Chapitre V. Essoufflement et adaptation (1571-1578). Les deux fluctuations primaires
p. 527-564
Texte intégral
1Ce cycle d’essoufflement et d’adaptation se place sous le signe — on l’a vu — d’un ralentissement général de l’expansion. Indices des prix et mouvements volumétriques marquent, en effet, un palier, tandis que, sous ce marasme relatif, gonflement du tonnage unitaire et accroissement du mouvement en valeur cheminent.
2Signes, bien souvent, autant que causes, de nombreux facteurs sont apparus. A l’intérieur même du trafic, la décadence des mouvements canarien et antillais, la fatigue du commerce nouvel-espagnol, relayé, bientôt, par celui de la Terre Ferme, encore sous l’impulsion des nouvelles techniques de l’amalgame. Sans compter les facteurs extérieurs : la jeune course anglaise, le raid de Drake et le sac de Panama, les conflits de Méditerranée et des Flandres. Enfin, l’épidémie redoutable de 1576 qui ravage la Nouvelle-Espagne.
3L’énumération, l’analyse, la coordination de ces différents traits n’ont pas, au cours du dernier chapitre, épuisé tous les problèmes et toutes les explications. Mieux qu’une vue d’ensemble, trop immobile, une étude dynamique de ce cycle et des différents moments des deux fluctuations primaires qui l’engendrent, bien séparées par le creux médian de 1575, permettra, peut-être, de comprendre les problèmes, au fur et à mesure qu’ils se posent, d’en mesurer l’exacte portée. C’est l’objet de ce présent chapitre.
I. — LA PREMIÈRE FLUCTUATION PRIMAIRE (1571-1575)
4La réalité de cette première fluctuation primaire ne peut être mise en doute. Pas plus que celle de son creux conjoncturel initial de 1571.
LE CREUX CONJONCTUREL DE 1571
5C’est, évidemment, par une étude attentive du creux initial qu’il faut commencer, puisqu’il conditionne le départ d’une nouvelle fluctuation.
1. Analyse
6L’existence, voire la gravité de l’accident de 1571, tant en chiffres absolus qu’en chiffres relatifs, ne peuvent, on l’a vu1, être niées.
7a. Les départs canariens. — Les caractéristiques deviennent, même, particulièrement astreignantes, si l’on songe à la proportion tout-à-fait insolite des Canaries — même si quelques départs sur le global sont à l’actif de 15722 — 70 navires, 5 600 toneladas, dont 55 navires, au moins, sortent de la Palma, la plus occidentale des sept îles, la plus profondément enfoncée loin du Vieux Monde, en figure de proue, face à l’Océan. Cette particularité renforce le caractère catastrophique du mouvement Allers de l’année. Malgré l’adjonction de cette masse énorme de Canariens, dont la valeur économique, on le sait, n’est en aucun cas comparable à celle des navires du Guadalquivir, ce mouvement Allers — signe de crise grave — est en dessous du mouvement Retours. Mais, si on exclut les Canariens, pour établir les plans de comparaison sur les seuls navires marchands d’Andalousie3, les Allers, avec 20 navires et 5 340 toneladas, ne forment même plus 40 % des Retours (53 navires, 12 617 toneladas), moins d’un tiers d’un mouvement global, dont seuls, les Allers des Canaries seraient exclus4. Cette proportion, à peu près unique, témoigne de l’importance conjoncturelle du phénomène récessif de l’année 1571.
8Tout comme l’importance des départs des Canaries doit être portée, dans ce contexte, à l’actif d’une sémiologie sûre d’un creux de conjoncture majeure. Cette masse canarienne arrive en bouche trou, suppléant à une insuffisance flagrante des départs normaux du Gaudalquivir. Elle aura empêché les Indes de trop souffrir de la carence du trafic de Séville, entièrement sollicitée, au cours de cette année, par l’énorme effort méditerranéen, qui va déboucher, bientôt, sur le prestigieux mais illusoire triomphe de Lépante.
9b. Le découpage annuel. — Le creux de 1571, contrairement à ce que l’on notera, plus tard, pour 1573, par exemple, ne peut être imputé aux hasards du découpage annuel. Les départs entre 1570 et 1572 s’échelonnent d’une manière normale5 : 7 février et fin septembre 1570, fin avril et 10 août 1571, 25 janvier et 23 août 1572. Le creux centré, au départ, sur 1571 est bien réel. Il ne résulte pas de départs anormaux différés ou anticipés, soit à la fin de l’année précédente, soit au début de l’année suivante, ni de l’addition des deux facteurs, comme on l’a déjà observé et comme on l’observera encore.
10c. L’accident sévillan. — L’accident, d’autre part, est purement sévillan et c’est sur la seule représentation6 des départs courants de Séville — évidemment, la plus importante — qu’il faut en mesurer toute l’ampleur : 20 navires, seulement, entre les 42 départs de 1570 et les 50 départs de 1572, 5 340 toneladas en 1571 contre les 12 890 toneladas de 1570 et les 15 408 toneladas de 1572, 40 % seulement de 1570, 34 %, à peine, de 1572. Les globaux ne sont plus, ici, suffisamment sensibles, puisqu’ils additionnent deux réalités contradictoires : un énorme fléchissement andalou, partiellement masqué par un large bombement canarien. Sans que l’une ne puisse, d’ailleurs, être pensée indépendamment de l’autre. C’est pourquoi, l’écart négatif des Allers globaux à la moyenne mobile ne donne du creux véritable qu’une expression atténuée, malgré sa vigueur (le pourcentage des Allers à la moyenne s’élève, en effet, à 64,05 %7). Des écarts calculés dans les mêmes conditions sur le seul mouvement normal de Séville nous amèneraient à une position relative à moins de 40 % seulement de la moyenne.
11Le creux de 1571, ainsi défini, est dû à une défaillance à peu près totale des départs de Terre Ferme8, à laquelle s’ajoute un faible tonus de la Nouvelle-Espagne.
12d. Le rôle de la Terre Ferme. — L’allure du mouvement des départs en direction de la Terre Ferme n’est pas surprenante. On obtient, en effet, par exclusion des Canariens, dans le cadre annuel, un rythme binaire particulièrement caractéristique de toute la période9. Ce n’est guère avant 1576 que l’on parviendra à un système de convois vraiment annuels, en direction de l’isthme, tels que la loi le prévoit. En ce sens, le creux du mouvement Allers en direction de la Terre Ferme (départ de Séville), s’il est, en 1571, mieux accusé que jamais, ou presque, au cours du deuxième demi-seizième siècle, n’est pas paradoxal entre 1571 et 1575.
13Une des modifications les plus importantes, qui oppose la première fluctuation primaire à la seconde du cycle 1571-1578, ne sera-ce pas, précisément, grâce au renforcement absolu et relatif de la participation de la Terre Ferme à l’ensemble du mouvement, l’instauration, au cours de la seconde fluctuation primaire 1575-1578, d’un véritable rythme annuel des départs de Terre Ferme. Il est vraisemblable — la comparaison entre le mouvement avec la Terre Ferme et les départs des Canaries incite à le penser10 — que les grosses poussées du trafic hispano-canarien, qui marquent si vigoureusement la charnière déprimée des deux cycles 1559-1571 et 1572-1578, sont dues, essentiellement, aux besoins insatisfaits de la Terre Ferme, dont on a vu, déjà, qu’elle passait alors par une ère d’extrême dépression.
14e. Le rôle de la Nouvelle Espagne. — Dans ces conditions, le creux relatif des départs en direction de la Nouvelle-Espagne paraîtra plus représentatif, même, de l’accident conjoncturel qui se place dans le tout début de la décade des années 1570. Le creux est sensible, non seulement en 1571 mais, en fait, sur deux ans11 La moyenne des départs Allers, 4 800 toneladas annuelles en 1570-1571, est moitié, à peine, de la moyenne, 9 700 toneladas annuelles des Allers vers la Nouvelle-Espagne, de 1572 à 1575, quelque 7 000 toneladas de 1576 à 1580, encore. De 1564 à 1571, la moyenne du mouvement Allers vers la Nouvelle-Espagne — autre terme de référence — est encore de 5 811 toneladas. 1570-1571 constitue donc un creux particulièrement sensible sur les départs du Guadalquivir en direction de la Nouvelle-Espagne.
15Et c’est, peut-être, dans le creux étalé de la Nouvelle-Espagne que réside l’élément conjoncturel le plus valable : dans la mesure où, entre la seconde fluctuation primaire du cycle précédent et la première fluctuation du cycle suivant, la Nouvelle Espagne a joué, par sa masse, un peu le rôle de trafic dominant12, si l’on veut, de l’Atlantique espagnol. Un fléchissement de la Nouvelle Espagne donne la tonique d’un accident conjoncturel grave. Et si l’on tient compte, comme il se doit, du rythme annuel du trafic de la Nouvelle Espagne13 et du rythme biennal des départs vers la Terre Ferme, c’est bien sur le mouvement de la Nouvelle Espagne et non sur celui de la Terre Ferme, que se situe, au départ d’Espagne, contrairement aux apparences, le creux moteur.
16Le raisonnement qui nous a conduit à chercher la tonique conjoncturelle sur le mouvement des départs en direction de la Nouvelle Espagne oblige à ne pas sous-estimer la belle vigueur de la dépression qui sépare les deux fluctuations. Le mouvement en direction de la Nouvelle Espagne anticipe assez sensiblement, en effet, le repli général des expressions volumétriques globales du trafic. De ce fait, malgré les 92 navires et les 18 164 toneladas des Allers de 1570 (à 102,57 % de la moyenne mobile), il faut considérer que le lâchage y est déjà beaucoup plus qu’amorcé. La faible proportion des départs en direction de la Nouvelle Espagne, cette année, 14 bateaux, 4 664 toneladas, la faible proportion des départs en flotte du Guadalquivir (42 bateaux, 12 890 toneladas) corroborent cette impression14. Elle facilite, d’ailleurs, d’autant plus, la compréhension du creux conjoncturel initial de 1570-1571.
2. Tentative d’explication
17Elle diminue, en effet, d’un an — et c’est appréciable — le décalage chronologique qui sépare la courbe des trafics et celle des prix espagnols.
a. Facteurs économiques
18Les prix. — Les indices compensés des prix espagnols15 se tiennent — on l’a vu16 — en dessous de la moyenne pendant cinq années consécutives, de 1566 à 1570, creux assymétrique, dont la pointe se situe en 1569, avec un écart négatif maximum de plus de 4 %. Il n’est pas choquant de retrouver, en 1571, sur le trafic Allers, Retours et Allers et retours, le creux des prix de 1569. Mais il est plus commode, encore, de le retrouver, étalé sur deux ans, dès 1570, comme une élimination légitime des exigences techniques propres alors, à la navigation en direction de la Terre Ferme, nous incite à le faire. Il existe — et c’est évidemment réconfortant — une similitude profonde de mouvement entre la série des prix espagnols et celle des Allers — et plus même qu’il risque de n’apparaître superficiellement — ces séries étant liées par une causalité sur laquelle on s’est déjà expliqué.
19Les prix n’ont, peut-être, pas joué, ici, un rôle décisif. Il suffit, en effet, pour se convaincre du caractère insolite de ce creux conjoncturel, de suivre attentivement l’équilibre Allers/Retours, au sein du mouvement global. On a été accoutumé à voir les Allers précéder les Retours, aussi bien dans la phase ascendante que dans la phase descendante de la fluctuation. C’est, du moins, l’enchaînement le plus normal, tant que la direction économique du mouvement continue d’être située sur ce rivage de l’Océan. Or, il n’en va pas, ainsi, à la charnière des deux fluctuations.
20Les Retours. — Le mouvement Retours est en reflux — à l’échelle de la fluctuation courte telle qu’on la mesure par rapport à la moyenne mobile de treize ans, du moins17 — depuis la pointe cyclique record des Retours de 1566. Toutes éliminations faites des éléments discutables qui peuvent masquer la réalité conjoncturelle, le reflux des Retours commence au-delà de la pointe secondaire de 1568, passe par un creux, tant absolu que relatif, en 1569 et 1570. Par rapport à un trend exprimé par une moyenne mobile, de treize ans, les Retours sont en contraction pendant quatre années consécutives, de 1569 à 1572. Le creux conjoncturel du mouvement Allers, de 1570 à 1571, répercuté et atténué sur les Allers et retours, paraît commandé, pour l’essentiel, par le creux conjoncturel du mouvement Retours. La concordance est donc parfaite et presque simultanée entre le comportement des prix et celui des seuls Retours. Faudrait-il admettre que les mauvaises perspectives, que permet de présumer l’indice général des prix, aurait découragé les Retours ?
b. Facteurs politico-militaires
21Une explication limitée à l’économie seule n’est pas suffisante, Il faut avoir recours encore à un vaste complexe politico-militaire qu’il serait imprudent de négliger, particulièrement au cours de ces années. N’assiste-t-on pas, en effet, sur quatre ans, à une rétention des Retours, de 1569 à 1572 ? Cette rétention s’exprime dans le déséquilibre des Retours par rapport aux Allers18. Il est impossible que cette défaillance n’ait pas eu, assez rapidement, une action déprimante sur les Allers. A l’inverse, l’exceptionnelle importance des Retours dans la demi-décade 1571-157519 aura eu, sans conteste, une action tonique sur les mouvements Allers et Allers et retours. Toute anomalie se répercute, ainsi, en s’atténuant, suivant un processus déjà décrit20 pendant, parfois, une décade et plus.
22Mais pourquoi cette rétention ? On peut se demander si elle n’est pas tout simplement la conséquence de deux grands événements politiques et militaires qui mettent en cause l’Espagne, au tout premier chef. La guerre des Flandres — de guerre couverte, elle devient guerre ouverte en 1568 — est bientôt relayée par l’effort méditerranéen qu’exigent les préparatifs qui aboutiront à la victoire de Lépante (7 octobre 1571).
23Les événements de Méditerranée. — L’incidence des événements de Méditerranée, plus directe, est plus facile à comprendre. Ses préparatifs, puis la guerre sur mer21, sont pour l’Espagne une rude épreuve. Une épreuve pour l’État, surtout, « puisqu’il en payera la plus grosse part », la moitié, à lui seul, « les frais communs » étant « divisés en six parts (comme en 1537), trois à la charge du Roi d’Espagne, deux à la charge de Venise, la dernière revenant au Saint-Père »22. L’engagement de fournir du blé italien aux coalisés et, nommément, aux Vénitiens, constitue une difficulté supplémentaire. Ce brusque et éphémère refus des possibilités d’importation du bassin oriental porte le risque d’une augmentation des prix. Ce risque, le Roi doit le couvrir à titre onéreux. Mais le Roi, qu’est-il ? Ce n’est pas une entité, certes, indépendante des marchands de la Carrera. N’a-t-il pas coutume, en cas de crise, de prélever sur ce volant, avec une prédilection exceptionnelle.
24Plus spécialement dans ce cas. L’effort d’armement, dont l’Espagne allait porter l’essentiel, aura une incidence directe sur l’armement de l’Atlantique hispano-américain. On sait que la réquisition par le Roi n’est pas pour l’armateur une opération payante. Le Roi est mauvais payeur et le manque à gagner toujours considérable. Conserver quand on est armateur, ses navires aux Indes — plutôt que de les exposer dans le Guadalquivir aux exigences de la grande politique du Roi est un réflexe que la sagesse conseille.
25La guerre des Flandres. — La guerre des Flandres, dès qu’elle est connue aux Indes à la fin de 1568 et de 1569, avait déjà produit un effet analogue. Certes, on ne risquait pas, ici, des réquisitions directes pour une guerre essentiellement terrestre, péniblement ravitaillée, de plus en plus exclusivement par la voie méditerranéenne et après Gênes, les cols des Alpes et les électorats vassaux du Rhin. Mais on a dû sentir, très tôt, à Séville ce qu’il devait en coûter. On ne pouvait, sans doute, dans la Carrera des années 1568-1569, prévoir la longueur et le poids d’une aventure dont on sait la douloureuse issue. On était bien payé, toutefois, pour connaître le prix des très longues campagnes. Et le Flamand, depuis toujours, omniprésent et tout puissant. On pouvait s’attendre à un gros et coûteux effort.
26En pareil cas, les Retours d’argent d’Amérique sont, toujours, une proie tentante... Bien sûr, l’État rembourse... en juros qui font les frais de l’inévitable banqueroute23. C’est ainsi, en gros, qu’on liquida, en 1557, le solde financier de la victoire sur la France. En 1575, on le sait, une opération du même ordre liquidera la première manche douloureuse de l’interminable guerre des Flandres. A Séville, tout laisse à penser qu’on aura vu venir les périls... Loin de les surestimer, on les aura, plutôt, sous-estimés... d’où une bonne parade, mais à court terme : la rétention aussi évidente qu’a priori, paradoxale des Retours, l’accumulation aux Indes d’une masse considérable de navires et de cargaisons, qu’attestent bien les chiffres de la table 15924. Cette parade conditionne la reprise importante, à court terme25, des années 1572-1574.
LA REPRISE
1. Conditions et hésitations
27Un simple coup d’œil sur les expressions les plus synthétiques du mouvement convainc de la réalité d’une reprise qui couvre, au moins, trois ans.
28a. Victoire de Lepante et sac de Panama. — Cette reprise découle presque nécessairement des conditions particulières, partiellement artificielles, entendez exogènes, de la contraction du creux des années 1570-1571.
29L’accumulation insolite des navires aux Indes, trésors et cargaisons, ne peut se prolonger indéfiniment. L’heureuse issue de Lépante — elle ne peut guère être connue en Amérique avant les premiers mois de 1572 — aura contribué à défaire cette accumulation de richesses, que la peur avait constituée aux Indes, dans les dernières années du cycle précédent.
30A ce facteur favorable s’en ajoute un autre, négatif : le grand raid de Drake et le sac de Panama26. Désormais, entre 1572 et 1573, le centre des risques s’est déplacé. Il est, incontestablement, aux Indes, plus spécialement, sur le bord Pacifique de l’isthme. Les ports Amérique ont pu, sous l’action de la double tension européenne, flamande et méditerranéenne, jouer le rôle de havre de grâce, ils n’en auront eu que plus d’attraits pour la course britannique. Or, le havre de grâce, après le sac de Panama, c’est l’Andalousie : Lépante, d’un côté, Panama, de l’autre. Comment hésiter ?
31b. Importance des Retours. — Il n’y a pas, en fait, d’hésitation : les chiffres sont là. C’est en 1573 que se place, avec 71 navires et 17 149 toneladas, le record absolu, à ce jour, du mouvement Retours27 et le record, avant longtemps, compte tenu du seul nombre des navires mis en cause28. Or, il y a, parmi ces Retours, un nombre considérable de navires venant de la Terre Ferme29. Ce brusque gonflement, un peu paradoxal, après la grosse alerte du raid de Drake, doit être interprété, selon toute vraisemblance, comme un réflexe de fuite devant le danger aux Indes. Comment expliquer autrement l’écrasant excédent des Retours, sur les Allers de 1573 à 157530 : 165 navires relevés au départ, représentant 44 741 toneladas, contre 187 navires dénombrés au Retour représentant 54 075 toneladas ? Cette anomalie est, sans conteste, une des plus fortes et des plus surprenantes de toutes celles que l’on pourra observer dans toute l’histoire de la conjoncture Atlantique31.
32c. Montée des prix. — Les prix — à l’intérieur même du système économique de l’Atlantique — peuvent être considérés aussi comme responsables de la reprise.
33De 1571 à 1575, pendant cinq années consécutives32, les indices des prix sont, on l’a vu déjà, sans discontinuer, au-dessus de la moyenne mobile : 1571,1572 et 1573 se tiennent, pratiquement, au même niveau relatif : 102,6 %, 101,9 % et 102,4 %, fléchissement relatif en 1574, avec 100,6 %, puis remontée brutale et chute vertigineuse : 106,2 % en 1575, 95,75 % en 1576 et 93,67 % en 1577, soit un décrochement extraordinaire de près de 10 points (103,71 et 95,65, 94,00 sur les indices les plus généraux eux-mêmes).
34Mais ces indices ne sont que médiocrement influencés par les prix andalous, les plus importants, pourtant, à notre point de vue. Les prix andalous semblent — autant qu’on en puisse juger33 en raison des lacunes de la série — avoir anticipé de deux ans, au moins, voire même de quatre à cinq ans, la marche des autres séries géographiques. La pointe des prix andalous est en 1571, entendez qu’après avoir gêné, peut-être, les départs de l’année même, elle aura contribué à donner l’impetus que la série nouvelle-castillane qui suit à deux ans d’intervalle l’andalouse, aura pu, facilement soutenir. La marche des prix andalous et nouveaux castillans rend plus particulièrement compte — dans le cadre du schéma explicatif provisoire que nous nous sommes cru en droit d’établir — de cette reprise du trafic, dont il importe, désormais, de suivre exactement les respirations.
2. Ampleur et modalités
35a. Ampleur. — Si on s’en tient à la leçon toujours un peu superficielle du découpage annuel, l’amplitude du mouvement positif entre le creux de 1571 et la pointe de 1572 est particulièrement importante. En Allers, par exemple, de 1571 à 1572, on passe de 90 navires à 116 unités, mais surtout, de 10 940 à 26 838 toneladas, soit un bond en avant de 250 %. Le saut est plus impressionnant encore, si on écarte, un moment, le volant canarien, dont on a dit assez combien il jouait, au cours de ces années critiques, un rôle non équivoque de régulateur ou de modérateur d’amplitude. De 20 navires à 50 navires, le progrès unitaire est de 250 % ; de 5 340 toneladas à 15 408 toneladas, en volume, il atteint, pratiquement, 300 %, pour les départs en flotte de Séville et de San Lúcar34, entendez, au départ, l’articulation dominante. Beaucoup plus net encore, si on établit la comparaison, à la seule exclusion des canariens, sur l’axe global du mouvement andalou. Alors que les départs globaux d’Andalousie (Séville, Cádiz, navires marchands et navires d'armada réunis) n’excédaient pas 20 unités, soit 5 340 toneladas en 1571, en 1572, l’ensemble espagnol atteint dans cette définition 74 navires et 23 478 toneladas. Le progrès en tonnage n’est-il pas, alors de l’ordre de près de 450 %. Il y a bien peu, tout au long de l’histoire de la Carrera, de déclenchement de cet ordre.
36C’est, évidemment, sur les Allers que la modification profonde du comportement des mouvemetns se marque le plus vigoureusement. En Retours, par exemple, les progrès très faibles continuent insensiblement depuis 1569, à un rythme ralenti encore entre 1571 et 1572, de 59 unités à 64, de 12 617 toneladas à 13 720 toneladas, les progrès sont à peine de l’ordre de 4 % (moins que le redressement continu de 1569 à 1571, de 1569 à 1570, 9 %, et de 1570 à 1571, 20 %). Le progrès, par contre, est particulièrement sensible, de 1572 à 1573, où l’expansion, de 64 à 71 navires, de 13 120 à 17149 toneladas surtout, est de l’ordre de 37 à 38 %. Répercussion normale et atténuée, un an plus tard, en Allers, du choc de 1572. On ne pourra contester, malgré tout, si on met en parallèle le mouvement Retours et celui des Allers, leur grande indépendance réciproque.
37Entre les deux, les globaux Allers et retours se trouvent dans une situation moyenne, avec un accroissement intermédiaire brusque de 60 %, de 1571 à 1572, le passage de 143 à 180 navires, de 23 557 à 39 958 toneladas est plus proche du comportement des Allers que de celui des Retours, comme c’est le plus souvent le cas.
38b. Modalités. — Mais il convient, en effet, de regarder les choses de plus près.
39Le creux de 1571 est apparu excessif. Il en va de même du bond en avant de 1572. Cette trop brusque poussée emprunte le meilleur de son ressort, en effet, à l’existence, au départ de 1572, de l’énorme convoi destiné à la Terre Ferme qui s’éloignera de San Lúcar, le 23 août 157235, vingt-deux mois après l’armada y flota de Diego Flores de Valdés (fin octobre 1570)36. Le départ des convois en direction de la Terre Ferme ne parvient pas à un rythme annuel avant 1576. Dans ces conditions, on doit hésiter à porter à l’actif de la conjoncture de 1572, la totalité de la masse énorme des 46 navires et des 14 728 toneladas qui vont, dans le second semestre de 1572, d’Espagne en Terre Ferme.
40Deux faits permettent, toutefois, d’affirmer sans ambage une ample reprise à la charnière de 1571 et 1572. Une augmentation de l’ordre de 50 % du volume des départs du complexe andalou en direction de la Terre Ferme, entre 1570 et 1572, compte tenu, cette fois, par conséquent, de la biennalité des convois. De 31 bateaux et 9 630 toneladas, on passe, vingt-deux mois plus tard, à 46 unités et 14 728 toneladas. Ces chiffres, d’ailleurs, extrêmement considérables, ne seront pas dépassés avant longtemps ; il faut attendre, de toute manière, la seconde fluctuation primaire de 1576 à 1578 pour que, compte tenu de l’établissement, à cette époque, d’un système effectif de convois annuels on soit en présence, entre 1576 et 1577, d’un niveau des Allers de Terre Ferme37 sensiblement comparable au niveau 1571-1572 ou 1572-1573.
41Une augmentation plus forte encore du volume des départs espagnols en direction de la Nouvelle Espagne. Ici, plus de doute possible, car le rythme est annuel. De 16 navires, 4 800 toneladas (1570,14 unités et 4 664 toneladas ; 1571,18 unités et 4 920 toneladas) on passe à 28 navires et à près de 9 000 toneladas (1572, 24 navires et 8 270 toneladas ; 1573, 32 et 9 025 ; 1574, 27 et 9 018). Le coefficient d’expansion dépasse, donc, sans hésitation possible, 70 %. Mieux, c’est à la hauteur de 1572, que se situe un changement durable de niveau. La Nouvelle-Espagne, au cours de ces années, on s’en est expliqué(1) joue le rôle d’un trafic dominant. C’est là qu’il faut, de préférence à toute autre direction, chercher, dans sa plus grande pureté, le rythme profond de l’Océan. Toutes corrections faites, la véritable ampleur du déclenchement est de l’ordre, en gros, de 60 % en Allers, de 4 % en Retours, de 35 à 40 % en Allers et retours.
42Que l’on soit en présence d’une modification importante, imputable à la seule conjoncture, puisqu’on s’est efforcé, précisément, d’éliminer tout risque de distorsion systématique, le fait n’est pas douteux. L’importance du trafic de 1572 n’est pas sensible seulement dans les expressions volumétriques du mouvement, mais tout aussi bien en valeur. Il semblerait même que les valeurs se sont, une fois de plus, en conjoncture haute, développées plus vite que les volumes mis en cause.
43Si on compare, en effet, 1572 aux niveaux précédemment records de 1567 et 1569, dont la position conjoncturelle est sensiblement identique, on notera que l’on passe de 969 ou 995 millions de maravedís à 1332 millions en 157238. On peut, au moins, affirmer, en présence de tels chiffres, que le décrochage volumétrique, qui oppose 1571 à 1572, n’aura pas été acquis au prix d’une quelconque poussée de marchandises de moindre valeur, malgré la proportion qui demeure forte des canariens39, sur l’ensemble du mouvement.
44Une fois de plus, il faut bien constater la précision et l’absolue rigueur du parallélisme, prix/trafic. C’est entre 1569 et 1571 et plus particulièrement, entre 1570 et 1571 que les indices des prix argent composés40 passent au-dessus de leur moyenne mobile. C’est donc à cette hauteur qu’il faut localiser le phénomène cyclique le plus important des prix. Ne passe-t-on pas sur la série des prix andalous41 de l’indice 94,77 à l’indice 103,41, soit un progrès absolu de près de 10 % en deux ans. La répercussion sur le trafic, un an plus tard, est tout à fait légitime et attendue. Elle corrobore bien tout ce que nous avons vu, jusqu’à ce jour.
3. Les séquelles de la crise. Problèmes anciens et problèmes nouveaux
45L’installation, toutefois, sur un plancher conjoncturel élevé — sur lequel nous nous expliquerons et qui va de 1572 à 1574 — ne s’est pas faite instantanément ; elle n’aura pas liquidé, tout de suite, non plus, toutes les difficultés.
46Il n’est pas besoin de rappeler, ici, la tension qui, pendant tout le creux du cycle décennal, aura opposé, à propos de la méthode des contrôles42, au cœur même de Séville, les différents groupes du Monopole. 1572 — il suffit de se reporter à la grande lettre rapport de la Casa au Consejo en réponse à la cédule du 19 août de la même année43 clôt un long débat et marque une victoire à la fois définitive et disputée des marchands44. Comment cette histoire, si éclairante des vrais usages des douanes espagnoles des xvie et xviie siècles — elle a été écrite ailleurs — vient-elle s’inscrire dans la conjoncture économique de l’Atlantique ?
47On peut penser que la méthode de contrôle qualitatif fictif et quantitatif réel, favorable aux marchands, a prévalu, entre 1550 et 1560, sur un estilo antiguo, plus mythique, peut-être, que réel. D’autant plus facilement que la contraction des volumes s’accompagnait, avec ses difficultés habituelles, d’une augmentation considérable de la valeur unitaire des produits transportés45. Le premier recul substantiel des produits agricoles et la première substantielle avance de la gamine excessivement bigarrée de la « ropa menuda », entendez le tout venant, l’inclassable, l’invérifiable production manufacturée de l’Europe technicienne, expliquent que l’État ait facilement renoncé à un contrôle effectif sur la marchandise au départ d’Espagne.
48Le nouveau style se sera incrusté, au cours de la première demi-phase longue de contraction, parce que la contraction des volumes des années 50 aura amené les marchands à affermir leurs positions, à pousser leurs avantages contre l’État et une fiscalité para-étatique, parce que la modification de la nature des cargaisons rendait un contrôle qualitatif réel plus difficile que par le passé, parce que l’augmentation particulièrement rapide, on s’en souvient, en cette période de difficultés, de la valeur unitaire des exportations en direction du Nouveau Monde, devait engager l’État assuré du maintien, voire d’une légère augmentation des redevances perçues, à un minimum, d’indulgence.
49La période de prospérité46 du cycle 1560-1571 aura contribué à consolider ces dernières positions. L’adoption ou, du moins, la généralisation du contrôle quantitatif, seul réel, facilitera l’évolution géopolitiquement commandée en dehors de l’État, qui tend à éliminer les produits alimentaires pondéreux, relativement aux normes du grand commerce du monde de l’Ancien Régime. Cette prétendue évolution est, en fait, une vague de fond. L’euphorie économique aura gonflé aussi les sommes perçues au titre de l’ad valorem et, donc, incité l’État à l’acceptation du statu quo récent, entendez l’abandon d’un contrôle qualitatif réel.
50Mais cet équilibre récent, partant instable, sera compromis par le creux cyclique qui va, en gros, de 1568 à 1571. Le fameux rapport, que la Casa adresse au Consejo à la fin de 157247 et qui a tant contribué à la compréhension des mécanismes profonds et secrets du contrôle fiscal, marque la fin d’une assez longue période de crise. Quand la matière imposable se dérobe à la conjoncture, il est naturel que l’État, entendez plus simplement, ici, les almojarifes, ces modestes agents que leurs fonctions placent en contact direct avec la matière imposable, durcissent leurs positions..., imputant au mauvais fonctionnement de la machine fiscale, ce qu’il faut plus simplement attribuer à une dépression passagère du mouvement. On se souvient, alors, de concessions qui, pour n’être plus si récentes, ne sont pas tellement anciennes, de quelque quinze, vingt ans, peut-être. Et ce seront les attaques, les prétentions, qui précèdent la grande lettre rapport de 1572, elles se situent dans le creux conjoncturel et trouvent, finalement, dans la cédule du 19 août 1572, une de ces trop coutumières victoires à la Pyrrhus.
51La cédule du 19 août — c’est bien souvent le cas de tels documents — exprime des vœux qui sont ceux d’une situation déjà en grande partie révolue. La formidable contre-attaque de la Casa emportera la victoire, on s’en souviendra, pour le camp des marchands, asseyant définitivement le triomphe du contrôle qualitatif fictif et quantitatif réel, le plus efficace parce que le plus simple.
52Le Consejo ne répondra pas, et qui ne dit mot, consent. Mais la victoire de la Casa pour les marchands aura été d’autant plus facile — mieux, la résignation des almojarifes et du Consejo, d’autant moins pénible — qu’il y aura eu, en 1572, cette puissante reprise qu’on a vue déjà. Sans qu’il y ait eu besoin de rien modifier aux méthodes jugées, quelques mois avant, déplorables, et pour cause par le fisc, le seul montant, par exemple, de l’avería d’aller perçue en 1572, s’élèvera, avec quelque 1 332 millions, à un record jamais égalé et qui ne sera pas dépassé, et en apparence, seulement, puisqu’en monnaie dévaluée, avant 158248.
53On voit, ainsi, comment cette grande et grave querelle des relations jurées épouse, au moment de crise le plus décisif, les respirations les plus courtes mêmes de la conjoncture des trafics et des prix. Mieux, elle aide à en préciser les articulations et les frontières. Entre la cédule du 19 août, témoin d’un temps où la reprise tarde encore49 et la parade victorieuse de la Casa, il y a le départ triomphal de l’Armada y flota de Diego Flores de Valdés50. C’est elle qui renverse la signification conjoncturelle de l’année. La cédule et la lettre de la Casa précisent, à quelques jours près, en quelque sorte, la date véritable d’une reprise.
54Mais les événements de 1572 ne se bornent pas à subir ou à exprimer les articulations et les fluctuations de la conjoncture, ils agissent sur elles. Et la consolidation du système du contrôle fictif, grâce à l’action de la Casa de la Contratación auprès du Consejo, aura été sans doute un élément favorable à une reprise conjoncturelle. L’euphorie dé Lépante, avec la libération des forces en direction de l’Atlantique que l’événement ne pouvait manquer de signifier, à plus ou moins long terme, aura été, aussi, un facteur conjoncturel important.
55Le départ, fin août 1572, était excellent. Le temps n’allait pas, toutefois, se maintenir longtemps au beau fixe et des signes porteurs d’angoisse viendront, à n’en pas douter, compromettre rapidement les belles perspectives du tout début d’un cycle, qui ne tiendra qu’imparfaitement ses promesses des premiers jours : la grande attaque de Drake sur la côte Pacifique, qui se fera sentir en Allers, quand elle sera connue, en 1573 ; la poursuite d’une guerre longue et coûteuse en Flandre, qui aura, entre autres et dans l’immédiat, la très fâcheuse conséquence de rendre difficiles quelques approvisionnements en matières clefs pour la construction navale51, notamment, la jarcia, la fibre à gréément qui vient traditionnellement du Nord par le canal indispensable du cabotage flamand. Ce contexte établi, on comprend que la prospérité de 1572 tourne relativement court.
LE PALIER CYCLIQUE (1572-1574)
56Les chiffres records, mais un peu en trompe l’œil, de 1572, sont absolument indissociables de ceux des années suivantes, 1573 et 1574. Il faut interpréter ces trois années comme une plateforme de trafic élevé, comparativement aux creux cycliques de 1571 et de 1575, mais d’un dynamisme médiocre, si on les replace dans l’ensemble de la seconde demi-phase longue d’expansion du siècle.
1. Le faux creux de 1573
57a. Allers et Allers et retours. — A s’en tenir à une observation superficielle des faits, il faudrait considérer 1573, comme un creux profondément dessiné entre les deux pointes de 1572 et de 1574. C’est vrai sur les Allers, c’est vrai encore sur les Allers et retours..., et les Allers donnent le ton à l’ensemble du mouvement, comme il est normal. Si on se cantonne au seul découpage annuel, le mouvement Allers de 1573 est à peine supérieur à celui de 1571 : 11405 toneladas contre 10 940, quelque 5 % de différence seulement et très inférieur sur l’expression unitaire du mouvement : 49 navires au lieu de 90. Il est même légèrement en dessous du mouvement de 1545 (11 740 tonelalas) qui ne compte, il est vrai, que 35 unités. Les 11405 toneladas de 1573 sont, a fortiori, en contrebas par rapport aux 12 185 toneladas de 1578, à plus forte raison encore, si on accepte notre grille de pondération52 et si on a recours au mouvement en unités pondérées. Le fait de retrouver, bien que très atténuée, la même concavité en Allers et retours, à la hauteur de 1573, ne permet pas de trancher d’une manière définitive (120 bateaux, 28 553 toneladas, le niveau de 1573 est plus proche des creux incontestables de 1571, 1575 et 1578, que des pointes de 1572 et 1574 qui l’encadrent).
58b. Les Retours. — Une analyse attentive permettra, tout au contraire, de ramener à sa juste proportion l’incident de 1573.
59La poussée des Retours est un premier fait non négligeable. 1573 marque, avec 1577 (le mouvement de 1577 n’est pas sans présenter quelques analogies décisives avec celui de 1573), le point le plus haut atteint par les Retours : 60,06 % du mouvement global annuel. C’est, d’ailleurs et de loin, le record de la fluctuation. Or, il faudra noter, dans ces forts Retours qui correspondent aux Allers anormaux de 1572, la proportion tout à fait remarquable de la Terre Ferme. Certes, les chiffres des Retours de Terre Ferme, tels qu’ils sont donnés dans la colonne correspondante de la table 16953, n’englobent pas toute la réalité : la rubrique îles — on s’en est déjà expliqué — comprend nombre de navires venant du continent, qui ont, par cabotage, complété leurs cargaisons dans les ports des Antilles, toujours mieux pourvus, grâce aux cuirs, en fret pondéreux de Retour. Mais cette particularité ne retire pas sa valeur aux comparaisons que l’on peut faire à l’intérieur du mouvement des Retours de Terre Ferme.
60L’énorme poussée des Retours de 1573, 71 navires contre 64, 17 149 toneladas contre 13 120 toneladas, soit un progrès de plus de 25 %, est à peu près uniquement le fait des Retours de Terre Ferme. Le chiffre des Retours de Terre Ferme en 1573 est un chiffre record (18 bateaux, 5 478 toneladas), pendant tout le creux du mouvement Retours, il n’est pas dépassé avant l’extrême fin de la fluctuation, 1578 et au-delà de 1580. Cette constatation est d’autant plus valable que le rythme bi-annuel des Allers en direction de la Terre Ferme ne se retrouve plus sur les Retours de même provenance. Certes, les Retours de Terre Ferme en 1573 reproduisent, en partie, les Allers de l’année précédente... en les amortissant. Bel exemple, entre beaucoup, de la conservation et de l’amortissement des chocs.
61Mais il y a autre chose : très vraisemblablement, on l’a déjà pressenti..., on doit voir dans cette brutale poussée, un effet du raid de Drake sur l’isthme et du climat d’insécurité qu’il a, ainsi, provoqué. On fuit, on a fui, à l’isthme surtout, la zone d’insécurité — insécurité psychologique — que le raid dévastateur sur Panama a engendrée54. Malgré le danger que crée, en Europe, pour les trésors, au Retour, les énormes besoins d’argent de la guerre des Flandres, Drake aura eu le mérite — indirectement et involontairement — en vidant le grenier de tonnage que la peur des besoins du roi en Flandre avait constitué en Amérique, d’entretenir un élan que l’insécurité de sa présence tendait, de son côté, à freiner gravement.
62S’il y a maintien d’une conjoncture haute — quand même — si le tassement, à l’Aller, après 1572, n’est pas plus accusé, c’est, sans doute, grâce à un niveau extraordinairement élevé des Retours : 177 navires, 44 075 toneladas, de 1573 à 1575, contre 165 navires et 44 741 toneladas55 à l’Aller, pendant le même temps. La brusque prise de conscience de l’insécurité des eaux américaines n’aura pas été étrangère au renversement de la tendance à l’accumulation aux Indes dénoncée à la fin du cycle précédent56.
2. La vraie nature du creux de 1573
63Quelques-unes des raisons, qui ont incité à ne pas prendre entièrement au pied de la lettre les chiffres de 1572, incitent à considérer, avec un œil plus critique, aussi, les chiffres de 1573.
64a. Canaries. — La disparition des Canaries est un facteur sérieux, 70 canariens en 1571, 5 600 toneladas, à l’Aller, 42 navires et 3 360 toneladas encore en 1572,6 navires seulement en 1573 et 480 toneladas, 21 navires et 1 680 toneladas en 1574, puis, plus rien, pendant trois ans, de 1575 à 1577... Le trafic débouche en 1573 sur un grand vide canarien qu’on ne peut imputer à un caprice documentaire. Ce vide est réel, même s’il est moins total que les séries ne le laisseraient à penser : il exprime une tension au sein du complexe ; cette tension, qui se marque par l’exclusion officielle, du moins, des Canariens des Indes, est la conséquence du ralentissement de la pente ascensionnelle du trafic dénoncée ailleurs57. Les ports andalous, une fois libérés, de l’effort que Lépante leur avait demandé en direction de la Méditerranée — cet effort qui, en provoquant un vide dans le tonnage disponible dans le Guadalquivir, avait disposé Séville à une indulgence forcée à l’égard de son concurrent canarien — anxieux d’une reprise qui ne donne pas tout ce qu’on aurait pu en attendre, ont obtenu que la concurrence redoutable et redoutée de l’archipel leur soit provisoirement épargnée.
65De cette situation, il découle que le creux des Allers est déjà sensiblement atténué, quand on l’observe, seulement, sur les séries représentatives des seuls départs andalous58. Par exemple, si on se borne à la seule série-clef des départs des navires marchands du Guadalquivir, la chute est sensiblement atténuée : les 11405 toneladas de 1573 ne sont plus qu’à 42 % des 26 838 toneladas de 1572, mais les 8 650 toneladas des navires marchands de Séville en 1573, représentent 56 % des 15 408 toneladas de 1572. La position de 1573, si on ajoute aux départs marchands de Séville les départs caditains, considérant ainsi l’ensemble marchand andalou, est en soi sensiblement améliorée, relativement à 1572. La prise en compte des armadas la ferait, par contre, légèrement rétrograder. Quoiqu’il en soit, un recul de l’ordre de 40 à 50 % sur la branche Allers, donc dynamique, du mouvement, n’en demeure pas moins un accident sérieux59.
66b. Terre Ferme. — C’est pourquoi l’argument décisif est ailleurs..., dans le rythme encore biennal des convois de Terre Ferme. Il ne l’est plus pour longtemps, puisque, dès la seconde fluctuation primaire du cycle de 1576 à 1578, les convois de la Terre Ferme au même titre que ceux de Nouvelle Espagne, sont désormais, effectivement — comme ils l’étaient déjà, légalement — annuels. Or, l’effondrement du mouvement en 1573 est dû, tout simplement, au maintien de cette biennalité : 4 navires connus comme allant en Terre Ferme (980 toneladas) contre 46 (14 728 toneladas) en 1572 et 29 (10 178 toneladas) en 1574. Le creux de 1573 est intégralement défini par cette situation. L’énorme convoi de Diego Flores de Valdés a quitté le Guadalquivir, le 23 août 157260..., le prochain départ, celui des galions de Pedro Menéndez de Avilés, se situe, dix-sept mois seulement, après, mais à la fin janvier 1574, tout de même... La flotte régulière de Don Alonso Manrique de Lara61, il est vrai, part, tard dans l’année, entre le 7 et le 19 octobre 157462. Ce creux est normal et le départ en janvier de Flores de Valdés en réduit d’autant la signification.
67c. Nouvelle Espagne. — On peut invoquer, d’une tout autre manière, en faveur de l’atténuation du creux apparent de 1573, le mouvement en direction de la Nouvelle Espagne. On s’est expliqué déjà63 sur son rôle particulier et tout à fait provisoire, de trafic dominant. Or, il y a progrès encore, de 1572 à 1573, sur la ligne des départs en direction de la Nouvelle Espagne : de 24 navires, on passe à 32 navires, de 8 270 à 9 025 toneladas. Ce chiffre de 1573 constitue un record pour toute la fluctuation courte, 1571-1575. Il y a progrès, il est vrai, de médiocre importance et de piètre signification, sur les Allers en direction des îles, de 4 à 7 navires, de 480 à 920 toneladas.
68Quoiqu’il en soit, la tenue et l’accroissement des départs en Nouvelle Espagne dont l’espace joue, jusqu’à l’extension des techniques de l’amalgame au Pérou, le rôle en Amérique d’économie dominante, interdit de considérer 1573 comme une zone déprimée. Voilà un cas où il convient d’être bien en garde contre les illusions d’un découpage annuel64.
69En fait, 1573 constitue, avec 1574, le palier tout au plus très légèrement descendant d’un sommet cyclique dont le dernier semestre de 1572 constitue l’arête. La leçon du mouvement coïncidera, une fois de plus, avec celle des prix espagnols et andalous, tels que Hamilton les a établis.
3. Le palier légèrement descendant des années 1573-1574
70Deux facteurs, issus du même événement et pourtant contradictoires, expliqueront le caractère assez alourdi du palier cyclique 1573-1574. L’événement, c’est encore l’attaque de Drake sur Panama. Connu en Espagne, au début de 1573, il exercera sur les départs de 1573 un effet déprimant, passager mais puissant. Il aura vraisemblablement contribué, quelle que soit la réalité du rythme biennal des flottes, à tuer, cette année, toute velléité de départ pour la Terre Ferme. La biennalité est toute proche de céder le pas à l’annualité... On peut hésiter sur la date du transfert : 1574 ou 1576 ? Elle est, de toute façon, imminente. Peut-être la ligne de démarcation serait-elle passée, un ou trois ans plus tôt, si le sac de Panama n’avait eu, sur les perspectives du négoce en direction de la Terre Ferme, l’influence déprimante qu’il est facile d’imaginer.
71Mais le coup de 1573 est responsable — en partie — des Retours excessifs de cette année sur lesquels on s’est déjà expliqué. Or, ces Retours ne manqueront pas de réamorcer la pompe, ou, plus exactement, de maintenir les Allers et notamment, ceux de Terre Ferme, à un niveau élevé. A ce facteur favorable s’ajoute la victoire, grâce à la Casa, du contrôle fictif, paradoxalement, le plus efficace. Les chiffres de 1574 en sont fortement influencés.
72Ces chiffres ne doivent pas plus faire illusion par leur masse que ceux de 1573 ne devaient impressionner par leur relative faiblesse. Si on prend, une fois de plus, les données au pied de la lettre, sans critique, à l’intérieur du découpage annuel, le mouvement de l’année 1574 apparaîtra en progrès sensibles sur 1573. Le volume des Retours65, certes, décroît, de 71 à 52 unités, de 17 149 à 12 430 toneladas, par contre, la remontée, de près de 100 % des Allers, de 35 à 62 navires, de 11 740 à 21049 toneladas compense, et au-delà, ce recul sur les globaux. Ne passe-t-on pas, en effet, de 120 à 133 unités, de 28 553 à 34 026 toneladas ? Ce chiffre très élevé n’est que de 13 à 14 % inférieur au record atteint, mais on sait comment, en 1572.
73En réalité, ü serait imprudent d’interpréter ces données comme constituant une nette reprise, après un creux de 1573 qui n’existe pas. 1574 a vu, il est vrai, une certaine récurrence des canariens : 21 navires, 1680 toneladas, c’est peu, mais beaucoup, si on les compare au silence à peu près total du commerce officiel de l’archipel dans les quinze ans qui viennent.
74Sur l’expression des seuls navires marchands du Guadalquivir, 1574 avec 48 navires et 14 208 toneladas66 est à 8 % près au niveau de 1572... Le mouvement Allers est, donc, au cours de cette année, grâce au recul sensible des armadas, des caditains et surtout, des canariens, par rapport à l’élément le plus lourd, les navires marchands partant en convois du Guadalquivir, très considérable. L’avería perçue à l’Aller le prouve67. Elle représente une valeur d’au moins 1009 millions 1/3 ; moins, certes, qu’en cette exceptionnelle année record de 1572, mais presque exactement autant (1009 millions de maravedís) qu’en 1576, pour un volume global des départs, très exactement identique68. Par rapport à l’année 1576, date de l’expansion cyclique maximale de la seconde fluctuation primaire du cycle, 1574 présente même une certaine présomption de plus grande valeur unitaire des marchandises exportées.
75Mais s’en tenir à ces seules données constituerait une erreur. 1574 est indissociable, en effet, du creux en partie accidentel de 1573, dans l’exacte mesure où — on l’a dit — les départs de 1573 ont été, certainement, en partie inhibés par le raid dévastateur de Drake sur Panama. Les galions de Pedro Menéndez de Avilés, qui partent à la fin janvier69 sous le commandement de Diego Flores de Valdes, peuvent être attribués, par exemple, au potentiel de l’année 1573, soit 3 700 toneladas, au départ et 2 700 toneladas encore à l’arrivée aux Indes, compte tenu de la perte d’un géant de 1 000 tonneaux. Ainsi, le dénivellement disparaît, dès que l’on fait entrer en ligne de compte la biennalité du mouvement vers la Terre Ferme, tant de fois déjà, dénoncée comme élément perturbant au départ.
761574-1575 forme, dans ce domaine, une frontière qu’il faut préférer à la coupure possible au-delà de 157670. Mais la biennalité dure bien jusqu’en 1574. Il est possible que la rétention des départs, consécutive au raid de Drake, l’ait prolongée un peu au-delà de son terme naturel. Les 29 unités et les 10 178 toneladas destinés à la Terre Ferme en 1574 sont donc bien indissociables du creux de 1573.
77Or, une fois les départs pour la Terre Ferme ventilés sur deux ans, 1574 et 1573 allèguent des niveaux sensiblement analogues. Avec la ventilation la plus simple (16 004 toneladas aux Allers de 1573 contre 16 997 à ceux de 1574), les niveaux s’égalisent, au départ. Mais sur les mouvements globaux, Allers et retours, grâce à la masse énorme des Retours de Terre Ferme de 1573, 1573 prend vigoureusement le pas sur 1574 : 33 153 toneladas contre 29 427.
78Et c’est autour de ces chiffres qu’il faut chercher, sans doute, une conjoncture épurée de la mer et de la guerre..., un économique seul ou presque. Au lieu d’un mouvement en dents de scie, on est donc en présence, après le creux des années 1569-1571, d’une belle montée (1572), consolidée par un palier légèrement en retrait et légèrement descendant de 1573 à 1574. Ce palier haut, encore que glissant, ne sera pas de longue durée. Il se termine par une brusque et irréductible chute de potentiel : c’est le creux médian de 1575.
LE CREUX CONJONCTUREL MÉDIAN DE 1575
79Il ne sera pas possible, par contre, de contester, l’objective réalité du creux de 1575. Ne sommes-nous pas en présence, ici, d’un nombre considérable d’indices concordants ?
1. Analyse
80La dépression est très nette sur les séries globales du mouvement71. En Allers, par exemple, 35 navires seulement — le chiffre le plus faible de 1556 à 1587 — et 11 740 toneladas, un peu plus que 1571, moins que 1578, à peu près autant que le creux accidentel, on l’a vu, de 1573. En Allers et retours, 89 navires, 26 236 toneladas, le creux, un peu moins accusé que les deux creux frontières de la fluctuation en gros décennale, reste le plus vigoureux à l’intérieur de la fluctuation. Les Retours, seuls, se désolidarisent, ici, de l’ensemble du mouvement dépressif72. Que la reprise des Retours précède d’un an, une fois encore, celle des Allers... rien de surprenant, cette situation exprime, finalement, quelques-unes de ces graves perturbations qui marquent cette période d’accommodement et d’adaptation. Le creux médian de 1575 n’en est que plus réel, dans la mesure, précisément, où il n’est bien marqué que sur les seuls Allers... et par voie de conséquence, sur les Allers et retours.
81Les canariens, désormais, ont, pour un long temps, officiellement disparu du mouvement au départ73. Cette disparition ne peut être portée à l’actif d’un accident de conjoncture courte, sinon à un mouvement d’une assez longue durée. On ne peut donc, raisonnablement, faire intervenir cet effacement, pour atténuer, en conjoncture courte, la portée du creux médian de 1575.
82Ce creux sensible, n’implique pas, loin de là, une débandade. En valeur74, en effet, selon la leçon peu suspecte, sur une aussi courte période, de l’avería du mouvement Allers, le creux de la vague est médiocre, inférieur à 30 %, 715 millions 3/4 de maravedís, contre les 1 009 1/3 de 1574 et les 1 009 millions de 1576. Le creux volumétrique a donc été, en partie, compensé par un alourdissement passager de la valeur unitaire du mouvement au départ75. Et c’est pourquoi, le creux de 1575, malgré son importance, n’est quand même qu’un accident conjoncturel intracyclique, qu’on ne peut égaler aux grands accidents bordant, au début et à la fin, les frontières de la fluctuation.
83Mais ce sont, surtout, les ventilations régionales des différents mouvements qui rendent compte de l’importance exceptionnelle du creux de 1575. Bien sûr, la tonique du creux est donnée, d’abord, par l’effacement de la Terre Ferme, presque logique, entre les niveaux élevés de 1574 et de 157676. Ce creux paraît, pourtant, cette fois, presque plus imputable à un fait de conjoncture économique qu’à une cause technique : la biennalité en l’occurrence des convois, en cours de résorption.
84Le creux des Allers de Terre Ferme (niveau inférieur de 25 % aux niveaux correspondants des années encadrantes) ne paraîtra pas suspect. Un convoi — une armada77 — sous le commandement d’Alvaro de Flores, met le cap sur l’isthme de Terre Ferme, à la mi-juin. Ouvert à tous, il aurait, pourtant, les observateurs peu suspects de la Casa de la Contratación en témoignent, suscité peu d’enthousiasme de la part des marchands78. Or, ce peu d’enthousiasme, cet absence d’écho, qu’est-ce sinon la meilleure expression psychologique d’un fait de conjoncture ? La présence, encore qu’à une échelle réduite, d’une rubrique Terre Ferme, au départ, permet d’attribuer au creux de 1575 une prééminence valable sur le creux de 1573... le plaçant presque à égalité avec celui, initial, de 1571. Le comportement, à l’Aller, de la Nouvelle Espagne et des îles est presque aussi significatif, à tous égards.
85Pour la première fois, depuis 1570, le volume des Allers en Nouvelle Espagne recule sensiblement entre 1574 et 1575. Avec 32 navires et 9 025 toneladas en 1573, 27 navires et 9 018 toneladas en 1574, le mouvement en direction de la Nouvelle Espagne a plafonné sur deux ans. En 1575 et pour la première fois depuis 1569-1570, on assiste, sur les départs pour la Nouvelle Espagne, à un décrochement appréciable, de l’ordre presque de 10 %79. Il ne peut être mis en relation avec le déclenchement des grandes épidémies80 qui ravagent la Nouvelle Espagne, dans la deuxième demi-décade des années 70. La chronologie ne s’y prête pas : les effets économiques de l’épidémie et de la prodigieuse chute de population indienne qui en découle, anticiperaient la maladie elle-même dont les premiers symptômes sont de la fin 1575 ou du début 1576. De plus, un phénomène démographique d’une telle ampleur81 n’intervient pas en conjoncture courte, mais en conjoncture de plus longue durée, sinon en structure.
86Aussi, le fléchissement des Allers en Nouvelle Espagne82 — il est d’autant plus révélateur qu’il n’aura pu être influencé par une quelconque interférence de gros besoins en tonnage, en capitaux, en marchandises de la Terre Ferme — doit être, vraisemblablement, imputé, pour l’essentiel, à des facteurs dépressifs internes, au commerce et à l’espace géographique andalou.
2. Essai d’explication
87Deux ordres de causes ont pu intervenir.
88a. Les prix. — On peut en chercher un — mais avec beaucoup de prudence — dans les prix, car sur ce point précis, les séries les plus importantes des prix andalous ne sont pas complètes. Les prix andalous, selon l’interprétation de Hamilton83, décrochés entre 1571 et 1572, sont sur une pente descendante, très en contrebas et dont le creux se situerait en 1576.
89Mais en est-il bien ainsi ?
90Il faudrait que les prix andalous fissent preuve, en l’occurrence, d’une indépendance absolue à l’égard des séries géographiques voisines, des séries Valencienne, ce qui porte peu à conséquence, mais ce qui est plus grave, par contre, à l’égard des séries vieille-castillane-léonaise et nouvelle-castillane. Or, toutes ces séries accusent, en 1575, les marques de la crise cyclique, à tel point que les indices composés en portent témoignage, avec un écart positif à la moyenne extrêmement considérable de 106,192 %84. En fait, on l’a vu déjà à plusieurs reprises, cette pointe passagère a pu avoir, à court terme, un effet dépressif85, en rendant difficile au négoce la mobilisation des produits exportables, donc, en provoquant l’exclusion, pratiquement, des produits agricoles.
91Une comparaison entre chiffres des volumes et chiffres des valeurs86 peut servir d’argument en faveur de cette hypothèse. Les valeurs, on l’a vu, ne répondent à un recul de plus de 50 % des volumes que par un fléchissement de l’ordre de moins de 30 %87. Semblable distorsion n’a pu se produire que par une ventilation particulière des marchandises, un recul du pondéreux agricole espagnol au détriment du manufacturé espagnol et non-espagnol cher. Tout cela, il faut bien le confesser, ne repose que sur des présomptions assez faibles, dans l’ignorance où l’on se trouve du comportement précis des prix andalous, cette année.
92b. La faillite. — En fait, on n’a pas besoin des prix andalous pour comprendre l’accident du creux médian de 1575. Il est une conséquence plus ou moins lointaine de l’effort exorbitant exigé par la guerre des Flandres. 157588, comme 155789 est une année de banqueroute qui porte, surtout, sur la dette à court terme. La grande faillite dé 1557 — on l’a vu — s’était répercutée amplement déjà sur le mouvement. Celle de 1575 aura eu, finalement, des effets analogues, mais plus réduits. Il semble certain, en effet, que les cargadores sévillans étaient contraints de prendre des juros... C’est le cas, souvent, à l’arrivée, quand tout ou partie des retours d’argent sont saisis et convertis, d’autorité, en titres de rentes. La faillite se produit, d’une manière presque automatique, à intervalles réguliers, environ tous les vingt ans, comme l’a bien mis en valeur Fernand Braudel. Les marchands sont, directement et indirectement, impliqués dans l’affaire. La crise de la banqueroute a souvent sur la Carrera des effets multiples, pas toujours immédiats. Elle agit plus encore sur le trafic, avant qu’après... avant, quand l’État est aux abois, il arrive qu’on n’ose plus procéder aux indispensables envois d’argent... c’est alors que la crainte de l’embargo sur les trésors provoquent ces rétentions des Retours, la constitution de ces nœuds de navires aux Indes dont les effets ont été particulièrement évidents dans les dernières années du cycle 1559-157190. Les effets dépressifs d’un allongement des temps de crédit, le ralentissement du rythme de rotation des capitaux engagés dans le négoce, la pénurie de tonnage, que l’accumulation des navires aux Indes engendre dans le Guadalquivir, sont particulièrement sensibles, un peu avant le dénouement logique..., la banqueroute, le reniement des créances.
93Les effets dépressifs du processus de la banqueroute qui vient — impact sur le grand négoce transatlantique du poids démesuré de l’État et de son impérialisme tentaculaire — ont été particulièrement sensibles entre 1568 et 1571..., effacés, un moment, par l’euphorie de Lépante et la relaxation de l’effort en Méditerranée, ils entrent, à nouveau, en ligne de compte en 1573 et 1574. Ils auront contribué, selon toute vraisemblance, à donner au palier 1572-1574 son aspect en pente inclinée91 que le seul comportement des prix eût été, à lui seul, incapable d’expliquer.
94La banqueroute, qui, en 1575, éponge la dette à court terme, aura été un des facteurs décisifs responsables, cette année, du creux profond du trafic Allers. Il est impossible que les porteurs de juros — il y en avait, et pour cause, parmi les cargadores — n’en ait pas été affecté. D’autant plus que le juro joue un peu le rôle de monnaie fiduciaire et sert, sinon directement, de monnaie, du moins indirectement, comme couverture de crédit. Effet dépressif, violent, sur le coup, mais sans lendemain, dans la mesure où, précisément, le juro était considéré, déjà, comme une valeur morte.
95Plus l’opération est attendue, plus elle est redoutée, plus elle aura eu un effet d’inhibition, avant, plus elle risque, dans un avenir très proche, d’avoir les effets juste opposés. En réalité, la part énorme des Retours dans la seconde fluctuation primaire du cycle — on s’en expliquera ultérieurement92 — est une conséquence de l’euphorie qui suit la catastrophe de 1575. Les risques de confiscation ne sont-ils pas moindres aussitôt après la jetée de lest de la dette par le trésor ? Mais le niveau exceptionnellement élevé des Retours aura, assez rapidement, un effet sur les Allers et les globaux Allers et retours..., même si, a priori, la conjoncture des prix ne peut être considérée, d’entrée de jeu, comme favorable.
II. — LA SECONDE FLUCTUATION PRIMAIRE (1575-1578)
96Une seconde fluctuation primaire, dont on précisera le dessin extrêmement net, s’étend sur trois ans, du creux de 1575 à celui de 1578.
CAUSES. FORMES. MODALITÉS
97Il importe, tout d’abord, de l’étudier dans son ensemble.
1. Causes
98La fin de la récession engendrée par la crainte de la banqueroute sur la dette à court terme devait amener, par simple compensation, un ressaut en avant... force d’expansion, dans l’exacte mesure où elle avait, précédemment, été force de contraction. Ce facteur expansif se sera manifesté à brève échéance : il est responsable du comportement du mouvement en 1576. Les Retours, déjà considérables, de 1575 auront eu, en outre, un effet décisif sur les Allers de 1576.
99Tels sont, essentiellement, les facteurs qui ont commandé le départ d’une nouvelle fluctuation.
2. Formes et modalités
100Cette fluctuation très particulière, bâtie sur une phase comte d’expansion et une période double de contraction, nécessite une compréhension en profondeur qu’on dégagera d’une analyse suffisamment précise du mouvement sous ses diverses formes.
101On sera, d’abord, frappé par la vigueur et la régularité de la fluctuation.
102a. Creux et pentes. — Les creux sont bien marqués : 1575 et 1578, en Allers, avec 35 navires et 11 740 toneladas d’une part, 50 navires, 12 185 toneladas d’autre part, ne forment, respectivement, que 55 et 60 % du point d’expansion cyclique maximale de 1576, avec 62 navires et 21 049 toneladas. Par rapport à la moyenne mobile de treize ans, 1575 et 1578 sont à 69,9 % et 71,312 % contre 129,97 %, position de 1576 au centre.
103Le schéma s’applique pour les globaux Allers et retours, bien que l’amplitude de la fluctuation soit, comme il est logique, atténuée. Le creux de 1575 (89 navires, 26 236 toneladas) en Allers et retours, n’est pas, pourtant, à plus de 70 % de la pointe de l’année suivante (114 navires, 36 119 toneladas en 1576), et la situation du creux de 1578 est du même ordre, par rapport à la pointe de deux ans antérieure, un peu plus accusée, même en tonnage, du moins, que le creux de 1578, qui ne représente plus que les deux tiers du point haut de 1576, avec 95 navires et 24 375 toneladas, au lieu de 114 unités et 36 119 toneladas.
104Les pentes des deux mouvements sont régulières et également dissymétriques. De 1575 à 1576, on note un saut en avant très net, de près du simple au double93, même en Allers, si on fait entrer en ligne de compte l’hypothétique pondération pour parer à la variation de la tonelada et des méthodes d’arqueamiento. Pour atteindre le creux, d’ailleurs, assez sensiblement moins marqué de 1578, les Allers descendent régulièrement sur deux ans, d’une manière inégale, le plus gros de la descente est parcouru entre 1576 et 1577. En Allers et retours, les conditions sont analogues : même dissymétrie entre un ressaut d’un an à l’expansion et un plan incliné sur deux ans à la contraction. La pente, toutefois, n’est plus dessinée de la même manière : la chute, de 1577 à 1578, est plus forte qu’elle ne l’est entre 1576 et 1577.
105b. Spécificité des Retours. Rapport Allers Retours. — Les Retours témoignent, par contre, à l’égard du reste du mouvement, d’une grande indépendance : le creux initial n’est plus ici, en 1575, mais un an plus tôt, en 1574 ; la fluctuation se déroule, donc, non plus sur trois ans, mais sur quatre ans. La dissymétrie est exactement inverse, puisque le point haut du mouvement se situe en 1577. On a donc une pente ascendante lente, étalée sur trois années, de 1574 à 1577, qui fait passer le mouvement des Retours de 52 navires à 61 unités, de 12 430 à 17 359 toneladas, soit une expansion de l’ordre de 39 % ; montée en deux temps, avec, au centre, un quasi plateau, à la hauteur de 1575 et de 1576. La contraction est un peu plus prononcée : ne passe-t-on pas de 17 359 toneladas et 61 navires en 1577 à 45 navires et 12 190 toneladas, soit un point très légèrement inférieur au creux initial ?
106Retrouver en 1577 une pointe des Allers de 1576 (Allers de 1576 :21049 toneladas ; Retours de 1577 : 17 359 toneladas) ne doit pas surprendre et il n’y a rien de remarquable dans cette spécificité de l’allure des Retours. Le rapport des volumes respectifs des Allers et des Retours, par contre, est significatif. On notera l’importance tout à fait exceptionnelle des Retours de 1576 à 1578, par exemple : 44 619 toneladas contre 47 699 toneladas en Allers. Cette différence est insolite par son insignifiance même... Beaucoup plus insolite encore, l’égalité des Allers et des Retours, si on incorpore à la fluctuation le creux initial de 1575 : 59 430 et 59 115 toneladas, pour les quatre années. Il y a donc un très important gonflement des Retours à la fin de la fluctuation décennale 1571-1578, comme à la fin de la fluctuation majeure précédente 1559-1571.
107Dans une période comme celle-ci, où la direction du trafic est assumée d’Espagne, il faut interpréter semblable donnée, l’anomalie positive des Retours, comme le signe d’un rapatriement important de capitaux, en fait, comme une rétractation majeure du dispositif. C’est donc un signe de contraction sûr. Il implique, que, relativement à l’ensemble du mouvement94, cette fin de fluctuation doit être considérée comme globalement déprimée.
108c. Mouvement dépressif.
109Dépression. — Rapport Aller/Retour, chiffres absolus et relatifs, conduisent à penser que ces années 1575-1578 de la deuxième fluctuation primaire du cycle sont des années de dépression. Cette situation concorde bien avec ce qu’on pouvait entrevoir, par ailleurs, du comportement des prix. 1576, 1577, 1578 se placent, en effet, sur un creux très accusé des prix espagnols95. Les pourcentages d’écarts à la moyenne96 des indices des prix espagnols composés le prouvent : 1575, position relative 106,192 % ; 1576, 95,77 % ; 1577, 93,07 % ; 1578, 95,93 % ; 1579, 104,87 % ; 1580, 99,15 % ; 1581, 99,33 %.
110Covariation positive des trafics et des prix. — Si on considère — et il est difficile de faire autrement — que, prise dans son ensemble, la seconde fluctuation primaire du cycle 1575-1578 délimite une zone déprimée des mouvements volumétriques, il faut bien reconnaître que cette dépression concorde parfaitement avec le phénomène analogue dont on vient de tracer les contours sur les prix. La covariation positive prix-trafic existe, mais elle est limitée à l’échelon relativement large d’un laps de trois à quatre ans, la durée, au vrai, de la fluctuation primaire. Le tassement des prix aura entraîné, en quelque sorte, un tassement des volumes négociés à travers l’Atlantique. Il commande, peut-être, bien au-delà — entre autres facteurs — le tassement des trafics au cours de la première fluctuation primaire de 1578 à 1583 du cycle suivant (1578-1592).
111Mais cette covariation valable en gros est impuissante à rendre compte de la fluctuation dans le détail. Tout compte fait, on peut se représenter la fluctuation 1571-1578 de la manière suivante :
112Après le creux conjoncturellement incontestable des années 1568-1571, un sursaut conjoncturel important nous conduit au niveau élevé de 1572-1573. De là, le palier s’établit — élimination faite de tout l’extra économique — sur une pente très légèrement descendante qui se creuse en fin de fluctuation. La concordance prix-trafic se lit alors aisément : l’action du décrochement des prix... n’est plus suffisamment ranimée par le maintien sur un palier haut, et pourtant, ascendant. Quand on passe du palier ascendant au creux, c’est rapidement la catastrophe.
113Le creux moteur de 1575. — Dans ces conditions, l’accident en creux de 1575, doit être considéré comme principal responsable de la genèse de la seconde fluctuation primaire. Une conjoncture large des prix ne pourra jamais expliqué autre chose qu’un mouvement d’ensemble : le mouvement plongeant interannuel..., mais n’a-t-on pas eu l’occasion de s’expliquer97 déjà sur le fait évident que le cycle 1571-1578 pris dans son ensemble doit être considéré comme un cycle palier où le mouvement reprend baleine ?
114L’accident de 157598 rend compte du reste. Il a, pour cause essentielle, semble-t-il, un facteur extérieur à l’économique stricto sensu, mais non dans un sens large et plus compréhensif de la réalité humaine, entendez la banqueroute de 1575 et le rejet brutal par l’État de la dette flottante. Cet accident est encore aggravé par le comportement des prix à très court terme99, la flambée de 1575. Elle aura — comme il arrive souvent d’une flambée sans lendemain — vraisemblablement ajouté son action inhibitrice à celle des facteurs précédents.
115La conjoncture demi-longue des prix étant un des facteurs — il y en a d’autres qu’une analyse plus poussée permet de dégager — l’accident de 1575, une fois expliqué, la forme globale de la fluctuation primaire 1575-1578 ne présente plus de difficultés. Elle procède, tout simplement, d’un phénomène de rétention des Allers répercuté sur trois ans.
116On admettra, en effet, qu’on substitue, en Allers, aux chiffres vrais de 1575 et 1576, des niveaux légèrement rabotés par une moyenne mobile sur deux ans100, on rétablira la pente descendante du mouvement Allers conforme à la conjoncture un peu longue des prix. Mais si l’accident sus-décrit, incapable de détruire une quantité importante de richesses, a été suffisant, quand même, comme on peut le penser, pour reporter de 1575 sur 1576 une fraction importante du mouvement, tout devient clair : le creux de 1575, mais aussi la pointe de 1576, la rupture de pente de 1576-1577101, la pente douce 1577-1578. On comprend ainsi, sans peine, la substitution à une pente continue et légèrement inclinée, d’une fluctuation dissymétrique, opposant à une phase ascensionnelle vigoureuse et courte, une phase descendante étalée, fortement accusée, d’abord, puis insensiblement inclinée ensuite. L’anomalie des Allers de 1576 se reproduit normalement en 1577 sur les Retours. L’accident de 1575-1576 explique donc l’allure générale du mouvement Retours, avec son assymétrie inverse de l’assymétrie des Allers, tandis que la contraction rend compte du volume anormalement important des Retours par rapport aux Allers.
LA VENTILATION DU MOUVEMENT ET SA SIGNIFICATION
117Une analyse plus poussée du mouvement permettra de dégager d’autres relations. On sera sensible, en effet, à l’importante distorsion qui va s’accentuer, sur quelques années, au-delà de l’accident de 1575, entre les deux espaces continentaux-clefs de la Nouvelle Espagne et du Pérou-Terre Ferme. Le grand fait est, incontestablement, le renforcement de la Terre Ferme et le recul de la Nouvelle Espagne.
1. Analyse des deux mouvements fondamentaux
118Ce phénomène atteint même une ampleur tout à fait exceptionnelle.
119a. Nouvelle Espagne. — Sur l’axe des mouvements Allers, notamment, la Nouvelle Espagne qui avait atteint 47,3 % du mouvement unitaire et 52,4 % du tonnage, de 1572 à 1575, lors de la première fluctuation primaire du cycle, ne constitue plus, désormais, avec 56 navires et 21 084 toneladas que respectivement 39,2 % et 45,2 %. Le recul n’est pas seulement relatif, puisque le niveau des Allers traduit un fléchissement extrêmement important, 7 028 toneladas, moyenne annuelle de 1576 à 1578, contre 8 660 3/4 toneladas de 1572 à 1575102. Si le mouvement est imperceptible sur les Retours103, il est sensible, naturellement, sur les globaux, de 49,7 % à 46,7 %.
120b. Terre Ferme. — Au même moment, la masse globale de la Terre Ferme s’accroît plus sensiblement encore104 que ne décroît, corrélativement, celle de la Nouvelle Espagne. Il en va ainsi, parce qu’il y a eu, en outre, entre la première et la seconde fluctuation primaire du cycle 1571-1578, laminage considérable des chiffres du mouvement avec les îles.
121Prodigieux accroissement, tant relatif qu’absolu, de la Terre Ferme. Ne passe-t-elle pas de 41,9 % et 43 % à 46,9 % et 48,3 % de la première fluctuation à la seconde. De 43 % à 48,3 %, on mesure l’avance, en Allers. De 7 084 toneladas, niveau moyen, à 7 566 toneladas 2/3, compte non tenu des modifications possibles de la tonelada et des méthodes de mesure. Cette modification est d’autant plus surprenante qu’elle va à l’encontre de la tendance majeure du mouvement. Il faut donc en déduire que la tendance légèrement plongeante, en fin du cycle, du mouvement global Allers, est due au seul comportement de la Nouvelle Espagne, tandis que la Terre Ferme, à contre courant, en contrarie sensiblement la marche, certes, mais pas assez, toutefois, pour effacer la syncope mexicaine.
122S’il en va ainsi, c’est qu’à partir de 1575, peut-être, de 1576, sûrement105, le rythme des départs en direction de la Terre Ferme, de biennal, devient, pour longtemps, annuel. Il est inutile de chercher dans ce changement de rythme, une cause. Ce serait plutôt une conséquence, une conséquence de plus gros besoins. Pas uniquement, pourtant. Il n’est pas exclu, en effet, que le changement de la période du rythme ait été aussi la conséquence d’une meilleure possession technique de l’espace, d’une connaissance meilleure du régime des vents et des conditions naturelles de la navigation. Le progrès aurait pu, dans ce domaine, constituer un facteur secondaire, certes, et entre beaucoup, de la montée des départs en direction de l’Amérique du Sud.
123La modification — assez paradoxale — du trafic avec la Terre Ferme est plus sensible encore au Retour qu’à l’Aller. De 24,38 % de 1572 à 1575, le pourcentage avoué passe à 33 % de 1576 à 1578, mieux, les Retours (14 720 toneladas), sur trois ans de 1576 à 1578, excèdent, désormais, les chiffres (13 946 toneladas) obtenus précédemment sur quatre ans de 1572 à 1575 ; accroissement des plus considérables, compte non tenu, pourtant, de l’accroissement probable de l’unité de mesure. C’est là — ou sur les Allers et retours, de 34,3 %, 42 282 toneladas sur quatre ans à 41,2 %, 37 420 toneladas sur trois ans — qu’il faut mesurer la véritable amplitude du redressement du mouvement avec la Terre Ferme. La leçon la plus claire qui se dégage ici — elle est valable, explicative et éclairante, pour la première partie, déprimée (1578 1583) du cycle suivant (1578-1592) — c’est la prise en ciseau des deux mouvements, Nouvelle Espagne et Terre Ferme, dont les rôles respectifs sont intervertis. Aussi, la Terre Ferme vient relayer la Nouvelle Espagne dans son rôle d’économie dominante. Elle gardera ce rôle pendant plus de trente ans.
124Les deux mouvements, toutefois, ne s’annulent pas. Le décalage de la reprise de la Terre Ferme, par rapport à l’essoufflement de la Nouvelle Espagne, est responsable de ce creux qui, à cheval entre la fin du cycle 1571-1578 et le début du cycle 1578-1592, maintient, pratiquement, pendant sept années consécutives, les chiffres vrais du mouvement Allers et retours, par exemple, en dessous de la moyenne mobile de treize ans.
2. Essai d’explication
125A quoi attribuer ce double mouvement, si décisif, si porteur d’avenir ? L’explication en paraît assez simple, à condition de se contenter d’une vue finalement sommaire, satisfaisante, quand même, en l’état modeste de nos connaissances.
126a. Recul de la Nouvelle Espagne.
127La tendance au repli de cet important axe du trafic, l’axe de la Nouvelle Espagne — il faut commencer par lui, puisqu’il précède la reprise de la Terre Ferme, sinon chronologiquement, du moins par la vitesse et l’amplitude du recul — constitue un des traits majeurs de l’histoire de la Carrera, pendant un bon quart de siècle. C’est lui qu’il faut expliquer.
128Le Commerce d’Extrême Orient par les Philippines. — La liaison, désormais, régulière avec l’Extrême Orient par les Philippines, composante sinon majeure, du moins essentielle, du climat commercial du plateau de la Nouvelle Espagne106, a pu intervenir, mais selon toute vraisemblance, d’une manière tout à fait secondaire. On a vu, par exemple, l’arrivée précoce de la cannelle sur le marché de Séville, via Acapulco, Mexico, la Vera Cruz107, très tôt, dès 1566-1567. La première interprétation inciterait plutôt à penser qu’une telle situation a contribué à exercer une action tonique sur l’ensemble des échanges Europe-plateau mexicain. Témoin, cette cannelle du Sud de l’archipel et des terres des épices qui, jointe aux produits de Chine..., sera, sans conteste, une incitation supplémentaire à aller à la Vera Cruz. Les chiffres eux-mêmes sont là. C’est entre 1564 et 1571 et, plus encore, de 1572 à 1575, que se. situent les points hauts du mouvement avec la Nouvelle Espagne. Les deux ordres de phénomènes, installation du trafic transpacifique et accroissement du trafic transatlantique, ne sont pas nécessairement liés..., d’autant plus qu’au cours des toutes premières années de la jonction Acapulco-Manille, comme l’attestent les sommes d’almojarifazgo perçu à Manille108, l’importance des échanges entre la Nouvelle Espagne et les Philippines est faible.
129En vérité, ce n’est guère avant le milieu des années 1570 — c’est-à-dire, au moment précis du repli de la Nouvelle Espagne sur le marché du commerce officiel du Monopole — que le commerce Manille-Acapulco peut être considéré comme définitivement et efficacement constitué109.
130Ceux qui considèrent toujours un peu vite qu’un trafic ne peut se constituer qu’au détriment d’un autre trafic, une activité économique, au détriment d’une autre, parieront de relais et de substitution partielle. Même dans le cadre économique relativement rigide de ce xvie siècle colonial finissant, il n’est pas certain qu’il en soit toujours allé par substitution et transfert. Les contemporains, du moins, avaient tendance à croire à semblables relations. La concomitance existe, toutefois. Il n’est pas sûr qu’elle implique un ben de cause à effet. Mais on ne peut la repousser, pourtant, purement et simplement. En l’absence de données suffisantes qui permettent de trancher, il faut se borner à poser le problème110. De toute façon, il ne saurait être question, ici, que d’un facteur second.
131L’épidémie de « matlazahualt ». — Le ou les vrais facteurs sont, sans doute, ailleurs. Pourquoi ne pas les chercher, au premier chef, dans le grand phénomène démographique que représente de 1576 à 1579, la terrible épidémie de matlazahualt111 ? Elle porterait la responsabilité, en substance, d’une chute de la population indienne qui serait — sur le seul Mexique central, entendez les quatre cinquièmes au moins de la masse globale alors de la Nouvelle Espagne effectivement dominée — de 4 409 180 à environ 2 500 000 de 1565 à 1597112.
132Il est impossible qu’un tel cataclysme n’ait pas eu, d’emblée, sur l’ensemble de l’économie nouvelle espagnole des répercussions profondes. En affectant, notamment, la ressource capitale du pays, l’économie minière — capitale — bien qu’elle joue, ici, un rôle moins dominateur qu’elle ne le fait, au Sud, au Pérou, notre Terre Ferme.
133La raréfaction massive de la main-d’œuvre aura compromis, pour plus d’un siècle, le rôle de la Nouvelle Espagne au premier plan des producteurs d’argent..., contrebalançant, en quelque sorte, l’effet nécessairement bénéfique de la généralisation en profondeur du procédé d’extraction par amalgame, introduit depuis quelque dix-sept à dix-huit ans. Le renversement de la tendance majeure de l’équilibre démographique de la population indienne en Nouvelle Espagne ne se produira pas avant un siècle, on le sait, c’est-à-dire, avant 1680113 au plus tôt. Dans ces conditions, de nouveaux progrès de la production minière ne seront plus possibles en Nouvelle Espagne, jusqu’au début du xviiie siècle, sans qu’il y ait, concurremment, progrès géographique vers le Nord. Seule, l’annexion de zones toujours plus larges du Mexique sec du Nord sera susceptible — dans les conditions d’une production techniquement stable depuis le progrès de l’amalgame — de contrebalancer la perte sèche d’hommes causée, au tout premier chef114, par la terrible épidémie de matlazahualt.
134On ne saurait — cela va sans dire — établir une relation simple entre la production de l’argent et le niveau global de la prospérité mexicaine. L’activité minière apparaîtra plutôt, ici, comme la résultante et le signe d’un tonus économique global que comme un vrai moteur. Le résultat, en ce qui nous concerne, est, toutefois, identique.. Que l’argent soit un moteur, ou, plus raisonnablement, un indice de choix d’activité globale, en l’absence d’autres signes plus précis, il y a là, aussi, un parallélisme évident avec l’évolution démographique et le trafic Andalousie-Nouvelle Espagne.
135E. J. Hamilton, une fois de plus, fournira tous les éléments115, du moins, ce qu’il faut pour les calculer. Comment ne pas être frappé, par cette étonnante simultanéité ? La grande cassure dans les arrivées d’argent mexicain se situe juste entre la première et la seconde fluctuation primaire du cycle, entendez au moment du palier de la tendance majeure du mouvement global, au moment même où la maladie gaspille un million de ces précieux indiens de l’Anahuac, dont le travail quelquefois meurtrier, avait sous-tendu, en profondeur, le trafic Espagne-Nouvelle Espagne.
136De 1571 à 1575116, l’argent mexicain avait représenté une fraction exceptionnellement importante de l’ensemble des trésors d’Amérique dans le Guadalquivir (61 %), soit, niveaux officiels absolus calculés en partant des données de Hamilton, 7 260 000 pesos à 450 maravedís environ.
137Au même moment, pendant la première fluctuation primaire du cycle, on aura pu noter un point haut (tant en valeurs relatives qu’absolues), dans la masse des échanges entre la péninsule ibérique et l’espace mexicain. Ces deux signes, pointe d’argent mexicain (un 61 % entre le 50 % de 1566 à 1570, et le 42 % et le 35 % de 1576-1580 et de 1581-1585) et pointe volumétrique du mouvement, sont deux signes concordants qui expriment tous deux un tonus extraordinaire, une activité exceptionnellement élevée de la population et de l’économie coloniale. Un tel niveau ne se retrouvera plus — en toute objectivité — avant longtemps en Nouvelle Espagne.
138Mais cette économie coloniale — éminemment destructive — ne se conçoit, vraiment, à ce rythme, du moins, qu’à condition d’être constamment alimentée en techniques nouvelles (ce fut le cas de l’amalgame allemand adapté aux conditions minérales des plateaux du Nord), en espaces nouveaux (cette condition, le « Drang nach Norden » mexicain la réalise souvent), plus, peut-être, encore, en hommes qu’elle puise dans les greniers d’humanités des plateaux que le précolombien avait prudemment accumulées.
139Mais les réserves humaines se dilapident, par les vides qu’y creusent les prélèvements de main-d’œuvre, d’une main-d’œuvre souvent exploitée jusqu’à la mort, plus encore par cette insuffisance bi-séculaire de la natalité117 face à une mortalité trop élevée, résultante elle-même, d’une prodigieuse et collective désespérance. La désespérance d’hommes et de sociétés qui se savent condamnés et dont le long refus de vivre résulte d’un excès, certes, démesurément prolongé de souffrances physiques et morales et plus encore, du bris en profondeur des ressorts qui font vivre.
140Quand le christianisme aura, deux siècles plus tard, par une pénétration un peu plus profonde qu’aux premiers temps, rendu à cette collectivité une nouvelle raison d’être, la tendance démographique se ressaisira. Sans que les conditions physiques se soient, peut-être, sensiblement modifiées, simplement parce que la collectivité indienne a dépassé ses mythes morts et adopté, avec leur foi, les raisons de vie de ses maîtres. Mais cela, pas avant le xviiie siècle.
141L’humanité des plateaux mexica est, pour plus d’un siècle encore, un monde humain qui dépérit. Qu’éclate un grave accident, comme l’épidémie de matlazahualt, et la faible pente descendante de la masse indienne se mue en débandade. De 1576 à 1579, l’Indien s’est dérobé entre les prises de l’économie coloniale européenne — la seule que nous puissions saisir pour très longtemps et d’une manière irréversible. C’est tout le drame que traduisent... au-delà, courbes de l’argent et courbes des trafics. Pour l’économie coloniale, la catastrophe n’est, certes, pas irréversible, comme le prouve son comportement démographique : la montée presque ininterrompue qui l’anime118 établit qu’il y a, pour elle, de larges possibilités d’adaptation. L’adaptation, pourtant, n’est pas immédiate. C’est ainsi que, sans conteste possible, le matlazahualt aura bien été aux origines de la chute du trafic et de celle de là production de l’argent119.
142Mais est-ce bien tout ? Faut-il, ce matlazahualt, le porter au rang d’un deus ex machina, totalement en dehors de nos prises, ou, si l’on veut, l’élever au rang de cause pure, non causée, mystérieux primum mobile ? Ne serait-il pas meilleur, au contraire, de l’incorporer au tissu conjoncturel de l’Atlantique, en lui rendant sa vraie position, à l’intérieur d’une chaîne d’interréactions. Car, enfin, quand il éclate en 1576, brisant, pour dix ou vingt ans, l’élan de la société dominante, en la frappant par le dominé, par un million de morts anonymes, est-ce pur hasard, s’il vient, juste après cette fièvre des années 1571-1575 que notre sémiologie grossière avait devinée, pourtant ? En pleine fièvre de l’activité minière de l’amalgame triomphant... Un accroissement même limité de production, au-dessus d’un seuil, certainement dépassé, au cours de la première fluctuation du cycle, ne s’est-il pas payé, pour la population indienne dominée, soumise au maniement particulièrement toxique du mercure, par un accroissement exponentiel de fatigue, par une fragilité, donc, devant la mort ? Si cette activité fébrile — or, c’est, on le sait, plus la pente qui vaut, l’accélération que le niveau vrai — s’est bien marquée pour la population indienne par un accroissement exponentiel de l’effort — ce qui n’est guère douteux dans nos hypothèses — le matlazahualt aura éclaté, ravageur, dans une population débilitée par l’effort déraisonnable du demi-cycle d’apogée de l’économie coloniale mexicaine. Par le matlazahualt, rattaché à un contexte d’activité économique, ce sera, un peu, sa croissance trop rapide que le Mexique colonial payera, dix à vingt ans durant... et pour nous, une nouvelle victoire des explications endogènes sur les théories exogènes, grossièrement tentantes.
143Tel nous apparaît se situer dans l’ensemble de la vie Atlantique cet important accident de l’économie d’échanges à longue portée du Mexique. S’il intervenait, seul, on assisterait, pour un long temps, à un repli de l’ensemble des trafics. Il n’en est rien, en fait, car, avec quelques années de décalage à peine, la poussée d’extraversion de l’économie coloniale péruvienne vient compenser et au-delà, le sensible repli mexicain.
144b. Pérou/Terre-Ferme. — Pas plus pour le Pérou que pour le Mexique, il ne peut y avoir motif d’établir une relation simple entre la production d’argent et l’ensemble de l’activité du pays, encore que l’argent soit appelé, au Pérou, à jouer, très rapidement — en fait à partir de la demi-décade 1576-1580 — un rôle beaucoup plus considérable qu’il n’en jouera, désormais, au Mexique120 ; pomme pour la Nouvelle Espagne, il faudra voir dans cette production saisie indirectement par les arrivées officiellement recensées à Séville, plus un indice de l’activité globale, indice de choix, certes, que le véritable et unique moteur de l’ensemble de l’activité coloniale péruvienne. Mais cet indice a, ici, une signification particulièrement importante, telle, peut-être, qu’il n’en existe, nulle part, ailleurs, d’aussi probants, pour l’économie coloniale, du moins, entendez, la seule qui nous intéresse, puisque la seule à étendre des tentacules aussi larges dans le vaste réseau des échanges internationaux.
145Il suffit, désormais, de se reporter aux chiffres tirés, directement ou indirectement, du travail de E. J. Hamilton121. En dix ans, entre 1571-1575 et 1581-1585, il y a quadruplement et au-delà, des arrivées recensées d’argent péruvien à Séville, de 4 640 000 pesos à 19 300 000 pesos. Une telle croissance, absolument sans précédent et sans équivalent ultérieur, est, évidemment, le fait de la grande révolution que constituent et l’adaptation de l’amalgame aux conditions péruviennes et l’ouverture à une production sur une grande échelle des mines de mercure de Huancavelica122.
146Autrement dit, à vingt ans de distance et, grosso modo, sous l’action des mêmes causes, l’économie argentifère péruvienne connaît le même sursaut, le même bond en avant que l’économie mexicaine. Comme la poussée mexicaine, la grande vague péruvienne sera d’assez faible durée. Et bien que l’histoire démographique des plateaux quechuas-aymaras à l’époque coloniale ne bénéficie pas du même éclairage123 que celle des plateaux de l’Anahuac, on a tout lieu de penser que, là aussi, cette poussée désordonnée de l’activité minière, symbole de l’activité coloniale, se sera développée au détriment des réserves humaines indiennes des plateaux. D’où, plus tard, des phénomènes évidents de choc en retour, quand le matériel humain vient à manquer. Mais, de par son poids même dans l’économie atlantique d’échanges, le secteur péruvien est relativement plus engagé encore dans les aventures commerciales transatlantiques lointaines que ne l’est le Mexique... Il n’est pas certain que la relève de l’économie argentifère pourra, alors, s’opérer et l’on sera, quand elle craquera, tout proche, alors, du rebroussement séculaire.
147Pour l’heure, on en est loin. Dès la fin du cycle 1571-1578 et plus encore, dès le début du long cycle suivant, on voit s’affirmer, de plus en plus, la relève qu’opère la Terre Ferme, cette relève qui va assurer la longue et puissante reprise qui marque si profondément le cycle 1578-1592.
Notes de bas de page
1 Cf. ci-dessus p. 484-492.
2 Cf. t. III, p. 154.
3 Cf. t. VI1, table 182, p. 384-387.
4 Au lieu de 46,44 % (de global, canariens compris), ce qui est déjà une proportion extraordinairement basse (cf. t. VI1, table 159, p. 356).
5 Cf. t. III, p. 140,154 et 168.
6 Cf. t. VI1, table 182, p. 384.
7 Cf. t. VI1, table 157, p. 354.
8 Cf. t. VI1, table 166, p. 365.
9 Ibid. — 1570 : 31 navires, 9 630 toneladas ; 1571 : 1 unité et 300 toneladas ; 1572 : 46 unités et 14 728 toneladas ; 1573 : 4 unités et 980 toneladas ; 1574 : 29 unités et 10 178 toneladas ; 1575 : 5 unités et 2 450 toneladas.
10 Cf. t. VI1 ; comparaison facile, en rapprochant, notamment, les tables 166 et 182, p. 365 et p. 384.
11 Cf. t. VI1, table 168, p. 367. 1570 : 14 navires, 4 664 toneladas ; 1571 : 18 navires et 4 920 toneladas.
12 Une des caractéristiques qui permet d’assimiler le trafic volumétriquement dominant à notre concept d’économie dominante est, précisément, la suivante. — Le trafic dominant, ici comme ailleurs, donne la tonique, l’articulation conjoncturelle du mouvement, tandis que, par rapport au mouvement, les trafics secondaires jouent, toutes proportions gardées, le rôle de volants atténuateurs.
13 Il ne se dément pas, d’ailleurs, quand vient la crise.
14 Il est bien évident, par exemple, que si on élimine la pulsation biennale des départs vers la Terre Ferme, on arrive à des chiffres équivalents de départs entre 1570 et 1571. Le creux cessse d’être l’apanage de la seule année 1571, mais couvre amplement l’ensemble 1570-1571.
15 Cf. t. VI1, table 159, p. 356.
16 Cf. ci-dessus, p. 497-498.
17 Cf. t. VI1, table 163, p. 362.
18 Cf. t. VI1, table 159, p. 356 et t. VII, p. 52-53.
19 Cf. t. VI1, table 160, p. 357.
20 Cf. ci-dessus, p. 333-334, 342.
21 Cf. F. Braudel, Méditerranée, op. cit., p. 924 et sq.
22 Ibid., p. 925.
23 Ibid., p. 411.
24 Cf. t. VI1, p. 356.
25 Dans une fluctuation qui, on l’a vu (p. 499-525), constitue un palier sensible d’expansion médiocre entre deux cycles particulièrement dynamiques du second xvie siècle.
26 Cf. Haring, op. cit., p. 230.
27 Cf. t. VI1, table 134, p. 332.
28 Il faut attendre 1523, 1584, 1585, pour trouver, au Retour, une expression unitaire du mouvement, légèrement supérieure.
29 Cf. t. VI1, table 169, p. 368, 18 unités, 5 478 toneladas, le record de la demi-décade.
30 Cf. t. VI1, tables 131, 134, 137, 159 et 160, p. 329, 332, 335, 356, 357.
31 T. VI1, table 159, p. 356 ; t. VII, p. 52-53 et cf. ci-dessus et ci-dessous, p. 100-101, 333-335..., 1354-1355, 1866-1872.
32 Cf. t. VI1, table 163, p. 362.
33 E. J. Hamilton, 1501-1650, op. cit., p. 200.
34 Cf. t. VI1, table 182, p. 384.
35 Cf. t. III, p. 168.
36 Cf. t. III, p. 140 ; t. VI1, table 166, p. 365.
37 Cf. ci-dessus, p. 509-511.
38 Cf. t. VI1, table 218, p. 466 et table 226, p. 471, t. VII, p. 58-59.
39 Cf. t. VI1, table 182, p. 384, 42 navires et 3 360 toneladas.
40 Cf. t. VI1, table 163, p. 362.
41 E. J. Hamilton, 1501-1650, op. cit., p. 198-200.
42 Cf. t. I, p. 78 et suiv. et p. 88-89 et suiv. et dans t. III, plus spécialement, les p. 172 à 176.
43 Ct. 5167, lib. I, f° 207 v°-210 v°, cité souvent et notamment, t. 1, p. 78, note 3.
44 Comme toutes les victoires, cette victoire sera souvent remise en cause par ceux-là pour qui elle fut une défaite, les almojarifes de Séville et des Indes, agents trop zélés et intéressés de l’État. Il n’en demeure pas moins que le modus vivendi, tacitement admis par le Consejo en 1572, ne cessera plus d’avoir cours jusqu’à l’indulto de 1660 qui, en supprimant l’ad valorem, le rendait inutile.
45 Cf. ci-dessus, p. 277-283.
46 Cf. ci-dessus, p. 415484.
47 T. I, p. 88-97.
48 Cf. t. VI, table 198, p. 414, tables 226-227, p. 472473.
49 Cf. t. III, p. 166. L’armada des galions et celle de Juan Ortiz ont amorcé, à la fin de janvier, un mouvement de reprise encore discutable, qui se précise avec une flotte d’importance moyenne, celle de Juan de Alcega, à la fin juin.
50 Cf. t. III, p. 168.
51 Cf. t. III, p. 199-200.
52 Cf. t. VI, table 129, p. 327 et table 141, p. 339.
53 T. VI1, table 169, p. 368.
54 Cf. ci-dessus, p. 534.
55 Cf. t. VI1, table 166, p. 365.
56 Cf. ci-dessus, p. 484492.
57 Cf. ci-dessus, p. 497-525.
58 Cf. t. VI1, table 182, p. 384.
59 Il est à noter, toutefois, qu’avec 29 navires et 8 650 toneladas, les départs des navires marchands du Guadalquivir, l’emportent, désormais, sur les positions analogues de 1571, 1575 et 1578..., c’est-à-dire, les creux cycliques ou intracycliques autour desquels il faut articuler, selon notre hypothèse, fluctuation décennale et fluctuations plus courtes.
60 Cf. t. III, p. 168.
61 Cf. t. III, p. 194.
62 Cf. t. III, p. 196.
63 Cf. ci-dessus, p. 509-511.
64 Cf. ci-dessus, p. 340-341.
65 Cf. t. VI1, table 134, p. 332.
66 Cf. t. VI1, table 182, p. 384.
67 Cf. t. VI1, table 198, p. 414.
68 21 596 toneladas en 1574, 21 049 toneladas en 1576 (un peu plus, toutefois, en 1576, en tonneaux de jauge, si on tient compte du changement présumé du taux de pondération de la tonelada : 90 %, au lieu de 85 %, — t. VI1, table 129, p. 327 — soit 18 356,6 tonneaux contre 18 944,1 tonneaux — t. VI1, table 141, p. 339). Il est à noter, pourtant, qu’il existe, en dehors même de l’effet de pondération, une présomption de plus grande densité en valeur des exportations de 1574, par rapport aux exportations de 1576. En 1576, en effet, la proportion des navires marchands en convois est plus forte qu’elle ne l’est en 1574. Ces derniers constituant la partie normalement la plus riche du trafic, on pourrait normalement s’attendre à des valeurs fiscales plus grandes en 1576 qu’en 1574... Ce n’est pas le cas.
69 Cf. t. III, p. 194-195.
70 Le creux du mouvement Allers en direction de la Terre Ferme (cf. t. VI1, table 166, p. 365) en 1575, 5 navires, 2 450 toneladas, ne peut être comparé à la quasi-disparition des années antérieures, 980, 300 toneladas..., en 1573, 1571... ; d’autant moins qu’on observe, parallèlement, un fléchissement concomitant constant sur le mouvement pilote en direction de la Nouvelle-Espagne.
71 Cf. t. VI1, tables 131, 134, 137, p. 329, 332, 335.
72 Notons, tout au cours de cette fluctuation, un comportement particulier des Retours. Au début du cycle, le creux et le mouvement de reprise des Retours anticipait déjà de deux ans les Allers et les Allers et retours, 1569 au lieu de 1571. L’anticipation n’est plus, ici, que d’un an. Le creux médian des Retours se place en 1574 au lieu de 1575, soit un an plus tôt.
Au cours de la seconde fluctuation primaire, le synchronisme entre les deux mouvements se rétablit. A la pointe Allers de 1576 correspond normalement, à nouveau, une pointe Retours, en 1577, puis même localisation du creux.
73 Jusqu’en 1585, à l’exception de quelques réapparitions aussi infimes que sporadiques, en 1578 et 1579, par exemple. Cf. t. VI1, table 182, p. 387.
74 Cf. t. VI1, table 226, p. 471-472.
75 Sur le mouvement particulièrement important des navires marchands de Séville, le creux des Allers est de 50 % entre 1574 et 1575, 1575 et 1576 : 28 navires et 8 540 toneladas contre 48 navires et 14 208 toneladas en 1574, 47 navires et 16 149 toneladas en 1576.
76 5 navires, 2 450 toneladas entre 29 navires, 10 178 toneladas en 1574 et 29 unités, 10 300 toneladas en 1576 ; t. VI1, table 166, p. 365.
77 Cf. t. III, p. 210 et 211.
78 Ibid., p. 210, note 1.
79 Cf. t. VI1, table 166, p. 365 — avec, en 1575, 22 navires et 8 330 toneladas.
80 Sherburne F. Cook and Lesley Byrd Simpson, The population of Central Mexico in the Sixteenth Century, Berkeley, in-8°, 1948, op. cit., et surtout, Woodrow Borah (New Spain’s Century of depression, Berkeley, in-8°, 1951) ; op. cit. p. 2 et 3.
81 Cf. ci-dessus, p. 518-519 et t. VIII1, p. 802-809.
82 Dernier indice, peut-être, enfin, encore que d’une interprétation beaucoup plus chanceuse, une importance non négligeable, par rapport à l’ensemble, plus grande qu’en armée prospère, des départs en direction des îles, 8 navires, 960 toneladas (cf. t. VI1, table 166, p. 365). Devant le recul des grands, les petits trouvent mieux place. On exporte aux îles dans un espoir, peut-être, de réexportation en direction du continent, quand les conditions, seront meilleures. Un tel symptôme, seul, ne dirait rien, mais replacé dans son contexte, il prend un certain relief.
83 Interpolation pour les prix andalous donnée par E. J. Hamilton, 1501-1650, op. cit. dans le graphique de la p. 200.
84 Cf. t. VI1, table 163, p. 362. L’indice composé de 1575, 103,71, entre l’indice de 98,29 en 1574 et 95,65 en 1576 et 94 en 1577, est d’autant plus considérable qu’il a été calculé dans l’hypothèse d’une Andalousie aberrante qui nous paraît difficilement plausible. L’écart cyclique des prix de 6,192 % est donc, à tous égards, sous-estimé en dessous de la réalité.
85 Cf. ci-dessus, p. 124-126.
86 Cf. t. VI1, table 131, p. 329 et table 226, p. 471-472.
87 Cf. ci-dessus, p. 545-546.
88 F. Braudel, Méditerranée, op. cit., p. 411.
89 Cf. ci-dessus, p. 517-518.
90 Cf. ci-dessu3, p. 490 492.
91 Cf. ci-dessus, p. 541-549.
92 Cf. ci-dessus, p. 553-564.
93 Cf. t. VI1, table 129,131 et 140, p. 327, 329, 338.
94 Cf. notamment t. VI1, table 163, p. 362.
95 Il suffit de se reporter aux travaux de E.J. Hamilton (1561-1650, op. cit.), p. 198, 200 et 403... et plus, peut-être même encore que ne le montrent les propres graphiques du grand savant américain. Il faut tenir compte, en effet, des graves lacunes existant dans la série la plus importante pour nous, celle des indices andalous. Il nous paraît dangereux, en effet, de supposer, comme le fait Hamilton dans sa courbe des indices andalous (ibid., p. 200), une indépendance aussi accusée des indices andalous à l’égard des autres séries de Nouvelle-Castille, Vieille-Castille-Léon et Valence. En l’absence de données suffisantes pour l’Andalousie, il est peut-être, plus sage de supposer le mouvement andalou à l’imitation du mouvement connu pour la Nouvelle-Castille. On est en droit de faire cette hypothèse, puisque, quand on possède les séries andalouses intégralement, on est à même de vérifier l’homogénéité relative des séries géographiques andalouse et nouvelle-castillane..., surtout, quand (c’est le cas de 1575 à 1580), les autres séries (Nouvelle-Castille ; Vieille-Castille ; Valence) présentent, entre elles, une aussi grande homogénéité. Dans le moment même où les séries géographiques, éventuellement les plus indépendantes, sont saisies dans des liens d’étroite dépendance (Nouvelle-Castille ; Vieille-Castille ; Valence), il n’est pas prudent de supposer une totale indépendance des deux séries Andalousie-Nouvelle-Castille, ordinairement, les plus dépendantes. Plutôt que de réunir, comme il l’a fait — Hamilton a agi en parfaite honnêteté et nul ne saurait lui en faire le moindre grief — les points connus sur la série andalouse par des segments de droite, il serait, peut-être, plus vrai de supposer, bien appuyée sur les indices calculés, une courbe andalouse assez voisine de la courbe des indices nouveaux-castillans.
Dans cette hypothèse, le creux, déjà tellement accusé des courbes représentatives des séries d’indices, sera plus marqué encore qu’il n’apparaît pour les indices compensés de la p. 403..., et, par voie de conséquence, les pourcentages d’écarts à la moyenne de treize ans de la table 163 du t. VI1, (p. 362), doivent être considérés, eux aussi, comme légèrement inférieurs à une réalité plus accusée dans l’hypothèse légitime d’une courbe andalouse plus creusée.
96 Cf. t. VI1, table 163, p. 362.
97 Cf. ci-dessus, p. 497-503.
98 Cf. ci-dessus, p. 547-551
99 Si on admet notre interprétation — défendue à plusieurs reprises déjà (cf. note 1, p. 554, etc.) — d’une dépendance plus étroite encore des prix andalous à l’égard des autres séries et, plus particulièrement, celle de la Nouvelle-Castille, que ne le croit apparemment E. J. Hamilton lui-même, si on tend à calquer, comme nous proposons de le faire, le dessin de la marche des prix andalous, mal connue, sur celle, mieux connue, des prix de Nouvelle-Castille.
100 Soit, en Allers, une série de 1575 à 1578 qui s’établirait ainsi : 1575,16 394 ½ toneladas 1576,16 394 ½ toneladas ; 1577, 14 470 toneladas ; 1578,12 185 toneladas.
101 Elle résulte de l’action combinée de deux forces : d’abord et surtout, l’écoulement du nœud de 1575 et, par conséquent, le retour à la normalité, d’une part, la pente normale du mouvement dont la tendance est à la baisse, d’autre part.
102 Le fléchissement, tel qu’il apparaît, est, en fait, encore en dessous de la réalité... étant donné la réduction radicale du mouvement des départs des Canaries entre la première et la seconde fluctuation primaire... il s’ensuit une réduction assez importante des Indias(?), parmi lesquels il y avait, nécessairement, un certain nombre de navires destinés à la Nouvelle-Espagne, de 8 % à 2,3 %, seulement.
103 Sans que cela puisse porter à conséquence et autoriser des conclusions trop rapides, étant donné l’impossibilité, plusieurs fois signalée, de considérer tous les Retours des îles comme venant uniquement des îles. La hausse spectaculaire, par contre, des Retours de Terre Ferme implique, à peu près nécessairement, une très forte présomption de baisse simultanée des Retours de la Nouvelle-Espagne. Dans l’ensemble, par conséquent, le repli, tant relatif qu’absolu, accusé par les tables 166, 169, 172, pour le mouvement de la Nouvelle-Espagne, doit être considéré comme une expression minimale de ce recul.
104 Soit des moyennes annuelles respectives de 10 570,5 toneladas de 1572 à 1575, sur l’axe Allers et retours-Terre Ferme et 12 473,3 toneladas, dans les mêmes conditions, de 1576 à 1578.
105 Cf. ci-dessus, p. 544 et t. VII, p. 66-69.
106 Cf. notre étude, Les Philippines et le Pacifique des Ibériques (1550-1700).
107 T. III, p. 114.
108 Cf. notre étude, Les Philippines et le Pacifique des Ibériques (1550-1800).
109 Soit un laps de temps à peu près comparable à celui qui a séparé le voyage de Colomb de la constitution d’une Carrera, dont le point de départ peut être donné par la mise en place de la Casa de la Contratación et celui du comput des navires, constitue, en quelques sorte, le réactif.
110 Il y aurait, sans doute, une bonne part de puérilité à construire une théorie sur du vent. On peut se demander, a priori, pourtant, si l’introduction de l’idée de seuil ne permettrait pas, le cas échéant, de concilier des termes apparemment inconciliables. Si on met en présence, en effet, le mouvement entre les Philippines (donc, l’Extrême Orient) et la Nouvelle-Espagne, d’une part, la Nouvelle-Espagne et le complexe portuaire andalou, d’autre part, on notera un parallélisme troublant : autour de 1575, autour de 1605-1610, il semble qu’il y ait simultanéité de mouvements sur des séries de phénomènes, au demeurant bien différents, le trafic Pacifique, d’une part, le trafic Atlantique, d’autre part.
1575 établit le trafic du galion de Manille sur son palier moyen de fonctionnement du xvie siècle, 1605 l’a installé à un apogée qui durera, en gros, jusque vers 1620, date de l’inexorable repli. Pour l’Atlantique, deux décrochages, simultanément, mais de sens différents. 1575 marque un effacement relatif de la Nouvelle-Espagne dans le commerce officiel de Séville, au détriment de la Terre Ferme, tandis que la première décade du xviie siècle marque, à l’inverse, un effacement relatif de la Terre Ferme par rapport à une Nouvelle-Espagne qui va atteindre, bientôt, le sommet, en chiffres absolus, de son mouvement.
Devant un tel phénomène, deux attitudes, seules, sont possibles : ou bien, rejetant sur le seul hasard la responsabilité des concomitances entre ces deux modifications d’accélération mais, d’orientation différente, on écartera, entre elles, toute possibilité de liaison causale ; ou bien, malgré l’orientation différente des mouvements et leur apparent défaut de cohérence, on retiendra comme présomption de lien de causalité la seule concomitance temporelle.
On imaginera que jusqu’à un certain seuil, le commerce Nouvelle-Espagne/Philippines, restant, en quelque sorte, de même nature que le commerce Atlantique, a été concurrent et, dans une certaine mesure, un tant soit peu contrariant de l’axe Atlantique du trafic entré l’Espagne et la Nouvelle-Espagne. Mais le trafic Nouvelle-Espagne-Extrême Orient, contribuant à un enrichissement général, pourrait bien, tout en restant quand même concurrent du trafic Atlantique, finir par avoir sur ce dernier une action positive. L’Atlantique de-Séville bénéficierait alors de l’accroissement des richesses commerciales apporté en Nouvelle-Espagne par le trafic d’Acapulco avec l’Extrême Orient. On conserverait, ainsi, sa signification à une concomitance, qu’il est fâcheux de totalement négliger.
111 Woodrow Borah, New Spain’s Century of depression, op. cit., p. 18-19.
112 Cook and Simpson, cité par W. Borah, op. cit., p. 3. Pour une analyse en structure, cf. t. VIII1, p. 495-510..., 528-534..., 685-688.... 802-809.
113 Cf. W. Borah, op. cit.
114 A l’intérieur du complexe causal examiné ailleurs. T. VIII1, p. 773-778.
115 E. J. Hamilton 1501-1650, op. cit., p. 34-35, 43.
116 Ibid., p. 43.
117 T. VIII1, p. 495-590,... 528-534,... 685-688,... 802-809.
118 W. Borah, op. cit., p. 18. Pour le Mexique central, auquel correspondent les chiffres de la population indienne calculés par Cook et Simpson, les évaluations prudentes de Borah donnent : 1570, 57 000 h. ; 1646, 114 000 ; 1742, 465 000 h. ; 1772, 586 000 ; 1793, 780 000 ; Cette montée ne peut être imputable que médiocrement à une immigration faible, elle est due pour les 9/10e, au croît naturel de l’humanité blanche. Les colons, étant donné leur faible proportion de dominants par rapport aux dominés indiens — et malgré les conditions pénibles de la vie tropicale — jouissent, ici, on s’en est expliqué, ailleurs (t. VIII1, p. 685 sq...., 720..., 750-752) — d’un taux d’accroissement élevé.
119 Sur ce point, que l’on se reporte à ces données tirées, soit directement, soit au prix d’un petit calcul, de E. J. Hamilton :
On voit parfaitement, ainsi, l’ampleur prodigieuse du coup de frein dû à l’épidémie. D’autant mieux que le comportement du Pérou est, alors, exactement inverse. Ce qui prouve, — puisque la résultante suivra, bientôt, la marche du Pérou — qu’un accident local, si important fût-il, ne peut infléchir durablement même cette ébauche grossière de conjoncture mondiale que nous nous efforçons de connaître.
120 Il ne saurait être; question, à cette époque, d’anticiper des situations postérieures, entre 1610 et 1630, en Nouvelle-Espagne, entendez, et précisément sous l’influence du commercé de Chine, d’une grande prospérité des échanges avec l’Espagne à travers l’Atlantique, indépendamment d’une production d’argent qui demeure, pendant tout ce tempe, sur un plan secondaire et en repli prononcé.
121 Pour le Pérou sur le modèle du travail fait pour la Nouvelle-Espagne (ci-dessus, p. 562, note 2).
ANNÉESPOURCENTAGE DES TRÉSORS DU PÉROU à l’ensembleMONTANT EN PESOS (450 mrs) DES TRÉSORS DU PÉROU. (arrondi)TRÉSOR TOTAL EN RESOS (arrondi)1751-157539 %4 640 00011 900 0001576-158058 %9 980 00017 200 0001581-158565 %19 300 00019 300 000
122 T. VIII2, Appendice, p. 1958-1978.
123 T. VIII1, p. 1066.
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