Le mercosur et ses états membres : les asymétries interétatiques, un obstacle à l’intégration ?
p. 51-70
Texte intégral
1Note portant sur l’auteur*
2Depuis plus d’une vingtaine d’années, le monde est confronté à une interdépendance économique grandissante qui affecte le pouvoir de l’autorité publique. L’instabilité croissante de l’économie et l’absence de structures mondiales satisfaisantes, conjuguées à des motivations locales propres, poussent les États à se tourner vers des structures régionales à l’instar des pays qui ont créé le Marché commun du sud (Mercosur). Nous analyserons cette organisation régionale en tenant compte du contexte international dans lequel elle est née ainsi que de ses spécificités. Les États du cône sud latino-américain ont choisi la carte de l’intégration régionale parce qu’ils sont confrontés à des impératifs qui les rapprochent. Ils voient dans l’intégration un moyen pour renforcer la démocratie dans la région, développer leur économie et permettre leur insertion internationale. Cependant, face au contexte de stagnation et de crise que traverse le Mercosur depuis 1998, il ne serait pas vain de se demander jusqu’à quel point ces objectifs communs ont constitué un spill over pour l’intégration ? Quel rôle ont joué les disparités intra et inter-étatiques face au processus d’intégration "mercosurien" ? Quel équilibre existe-t-il entre la diversité et la convergence ? Autrement dit, dans quelle mesure les asymétries entre les États membres d’ordre économique, démographique, géographique, ainsi que dans les domaines stratégiques de développement économique et de politique étrangère, peuvent constituer un obstacle à l’approfondissement de l’intégration régionale ?
LE REPOSITIONNEMENT RÉGIONAL DES ÉTATS
3Les transformations structurelles auxquelles l’économie mondiale fait face depuis le début des années 1980 ont engendré un enchevêtrement constant des économies nationales et un déplacement de l’équilibre du pouvoir économique. En effet, le pouvoir du marché s’est développé aux dépends de l’autorité étatique, alors que durant la période triomphante du capitalisme, l’équilibre penchait plutôt en faveur d’une gestion économique plus active de l’État. En réalité, l’ordre économique international libéral de l’après-guerre est entré en dépérissement suite à la crise des années 1970 discréditant ainsi les thèses keynésiennes au profit de modèles de développement reposant sur les attentes de l’offre (Gamble et Payne, 1996 :1 -20). Les États se sont alors lancés dans un processus de démantèlement des entraves étatiques à la dynamique du marché. Bien que les particularités sociales et économiques des différents pays soient conservées, une tendance générale commence donc à voir le jour, caractérisée par la remise en cause du consensus social-démocrate de l’après-guerre et la mise en place de politiques macro-économiques stabilisatrices. Les privatisations, déréglementations et libéralisations de pans entiers de l’économie permettent au capital financier transnational et aux sociétés transnationales de se déployer de plus en plus librement et induisant, par ricochet, un affaiblissement progressif du contrôle par les États de leur économie territoriale. Ces politiques dites néoclassiques ou encore néolibérales ont ainsi ouvert progressivement la porte à un système économique globalisé sur lequel l’Etat, bien qu’ayant contribué à son instauration, a commencé peu à peu à perdre le contrôle.
4Le domaine des finances est illustratif de ce phénomène. Depuis les années 1970 a été mis sur pied un marché unique de l’argent au niveau planétaire engendrant ainsi une montée en puissance de la finance globalisée (Helleiner, 1994). La globalisation financière aidée par les nouvelles technologies de l’information - destructrices de frontières temporelles et spatiales - tout en étant intimement liée à la globalisation des échanges des biens et de services, aura été beaucoup plus brutale et importante dans le domaine financier (Plihon, 1997 : 69), constituant aujourd’hui le domaine le plus avancé de la globalisation (Chesnais, 1994 : 207-210). De leur côté, les sociétés dites "transnationales", à l’instar des centres de pouvoir financier, ont également su tirer profit des politiques néolibérales pour se développer sur des espaces allant bien au-delà du seul cadre stato-national. C’est d’ailleurs vers la fin des années 1970 qu’une frange de la littérature des relations internationales commence à souligner l’affaiblissement de l’État en tant qu’acteur principal de la scène internationale du fait des rapports toujours plus étroits entre les économies nationales, du poids croissant des entreprises transnationales, des organisations intergouvernementales et non-gouvernementales (Keohane et Nye, 1977).
5Bien que l’on ne puisse pas parler de la "fin de l’État", il est impossible d’ignorer que dans un monde où les pays sont de plus en plus confrontés à l’affirmation des idéologies du marché, à l’ouverture et l’entrelacement de leur économie et au renforcement du poids d’acteurs socio-économiques transnationaux, les politiques économiques nationales doivent faire face, à des degrés différents, à des pertes d’efficacités. Un tel phénomène aurait pour conséquence un certain amenuisement de l’autorité de l’État à tel point que celle-ci serait fortement déterritorialisée et encaisserait une perte de maîtrise sur son économie territoriale (Strange, 1997 : 5).
6Confrontés ainsi à l’incontrôlabilité grandissante de l’économie et au manque des structures mondiales satisfaisantes, les États vont se tourner vers des structures régionales. Autrement dit, le processus de globalisation qui s’est développé depuis plus de deux décennies a servi de moteur au repositionnement régional des États. Dans le cadre du rapport de force entre autorité politique et pouvoir du marché global, le régionalisme est apparu aux yeux de nombreux gouvernements comme un instrument efficace pour renforcer leurs structures économiques respectives et les préparer à la concurrence globale. Il s’agit pour l’État de retrouver quelques marges de manœuvre économiques et d’accroître son pouvoir d’influence sur la scène internationale (Teló, 2001). Il est cependant nécessaire de souligner que ces différents processus d’intégration qui émergent entre les années 1980 et 1990 ne se déroulent pas de manière uniforme et que chaque espace régional se développe également dans un contexte qui lui est propre. Autrement dit, il existe une multiplicité de formes d’intégration régionale qu’il faut différencier (Petiteville, 1997).
LE RAPPROCHEMENT ENTRE L’ARGENTINE ET LE BRÉSIL : FACTEUR D’INTÉGRATION DANS LE CÔNE SUD
7Le Mercosur qui naît suite à la signature du traité d’Asunción par l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay, fait partie de cette nouvelle vague (Russel et Hirst, 1987)1 d’accords régionaux qui émergent à partir de la deuxième moitié des années 1980. Cet espace régional doit surtout son existence au rapprochement opéré entre l’Argentine et le Brésil durant les années 1980. Ces deux pays qui aujourd’hui constituent la colonne vertébrale du Mercosur ont toujours été très réticents à s’engager dans une forme de coopération économique avancée. En effet, la rivalité historique, qui les opposait pour le leadership régional, et la présence de gouvernements militaires durant de longues années avaient instauré dans la région "une paix armée" (Russel et Hirst, 1987) qui n’était en rien favorable aux idées intégrationnistes. Cependant, la transition vers des gouvernements civils, en 1983 en Argentine et en 1985 au Brésil, modifia l’état des choses (Perez Antón, 1997:9-43).
8Le passé dictatorial et tragique de ces pays a incité les nouvelles démocraties à rechercher dans des accords bilatéraux de coopération politique et économique un moyen pour se prémunir contre le retour éventuel de coups d’État2. En outre, le très mauvais bilan économique déposé par les gouvernement militaires lors de leur départ a poussé l’Argentine et le Brésil à couper avec le modèle de développement économique des substitutions des importations. Ils choisissent alors, en accord avec l’évolution économique internationale (voir supra), de faire reposer la croissance économique sur l’ouverture extérieure ce qui a favorisé l’intégration. Mais, comme on le verra plus loin, le rythme de libéralisation économique souhaité par les pays varie en fonction du modèle de leur développement économique propre. Pour ce qui est du Paraguay et de l’Uruguay, leurs systèmes politique et économique ont connu la même évolution que leur deux grands voisins durant les années 1980 : transition d’un régime autoritaire-militaire vers un régime démocratique et passage d’une économie introvertie à une économie d’insertion internationale – éléments qui vont constituer la clé de voûte du processus de genèse du Mercosur (Medeiros, 2000 : 23). En réalité, ces deux pays, ainsi que la Bolivie, ont durant longtemps été victimes de tentatives de satellisation de la part de l’Argentine et du Brésil. Mais l’apaisement politique et les contraintes économiques auxquels font face les pays de la région vont contribuer à normaliser leurs relations et à les rapprocher.
9Comme nous avons déjà pu le constater, les premiers rapprochements qui constitueront la base pour le Mercosur, se font entre l’Argentine et le Brésil suite à la déclaration de Foz de Iguazú de 1985. Ce mouvement se poursuit en 1986 avec la signature par les présidents argentin, Raul Alfonsín, et brésilien, José Sarney, de l’Acte pour l’intégration argentino-brésilien qui établit le Programme d’intégration et de coopération argentino-brésilien (Picab). Ce dernier choisit une méthode de convergence économique prudente puisqu’elle est fondée sur la création de préférences commerciales "produit par produit". La volonté d’accélérer le processus bilatéral d’intégration se fait encore sentir quand les deux pays signent en 1988 le Traité d’intégration, de coopération et de développement (TICD) qui jette les bases pour la création d’un marché commun binational dans un délai de dix ans. L’engagement des deux pays pour l’intégration va perdurer malgré les changements de législature. Ainsi, en juin 1990, les Présidents argentins, Carlos Menem, et brésilien, Fernando Collor, décident, en signant l’Acte de Buenos Aires, d’avancer à 1995 la date d’entrée en vigueur du marché commun. Le Paraguay et l’Uruguay seront invités à s’associer au projet3. C’est dans un contexte de plein essor du régionalisme sur la scène internationale que ces quatre pays décident de signer en mars 1991 le traité d’Asunción instituant un nouvel espace régional : le Marché commun du sud.
DÉSÉQUILIBRE ENTRE LES UNITÉS D’INTÉGRATION
10En réalité, la décision du Paraguay et de l’Uruguay d’adhérer au projet d’intégration n’a rien de surprenant. Ces deux petits pays sont encastrés entre les deux grandes puissances voisines qui sont à la base du Mercosur. Si l’on analyse ces deux pays sur une perspective historique, on voit qu’ils ont occupé un rôle d’État tampon dans la région et ont souvent dû subir la rivalité entre l’Argentine et le Brésil4. Par ailleurs, d’un point de vue économique, ces deux pays sont relativement dépendants du marché régional. Du fait de leur position géographique et des liens économiques tissés avec l’Argentine et le Brésil, les deux petits États n’ont pas d’autre choix que de participer au projet régional. En fait, le traité d’Asunción ne fait qu’officialiser les importantes relations commerciales que le Paraguay et l’Uruguay entretenaient déjà avec leurs deux voisins : "Il est clair que, comme pour le Paraguay, la décision uruguayenne a été foncièrement influencée par le fait que la dimension du commerce extérieur avec l’Argentine et le Brésil atteignait un niveau très élevé qui dénonçait une situation de pré-adhésion de facto" (Medeiros, 2000 : 69). En outre, il est important de signaler que l’Argentine et le Brésil représentent 95 % de l’espace territorial, de la population, du produit et du commerce extérieur du Mercosur (Ferrer, 1996:114). En s’intégrant les économies paraguayennes et uruguayennes sont devenues encore plus dépendantes du marché régional réalisant aujourd’hui plus de 50 % de leurs échanges commerciaux avec leurs partenaires de la région (Schutt, 1996 : 11). Finalement on constate que ces deux petits États se sont engagés dans un processus d’intégration qu’ils n’auront pas initié et qu’ils ne contrôleront pas (Pastori, 1996 :120).
11Quant aux deux grands la situation va changer substantiellement. Alors que ces pays ne parvenaient même pas à intégrer les produits pour lesquels ils bénéficiaient d’avantages comparatifs (Schvarzer, 1999 : 81), aujourd’hui la République brésilienne est devenu le principal partenaire commercial de l’Argentine, non seulement au niveau régional mais aussi au niveau mondial, constituant 30 % des exportations totales argentines. En Argentine, cette situation a donné naissance au néologisme Brasildependencia (Sevilla, 1999 : 4). En revanche au Brésil, bien que le marché régional ait également pris de l’importance pour ce pays, on remarque un déséquilibre important dans les relations commerciales intra-bloc : seulement 13 % des exportations brésiliennes sont destinées à l’Argentine (Irela, 1999 :1) et 4 % à l’Uruguay et au Paraguay. Ainsi la place économique qu’occupe le Mercosur pour le Brésil est relative, bien que comme l’affirment certains il ne faut pas minimiser son importance (Motta Veiga, 1999 : 52-55). Si on élargit maintenant l’éventail des paramètres, on se rend compte du poids démesuré de la fédération brésilienne dans l’espace régional : ce pays, à lui seul, couvre approximativement 70 % du territoire, 80 % de la population et 60 % du produit intérieur brut du Mercosur (Duhamel, 1999). En réalité, le pays a des proportions continentales et constitue un géant économique dans la région.
12À ce déséquilibre viennent se superposer des asymétries infra-étatiques. Par exemple, l’entité fédérée de Buenos Aires constitue un poids politique et économique prépondérant en Argentine. Même si son importance économique dans le Mercosur est relative. Le groupement régional tire, en grande partie, son dynamisme économique du triangle Sao-Paulo/Rio/Porto-Alegre (Thual, 1996 : 85). De même certains États brésiliens sont, à l’instar de Sao Paulo, démographiquement et économiquement parlant, plus puissants que le Paraguay et l’Uruguay ensemble. Les disparités sont encore plus importantes quand on sait que le seul État de Sao Paulo représente 35 % du PIB et plus de 20 % de la population du Brésil. En outre, son poids démographique est semblable à celui de l’Argentine.
13Cette double disparité inter et intra-étatique conditionne fortement la nature institutionnelle du Mercosur. Si un système pondéré de votes devait être introduit dans les structures régionales, l’Argentine, le Paraguay et l’Uruguay pourraient se voir étouffé par le poids que le Brésil dégagerait d’un tel système. C’est pourquoi les trois premiers États s’accrochent à la parité des voix. D’autre part, le Brésil refuse, pour des raisons politiques, de participer à l’instauration d’une architecture supranationale : "Pour Brasilia, déjà aux prises avec les vingt-six États de sa fédération, il est inadmissible que l’Argentine, le Paraguay ou l’Uruguay puissent venir, en tant que partenaires égaux et non comme membres encadrés d’une fédération, menacer sa souveraineté" (Medeiros, 2000 : 163).
LA DIMENSION INSTITUTIONNELLE DU MERCOSUR
14Il n’est donc pas surprenant que les instances de régulation prévues par le traité d’Asunción de 19915 et le protocole d’Ouro Preto de 19946 soient uniquement intergouvernementales. Autrement dit, les positions communes restent habituellement à la merci des intérêts nationaux occasionnant fréquemment d’âpres différends commerciaux au sein de l’organisation régionale qui la plupart du temps ont dû être résolus au plus haut niveau politique, c’est-à-dire par l’intervention active des présidents des États membres. Si la gestion des conflits reste politique c’est suite à la complexité du système de règlement des différends qui se fait au cas par cas. Chaque cas nécessite la formation d’un tribunal ad hoc. Ce système, envisagé par le protocole de Brasilia de décembre 1991, décourage les parties, jusqu’à présent, seuls quatre conflits ont été résolu par le truchement de ce système. Il faut tout de même préciser que la Commission de commerce du Mercosur a parfois réussi à résoudre certains conflits. Cependant, tout résultat reste tributaire de la volonté de chaque État membre.
15Depuis quelque temps, les milieux d’affaires et universitaires du Mercosur ainsi que les autorités argentines et uruguayennes élaborent des propositions pour mettre sur pied des institutions ayant une certaine indépendance vis-à-vis des décisions gouvernementales. Cependant, les autorités brésiliennes se sont toujours montrées très réticentes à modifier le mécanisme institutionnel actuel et déclarent ne pas vouloir créer une "bureaucratie supranationale" à l’européenne qui, selon elles, rendrait le système plus coûteux et moins efficace (Irela, 1997 : 14). En réalité, ce discours antibureaucratique cache la réticence de faire du Mercosur une communauté de droit allant contre sa puissance hégémonique régionale.
16Cet espace régional fait donc face à des carences juridiques importantes. Par exemple, sans applicabilité directe des normes juridiques communautaires celles-ci doivent être transposées dans les droits nationaux. Or, bien souvent, les États éprouvent de grandes difficultés à garantir cette transposition, ce qui ralentit considérablement le processus. En outre, la hiérarchie entre le droit communautaire et le droit national n’est pas encore clairement explicitée. Elle est d’autant plus difficile à établir qu’il n’y a pas de cours de justice chargée d’interpréter les textes. Par conséquent, aucune jurisprudence ne peut apparaître pouvant imposer la primauté d’un droit communautaire. Ceci laisse une grande liberté d’action aux parties pour prendre des mesures unilatérales surtout en période de conjoncture difficile, comme ce fut le cas suite aux pressions exogènes des crise mexicaine (1994-95), asiatique (1997) et russe (1998). En effet, les pays du bloc qui sont assez vulnérables au climat international, sont de temps à autres soumis à des tensions commerciales et fiscales qu’ils entendent parfois résoudre en modifiant, de manière unilatérale, leurs tarifs douaniers au détriment de l’union douanière du Mercosur. Cette flexibilité dans la détermination des tarifs douaniers a souvent été à la base d’importants conflits entre les partenaires.
17Dans la plupart des cas, c’est le Brésil qui est à l’origine des contentieux intra-régionaux les plus conséquents. Peu après l’entrée en vigueur de l’union douanière (imparfaite7), le Brésil, confronté à un déséquilibre de sa balance commerciale, a décidé de façon unilatérale d’augmenter ses tarif douaniers sur les voitures engendrant un conflit commercial intra-bloc8. Puis après des négociations avec ses partenaires, le Brésil obtint la flexibilisation du tarif extérieur commun. Il décide alors, pour diminuer son déficit commercial, d’augmenter jusqu’à 70 % les tarifs douaniers des biens de consommation durables (les automobiles) et de les diminuer sur les produits de première nécessité afin de faire baisser leur prix. La marge de manœuvre dont ce pays a pu jouir temporairement pour fixer ses droits de douane témoigne de l’importance que ses partenaires accordent à sa stabilisation économique pour la région (Grandi et Schutt, 1997 : 43).
18Cependant, un nouveau conflit a surgi suite aux menaces brésiliennes d’imposer des quotas à l’importation de voitures en provenance d’Argentine. Cette grave crise ne sera résolue qu’avec l’intervention directe des présidents Carlos Menem et Fernando Henrique Cardoso. Pour régler le problème, les parties avaient prévu l’adoption d’un régime de transition qui devait rendre compatibles jusqu’à l’année 2000 les flux automobiles de ces deux pays et prévoyait des quotas d’exportations croisées. Cependant, le conflit s’est ravivé l’année suivante suite à la décision du gouvernement brésilien d’adopter des mesures d’incitation fiscale et financière en faveur des entreprises de ce secteur qui choisiraient de s’implanter dans certaines régions du pays. En réalité, la question ne concerne pas un seul secteur ou des décisions relevant du gouvernement fédéral. En effet, les entités fédérées brésiliennes, qui jouissent d’une autonomie institutionnelle, se livrent souvent à des batailles fiscales (réduction ou exemptions d’impôts, subventions aux exportations,...), afin d’attirer les entreprises sur leur territoire, ce qui dans un contexte de construction d’un marché commun cesse d’être un enjeu national pour devenir un conflit au sein du Mercosur (Hillcoat, 1997 :123). Cette situation confirme également les différences existantes entre les modèles de développement économiques des États membres.
DIVERGENCES DANS LES STRATÉGIES NATIONALES DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE : LE CAS DES DEUX GRANDS
19La crise de la dette des années 1980 plongea les pays latino-américains dans une période de marasme économico-financier surnommée la "décennie perdue". Le modèle de développement des substitutions des importations fut alors discrédité en faveur de politiques économiques néolibérales. Sorties du "consensus de Washington"9 dont le but était la réinsertion des économies latino-américaines dans le marché international, ces politiques ont donné lieu à l’ouverture unilatérale des marchés, à une course à la privatisation d’entreprises publiques, à la déréglementation et libéralisation des activités économiques, à des politiques macro-économiques stabilisatrices pour capter l’investissement étranger direct et à une profonde réforme de l’État (Gana, 1994: 67). C’est dans ce contexte qu’il faut replacer le Mercosur. Les États de la région ont vu dans le Mercosur un moyen efficace pour s’insérer dans l’économie globale et renforcer les réformes néolibérales (Phillips, 2000 : 285-286). Cependant, si l’on fait une analyse plus en profondeur on observe que les États latino-américains n’ont pas tous appliqué avec le même dynamisme les politiques de stabilité et d’ajustement structurel.
20Les deux grands pays du Mercosur constituent à ce sujet deux cas intéressants. Le rapprochement entre ces deux pays a pu se faire par ce qu’il y a notamment eu une certaine convergence économique. Mais ils gardent tout de même des conceptions différentes en ce qui concerne les voies devant conduire au développement économique. Alors que l’Argentine a appliqué le modèle de développement conservateur avec orthodoxie, le Brésil a opté pour une application hétérodoxe de celui-ci. En effet, le Brésil a conservé des éléments de l’idéologie "développementaliste" qui attribuait à l’État un rôle prépondérant dans le développement économique du pays. Malgré les réformes structurelles qu’il a appliqué à partir de la deuxième moitié des années 1980 et surtout durant les années 1990, et son engagement dans le Mercosur, on constate que ce pays continue à avoir une véritable politique industrielle, d’incitations aux exportations ou de protections de monopoles (Dabène, 1997 : 297). Il existe dans ce pays un lobby industriel puissant tourné vers le marché interne et réticent aux politiques de déréglementation. Les autorités brésiliennes sont plutôt pour une libéralisation commerciale prudente. En revanche, l’Argentine a cherché à mettre sur pied un marché unique conforme aux thèses néolibérales. Autrement dit, ne disposant plus d’une politique industrielle, elle a soutenu une politique d’ouverture maximale sur l’extérieur ainsi qu’une intervention minimale de l’État dans les affaires économiques. Elle a supprimé ses politiques incitatives dans l’industrie et fait pression sur les autorités brésiliennes pour qu’elles abandonnent leurs politiques incitatives afin qu’elles n’affectent pas l’économie argentine (Schvarzer, 1999 : 92).
21En réalité, le Brésil cherche à jouer le rôle de puissance industrielle du Mercosur, de fournisseur privilégié de ses associés pour un nombre important de secteurs stratégiques ayant une forte valeur ajoutée, tels que les biens d’équipement, les produits chimiques, les produits informatiques, les automobiles,... (Grandi et Schutt, 1999 : 78). Mais les trois autres pays membres du bloc ne souhaitent pas devenir des marchés captifs du Brésil et font pression pour une plus grande libéralisation économique et commerciale. Ces asymétries ont des conséquences en termes de politique commerciale et d’intégration. En 1995, par exemple, c’est une zone de libre-échange incomplète et une union douanière imparfaite qui sont entré en vigueur, contrairement à ce qui avait été prévu. Résultat, notamment, des désaccords profonds entre l’Argentine et le Brésil sur le degré d’ouverture commerciale.
22Cependant, en mars 2001, c’est l’Argentine qui décide d’augmenter unilatéralement les barrières douanières extra-communautaires pour les produits de consommation et les diminue à zéro pour les bien de capital. Cette décision qui reçut par la suite l’assentiment des trois autres pays du bloc - à condition que ces modifications soient exceptionnelles et temporaires jusqu’au 31 décembre 2002 (El Clarín, 2001) - constitue une rupture unilatérale avec l’union douanière. Il s’agit là d’une des mesures prises par le gouvernement argentin pour faire sortir le pays de la récession dans laquelle il est plongé depuis la dévaluation de 40 % du real opérée par les autorités brésiliennes le 13 janvier 1999 sans consulter au préalable ses partenaires du Mercosur (Santander, dans La Voz del Interior, 1999 :15A). Par contre, l’Argentine n’a pas suivi ce mouvement de dévaluation car sa monnaie est strictement liée au dollar. Ceci témoigne d’une asymétrie dans la politique de taux de change entre les deux grands partenaires du Mercosur.
DE LA CONVERGENCE À L’ASYMÉTRIE DE LA POLITIQUE DE CHANGE
23Durant la deuxième moitié des années 1980, le rapprochement entre l’Argentine et le Brésil sera d’autant plus facilité que les deux pays feront appel à des traitements économiques semblables pour résoudre la crise dans laquelle ils sont plongés. En effet, l’Argentine adopte son plan Austral en 1985 et le Brésil lance son plan Cruzado en 1986 pour contrôler les prix et les salaires. Cette convergence économique eut pour conséquence une stabilité monétaire qui à son tour facilita les échanges commerciaux. Mais la situation économique se détériora très fortement en 1989 poussant le président Alfonsín à démissionner. Le nouveau Président, Eduardo Menem, décide alors de dévaluer la monnaie nationale. La convergence économique s’acheva alors "de fait" entre les deux pays. Pour résoudre la crise, les deux pays adoptèrent des politiques économiques plus orthodoxes, mais selon des rythmes différents.
24L’Argentine confrontée à l’hyperinflation décide d’appliquer en 1991 des réformes structurelles. Il ne s’agit pas seulement de libéraliser l’économie et privatiser les entreprises nationales. En effet, le ministre d’Economie argentin, Domingo Cavallo, prévoit un plan de convertibilité qui instaure un système de currency board (directoire financier). Ce système qui consiste à rattacher le taux de change du peso au dollar et de lier l’émission de monnaie aux réserves en devise est extrêmement rigide. De même, le Brésil se lance dans des réformes structurelles avec l’arrivée au pouvoir du président Collor, en 1990. Différents plans de stabilité monétaire se succéderont, mais sans succès. En 1994, le Plan Real de Fernando Henrique Cardoso, ministre des Finances de l’époque, crée une nouvelle monnaie, le real, qui sera attaché au dollar. Ce plan, qui parvient à juguler l’inflation et à stabiliser le cours de sa monnaie, permet au Brésil de faire un grand pas vers la convergence macro-économique à l’intérieur du Mercosur comme il était prévu dans l’article premier du traité d’Asunción. Cependant, la rigidité du plan de Convertibilité contraste avec la flexibilité du Plan Real. Cette différence est notamment due au fait que l’Argentine, à différents moments de l’histoire, à été fortement affectée par l’hyperinflation, alors que le Brésil poursuit des politiques de changes compatibles avec la compétitivité internationale de son industrie.
25Suite à la crise asiatique et russe, la compétitivité économique brésilienne fut mise sous pression. Pour relancer ses exportations et juguler le déficit des comptes courants10 le Brésil décida de dévaluer le real mettant ainsi en lumière la flexibilité qui caractérisait l’ancrage du real au dollar. Cette dépréciation rendra les produits brésiliens extrêmement compétitifs et permettra au Brésil d’augmenter très fortement ses exportations vers les trois autres pays de la région. Le pays à avoir subi le plus sévèrement cette mesure est l’Argentine. La crise y sera en effet aggravée par la chute brutale des prix internationaux des matières premières qui constituent pour l’Argentine un secteur très important de l’économie. En outre, les autorités argentines qui veulent garder leur crédibilité auprès des opérateurs financiers internationaux, refusent de dévaluer. Le maintient du currency board contribuera à ne pas rendre les produits argentins compétitifs dans le Mercosur. Le gouvernement Menem décide alors d’introduire des barrières non-tarifaires affectant ainsi les produits en provenance des autres pays membres.
26Au Brésil, certaines entités fédérées décident de proposer des conditions fiscales très favorables aux investisseurs ce qui aura pour conséquence la délocalisation d’entreprises argentines. L’escalade des mesures unilatérales et les conflits commerciaux qui s’en suivront plongent le Mercosur dans la plus grave crise depuis sa naissance. En outre, les propositions avancées à l’époque par le président Menem de dollariser non seulement l’Argentine mais tout le continent latino-américain pour résoudre la crise et avoir une stabilité financière, faisaient peser de sérieux doutes sur l’avenir du Mercosur puisque si une telle proposition venait à se concrétiser elle rendrait la région encore plus dépendante des États-Unis. Le gouvernement du président Cardoso s’est catégoriquement opposé à cette proposition affichant une nette préférence, comme l’avait déjà proposé le président Menem en 1997, pour une monnaie unique.
27Malgré la crise aiguë que le Mercosur a dû affronter durant l’année 1999, les États membres décident, lors des sommets du Marché commun de Buenos Aires (Argentine) et de Florianapolis (Brésil), tenus respectivement en juin et décembre 2000, de s’engager à relancer le Mercosur. Pour y parvenir, ils sont conscients de la nécessité d’un approfondissement du Mercosur. Ils décident alors, pour donner un nouveau souffle au processus d’intégration, de se fixer onze objectifs parmi lesquels le renforcement de l’union douanière, l’amélioration du système de règlement des différends et l’harmonisation de leurs politiques macro-économiques respectives par le truchement de critères de convergence (Gosman, 2000)11 devant déboucher sur une monnaie commune. Il aura fallu une crise profonde dans le Mercosur pour que le Brésil décide à s’engager en faveur de l’harmonisation macroéconomique qui constitue selon la vision des autorités argentines la meilleure voie pour progresser dans le sens de l’intégration – ce qui ne signifie pas que le Mercosur soit sorti de la crise.
28Aux yeux du Brésil, la dollarisation ne serait qu’un moyen pour renforcer l’insertion des pays latino-américains dans la zone d’influence américaine. En fait, les autorités brésiliennes cherchent à relancer le Mercosur, voyant dans celui-ci un moyen efficace pour faire face à la domination des États-Unis ainsi que pour accroître son pouvoir sur la scène internationale. Cependant, l’Argentine bien qu’elle est accueillie avec enthousiasme l’harmonisation macro-économique ne partage pas les craintes du Brésil au sujet de la domination américaine et encourage souvent au sein du Mercosur l’accélération de la mise en place de l’Accord de libre échange des Amériques (ALCA). Les États membres ont donc des politiques extérieures divergentes ce qui peut parfois affecter le processus d’intégration du Mercosur.
LE MERCOSUR FACE AUX ASYMÉTRIES DES POLITIQUES EXTÉRIEURES DES ÉTATS MEMBRES
29À l’époque où le traité instituant le Mercosur est en train de naître, les États-Unis proposent l’Initiative pour l’entreprise des Amériques (Enterprise for the Americas Initiatives, EAI) dont le but est de créer une gigantesque zone de libre échange de l’Alaska à la Terre de feu. Cette proposition est faite au moment où l’économie américaine accuse un important essoufflement et une concurrence accrue de la Communauté européenne et du Japon (Valladão, 1995 : 21). L’EAI propose de s’attaquer à trois questions prioritaires : la libéralisation du commerce, les flux d’investissements et l’endettement. Dans un premier temps, il est question d’encourager les échanges par la signature d’accords-cadres déterminant les principes qui devraient diriger le commerce et les investissements et fixant les bases de consultation régulières. Dans un deuxième temps, il est prévu de signer des accords de libre-échange bilatéraux entre les États-Unis et chaque État latino-américain. Ces accords de libre-échange seraient, à leur tour, accompagnés d’une politique d’investissements américains accordant la priorité aux privatisations des entreprises publiques et aux réformes visant à renforcer l’économie de marché en Amérique latine. Enfin, les pays qui s’engageraient fermement dans cette voie bénéficieraient d’une diminution substantielle de leur dette. Craignant d’être marginalisés à l’occasion de la grande redistribution des cartes au lendemain de la guerre froide, les pays latino-américain ont accueilli cette grande alliance économique avec enthousiasme. À la fin de son mandat, en janvier 1993, le gouvernement de George Bush avait signé avec la quasi-totalité de l’Amérique latine – mis à part Cuba – un premier accord-cadre.
30Cette stratégie panaméricaine se poursuivra sous la houlette du gouvernement Clinton (Henning, 1994-1995 : 971-981). En effet, ce dernier organise en décembre 1994 à Miami, le premier sommet des Amériques où est décidé de mettre sur pied, pour 2005, un Accord de libre commerce pour les Amériques. La première pierre de ce projet fut déposée avec la signature de l’Accord de libre-échange nord américain qui regroupe le Canada, les États-Unis et un pays latino-américain : le Mexique. Deux autres sommets, tenus respectivement à Santiago du Chili en avril 1998 et à Québec en avril 2001, sont venus confirmer ce projet. Cependant, durant les deux derniers sommets des Amériques, on a pu constater une certaine résistance des autorités brésiliennes. En effet, contrairement au souhait américain, le Brésil s’est opposé à avancer la date d’entrée en vigueur de l’ALCA et a obtenu que les groupes sous-régionaux, comme le Mercosur, subsistent après sa mise en place. Ce pays considère que ses intérêts nationaux seront mieux préservés dans le Mercosur, où le poids de son économie représente 70 % de l’ensemble du bloc, que dans la future ALCA où il ne dépasserait pas 10 %.
31Par conséquent, le Mercosur apparaît aux yeux des dirigeants brésiliens comme un moyen pour renforcer leur poids politique et économique sur la scène internationale. Le président Fernando Henrique Cardoso a souvent rappelé aux autorités américaines que le Mercosur reste "une priorité de la politique extérieure et commerciale brésilienne" et ne doit donc pas se diluer dans une zone de libre commerce (Sevilla, 1997 :4). Deux jour avant le sommet de Québec, le Ministre des affaires étrangères brésilien, Celso Lafer, déclara dans une conférence avec la presse étrangère que le "Mercosur est une réalité, tandis que l’ALCA est une hypothèse" (Gosman, 2001). Ces déclarations étaient destinées aux autorités américaines qui cherchaient à accélérer le processus de libéralisation continentale et aux autorités argentines tentées d’accepter la proposition des États-Unis. Pour les autorités brésiliennes le Mercosur est une priorité parce qu’il est considéré comme faisant partie d’un "projet national plus large" permettant de "contrebalancer la domination américaine" (Schwartz, 1996 : 141-142).
32En ce qui concerne l’Argentine, ses dirigeants ont parfois hésité entre le Mercosur et l’ALCA. En fait, le Brésil et les États-Unis constituent les deux partenaires commerciaux principaux de l’Argentine et ont acquis une influence considérable sur sa politique commerciale. Cette situation a souvent placé l’Argentine face au dilemme de choisir entre un schéma d’intégration mené par le Brésil ou par les États-Unis (Santander dans Relazioni Internazionali, 1999 : 48). Le gouvernement de Menem (1989-1999) s’est caractérisé par la volonté de tisser des liens tant économiques que politiques avec les États-Unis. Alors que le président Menem déclarait publiquement vouloir entraîner l’Argentine dans la dynamique des pays développés plutôt que de la laisser à la traîne de ses voisins, son ministre de relations extérieures, Guido Di Tella, employait l’expression imagée de "relations charnelles" avec les États-Unis pour exprimer les objectifs de la politique nationale (Schvarzer, 1999: 88). C’est à cette époque, en 1993, que les États-Unis proposent à l’Argentine d’adhérer au projet de l’Alena qui doit entrer en vigueur l’année suivante. Tant que le Mercosur n’a pas de tarif extérieur commun (CET), l’Argentine jouit d’une certaine liberté de mouvement. Le gouvernement argentin va alors, dans un premier temps, freiner les négociations d’un CET dans le cadre du Mercosur. En réponse à cette situation, le Brésil refuse de donner son assentiment au Mexique pour que son adhésion à l’Alena soit compatible avec l’Association latinoaméricaine d’intégration (ALADI), bien que par la suite il cède tout en exigeant des compensations au Mexique. En outre, il lance l’idée d’un Accord de libre échange sud-américain (ALESA) compatible avec le Mercosur et d’autres espaces régionaux latinoaméricain tel que le Pacte Andin (depuis 1996, Communauté Andine des nations).
33Ces différentes initiatives visent à dissuader les pays comme l’Argentine, le Chili,... à adhérer à l’Alena. En isolant le Mexique et en organisant autour de lui un espace commun, le Brésil cherche à maintenir sa prédominance sur l’Amérique latine et à contrebalancer le projet d’intégration américain (Pastori, 1996 : 117-118). Le Brésil affirme avec de plus en plus d’autorité son ambition d’entrer dans le cercle des grandes nations (Kourliandsky, 1997 : 90). Il a soutenu l’Union européenne quand elle a présenté une demande d’enquête et ouvert une procédure à l’Organisation mondiale du commerce après l’adoption de la loi nord-américaine Helms-Burton qui renforce l’embargo sur Cuba. Il soutient la candidature chinoise à l’OMC. Il est favorable à la réforme du Conseil de sécurité des Nations Unies, à l’élargissement du groupe des membres permanents dont il entend faire partie.
34L’Argentine se méfie de l’augmentation relative du pouvoir du Brésil (Hirst, 1999 : 68-69) et de la mise en place d’un bloc sud-américain sous influence. Elle cherche plutôt à renforcer son alliance politique avec les États-Unis. À différentes occasions, la politique étrangère argentine s’est caractérisée par son proaméricanisme comme le montre l’appui que l’Argentine a donné à l’intervention militaire des États-Unis et des Nations Unies en Haïti. En outre, contrairement au Brésil, le gouvernement Menem ainsi que celui de De la Rúa ont adopté des positions anti-Castro au sein des Nations-Unies. De leur côté, les États-Unis sont peu enclins à accepter les velléités d’indépendance économique et les ambitions régionales du Brésil.
35C’est ainsi que l’administration Clinton a tenté de réactiver les anciennes querelles du bassin de La Piata en octroyant à l’Argentine, en août 1997, le statut exceptionnel d’allié hors l’OTAN, donc de partenaire militaire (Seintenfus, 1998 : 8). Le Brésil a réagi négativement à cette alliance et la perçoit comme une tentative de la part des États-Unis pour affaiblir la formation d’une alliance internationale dans le Cône Sud. De son côté, l’Argentine préfère que ce soit non pas le Brésil mais l’Amérique latine – selon le système de rotation entre les pays de la région – qui dispose d’un siège permanent au conseil de sécurité de l’ONU. Les deux grands pays membres du Mercosur ont donc une conception différente du Mercosur : alors que le Brésil a une perception plus stratégique du Mercosur, l’Argentine voit dans cet espace régional et dans sa relation avec le Brésil une dimension économique et commerciale (Fraga, 1999 : 288).
36Les différences entre les politiques extérieures des deux grands pays du Mercosur ont donc perturbé le processus d’intégration, l’Argentine hésitant entre le Mercosur et l’alena. Finalement, elle choisira le Mercosur suite, notamment, aux résultats négatifs d’une enquête faite sur les coûts et bénéfices de son adhésion à l’Alena12 et aux concessions que le Brésil est prêt à faire à ses partenaires sur le plan commercial13. Les pays membres du Mercosur ont alors décidé durant l’année 1994 de doter l’organisme régional d’un tarif extérieur commun qui entrera en vigueur en 1995 (voir supra). Ceci signifie donc que l’Argentine renonce à d’adhérer à l’Alena car, comme le prévoit le protocole d’Ouro Preto, l’adoption d’un CET signifie que tout partenariat avec des tierces parties est négocié en tant que bloc et non pas de façon bilatérale. Cependant, l’Argentine continuera, au sein du Mercosur, à soutenir le projet américain de créer une zone de libre-échange des Amériques.
37La stagnation importante que connaît actuellement le Mercosur, la crise économique dans laquelle l’Argentine est plongée depuis plus de deux ans ainsi que la tenue à Québec du troisième sommet des Amériques ont relancé en Argentine le débat sur les alternatives d’insertion internationale que ce pays devrait adopter (Muchnik, 2001 ; Bouzas, 2001 ; Gosman, 2001). Le ministre d’Economie argentin, Domingo Cavallo, qui se voit doté en mars 2001 de pouvoir extraordinaire lui permettant de prendre des mesures par decret pour faire sortir l’économie de la crise, décide de rompre unilatéralement avec l’union douanière imparfaite qui régissait depuis 1995. En outre, les propos tenus par le ministre de l’économie à l’encontre du Mercosur ne sont en rien rassurant pour ce qui concerne l’avenir du bloc. Dans son ouvrage Pasión por crear il affiche sa préférence pour une simple zone de libre-échange (Cavallo et De Pablo, 2001 : 263), propos qu’il a réitérée publiquement à plusieurs reprises faisant ainsi douter le Paraguay et surtout l’Uruguay sur le bien fondé du Mercosur et exaspérant les autorités brésiliennes. Il est certain que si de tels propos venaient à se concrétiser, le Mercosur aurait beaucoup de mal à résister au mouvement de libéralisation continentale qui est en cours.
CONCLUSION
38Si l’engagement des États membres du Mercosur a certes permis le développement de cette intégration régionale, ils ont aussi déterminé le degré et le rythme de son approfondissement. En réalité, la profondeur et l’orientation du processus d’intégration sont conditionnées par les asymétries qui existent entre les États membres. Cependant, du fait qu’ils considèrent l’intégration comme un moyen de stabilisation de la région, les États se sont fixés des objectifs communs qui vont bien au-delà d’une simple zone de libre-échange. Bien qu’ils aient des objectifs communs ambitieux, ils privilégient la flexibilité dans leurs engagements communautaires, comme l’illustrent les différentes mesures unilatérales prises à l’encontre de l’union douanière.
39Le respect des règles juridiques communautaires est souvent tributaire des intérêts nationaux. Elles sont, par conséquent, mal menées par les États membres d’autant plus que ces derniers ont opté pour une architecture institutionnelle minimaliste fréquemment paralysée par les positions contradictoires des parties. Le minimalisme institutionnel, surtout souhaité par la puissance régionale du Brésil, a souvent été incapable d’éviter ou de résoudre les crises profondes au sein du Mercosur. Cependant, il ne faut pas exagérer la portée des divergences, car ce qui tient le Mercosur, au-delà des asymétries et divergences économiques c’est un projet politique. Dans bien des cas, cet engagement politique a permis de résoudre, souvent au plus haut niveau politique, des crises sérieuses. Si le Mercosur parvient à sortir de l’impasse dans laquelle il se trouve aujourd’hui, se confirmera alors l’idée que ce sont les crises qui le font avancer.
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Notes de bas de page
1 Sur les anciens processus d’intégration en Amérique latine, voir Rosenthal, 1991 : 60-65 et, dans ce même ouvrage, le travail de German E. de la Reza.
2 Les États donneront à l’intégration une place importante pour contrer tout retour éventuel de coups d’État et renforcer les démocraties dans la région. Il s’agit d’une constante que l’on retrouve dans le Mercosur. En effet, depuis la signature du traité d’Asunción, les pays membres n’ont cessé de mettre l’accent sur la consolidation démocratique par le biais de l’intégration et cela en dépit des alternances politiques intervenues dans les différents États. Les pressions diplomatiques et la menace d’exclusion proférées par les autres pays à l’encontre du Paraguay suite aux deux tentatives de coup d’État qui ont eu lieu respectivement en 1996 et 2000 montrent que la sauvegarde d la démocratie figure parmi les objectifs principaux du Mercosur. C’est d’ailleurs suite à la première tentative de coup d’État au Paraguay que les pays membres ont décidé de couler en texte une "clause démocratique" renforcée en 1998 par le protocole d’Ushuaia sur le compromis démocratique. Le maintien du système démocratique, des droits et des libertés apparaissent donc comme une condition obligatoire de la qualité de membre du Mercosur. Contrairement à d’autres engagements pris par les membres, comme on le verra plus loin, celui envers la démocratie reste inaliénable.
3 Le Paraguay est resté isolé de ses voisins à cause du régime dictatorial qui s’est maintenu jusqu’au "coup d’État institutionnel" de 1989. À partir de ce moment commence un processus de libéralisation économique et politique permettant qui va rapprocher le pays de son voisinage immédiat. Par contre, l’Uruguay, qui connaît un retour à la démocratie en 1985, a été lié au processus de gestation du Mercosur dès le début. En effet, l’Uruguay signera quelques-uns des 24 protocoles sectoriels.
4 Ils ont parfois tenté de tirer profit de cette situation. Par exemple quand l’Argentine refuse durant les années 1970 de réduire le tarif d’importation sur le bois semi-élaboré paraguayen et de permettre aux lignes aériennes commerciales du Paraguay d’atterrir à Buenos Aires, le gouvernement paraguayen de l’époque décide de signer avec le Brésil le Traité d’Itaipu. Ce dernier prévoit de construire sur la frontière entre les deux pays une centrale hydraulique qui pour le Paraguay aura des conséquences économiques assez favorables.
5 Deux organes sont créés : le Conseil marché commun (CMC) et le Croupe du marché commun (CMC). Le premier, qui est l’organe politique et de décision du Mercosur, est composé des présidents et des ministres des affaires étrangères et d’économie des États membres. Le deuxième, qui est l’organe exécutif chargé de proposer des règles, est composé des hauts fonctionnaires des ministères des affaires étrangères.
6 Ce protocole, qui renforce l’architecture institutionnelle du Mercosur, crée quatre nouveaux organes : une Commission de commerce qui doit veiller à la mise en place de l’union douanière et favoriser la résolution des différends; un Secrétariat administratif qui sert de soutien technique au CMC; ainsi qu’une Commission parlementaire conjointe et un Forum consultatif économico-social qui n’ont qu’un rôle consultatif et de conseil.
7 Le tarif extérieur commun qui entre en vigueur en 1995 est imparfait par ce qu’il ne couvrira que 85 % des produits commercialisés par le bloc avec les pays tiers.
8 Il faut rappeler que, juste avant, le gouvernement argentin de l’époque avait menacé d’augmenter unilatéralement ses droits sur les importations dans le contexte d’un plan orthodoxe de réduction de ses dépenses publiques. Cette menace ne fut pas suivie de mesures concrètes.
9 Selon cette expression, les nouveaux modèles de développement économiques qui apparaissent à partir de la deuxième moitié des années 1980, ont été imposés par les circonstances, les institutions internationales et les États-Unis. L’expression a été proposée par John Williamson (Williamson, 1990).
10 Les comptes courants regroupent les éléments suivants : balance commerciale, dette et intérêts de la dette publique et dette privée.
11 Pour 2002 les pays membres que le déficit fiscal net ne pourra pas dépasser 3 % du PIB ; la dette ne pourra pas être supérieure à 40 % du PIB et en matière d’inflation ; les États décident qu’elle ne devra pas être supérieure à 5 % par an entre 2002 et 2005. L’harmonisation macro-économique est sous contrôle d’un Conseil de coopération macro-économique qui n’est pas un organe formel du Mercosur, ce qui diminue la portée de la mesure.
12 Selon cette étude, l’adhésion de l’Argentine à l’Alena allait permettre à ce pays d’exporter pour 100 millions de dollars alors que les États-Unis allait exporter vers l’Argentine pour plus de 900 million de dollars.
13 La décision du gouvernement brésilien de réduire à 20 %, à partir du 1er septembre 1994, les droits à l’importation concernant 445 produits, dont certains sont jusque-là frappés de droits pourvant atteindre 35 %, est interprétée comme un signe de la volonté du Brésil d’avancer avec un rythme plus soutenu dans le processus de réduction des tarifs douaniers.
Notes de fin
* Institut d’études européennes de l’Université libre de Bruxelles
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