Introduction
p. 17-38
Texte intégral
1Le 1er août, le Paraguay célèbre les Pohã Ñana, plantes médicinales consommées au quotidien par 90 % de la population [Pin et al., 2009, p. 335]. La candidature des « Pratiques et des savoirs traditionnels du tereré dans la culture du Pohã Ñana. Boisson ancestrale guarani au Paraguay » est déposée le 4 avril 2019 à l’Unesco à Paris par le ministre de la Culture, Rubén Capdevila, et inscrite à la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité en octobre 2020. Le tereré est une infusion d’eau froide, voire glacée, à base de yerba mate1. Le court-métrage de candidature explique comment se prépare un tereré. Il détaille son processus, les règles qui régissent sa consommation et son partage, et les rôles de chaque acteur : « Agriculteurs qui préservent les espèces de Pohã Ñana […], [c]ollectionneurs qui transportent les Pohã Ñana du champ aux marchés de vente […], yuyeros et médecin ñana qui vendent et partagent les connaissances traditionnelles sur les propriétés curatives de Pohã Ñana […], yerbateros qui produisent de la yerba mate […], [d]es artisans qui fabriquent des guampas2, des bombillas3, des thermos et des carafes […] [e]t le cebador » chargé de servir et faire passer la guampa.
2Or, les initiatives de mise en culture de plantes médicinales sont aujourd’hui l’affaire d’industriels ou de rares projets communautaires et se concentrent sur un nombre très réduit de plantes. Cette production ne couvre pas les 25 % de la superficie des marchés municipaux d’Asunción ni ne concerne les 500 espèces de plantes dites médicinales [Pin et al., 2009, p. 335] qui y sont commercialisées. En 2014, leur exportation se chiffrait à six millions de dollars, tandis que leur distribution, principalement nationale, est estimée à 89 millions de dollars [Fogel et al., 2016, p. 12]. Derrière l’exaltation identitaire dont le tereré et les Pohã Ñana sont l’objet et derrière leur chaîne de distribution officielle, des femmes et des hommes se consacrent à leur collecte et leur vente. Ils sont essentiels à la consommation de la boisson phare connue pour ses remèdes et font partie du paysage des villes comme des quartiers moins urbanisés, installés sur les marchés, dans les rues de la capitale, sur les places ombragées, devant les épiceries des quartiers périphériques ou au bord des routes nationales. Ils se débrouillent pour collecter des plantes qui germent des friches aux contreforts des cerros4, de toute part et si invisibles à la fois.
Défrichage lexical
3Nous mènerons une ethnographie de la vente et de la collecte de yuyos entre les départements Central et Cordillera du Paraguay, du tereré à la terre. Nous suivrons la trajectoire de ces yuyos du marché de San Lorenzo à leur lieu d’extraction sous le prisme de celles et ceux qui le font circuler.
4Le mot guarani Pohã signifie médicament, remède selon le Diccionario Guarani Castellano d’Antonio Guasch, tandis que le mot ñana renvoie à des plantes poussant près du sol, tantôt broussailles, tantôt remèdes. Un ñana, c’est un yuyo, me répondent mes interlocuteurs guaranophones. Le dictionnaire indique plusieurs significations : yerba, yuyo, maleza, herbazal, hierba. Yuyo renvoie à ce que nous appelons « mauvaise herbe » et désigne le remède. Il recouvre un large panel de plantes, une composition de différentes herbes dites médicinales visant à soigner ou prévenir des maux précis. Il peut s’agir d’une portion d’une ou de plusieurs plantes traditionnellement reconnues pour leurs propriétés prophylactique et curative. Tous les yuyos ne sont pas des remèdes et tous les remèdes ne sont pas des yuyos, me lance María Asunción lors d’une pause au monte. Par souci de cohérence géographique et contextuelle, nous préférons employer le terme yuyos à son équivalent remedios refrescantes ou Pohã Ñana, ou plus précisément Pohã Ro’ysã, ainsi qu’à l’appellation française « plantes médicinales » ou « simples5 ». Leurs connotations curatives nous semblent faire trop d’ombre aux autres dimensions auxquelles ces plantes s’attachent : s’il est rare que le mot yuyo soit aujourd’hui utilisé pour désigner un légume, una verdura, il se réfère fréquemment aux mauvaises herbes et aux broussailles. En somme, ce mot cristallise une multitude de champs de réflexions et d’études compartimentés dont nous voulons rendre compte.
5Nous préférons le terme de collecte à celui de cueillette dans le sens que leur donne Claire Julliand. Il s’agit de rendre compte de la dimension économique de l’activité sur laquelle nous nous pencherons. « Commerciale, soumise à des impératifs de productivité, la cueillette bucolique cède la place au pragmatisme de la collecte, du prélèvement, de la récolte ou du ramassage. » Au terme cueillette, « [d]’autres termes comme collecter, récolter, prélever, ramasser, grappiller ou glaner peuvent se substituer […]. Le verbe est alors nuancé par le contexte de la cueillette et les intentions du cueilleur » [Julliand, 2008, p. 506].
6Notre enquête a établi plus d’incertitudes que nous n’en avions au départ quant à ce qu’est une yuyera : certaines définitions excluent tantôt l’activité de cueillette – ne sont considérées yuyeras que les marchandes –, tantôt l’approvisionnement de plusieurs classes de plantes – ne seraient yuyeras que celles qui vendent des plantes fraîches, non séchées. Le film de candidature considère que les « yuyeros et médecins ñana vendent et partagent les connaissances traditionnelles sur les propriétés curatives du Pohã Ñana » et se distinguent de ceux qui se chargent de la collecte. Peut-on inclure ceux qui vendent des plantes entre autres produits ou cumulent les activités ? Rien n’est moins sûr, mais nous opterons malgré tout pour son utilisation tant pour les vendeurs que pour les cueilleurs. En tant que dérivé du terme yuyo dont nous avons souligné la polysémie, il a le mérite de signifier la pluralité des tâches accomplies par les vendeurs et/ou cueilleurs. La difficulté de saisir ce que fait une yuyera est plus significative que la distinction entre agriculteurs, transporteurs et vendeurs, opérée dans le film de candidature. Notre enquête a révélé une présence masculine non négligeable parmi celles et ceux qui se dédient à la collecte et la vente de yuyos. Cependant, afin de rendre compte de la mixité du métier sans éluder le fait que l’emploi du terme au quotidien est plutôt féminin, nous privilégierons l’emploi du féminin yuyera. Il désigne les marchands et cueilleurs de plantes médicinales localisés dans les rues ou des marchés auprès desquelles il est possible de se procurer des simples au quotidien. Les industries nationales et entreprises qui ne proposent que des remèdes secs seront peu évoquées au profit des remèdes frais qui seront l’objet de notre attention.
Défrichage bibliographique
7Les recherches sur les plantes médicinales ou simples au Paraguay et la zone linguistique guaranie mettent au premier plan leur aspect médicinal ou prophylactique. Nous les faisons remonter aux manuels de médecine jésuites, tels que la Materia Médica de Pedro de Montenegro, El Paraguay Natural de José Sánchez Labrador et le manuscrit anonyme en guarani jésuite communément appelé Pohã Ñana. D’un point de vue historique et focalisé sur la médecine dans les missions jésuites, la publication dirigée par Franz Obermeier à partir des actes du congrès qui s’est tenu à Kiel en août 2017 constitue une référence majeure. Parmi ces contributeurs, nous comptons notamment Eliane Deckmann Fleck.
8Les travaux d’Aimé Bonpland, botaniste et explorateur du xixe siècle, en collaboration avec Alexander von Humbolt, imprègnent ce champ d’étude. Capturé par les troupes du docteur Francia qui craignait qu’il mît en péril sa production de yerba mate, Bonpland a laissé pléthore de données botaniques sur la flore paraguayenne et des mémoires de sa période de captivité sur le sol paraguayen qui font de nos jours l’objet de commentaires. Le siècle suivant est marqué par le médecin Dionisio Gonzálo Torres, connu pour son Folklore del Paraguay et auteur de plusieurs publications, dont une sur la botanique coloniale. À sa suite, Pastor Arenas, ethnobotaniste et universitaire, spécialisé sur l’étude du Chaco, incarne aujourd’hui la figure phare de l’ethnobotanique dans le Rio de la Plata. Il a œuvré avec des membres du CONICET à des recherches sur l’utilisation des plantes selon les régions [Scarpa & Rosso, 2019], et à l’élaboration de rapports institutionnels, comme celui de l’Unesco présenté sous forme de manuel « de poche » de phytothérapie destiné à un large public [Cáceres & Machaín Singer, 2001]. L’article d’Elizabeth Finnis et de Heather Millman sur les yuyeros et les campesinos constitue l’une des rares sources de données quantitatives sur les vendeurs du Mercado 4 [Finnis & Millman, 2015]. Des entretiens auprès de yuyeras ont déjà été menés par l’Association ethnobotanique paraguayenne, des chercheurs de l’université nationale San Lorenzo et des chercheurs européens, comme Didier Roguet.
9Néanmoins, ceux-ci ne recèlent que de rares données exploitables pour analyser le métier et les travailleurs en tant que tels. À leurs études s’ajoute le programme de l’USAID de mai 2010 [Fretes, 2010]. Le manque de connaissance des vendeurs et cueilleurs est apparent dans chacun d’eux, légitimant l’approfondissement de ce sujet dans notre analyse.
10À l’échelle globale, dans des études en sciences humaines, les plantes sont traitées sous l’angle curatif et médicinal. L’articulation des médecines universitaires et populaires entre elles est un thème récurrent, analysé sous le prisme de l’acculturation [Aguirre Beltrán, 1992(1963)], des tensions entre tradition médicale et développement [Pordié, 2005] ou du pluralisme médical [Benoist, 1996]. Dans Medicina y Magia, Gonzalo Aguirre Beltrán évoquait déjà, sans y consacrer le cœur de son étude, la médecine universitaire qui reflétait la structure économique duale de la colonie, le mercantilisme capitaliste et l’économie de subsistance. Raymond Massé invitait, quant à lui, à la formulation de nouvelles problématiques et méthodologies pour l’anthropologie de la santé. En effet, « [l]a santé est de plus en plus emmêlée dans un complexe ensemble de politiques économiques, de relations internationales, de mobilité de populations, voire de nouveaux systèmes parallèles de santé que sont les ONG et les fondations privées internationales » [Massé, 2010, p. 2]. Dans son mémoire, Sarah Flanagan montre comment les perceptions des causes de la maladie, des risques et l’usage des services de santé ont été influencées par les changements de l’écologie locale et du climat sociopolitique. Malgré son approche médicale de l’usage des simples, elle met en lumière la gestion étatique des infrastructures sanitaires au Paraguay et le rapport des habitants au soin [Flanagan, 2012]. En somme, le champ de l’anthropologie de la santé est incontournable même si, dans ce livre, nous ne nous y inscrivons pas.
11Bien qu’il n’ait pas examiné la zone du Rio de la Plata dans son ouvrage La colonisation du savoir, qui propose une « histoire politique du pouvoir de transformation des plantes », Samir Boumediene renouvelle avec brio l’étude des médecines en prenant pour objet les plantes médicinales et montre que celles-ci, par leur aspect de « marchandise, de soin, de rite, de mode de gouvernement » offrent « un point de vue à travers lequel observer la totalité d’une évolution historique » [Boumediene, 2016, p. 27]. Sensibles aux enjeux prêtés par l’auteur aux plantes médicinales, nous souhaiterions insister sur la dimension marchande et circulatoire de celles-ci. Boumediene s’inscrit dans le mouvement de recherche sur le commerce des plantes dans lequel Hélène Blais et Rahul Markovits [2019, p. 8] préconisent un dialogue entre deux historiographies « qui tendent à s’ignorer » : l’histoire des savoirs botaniques et celle des échanges commerciaux. Le dossier qu’ils introduisent repose sur trois paris méthodologiques : une approche sur le temps long qui permet la convergence historiographique entre histoire moderne et histoire contemporaine, le croisement et la confrontation des approches d’histoire impériale et d’histoire globale et le questionnement de la régulation de ces trafics pour dessiner « les contours d’une sorte d’économie politique végétale à l’échelle globale » [ibid., p. 9].
12Prendre en compte l’aspect marchand du yuyo nous engage dans le domaine de l’anthropologie économique. Notre étude de terrain s’est en partie déroulée sur un marché et compte tenu de la polysémie du mot pleinement exploitée dans notre étude, nous nous inscrivons également dans le champ de l’anthropologie du marché. Si le marché correspond à l’état des sociétés au sein desquelles l’économie se trouve le moins « encastrée » dans la structure sociale [Robineau, 1994], il n’en demeure pas moins inscrit dans un monde institutionnel et où le politique occupe une place fondamentale. Florence Weber [2007, p. 7] nous rappelle la place des études anthropologiques sur le marché et les monnaies :
« [D]ès les années 1980, les ethnographes ont analysé non seulement les places de marché mais aussi les pratiques marchandes, en mettant l’accent sur le rôle normatif et cognitif du marché comme modèle, sur la rupture entre des transactions mises en série et le contexte interpersonnel dont elles sont abstraites, sur l’existence d’un marché sans monnaie. Parallèlement, ils ont rouvert le débat sur la nature de la monnaie, reprenant des questions traitées dès le début du xxe siècle et interrogeant à nouveaux frais la différence entre monnaies primitives et monnaie moderne, puis l’existence contemporaine de monnaies multiples. Les anthropologues ont rencontré dans ce domaine les travaux de l’histoire économique, familiarisée de longue date avec l’anthropologie, et les théories de la monnaie produites par l’économie institutionnelle et par la sociologie, sans toujours éviter l’opposition entre monnaies archaïques et monnaie moderne. »
13Laurent Bazin et Monique Selim critiquent la tendance trop descriptive des ethnographes de marché issue de leurs emprunts à la sociologie du travail. Cette tendance couperait les terrains de leur contexte, travers auquel s’ajoute celui d’instaurer la mondialisation comme objet d’analyse : les auteurs souhaitent un retour aux dimensions politiques et économiques de la globalisation dans les études ethnographiques [Bazin & Selim, 2002]. Nous entendons ces arguments et assumons d’avoir adopté une méthode proche de celle qu’ils critiquent. Le marché ne constitue qu’un pan de notre ethnographie et Alain Testart rappelle ses diverses acceptions. C’est d’abord un lieu institué et public. Ensuite, au sens de l’économie politique, il désigne le lieu de la rencontre de l’offre et la demande dans un cadre qui dépasse les cadres institutionnels classiques, jusque dans la finance [Testart, 2001, p. 722-723]. Nous traitons ici le marché avant tout en tant que lieu sur lequel il est possible d’observer des dynamiques de l’économie politique. L’étude du marché du yuyo selon l’acception de l’économie politique imprègnera notre réflexion même si notre étude n’a pas pour ambition d’en faire son cœur. De plus, « [l]’échange marchand déborde le marché de toute part » [ibid., p. 723] et la place de marché ne constitue qu’une étape du cheminement de notre étude. La marchandise est « un bien en suspens, en attente, entre deux possesseurs, le précédent qui ne la veut plus et le suivant qu’elle n’a pas encore trouvé » [ibid., p. 725]. Nous nous concentrerons sur la vente plutôt que sur l’achat, et ce d’autant plus que le verbe « vendre » ne va pas de soi dans le contexte paraguayen : il n’existe pas d’équivalent guarani au verbe vender et l’expression la plus communément employée est celle d’(a)vende. Mickaël Orantin donne une explication éclairante à ce sujet [Orantin, 2020].
14Notre étude porte sur les réseaux et les acteurs qui les constituent. Blais et Markovits [2019, p. 7] soulignent que « les effets de la circulation et du commerce des plantes sont aujourd’hui bien connus, les mécanismes de leur mise en œuvre, les pratiques de terrain et le rôle des divers acteurs dans ce commerce demeurent peu explorés ». Ils rappellent l’importance des réseaux informels dans l’échange des plantes lors de la colonisation, « quand les colons sont souvent bien plus actifs que les institutions » [ibid., p. 14]. Penser la circulation du yuyo comme marchandise ne peut faire l’économie de l’étude de la circulation de son possesseur avant qu’il ne le vende, au consommateur pour son tereré, d’autant plus qu’un mot lui est consacré : yuyera, yuyero. Les études en sciences sociales sur la santé et la médecine privilégient la figure d’administrateur de soin, intermédiaire nécessaire entre la plante et le corps souffrant, tandis que l’ethnobotanique se concentre sur les propriétés médicinales des plantes et leur utilisation. Le contexte de patrimonialisation qui exalte la figure de la yuyera en tant que détentrice et vecteur de savoirs sur la pharmacopée ancestrale occulte un pan considérable du rôle qu’elle remplit avant que le yuyo soit plongé dans l’eau du tereré : se procurer les plantes, les acheminer, s’assurer de leur vente.
15L’angle d’analyse choisi et cette tension sur le métier nous conduisent à la littérature scientifique sur le travail. La contribution du courant de la Global Labour History, dont « l’une des principales aspirations […] est d’inclure tous les groupes de travailleurs dans l’analyse historique » s’avère considérable et les études sur l’Amérique latine y jouent un rôle tout particulier.
« […] [D]es chercheurs d’Amérique latine et latino-américanistes ont débattu de l’idée qu’une production à vocation commerciale de biens d’exportation pour le marché mondial – des lingots aux cultures – peut être combinée avec toutes sortes de relations de travail sur place : de l’esclavage, de la corvée et d’autres formes de travail forcé au paiement de dettes, le partage des cultures et le travail salarié gratuit ; cette évaluation a en effet été au cœur des controverses animées sur la dépendance qui ont surgi dans les années 19606. » [Barrágan & Mayer, 2018, p. 83]
16La symbiose entre secteurs formel et informel, désormais théorisée par le think tank brésilien réunissant Cardoso et Oliveira [Munck, 2019], laisse penser que la notion de marginalité du travail est désuète. Cela reviendrait à nier sa permanence au niveau spatial et social. Cette symbiose n’améliore pas la condition du travailleur socialement stigmatisé, alors que le système mercantile s’appuie sur ses efforts. La question sociale et celle du travail sont indissociables et la précarité devient avec Anna Tsing « la pièce maîtresse que nous cherchions », pièce qui prend place dans une socialité plus qu’humaine. Elle est
« la condition dans laquelle on se trouve vulnérables aux autres. Chaque rencontre imprévue est l’occasion d’une transformation : nous n’avons jamais le contrôle, même pas de nous-mêmes. Pris dans l’impossibilité de nous fier à une structure communautaire stable, nous sommes projetés dans des agencements fluctuants qui nous refabriquent en même temps que les autres. Nous ne pouvons nous appuyer sur aucun statut quo : tout est toujours en mouvement, y compris notre capacité à survivre. Penser avec la précarité change l’analyse sociale. Un monde précaire est un monde sans téléologie. » [Lowenhaupt Tsing, 2017(2015), p. 56]
17Les travaux récents sur la vente en place de marché à proprement parler insistent sur l’agentivité des vendeurs qui s’approprient l’espace qu’ils investissent [Vega et al., 2019] et multiplient les stratégies d’apprentissage pour mener à bien leur commerce. Le sociologue français Pierre Deffontaines préconise une sociologie du travail marchand. Cette approche révèle les modes d’organisation et de structuration des marchés par l’analyse des pratiques, du travail de commercialisation, de la socialisation aux relations marchandes et des dispositions aux calculs économiques [Deffontaines, 2019, p. 48]. Il considère la trajectoire des vendeuses comme une véritable carrière construite « en-deçà des cadres institutionnels de la société salariale et sans certification scolaire » [ibid.]. Elle remet également en cause « la séparation entre la sphère productive du travail rémunéré extérieur et la sphère reproductive du travail domestique » : un nouveau regard est porté sur les vendeuses et leurs savoirs, considérés aussi naturels que leurs « responsabilités domestiques d’intendance et de production » [ibid.]. Les travaux de Deffontaines nous ont inspirés et éclairés pour envisager la situation sur notre propre terrain, ainsi que l’ouvrage Detrás de la línea de pobreza dans lequel les auteurs soulignent l’importance de prendre en compte tous les déplacements des individus en plus du travail et du lieu de vie [Filardo & Merklen, 2019]. C’est dans cet esprit que nous suivrons les yuyos et les yuyeras dans leur quotidien, si profondément mêlé au travail sans jamais le recouvrir totalement.
18À l’instar d’Anna Tsing qui suit la ligne de vie des champignons matsutake, nous suivons la ligne de vie des yuyeras qui font circuler les yuyos comme les yuyos font circuler les yuyeras de la terre au tereré. Les marginaux récoltant des champignons de manière artisanale sont peut-être les personnes les plus discrètes de ces travaux, constat qui nous conforte dans notre initiative d’encourager les travailleuses et travailleurs à nous introduire à ce qu’ils font.
19Le numéro d’EchoGeo « Nouvelles géographies de la cueillette » condense les problématiques soulevées par cette activité ainsi définie :
« Du latin colligere (collecter, cueillir, ramasser, recueillir, rassembler), le terme de “collecte” se veut ici une dénomination englobante, qui qualifie les processus de ramassage de matières valorisables, disponibles dans des environnements situés. Le produit de la collecte est donc une ressource, a priori renouvelable. Il ne s’agit pas d’un produit issu du travail opéré sur des matières premières : il est présent dans la nature ou dans l’environnement. C’est un produit que le cueilleur trouve, dont il connaît les lieux de concentration, dont il peut même faciliter la régénération, mais dans la collecte duquel intervient un facteur chance et une part d’incertitude. » [Dejouhanet & Bercegol, 2019, p. 2]
20Les deux volumes de l’ouvrage collectif dirigé par Francis Hallé, en partenariat avec Pierre Lieutaghi pour le second [Hallé, 2008 ; Hallé & Lieutaghi, 2008], offrent une approche pluridisciplinaire dans laquelle Claire Julliand relève les multiples enjeux de la cueillette et notamment celle de plantes sauvages. Elle traverse les époques comme les territoires et est traversée par des problématiques environnementales, sanitaires, économiques et juridiques. « Sous ses apparences anodines, dans la diversité de ses manifestations, [la cueillette] témoigne d’un rapport complexe et ancien au végétal, et de fait questionne notre relation à la nature : une relation ambigüe – entre adoration et prédation amnésique » [Julliand, 2008, p. 504]. Thierry Thénevin se consacre à la cueillette de plantes médicinales et souligne l’ambiguïté du métier de cueilleur-herboriste, ses liens avec l’agriculture du côté de la production et avec la santé du côté du grand public.
21Au vu de la tension de la mise en culture des plantes médicinales face aux pratiques de cueillette, les travaux d’Eric Vanhaute, historien du courant de la Global Labour History et spécialiste des mondes paysans et agricoles, rencontrent les enjeux de la cueillette. Se manifestent à cet endroit des liens palpables entre le travail et les relations entre l’humain et le monde du vivant. Dans son étude des friches, Rémi Beau invite à dépasser la dichotomie entre la figure du jardinier et du paysan dans une éthique de la nature ordinaire née d’une synthèse des courants de la philosophie de la nature. Il prône le « faire avec » et propose d’assumer la conflictualité entre « des intérêts humains distincts mais aussi entre ces derniers et des intérêts naturels, qui peuvent, eux-mêmes, diverger entre eux » [Beau, 2017, p. 319]. Il rejoint la pensée de l’anthropologue brésilien Eduardo Viveiros de Castro [2009] qui préconise le perspectivisme et le multinaturalisme. Son anthropologie comme anti-Narcisse, en écho avec l’anti-Œdipe de Deleuze, va contre l’amour du même. En prenant la métaphore du cannibalisme, il souhaite que l’anthropologie cherche à décrire les différences plutôt que les similitudes. Avec la domestication comme pierre angulaire, l’anthropologue étatsunien James C. Scott remet en question l’idée selon laquelle elle serait à sens unique, de l’homme au reste du vivant, et suggère qu’à travers la mise en culture et l’élevage, l’homme devenu sédentaire a été lui aussi domestiqué. Il opère la distinction entre les céréales et les légumes-racines ou les tubercules : son hypothèse est que les premières favorisent l’émergence de l’État, « [la] concentration de la population, [le] prélèvement fiscal, [l’]appropriation, [les] registres cadastraux, [le] stockage et le rationnement » [Scott, 2019(2017), p. 37].
22La méthode d’enquête – une ethnographie économique des échanges marchands et du travail forte d’un terrain multi-situé [Marcus, 1995] et inspirée par une littérature scientifique pluridisciplinaire et internationale – vise à soulever les enjeux de toutes les étapes de la circulation des plantes sans pour autant occulter le particularisme de chaque maillon que nous n’envisageons qu’au regard des autres. Cette étude de terrain inédite suit l’itinéraire des yuyeras et des yuyos lors de la vente, de leur passage par le lieu de résidence jusqu’au lieu d’extraction des plantes. Les champs d’études sont pluriels et regroupent le travail, le commerce, la santé et les savoirs, la famille, l’écologie, le foncier et l’agriculture. S’engager sur un tel itinéraire invite à des réflexions sur la reproduction de la vie, humaine et au-delà, et sur le concept de propriété.
« Jopara décrit des mélanges qui opposent des éléments sans qu’ils se diluent l’un dans l’autre. Ce sont des juxtapositions de couleurs sur la peau d’un serpent, une couverture ou un jeu de cartes. Elles peuvent être éphémères. Ce sont des unions d’éléments qui ne perdent pas leur identité respective mais qui contrastent, l’un en relation à l’autre. Ils se rassemblent sans se confondre. Les éléments ne restent pas identiques (idem) mais bien identifiables (ipse). L’avantage du guarani sur l’espagnol et le français est qu’il donne l’idée d’un processus mutuel de convergence sans confusion dans en un seul mot. » [Boidin, 2012, p. 22]
23Suite à une synthèse des débats autour du jopara et de sa richesse polysémique, Capucine Boidin en dresse un portrait qui inspire notre réflexion et auquel nous trouvons une complémentarité avec la pensée d’Anna Tsing sur la précarité et avec la conception d’un monde en rhizome pensé par Deleuze et Guattari. Le rhizome « n’est pas fait d’unités, mais de dimensions, ou plutôt de directions mouvantes. Il n’a pas de commencement ni de fin, mais toujours un milieu, par lequel il pousse et déborde » [Deleuze & Guattari, 1980, p. 31]. Comme le rhizome, il nous semble que nous gagnons à concevoir les yuyeras et les yuyos « toujours au milieu, entre les choses, inter-être, intermezzo » [ibid., p. 36]. Nous voyons dans la définition du rhizome proposée par Deleuze et Guattari une piste pour penser autrement et composer avec les deux courants de pensée principaux en anthropologie que sont l’anthropologie structurale et l’anthropologie sociale et historique.
En chemin vers l’enquête
24Suivant le yuyo du tereré à la terre, de main en main, pour mieux mettre en relief le quotidien et le travail de celles et ceux qui les vendent et les collectent, nous nous demanderons de quoi la figure paraguayenne de cueilleur-herboriste, la yuyera, est le nom. Nous partirons dans un premier chapitre du marché de San Lorenzo où nous rendrons compte des techniques et stratégies commerciales au sein de l’écosystème du marché dont nous analyserons les lois tacites. Dans l’acte de vente, les activités accomplies par les travailleurs se déclinent en des nuances allant du commerce au service à la personne. Nous ferons une étape au second chapitre dans la maison des yuyeras, une occasion de mettre en lumière l’imbrication des réseaux professionnels et familiaux, aux interstices desquels s’insèrent les yuyos. Enfin, nous partirons dans le troisième et dernier chapitre sur les lieux d’extraction des yuyos : il s’agira de penser les milieux à la lisière, où s’entremêlent et se précisent les enjeux liés à la propriété, les savoirs et la reproduction de la vie.
25Le matériau d’analyse principal est mon journal de terrain relatant les trois mois passés de mai à août 2019 dans les départements Central du Paraguay, d’abord auprès d’une famille chez qui j’ai vécu autour du Kilómetro 42 de la Ruta 2, au Barrio Portal de Asunción, puis me rendant tous les jours au marché de San Lorenzo auprès d’une famille de revendeurs.
26Sauf mention contraire, je suis à l’origine des traductions proposées et je tiens à souligner l’aide de Joaquín Ruíz Zubizaretta pour celles du guarani au français. J’ai pris le parti de conserver les phrases telles que je les ai entendues et de ne pas corriger les erreurs de grammaire ou de conjugaison commises. En revanche, je ne les ai pas reproduites systématiquement dans la traduction française.
Entrée sur le terrain au Barrio Portal de Asunción
27Après une promenade presque solitaire dans les rues de la capitale qui, je l’espérais, me permettrait d’atterrir tout à fait, je me rends au musée Andrés Barbero. On me suggère de me rendre aux Archives nationales le soir même pour rencontrer G. : il serait susceptible de m’aider à rencontrer une yuyera. Le lendemain, ce G. me conseille avec insistance de quitter l’auberge où je me trouve : le quartier serait une plaque tournante de la drogue avec la complicité de la police et un lieu de prostitution. Ses hôtes seraient prêts à m’accueillir le soir même et le temps qu’il faudra. Tout allait très vite, et ne connaissant pas bien la ville, je suivais ses conseils. Dans ce nouveau refuge, je rencontre Patricio. Il y travaille depuis 16 ans et m’assure tout de suite qu’il serait prêt à m’accueillir chez lui. Le lendemain dans l’après-midi, son employeuse l’appelle pour mettre les choses à plat, lui demander des précisions sur le lieu où je dormirais. C’était d’après elle plus rassurant pour Patricio qu’elle soit son interlocutrice. Il est convenu de lui rendre visite le lendemain pour rencontrer toute la famille et visiter les lieux avant de confirmer ma venue. Ce dimanche matin ensoleillé, nous prenons la route vers le Barrio Portal de Asunción. Une partie de la famille nous attend sous l’arbre, y compris la doyenne. L’employeur de Patricio boit son tereré à l’ombre sans faire passer la guampa. Il reste assis pendant que sa femme et moi commençons la visite de la maison de Luciana. Aux prises d’une sensation de voyeurisme, voire investie d’un rôle d’inspectrice qui devait évaluer la salubrité ou non des conditions de vie d’une famille que je ne connaissais pas, le malaise qui m’habitait depuis le début des négociations entreprises par l’employeuse de Patricio atteint son paroxysme. Satisfaite, elle complimente Luciana sur la tenue de sa maison qui lui répond que c’était un réel travail de la maintenir propre et agréable. Avant de les quitter et de nous bénir les uns les autres, Luciana m’assure qu’elle m’accueillera avec plaisir et qu’elle fera tout pour que je me sente bien avec sa famille.
28Le lendemain aux alentours de 15h, nous prenons le bus avec Patricio. À notre arrivée, la nuit est tombée. Après le dîner, les deux enfants de Mabel m’escortent jusqu’à leur maison et s’allongent auprès de moi dans ce lit qui prenait les trois quarts de l’espace disponible. « Tu vas te laver les dents à chaque fois ? », me demanda Thiago avant de s’endormir à ma droite, la tête au pied du lit.
Entrée sur le terrain à San Lorenzo
29Le temps de récupérer de mon séjour au bord de la Ruta 2, je profite de mon temps à la capitale pour me rendre aux conférences données à l’Alliance française dans le cadre de l’année des langues indigènes. Dans le patio m’apparut un visage familier. Lors de ma première soirée sur le sol paraguayen, après la conférence de G. aux Archives nationales, une jeune femme a pris part à la discussion et dit bien connaître le Mercado 4. Nous nous sommes reconnues et cette fois-ci, nous avons échangé nos coordonnées. Elle m’invite à la présentation d’un livre sur les plantes médicinales qui a lieu la semaine suivante. Lili est une jeune femme de 30 ans, divorcée et mère de deux enfants. Elle a repris ses études en histoire en parallèle de sa profession d’assistante dans un cabinet d’avocat de la capitale. Elle m’apprend que ses parents vendent des yuyos devant chez eux, à quelques minutes du marché de San Lorenzo, en même temps qu’ils tiennent une despensa7. Elle me propose de leur demander de m’accueillir quelques temps. J’accepte très enthousiaste : nous leur rendons visite le lendemain soir.
30Nous dînons avec ses deux jeunes fils pendant que mes potentiels hôtes, ses parents, regardent une émission dans leur chambre. Ils restent en retrait et Lili fait l’intermédiaire. Au menu, pastel mandi’o8, le mbejú9, et ce qui s’apparente à des steaks. « Elle restera jusqu’au mois d’août », affirme ma nouvelle tante (tía) Enriqueta, à qui il n’était désormais plus question de faire des infidélités ! J’emménageai donc le lendemain chez ma nouvelle famille d’accueil, à 15 minutes à pied du marché de San Lorenzo. Enriqueta a inventé une histoire pour éviter que tout le monde pose des questions en permanence sur qui j’étais et pourquoi je vivais chez eux : les voisins sont très cancaniers, « muuuuuy chismosos ». C’est ainsi que je devins leur nièce française éloignée.
315 h 30, nous partons pour le marché à pied avec Enriqueta. Une fois passées chez sa marchande de Pohã Ñana et à la boucherie, je rends visite à des amis revendeurs de María Asunción qui travaillent tout près et qu’elle m’a présentés. Ils se souviennent de moi et me disent que je peux rester un moment avec eux. Dès lors, je les rejoins presque tous les jours.
Tableau 1. Présentation des interlocuteurs et hôtes se dédiant au commerce des yuyos
Nom | Lieu de résidence connu | Bref parcours de vie centré sur le travail |
Juana | Ruta 2, Kilómetro 42 | 33 ans. Mariée, 2 enfants. Elle a été formée par sa belle-mère à la vente et collecte de plantes. |
Rosalía (Petrica) | Ruta 2, Kilómetro 42 | 24 ans. Mariée, 1 enfant. Après avoir commencé des études qui l’auraient menée au métier de caissière, elle a suivi sa mère dans la collecte et la vente de plantes |
María Asunción (Ña* Asu) | Près de la Ruta Pedrozo – Pirayu, qui croise la Ruta 2 | 55-60 ans. Mariée sur le terrain, veuve depuis fin novembre 2019. Mère de huit enfants. Sa belle-famille l’a formée à la vente et à la collecte de plantes médicinales. |
Feliciana | Ruta 2, Kilómetro 42 | Environ 30 ans. Sa belle-mère l’a formée à la vente et à la collecte de plantes médicinales. |
Rossana | Ruta 2, Kilómetro 42 | 41 ans. Mariée, 3 enfants, dont la première d’une autre union. Elle travaillait comme domestique à Asunción avant d’être formée par Juana à la collecte de plantes. |
Lorena | Ruta 2, Kilómetro 42 | 35-40 ans. Mariée, 7 enfants. Elle travaillait comme domestique à Asunción avant d’être formée par Juana à la collecte de plantes. |
Marie (Ña Marie) | San Lorenzo | 66 ans, elle est mariée depuis ses 16 ans et a eu quatre enfants. Ses deux filles sont respectivement professeure et psychologue, et ses deux garçons travaillent avec elle. Sa mère et sa grand-mère étaient yuyeras et travaillaient au Mercado 4 qu’elle « a plus fréquenté que sa maison à Fernando de la Mora ». Elle a commencé là-bas, mais est venue à San Lorenzo une fois mariée, parce qu’elle habite plus près. Voilà 4 ans qu’elle tient ce poste à l’angle des rues. Avant, elle était depuis plus de 30 ans dans le marché couvert qui a brûlé. Ses sœurs aussi sont dans les yuyos : l’une a son poste quelques mètres plus loin, ainsi qu’un cousin des garçons. |
Rodolfo (ou Rodi) | San Lorenzo | 38 ans. En couple, 3 enfants. Il lui manquait 3 points pour entrer à l’université nationale, il a alors commencé une formation privée en comptabilité, mais l’abandonna un an après pour des raisons financières. Un ami l’a recommandé pour un poste de douanier qui se libérait. Dégoûté de ce monde peu honnête selon ses dires, il a rejoint le commerce familial. |
Antonio | San Lorenzo | 40 ans. Marié, 2 enfants. Après le secondaire, il s’est formé comme mécanicien, un métier qui « permet de bien gagner sa vie ». Il s’est fait très mal au dos par accident et ne peut plus continuer d’exercer sa profession. Il aide désormais sa mère. |
Elisa | Encarnación | 62 ans. Elisa a commencé à travailler comme cuisinière à Buenos Aires. Elle cumulait les postes et passait une grande partie de son temps à travailler, un rythme impossible à suivre lorsqu’elle a eu des enfants (8). Elle est partie de chez elle parce que son premier mari la maltraitait. Celui-ci avait dépensé son héritage dans de l’alcool. Le métier de yuyera lui a permis à la fois de gérer sa vie familiale et de subvenir aux besoins de tous. Voilà maintenant 25 ans qu’elle s’est lancée. Certains de ses enfants ont fait des études d’ingénieur agronome, d’avocat, d’autres sont entrés dans l’armée. |
Lara | Encarnación | 41 ans. Lara a deux enfants. Mère célibataire très jeune, elle n’a pas fini son cursus dans l’enseignement secondaire. Elle vendait des empanadas jusqu’à ce qu’on lui propose de vendre des plantes médicinales. Elle rechignait au début, puis s’y est accommodée. Elle souhaite reprendre ses études pour faire un travail manuel comme la cuisine. |
Lucas | San Lorenzo | 80 ans. Marié, 4 enfants, dont une avec sa femme actuelle. Retraité de la compagnie nationale de téléphonie. Il tient la despensa accolée à sa maison à San Lorenzo. |
Enriqueta | San Lorenzo | 58 ans. Mariée, 3 enfants dont une avec son mari actuel. Elle a travaillé en Argentine et a vendu des bijoux ou de l’artisanat dans les rues d’Asunción avant de tenir la despensa accolée à sa maison à San Lorenzo. |
Notes de bas de page
1 Le maté, au contraire, est consommé avec de l’eau très chaude transvasée petit à petit d’une jarre ou d’un thermos dans la guampa, préalablement remplie aux trois quarts de yerba, à chaque fois que le buveur en aspire la totalité par sa bombilla.
2 Récipient en palo santo, calebasse, acier inoxydable ou corne de vache dans lequel est versé la yerba mate et les remèdes secs si l’on y verse de l’eau chaude.
3 Paille en acier inoxydable ou en argent, composée d’un filtre à son extrémité.
4 Un cerro est un genre de colline dont la pente peut être plus abrupte, une élévation de terrain isolée.
5 Synonyme de plantes médicinales à l’état brut, telles qu’on les trouve dans la nature.
6 Citation originale : « […] researchers from and about Latin America have debated the idea that a commercially oriented production of export goods for the world market –from bullion to crops– can be combined with all kinds of labour relations on the spot: from slavery, corvée, and other forms of coerced labour to debt peonage, share cropping,and free wage labour; this assessment was indeed a central issue in the heated controversies around dependency which arose in the1960s. »
7 Local de vente de quartier, proposant des produits majoritairement alimentaires.
8 Chausson de type empanada à base de manioc fourrée de viande hachée.
9 Galette à base de farine de manioc et/ou maïs, de matière grasse animale et de queso paraguayo.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
S'affirmer Lacandon, devenir patrimoine
Les guides mayas de Bonampak (Chiapas, Mexique)
Julie Liard
2010
Représentations de l'Europe et identité au Mexique
Le Juan Panadero, un journal de Guadalajara (1877-1910)
Guillemette Martin
2008
Le lien migratoire
Migrations clandestines de paysans guatémaltèques vers les États-Unis
Argán Aragón
2008
Les fils du tabac à Bogotá
Migrations indiennes et reconstructions identitaires
Luisa Fernanda Sánchez
2007
Trajectoires féminines et mobilisation d’exilées à Bogotá
Des destins déplacés aux futurs éclairés
Marjorie Gerbier-Aublanc
2013
L'Institut international de Coopération intellectuelle et le Brésil (1924-1946)
Le pari de la diplomatie culturelle
Juliette Dumont
2008
Démocratie et sexualité
Politisation de la pilule du lendemain dans le Chili de la Concertación (1990-2010)
Lila Le Trividi Harrache
2013
De la parole avant le discours
Communication pré et post-natale dans une « communidad campesina » d’Amazonie péruvienne
Émilie Massot
2007
Le transfert d'un modèle de démocratie participative
Paradiplomatie entre Porto Alegre et Saint-Denis
Osmany Porto De Oliveira
2010