuffisantes pour absorber les excédents de main-d'œuvre dont dispose la région. Aussi bien pendant les deux dernières décennies cette région a été celle qui a fourni les plus de braceros à l’agriculture nord-américaine : 3,6 % de la main-d'œuvre agricole en moyenne allait chaque année de l’autre côté de la frontière.
A. — La vie rurale
I. — Ouverture des communautés indigènes a la vie moderne
24Les Tarasques forment dans la région le seul bloc important de population indigène. Néanmoins c’est chez eux qu’on trouve l’exemple le mieux connu de transformation sociale intense et d’intégration à l’économie régionale. La communauté de Naranja, près de Zacapu (Mich.), groupe 300 familles ; elle a bénéficié de nombreux facteurs de transformation : un ancien lac drainé par une hacienda a fourni de bonnes terres de plaine livrées au village par la réforme agraire ; la route goudronnée reliant Mexico à Guadalajara ouverte dès avant 1940 par Morelia et Zacapu, passe par Naranja, qui possédait de longue date une liaison ferroviaire ; enfin à Zacapu s’est installée en 1947 une grande entreprise moderne, la Celanese (nylon).
25La communauté a participé activement aux luttes agraires, fournissant des leaders politiques de gauche et des militants francs-maçons. Le bénéfice a été certain : aux propriétés privées minuscules (entre 0,1 et 1 ha par famille) se sont ajoutées des parcelles d’ejido relativement importantes (2,6 ha par famille). Malgré cela les difficultés de crédit limitent la prospérité agricole : le Banco Ejidal ne prête qu’au quart des ejidatarios et la moitié des familles doit recourir à l’usurier, membre de la communauté ici. Ces difficultés de trésorerie n’empêchent pas de recourir à une main-d'œuvre salariée étrangère à la communauté au moment de la récolte de maïs.
26Il a fallu et ceci depuis longtemps chercher d’autres sources de revenu, essentiellement dans l’émigration. Celle-ci n’est pas nouvelle : on allait travailler dans les haciendas de terre chaude du Colima à l’époque de don Porfirio ; ce mouvement a été remplacé par celui des braceros vers les Etats-Unis. Mais surtout l’émigration définitive est importante : elle atteint 74 familles (soit ¼ par rapport aux 300 familles qui vivent à Naranja) ; 50 familles émigrées vivent à Zacapu, 10 à Morelia et 14 à Mexico : ceci donne la mesure de l’attraction exercée respectivement par les villes proches et par la capitale, compte tenu de ce que nous sommes ici presque dans la banlieue de Zacapu.
27En liaison avec cette ouverture économique très large, le particularisme tarasque s’effrite ici de façon marquée. Le système des fêtes et des marchés qui reliait Naranja aux villages tarasques de la Sierra perd de son importance, tandis que le cinquième des jeunes gens seulement parle encore correctement le dialecte ancestral. L’usage de l’espagnol se généralise donc, en même temps que la scolarisation atteint le tiers des enfants. La richesse et le modernisme de Naranja sont évidents si l’on considère ce que la communauté est réputée fournir au monde extérieur : du maïs, des leaders de gauche et des orchestres de musique ranchera de tradition métisse. Il faut prendre cet exemple comme un cas d’évolution qui ne représente pas l’ensemble de la communauté tarasque.
II — L’agriculture commerciale du Bajío
28On a vu que le milieu naturel et l’histoire de l’occupation humaine permettent d’inclure sous ce nom de Bajío l’ensemble des plaines alluviales partiellement irriguées qui accompagnent le Rio Lerma. Certes la dénomination traditionnelle semble plus restrictive ; le Bajío oriental serait en ce sens le confluent avec le Rio Laja, de Celaya à Salamanca ; le Bajío occidental les confluents avec les Rios Silao et Turbio, de Irapuato à Leon. Mais la plupart des indices économiques régionaux (émigration rurale, niveau des salaires, importance relative des différentes cultures) incite à considérer d’un seul bloc les plaines depuis le bassin de Querétaro jusqu’aux bassins agricoles situés au nord et au sud du lac de Chapala. Notons seulement que les altitudes plus faibles autour de ce lac font cesser la culture du blé et apparaître celle de la canne à sucre. Localement, à l’ouest de Guadalajara, une culture de plantation non irriguée est devenue une monoculture spéculative : la distillation de la pulpe d’une agave donne un alcool réputé, le tequilla, du nom du principal centre producteur.
29On trouve dans ces bassins une imbrication des cultures de temporal et des cultures irriguées ; l’ensemble de ces cultures irriguées représente 230 000 ha. Une petite paysannerie métisse est parfois maîtresse de sa terre depuis longtemps, mais les meilleures terres lui sont venues du démembrement des haciendas lors de la réforme agraire : en effet plus de 60 % des terres irriguées sont ejidales. Souvent la culture du blé a été dès l’origine orientée vers la vente dans ce grenier traditionnel du Mexique, mais les cultures alimentaires habituelles — maïs et haricot — ont aussi leur place ici, tandis que d’autres spéculations ont pris de l’importance : l’élevage des porcs, l’élevage laitier lié aux cultures de luzernes et de sorgho, les cultures de légumes (ail et surtout tomate). Au total le Bajio est un pays de polyculture dont la modernisation est freinée par l’exiguité des tenures, par les problèmes de crédit et par ceux de l’organisation des marchés.
30Grâce à une des meilleures études agronomiques, on peut préciser certains points pour le Bajio oriental, de Celaya à Salamanca. Cette région connaît bien sûr l’imbrication des terres d’ejido et des propriétés privées. On peut schématiser en disant que dans les exploitations ejidales les cultures de consommation familiale dominent, que l’emploi de la main-d’œuvre salariée y est assez faible (30 % du travail agricole), que la part des terres irriguées y est minoritaire et que cette irrigation dépend essentiellement de l’eau distribuée par les canaux provenant soit du Rio Laja soit du Rio Lerma lui-même. Les irrégularités dans la pratique ejidale sont classiques : locations des parcelles, ou divisions de celles-ci entre « cohéritiers ». Au contraire dans les exploitations privées, le travail salarié prédomine (trois quarts de la main-d’œuvre employée, ce qui relève encore en moyenne de l’exploitation paysanne) et les terres irriguées occupent une place bien plus large, essentiellement pour les cultures commerciales (blé, tomate, luzerne, ail et pois chiches). En outre les propriétaires privés sont presque les seuls à recourir au pompage pour irriguer leurs terres.
31Ainsi le principal problème que rencontre le progrès agricole est celui de l’irrigation. En effet la culture de temporal est possible — elle est de règle pour le maïs et le haricot traditionnels —, mais les rendements augmentent considérablement avec l’irrigation : ils triplent pour le blé ou le maïs et ils décuplent pour la tomate. Les spéculations agricoles peuvent varier, mais presque toutes dépendent de l’irrigation. On distingue en effet dans la région quatre types d’exploitations : la spécialisation laitière, la spécialisation dans le blé et la polyculture intensive dépendent de l’irrigation ; seule la spécialisation dans le maïs n’en dépend pas. Mais les ressources en eau sont limitées : le Rio Laja n’a que des débits médiocres, tandis que le Lerma fournit plus d’eau, grâce aux deux retenues à l’aval du bassin de Toluca (Solis et Tepuxtepec) et au réservoir ancien aménagé dans le lac de Yuriria. Mais l’irrigation par pompage est celle dont on attend les plus forts débits dans l’avenir : plus des deux tiers du total.
III. — L’agriculture pionnière des terres chaudes
32Le développement agricole dépend ici de l’ouverture des communications modernes et éventuellement aussi des travaux d’irrigation. Pour cette raison la mise en valeur du Colima est la plus ancienne, grâce à la voie ferrée puis après 1950 à la route goudronnée Guadalajara-Manzanillo. Mais sur la façade côtière du Jalisco, comme au Michoacán et au Guerrero de part et d’autre de l’embouchure du Balsas, la mise en culture des terres est bien plus récente. Cultures vivrières mises à part, la principale spéculation de la région côtière est la culture des cocotiers pour la production d’huile.
33La région agricole la plus importante est située dans le fossé du Balsas, au nord du Rio Tepalcatepec qui occupe la partie occidentale du fossé. La région actuellement irrigable couvre 100 000 ha, dont 75 000 étaient en culture en 1965, grâce aux eaux du Tepalcatepec et de son affluent le Rio Cupatitzio. L’œuvre d’irrigation est fort récente, en complément des 10 000 ha irrigués d’une hacienda de l’époque porfirienne. Cette région, la plus chaude du Mexique, pratique deux cultures par an car l’eau ne manque pas. La campagne d’été est consacrée principalement au coton dont la culture se développe rapidement : insignifiantes en 1956, les surfaces atteignent 37 000 ha en 1962, 60 000 ha en 1964 ; il s’y ajoute du sésame, culture traditionnelle de la région, du maïs et du riz. La campagne d’hiver consacre de grosses surfaces au maïs et au riz, mais les spéculations les plus rémunératrices sont les melons et pastèques : ces fruits arrivent de novembre à avril sur le marché nord-américain par wagons complets climatisés ; au mois de février les cours sont très élevés car la concurrence d’autres régions est alors très faible.
34Restée sous la forte influence du président Cardenas, cette région du Michoacan est un fief de l’agriculture ejidale ; 80 % des terres mises en irrigation ont été distribuées en ejido et la parcelle est en moyenne de 10 ha, comparable à celle des grandes régions irriguées du nord. Mais pour une agriculture commerciale brusquement implantée et confiée à des paysans dépourvus de moyens financiers, des problèmes essentiels de crédit se posent : il en résulte que sûrement la moitié et peut être les deux tiers des ejidatarios louent leur parcelle à un entrepreneur de culture : on constate que malgré le salaire rural élevé pratiqué dans cette région pionnière (18 pesos par jour), la rente du sol fournit à l’ejidatario l’équivalent d’un salaire permanent ; les locataires exploitent en général au moins 50 ha et ont besoin de fonds très importadts pour des cultures comme le melon et surtout le coton. Les prêts leurs sont consentis sans garantie hypothécaire, mais à des intérêts globaux de 60 % par an, si l’on tient compte de ce que les prêteurs sont en général les commerçants qui achètent la récolte en fixant le prix de celle-ci et qui vendent les insecticides et le matériel au prix fort.
35La main-d’œuvre agricole est composée ici en partie de braceros opérant aussi dans le nord : la récolte du coton, très précoce dans la région du Tepalcatepec, attire une douzaine de milliers de cueilleurs. Cet afflux de main-d'œuvre lointaine surprend en raison de la proximité de la Sierra tarasque surpeuplée. L’abondance de main-d’œuvre proche agit cependant sur les conditions agricoles de la région. C’est ainsi que l’on essaie d’étendre dans les rizières la pratique du repiquage, courante dans le Morelos, ce qui emploie beaucoup de monde. Quoi qu’il en soit, des gens de la Sierra ont été appelés à bénéficier des distributions de terres de la régior et il est intéressant de comparer l’activité de deux ejidos dont le peuplement diffère. Antunez, peuplé de métis de la région (650 familles) connaît une atmosphère fort individualiste. A la suite de luttes intérieures, le Banco Ejidal a cessé ses prêts ici et 2/3 des parcelles sont louées. Les efforts collectifs d’urbanisme sont médiocres au village où la scolarisation complète est difficile à assurer faute de maîtres en nombre suffisant ; les plus aisés des ejidatarios vivent d’un métier pratiqué à Apatzingán où ils résident et envoient leurs enfants suivre des études supérieures à Mexico.
36L’ejido de Buenos Aires, qui groupe 200 familles, est composé de gens de la Sierra tarasque. Leurs connaissances techniques et surtout leur entregent sont moindres qu’à Antunez. Les gens ici apportent leur propre travail, par exemple pour épierrer les terres nouvellement irriguées sans avoir obtenu de crédits pour payer la main-d’œuvre nécessaire. L’effort d’urbanisme collectif du village est très net, pour l’organisation du dispensaire, du club féminin ou de la coopérative de consommation ; ces créations reçoivent d’ailleurs une aide gouvernementale importante. Ici aussi les problèmes de crédit se posent : le Banco Ejidal ne consent pas de prêts ici et la moitié des ejidatarios aurait accès au crédit privé ; il est typique que ceux qui reçoivent des prêts des commerçants se disent ejidatarios libres par opposition à ceux qui dépendent du crédit du Banco Ejidal. De toute façon les gens semblent ici s’attacher fortement à leur terre et ne la mettent généralement pas en location.
B. — La vie urbaine
37L’altiplano et les terres chaudes diffèrent fortement dans leur organisation urbaine. Dans les terres chaudes où le développement économique et l’organisation des transports commencent à peine, on ne trouve que quelques villes, dont la croissance est parfois très rapide. Des villes anciennes restent endormies, comme Colima, ou ont connu une croissance ralentie, comme Zitácuaro ou Uruapan, toutes deux situées sur des piémonts irrigués anciennement mis en valeur juste à la bordure de l’altiplano et animés par le rail puis la route, mais hors des zones pionnières actuelles. Les possibilités des zones pionnières ne dépendent pas uniquement de l’agriculture, qui fait d’Apatzingán une ville champignon très prospère. L’axe ferroviaire et routier le plus ancien assure la prospérité de Manzanillo, port de Guadalajara.
38Mais très récemment la route a atteint l’embouchure du Balsas, pour les besoins des installations hydroélectriques, sans qu’on puisse encore parler de villes. Après l’utilisation, pour les besoins régionaux jusqu’au Bajio ou pour la capitale, de la force du Rio Cupatitzio (puissance installée 200 000 kW), on s’est attaqué au Balsas dans les gorges où il traverse la Sierra Madre méridionale. Le gros œuvre du barrage de l’Infiernillo est terminé et la puissance totale prévue sera de 900 000 kW, essentiellement destinés à la capitale fédérale. Le lac de barrage présente des attraits pour le tourisme. Enfin près de l’embouchure les travaux d’un nouveau barrage ont commencé, à la Villita où l’on prévoit une puissance disponible de 340 000 kW. Le barrage doit servir de pont, peut-être pour un éventuel chemin de fer, mais surtout pour la rocade routière pacifique dont les tronçons au nord de Manzanillo sont déjà très avancés et qui par Zihuatanejo rejoindra Acapulco. Le barrage de la Villita doit fournir l’énergie à des installations sidérurgiques : pour utiliser des minerais de fer très riches situés à proximité (Las Truchas), des projets prévoient une production d’un demi-million de tonnes d’acier. Ce serait enfin l’aboutissement de projets ébauchés voici une dizaine d’années, qui concernaient à la fois cette région et celle de Manzanillo. Une implantation aussi isolée par rapport aux activités métallurgiques actuelles du Mexique (le nord-est et la capitale) signifie pour le moins une confiance hardie dans le développement de la région. On peut compter plus modestement que l’irrigation future de 25 000 ha et surtout le tourisme lié à la rocade pacifique vont mettre fin en peu d’années à l’isolement traditionnel, comme cela se passe actuellement dans les terres chaudes du Jalisco.
39Sur l’altiplano on rencontre le semis de villes le plus dense du Mexique, formé par les agglomérations qui assurent la commercialisation des produits agricoles et miniers depuis l’époque coloniale. Les distances modérées ont permis la création d’un réseau de voies de communications modernes ce qui pose maintenant la question d’une spécialisation et d’une hiérarchisation de ces villes les unes par rapport aux autres. On rencontre cependant certaines entraves au développement urbain : certaines industrise risquent de ne pas avoir d’eau en quantité suffisante à la bordure nord du Bajío. Par contre l’axe routier méridional, par Zitácuaro, suit un trajet difficile par les Mil Cumbres : la voie ferrée qui passe plus au nord est mieux placée. Du choix des axes privilégiés pour l’amélioration des transports dépend bien sûr le développement urbain. De même si l’on prolonge jusqu’à Guadalajara le gazoduc qui aboutit à Irapuato, le choix du trajet est important : N. D. Lees suggère, malgré un détour, de le faire passer par Zacapu et Zamora où l’eau ne manque pas pour les industries futures. Quoi qu’il en soit il est évident que toute la région du Bajío, de Morelia ou de Querétaro à Guadalajara, est privilégiée pour le développement d’industries de transformation : la proximité de la capitale, la variété des noyaux urbains bien reliés les uns aux autres, la masse de main-d’œuvre sous-employée et la densité de la clientèle rurale potentielle vont dans ce sens. Mais les initiatives sont rares, sans doute faute de capitaux—investis ailleurs — et faute de techniciens, qu’il faudrait former dans la région. Plusieurs villes ont été dotées d’une zone industrielle aux vastes terrains équipés à l’écart du noyau ancien : les échecs dominent, parfois en raison d’une localisation trop éloignée des zones de logement, ce qui oblige au transport quotidien du personnel par les entreprises. Parfois le prix des parcelles équipées fait que les entreprises préfèrent se contenter de terrains plus petits et moins bien desservis, mais moins chers et plus proches des villes.
40La physionomie des villes du Bajío est très variée, principalement selon que ces villes coloniales s’endorment en perdant leur activité commerciale au profit d’un concurrent proche mieux placé sur le système des transports, ou bien au contraire gardent leur dynamisme commercial, soit grâce à la desserte d’une région agricole qui s’enrichit ou qui s’étend plus loin, soit grâce à l’installation d’entreprises industrielles importantes. On peut noter que dans la période 1900-1940 bien peu de villes du Bajío ont une croissance démographique supérieure à l’accroissement naturel de la population mexicaine : seuls quelques carrefours ferroviaires accueillent une immigration notable, comme Irapuato, Ocotlán ou Acámbaro, ainsi que la capitale de l’ouest, Guadalajara. Toutes les autres villes stagnent ou même connaissent une émigration : la guerre civile, la désorganisation de l’économie rurale traditionnelle et la concurrence des grands centres sont les causes de cette décadence. Pendant la période 1940-1960, certaines villes perdent encore leur substance : villes minières (Guanajuato), marchés ruraux trop petits ou mal placés sur le nouveau système des communications routières qui remplace la voie ferrée (Ocotlán, Lagos de Moreno, Ciudad Guzman, Silao, Acámbaro). Mais la plupart reprennent vie et attirent les migrations régionales.
41Dans le Bajío oriental, plusieurs villes ont un dynamisme remarquable : Salamanca, grâce aux installations de Pemex a l’accroissement le plus net et risque de dépasser Celaya. Querétaro s’est brusquement réveillée grâce au succès de sa zone industrielle : plusieurs entreprises ont été tentées par le carrefour de la nouvelle panaméricaine avec la route de l’ouest. Les trois plus grandes villes sont par ordre de leur vitesse de croissance Morelia, vieille capitale coloniale qui sort à peine de la tradition, Irapuato, dont la zone industrielle n’a pas encore su attirer d’entreprises importantes et León dont la situation est paradoxale : sans être capitale d’état, c’est depuis un siècle la seconde ville du Bajío après Guadalajara et sans avoir d’autres industries que de petites entreprises d’un niveau technique médiocre — chaussures en particulier — elle retrouve son dynamisme démographique. On peut penser qu’une politique d’organisation régionale du Bajío oriental devrait choisir entre ces trois capitales possibles pour y concentrer les activités motrices.
42Dans la partie occidentale, Guadalajara est la seconde ville du Mexique par sa population, qui a atteint le million d’habitants vers 1964. Son rôle de capitale régionale est évident : dans son orbite ne se développent que des villes de moins de 50 000 habitants, dont certaines croissent assez vite comme les centres de bassins irrigués de Zamora ou la Piedad, où très vite comme Zacapu grâce à l’industrie. Guadalajara manifeste un dynamisme démographique remarquable : aucune ville de la région ne s’accroît aussi vite à aucun moment. On peut la comparer à ce point de vue à Monterrey, dont l’agglomération s’accroît plus vite qu’elle avant 1940, mais moins entre 1940 et 1960. Mais Monterrey s’est nourrie d’une immigration venue de loin pour une part et son économie est née à la fin du xixe siècle de grandes entreprises dont le marché s’étend à l’ensemble du Mexique. Guadalajara au contraire est une ville coloniale certes plus dynamique que d’autres jusqu’en 1940, grâce aux relations avec des mines prospères, puis grâce à l’ouverture de nouvelles zones agricoles proches qui stimulent le commerce de la ville. Mais aucune grande entreprise industrielle ne joue ici de rôle moteur. Certes après 1940 des industries d’un niveau technique élevé se créent, mais leur nombre ne peut être comparé à celui des entreprises régiomontaines ; on ne trouve pas encore d’enseignement technique supérieur développé et les capitaux locaux s’investissent parfois à Monterrey.
43De quoi se nourrit alors cette croissance démographique très rapide des vingt dernières années ? Sans doute l’ouverture des communications avec les terres chaudes a-t-elle fait de Guadalajara la capitale d’une région agricole pionnière ; la ville possède une importante industrie de transformation des produits agricoles et une industrie des matériaux de construction en plus de l’activité traditionnelle du textile. Nul doute que se trouve ici l’espoir d’une croissance urbaine capable de faire un contrepoids à la capitale nationale, dans des conditions moins instables qu’à la frontière nord-américaine.
Section III. ASPECTS HUMAINS DE L’EST
44La portion orientale du Mexique central présente une particularité essentielle : la présence d’une capitale nationale de cinq millions d’habitants (1960) dont le développement régional dépend de la façon la plus directe : aucune autre ville vraiment importante n’y connaît une croissance rapide, le développement agricole y dépend d’un seul marché privilégié et les migrations rurales y sont absorbées presque totalement par un pôle d’attraction unique. Ceci ne veut pas dire que l’influence de la capitale s’arrête à cette région, comme on l’a vu dès la première partie de ce travail. On ne peut dire non plus que depuis la capitale la vie économique se soit diffusée dans toutes les parties de l’ensemble oriental, loin de là : des secteurs sont restés dans l’ombre et subissent une décadence marquée.
A. — Les régions déprimées
45L’ensemble méridional tout entier est défavorisé dans l’état de Oaxaca, celui de Guerrero et la partie méridionale de celui de Puebla ; mais des régions pauvres plus réduites apparaissent aussi sur l’altiplano. Le sud forme un ensemble de terres exploitées de longue date par les populations indigènes — dans les plateaux de l’état de Oaxaca et le sud du Puebla — et peuplées de façon beaucoup plus lâche par des populations métisses dans le centre et l’est du fossé du Balsas, c’est-à-dire dans le Guerrero. Cette dernière région est une terre où le relief et la dispersion du peuplement favorisent l’isolement : le maintien des traditions culturelles africaines dans la région d’Ometepec, en arrière de la côte orientale du Guerrero (Costa Chica) en est un bon exemple, dans une zone où se réfugièrent des esclaves fugitifs. Ailleurs se marque seulement un état de tension et de violence entre les communautés métisses. En dehors des Nahuas, les deux groupes indigènes prédominants de la région des plateaux sont les Mixtèques à l’ouest et les Zapotèques à l’est : les deux groupes convergent dans le bassin de Oaxaca. Bien que les populations indigènes forment ici des blocs massifs comme dans les régions maya du Yucatán ou du Chiapas, elles semblent plus pénétrées par la culture nationale, tenues en main par un pouvoir central dès avant l’époque coloniale.
46La pauvreté rurale est particulièrement marquée dans le haut pays mixtèque, autour de Tlaxiaco ; ce bourg joue un rôle commercial nettement parasitaire, entre autre comme centre de fabrication et de distribution de l’alcool. L’activité artisanale reste dans ces régions une ressource importante : particulièrement le tressage de la palme pour la fabrication de chapeaux. Aujourd’hui encore il n’est pas sûr que le revenu moyen des tresseurs de palme dépasse un ou deux pesos par jour. Ce travail est intégré dans une chaîne commerciale qui de revendeur en revendeur aboutit au conditionnement des chapeaux pour la vente par les grossistes de Puebla ; leur clientèle comprend l’ensemble du Mexique.
47La médiocrité de l’agriculture n’a pas stimulé d’échanges importants : la seule exception actuelle serait la culture du sésame et la production d’huile du Guerrero, dans le fossé du Balsas. Aussi la seule ville importante du plateau est-elle Oaxaca. Elle garde pour l’essentiel son aspect traditionnel, malgré un essor notable de sa population depuis 1940 : réunie par la route panaméricaine à la capitale dès 1940 et à l’isthme dix ans plus tard, elle n’a cependant pas une activité industrielle qui permette d’expliquer ce gros afflux d’immigrants. De la même façon la construction de la route d’Acapulco a stimulé au Guerrero la croissance de deux petites villes : Iguala, dans un bassin où l’on peut irriguer la canne à sucre, et Chilpancingo, la capitale de l’état. Cette route goudronnée dès 1940 atteint donc le port dont la fortune touristique dépend à la fois de la capitale et d’une clientèle internationale. Récemment on a poussé la construction de tronçons de la rocade pacifique : l’effort s’est porté d’abord vers la Costa Grande (ouest d’Acapulco) ; puis la route de la Costa Chica, sans être encore goudronnée (1965) a été construite jusqu’à Puerto Angel et elle atteindra bientôt l’isthme de Tehuantepec ; en même temps, des routes partant de Oaxaca atteignent le Pacifique. Dès maintenant un résultat est acquis : les plantations de cocotiers se sont multipliées sur la côte et l’état de Guerrero produit près de la moitié du coprah mexicain, pour lequel des huileries se sont montées à Acapulco. On espère d’autre part que l’ouverture de la côte pacifique de Oaxaca attirera les populations mixtèques qui sont en surnombre sur le plateau : l’Institut National Indigéniste oriente ses efforts dans ce sens. Si l’attrait récent de la côte est notable il n’est pas question qu’il puisse contrebalancer celui qu’exerce la capitale fédérale, où les immigrants du Guerrero ou de Oaxaca se multiplient depuis 1950, l’isolement traditionnel ayant cessé.
48Si les terres du sud forment un bloc qui sort à peine de son isolement, des régions limitées proches de la capitale souffrent de maux comparables. Au nord du bassin de Toluca, comme dans les régions dépourvues d’irrigation du Hidalgo et dans la majeure partie de l’état de Tlaxcala, les populations de tradition indigène sont nombreuses et les terres insuffisantes. Cultivés sur des pentes excessives, ou surpâturés, les sols sont érodés. Si la modernisation rurale de ces régions présente de graves difficultés, de nombreuses voies de communication les relient facilement depuis longtemps à la capitale : l’émigration rurale vers celle-ci est donc ancienne, ce qui améliore le niveau de vie de ceux qui restent, même si l’économie locale ne progresse pas.
B. — Les spéculations agricoles autour de la capitale
49Là où la qualité des terres le permet, l’agriculture traditionnelle de temporal s’est adaptée aux besoins du marché. A 2 600 m d’altitude, le bassin de Toluca a dû garder essentiellement les productions anciennes — maïs principalement — avec des rendements améliorés. Dans le bassin de Puebla, situé plus bas, la spéculation agricole s’est orientée sans besoin d’irrigation vers les cultures d’arbres fruitiers tempérés, pommiers surtout. Mais la plus importante transformation de la polyculture traditionnelle concerne la culture de l’agave-maguey, dont la sève fermentée donne le pulque. Habituellement les plantations forment des haies aux limites des champs ou soutiennent des terrasses de versants. Cependant dans la région sèche située au nord-est de la capitale, les plantations de maguey à pulque sont devenues à la fin du xixe siècle une monoculture pratiquée par de grandes haciendas qui profitèrent de la clientèle de la capitale. Située à cheval sur les trois états de Mexico, Hidalgo et Tlaxcala, cette région où les terres sont fort médiocres est desservie par les voies ferrées qui unissent la capitale à l’est du pays, contournant par le nord la Sierra Nevada. Comme au Yucatán les cultures d’agaves-henequen, les plantations ont ici souffert de la réforme agraire : les ejidatarios faute de capitaux n’ont pu assurer le renouvellement des plantations car il faut attendre une dizaine d’armées avant que le maguey produise de grosses quantités de sève pendant quelques mois : les ejidatarios le remplacent par de maigres cultures de maïs, ou d’orge dans les zones les plus sèches. La production du pulque sera dans l’avenir concurrencée par d’autres boissons, bière essentiellement ; mais jusqu’à présent l’afflux massif vers la capitale d’une population née dans les zones rurales consommatrices de pulque a provoqué une concentration de clientèle qui garde ses habitudes alimentaires traditionnelles.
50Plus récente est la spécialisation de nombreuses zones irriguées de l’altiplano dans l’élevage laitier, principalement grâce à la culture de la luzerne. Les eaux superficielles servent on l’a vu à l’irrigation de bassins du Mezquital. Il en est de même dans le bassin de Puebla. La région de San Juan del Rio utilise à la fois le système traditionnel des bordos et les pompages. Ceux-ci fournissent l’essentiel de l’eau utilisée dans le bassin de Tulancingo et dans celui de Mexico. Il est fréquent que les propriétés privées jouent le rôle principal dans la production laitière.
51Enfin les terres situées au pied de l’axe volcanique dans les bassins du Morelos ont au moins depuis l’époque coloniale une situation privilégiée pour les cultures tropicales. La principale fut bien sûr la canne à sucre : le Morelos a dû fournir le tiers de la production de Nouvelle-Espagne, car une clientèle urbaine exceptionnellement importante consommait le sucre de cette région située trop loin de la mer pour exporter. Comme dans les régions côtières la production de canne a augmenté ici à l’époque porfirienne : c’était devenu une monoculture pour le Morelos. La désorganisation a été totale à la suite de la guerre civile, particulièrement dure et longue en pays zapatiste. La plus grande partie des ingenios se trouvant détruits, l’économie régionale a longtemps hésité et seul un gros effort gouvernemental a permis la reconstitution de la production sucrière, en particulier grâce à la construction du gros ingenio de Zacatepec qui est une coopérative d’état comme celui de El Mante.
52Mais actuellement on n’a plus ici qu’une faible part de la production nationale et cette situation ne peut que s’accentuer car d’autres cultures plus rémunératrices peuvent être pratiquées ici : les ejidatarios ne s’en tiennent à la canne que sous la pression des ingenios, dans la mesure où initiative et crédit leur manquent pour changer leur activité. La principale culture de rechange est celle du riz que l’on repique puisque dans la région on dispose d’une main-d’œuvre bon marché et abondante. Une production de qualité et une clientèle proche permettent de rivaliser avec la production de Veracruz ou du Sinaloa. Sans irrigation, le coton tente parfois aussi les cultivateurs. Enfin les profits sont nettement plus élevés dans le cas des cultures de légumes, qui se développent dans la région de Tenancingo mais surtout dans le Morelos oriental autour de Cuautla, particulièrement proche du marché de la capitale. Ainsi les cultures de terre chaude jouissent d’une grande prospérité dans une région où la réforme agraire a été très poussée : le surpeuplement rural est ici nettement moindre que sur l’altiplano et une main-d’œuvre agricole temporaire ou définitive est attirée depuis les régions pauvres.
C. — La vie urbaine a l’ombre de la capitale
53Malgré les densités de population les plus fortes du pays, dès avant l’époque coloniale et jusqu’à nos jours, nous trouvons ici un semis de villes moins serré et surtout moins varié que dans la portion occidentale du Mexique central. Puisque la capitale par ses dimensions et son rôle national assure toute une gamme de services, bien au delà des besoins régionaux, les villes n’ont guère pu prendre à aucun moment une figure de capitale régionale, ou ont vite perdu au profit de la capitale fédérale les activités qui leur avaient assuré quelque temps une croissance dynamique. Dans ces conditions il n’est pas étonnant de rencontrer ici peu de grandes villes malgré la densité des populations rurales voisines. De même il n’est guère de villes qui présentent ici une croissance rapide et régulière. On remarque qu’avant 1940 aucune ville ne révèle par sa croissance une immigration vraiment forte, à l’exception de petits centres animés par la construction des chemins de fer (Apizaco, Tehuacán) ou par l’activité d’une industrie (Atlixco).
54Certaines villes ont échoué dans le développement de leur commerce ou de leurs services : c’est le cas de Pachuca, capitale d’état et centre minier décadent comme Guanajuato. Tulancingo, longtemps endormie, s’est développée assez rapidement depuis 1940 : une agriculture irriguée prospère, quelques usines profitent d’un axe routier entre la capitale déjà éloignée et la Huastèque. Les villes animées avant 1940 par la voie ferrée ont maintenu leur activité : Apizaco a attiré quelques entreprises industrielles après que ses ateliers de réparation des chemins de fer aient perdu leur importance et Tehuacán, grâce à ses eaux thermales, a développé sa production de boissons gazeuses et son activité touristique ; pour ces villes les transports routiers sont maintenant plus importants que la voie ferrée.
55Toluca a réussi, avant 1940, à faire figure de capitale régionale, grâce à des initiatives de l’époque porfirienne : à son rôle traditionnel de marché pour la population rurale elle a ajouté à cette époque une activité administrative et celle de quelques établissements industriels. Cependant, depuis 1940, sa croissance démographique ne révèle aucune immigration notable : le marché de la main-d'œuvre est trop faible en comparaison de celui de la capitale fédérale où par ailleurs se concentrent les décisions. Les conditions générales sont assez semblables à Cuernavaca : la proximité de la capitale est trop grande pour que des initiatives autonomes se développent. Mais après un marasme très marqué en raison du mouvement zapatiste, l’essor récent provient de la reprise à grande échelle d’un rôle touristique ancien lié à la capitale : aux « maisons de fin de semaine » et aux vacances traditionnelles des gens aisés s’ajoute ici comme en divers points du Morelos un afflux hebdomadaire de promeneurs et de baigneurs appartenant aux couches populaires de la population de la capitale qui de plus en plus disposent d’autos ou utilisent les nombreux autocars.
56La seule grande ville qui se soit développée à l’ombre de Mexico est Puebla : ville coloniale aux monuments prestigieux, fondée à distance des noyaux indigènes anciens dans une zone où la colonisation rurale se développait. Son rôle de marché rural a été complété par le développement d’une activité administrative pour un vaste état et d’une industrie textile. Ce développement nettement supérieur à celui de Toluca s’explique par l’éloignement un peu plus grand par rapport à la capitale, par l’ampleur de la région agricole environnante aussi, mais surtout par la position sur la seule route carossable ancienne entretenue, reliant la capitale à Veracruz. A l’écart de la voie ferrée principale, Puebla reste cependant la ville du textile : cette tradition est née de l’artisanat qui n’a pas disparu, dispersé jusqu’à Tlaxcala dans de nombreuses bourgades. L’industrie de Puebla a même essaimé vers Atlixco où quelques usines ont assuré la prospérité, mais sans attirer d’immigrants depuis 1940. Comme le prouve l’accroissement démographique dans les années 1940-1950, la prospérité des textiles a été grande à Puebla jusqu’après la deuxième guerre mondiale ; puis la vétusté de l’équipement est devenu un problème grave et la population a tendance à stagner. La ville peut accueillir des entreprises nouvelles si le souvenir des luttes syndicales ne décourage pas les investisseurs de capitaux.
57C’est seulement vers 1960 que l’état ou les entreprises privées ont envisagé les avantages de décentralisations industrielles dans les villes situées à proximité de la capitale, parce que dans celle-ci les problèmes de prix des terrains, de transports ou les difficultés d’approvisionnement en eau rendaient moins souhaitable l’installation de nouvelles usines. Quelques entreprises se sont ainsi créées à Puebla, d’autres à Toluca. Des projets existent pour Cuernavaca et le renouveau de Querétaro, à l’extrémité orientale du Bajío, relève peut-être d’une politique semblable. Il faut enfin signaler dans ce domaine la réalisation d’une ville industrielle nouvelle à Ciudad Sahagún (Hidalgo), bien desservie par les routes et les voies ferrées au bord de la région de monoculture du maguey. Les trois entreprises métallurgiques qui ont été créées par l’état occupent près de 3 000 ouvriers, mais on les a attirés par des salaires élevés, ce qui n’incite pas les capitaux privés à venir profiter ici de l’infrastructure disponible.
Section IV. LA CAPITALE NATIONALE
58Tout au long de la première partie et souvent au cours de la seconde il a fallu faire allusion au rôle national, ou immédiatement ci-dessus au rôle régional de Mexico. Il serait inutile de revenir sur ces aspects déjà présentés. On peut seulement essayer de proposer un bilan provisoire de cette grande métropole.
59Dans le temps d’abord on peut saisir la croissance de la capitale et se demander quel avenir lui est réservé. On a pu dire que la ville de Mexico cessait d’attirer les immigrants : c’est évident pour le centre de la ville, mais profondément faux pour l’agglomération qui non seulement a rempli presque la totalité du district fédéral, mais s’est étendue ensuite vers le nord sur plusieurs municipes de l’état de Mexico. Dans ce cadre — large et mouvant — on peut dire que la métropole ne cesse de croître, mais moins vite pour la dernière décennie (croissance décennale 1940-1950 : 74 % ; 1950-1960 : 62 %). On peut aussi noter qu’ella absorbe une part moindre des mexicains qui émigrent hors de l’état où ils sont nés (46 % en 1950 et seulement 44 % en 1966). Cet affaiblissement du mouvement migratoire vers la capitale peut se calculer grossièrement si l’on admet que la croissance naturelle est en ville la même que dans le reste du Mexique : l’immigration serait alors responsable d’une croissance de 43 % en 1940-1950 (plus de la moitié du total) et d’une croissance de 27 % en 1950-1960 (moins de la moitié du total). Ainsi le poids démographique de la capitale n’a pas cessé d’être un problème. On aurait tort de conclure rapidement que d’autres villes sont en train de relayer Mexico comme lieu d’accueil des migrants : certes la croissance de la population — donc l’attraction des migrants — a été plus rapide dans les deux métropoles régionales de Monterrey et Guadalajara. Mais il faut souligner que ce sont des phénomènes qui se placent à un autre niveau : Monterrey attire quelques centièmes des migrations nationales et Guadalajara moins encore.
60Les quelques décentralisations industrielles notées ci-dessus autour de Mexico sont un indice important : ce moteur de la croissance de la capitale qu’est l’industrie peut cesser d’agir et d’autres points du territoire peuvent en profiter. Mais sans développer le problème on peut noter que la main-d'œuvre industrielle ne représente qu’un peu plus du tiers de la population active du District Fédéral (moins du tiers si l’on élimine la construction). En définitive ni la croissance naturelle ni l’immigration ne vont baisser rapidement : pour 1970 l’agglomération métropolitaine comptera sûrement au moins sept millions et demi de gens et pèsera encore plus lourd qu’actuellement dans la vie économique nationale.
61Après s’être assuré que le poids de la capitale dans la vie nationale est un fait doué d’une certaine permanence, on peut essayer de dessiner provisoirement le tableau des régions où se fait sentir, sous des formes très variées, l’influence de Mexico. Rappelons l’aspect démographique du panorama. Les migrants proviennent de l’ensemble du territoire national, sauf du nord-ouest. La vaste région qui en majorité envoie ses migrants vers la capitale a été définie chapitre III de la première partie, ci-dessus. Mais il est une région plus restreinte dont les migrations se dirigent exclusivement ou presque vers la capitale : tout le centre-est qui est décrit au chapitre précédent ; on a vu que ses villes n’étaient douées, à l’ombre de Mexico, que d’un pouvoir d’attraction faible ou sporadique et qu’aucune grande métropole régionale ne prospérait ici. Mais un autre mouvement de population se dessine depuis les années 1960 surtout ; il s’agit des phénomènes de banlieue qui s’étendent de plus en plus largement et relèvent d’une étude de détail : dans la plus grande partie du bassin de Mexico, l’augmentation de la population est égale ou supérieure à la croissance naturelle nationale ; ceci signifie que les ruraux ont cessé ici d’émigrer vers la ville ; mais sans changer de résidence ils vont souvent y travailler : l’habitat rural se maintient et le surpeuplement des villages se fait parfois sentir, mais l’activité agricole cesse d’être la plus importante. A ces migrations quotidiennes du travail vers la ville et ses banlieues industrielles s’ajoute la migration hebdomadaire des gens de la ville qui toujours plus nombreux vont passer leur dimanche ou leur fin de semaine en terre moyenne ou chaude, voire jusqu’à Acapulco. Cet élément de revenu est important surtout dans l’état de Morelos où toutes les activités de tourisme, y compris la construction, sont fortement stimulées.
62Au mouvement de la population il faut ajouter bien sûr celui des marchandises et des capitaux. On essaiera de classer ces mouvements sous trois rubriques : le drainage opéré par la métropole, la gestion qu’elle effectue et enfin ses exportations vers le reste du pays. On ne mentionnera ici que les éléments dont Faire géographique peut être esquissée en renonçant à des hypothèses sur les flux qui restent insuffisamment connus.
63Pour sa consommation la ville de Mexico s’adresse à l’ensemble du pays pour certains produits. Pour la fourniture d’énergie, toutes les régions pétrolières mexicaines de la façade du Golfe sont reliées à Mexico, sauf les gisements frontaliers de Reynosa. Ainsi l’entreprise nationalisée des Pétroles mexicains contribue dans son ensemble à l’approvisionnement de la capitale. La consommation d’électricité de la ville dépend partiellement de centrales thermiques qui consomment des produits pétroliers, mais aussi de centrales hydroélectriques ; on les construit toujours plus loin, sur des rebords montagneux : après l’usine ancienne de Necaxa dans la Sierra de Puebla, on s’est adressé encore à l’escarpement oriental, mais bien plus loin, au barrage Miguel Alemán ; puis l’axe volcanique a été mis à contribution (tête du Rio Cutzamala à Valle de Bravo, puis Rio Cupatitzio dans le Michoacan). On en est maintenant à la Sierra Madre méridionale (le Balsas barré à l’Infiernillo) bientôt viendra le Grijalva au débouché des hautes terres du Chiapas (Malpaso) : ainsi on passe de distances d’approvisionnement situées entre 300 et 400 km à des distances de l’ordre de 800 km, pour les lignes à haute tension comme pour les oléoducs et gazoducs. Ces distances n’ont rien d’inquiétant pour des produits aussi faciles à transporter. Les besoins de la capitale en eaux posent des problèmes plus particuliers, parce que la ville est située dans un bassin montagneux endoréique. On n’a pas fini d’évaluer les conséquences du drainage des nappes lacustres et du pompage des nappes phréatiques, pour la vie rurale comme pour l'urbanisme du bassin de Mexico. Un premier pas a été franchi hors du bassin avec des pompages dans les marécages où naît le Lerma dans le bassin de Toluca. Pour l’avenir on a parlé de prendre l’eau aux têtes du Balsas situées dans le Morelos (Rio Amacuzac), 1 200 m plus bas que la ville ; on a envisagé aussi de prendre l’eau du Papaloapan, c’est-à-dire à 300 km de Mexico dans la plaine du Golfe.
64L’approvisionnement de Mexico en produits alimentaires montre à quel point la croissance de la ville a changé la nature des problèmes. Le site précolonial et colonial était très favorable, mais à courte distance : les transports en barques sur les lacs du bassin de Mexico permettaient d’apporter directement en ville les produits agricoles des zones humides cultivées en chinampas. Si nous changeons d’échelle pour passer à l’époque actuelle, nous trouvons une ville située au milieu de hautes terres très peuplées, dont les produits agricoles commercialisables sont peu abondants et peu variés, sauf dans le bassin du Morelos. Les transports entre ce haut bassin et les plaines plus vastes sont longs, 200 à 300 km vers le Bajío ; de plus ils sont difficiles vers les plaines du Golfe puisqu’il faut franchir l’escarpement de la Sierra Madre orientale.
65Pour l’approvisionnement en céréales on a eu recours dans les années 1950 à des importations nord-américaines. La série de bonnes années agricoles 1963-1965 avait permis d’y mettre fin pour le maïs : il provient de régions très varices du pays. Dès les années 1958-1960, la production de blé a été suffisante pour en finir avec les importations à mesure que les zones irriguées du nord et du nord-ouest augmentaient leur production et relayaient le Bajío. Le Morelos est bien placé pour vendre son riz et son sucre à la capitale, mais là encore un marché national se dessine. L’approvisionnement en viande provient surtout de la Huastèque et il subit moins d’à-coups à mesure que les liaisons routières se diversifient entre l’altiplano et la façade du Golfe. Bien entendu les deux marchés les mieux délimités sont ceux des légumes et du lait. Le bassin laitier de Mexico est constitué par une série très discontinue de secteurs irrigués où l’on cultive surtout la luzerne, à la fois dans la partie orientale de l’altiplano et dans le Bajío. Les légumes proviennent du Bajío et du bassin du Morelos.
66Il serait présomptueux de prétendre indiquer dans quelle région la vie économique est gérée par la capitale. Une fois de plus un bon nombre d’entreprises agissent à l’échelle nationale, depuis la capitale bien sûr : en particulier les entreprises nationalisées mais aussi des entreprises privées industrielles, des banques, etc. comme on l’a vu au chapitre V de la première partie. Notons simplement que dans de nombreux secteurs les capitales régionales ne couvrent pas toute la région environnante : les villes plus petites sont souvent en relation directe avec la capitale nationale. C’est ce qui se passe en outre de façon beaucoup plus poussée dans le sud et l’est du pays où aucune capitale régionale ne s’est affirmée.
67Il n’est pas facile non plus d’indiquer à quelles régions s’étend le marché de vente des produits industriels de la capitale. En ce qui concerne toute une série de biens de consommation, la capitale — avec les usines décentralisées à ses abords — est le seul vendeur : les automobiles et les instruments ménagers, le matériel électrique, des produits chimiques et en particulier les produits pharmaceutiques n’ont pour concurrents que des produits nord-américains, en particulier dans le nord, même hors des zones franches ; les métropoles régionales mexicaines ne présentent guère que des fabrications de produits courants — textiles, chaussures, quincaillerie, etc. L’industrie textile est bien sûr la plus importante : elle existe à Guadalajara et surtout à Puebla. Il est difficile de dessiner les zones couvertes par le commerce de gros de ces différentes villes, car de plus en plus les affaires se sont concentrées financièrement et des usines situées dans les trois villes peuvent avoir une administration unique localisée dans la capitale.
68On peut conclure très provisoirement que l’agglomération de Mexico étend ses relations à deux niveaux : pour toute une série d’approvisionnements ou de fournitures de produits industriels et de services elle s’adresse au pays tout entier. Mais elle domine à peu près complètement la majeure partie du centre oriental par ses services d’un niveau moyen ou supérieur, par son marché de main-d’œuvre (à moins que des entreprises ne se décentralisent et aillent à la rencontre de cette main-d’œuvre), par son marché de vente des produits agricoles commercialisés et par les revenus complémentaires d’origine touristique qu’elle procure.
Bibliographie
BIBLIOGRAPHIE
Sur le milieu naturel du centre du Mexique, en écrivant Bataillon, C. L’axe volcanique dans la géographie du Mexique central, RG juin 1966, p. 17-28, nous n’avions pas eu en main le Handbook of Middle American Indians, où la description est excellente en particulier pour l’axe volcanique lui-même mais aussi pour les systèmes lacustres situés sur le bloc septentrional. Pour la partie méridionale, la notion de piémont lié au volcanisme n’apparaît pas aussi clairement.
I. — Nord-est. Outre le numéro spécial de Mexico en la Cultura, Estado de Puebla, Serie monografia no 1 (s. d. 1963 ?) on peut noter les articles sur l’économie dans ESEM, no 418, septembre 1960 ; no 419, octobre 1960 ; no 442, septembre 1962 ; de Galvez, E. Desenvolvimiento del estado de Hidalgo, RE, mars 1951. La première étude publiée de cadastre de la réforme agraire est celle de Fabila, G. y. A. Tlaxcala, Tenencia y aprovechamiento de la tierra, Centro de InvestigacioneAgrarias, 1955.
Le bassin de Puebla fait l’objet d’une étude systématique inspirée par l’anthropologue P. Kirchhoff, à laquelle l’Institut de Géographie de l’UNAM participe. Un rapport préliminaire a été donné par Tichy, F. Informe sobre los trabajos geográficos iniciados en la zona Puebla-Tlaxcala, México, en conjunto con las investigaciones interdisciplinarias mexico-alemanas, CRLA t. 2, p. 228-237 ; Levi de Lopez, S. Carta de uso del suelo en la región templada de Atlixco, Puebla, CRLA t. 2, p. 337-342 ; deux études urbaines de Gormsen, E. Apuntes sobre el desarrollo de pequenas ciudades en la Meseta Central mexicana, CRLA, t. 1. p. 598-616 ; et Falcon de Gyves, Z. Evolución y crecimiento de la ciudad de Puebla, ibidem. Vue d’ensemble de Pfeifer, G. The basin of Puebla-Tlaxcala in Mexico, RG, juin 1966, p. 85-107 ; il se réfère à l’étude agraire de Tichy, F. Politischer Umsturtz und Kulturlandschaftswandel im Hochland von Mexiko, Heidelberger Studien zur Kulturgeographie, Wiesbaden, 1966, p. 99-114.
Des points particuliers sont traités par Loyola Montemayor, E. La industria del pulque, B de M 1956 ; Flores, E. Tratado de economía agrícola, FCE, 1961 (chapitre sur le bassin laitier de la capitale) ; Moore, V. E. El impacto del industrialisme) en la poblacion, PAIM, vol. 6, no 2, 1954 (sur la région de Atlixco).
II. — Sud-est. On trouve des éléments d’ensemble dans Mexico en la Cultura, Estado de Morelos, Serie monografía, no 3 (1964 ? s. d.) ; dans ESEM, no 420, novembre 1960 (Morelos) ; no 436, mars 1962 (Guerrero) ; no 402, mai 1959 (Guerrero). Bataillon, C. Rasgos geográficos principales del estado de Morelos, Boletín del centra internacional de estudios pedagógicos de Mexico, IFAL, octobre 1964. Plus important encore comme exemple d’évolution d’une communauté rurale que comme étude sur le Morelos, de Lewis, O. Lite in a mexican village : Tepoztlán restudied, Illini Books no 10, University of Illinois Press, Urbana Illinois, 1963, 512 p.
Les problèmes indigènes de l’état de Oaxaca sont étudiés par Malinowsky, B. et De La Fuente, J. La economia de un sistema de mercado en México, Acta Antropológica, época 2, vol. 1, no 2, Escuela Nacional de Antropologia e Historia, 1957 : la qualité de l’enquête est garantie par le nom des signataires ; Marroquin, A. Tlaxiaco, La ciudad Mercado, Cultura mexicana, no 19, Imprenta universitaria, est dans la même ligne.
III. — Nord-ouest. Aspects généraux dans Galvez, E. Notas sobre el desarrollo económico y social del Bajío, RE, juillet 1951 ; sur l’élevage du Bajío, ESEM, no 390, mai 1958 et no 391, juin 1958.
Une étude du pays tarasque est donnée par West, R. Cultural Geography of the Modem Tarascan Area, Smithsonian Institution of Social Anthropology, Publ. no 7, Washington 1948. Sur l’évolution des Tarasques, Friedrich, P. Naranja y el mundo exterior, Revista interamericana de ciencias sociales, Washington, 2e époque, vol. 2, no 3 p. 346 : un exemple très réussi d’analyse d’acculturation.
L’étude agronomique approfondie de Manuel Castillo, C. La economia agricola en la región de El Bajio, PAIM, 8, 3-4, 1959. De Helbig, K. une longue note sur l’histoire du problème de l’utilisation du lac de Chapala : Der Chapala See, Petermanns Geographische Mitteilungen, 1959, p. 18-33, Gotha. Parmi les documents sur le plan Lerma, communication ronéotypée au Ve congrès international de planification, Mexico, juin 1964. La vie urbaine est particulièrement étudiée dans Lees ainsi que dans la communication de Unikel, L. au congrès de planification ci-dessus indiqué. Enfin la monographie sociologique de Whiteford, A. H. Popayan y Querétaro, Facultad de Sociologia, Univcrsidad Nacional de Colombia, Bogota 1963 : plus suggestif par la vivante introduction que par les tableaux chiffrés.
Les romans sur l’ouest-Jalisco principalement — ont un intérêt particulier : Yanes, A. Alfilo del agua ; La creación ; Las tierrasflacas (son roman Las tierras pródigas concerne les terres chaudes nouvellement ouvertes par la route). Azuela, M. Los de abajo, est un classique. La valeur de Rulfo, J. El llano en limas, et surtout Pedro Páramo est exceptionnelle. Tous ces livres ont été publiés au FCE (sauf Las tierras flacas, Joaquin Mortiz) ; de Arreola, J. J. La feria couronne cet ensemble (El Volador, Joaquin Mortiz, 1963).
IV. — Sud-ouest. Une coupe des terres chaudes aux terres froides est donnée par Stanislawski, D. Once pueblos de Michoacán, PAIM, 8-2, 1956 ; des notes économiques sont à relever, de Galvez, E. Michoacan en su desarrollo economico y social RE, août 1951 ; ainsi que ESEM no 419, octobre 1960 (Zitácuaro).
Sur les travaux de la commission du Tepalcatepec, Mernorias de los trabajos realisados por la comision del Tepalcatepec, 1947-1961, Uruapan 1961. Le problème agricole des locations de terres ejidales est présenté par Equihua, L. et autres, El cultivo del algodón en la cuenca del Tepalcatepec, Union de productores de algodón de la República Mexicana, février 1964 ; voir aussi CE, mai 1964, et Gonzalez, A. Problems of agricultural development in a pioneer region of southwestern Coastal Mexico RG, juin 1966.
L’aménagement de l’Infiernillo est présenté dans ESEM, no 424, mars 1961 et no 435, février 1962 ; sur le fer de Las Truchas, près de la Villita, CE de avril 1957, avril 1959, février 1960.
V. — L’agglomération de Mexico. Une des meilleures études est celle de Flores E. El crecimiento de la ciudad de México, IE, vol. 19, no 74, 1959 (reprise curieusement dans le Tratado de Economía Agrícola, cité ci-dessus). Voir aussi le panorama de Beltran, E. El hombre y su ambiente, ensayo sobre el Valle de México, FCE 1958. Nous avions esquissé certains aspects dans Bataillon, G. Mexico capitale metis, Caravelle, no 3, 1964 déjà cité au chapitre 2 de la première partie. L’article de Stevens, R. P. Algunos aspectos de la migración interna y urbanización en México 1950-1960, CRLA, t. 1, p. 65-72, est critiquable pour l’immigration vers la capitale, car il la sépare de sa banlieue. Une série d’articles sont réunis dans : Mesas redondas sobre problemas del Valle de México, Instituto Mexicano de Recursos Naturales Renovables, 1963 ; d’autres dans : CRLA, t. 4, Simposio sobre el valle y la ciudad de México.
Enfin le roman exprime la nouvelle réalité urbaine ; Fuentes, C. La región más transparente FCE, 1958 ; Spota, L. Casi el paraiso, FCE, 1956.
Notes de bas de page
1 Voir fig. 2, en bas.
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