Les réformes des systèmes de protection sociale au Brésil et au Mexique au cours des années 1990 dans le cadre du Mercosur et de l’Alena
p. 71-97
Texte intégral
1Note portant sur l’auteur*
2Ce travail a pour objet l’analyse des transformations des systèmes de protection sociale du Brésil et du Mexique à la lumière de leurs schémas respectifs d’intégration régionale. Le changement dans les systèmes de protection sociale, d’inspiration néolibérale, se faisait déjà sentir avec la crise économique des années 1980 et les vagues d’ajustements économiques, tendance dans laquelle s’imbriquent l’influence de l’Alena dans le cas du Mexique et celle du Mercosur dans celui du Brésil, bien que les changements aient suivi, dans chacun des pays et selon leurs particularités, des voies différentes.
3Ce chapitre est organisé en quatre parties. La première, qui prend comme contexte le processus de globalisation et la formation du bloc économique nord-américain (dans lequel les État-Unis ont un rôle pivot), traitera du type d’intégration qui tend à se développer en Amérique latine, ainsi que de l’influence de ces phénomènes sur l’assouplissement du rapport salarial et sur l’affaiblissement de la protection sociale au Brésil et au Mexique. Dans la seconde partie seront examinées les spécificités que la dimension sociale a acquises dans le Mercosur et dans l’Alena, ainsi que le rôle qu’ont joué à cet égard les partenaires sociaux, en particulier les syndicats dans la promotion d’un calendrier social. Dans la troisième partie seront analysées les transformations récentes des systèmes de protection sociale du Brésil et du Mexique occasionnées par la crise structurelle interne et sous l’influence du Mercosur et de l’Alena. Dans le cas du Mexique, seule la récente privatisation du système de retraite de l’Institut mexicain de sécurité sociale (IMSS) sera analysée (photographie n°3). Enfin, la quatrième partie rendra compte de quelques réflexions sur les particularités des schémas d’intégration régionale auxquels participent le Brésil et le Mexique, ainsi que sur les trajectoires de leurs systèmes de protection sociale dans les années 1990.
MONDIALISATION, INTÉGRATION RÉGIONALE ET ASSOUPLISSEMENT DU RAPPORT SALARIAL ET DE LA PROTECTION SOCIALE
4Dès le milieu des années 1970, les économies capitalistes entraient dans une crise dont le principal antécédent était l’épuisement du modèle d’accumulation fordiste, qui s’est reflété dans un marasme de la productivité et des profits. La compatibilité entre l’augmentation du bien-être et celle des bénéfices touchant à sa fin, ce phénomène a conduit à remettre en cause l’État providence, affectant dans un premier temps les centres capitalistes, et dans un second temps et avec plus de force encore, la périphérie capitaliste.
5La crise structurelle capitaliste a favorisé, d’une part, un important effort de développement technologique pour rationaliser la production, en abaisser les coûts, créer de nouveaux marchés et de nouvelles sources de profit, et de l’autre, des actions violentes pour rompre les engagements institutionnalisés qui avaient pris forme dans l’État providence. Selon Hirsch (1996 : 89), c’est en ces termes qu’il faut comprendre la signification de la mondialisation : "... une stratégie décisive du capital comme solution à la crise du fordisme ; c’est-à-dire que la libéralisation radicale du transit des marchandises, des services, de l’argent et du capital doit être la condition préalable à la rationalisation systématique renouvelée du processus de travail dans la production capitaliste, ce qui implique en même temps lié la destruction de l’engagement fordiste des classes et de ses bases institutionnelles. [...] La mondialisation n’est pas un processus économique simple, ni n’exprime une "logique" inévitable du capital ; c’est une vaste stratégie politique".
6La stratégie d’accélération de l’ouverture des marchés comme base de la mondialisation s’est cependant fracturée, l’intensification de la concurrence ayant entraîné la création de blocs régionaux (la dite "triade") qui rivalisent entre eux économiquement et politiquement, mais pas militairement. Par leur supériorité en armements, les États-Unis sont devenus le gendarme qui coordonne les pays leaders des autres blocs dans les opérations militaires contre la périphérie, comme ce fut le cas lors de la guerre du Golfe, et plus récemment dans la guerre contre les Serbes de Yougoslavie. Comme l’affirme Hirsch (1996: 21), "ce déséquilibre entre puissance militaire et économique conduit l’impérialisme à prendre une forme nouvelle et complexe".
7Le processus de globalisation non seulement s’est fracturé à cause de la rivalité économique entre les pays du centre, mais c’est encore un processus incomplet, aussi bien parce que le vecteur le plus important de l’internationalisation continue à être l’exportation à partir d’une base nationale, que parce que la majorité des salariés se trouvent toujours dans leurs pays d’origine (Boyer, 1997 : 28). Il faut donc être réaliste et considérer la mondialisation comme une vaste stratégie destinée à apporter une solution à la crise du modèle de croissance fordiste, mais qui se heurte à d’importants obstacles.
8À partir des années 1980, en pleine tendance à la mondialisation et dans une étape de crise économique et politique aiguë à laquelle l’Amérique latine est confrontée, deux tendances importantes se développent à leur tour : d’un côté, la réapparition du caractère central des États-Unis dans leur commerce avec la région, puisqu’ils absorbent dans ces années-là 30 % de ses exportations et près de 40 % au début des années 19901. En 1990, environ la moitié du stock total des investissements directs étrangers de la région est d’origine américaine (CEPAL, 1994 : 24). Ceci, ajouté à l’influence des États-Unis sur les agences et les banques qui gèrent la dette extérieure et au coût probablement élevé qu’implique s’opposer au "consensus de Washington", a conduit à une certaine convergence des gouvernements latino-américains vers cette politique (Hurrell, 1996: 203-206). Cette convergence s’observe dans la vague de libéralisation commerciale que connaissent les pays de la région2. D’un autre côté, une longue série d’accords commerciaux bilatéraux est signée entre les pays latino-américains, et entre ceux-ci et les États-Unis. L’attraction exercée par le grand marché états-unien a conduit à un bilatéralisme commercial qui pourrait entraver toute intégration continentale.
9Cependant, si une intégration continentale était menée à bien, un autre scénario lui aussi problématique pourrait se dérouler. L’hégémonie exercée par les États-Unis sur l’Amérique latine peut permettre l’établissement d’un modèle d’intégration fondé sur des liens de dépendance renforcés par la politique néolibérale que ce pays préconise. Pour paraphraser Perroux (1991 : 686), il existe une puissance "intégrante", dans ce cas les États-Unis, et des zones "intégrées" ou "à intégrer" : le reste des pays du continent américain. L’une des caractéristiques les plus importantes du modèle d’intégration défendu par les États-Unis est son insensibilité à l’intégration sociale. L’Alena, par exemple, ne contient pas d’accord pour la défense de la protection sociale, vu que sa négociation a été régie par le principe de compétitivité, excluant celui de la sécurité générale. Il en ressort que les systèmes de protection sociale dans la région seront soumis à une concurrence directe (Brunelle et Deblock, 1994 : 20).
10Les changements les plus importants dans les systèmes de protection sociale en Amérique latine ont débuté avec la crise des années 1980, et ont ensuite été impulsés par des ajustements économiques drastiques promus par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale. La première vague d’ajustements économiques s’est produite à la suite de la crise de la dette extérieure, provoquant un cercle vicieux de dévaluation, inflation, élévation des taux d’intérêt et augmentation de la dette intérieure, paiement du service de la dette extérieure, dévaluation, et ainsi de suite (Salama et Valier, 1990). La dégradation des systèmes de protection sociale s’est fait sentir non seulement au niveau de l’hyperinflation qui a réduit à l’excès les frais réels, mais aussi du fait de l’aggravation de la crise fiscale, qui a entraîné des réductions drastiques dans la dépense en développement social.
11À la fin des années 1980 et au début des années 1990, on entre dans une seconde phase de politiques d’ajustement promues par le FMI et la Banque mondiale, et mises en œuvre par les gouvernements latino-américains. On passe à une désinflation soutenue par la surévaluation du taux de change et à des taux d’intérêt élevés pour attirer les capitaux étrangers à court terme, lesquels sont utilisés pour couvrir le déficit commercial qui réapparaît avec la reprise économique. La fuite des capitaux spéculatifs étrangers catalyse la dévaluation et la crise financière, comme au Mexique à la fin de 1994. L’ajustement des finances publiques devient récurrent, conduisant à des budgets chaque fois plus austères qui affectent le système de protection sociale.
12Outre les politiques d’ajustement pernicieuses, les pays d’Amérique latine se sont vus entraînés dans une vague de privatisations qui ont, elles aussi, affecté les systèmes de protection sociale. C’est le cas du système mexicain de santé et de sécurité sociale, soumis aux exigences persistantes de la Banque mondiale dont le but était d’agrandir le marché de la médecine privée. Le système brésilien a subi moins de pressions car, depuis les années de la dictature militaire, l’expansion de la protection de la santé s’est faite principalement au travers d’entreprises médicales privées. La protection sociale est intimement liée au rapport salarial, dont les formes de régulation les plus globales ont conduit, lors d’une phase de croissance économique, à des relations industrielles tendant à l’augmentation du niveau de cette protection. Le rapport salarial analyse l’utilisation productive de la force de travail et sa reproduction au travers d’un ensemble de formes institutionnelles qui régulent le processus et les conditions de travail ainsi que le marché du travail. Les formes institutionnelles codifient socialement un ou plusieurs rapports sociaux de production dont la fonction est de réguler le comportement de la force de travail (Boyer, 1986). Or, la reproduction de cette dernière s’est vue facilitée par la sécurité sociale, l’assistance publique, les programmes de soutien au logement et par l’éducation, dans le fonctionnement desquels la gestion de l’État a été importante. La bonne marche des institutions de protection sociale dépend, outre de l’appui politique du mouvement ouvrier et d’un financement adéquat, du niveau d’organisation sociale et du degré de marchandisation des institutions elles-mêmes.
13La libéralisation des flux commerciaux et financiers, menée à bien en Amérique latine à la fin des années 1980 et au début des années 1990, constitue l’une des étapes les plus récentes et les plus achevées de l’impact du processus de globalisation dans la région. L’ouverture commerciale et financière a conduit à approfondir la restructuration productive qui avait commencé avec la crise du régime d’accumulation par substitution d’importations. L’intégration régionale et sa coïncidence avec l’ouverture économique est venue influencer encore plus la restructuration productive, étant donné que les économies étaient désormais plus exposées à la concurrence intra-régionale.
14Deux stratégies ont permis de faire face à la restructuration productive dans les pays les plus industrialisés d’Amérique latine : a) la solution productive et structurelle à long terme, et b) la solution politique et conjoncturelle, centrée sur le problème de la création de la valeur et de sa répartition entre les salaires et les profits, et qui conçoit le rapport salarial comme un simple coût de production (Gutiérrez, 1990 : 64). La première est centrée sur l’innovation technologique et sur l’introduction d’équipements souples et informatisés dans le processus de travail. La seconde repose sur l’assouplissement des conditions de travail, dissociant le salaire de la productivité et de l’augmentation des prix, annulant la stabilité de l’emploi, augmentant l’intensité du travail et diminuant les prestations sociales. Cette seconde stratégie a rejoint les politiques drastiques d’ajustement néolibéral appliquées dans la région latino-américaine, et s’est appuyée sur elles.
15Il faut signaler que les deux stratégies de reconversion productive se combinent souvent. Au Mexique, par exemple, on a introduit dans l’industrie automobile une technologie de pointe, mais en même temps, la journée de travail s’est intensifiée et l’on a instauré dans les installations du nord du pays des salaires et des prestations sociales inférieurs à ceux pratiqués dans le centre du Mexique. La première stratégie est liée aux grandes entreprises, principalement à celles qui sont tournées vers l’exportation, alors que la seconde concerne surtout les petites et moyennes entreprises qui approvisionnent le marché national.
16Les transformations productives induites par le processus de mondialisation et par les schémas d’intégration régionale ont aussi entraîné une altération importante du profil productif de vastes secteurs, ce qui à son tour a exigé l’augmentation des besoins de qualification et de formation de la main-d’œuvre et occasionné une mutation dans la nature du marché du travail, en particulier en ce qui concerne la qualité des emplois créés –concentrés dans le secteur informel et sujets à des horaires de travail souples et à la marge des législations du travail (Freitas-Barbosa et Candia Veiga, 1997 : 65). La restructuration productive exacerbée par les politiques d’ajustement néolibéral, l’ouverture économique et l’intégration régionale ont entraîné la montée des indices de chômage et de sous-emploi et la précarisation des conditions de travail, donnant à ces dernières un caractère informel. Ces phénomènes ont à leur tour frappé les systèmes de protection sociale, surtout dans le secteur de la santé et de la sécurité sociale, étant donné la baisse ou la stagnation de l’affiliation et des cotisations, et ont mis en échec les institutions d’assistance publique, vu l’augmentation exorbitante des exclus de la sécurité sociale.
17Les schémas d’intégration projettent également d’autres types d’influence sur leurs systèmes respectifs de protection sociale, lesquels diffèrent non seulement au niveau des accords qui ont pris forme dans les protocoles d’intégration, mais aussi par la configuration du système de protection sociale lui-même et par la structure du système politique de chaque pays. Malgré le fait que l’Alena ne contient dans l’ensemble de ses articles que très peu de choses sur la protection sociale, on peut alléguer qu’il existe plusieurs facteurs qui ont ou qui pourraient influencer la voie de la protection sociale. Selon Boismenu (1995 : 88-89), il y a quatre facteurs importants :
18a) La section sur les services accepte le libre-échange dans la gestion des services sociaux et de santé, dont certaines des prestations sont sous-traitées par des institutions privées, lesquelles deviennent l’objet d’une commercialisation transfrontalière ; b) l’imprécision dans le concept de subvention pourrait donner lieu à ce que certaines mesures sociales soient interprétées comme des avantages discriminatoires ; c) dans le cas des monopoles publics, bien que l’on puisse instaurer ces mesures à la condition d’une consultation préalable avec les autres membres de l’Accord, les contraintes fixées sont telles que cette création s’avère difficile, voire improbable, ce qui pourrait amener l’Etat à se retirer de la prestation des services sociaux ; et enfin, d) les pays ont l’obligation de libéraliser les marchés publics, du moins au niveau fédéral, et l’on suppose que cette libéralisation s’étendra aux États fédérés et aux municipalités, ce qui implique que le modèle américain de protection sociale fera pression sur les modèles mexicain et canadien.
19Cependant, l’influence de l’Alena sur la protection sociale va au-delà des quatre points mentionnés par Boismenu. Dans le chapitre sur les services entrent les services financiers et les assurances en tout genre, y compris les assurances maladie/accidents, qui étendront très probablement leur rayon d’action non seulement par la sous-traitance mentionnée au point a) mais aussi par la vente directe de leurs polices d’assurance. L’ouverture du marché ayant eu lieu en l’an 2000, il est fort probable que les progrès déjà accomplis par les compagnies d’assurances vont, avec l’appui de la politique gouvernementale, accélérer leur avance.
20En outre, les effets sur la protection sociale possèdent d’autres aspects dont le développement va être facilité à mesure que seront libéralisés dans l’Alena les marchés comme ceux de l’industrie pharmaceutique, des équipements biomédicaux et de la recherche / développement (R&D) de processus et de produits. Même si l’industrie pharmaceutique montre un des indices de multinationalisation les plus élevés, l’ouverture commerciale pourrait décimer les quelques fabriquants nationaux de produits pharmaceutiques et d’équipements médicaux. La R&D pourrait augmenter, dans des pays comme le Mexique et le Brésil, par le biais de sociétés multinationales qui peuvent fonctionner à des coûts plus bas en ce qui concerne le salaire des chercheurs, des scientifiques et du personnel technique ; mais le problème deviendrait alors celui du contrôle des brevets et des marques, ainsi que du transfert de technologie. L’Alena a fait de la question des droits intellectuels l’un de ses chapitres les plus importants, où sont accordés des délais plus longs à la durée des brevets, ce qui donne aux multinationales de plus grandes marges de manœuvre.
MERCOSUR ET ALENA : LA DIMENSION COMMERCIALE PRIME SUR LA DIMENSION SOCIALE
21Le Mercosur aussi bien que l’Alena ont mis l’accent sur la dimension commerciale, reléguant au second plan la dimension sociale, surtout dans l’Alena dont aucun article ne fait mention d’objectifs concernant le bien-être social, ni ne prévoit la participation d’institutions sociales à son fonctionnement. On peut constater que les flux commerciaux ont significativement augmenté dans les deux schémas d’intégration sous-régionale, mais que la participation des partenaires sociaux s’est heurtée à d’importants obstacles dans le Mercosur et qu’elle est pratiquement inexistante dans l’Alena. Avant d’aborder la dimension sociale, jetons donc un coup d’œil sur l’évolution des flux commerciaux.
22Le dynamisme du Mercosur a jusqu’à présent été excellent, puisque le commerce intrarégional est passé de 3,639 milliards de dollars en 1990 à 12,127 milliards en 1994, soit une augmentation de 333 %. Vers 1995, l’Argentine absorbait presque 9 % des exportations brésiliennes, devenant ainsi le deuxième partenaire commercial du Brésil après les États-Unis. Parallèlement, le Brésil est le principal acheteur de produits agricoles et manufacturés argentins (Rodríguez, 1997 : 150). L’extension du Mercosur au Chili et à la Bolivie donnait à ce schéma en 1997 un PIB total de 1 178 milliards de dollars (Secrétariat du Mercosur, 1998) et un marché potentiel de plus de 200 millions de consommateurs.
23L’expansion des exportations à l’intérieur du Mercosur a suivi, entre 1994 et 1998, un rythme de 13, 9 % par an, passant de 12,127 à 20,344 milliards de dollars, comme le montre le tableau n° 7. En revanche, le dynamisme des exportations des pays membres du Mercosur vers d’autres pays ou blocs de pays a été moindre : avec l’Union européenne (UE), elles ont augmenté à un taux annuel de 5,1 %, à un taux inférieur à 1 % par an avec l’Alena, et à un taux de 4,9 % avec le reste des pays d’Amérique latine. Alors qu’en 1994 les exportations vers l’Union européenne occupaient toujours la première place, suivies de celles vers les pays de l’Alena et en troisième place, les exportations vers le Mercosur lui-même, en 1998, la première place revenait à ce dernier, et la deuxième et la troisième places, respectivement à l’Union européenne et à l’Alena. Ainsi, le Mercosur, à la différence de l’Alena, donne la possibilité d’une intégration latino-américaine reposant sur une croissance endogène plutôt que sur une croissance poussée par les exportations vers les États-Unis.
24La forte montée des investissements étrangers dans le Mercosur renforce la possibilité d’une intégration orientée "depuis l’intérieur" (Marques-Pereira, 1998 : 6). Les Brésiliens et plusieurs de leurs voisins ont eu tendance à voir les préférences commerciales comme étant géographiquement définies et relativement locales, vision que l’on retrouve dans le Mercosur. Cependant, le modèle actuel de ses flux commerciaux suggère que les intérêts commerciaux du Brésil pourraient à long terme s’étendre au-delà des frontières sous-régionales (Coes, 1996 : 84)3.
25L’Alena a lui aussi développé une dynamique d’expansion importante, puisque le commerce entre ses membres est passé de 299,109 milliards de dollars en 1993 à 512 milliards en 1998 (IMF Trade Statistics, 1994 et 1999), c’est-à-dire qu’il a augmenté à un taux annuel de 11,4 %, lequel est légèrement inférieur à celui du Mercosur. L’échange commercial entre les États-Unis et le Mexique est passé de 108,952 milliards de dollars en 1994 à 206 milliards en 1998, atteignant un taux de croissance annuel de 17,1 % (BDI-NECI, 1999), supérieur à celui du commerce entre le Canada et les États-Unis, qui a été de 7 %.
26Examinons maintenant l’influence des partenaires sociaux à l’intérieur des deux schémas d’intégration qui nous intéressent, au niveau des débats sur leur insertion d’objectifs sociaux. On peut interpréter la participation des partenaires sociaux à l’intérieur du Mercosur en trois phases importantes (Vigevani, 1997 : 8). La première va de la signature du Programme d’intégration et de coopération économique entre le Brésil et l’Argentine (1986) jusqu’à 1991, période durant laquelle les forces politiques et sociales, y compris les syndicats, n’ont eu aucun lien, ou presque, avec le déroulement des négociations. La deuxième phase débute avec la signature du traité d’Asunción en 1991, et s’achève en 1992 avec la réunion de Las Leñas. On passe dans cette étape d’une ignorance de l’intégration régionale à sa reconnaissance comme thème important, mais on y maintient une position critique envers ce processus. Dans la troisième phase, l’attitude des syndicats dans les quatre pays (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay), et en particulier celle des organisations ouvrières – la Centrale unique des travailleurs (CUT) au Brésil et l’Assemblée intersyndicale des travailleurs-Confédération nationale des travailleurs (PIT-CNT) en Uruguay – a été de lutter ouvertement pour un espace à l’intérieur du processus de négociations.
27Les dirigeants syndicaux brésiliens étaient préoccupés par le fait que le processus d’intégration régionale puisse entraîner la réduction du niveau d’emploi, des formes de dumping social ainsi qu’une dégradation de la protection sociale et l’aggravation des effets des politiques récessives, étant donné que le Mercosur avait été pris par les gouvernements comme un instrument pour accélérer leurs programmes de libéralisation et de dérégulation économiques. Le choix le plus adéquat était donc pour eux de s’intégrer aux négociations (Vigevani, 1997 : 9). Les entrepreneurs sont eux aussi passés par une étape où ils se sont montrés critiques à l’égard de l’intégration régionale, mais après avoir évalué les possibles bénéfices sectoriels ou régionaux qu’elle pourrait leur apporter, ils ont changé d’attitude et commencé à la soutenir, manifestant chaque fois plus de détermination (Vigevani, 1997 : 9).
28Les syndicats ont suivi dans le Mercosur une double stratégie : l’une, plus ample, qui a tenté de disputer au gouvernement et aux entrepreneurs l’hégémonie de l’intégration, et l’autre, plus spécifique, centrée sur l’amélioration des conditions de travail et du niveau de vie des travailleurs. En ce qui concerne la première, on a obtenu la participation syndicale au sous-groupe de travail (SGT) 11 "Conditions de Travail, Emploi et Sécurité sociale" (par la suite SGT-10), comme instance qui garantirait un espace institutionnel de discussions. Quant à la seconde, on a proposé aux quatre pays du bloc régional de ratifier un ensemble de conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT) et l’élaboration d’une Charte sociale ou des Droits fondamentaux du Mercosur (Ibid., 11).
29Mais, dans le processus de négociations à l’intérieur du Mercosur, les organisations syndicales n’ont obtenu que de très modestes résultats. La faiblesse des mouvements syndicaux des quatre pays membres aussi bien que les transformations productives ou que la pression exercée par les problèmes sociaux internes sur l’action syndicale expliquent en bonne partie les maigres résultats des syndicats dans le Mercosur (Portella de Castro, 1995 : 11).
30Dès 1991, on a commencé à discuter la proposition syndicale d’une charte sociale, mais on a peu avancé étant donné que depuis le début, le gouvernement brésilien s’est fermement opposé à toute mesure de sanction commerciale qui découlerait d’un accord sur le travail, aussi bien dans le Mercosur que dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Ce n’est qu’en 1997 qu’on est parvenu à établir un "Protocole social et du travail", dont il est proposé que l’application et le suivi soient du ressort d’un organe tripartite, lequel aura deux instances, l’une nationale et l’autre régionale ; proposition qui rappelle le fonctionnement de l’Accord nord-américain de coopération dans le domaine du travail – Anact (Von Bülow, 1998 :17). Le Protocole constitue cependant un document proche d’une charte sociale et est différent de l’Anact, ce dernier ne mentionnant en rien la justice sociale, puisqu’il ne s’agit pas d’un accord pour la défense des travailleurs mais d’un instrument qui vise simplement à enrayer la concurrence déloyale issue du manquement aux normes du travail (De Buen, 1999 : 10-11).
31Le mouvement syndical à l’intérieur de l’Alena a jusqu’à présent suivi des chemins différents de ceux du Mercosur. D’une part, la Fédération américaine du travail (AFL-CIO) et, au Canada, le Congrès des organisations industrielles (FAT-COI), se sont fermement opposées à la signature de l’Accord par le gouvernement et à sa ratification par le Congrès. De même, le Congrès du travail du Canada (CTC) a adopté une position proche de celle de la FAT-COI, et la Confédération des syndicats nationaux (CSN) du Canada, dont le siège est à Québec, tout en acceptant l’intégration, a critiqué son caractère néolibéral et proposé une révision de ses fondements. D’autre part, la Confédération des travailleurs du Mexique (CTM), haute représentante du corporatisme pro-gouvernemental, s’est solidarisée avec le gouvernement et a soutenu l’Alena, à la différence du Front authentique des travailleurs (FAT) mexicain et des syndicats universitaires indépendants, qui l’ont ouvertement rejeté (Freitas-Barbosa et Candia Veiga, 1997 : 82-83). Au contraire des mouvements syndicaux des pays du Mercosur, qui ont constitué une commission "coordinatrice des centrales syndicales du Cône Sud", laquelle a présenté un front commun luttant pour obtenir un espace de participation dans le réseau institutionnel, les mouvements ouvriers du Canada, des États-Unis et du Mexique ne sont pas parvenus à un consensus ni n’ont gagné d’espace institutionnel dans l’Alena.
32Malgré le manque d’unité des mouvements syndicaux des pays de l’Alena, les centrales ouvrières, la CTM mise à part, ont soutenu des réseaux sociaux articulés par des mouvements de la société civile, réseaux qui ont encouragé plusieurs initiatives trinationales pour tenter d’imprégner l’Alena d’une dimension sociale. Au Canada, le Mouvement populaire solidaire du Québec, qui a mêlé plus de cent organisations sociales à la dénonciation de l’Alena, a présenté, conjointement avec le CTC, la CSN et Dialogo 86, des alternatives à caractère social pour modifier l’Accord. Au Mexique, le Réseau mexicain contre la zone de libre-échange (Rmalc), et aux États-Unis, l’Alliance pour un commerce responsable, ont participé au processus d’incitation à une opposition régionale au caractère excluant de l’Alena (Ibid. : 83).
33Aux États-Unis, les organisations civiles aussi bien que syndicales, l’AFL-CIO en particulier, ont fait pression sur le gouvernement pour que soient intégrées des règles qui évitent une concurrence déloyale en raison du bas niveau de salaire au Mexique et de l’absence de mesures visant à préserver l’environnement. Étant donné que la ratification de l’Alena par le Congrès américain était menacée, le Président Clinton a encouragé, en octobre 1992, la négociation d’accords parallèles liés aux conditions de travail et à l’environnement, laquelle a eu lieu entre février et août 1993. Pourtant, ces accords n’ont pas comblé les attentes sur l’établissement d’un objectif pour améliorer les conditions de travail des travailleurs mexicains et sur l’observance des normes environnementales, ce qui fait que le Mexique continue à souffrir d’un "dumping social" important.
34Les salaires pratiqués au Mexique sont, par rapport à ceux des États-Unis, excessivement bas, atteignant des proportions de treize contre un dans des industries comme l’automobile (Robinson, 1996 :186). Ils sont en outre inférieurs aux taux salariaux de la Corée et de Taiwan, qui étaient de 56 % plus élevés qu’au Mexique au début des années quatre-vingt-dix (Rothstein, 1993 : 68, cité par Boismenu). De plus, les conditions de travail y sont moins bonnes, même dans des entreprises étrangères, non seulement au niveau des installations, des équipements et des technologies, mais aussi en ce qui concerne l’intensité et la durée des journées de travail. Les grandes organisations pro-gouvernementales, la CTM en particulier, offrent des contrats de protection, surtout aux sociétés multinationales qui suivent une stratégie d’accroissement de la productivité et de bas salaires4.
35Il est très probable que l’Alena stimule la généralisation de cette stratégie et permette à l’économie mexicaine de se réorganiser selon cette orientation. Les entreprises étrangères qui s’installent au Mexique pourront le faire n’importe où dans le pays et y obtenir les mêmes avantages en ce qui concerne les tarifs douaniers que le Canada et les États-Unis. Elles pourront aussi vendre aux consommateurs mexicains, ce que ne pouvaient pas faire les maquiladoras avant l’Alena. Cela pourrait nuire aux entreprises mexicaines dont les salaires sont plus élevés et la productivité plus faible que ceux des maquiladoras et des usines des multinationales. Les syndicats des entreprises mexicaines s’en trouveraient également affaiblis (Robinson, 1996 : 175-176).
36En ce qui concerne les problèmes d’environnement, l’Alena stipule qu’aucun de ses membres ne pourra réduire les normes de protection de l’environnement afin d’attirer des investissements, et qu’aucun d’entre eux ne peut ignorer ces dispositions. Afin d’éviter de mettre d’inutiles barrières au commerce, l’Alena recommande l’utilisation de normes internationales importantes pour le développement des mesures sanitaires et phytosanitaires dans ses pays membres (Castillo et López, 1996 :451). Mais, compte tenu des exigences minimes en matière de protection de l’environnement que l’on observe traditionnellement au Mexique, on soutient qu’elles constituent une variable importante de localisation. Au-delà de cette considération, on peut affirmer que les conditions environnementales empirent actuellement dans la région frontalière, vu la croissance importante et la diversification des industries de maquila, dont les coûts sont reportés sur la population environnante.
37On a beaucoup discuté de la nécessité pour l’Alena d’intégrer une charte sociale assez semblable à la Charte européenne, laquelle contiendrait un ensemble de principes et de normes qui contribueraient à la régulation des conditions de travail, surtout en ce qui concerne les conditions et la sécurité au travail, la protection de la santé et les prestations sociales (Adams et Turner, 1996 : 149-150). Cependant, l’Accord n’en a pas intégré, étant donné que l’avis des grandes entreprises s’est imposé, avis qui dans les faits se manifeste dans la stratégie de haute productivité et de bas salaires. Mais selon Boismenu (1995 : 111), la possibilité d’une charte sociale pourrait s’imposer dans l’avenir, puisque "les mouvements syndicaux, populaires et écologistes qui lui sont favorables pourraient, dans un futur proche, engendrer une situation qu’on pourra difficilement ignorer".
RÉFORMES RÉCENTES DANS LES SYSTÈMES DE PROTECTION SOCIALE DU BRÉSIL ET DU MEXIQUE
38Même si l’assouplissement du rapport salarial, la dérégulation et les tendances à la privatisation dans le système mexicain de protection sociale viennent d’une époque antérieure à l’Alena et s’expliquent surtout par des facteurs internes, l’entrée en vigueur de celui-ci a formalisé la continuité des pressions américaines et, en même temps, a justifié le discours du gouvernement mexicain pour appliquer une politique de type néolibéral. Depuis le milieu des années 1980, une véritable avalanche de nouvelles lois a tenté de mettre la politique économique et sociale mexicaine en harmonie avec le "consensus de Washington", bien qu’il reste à engager, entre autres initiatives de lois de la part du gouvernement, le changement de la Loi fédérale du travail, maintenant sous la pression de la "compétitivité" à l’intérieur de l’Alena5.
39L’influence du Mercosur sur les institutions de protection sociale a été moins négative que celle de l’Alena, si l’on prend en compte la position un peu plus ouverte des gouvernements et de la participation de la Commission coordinatrice des centrales syndicales du Cône Sud. On notera en outre l’existence du Forum consultatif économique et social, au sein duquel des propositions ont été faites pour que l’intégration régionale ne mine pas les systèmes de protection sociale ni n’encourage le dumping social. On a engagé des négociations dans les sous-groupes de travail 7 et 10 afin d’établir des normes qui protègent les travailleurs migrants, comme cela a été le cas pour l’industrie du bâtiment. On est aussi parvenu, dans les quatre pays, à un accord sur l’éducation. Le niveau de concertation entre les pays membres, plus élevé qu’entre ceux de l’Alena, pourrait amener à une négociation plus positive en ce qui concerne les points mentionnés par Boismenu qui peuvent avoir une incidence sur les systèmes de protection sociale. C’est ainsi que, lors du 13e sommet du Mercosur qui s’est tenu à Buenos Aires en juin 2000, les États membres ont signé une charte sociale, également paraphée par la Bolivie et le Chili.
Les réformes du système brésilien de protection sociale dans les années 1990
40La nouvelle Constitution de 1988, à l’époque des premières négociations entre le Brésil et l’Argentine pour créer le Mercosur, marque une étape importante dans la réforme du système brésilien de protection sociale. On a progressé dans la législation, passant d’un modèle qualifié de "méritocratico-particulariste" à un modèle "institutionnalo-redistributif" (Vianna, 1992 : 175). Les droits sociaux, l’universalisation de l’accès à la couverture et l’extension de cette dernière ont pris de l’ampleur. Le lien contributif comme principe structurant du système s’est distendu, et la conception de la sécurité sociale a culminé avec un mode de protection plus universel, la définition de bénéfices sociaux minimums et un plus grand engagement de l’État et de la société dans le financement du système (Draibe, 1992 : 62-63). L’assistance publique a aussi fait un grand pas en avant dans la nouvelle Constitution, puisqu’elle y est considérée comme un droit de la population, indépendamment des contributions préalables de toutes sortes, et qu’on y a aussi intégré le droit des familles à percevoir un revenu minimum (Soria, 1995 :46).
41Plusieurs années après la réforme constitutionnelle de la protection sociale en 1988, ses résultats ont été très inférieurs à ceux que l’on attendait, comme le note Melo (1993 : 154). Celui-ci explique cet échec relatif non seulement par l’effet combiné du timing de la session de l’assemblée constituante, du modèle de recrutement des cadres techniques et de la crise fiscale, mais aussi par l’action des clientèles de bénéficiaires et des pressions universalistes, ainsi que par la force du corporatisme sectoriel. Il reste toujours une série d’inégalités et de privilèges flagrants qu’il est difficile d’éradiquer6. On peut affirmer qu’entre 1989 et 1992, une "contre-réforme conservatrice" a été engagée, dont la gestation s’est faite entre 1988 et 1990, avec la chute de la dépense en développement social et l’opposition opiniâtre du pouvoir exécutif à mettre en place les réformes constitutionnelles de 1988. La contre-réforme s’est renforcée entre 1990 et 1992 sous le gouvernement de Collor, au moyen d’une politique qui, en favorisant le clientélisme dans les programmes fédéraux de protection sociale, a suscité la fragmentation des institutions et débouché sur une désorganisation importante des politiques publiques (Cohn, 1999 : 2).
42Entre 1990 et 1993, le Congrès a complété les principes de la Constitution de 1988, en particulier ceux concernant la sécurité sociale et les systèmes unifiés de santé (SUS). Mais, dans les faits, le gouvernement de Collor a appliqué des mesures de réduction des dépenses sociales, pour respecter le programme d’ajustement économique et les contraintes fiscales qui en découlaient. Le budget de la sécurité sociale a diminué de 15,9 %, pendant que celui des autres domaines sociaux accusait une baisse de 34,7 % ; ainsi, le budget total a été réduit de 25,35 %. En outre, on a recentralisé les décisions de politique sociale, en négociant directement avec les municipalités et en imprégnant la gestion de la politique sociale d’un style clientéliste et "patrimonial". Plus encore, il y a eu une détérioration du réseau des services sociaux, étant donné la désastreuse réforme administrative et les coupes budgétaires de type néolibéral, comme l’élimination des pensions alimentaires (Draibe, 1997 : 121-122). Tout ceci a engendré une situation paradoxale, car, d’un côté, on a généreusement réformé le système de protection sociale, et de l’autre, le Brésil a vécu le marasme le plus grave de son histoire, aussi bien dans ses programmes que dans le réseau de prestations de services sociaux, qui a surtout touché les segments les plus pauvres de la population (Ibid.).
43C’est à partir du gouvernement d’Itamar Franco qu’un effort important a été fait pour parvenir à redémarrer les programmes de protection sociale. D’un côté, on a repris l’esprit des réformes constitutionnelles de 1988 en promulguant, en décembre 1994, la Loi sur l’assistance publique, et de l’autre, on a assigné des fonds plus importants pour rattraper le niveau des dépenses de la protection sociale (Colin, 1999 : 2). Au cours de la première année du gouvernement de Franco, le budget global a augmenté de 24,4 %, retrouvant presque son niveau de 1989, et bien qu’il ait baissé de 3,2 % en 1994, il avait en 1996 regagné 10 % par rapport à 1993.
44À son arrivée au pouvoir en 1995, Fernando H. Cardoso, dans son programme de gouvernement, s’est fixé deux lignes d’action : d’une part, la réforme du pouvoir judiciaire et du système politique pour tenter de consolider la démocratie, et de l’autre, la restructuration du système de protection sociale dans le but de diminuer de façon significative l’inégalité et la pauvreté. Cette problématique interne s’est vue confrontée à la libéralisation économique, à l’intensification de la dimension commerciale du Mercosur et aux ajustements économiques qui jugulaient à un certain degré l’activité productive et aggravaient l’inégalité économique et sociale, ce qui a affecté la crédibilité du gouvernement auprès des classes sociales les plus démunies.
45La politique de protection sociale a été définie autour de trois axes principaux : 1) fournir des services de base à caractère universel, qui incluent des programmes de sécurité sociale, de protection de la santé, d’éducation, de bien-être, d’hygiène publique et de soutien au logement ; 2) le travail, l’emploi et des programmes sur le revenu, centrés sur la création de nouvelles opportunités de travail et sur la réduction de la discrimination sociale qui prévaut même sur le marché du travail ; 3) des programmes prioritaires visant l’élimination de la pauvreté, dont certains sont inclus dans les programmes universels, d’autres faisant partie du programme de "Communauté solidaire" (Draibe, 1997: 124).
46L’accent mis sur des politiques sociales à caractère universel implique pour le gouvernement de s’engager à affecter des ressources sur la base d’une couverture générale au lieu de seulement financer des programmes de compensation et d’urgence. On propose l’universalisation des services de base ainsi que leur restructuration pour parvenir à une plus grande efficacité et à une meilleure qualité. On réaffirme en même temps l’objectif de décentralisation, ainsi que l’incitation à la participation de secteurs d’entreprises et d’ONG. Au Mexique, si l’on a insisté sur la décentralisation des services sociaux et sur la participation des entreprises et des ONG, on n’est pas conscient de la nécessité de s’associer avec ces dernières. Au Brésil, on a cherché à encourager la création d’emplois par le financement des micro et petites entreprises, l’investissement en infrastructure urbaine, la dérégulation des conditions de travail et la modernisation des relations avec les syndicats. Des programmes ont également été réalisés pour la formation et l’amélioration de la force de travail (les entreprises ont été encouragées à agir dans ce sens), ainsi que pour renforcer l’assurance-chômage et les prestations des travailleurs ruraux et les retraités7 (Draibe, 1997 : 125).
47Le programme de Communauté solidaire a tenu compte de plusieurs des recommandations de la Banque mondiale, qui ont aussi été appliquées au Mexique et dans plusieurs pays d’Amérique latine où se sont répandus les programmes de solidarité dès la fin des années 1980. On compte parmi elles la recommandation de projets auxquels doivent participer les communautés locales et qui, par la suite, seront gérés et contrôlés par elles. La hiérarchisation des priorités dans une région, selon l’importance de la pauvreté, constitue un autre mécanisme d’affectation. Ce programme fédéral est aussi lié aux gouverneurs et aux maires.
48Le système brésilien de santé doit faire face à plusieurs problèmes qui affectent sa bonne marche, parmi lesquels la taille importante des SUS et de leur clientèle, les obstacles à une bonne gestion, ainsi que sa situation financière grave, dont le déséquilibre se manifeste dès le début des années 1990. La décentralisation du secteur de la santé et d’autres services ne semble pas être une solution à ses problèmes, à moyen terme du moins. L’ajustement fiscal qu’ont subi les États fédérés et un grand nombre de municipalités augmente les problèmes financiers du secteur de la santé8. Depuis que le Fonds de stabilisation fiscale a été établi, en 1995, tout le système de protection sociale a été affecté, car ce fonds ne laisse que peu de marge pour améliorer les programmes.
49Un problème important est apparu : les critères de redistribution des ressources fiscales aux États et aux municipalités n’ont pas été définis, malgré le fait que la loi pour l’organisation et le financement de la protection sociale a été promulguée dès juillet 1991 (Draibe, 1997 :132). Un autre problème, au cœur du budget de la protection sociale, consiste en ce que si la mise en œuvre des programmes de santé et de bien-être social est décentralisée, son financement reste concentré entre les mains du gouvernement fédéral. Ce n’est que récemment qu’ont été introduits certains mécanismes de transfert aux États et aux municipalités pour assurer la décentralisation. On a cependant tiré quelques bénéfices de la décentralisation fiscale de 1988 dans la structure de la dépense sociale fédérale, puisque celle-ci a diminué de 65,8 % en 1980 à 57 % en 1992, avec pour conséquence l’augmentation des dépenses sociale au niveau des États et des communes (Ibid. : 136).
La privatisation des retraites à l’Institut mexicain de sécurité sociale
50Jusqu’à 1982, la dynamique des institutions d’assistance publique et de sécurité sociale a été celle d’un accroissement de la couverture, soutenu par des augmentations budgétaires qui, bien que modestes, leur permettaient d’agrandir leur rayon d’action. À partir de 1983, la crise économique et celle des finances publiques ont conduit l’administration du président Miguel de la Madrid à engager une politique d’austérité d’inspiration néolibérale qui s’est traduite par un début de décentralisation des services médicaux du ministère de la Santé, ainsi que par une réforme administrative et par différentes formes de privatisation partielle, aussi bien au ministère de la Santé qu’à l’Institut mexicain de sécurité sociale (Imss) et à l’Institut de sécurité sociale pour les fonctionnaires et les employés publics (Issste). Sous le mandat de Carlos Salinas (1988-1994), la privatisation de quelques fonctions auxiliaires de ces institutions s’est accrue et l’on a posé les bases de la privatisation des retraites à l’IMSS, mouvement qui a pris forme au début du mandat d’Ernesto Zedillo (1994-2000).
51Comme l’indique Laurell (1995, 1997), la privatisation de la sécurité sociale ne peut être totale, étant donné la pauvreté de la majorité de la population mexicaine et l’exigence de rentabilité des entreprises privées. En réalité, la privatisation sera sélective et visera à créer un marché de services de santé s’adressant aux couches moyennes et hautes. La privatisation définitive des retraites (l’assurance vieillesse-invalidité, licenciement pour les plus de 60 ans et décès – Ivcm) a eu lieu avec l’approbation de la nouvelle Loi de l’Imss, le 8 décembre 1995, dont l’entrée en vigueur, le 1 er janvier 1997, fut repoussée au mois de juillet de la même année du fait de l’incapacité financière de l’État à honorer sa contribution. La loi a été approuvée grâce à la majorité des représentants que comptait encore le parti officiel (PRI) aux chambres législatives et qui ont servi de courroie de transmission au pouvoir exécutif pour imposer sa volonté. Les propositions des syndicats, des organisations sociales et des chercheurs universitaires furent tout simplement rejetées9, le gouvernement, aligné sur les positions de la Banque mondiale, s’étant appuyé sur l’opinion des dirigeants des organisations d’entreprises.
52La nouvelle loi remplace l’Ivcm et le système d’épargne-retraite (SAR) par l’assurance retraite, licenciement pour les personnes âgées et vieillesse (Receav) et par l’assurance invalidité et vie (INVI). La Receav est financée par 6,5 % du salaire base de cotisation (SBC), acquittés conjointement par les employeurs (5,15 %), les travailleurs (1,125 %) et l’État (0,225 %), plus 5,5 % calculés sur le salaire minimum général (SMC) et versés par l’État. Ces fonds seront gérés par les Administrateurs de fonds de pension (Afore), qui ouvriront un compte individuel à chaque travailleur. De même, 5 % sur le salaire correspondant seront déposés sur ce compte à l’Institut national pour le soutien au logement des travailleurs (Infonavit), à condition que le travailleur ne soit pas bénéficiaire d’un prêt logement. L’Invi est financée par des quotes-parts de 2,5 % sur le SBC, acquittées par les patrons, les travailleurs et le gouvernement.
53Chacune des Afore est accompagnée d’une Société d’investissements de fonds de pension (Siefore) qui se charge d’investir les épargnes déposées dans des valeurs financières et de payer sa pension au travailleur lorsqu’il choisit, en prenant sa retraite, la modalité de la retraite programmée. Le retraité pourra aussi choisir une rente viagère, qui disposera d’une compagnie d’assurances à laquelle seront remis les fonds du compte individuel. Pour avoir droit à la retraite, l’assuré doit avoir cotisé pendant 1 250 semaines et être âgé de 65 ans. Au cas où il aurait l’âge requis mais pas le nombre de semaines de cotisation nécessaire, le travailleur pourra retirer le solde de son compte individuel en une seule fois ou continuer à cotiser jusqu’à atteindre le nombre de semaines requis pour que sa retraite s’active. Ce n’est qu’après un minimum de 750 semaines de cotisation que l’assuré aura droit aux prestations en espèces de l’assurance maladie et maternité (art. 154 de la nouvelle Loi de l’Imss).
54On a amplement débattu sur les avantages et désavantages du régime de retraite par capitalisation et de sa gestion privée, mais il convient pour cela de connaître le rendement des Siefore depuis qu’elles ont commencé à fonctionner le 1er juillet 1997. Le tableau n° 8 montre le rendement moyen des quatorze Siefore en termes réels (prix de juillet 1997) : au cours des six premiers mois de fonctionnement, le rendement réel a été de 4,7 %, de 9,4 % en termes d’annualisation, baissant à 5,7 % en 1998. On peut voir que le rendement nominal annualisé des bons du Trésor (Cetes) a été de 18,75 % en 1997 et de 23,57 % en 1998, rendements qui, si on leur enlève l’inflation, sont très proches de ceux obtenus par les Siefore. Cela suggère que si les Afore et les Siefore disparaissaient, les travailleurs économiseraient les commissions que les premières leur font payer, et la société économiserait le coût administratif des deux.
55Le coût principal pour les épargnants est celui des commissions retenues par les administrateurs et qui sont très élevées. Au cours de la période juillet-décembre 1997, elles sont montées à 873,3 millions de pesos (données de Amafore, El Financiero du 15/02/98, p. 4), alors que les rendements obtenus ont été de 258,2 millions de pesos (El Financiero du 08/01/98, p. 4). On a ainsi obtenu une perte pour les travailleurs de 615 millions de pesos (tous ces chiffres étant rapportés aux prix de juillet 1997). En ce qui concerne les services médicaux de l’Imss, il existe une proposition de privatisation soutenue par la Banque mondiale, qui inclut un financement de 700 millions de dollars, lequel s’est négocié à l’insu du Congreso de la Unión et de l’opinion publique (voir Proceso, numéros 1117 du 29/III/98, pp. 6-10, et 1118 du 05/IV/98, p. 22).
56Afin d’accroître la compétitivité, on prétend séparer le financement de la prestation de services, lesquels seraient sous-traités par des entreprises médicales privées et des compagnies d’assurances santé, profitant que la loi de l’IMSS sur le "reversement des cotisations" (reversión de cuotas) est en vigueur. Ainsi, les services médicaux de l’IMSS seraient segmentés : l’IMSS conserverait les cotisants dont les revenus sont faibles et moyennement faibles, et la médecine privée s’occuperait des cotisants dont les revenus sont élevés et moyennement élevés (pour une analyse détaillée, cf. Soria, 1999).
RÉFLEXIONS FINALES
57On a abordé les transformations subies par les systèmes de protection sociale du Brésil et du Mexique, en commençant par l’analyse de la dimension stratégique de la mondialisation capitaliste, laquelle a promu l’assouplissement du rapport salarial (dans lequel se situe la protection sociale) comme voie pour rétablir la rentabilité du capital. Même si le processus de mondialisation est encore partiel et qu’il se heurte à la formation des trois principaux blocs économiques régionaux, l’action stratégique se poursuit au moyen des politiques néolibérales synthétisées par le "consensus de Washington".
58Parallèlement aux modalités de politique économique défendues par le processus de mondialisation, la formation du bloc économique mené par les États-Unis a conditionné les schémas d’intégration en Amérique latine en essayant d’établir un modèle d’intégration commerciale de type néoclassico-orthodoxe. Ce modèle, avec l’ensemble des politiques néolibérales, appliqué avec le concours des gouvernements de la région, a favorisé la récurrence des ajustements économiques, l’intensification de la dépendance financière ainsi que l’augmentation du conflit distributif et la dramatique montée de la pauvreté.
59À partir de la crise économique des années 1980, aussi bien au Brésil qu’au Mexique, a débuté un processus de reconversion productive, qui a été accéléré par les schémas d’intégration sous-régionale auxquels ces pays appartiennent. À son tour, la restructuration productive a entraîné la contraction ou la disparition de certaines branches dont les travailleurs se sont retrouvés au chômage et sans sécurité sociale, ce qui a fait pression sur les finances de la sécurité sociale et a répercuté une augmentation de la demande de soins de santé sur les institutions d’assistance publique.
60On peut affirmer que dans le cas du Brésil et du Mexique, les transformations subies par la protection sociale ont reçu le triple impact de la crise économique et politique de chacun des pays d’abord, des mesures d’ajustement de type néolibéral ensuite, et enfin du modèle d’intégration de libre-échange que tentent d’imposer les États-Unis et qui renforce les politiques liées au consensus de Washington. Aussi bien dans le Mercosur que dans l’Alena, et surtout dans ce dernier, à mesure qu’on libéralise les services sociaux et de santé publics ainsi que l’approvisionnement en matériel du secteur public, les compagnies privées d’assurances, de services médicaux, les entreprises pharmaceutiques, les fournisseurs d’équipements médicaux et toute une multitude d’entreprises privées vont occuper une partie du terrain des institutions de protection sociale, étant donné la privatisation croissante qui touche ces institutions.
61L’accent mis sur la dimension commerciale au détriment de la dimension sociale a débouché sur de petits progrès dans le domaine de la protection sociale pour les travailleurs du premier schéma et sur des résultats nuls pour ceux du second. La différence en ce domaine est principalement due à l’attitude active de la Commission coordinatrice des centrales syndicales du Mercosur, qui s’est battue pour que soit accepté un "Protocole social et du travail" proche du contenu d’une charte sociale. Dans l’Alena, en revanche, les principales centrales syndicales des Etats-Unis et du Canada se sont clairement opposées à l’Accord, fait qui, conjugué à l’attitude conservatrice des entrepreneurs et des gouvernements des pays membres, les a incitées à rester en dehors des instances de négociation. Au Mexique, l’intégration silencieuse avec les États-Unis, en bonne partie favorisée par la relation de voisinage entre les deux pays et plus récemment par l’Alena, dans un contexte de crise économique, de crise du système politique mexicain et de faiblesse du gouvernement, a mis le pays sur le chemin d’une future adéquation partielle de son système de protection sociale avec celui des États-Unis. Cette évolution est remarquable en ce qui concerne le développement des marchés privés, mais les usagers n’en tirent pas que des bénéfices.
62Les réformes effectuées dans les systèmes de protection sociale au Brésil et au Mexique dans les années 1990 ont un résultat moins négatif dans le premier des deux pays. Si les réformes importantes de la protection sociale intégrées à la Constitution de 1998 se sont vues bloquées par l’orientation néolibérale et par l’influence indirecte de la dimension commerciale du Mercosur, on a repris, à partir de 1993, un chemin plus démocratique et plus universel pour mettre progressivement en place ces réformes. Cependant, dans la protection sociale brésilienne subsistent quelques formes institutionnelles héritées de l’étape autoritaire, en particulier le clientélisme, le paternalisme et les privilèges et inégalités qui en découlent.
63Sous le mandat de Collor, le credo néolibéral a justifié la réduction de la dépense sociale sous prétexte d’appliquer les ajustements fiscaux et financiers nécessaires à la survie de l’État, dans le cadre d’une politique monétaire d’austérité. Sous le mandat de Cardoso, la dépense sociale a été conditionnée par l’assainissement des finances publiques et par la croissance économique, même si l’on s’est efforcé de fournir des services de base à caractère universel dans les domaines de la sécurité sociale, de la santé, de l’éducation, du bien-être, du logement et de l’hygiène publique, de l’augmentation des opportunités de travail, de l’emploi et de l’augmentation des revenus, tout en créant une large gamme de programmes prioritaires pour combattre la pauvreté. Pourtant, il reste à relever les défis que représentent le financement insuffisant du secteur de la santé et la discordance entre la mise en place décentralisée des programmes de santé et de bien-être social et leur financement centralisé au niveau du gouvernement fédéral.
64En revanche, au Mexique, la réforme du système de protection sociale est plutôt allée du côté de la privatisation que réclament à grands cris les grandes entreprises nationales et étrangères, le gouvernement américain, la Banque mondiale, les banques nationales et internationales et le gouvernement mexicain lui-même. En juillet 1997, le système d’épargne-retraite a commencé à fonctionner par le biais d’institutions financières privées, lesquelles avaient déjà enregistré des pertes au cours du premier semestre de 1998. Or, l’exposition à des taux d’inflation élevés durant les crises financières à caractère cyclique augure sans aucun doute une perte continue dans les fonds de pension des travailleurs. Il faut ajouter à cela que l’objectif déclaré d’accroître l’épargne interne pour étayer l’investissement n’a pas été atteint, étant donné que les fonds d’épargne-retraite ont servi à 96 % à financer la dette intérieure du gouvernement.
65Par ailleurs, les apologistes de l’Alena font pression pour privatiser une partie du secteur de la santé, conjointement aux propositions de la Banque mondiale pour établir une concurrence interne dans le système mexicain de santé au travers de la sous-traitance par des entreprises médicales privées et des compagnies d’assurances, ce qui favoriserait l’entrée de firmes américaines dans le marché privé des soins de santé. Le plan à long terme est d’assigner au ministère de la Santé le contrôle normatif du système de santé et de transférer ses opérations d’assistance publique aux entités fédératives ; le rôle de percepteur des cotisations sera attribué à l’IMSS, qui canalisera les fonds des cotisants aux revenus les plus élevés vers les entreprises privées de soins de santé. L’IMSS prêterait des services médicaux aux travailleurs dont les salaires sont les plus bas et les problèmes de santé plus importants au moyen d’un forfait médicalisé intermédiaire. Ainsi, la citoyenneté serait segmentée en trois parties : celle relevant de l’assistance publique, qui bénéficierait d’un forfait médical minime ; les travailleurs à bas revenu affiliés à l’IMSS, qui auraient droit à un forfait médicalisé que l’on peut imaginer inférieur à ce à quoi ils ont droit actuellement, puisqu’on leur retire des moyens financiers qui proviennent des cotisants à revenu plus élevé ; et celle relevant de la médecine privée, avec une série de plans de soins de santé gradués en fonction des revenus des ayants droit.
66Compte tenu des résultats désastreux de la libéralisation financière et du chantage exercé par les politiques de désinflation pour nier les revendications professionnelles et celles de la protection sociale, le défi pour les pays d’Amérique latine est de tenter de mettre en œuvre une véritable concertation politique qui les amènerait à reconquérir leur souveraineté politique en matière monétaire, comme le propose Marques-Pereira (1998). Le manque de solution à la dette extérieure croissante, sur le plan de l’incapacité de l’Etat à engager une réforme fiscale, et la soumission de la politique monétaire aux marchés financiers ont laissé une marque profonde de démantèlement dans les systèmes de protection sociale, et un appauvrissement croissant dans les pays de la région.
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 L’expansion des exportations de l’Amérique latine dans les années quatre-vingt est due en bonne partie au fait que les États-Unis se sont montrés plus ouverts à l’achat de produits manufacturés de cette région que la Communauté européenne (CEE) ou le lapon (Hurrell, 1996 : 209).
2 Les réformes commerciales orientées vers la libéralisation se sont généralisées au cours des dernières années en Amérique latine. Huit pays, parmi lesquels l’Argentine, le Brésil et le Mexique, ont introduit des réformes que l’on peut cataloguer de "drastiques" et d’"abruptes". Dans sept des huit pays, "la libéralisation des importations a été menée à bien sur une période de deux ou trois ans (de 1989-90 à 1992-93)" (Agosin et French-Davis, 1993 : 45).
3 Cette opinion concorde avec l’observation de Rodríguez (1997 : 150) : "La vocation à un commerce plus global dont fait montre le Brésil depuis longtemps, et l’Argentine plus récemment, peut avoir favorisé le pari du Mercosur sur le régionalisme ouvert qui semble se profiler actuellement". Au cours des dernières années, le Brésil a destiné environ 30 % de ses exportations à l’Union européenne, entre 20 et 25 % aux États-Unis, des pourcentages similaires à l’Amérique latine et entre 15 et 20 % aux pays de l’est de l’Asie.
4 L’antécédent de cette stratégie se trouve dans les États du sud des États-Unis, dans un effort pour soutenir l’Industrie manufacturière de l’habillement et l’industrie textile dans la concurrence avec les pays peu développés, afin d’attirer les entreprises automobiles et autres manufacturières du nord-est et du centre-ouest qui pratiquent des salaires élevés. Avec la création de la zone de maquila au Mexique en 1965, les multinationales américaines ont étendu leur stratégie au Mexique (Robinson, 1996 : 173). La CTM et la Confédération régionale des ouvriers et des paysans (CROC) se sont prêtées à cette stratégie de haute productivité et de bas salaires.
5 Parmi les principaux changements dans la législation, signalons l’adéquation progressive de l’Impôt sur le revenu ; la nouvelle loi du commerce extérieur ; la transformation du système financier mexicain qui inclut la reprivatisation de la banque du commerce, l’autonomie de la Banque du Mexique et plus récemment, la création de l’Institut de protection de l’épargne bancaire, à la suite de la faillite scandaleuse du système bancaire ; la loi sur la concurrence commerciale ; la réforme de l’article 27 de la Constitution, qui promeut la privatisation de l’ejido (terres appartenant à l’État mais dont l’exploitant a l’usufruit) ; ainsi que la nouvelle loi agraire. La réforme des retraites sera analysée plus loin.
6 Par exemple, à la retraite, en ce qui concerne le temps de service et les meilleures conditions pour les fonctionnaires, les employés du pouvoir judiciaire et les professeurs universitaires. Ces privilèges empêchent l’application universelle de services et de prestations qui puissent permettre aux couches les plus défavorisées d’égaliser vers le haut (Draibe, 1997 : 118-119).
7 Si les programmes de formation des travailleurs soutenus par le gouvernement existent depuis le milieu des années soixante-dix, les entrepreneurs veulent se débarrasser de la tutelle de l’État dans ce domaine. Quant à la garantie de la protection des travailleurs, il n’existe pas au Mexique d’assurance chômage.
8 Depuis 1993, étant donné la croissance des prestations économiques de la sécurité sociale, le secteur de la santé a cessé de bénéficier de ressources provenant des charges sociales qui sont maintenant exclusivement destinées à la sécurité sociale (assurances vieillesse, accidents du travail et couverture partielle du chômage). Le résultat en a été la banqueroute financière de ce secteur, auquel l’affectation temporaire de ressources a exigé l’approbation en 1996 de la contribution sur le mouvement financier.
9 Le gouvernement a invoqué la nécessité de résoudre la crise financière de l’IMSS et l’iniquité des retraites (Laurell, 1996 : 9), alors que le secteur privé exprimait l’avantage de "renforcer l’épargne privée" et la bien connue "supériorité de l’administration privée" (El Financiero du 23/10/95, p. 7 et du 05/11/95, p. 10). Cependant, l’épargne des travailleurs a été investie à 96 % en bons du Trésor, et le reste en valeurs privées.
Notes de fin
Auteur
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